Category: Politique belge

  • La Réduction collective du temps de travail s’invite dans la campagne électorale

    Le thème du climat jouera indéniablement un rôle de premier plan dans la campagne électorale, de même que celui du pouvoir d’achat. Mais la réduction collective du temps de travail (RCTT) rejoindra les thèmes majeurs du débat politique, puisque le PS, Ecolo, le PTB et Défi défendent ouvertement le principe.

    Par Pietro (Bruxelles)

    Il est déjà tout à fait possible aujourd’hui d’introduire une diminution du temps de travail à moins de 38 heures par semaine et d’instaurer une semaine de 4 jours, soit via une convention collective de travail (sectorielle ou au niveau de l’entreprise) ou via le règlement de travail. Une réduction des cotisations sociales est prévue pour les employeurs en guise de compensation. Mais il est bien plus intéressant pour les patrons de presser leurs travailleurs comme des citrons pour préserver et accroître les bénéfices.

    Le modèle défendu par Défi et Ecolo doit s’opérer ‘‘sur une base volontaire’’… comme aujourd’hui en somme! Ecolo précise toutefois qu’il faudrait une ‘‘embauche compensatoire de minimum 50 %’’ avec des ‘‘réductions de cotisations sociales d’un montant équivalent à l’allocation de chômage moyenne d’un demandeur d’emploi complet indemnisé’’. Le PS se prononce également en faveur de la RCTT à 32h avec accès par paliers négociés via la concertation sociale pour s’adapter aux besoins des secteurs. Avec réduction des cotisations sociales pour les patrons bien entendu. Le PS ne parle par contre pas d’embauche compensatoire obligatoire mais de contrôle des heures supplémentaires, ce qui pourra clairement être détourné par les patrons via une augmentation des cadences.

    Le PTB aussi se dit favorable à une telle revendication, en proposant le modèle de la semaine de 30h. Son modèle reste malheureusement dans le cadre du système, via l’implémentation par étapes, secteur par secteur, sans hélas nier la possibilité d’utiliser des subsides publics.

    Le débat se la RCTT repose donc sur la manière dont la collectivité aura elle-même à payer pour cette mesure! Accepter de diminuer les cotisations sociales des employeurs revient à s’en prendre à la partie socialisée de nos salaires qui sert au financement de la sécurité sociale. Si les prétendues ‘‘charges patronales’’ l’étaient réellement, elles seraient calculées sur les dividendes et les intérêts bancaires et non sur les salaires !

    La RCTT est une mesure d’urgence sociale qui s’impose contre le chômage et la trop grande charge de travail qui pèse sur les épaules des travailleurs. La dernière RCTT nationale date de 2003, où la semaine de travail est passée de 39 à 38 heures. Depuis, plus rien. Le PSL défend une RCTT à 30h semaine, sans perte de salaires, avec embauche compensatoire et sans augmentation des cadences. Nous défendons chaque pas concret correctement mis en avant : les partis qui se disent aujourd’hui favorables à la RCTT peuvent par exemple la mettre en pratique dans les services publics wallons et bruxellois après les élections de mai 2019.

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    [Socialisme 2019] “La victoire des travailleurs de Lidl et la lutte contre la pression au travail”, atelier de discussion ce samedi 30 mars, de 16h00 à 18h00, lors du week-end Socialisme 2019.

  • Le PSL a envoyé une lettre au PTB pour les prochaines élections

    Les élections du 26 mai prochain verront une progression importante du nombre d’élus du PTB dans les différents parlements. Pour le monde du travail, il s’agira d’un pas important en avant auquel le PSL souhaite contribuer. Nous avons donc écrit à la direction du PTB pour lui proposer notre collaboration.

    Par Bart Vandersteene

    “Tout d’abord, félicitations pour vos résultats aux élections communales d’octobre 2018. Le PTB a obtenu ses premiers sièges dans un certain nombre de villes centrales flamandes. Vous avez fait une véritable percée à Bruxelles et dans les principales villes wallonnes. Il s’agit d’un pas en avant important pour donner une traduction politique aux mouvements sociaux.

    ‘‘Vous savez que, dans la mesure de leurs possibilités, les sections et membres du PSL/LSP ont fait campagne pour obtenir le score le plus élevé possible en faveur des listes PTB/PVDA. A Keerbergen et à Saint-Gilles, nous avons participé à des listes plus larges d’opposition de gauche qui ont obtenu des scores respectables. Vous connaissez notre opinion : le score aurait pu être encore meilleur si le PTB/PVDA avait considéré comme étant sa tâche de réunir les différents mouvements de la gauche conséquente et les nombreux syndicalistes et activistes de gauche indépendants.

    ‘‘Le défi pour les prochaines élections législatives, aux niveaux européen, fédéral et régional, est encore plus grand. La crise du capitalisme et sa politique d’austérité ont provoqué beaucoup de colère et de résistance. Immédiatement après sa création, Michel 1er a été confronté à un mouvement de grève historique. Ce mouvement avait le potentiel de faire tomber le gouvernement et ses partis. Depuis, la résistance n’a jamais vraiment cessé, mais la question s’est posée de savoir quelle alternative s’offrait à nous en cas de chute de ce gouvernement. Le thème sécuritaire a été soulevé après les attentats de novembre 2015 en France et en particulier ceux du 22 mars 2016 en Belgique afin de détourner consciemment l’attention de la profonde crise sociale. La crise des réfugiés a également été utilisée par les partis de droite pour détourner toute l’attention politique des thèmes sociaux cruciaux. L’effet de tout cela peut être limité si le mouvement organisé des travailleurs parvient à mettre la lutte de classes à l’agenda au moyen de fortes mobilisations et de la défense d’un projet alternatif pour la société.

    ‘‘Les formes profondes d’exploitation, à travers la pression croissante au travail et la baisse du pouvoir d’achat, ont donné, ces dernières années, un nouvel oxygène à la résistance sociale. Il y a un siècle, le socialiste américain Eugène Debs disait : ‘‘Je m’oppose à un ordre social qui permet à un être humain de recueillir une fortune de millions de dollars en ne faisant rien d’utile, alors que des millions de femmes et d’hommes travaillent dur chaque jour et ont à peine assez pour mener une existence misérable.’’ Beaucoup de personnes se reconnaissent dans ces paroles, de plus en plus de gens y reconnaissent l’essence de notre système capitaliste.

    ‘‘De plus, les fantastiques mobilisations de la jeunesse expriment une grande colère face au refus des partis politiques classiques de s’en prendre à la racine du problème climatique.

    ‘‘La prochaine campagne électorale portera-t-elle sur le sécuritaire et les réfugiés, les graves manques de moyens de notre société étant placés dans ce contexte ? Ou bien alors l’attention sera-t-elle concentrée sur l’impact de l’accaparement des richesses mondiales par une infime couche d’ultra-riches ? La concentration de richesses sans précédent révèle les contradictions du système. Jamais auparavant l’humanité n’a eu une plus grande capacité à résoudre tous les problèmes cruciaux auxquels elle fait face. Jamais auparavant il n’a été aussi évident que cela n’était pas possible à cause du régime capitaliste de propriété privée des moyens de production, ce qui permet à une grande partie de la valeur produite de s’écouler vers l’élite capitaliste.

    ‘‘Une réponse de gauche claire et sans équivoque en faveur d’une alternative socialiste à cette folie peut frapper les esprits dans la lutte sociale et au moment des élections. Il existe de nombreux exemples internationaux qui ont récemment montré qu’une alternative combative et ambitieuse contre l’austérité peut compter sur un soutien large et enthousiaste.

    ‘‘En Belgique, la N-VA menace d’agiter le spectre communautaire, pendant et après les élections. Selon elle, le caractère ingouvernable du pays repose sur l’existence de deux réalités différentes. Les postiers wallons, les bagagistes bruxellois de Zaventem et le personnel flamand de Proximus, par exemple, ont cependant bien plus en commun ensemble qu’avec leurs mondes politiques traditionnels respectifs ou avec l’élite capitaliste qui parlent leur langue.

    ‘‘Nous sommes tout comme vous convaincus qu’un bon score pour le PTB en Wallonie et le PTB/PVDA à Bruxelles est tout à fait possible. Mais le potentiel est également croissant en Flandre en faveur d’une voix politique de gauche conséquente.

    ‘‘Le SP.a et le PS ont tous deux subi de sérieuses pertes ces dernières années, leur crédibilité est à juste titre remise en cause auprès des électeurs de gauche. Groen et Ecolo tentent d’en tirer profit en se présentant comme les nouveaux leaders de ce qu’ils considèrent comme la ‘gauche’’. Après les élections communales, ils ont montré une fois de plus qu’ils n’ont aucun problème avec la politique libérale classique. Sans tarder, ils sont entrés dans toutes sortes de coalitions locales avec le MR, l’Open VLD, le CDH ou la N-VA.

    ‘‘Nous devons nous engager dans l’important combat visant à assurer que le PVDA obtienne également de bons résultats en Flandre et que plusieurs députés arrivent aux parlements flamand et fédéral. De cette façon, nous pouvons répondre à ceux qui prétendent que les différences de score démontrent qu’il y a deux réalités différentes dans notre pays.

    ‘‘Le PSL/LSP s’est engagé à renforcer les résultats du PTB/PVDA, avec notre propre vision et un programme où nous défendons la nécessité d’une transformation socialiste de la société. Bon nombre de vos membres connaissent les nôtres en tant que syndicalistes et militants respectés. Souvent, ils se tiennent côte à côte dans la lutte. La meilleure manière pour nous de contribuer à votre campagne est de déposer des candidats du PSL/LSP qui peuvent offrir une réelle valeur ajoutée à vos listes et donner la meilleure motivation à nos membres pour travailler à l’obtention du meilleur résultat possible.

    ‘‘Aux dernières élections communales, nous vous avons tendu la main de façon similaire. Cela a cependant été refusé. Nous espérons que vous serez en mesure de réévaluer cette attitude et que vous considérerez cette lettre et la proposition que nous y faisons comme une contribution constructive à la lutte pour une alternative de gauche conséquente. Nous attendons votre réponse avec impatience.’’

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    30 & 31 mars. SOCIALISME 2019 : du ras-le-bol à la riposte !

    • Programme complet & informations pratiques
    • 16h – 18h : Parmi les ateliers de discussion : “PTB : Tirer les leçons de Zelzate, Molenbeek et Charleroi pour un gouvernement de la taxe des millionnaires”
    • 16h – 18h : Parmi les ateliers de discussion : Théorie : “Socialisme utopique et socialisme scientifique”
    • 19h – 20h30. Meeting “Stoppons l’austérité ! Vers un gouvernement de la taxe des millionnaires ?” Avec Stéphane Delcros membre du bureau executif du PSL, Ruth Coppinger députée irlandaise – Solidarity & Bart Vandersteene, porte-parole du PSL

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  • Le gouvernement wallon perd sa majorité… 12.000 manifestants envahissent Namur le même jour

    Ce lundi 18 mars, le gouvernement wallon perdait sa majorité en raison d’une défection du MR vers les listes Destexhe. Ce même-jour, nous étions pas moins de 12.000 (9500 selon la police) à arpenter les rues de Namur pour dénoncer la politique de gouvernement MR-CDH et tout particulièrement la réforme APE (Aides à la Promotion de l’Emploi, des subventions publiques prévues pour soutenir l’emploi dans le secteur non marchand, les pouvoirs locaux et l’enseignement).

    Cette réforme menace directement des milliers d’emplois et, à leur travers, des services aussi essentiels à la population que les crèches, les maisons de repos, les écoles, les centres et clubs sportifs, les hôpitaux, les bibliothèques, les communes et CPAS, les centres de jeunesse, les associations culturelles ou d’éducation permanente, les missions régionales pour l’emploi,… Diverses mobilisations syndicales avaient déjà témoigné de l’ampleur des inquiétudes et de la colère suscitées par cette réforme. Ce gouvernement est aujourd’hui en situation de faiblesse, il ne possède plus de majorité absolue : c’est d’autant plus nécessaire d’accentuer la pression !

    On peut bien sûr porter un regard critique sur la complexité du dispositif qui a été dénoncée à de multiples reprises par les fédérations d’employeurs du non-marchand ou par la fédération des CPAS de Wallonie. On peut déplorer que les budgets insuffisants mettent en concurrence les associations et les pouvoirs locaux pour l’obtention des précieux points APE. On peut surtout rester sceptique devant un dispositif qui condamne un trop grand nombre de travailleurs à un emploi précaire lié à l’attribution périodique d’une subvention par une autorité de tutelle.

    Il n’en reste pas moins que les travailleurs APE ce sont des travailleurs sociaux dans les CPAS, des puéricultrices dans les crèches, des animateurs dans les maisons de jeunes, les centres culturels ou sportifs, du personnel dans les écoles…en bref, ce sont des emplois qui comblent tous les jours des besoins sociaux essentiels. Mais il nous faut des investissements publics pour de bons services publics ainsi qu’un secteur associatif renforcé. Cet argent existe, il faut aller le chercher et permettre ainsi que les missions du secteur public et du non-marchand puissent être réellement délivrée, par un personnel disposant de bons emplois, avec des contrats de travail décent et non précaires.

    Quelle alternative contre la droite ?

    Dans le cortège, où se trouvait un grand nombre d’usagers aux côtés des travailleurs des divers services, on pouvait lire de nombreuses banderoles et une multitude de pancartes qui appelaient à se souvenir de cette attaque le 26 mai prochain à l’occasion des prochaines élections. La FGTB wallonne s’est prononcée depuis longtemps déjà en faveur d’une majorité progressiste PS-PTB-ECOLO au parlement wallon. Au lendemain des élections communales, la FGTB avait vivement fustigé les ‘‘alliances contre nature’’ PS-MR conclues bien vite au lendemain des élections, comme cela fut le cas à Verviers. La FGTB défend que la composition d’alliances PS-PTB-ECOLO est la seule manière d’opérer un virage à 180 degrés contre les politiques d’austérité de la droite.

    En mai prochain, nous pourrons voter en faveur d’un gouvernement de la ‘‘taxe des millionnaires’’, du moins si les syndicats réalisent que seul un appel de vote sans équivoque pour le PTB peut éviter une coalition de droite. En nous renvoyant de nouveau en direction du PS ou même d’ECOLO, beaucoup d’affiliés risquent de s’éloigner encore plus de leur syndicat. Il n’est du reste pas du tout exclu que ces partis préfèrent dépanner le MR au lieu de mettre sur pied un gouvernement de gauche qui pourrait reprendre les revendications syndicales pour en faire une réalité.

    Mais le PTB est aussi placé devant de grandes responsabilités. La concentration de richesses sans précédent révèle les contradictions du système. Jamais auparavant l’humanité n’a eu une plus grande capacité à résoudre tous les problèmes cruciaux auxquels elle fait face. Jamais auparavant il n’a été aussi évident que cela n’était pas possible à cause du régime capitaliste de propriété privée des moyens de production, ce qui permet à une grande partie de la valeur produite de s’écouler vers l’élite capitaliste. Une réponse de gauche claire et sans équivoque en faveur d’une alternative socialiste à cette folie peut frapper les esprits dans la lutte sociale et au moment des élections. Il existe de nombreux exemples internationaux qui ont récemment montré qu’une alternative combative et ambitieuse contre l’austérité peut compter sur un soutien large et enthousiaste.

    Le PTB doit saisir l’occasion de ces élections pour défendre une alternative politique claire, mais aussi pour préparer les travailleurs et leurs familles à la nécessaire lutte acharnée qui accompagnera le moindre pas en avant dans cette période de crise du capitalisme. Les élections seront à elles seules insuffisante pour garantir que nous irons chercher l’argent là où il se trouve pour satisfaire les besoins de tous, répondre au défi climatique et nous débarrasser du chaos capitaliste.

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    30 & 31 mars. SOCIALISME 2019 : du ras-le-bol à la riposte !

    • Programme complet & informations pratiques
    • 16h – 18h : Parmi les ateliers de discussion : “PTB : Tirer les leçons de Zelzate, Molenbeek et Charleroi pour un gouvernement de la taxe des millionnaires”
    • 19h – 20h30. Meeting “Stoppons l’austérité ! Vers un gouvernement de la taxe des millionnaires ?” Avec Stéphane Delcros membre du bureau executif du PSL, Ruth Coppinger députée irlandaise – Solidarity & Bart Vandersteene, porte-parole du PSL

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    Reportage-photos d’Emily

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    Reportage-photos de Nico

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  • Le mouvement climatique à un carrefour : qui sont nos alliés naturels ?

    Depuis la marche historique pour le climat du 2 décembre 2018 et, surtout, depuis le début des grèves scolaires pour le climat le 10 janvier 2019, un mouvement historique et inédit s’est développé dans notre pays. La Belgique s’est retrouvée en toute première ligne des mobilisations internationales pour le climat et l’environnement. Parmi les manifestants et leurs sympathisants, un consensus semble régner : celui de transformer la société pour qu’elle respecte notre planète mais aussi tous ses habitants, dont les plus vulnérables. ‘‘Pas de justice climatique sans justice sociale’’ a-t-on pu régulièrement entendre. La vague pour le climat a le potentiel de devenir un tsunami qui pourrait balayer ces pratiques par lesquelles la planète bleue est sacrifiée au profit du billet vert.

    Par Nicolas Croes

    L’unité la plus large possible… mais à quel prix ?

    Le 5 février, une campagne appelant à une politique climatique forte en Belgique a été lancée en grande pompe. En une semaine à peine, sa pétition ‘‘Sign for my future’’ avait déjà récolté 100.000 signatures. La coalition à la base du projet estimait à juste titre qu’il s’agissait d’un ‘‘signal fort qui démontre que cette thématique fait partie des préoccupations de la population’’. Après les dizaines de manifestations de la jeunesse et les grandes marches pour le climat du 2 décembre et du 27 janvier, c’était déjà évident.

    La coalition se targue d’être la plus vaste mise sur pied pour ‘‘faire pression sur les élus’’ en matière climatique. Elle réunit des collectifs (Bruxsel’air, Youth For Climate,…), des ONG (CNCD, WWF, Unicef, Médecins du Monde,…), des universités (UMons, UGent,…), des médias (Roularta, RTL, IPM,…), mais aussi la fédération patronale Agoria, la Chambre de commerce et d’industrie de Bruxelles et enfin des entreprises telles que BNP Paribas, KBC, ING, bpost, Colruyt, Ikea, Proximus ou encore Solvay.

    Disons-le clairement : l’opération vise à brouiller les pistes en masquant la responsabilité des grands pollueurs. Il est à déplorer que diverses ONG et collectifs se soient laissés ainsi prendre au piège ou, pire encore, soient convaincues que l’urgence climatique implique de trouver des compromis avec des banques qui investissent dans les énergies fossiles !

    Il n’y a pas si longtemps, début 2017, le CNCD 11.11.11 (coupole d’ONG et associations belges francophones et germanophones engagées dans la solidarité internationale) a publié un rapport sur les investissements dans vingt sociétés minières controversées, notamment des mines de charbon. De celui-ci ressortait que BNP Paribas, ING Bank et KBC Bank ont respectivement investi 448 millions, 399,5 millions et 111 millions d’euros dans les sociétés minières Glencore, Vale et BHP Billiton en 2017.(1)

    Les géants miniers Vale et BHP Billiton sont directement impliqués dans le ‘‘Fukushima brésilien’’ la pire catastrophe écologique du Brésil survenue en 2015. Une vingtaine de personnes y ont trouvé la mort, des déchets toxiques miniers ont parcouru 600 kilomètres à travers le Rio Doce et la population s’est retrouvée sans moyens de subsistance. Les recherches de la police fédérale ont montré que Samarco, l’entreprise responsable (une coentreprise des multinationales Vale et BHP Billiton) était consciente du risque du barrage et qu’elle en faisait trop peu pour éviter la catastrophe.

    Comment le CNCD – organisation qui a participé à la divulgation de ces faits – peut-il aujourd’hui accepter de se retrouver côte-à-côte avec de telles banques ?! Et à côté de Nathalie Guillaume, Corporate Affairs Director de la multinationale agroalimentaire Danone, multinationale qui a fait pression sur plusieurs États membres de l’Union européenne pour rejeter une proposition imposant des normes plus strictes pour les emballages en plastique ? De Solvay, membre du groupe de lobbying PlasticsEurope ? De JCDecaux et ses panneaux publicitaires digitaux énergivores ? D’EDF Luminus ? Sans surprise, ‘‘Sign for my future’’ soutient d’ailleurs le marché du carbone européen, un instrument qui permet aux entreprises les plus polluantes de continuer à émettre des gaz à effet de serre sans trop dépenser d’argent.

    En grève pour le climat !

    Si le CNCD avait dénoncé cette opération de greenwashing, il y a fort à parier que Youth for Climate ne se serait pas non plus retrouvé embarqué dans cette galère. Bien heureusement, cela n’a pas empêché Youth for Climate d’appeler les syndicats à rejoindre la grève mondiale pour le climat prévue pour le 15 mars. Au moment d’écrire ces lignes, le président de la CSC Marc Leemans avait déclaré : ‘‘Nous soutenons la mobilisation et appelons même à y participer. Mais nous n’introduirons pas de préavis de grève’’. Quant à la FGTB, elle soutient le mouvement mais laisse la décision aux centrales professionnelles. La Centrale Générale (qui compte plus de 430.000 membres) a déjà fait savoir qu’elle déposerait un préavis de grève. Nous espérons qu’une pression suffisante permettra au plus grand nombre de travailleurs de rejoindre la grève pour le climat.

    Le 20 février, 300 chercheurs de France et de Belgique ont appelé à participer à la grève climatique mondiale en dénonçant ‘‘les actuels détenteurs du pouvoir économique, ceux pour qui seul compte de vendre plus, quel que soit ce qui est vendu et ses conséquences ; ceux qui maintiennent des procédures biaisées d’évaluation du risque des pesticides et autres substances dangereuses ; ceux qui proposent des investissements juteux dans les produits fossiles’’ et ceux qui ‘‘signent des accords commerciaux multilatéraux assortis d’une justice féodale à la solde de géants industriels ; ceux qui orientent la colère des foules vers des cibles trompeuses ou secondaires.’’(2) Ils disent comprendre la radicalité des activistes ‘‘bien faible face à celle de ceux qui veulent nous faire survivre hors sol, ou nous promettent de nous conduire sur Mars, c’est-à-dire sur une planète morte, après avoir rendu la nôtre impropre à la vie !’’

    Comment parvenir au ‘‘grand basculement’’ ?

    Selon un sondage réalisé pour Le Soir, RTL-TVi, VTM et Het Laatste Nieuws par Ipsos, plus de huit personnes interrogées sur dix se disent ‘‘très inquiètes’’ ou ‘‘plutôt inquiètes’’ vis-à-vis du climat en Belgique. L’humanité fait face à un tournant crucial, peu nombreux sont ceux qui osent encore contester cela. Pour l’establishment, le capitalisme est le seul système de société qui fonctionne. La noblesse féodale et les esclavagistes avant elle prétendaient de même à leur époque concernant leurs systèmes. Chaque système fonctionne, sinon il n’existerait pas. Il répond toujours à un certain degré de développement de nos capacités productives. Dès qu’un système de société devient un frein au progrès scientifique et technique, il provoque le chaos plutôt que le progrès. C’est alors que le moteur de l’histoire se déclenche; la lutte des classes.

    La classe des travailleurs – tous ceux qui créent de la richesse en vendant leur force de travail contre un salaire et qui sont source de valeur ajoutée – représente aujourd’hui la majorité de la population mondiale. Selon l’Organisation internationale du travail (OIT), cela concerne pas moins de 3,4 milliards de personnes. Sans cette main-d’œuvre, les capitalistes ne peuvent pas faire de profits. Leur système ne fonctionne pas sans notre travail. Toute la richesse provient de notre travail et de la nature. Le capitalisme sape les deux sources de richesse, comme le disait déjà Marx en son temps.

    C’est cette réalité qui éclate au grand jour dans une grève, par le blocage de l’économie. Il n’existe pas de moyen plus puissant pour affronter le capitalisme et poser la question d’une réelle démocratie, c’est-à-dire un système où ceux qui produisent les richesses décideraient de la manière de les produire et de les utiliser ensuite. Bien entendu, une grève, même générale, d’une seule journée sera insuffisante pour délivrer un changement véritable. Mais l’appel pour le 15 mars constitue un pas audacieux sur la voie à suivre pour construire un puissant mouvement capable de renverser l’économie capitaliste pour instaurer une véritable transition écologique grâce à la planification démocratique de l’économie et à l’appropriation collective des secteurs d’activité stratégiques. C’est ce que nous appelons le socialisme.

    (1) https://bankwijzer.be/fr/actualit%C3%A9s/2018/investissements-dans-les-sci%C3%A9t%C3%A9s-mini%C3%A8res-controvers%C3%A9es/
    (2) https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/20/nous-scientifiques-ferons-aussi-la-greve-scolaire-du-15-mars_5425917_3232.html

  • Vottem, 20 ans… Il faut en finir avec ce camp de la honte !

    10 mars : luttons pour la régularisation de tous les sans-papiers !

    14h, place Saint Lambert

    Depuis 20 ans, le centre fermé pour étrangers de Vottem (près de Liège) constitue pour beaucoup le symbole hideux de la politique raciste de l’Etat envers les personnes migrantes. Depuis 20 ans, des activistes de tout le pays battent chaque année le pavé pour réclamer la disparition du centre et de tous ceux du même genre à l’appel du CRACPE (Collectif de Résistance aux Centres pour Etrangers). Le rendez-vous de cette année sera d’autant plus crucial, pour essayer de relancer une mobilisation plus large pour la régularisation de tous les sans-papiers et pour discuter des stratégies pertinentes pour poser les prochains pas.

    Par Simon (Liège)

    Nos gouvernements successifs imposent aux personnes sans-papiers des conditions de vie inhumaines : traques policières, aucune existence légale et donc aucun droit ni possibilité de se construire un avenir. Les conditions de détention dans les centres fermés sont aussi scandaleuses : mauvais traitements, manque d’accès aux soins de base qui provoquent maladies, troubles psychologiques et suicides. Ces éléments seuls sont déjà des raisons suffisantes de s’indigner contre l’existence des centres fermés et le refus des autorités d’organiser un accueil digne et une régularisation massive des sans-papiers.

    Alors que personne ne quitte son pays natal par plaisir et que les démographes et les économistes sérieux ont démontré que l’immigration rapporte plus à nos économies que ce qu’elle ne coûte, les politiciens traditionnels et leurs relais médiatiques continuent inlassablement à prétendre le contraire et à présenter l’immigration comme un problème, un fardeau, voire un danger. Faire des immigrés la cause de tous nos problèmes constitue un moyen facile de nous détourner des vrais coupables bien de chez nous : ceux qui organisent méthodiquement la casse sociale et le chômage de masse.

    Ces discours xénophobes et le maintien dans la clandestinité d’une grande quantité d’immigré permet également d’offrir une main d’œuvre docile et bon marché à des patrons sans scrupules. Ceci permet de faire pression à la baisse sur les salaires des travailleurs légaux. La classe dominante a intérêt à diviser ceux qu’elle opprime. Elle a raison de vouloir nous diviser : la force des travailleurs, c’est son nombre. Divisés, nous ne sommes rien, réunis nous sommes tout. Et garantir qu’aucune catégorie de travailleurs ne soit laissée seule face à ses problèmes spécifiques, c’est renforcer les combats de toute notre classe.

    En 1998, à la suite de la mort de Semira Adamu, c’est la mobilisation de masse qui avait poussé le ministre de l’intérieur Louis Tobback à suspendre les expulsions de sans-papiers puis à démissionner. Ces dernières années, le mouvement a été confronté à une répression accrue et a été acculé à une attitude défensive. L’an dernier, après la mort de la petite Mawda, les responsables politiques de ce drame n’ont pas dû rendre de comptes, en l’absence de mouvement de protestation significatif. Mais ce potentiel des mobilisations de masse à engranger des victoires, fussent-elles partielles, n’a pas disparu. En témoigne la mobilisation extraordinaire de la jeunesse sur le climat, qui a poussé à la démission la ministre flamande de l’environnement Joke Schauvliege.

    L’atmosphère change actuellement dans la société : les jeunes activistes climatiques et les Gilets Jaunes ont encouragé les syndicats à mobiliser pour une journée de grève le 13 février dernier. Le mouvement des sans-papiers pourrait profiter de cette atmosphère combative pour ouvrir un front supplémentaire et solidariser de nouvelles couches avec ses revendications.

    En février, une nouvelle plateforme s’est mise sur pieds à Liège : le Front antifasciste 2.0, avec une première assemblée de plus de 200 personnes. Le fait que la FGTB y ait pris une place centrale est une bonne nouvelle. Un des défis du mouvement sera de réussir à attirer davantage de syndicalistes et d’intégrer les méthodes syndicales dans la lutte contre le racisme. C’est avec ces méthodes, avec des assemblées ouvertes et en essayant systématiquement d’élargir la mobilisation que les bases pourront être posées pour une lutte d’ampleur qui pourrait imposer la fermeture des centres, une régularisation massive et une politique d’asile basée sur la solidarité. Ça commence le 10 mars : tous à Vottem !

  • Le mouvement de masse pour le climat conduit à la démission d’une ministre

    Manifestation du 27 janvier. Photo : Liesbeth.

    Il est possible de pousser des ministres vers la porte grâce à des mobilisations soutenues. C’est ce qu’a illustré le mouvement des jeunes pour le climat. Après deux mois de manifestations, la ministre flamande de l’environnement Joke Schauvliege (CD&V) a dû démissionner. Elle était allée trop loin en indiquant que les marches pour le climat étaient le fruit d’un complot. Ses précédents faux pas avaient encore pu être camouflés, mais il est bien plus difficile de procéder de la sorte à l’occasion d’un mouvement de masse.

    Par Kenzo (Gand)

    Depuis le 2 décembre, la lutte contre le changement climatique est sur le devant de la scène. La première manifestation de masse du 2 décembre a été historique : des dizaines de milliers de personnes sont passées par Bruxelles. Mais la ministre fédérale de l’environnement Marie-Christine Marghem (MR) a s’est moquée des inquiétudes sur le climat par un “njet” au sommet sur le climat de Katowice. Après les examens puis les vacances de Noël, les mobilisations des étudiants du secondaire ont commencé : d’abord 3.500, puis 15.000 et ensuite 35.000 élèves ont ainsi manifesté à Bruxelles. Le dimanche 27 janvier, une nouvelle manifestation nationale a eu lieu et a réuni jusqu’à 100.000 personnes. La semaine dernière, 15.000 étudiants ont encore manifesté à Bruxelles, autant à Liège et 3.000 à Louvain, entre autres. Des étudiants du supérieur étaient déjà présents aux mobilisations mais, le 14 février, ils y participeront pour la première fois en masse.

    Joke Schauvliege (CD&V) est la ministre flamande de l’Environnement, de la Nature et de la Culture depuis 2009. A partir de 2014, l’Agriculture et l’Aménagement du Territoire lui ont été ajoutés. Elle était auparavant faite connue pour des déclarations bizarres telles que : “Un arbre a toujours eu la fonction d’être abattu” ou encore : “En tant que ministre de la Culture, vous n’avez pas besoin d’être un expert culturel.’’ Mais tout a systématiquement été couvert, elle obtenait après tout pas mal de voix et est tout de même vice-présidente du CD&V. Mais la mobilisation de masse a rendu sa position intenable. En raison de la politique menée et de ses réactions maladroites face aux protestations de la jeunesse, les critiques se sont faites plus nombreuses et plus caustiques. ‘‘What a joke (quelle blague)’’, pouvait-on ainsi lire sur les pancartes d’élèves présents aux marches pour le climat.

    Les rires ont accueillis ses déclarations selon lesquelles elle se sentait poussée dans le dos pour poursuivre sa politique grâce aux mobilisations de jeunes. Sa proposition visant à augmenter les taxes sur les vols était une tentative évidente de faire porter la responsabilité du problème sur des couches plus larges et sur la jeunesse. La fédération patronale FEB a immédiatement pris le train en marche en réclamant l’abolition de l’indexation des salaires avec l’idée que les mesures pour le climat entrent automatiquement en conflit avec le pouvoir d’achat ! L’appel à la gratuité et des transports publics et à leur extension n’a bien entendu pas été repris par la ministre ou les patrons. Enfin, elle a voulu apaiser les protestations avec des séances d’information des élèves des 5e et 6e années sur la politique climatique et les mérites de cette politique. Les applaudissements n’ont pas été nombreux.

    La récupération ayant échoué, elle a essayé de criminaliser la mobilisation en prétendant qu’il s’agissait d’une conspiration du lobby écolo. Selon elle, cette conspiration aurait même été confirmée par la sûreté d’État ! D’où provenait le complot ? Selon elle, il s’agissait d’une vengeance suite aux manifestations agricoles qui avaient conduit à la démission de Vera Dua (ministre flamande Agalev, aujourd’hui Groen) en 2003. Certains manifestants n’étaient même pas nés ! Ces déclarations bizarres ont été suivies d’excuses : Schauvliege a dû reconnaître que la sûreté de l’Etat n’avait rien signalé. Elle n’aurait rien pu faire d’autre : la sûreté d’État a elle-même réfuté les allégations. Quelques heures plus tard, l’inévitable démission a suivi. Schauvliege était devenue un obstacle trop important pour toute tentative de récupération moins visible, par exemple via des groupes de réflexion financés par de grandes entreprises mais avec la participation d’organisations écologistes. Sa démission est un coup dur pour le gouvernement flamand qui, jusqu’à présent, a toujours été relativement stable.

    Cette démission est une première victoire du mouvement, même si la bataille ne fait encore que commencer. Il ne s’agit pas d’une victoire concrète contre le changement climatique, mais d’une indication que la lutte porte ses fruits. Il est temps maintenant de passer à la vitesse supérieure ! L’appel à une grève internationale écolière le 15 mars pourrait jouer un rôle crucial à cet égard. Surtout si les syndicats profitent de la dynamique des jeunes pour se joindre à eux et déclencher une grève de toute la société pour le climat. C’est la meilleure réponse aux politiciens et aux patrons qui opposent climat et pouvoir d’achat pour éviter d’être placés face à leurs responsabilités.

    Cette démission renforcera la confiance du mouvement. L’establishment espère éloigner la discussion de la rue le plus tôt possible, il espère que les mobilisations deviendront moins fortes et que toutes sortes d’experts, financés ou non par de grandes entreprises, mettront la main sur le débat. Le lobbying en faveur d’une loi sur le climat pourra alors être opposé aux mobilisations de la rue. Le mouvement doit en être conscient et s’organiser pour préparer les étapes suivantes avec un plan d’action crescendo et des discussions sur des revendications qui feront vraiment la différence. Les syndicats peuvent jouer un rôle majeur à cet égard en s’ouvrant aux jeunes et, par exemple, en aidant à défendre de manière offensive la revendication de transports publics gratuits et plus nombreux. Il s’agit d’une revendication qui allie pouvoir d’achat, meilleure mobilité et air de qualité.

    La protestation contagieuse de la jeunesse montre que des actions déterminées qui ne sont pas apaisées par des promesses tièdes peuvent changer l’ordre du jour politique. Alors que la crise gouvernementale de décembre a attiré toute l’attention sur la migration et que la N-VA était déjà prête à y ajouter le confédéralisme, le débat public porte aujourd’hui sur le climat. Nous pouvons y ajouter le pouvoir d’achat : la grève nationale du 13 février offre cette opportunité. Nous serons plus forts en associant pouvoir d’achat et climat, en alliant l’enthousiasme des jeunes et la puissance économique du mouvement des travailleurs.

  • Le SP .a dépanne De Wever à Anvers

    Il y a six ans, pour la première fois en 80 ans, la ville d’Anvers s’est retrouvée avec un conseil communal de droite dure. Le bilan du collège échevinal est impressionnant : extension du système absurde des Sanctions administratives communales (SAC), taxe sur le permis d’exploitation des night shops, démantèlement policier d’un piquet de grève au port, réduction du budget de l’enseignement communal, offensive contre le travail social, etc. La liste pourrait prendre quelques pages. Selon la N-VA elle-même, cependant, sa plus grande réussite était d’avoir mis un terme à 80 années de gestion socialiste. L’événement aura duré 6 ans.

    Le pire résultat de tous les temps pour la social-démocratie

    La campagne anversoise du sp.a fut rude. Les scandales ont suivi les uns après les autres, emportant notamment son dirigeant Tom Meeuws. Le cartel conclu avec Groen a ensuite explosé. Initialement candidate indépendante, Jinnih Beels a tenté de sauver ce qui pouvait l’être en rejoignant le sp.a et devenant tête de liste. Pour pas grand-chose au final. Les sociaux-démocrates ont obtenu leur pire score aux élections communales à Anvers depuis l’introduction du suffrage universel : 11%.

    Les 80 années de gestion de la ville n’ont pas laissé grand-chose au sp.a. Le parti a tellement été impliqué au pouvoir qu’il n’était pas difficile de trouver des cadavres à sortir du placard pour lui nuire. Le bourgmestre Bart De Wever a soudainement estimé que cela n’était plus un problème. Après avoir crié haut et fort ‘‘plus jamais les socialistes’’, la N-VA est entrée en coalition avec le sp.a. Pour le sp.a, l’humiliation est encore plus grande, il en est réduit à la fonction de feuille de vigne semi-progressiste pour la même politique néolibérale.

    Les piètres résultats des anciens partenaires de coalition (CD&V et Open VLD) ont obligé De Wever à en chercher d’autres : Tom Meeuws et Jinnih Beels. Pour disposer d’une majorité plus confortable et réduire encore plus le poids du sp.a, De Wever a également emmené les libéraux avec lui. Le résultat est un accord de majorité autour de la politique de la N-VA que les Anversois ont subi ces six dernières années.

    Le sp.a auxiliaire de De Wever

    Jinnih Beels a promis d’ajouter (ou de rénover) 5.000 logements sociaux. C’est trop peu et trop tard : il manque des logements pour au moins 20.000 personnes à Anvers. Sans parler des possibilités de se dérober… L’accord mentionne que les éventuels nouveaux logements sociaux sont conditionnés au ‘‘maintien du système de financement flamand’’. Chaque point ‘‘remporté’’ par le sp.a laisse une bonne marge de manoeuvre à la N-VA. Il est évident qu’au sp.a, la participation au pouvoir était de loin plus importante que la victoire.

    Il en va de même pour la mobilité : le coeur sans voiture de la ville sera étendu ‘‘là où c’est possible’’. Un bel espace laissé à l’interprétation ! On ne parle d’efforts véritables que dans le centre historique de la ville (datant du XVIe siècle) qui, tout au long de l’accord, est invariablement appelé ‘‘le coeur commercial’’ ! Le message est clair : l’espace sans voiture n’est considéré que là où cela aidera à attirer les touristes. Quant aux habitants : leur patrimoine culturel a été officiellement déclaré centre commercial.

    Quant à la discrimination, le sp.a ne peut pas se vanter de grand-chose. Quelques balises ont été inscrites dans l’accord, sans toutefois être contraignantes, tandis que l’interdiction du port du voile dans la fonction publique est maintenue. Il est vrai que c’est un conseil communal dirigé par le sp.a qui a introduit la mesure en son temps. Le sp.a avait changé d’avis durant la campagne électorale, mais la chose est oubliée aujourd’hui.

    Une peau qui n’a pas été chèrement vendue…

    Le point fort de l’accord de majorité concerne le domaine de prédilection de la N-VA : la sécurité. Une rhétorique martiale que l’on connait bien à Anvers promet l’installation de nouvelles caméras dans les rues et sur les uniformes de la police, l’augmentation du nombre de patrouilles policières et l’introduction de ‘‘stewards’’. L’objectif est de monter d’un cran dans la ‘‘guerre contre la drogue’’.

    L’accord de majorité intègre-t-il des mesures sociales ? Pas vraiment. La réduction collective du temps de travail ? Plus de personnel communal ? Plus de moyens pour l’enseignement communal ? Une meilleure considération du travail social ? L’accord de majorité co-rédigé par le sp.a décevra nombre de ses électeurs.

    En juin dernier, Tom Meeuws était présent au rassemblement syndical aux portes du procès du président de la FGTB anversoise Bruno Verlaeckt et du militant Tom Devoght. Ce procès s’est tenu après qu’un piquet de grève au port d’Anvers ait été refoulé par la police envoyée par le bourgmestre De Wever. Verlaeckt et Devoght étaient poursuivis pour ‘‘entrave méchante à la circulation’’. L’accord de majorité n’exclut pas de telles actions répressives, que du contraire : il comporte l’ambition de ‘‘continuer à garantir l’accessibilité du port autant que possible en bonne concertation sociale’’ !

    Le sp.a n’a pas gagné grand-chose au-delà des postes. En octobre dernier, nous avons appelé à voter en faveur du PTB. Nous avons souligné l’importance de disposer d’une riposte de gauche qui s’oppose au bourgmestre en paroles mais aussi, et surtout, en actes, par la lutte sociale. La base de notre approche est que la gestion de la ville doit reposer sur les besoins de la population et non sur ce qui est ‘‘disponible’’.

     

     

  • L’extrême droite à l’offensive – organisons la riposte antifasciste !

    Le ‘‘Marche contre Marrakech’’ a dominé l’espace médiatique toute une semaine durant, mais cela n’a pas empêché l’extrême droite de se plaindre du manque d’attention. Avec plusieurs milliers de participants, cette marche s’est révélée bien plus petite qu’à peu près n’importe quelle mobilisation syndicale sérieuse. Mais il s’agissait tout de même de la plus grande action d’extrême droite à Bruxelles depuis des décennies. Theo Francken peut se féliciter. La police a parlé de 5.500 manifestants et de 1.000 contre-manifestants. La marche de la haine de l’extrême droite s’est terminée par des émeutes et des arrestations.

    L’instabilité politique laisse un espace à l’extrême droite. Le positionnement de la N-VA contre les réfugiés s’est systématiquement durci ces dernières années, au point que les campagnes en ligne du parti semblaient provenir du bureau du dirigeant du Vlaams Belang Filip Dewinter. L’opposition de la N-VA à ce pacte migratoire non contraignant et particulièrement vague a placé le thème de la migration au cœur du débat. La N-VA a délibérément agi de la sorte : cela permet d’éviter d’aborder la politique antisociale dont elle est le plus grand artisan. Cette politique entraîne un mécontentement croissant contre la hausse des prix et à la baisse du pouvoir d’achat. La N-VA cherche à dévier l’attention et l’extrême droite en profite.

    La mobilisation de l’extrême droite pour cette Marche contre Marrakech est la plus importante depuis des années. Contrairement à ce qu’elle affirme, la N-VA n’a manifestement pas coupé l’herbe sous le pied de l’extrême droite, bien au contraire ! La marche a été organisée par Schild & Vrienden, ce qui n’est pas un problème pour le Vlaams Belang : ces néo-nazis sont les bienvenus au VB. Au VB, le néonazisme de Driss Van Langenhove et sa bande qui a été révélée au grand jour dans un reportage de la VRT en septembre dernier est soit considéré comme un ‘‘péché de jeunesse’’, soit comme une manipulation médiatique. L’extrême droite a utilisé l’opposition de la N-VA au Pacte migratoire pour se replacer au premier plan, ce qui a également mis une certaine pression sur la N-VA. Théo Francken a ouvertement soutenu la mobilisation tandis que la N-VA essayait de garder une certaine distance. Un représentant local de la N-VA a pris la parole, mais les dirigeants sont restés loin du cortège : y participer compliquerait toute future participation gouvernementale. Le soutien de Francken à la manifestation démontre, s’il le fallait encore, que l’opposition de la N-VA au fascisme défendu par Schild & Vrienden n’est pas une ligne rouge.

    La politique qui vise à faire des réfugiés des boucs émissaires peut bénéficier d’un certain écho dans ce contexte de pénuries sociales croissantes et de mécontentement généralisé parmi les travailleurs et leurs familles. Cela peut se constater sur nos lieux de travail : même des partisans de l’action syndicale parlent parfois de Francken avec sympathie. Il faut dire que nous sommes quotidiennement confrontés au discours de Francken, qui repose sur un message très simple : la régression sociale s’expliquerait parce que les réfugiés viennent se servir dans les caisses de la collectivité. En réalité, il n’y a jamais eu autant de richesses qu’aujourd’hui, mais elles sont concentrées dans les mains d’une infime minorité. Si nous devons travailler plus longtemps alors que nos conditions de vie se dégradent, c’est parce que les néolibéraux servent les intérêts des ultra-riches. Notre pouvoir d’achat n’est pas sapé par les réfugiés, mais par les grands actionnaires et leurs marionnettes politiques (y compris celles de la N-VA).

    En Hongrie, modèle de politique par excellence pour l’extrême droite, des mobilisations se déroulent actuellement contre la “loi de l’esclavage” qui impose aux travailleurs des conditions de travail misérables. Cette nouvelle loi fait passer de 250 à 400 le nombre d’heures supplémentaires auxquelles peuvent recourir les employeurs chaque année. Elle allonge aussi à trois ans le délai de paiement de ces heures, contre un an maximum actuellement. Cette mesure antisociale n’est pas une conséquence de l’arrivée de réfugiés, la Hongrie n’en admet aucun. C’est le résultat de la politique néolibérale également défendues par l’extrême droite. Les Gilets Jaunes se mobilisent précisément con tre ce genre de logique.

    De nombreux syndicalistes étaient présents à la mobilisation antifasciste, ce qui représente un élément très positif. Le mouvement ouvrier est le seul qui puisse s’en prendre au terreau sur lequel prolifère l’extrême droite. La mobilisation d’environ 2.000 antifascistes en si peu de temps terme est une bonne chose, mais nous étions moins nombreux que l’extrême droite. Les traditions de résistance contre le Vlaams Belang en Flandre ont été mises sous pression ces dernières années. Notre campagne antifasciste flamande Blokbuster a régulièrement été seule pour organiser des manifestations antifascistes combatives. Pour la manifestation antifasciste du 16 décembre, diverses complications ont joué : les examens pour les jeunes et la mobilisation des syndicalistes pour la journée d’action du 14 décembre. D’autres mobilisations seront nécessaires : l’extrême droite a pris confiance en elle-même et elle continuera sur cette voie, avec de probables violences contre les opposants et les syndicalistes. La marche de l’extrême droite à Bruxelles s’est d’ailleurs terminée par des troubles et des violences.

    L’année dernière, il n’était pas certain que les étudiants d’extrême droite du NSV tenteraient encore de manifester dans une ville étudiante flamande. Grâce au soutien de Schild & Vrienden, ce fut finalement le cas à Gand. Il est probable que les étudiants d’extrême droite tenteront de maintenir l’alliance conclue dimanche dernier. Il est donc possible qu’une manifestation du NSV se déroule à Louvain en mars prochain. N’attendons pas pour lancer une campagne de mobilisation dès maintenant !

    Nous devrons organiser sérieusement la résistance antifasciste. La meilleure façon d’y parvenir est de s’y prendre dès maintenant : les milieux syndicaux doivent débattre de la manière de contribuer aux mobilisations et d’organiser la jeunesse. Le racisme et tout ce qui nous divise affaiblissent notre position dans la lutte contre la politique d’austérité. Nous ne devons pas fuir cette discussion, nous devons y apporter des réponses. Ce n’est pas notre solidarité, mais leurs politiques néolibérales qui conduisent à la misère et à la guerre dans le monde entier, de sorte que des gens ne voient d’autre choix que de fuir. Des tracts et des réunions de formation peuvent renforcer la position des syndicalistes dans les discussions sur le racisme et poser les bases d’une mobilisation conséquente contre l’extrême droite.

    La meilleure réponse à l’extrême droite est une lutte offensive du mouvement ouvrier pour de meilleures conditions de vie et un plan d’investissements publics massifs dans les infrastructures et les services publics. En même temps, nous devons consciemment organiser nos forces : le renforcement de l’extrême droite est un obstacle dans notre lutte pour une alternative à la misère et à l’inégalité du capitalisme.

    Une grande marche de la solidarité soutenue par les syndicats serait un bon pas en avant en préparation d’actions futures. Une telle manifestation serait aussi l’occasion de défendre des revendications telles que de meilleurs emplois, des salaires plus élevés, plus de services publics,…. Des revendications telles qu’un salaire minimum de 14 euros de l’heure, la restauration complète de l’index, une augmentation des salaires, une pension de 1.500 euros par mois minimum, la réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires,… permettront de convaincre de nombreux collègues et connaissances parfois ouverts à la propagande de la droite et de l’extrême droite.

    Photos de Liesbeth :

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  • Retour sur l’échec des majorités progressistes en Wallonie et à Bruxelles

    Dirk De Block, tête de liste du PTB à Molenbeek. Photo : Jean-Marie

    Malgré l’importante campagne de la FGTB wallonne pour des ‘‘alliances de gauche partout où c’est possible’’, les négociations pour des majorités communales entre le PS et le PTB ont échoués. Le syndicat s’est opposé aux alliances PS-MR en défendant des ‘‘majorités progressistes’’ PS-PTB-ECOLO pour opérer un virage à 180 degrés face aux politiques d’austérité des gouvernements de droite.

    Par Boris (Bruxelles)

    La mascarade du PS à Liège et Charleroi

    Willy Demeyer, le bourgmestre PS de Liège s’est allié au MR et a mis fin aux discussions avec le PTB en déclarant: ‘‘le PTB n’a pas été en mesure de démontrer ni la faisabilité ni le financement de ses propositions. Ses solutions étant le recours à l’endettement, la taxation massive et l’insurrection vis-à-vis des autres niveaux de pouvoir.’’ Même argument épouvantail pour Paul Magnette : le programme du PTB coûterait 2000€ de taxes supplémentaires pour chaque carolo. Pendant ce temps, de vraies négociations étaient en cours en parallèle avec ECOLO.

    A Liège et à Charleroi, le PS a manœuvré pour se débarrasser du PTB. Les négociations ne visaient pas à conclure un accord mais à démontrer d’une part la prétendue incapacité du PTB ‘‘à prendre ses responsabilités’’ en montant dans une majorité et d’autre part que le programme du PTB serait ‘‘impayable’’. Cette campagne orchestrée par le PS visait à présenter tout vote favorable au PTB comme un vote gaspillé dans la perspective des élections de mai prochain. Chaque avancée sociale proposée par le PTB – même limitée – était considérée comme excessive. Dans les faits, le PS à fait le boulot de la droite en défendant le credo de cette dernière face à l’austérité : TINA ‘‘There is no Alternative’’.

    Et à Molenbeek ?

    En était-il de même à Molenbeek là où, contrairement à ailleurs, le PTB était indispensable pour mettre le MR dans l’opposition ? Après coup, chaque parti dénonce le manque de sincérité de celui d’en face. Il est toutefois permis d’en douter. Le PTB a finalement retiré la prise des négociations à la suite du départ d’ECOLO, principalement en raison de la répartition des postes d’échevins. C’est une erreur. La base de la discussion aurait dû être le programme. Catherine Moureaux (PS) affirme qu’elle n’avait encore refusé aucune proposition de la note de négociation présentée par le PTB.

    Ce qui est certain, c’est que personne ne peut reprocher au PTB d’être allé négocier avec une note trop audacieuse. Il s’agissait d’un programme de 5,3 millions d’euros de dépenses et de recettes supplémentaires: 1000 logements sociaux supplémentaires en 6 ans (alors que 17.000 ménages figurent sur la liste d’attente du Logement Molenbeekois), un kit de rentrée scolaire gratuit, la gratuité des garderies rendues payantes par la majorité précédente MR-cdH-ECOLO, l’embauche de 20 instituteurs supplémentaires et un chèque sport et culture pour les adolescents.

    L’équilibre budgétaire serait atteint d’une part par la limitation des salaires des échevins à 6.000€ bruts et par la suppression d’un poste d’échevin et, d’autre part, par une augmentation de toute une série de taxes, pas pour chaque Molenbekois bien entendu, mais sur les surfaces de bureaux, les antennes GSM, la publicité, les caisses enregistreuses des supermarchés, les logements vides, les terrains non battis ou encore les parkings des grandes surfaces et des entreprises.

    Éviter le piège des négociations en coulisses

    Le PTB aurait pu organiser des assemblées en y invitant les habitants et le personnel de Molenbeek pour y discuter de ce que signifie un programme d’urgence sociale dans la commune. L’approche aurait été idéale pour éviter de se laisser engluer dans un agenda de négociations secrètes et, de cette manière, préparer au mieux une mobilisation active et la construction d’un rapport de forces autour de ce programme d’urgence sociale.

    A Bruxelles, le front commun syndical a élaboré un plan d’action pour le personnel des communes, des CPAS et des hôpitaux publics. Ils revendiquent entre autres une campagne de nomination du personnel, une augmentation des salaires de 10% et la réduction du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires. Tous les futurs conseils communaux seront interpellés à ce sujet. Officiellement, le PS se déclare favorable à la semaine de 4 jours et au salaire minimum de 14€ de l’heure. Le 8 novembre dernier, lorsque la manifestation du front commun syndical est passée devant les locaux du PS, Laurette Onkelinx est d’ailleurs sortie affirmer son soutien aux revendications syndicales.

    N’aurait-il pas été utile d’aborder à la table de négociation quelle serait l’attitude d’une majorité progressiste face aux revendications syndicales ? Dans le cas où le PS aurait accepté, cela aurait illustré à quel point le PTB peut faire une différence. Ces mesures auraient encore été insuffisantes, mais quel enthousiasme cela aurait suscité dans le mouvement des travailleurs à 6 mois des élections de mai ! Dans le cas où le PS aurait refusé, cela aurait prodigieusement exposé ce parti comme étant celui des promesses creuses.

    Une fronde des villes et des communes

    Ces dernières décennies, un désinvestissement inédit a frappé nos communes et les autorités des autres niveaux. Le manque de moyens sévit partout : dans le logement social, les crèches, les écoles,… Molenbeek a tout particulièrement souffert de la mise sous tutelle financière de la commune par la Région, qui a imposé une politique d’austérité drastique. Parmi le personnel communal, aucun départ (en pension ou autre) ne pouvait être remplacé. Le comportement de la Région bruxelloise envers les Molenbeekois est le miroir de celui de l’Union européenne envers le peuple grec.

    Il nous faut un réinvestissement public, et un majeur ! Cela exige d’en finir avec le transfert des moyens publics vers les entreprises et les riches. Les moyens fiscaux des communes sont limités. Il faut briser les carcans budgétaires volontairement limités et construire un front de communes rebelles contre les pouvoirs subsidiaires. C’est de cette manière que nous avons tracé un chemin pour le programme de lutte défendu par Gauches Communes tout au long de sa campagne électorale dans la commune bruxelloise de Saint-Gilles. Cette approche manquait à la campagne du PTB ; la population n’a pas été préparée à l’offensive de critiques qui a suivi les résultats.

    A Charleroi, on retrouvait dans la note du PTB toute une série de taxes comparables à celles présentées pour Molenbeek, mais adaptées au tissu industriel carolo. On y trouvait également – et c’est une bonne chose – des éléments de rupture avec les trajectoires budgétaires imposées aux communes par les régions et le fédéral. Il y était question du fait que l’éventuelle majorité progressiste prenne la tête d’une fronde des villes et des communes pour une augmentation de 15% des subventions de la Région wallonne aux fonds des communes.

    C’est un excellent élément à saisir pour une désobéissance organisée des majorités de gauche et la construction d’un rapport de forces contre les carcans budgétaires. Il n’a malheureusement pas été question de cette ‘‘insurrection vis-à-vis des autres niveaux de pouvoir’’ dans les négociations à Molenbeek et Zelzate. Etait-ce parce que, dans ces deux cas, les négociations avaient des chances d’aboutir ? La gauche ne doit pas restreindre son action à quelques mesures bienvenues mais limitées. Elle doit représenter un véritable changement.

    La droite et le patronat se félicitent de l’échec des majorités progressistes. Leur campagne de calomnie qui amalgame gauche et désastre économique est lancée. En mai, nous pourrons voter pour un gouvernement de la ‘‘taxe des millionnaires’’. Son instauration provoquera la fureur des capitalistes ainsi qu’une campagne de sabotage sous forme d’une fuite des capitaux. Nous précisons d’emblée qu’y faire face exige un programme socialiste comprenant le non-paiement de la dette publique, la nationalisation du secteur financier et le recours à l’arme de la nationalisation face à la réaction patronale.

  • La N-VA hors du gouvernement, partons maintenant à l’offensive contre toute la politique d’austérité !

    Tous les partis gouvernementaux ont perdu des plumes lors des récentes élections locales, à la suite de quoi les tensions ont atteint un tel point qu’une discussion sur un pacte migratoire non contraignant a mis un terme au gouvernement Michel 1. Si l’agonie a duré quelques jours, c’est en raison de ce mauvais théâtre qui a vu les partis de l’orange-bleue et la N-VA tenter de se rejeter l’un sur l’autre la responsabilité de la chute du gouvernement.

    Ces derniers jours, dans les médias, tout portait à croire que le mécontentement social n’était qu’un fait divers. Il s’agit pourtant d’un élément essentiel derrière les déboires électoraux subis par les partis gouvernementaux le 14 octobre. La marche historique pour le climat du dimanche 2 décembre, les “Gilets Jaunes” manifestant à 2000 à Bruxelles sans réelle organisation en opposition à la hausse des prix et des taxes, la colère face au dossier des pensions et à la baisse du pouvoir d’achat,… Tout cela semblait soudain sans conséquence. Mais c’est bien ce qui vit parmi de larges couches de la population.

    Comme le faisait remarquer Marc Reynebeau dans le quotidien flamand De Standaard : “Alors que le gouvernement fédéral s’enlise dans une discussion identitaire symbolique, (…) il y a encore des gens qui ont de vrais problèmes. Ils sortent maintenant dans la rue en gilets jaunes.” Pour les partis établis, cependant, ces thèmes n’ont suscité aucune crise gouvernementale. Si une campagne électorale se déroule autour de ceux-ci, elle serait à n’en pas douter synonyme de déroute. La politique d’asile et l’identité représentent donc un écran de fumée bien utile.

    Avec le départ de la N-VA prend fin le gouvernement Michel 1. Il fait place à un gouvernement minoritaire orange-bleu qui est clairement un gouvernement en affaires courantes instable et non plus le dur gouvernement thatchérien qui, une fois au pouvoir, a directement lancé une attaque brutale contre les pensions, les salaires, les allocations sociales, les services publics,… Les patrons se sont déjà plaints ces derniers jours car ils espéraient encore recevoir de nouveaux cadeaux avant les élections de mai 2019. La politique de Saint-Nicolas pour les grandes entreprises se poursuivra sans doute mais, avec un gouvernement instable, les choses pourront être plus difficile. Soyons clairs : la N-VA n’est pas la seule responsable de la politique d’austérité dure que nous avons subie ces dernières années. Ce n’est pas parce que la N-VA n’est pas au gouvernement que cette politique prend fin. Au niveau flamand, la coalition suédoise reste d’ailleurs en place.

    La campagne électorale de mai 2019 est lancée. Nous verrons peut-être le retour des images et slogans de campagne anti-migration de la N-VA dont Filip Dewinter (Vlaams Belang) peut se prétendre l’auteur en souriant. Le Vlaams Belang espère profiter de la campagne anti-migration de la N-VA, son président Van Grieken en est tellement euphorique qu’il ne trouve même plus le temps de tenter de récupérer les Gilets Jaunes. Les autres partis traditionnels – décrits par De Wever comme la “coalition de Marrakech” – ont réagi avec indignation à la campagne dégoûtante de la N-VA, mais ils sont pour le reste essentiellement en accord avec la politique de Francken. Dans plusieurs interviews, Vande Lanotte, leader du SP.a, a déclaré que son parti n’avait pas de problème fondamental avec la politique de Francken, juste avec sa communication polarisante.

    L’establishment politique rencontre des difficultés dans toute l’Europe et au-delà. Le mouvement des Gilets Jaunes en France continue de gagner du soutien. En France, la répression brutale – qui voit des milliers de personnes arrêtées tandis que des lycéens sont traités comme des prisonniers de guerre – renforce les voix qui appellent à la démission de Macron. Moins de 20% de la population soutient encore le président français! Dans notre pays, la situation est potentiellement similaire. Toutes les actions syndicales qui ont été sérieusement organisées ces dernières années ont été couronnées de succès, tout comme la marche pour le climat et les actions des Gilets Jaunes ces dernières semaines. Ces actions expriment un sentiment général : on en a marre !

    Toute la question est de savoir comment nous pouvons utiliser ce sentiment pour parvenir à un réel changement. Macron a dû reporter d’au moins un an l’augmentation prévue de la taxe sur le carburant : une lutte acharnée se révèle payante ! Mais la protestation ne concerne plus seulement le prix du carburant : le “ras-le-bol” est général. Traduisons ce sentiment en revendications concrètes pour améliorer la vie de la majorité de la population : une augmentation des salaires pour augmenter le pouvoir d’achat, la récupération de l’ensemble de l’indexation des salaires et des allocations sociales, l’augmentation du salaire minimum à 14 euros de l’heure, une pension de 1500 euros par mois minimum, une semaine de travail plus courte sans perte de salaire et avec embauches compensatoires, un plan massif d’investissements publics dans les infrastructures et les services publics, une plus forte imposition des grandes fortunes et des grandes entreprises. Aujourd’hui, nous payons plus de taxes que les héritiers du milliardaire Albert Frère pour leur succession !

    Nous devons discuter collectivement de ces revendications et, à partir d’elles, organiser des actions offensives vers une grève générale qui paralysera l’ensemble de l’économie. Les syndicats doivent jouer un rôle central à cet égard, mais les dirigeants doivent cesser de se disputer entre eux, essentiellement sur le fait qu’ils ne veulent pas agir, qui plus est !

    Organiser des actions déterminées, cela ne renforce pas la droite, bien au contraire ! Cela attire l’attention sur les thèmes qui réunissent la majorité de la population tout en veillant à ce que le débat public ne soit pas dominé par la droite. Même s’il ne faut pas s’attendre à de nouvelles attaques majeures de la part de ce gouvernement instable, rien ne sera fait pour améliorer le sort de nos pensions, de notre pouvoir d’achat, de la charge de travail ou de nos services publics. Une demi-journée d’action comme celle du 14 décembre – sans mot d’ordre clair, sans parler de son organisation – est bien en deçà de ce qui est nécessaire.

    Le gouvernement a été affaibli et, par conséquent, les patrons qui utilisent systématiquement leurs marionnettes politiques ont également été affaiblis. C’est un moment à saisir. Se reposer dans une attitude attentiste serait une erreur qui signifiait simplement de laisser l’adversaire récupérer des forces. Si les partis au pouvoir parviennent à limiter le débat électoral à leur manière de voir le thème de la migration, alors nous aurons à nouveau une politique anti-sociale très dure après mai 2019.

    Les actions offensives visant à augmenter les salaires et la protection sociale sont le meilleur moyen de répondre au mécontentement général, exprimé notamment par les Gilets Jaunes. Avec des assemblées générales pour débattre des revendications et des actions à mener, il serait possible de tisser des liens entre les militants et de renforcer la résistance contre la politique antisociale. Un mouvement social puissant est de nature à imposer une nouvelle réalité politique.

    Si cela ne se traduit pas par des représentants politiques qui font partie du mouvement et font tout ce qui est en leur pouvoir pour unir et organiser l’opposition à la politique d’austérité, alors cela pourra se refléter de manière déformée aux élections. La politique de boucs émissaires jouera alors un rôle plus important. Certains lorgneront vers l’extrême droite ou, au mieux, seulement vers une vague verte. En réalité, c’est l’ensemble de l’establishment politique et l’ensemble du système qui sont rejetés.

    Cette situation ouvre la voie à la recherche d’une alternative reposant sur le droit à une vie décente pour la majorité de la population au lieu de cette spirale infernale qui ne profite qu’à une élite d’ultra-riches. Cela signifie de lutter contre le capitalisme pour le remplacer par un autre système, un système qui selon nous ne peut être que le socialisme, un système où la majorité de la population disposerait du contrôle et de la gestion démocratiques des moyens de production, pour décider quoi produire et de quelle manière afin de répondre aux besoins de chacun.

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