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  • Déclaration publique : Graves défaillances dans la protection des personnes et la culture interne du PSL/LSP

    Avertissement relatif au contenu : mauvaise gestion d’un cas de sauvegarde et violence de genre

    Ceci est une déclaration de prise de responsabilité publique publiée par PSL/LSP en réponse à une crise de sauvegarde apparue en 2024, qui a conduit à l’exclusion d’un ancien membre dirigeant de l’organisation. Nous la publions parce que nous pensons qu’aucune organisation révolutionnaire ne peut être construite sur base de dissimulations, de préjudices non traités et de vérités cachées. Nous ne publions pas les détails des allégations ou des témoignages, par souci de confidentialité et de sécurité. 

    Nous voulons publiquement reconnaître et affronter les échecs et le mal qui a été causé. C’est pourquoi nous présentons nos excuses, sans réserve, à toutes les personnes lésées par les manquements de notre organisation – non seulement parce qu’elles ont été victimes de violences sexistes de la part de notre ancien membre, mais aussi en raison de la manière dont elles ont été traitées. Cela a causé du tort à celleux qui auraient dû pouvoir compter sur la sécurité, la solidarité et la prise de responsabilité.

    Cette crise a révélé des lacunes fondamentales dans notre politique et notre fonctionnement – dans notre pratique du féminisme socialiste, notre culture de direction, la conscience de la protection des personnes et la prise de responsabilité politique. Nous reconnaissons que ces défauts proviennent d’erreurs fondamentales dans l’analyse de base de la tradition du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) et d’Alternative Socialiste Internationale (ASI) dont nous faisions partie. C’est pourquoi, depuis le début de cette crise, une majorité de camarades s’est battue pour engager un processus de transformation politique approfondi.

    Tracer une ligne dans le sable

    En octobre 2024, le LSP/PSL a décidé de quitter ASI, s’opposant à la mauvaise gestion inacceptable d’un cas de sauvegarde impliquant une majorité des dirigeants d’ASI. Cette rupture résulte de notre analyse selon laquelle cette grave erreur de gestion résulte de méthodes politiques erronées, en contradiction avec ce qui est cruellement nécessaire dans la lutte contre le capitalisme et les oppressions qui lui sont inhérentes. Nous nous y opposons car, pour nous, la sauvegarde des personnes et le féminisme socialiste sont des responsabilités politiques essentielles, et non des préoccupations secondaires.

    Peu de temps après, il est devenu clair pour un plus grand nombre de camarades que notre propre organisation n’était pas exempte de défaillances similaires. Les allégations formulées dans le passé contre un membre dirigeant, n’avaient pas été traitées sérieusement par notre direction collective élue depuis de nombreuses années. Ces dernières années, de nouvelles allégations ont émergé contre ce membre. À la suite de l’enquête ouverte lorsque ces faits ont été révélés, il a été exclu. 

    Certains des faits révélés dans les nouvelles allégations étaient connus – ou partiellement connus – depuis des années, mais n’ont jamais donné lieu à des mesures de protection appropriées. Cela montre que les défaillances sont systémiques plutôt qu’une série d’incidents isolés. Cette longue inaction des dirigeant.e.s a donc entraîné une répétition pourtant évitable de comportements préjudiciables.

    Au milieu de ces allégations, un panel international et indépendant a été constitué. La tâche de ce comité était d’examiner le cas spécifique. Pourtant, ses conclusions étaient sans équivoque : la manière dont cette organisation n’a pas réagi – structurellement et politiquement – ​​a causé du tort. Il ne s’agit pas d’un cas isolé. Cela illustre des problèmes de protection des personnes et de culture interne plus importants. Même lorsque les membres agissaient avec de bonnes intentions, le résultat n’a pas abouti aux mesures nécessaires. Les conclusions de ce panel ont été pleinement acceptées par une majorité du Congrès national du PSL/LSP. 

    Nous tenons à remercier celleux qui se sont exprimé·es. Leur intervention courageuse a été essentielle pour ouvrir un espace de parole aux autres et, finalement, pour démarrer un processus de transformation. Nous nous engageons à bâtir une organisation dans laquelle personne ne se sent intimidé·e lorsqu’iel souhaite prendre la parole et dans laquelle faire part de ses préoccupations n’est pas seulement accepté, mais activement soutenu. Dans la formation d’un parti révolutionnaire, l’attention portée aux autres et le sens des responsabilités doivent être au cœur du projet, sans condition.

    Un processus de transformation

    Comme évoqué, en réponse à cette crise, un processus de transformation a été mis en place au sein du PSL/LSP. Ce processus consiste à revoir en profondeur notre approche et nos méthodes politiques passées.

    Rosa Luxembourg disait que « Le marxisme est une vision révolutionnaire du monde qui doit appeler à lutter sans cesse pour acquérir des connaissances nouvelles, qui n’abhorre rien tant que les formes figées et définitives et qui éprouve sa force vivante dans le cliquetis des armes de l’autocritique et sous les coups de tonnerre de l’histoire. » Ce principe est plus que jamais d’actualité pour nous et nous souhaitons nous engager pleinement dans cet esprit. Notre processus de révision et de transformation n’est pas seulement intellectuel, mais également structurel et vivant. 

    Voici quelques-unes des mesures concrètes que nous avons prises jusqu’à présent : 

    • Une enquête indépendante a été lancée et achevée, en collaboration avec un panel international.
    • Sur la base des conclusions du comité, nous avons reconnu que la personne mise en cause posait un problème de sécurité, elle a donc été exclue de l’organisation, avec des conditions préalables claires à une éventuelle réadmission, notamment le fait que l’organisation prendra une décision à ce sujet toujours en consultation avec les victimes et que nous respecterons leur point de vue.
    • Les dirigeant·es actuel·les et ancien.ne.s ont assumé la responsabilité des échecs et se sont retiré·es de certaines responsabilités.
    • De nouvelles structures de direction temporaires ont été mises en place pour garantir la responsabilité de la direction. Ces structures de direction ont pour mandat de diriger le processus de transformation pendant la période actuelle du congrès. Un engagement a été pris pour centrer la pratique féministe socialiste dans tous les aspects de notre travail, pas seulement dans notre programme. Nous voulons nous engager à approfondir notre compréhension des dynamiques de la violence basée sur le genre, y compris les dynamiques qui ont joué un rôle ici, comme par exemple la dissonance cognitive. 
    • Une révision de notre approche politique générale, de notre approche spécifique des oppressions, de notre politique de sauvegarde, de notre culture politique et de nos structures de direction est en cours. Nous nous engageons à poursuivre cette transformation de manière transparente et collective. Nous préparerons d’autres documents et matériaux de réflexion à partager avec les membres et sympathisant·es, comme l’illustre par exemple la déclaration sur la Palestine. 

    Nous exprimons notre solidarité à toutes les personnes qui ont été touchées, en particulier à celles qui ont tenté de s’exprimer plus tôt et n’ont pas été entendues. Rien ne peut défaire ce qui a été fait, ni les paroles ni les actes. Nous prenons au sérieux le changement et voulons nous engager à créer un espace plus sûr.

    Nous faisons partie d’un mouvement qui vise à mettre fin à toutes les formes d’exploitation et d’oppression. Ce travail doit commencer dans nos propres rangs. Bien trop souvent, les organisations du mouvement ouvrier ont commis de graves erreurs au cours des luttes contre les oppressions. Pour autant, il n’y a pas d’avenir révolutionnaire sans attention, sans justice et sans prise de responsabilité.

    Publié par le PSL/LSP

    avril 2025

  • Déclaration publique du PSL/LSP sur la question de la libération nationale de la Palestine

    Déclaration publique du PSL/LSP basée sur une résolution adoptée par le Congrès national

    L’élection de Trump à la tête de la première puissance impérialiste mondiale a exacerbé les velléités coloniales de la bourgeoisie israélienne d’extrême droite qui contrôle actuellement l’Etat. Composée de juif·ves orthodoxes, de partisans mizrahis et de colons, cette coalition tire son pouvoir politique de l’expansion continuelle des colonies illégales, avec comme ambition ultime “Eretz Israël”, ou le grand Israël. Ce projet colonial et raciste a pour objectif assumé d’en finir une fois pour toutes avec le peuple palestinien. Les politiques génocidaires ne sont cependant pas le monopole de la droite ou de l’extrême droite israélienne, mais bel et bien de l’ensemble du spectre politique israélien. Le soi-disant “camp de la paix”, qui prétend désirer la fin du conflit, reste fermement attaché aux structures coloniales, et s’oppose radicalement au droit au retour des Palestinien·nes. Une fois que l’on gratte le vernis pacifiste de cette “gauche” sioniste, on y trouve toujours la même violence coloniale.

    Aujourd’hui, après la rupture de l’accord de cessez-le-feu par l’Etat sioniste, Gaza fait de nouveau l’objet d’un siège meurtrier. L’Etat Israélien contrôle les deux tiers de la bande de Gaza, et bloque l’entrée de toutes les ressources nécessaires à la survie humaine. Les événements dramatiques qui se sont déroulés depuis le 7 octobre 2023, et l’accélération du processus génocidaire au coeur du projet sioniste, ont remis à l’avant plan la question palestinienne, ainsi que les thèmes de l’impérialisme, de la colonisation, et de la libération nationale. Toute organisation révolutionnaire, quand elle est confrontée à un tel bouleversement historique, doit nécessairement passer en revue son analyse. Le PSL/LSP est entré dans un processus de révision de son programme sur les questions coloniales, et plus particulièrement sur la question palestinienne. Ce processus est toujours en cours, mais nous sommes déjà en mesure de fournir des éléments de conclusions et de correction. Spécifiquement sur l’analyse du sionisme, de l’Etat Israélien et du rôle de la classe ouvrière israélienne. 

    La position historique du PSL

    Nos précurseurs politiques (à l’époque le Revolutionary Communist Party en Grande-Bretagne) se sont opposés à la création de l’État israélien en Palestine il y a plus de 70 ans. Dans leur opposition à ce projet colonial, ils ont souligné que celui-ci n’apporterait aucune sécurité aux Juif·ves et qu’il serait synonyme de souffrance pour les Palestinien·nes. 

    Après la Nakba, et la mise sur pied de l’Etat israélien, cette position a été modifiée pour s’adapter à la nouvelle situation. Reconnaissant que plusieurs générations de juif·ves israélien·ne.s étaient né·es sur place, et que l’unité de façade de la société israélienne cachait en réalité une société de classe fracturée, notre organisation s’est orientée en partie vers les masses israéliennes. Nous estimions que les révolutionnaires devaient s’appuyer sur les contradictions de classe de la société israélienne pour gagner une partie de la classe ouvrière israélienne au projet de libération nationale de la Palestine. Cette position était aussi articulée avec la perspective d’une révolution socialiste régionale et internationale qui en finirait une fois pour toutes avec le mode de production capitaliste. 

    Cette approche avait le mérite de tenter une approche vers certaines couches de la classe ouvrière israélienne. Cependant, en voulant gagner les masses israéliennes à la lutte de libération nationale palestinienne, sans exiger clairement une rupture avec le sionisme, l’organisation a fait des concessions programmatiques importantes, certaines d’entre elles tombant dans l’opportunisme.

    Ainsi, nous avons développé la revendication de deux Etats socialistes dans le cadre d’une fédération socialiste du Moyen-Orient. Cette position s’appuyait sur le fait que la colonisation de la Palestine et la création de l’Etat d’Israël se distinguent des expériences coloniales européennes, l’un des principaux aspects étant l’absence de métropole coloniale. Mais en légitimant l’existence d’un Israël “socialiste”, nous nous sommes compromis avec un projet à l’essence coloniale. En portant cette revendication, nous avons semé la confusion en laissant la porte ouverte à une interprétation qui pourrait légitimer les frontières de l’ancien projet capitaliste et colonial.

    Avec le temps, la réalité du fait colonial qui structure la société israélienne à tous les niveaux a été minimisée. Ceci est particulièrement vrai en ce qui concerne la distinction entre colon et colonisé, qui fut écartée de nos analyses. La société israélienne était analysée comme n’importe quelle autre société capitaliste. Notre ancienne internationale disposait d’une section israélienne qui résistait à l’occupation et à la violence des colons, plaidait pour une Palestine socialiste, mais aliénait les travailleur·euses palestinien·nes et arabes opprimé·es en fixant les frontières d’un futur État ouvrier israélien révolutionnaire. Cette revendication a eu pour effet de légitimer des frontières imposées par la colonisation. En raison de l’absence quasi-totale de membres palestinien·nes dans notre organisation sœur israélienne, la perspective palestinienne de l’oppression n’a pas reçu la place centrale qui lui revenait dans les analyses et les articles que nous produisions.  Ce manque d’analyse théorique sur le fait colonial nous a conduit à prendre de mauvaises positions, qui n’ont pas tardé à montrer leurs limites après le 7 octobre. 

    Nous avons dans un premier temps contesté les qualificatifs de génocide et d’apartheid pour décrire la réalité de l’oppression palestinienne. Nous avons également refusé d’utiliser le drapeau palestinien, et les autres symboles nationaux, sous prétexte qu’il s’agissait de  symboles nationalistes et baathiste, ignorant la dimension anticoloniale et émancipatrice de ces symboles. Et nous avons trop souvent posé une symétrie entre la violence génocidaire de la puissance colonisatrice et la violence des colonisé.e.s. Lorsque la question du boycott académique s’est posée, certaines des sections d’Alternative Socialiste Internationale, notre ancienne organisation internationale, ont refusé de reprendre ce mot d’ordre à leur compte, considérant que cela isolerait les masses israéliennes, et que cela ferait le jeu de la bourgeoisie israélienne.

    Bien que nous récusions théoriquement l’idée que les masses palestiniennes se devaient d’attendre les masses israéliennes pour mener leur lutte, et que nous reconnaissions théoriquement le droit des Palestinien·nes à la résistance, y compris par les armes, dans les faits, les événements politiques étaient systématiquement analysés depuis la perspective de la classe ouvrière israélienne. Tout ceci témoigne d’un manque de compréhension et d’analyse de la société israélienne, et une surestimation du rôle que peut potentiellement jouer la classe ouvrière israélienne, tant qu’elle ne rejette pas la politique d’occupation sioniste et le génocide du peuple Palestinien.

    Israël : une société coloniale et contradictoire

    L’Etat israélien a été bâti sur base d’une politique de colonies de peuplement porté par une classe ouvrière juive européenne. L’un des principaux courants du sionisme, le sionisme travailliste, estimait que pour atteindre les ambitions coloniales israéliennes, il ne suffisait pas de s’octroyer l’appui des grandes puissances impérialistes de l’époque, particulièrement la Grande-Bretagne, mais qu’il fallait aussi mener une politique de colonisation intensive. 

    Dans ce cas, les leaders ouvriers n’ont pas seulement été achetés par l’impérialisme, ils y ont activement contribué. La plus grande fédération syndicale du pays, la Histadrout, est directement responsable du nettoyage ethnique de la Palestine et de la Nakba, notamment par l’intermédiaire de sa milice, la Haganah. Cette spécificité de la classe ouvrière israélienne implique des difficultés supplémentaires quant à l’émergence d’une conscience de classe. 

    Bien qu’il existe des mobilisations sociales au sein de l’Etat israélien, ces dernières se déroulent la majorité du temps dans un consensus colonial, qui reste ignorant de la souffrance des Palestinien·nes. Ce fut par exemple le cas en ce qui concerne les mobilisations contre la réforme judiciaire de Netanyahu, ou pour les mobilisations pour la libération des otages. Un exemple plus récent de ce phénomène est la récente pétition signée par plus de 1000 réservistes et retraité.e.s de l’armée de l’air israélienne qui appellent à mettre fin à la guerre. L’argumentaire déployé par les signataires met en avant que “la guerre sert principalement des intérêts politiques et personnels, et non des intérêts de sécurité”. La tribune ne met aucunement en avant la nécessité de mettre fin à la colonisation et à l’apartheid. Son point de vue reste celui de la bourgeoisie israélienne et de la défense de son Etat.

    Nous estimons que des activistes de la classe ouvrière juive israélienne peuvent jouer un rôle, et nous ne négligeons pas que des mobilisations sociales au sein de l’Etat israélien peuvent modifier le cours de l’histoire, mais nous affirmons également que pour que ces activistes de la classe ouvrière juive israélienne puissent jouer leur rôle, il leur faut comprendre leur place privilégiée dans l’ordre colonial, et donc faire preuve d’une solidarité sans faille à l’égard de la résistance du peuple palestinien. Cela implique de combattre le sionisme pied à pied, en portant elle-même des revendications anticoloniales transitoires, telles que le retrait des troupes d’occupations israéliennes, l’ouverture immédiates des frontières, la fin de la discrimination économique et politique des Palestinien.ne.s et l’application du droit au retour pour les Palestinien.ne.s qui ont été dépossédé.e.s de leur terre. La conclusion logique d’une telle politique ne peut être que le démantèlement total de l’Etat capitaliste d’Israël, en tant qu’Etat basé sur un suprémacisme juif raciste. 

    Nous reconnaissons les erreurs d’évaluations qui ont été commises, tant sur la surestimation du rôle de la classe ouvrière israélienne et les réserves que nous avons émises sur les revendications des Palestinien·nes, que dans la minimisation du fait colonial en Palestine. Nous rejetons la revendication d’une Israël socialiste – position qui accepte les frontières capitalistes coloniales établies, et nous affirmons le droit à l’autodétermination pour tous les peuples de la région dans le cadre d’une révolution socialiste. Plus que tout, nous reconnaissons que nous n’avons pas élaboré un programme qui partait de la perspective palestinienne, et nous nous engageons à corriger cette grave erreur.

  • Un processus de transformation nécessaire – sérieux, approfondi

    A l’attention des lecteur.rice.s de Lutte Socialiste et des membres et sympathisant.e.s du PSL/LSP

    Nous vivons une époque de réaction à l’échelle mondiale. Le trumpisme n’est pas seulement un phénomène américain : il reflète un effondrement plus large de l’ère néolibérale, ainsi que la montée en puissance d’un capitalisme plus dur, plus autoritaire et plus militarisé. De la Palestine au Congo, des catastrophes climatiques aux violences policières, c’est la classe travailleuse qui paie le prix du sang et du désespoir.

    Face à l’horreur, la résistance existe. Nous assistons à des mobilisations massives pour la libération palestinienne, à des soulèvements anti-autoritaires en Serbie, dans l’Etat turc et au Bangladesh, ainsi qu’à des manifestations contre l’extrême droite et le Trumpisme aux États-Unis et en Europe. Différentes formes d’action – boycott, occupations, grèves – sont explorées. En Belgique, des mouvements comme Code Rouge ou les manifestations spontanées récentes contre l’impunité et la violence sexiste ont montré que l’ère du Trumpisme ne sera pas simplement acceptée comme la nouvelle normalité.

    Ces mouvements sont des graines d’espoir, montrant que malgré un niveau de conscience inégal et un niveau d’organisation faible (mais croissant !), la volonté de se battre reste vivante. Pourtant, les défis sont immenses. L’oppression – sexiste, LGBTQIA+phobe, raciste, coloniale,… – est structurellement ancrée dans le système capitaliste. Et alors que de nombreuses voix et poings se lèvent, une forte internalisation des oppressions au sein de la classe travailleuse rend possible la colossale poussée réactionnaire que nous connaissons actuellement.

    L’extrême droite et ses idées ne cessent de gagner du terrain. Forte d’un soutien financier considérable de la part des capitalistes, elle continue de promouvoir et d’exciter les sentiments réactionnaires parmi la classe travailleuse. Un récent sondage a révélé que 18 % des jeunes en Flandre estiment que la violence contre les personnes LGBTQIA+ est « acceptable ». Pendant ce temps, les forces de gauche ont trop souvent échoué à contrer efficacement ces idées. Pire, elles ont même pu leur concéder du terrain.

    C’est dans ce contexte que nous, le PSL/LSP, connaissons un processus de transformation nécessaire et profond.

    Au cours de la dernière année, notre organisation a été confrontée à un bilan souvent douloureux, mais essentiel. Une crise concernant la protection des personnes et des échecs politiques plus larges ont révélé de profonds problèmes dans notre culture et nos traditions internes. Celles-ci comprenaient une approche dédaigneuse des griefs des jeunes membres, des lacunes sur la compréhension des oppressions, des structures de protection inadéquates et un modèle de direction vertical qui laissait trop peu d’espace au débat critique ou à la prise de responsabilité. Il est clair désormais que la transformation n’est pas une option : c’est la seule voie à suivre.

    Nous nous engageons à reconstruire notre organisation en tant qu’organisation véritablement révolutionnaire, marxiste et féministe, enracinée dans l’attention aux autres, la prise de responsabilité et la solidarité. Dans le cadre de ce processus, nous remercions les personnes qui se sont exprimées. Leur courage a ouvert une brèche permettant d’entamer cette transformation.

    Dans les pages suivantes, vous trouverez deux documents abordant deux des aspects déjà examinés (concernant d’une part une crise de protection des personnes et d’autre part la lutte pour la libération palestinienne). Tous deux reflètent nos efforts pour tirer les leçons des erreurs passées et pour nous réorienter afin de relever les défis de cette nouvelle ère. Nous souhaitons nous engager dans une plus grande ouverture sur notre processus de transformation et vous invitons à lire, réfléchir et, si vous êtes intéressé.e, à participer à ce processus.

    Avril 2025

  • La politique de démantèlement menace le rail – seule la lutte peut l’arrêter !

    Pourquoi la colère du personnel ferroviaire est-elle à son comble ?

    La tension est à son comble entre le personnel ferroviaire et le gouvernement. Les attaques contre le personnel ne sont pas négligeables. Tout est sous le feu des critiques. Travailler plus longtemps pour une pension moindre est inacceptable, mais cela va plus loin que cela. À un moment où la crise de la mobilité et le climat exigent des transports publics plus nombreux et de meilleure qualité, l’Arizona propose une politique de démantèlement. Nous donnons la parole à celles et ceux qui sont rarement entendus dans les médias traditionnels, à savoir le personnel ferroviaire. Nous avons discuté avec un accompagnateur de train.

    Pourquoi le personnel ferroviaire est-il si en colère ?

    « Les pensions sont le point le plus sensible. L’âge de la retraite pour le personnel roulant est porté à 67 ans, avec une année supplémentaire chaque année. Celles et ceux qui auront moins de 55 ans l’année prochaine devront travailler beaucoup plus longtemps. Seules celles et ceux qui auront déjà 55 ans, mais qui n’auront atteint les trente années de service requis que quelques années plus tard, échapperont à l’augmentation de l’âge de la retraite. Le personnel non conducteur devra également rester plus longtemps, mais la différence est un peu moins importante. »

    « En outre, le calcul sera moins avantageux. Les tantièmes, qui déterminent notamment le pourcentage du salaire de référence que vous percevrez sous forme de pension, seront fixés à 1/60 pour tout le monde. Vous devrez donc travailler 45 ans pour atteindre le maximum de 75 %, contre 36 ans actuellement pour le personnel roulant et 41,3 ans pour le personnel sédentaire. Actuellement, le montant de la pension est calculé sur la base de la moyenne des quatre derniers salaires annuels, qui est ensuite étendue à l’ensemble de la carrière. Au début de votre carrière, le salaire est moins élevé, le montant de la pension diminuera donc considérablement. Travailler plus longtemps pour une pension moins élevée, c’est inacceptable ! »

    « Un contre-argument revient invariablement : les autres doivent aussi travailler jusqu’à 67 ans. C’est effectivement un problème, surtout pour les professions pénibles. Mais le problème des infirmier·ères qui doivent travailler jusqu’à 67 ans ne sera pas résolu si nous travaillons plus longtemps. Il faut une baisse de l’âge de la pension pour tout le monde et un régime spécial pour toutes les professions pénibles. Nous ne devons pas nous laisser diviser sur cette question. »

    « L’inquiétude du personnel porte également sur les salaires actuels. Il y a des inquiétudes concernant les primes maintenant que le repos dominical obligatoire et l’interdiction du travail de nuit ont été supprimés. La suppression des primes de nuit commence dans certains secteurs, comme la logistique, mais nous pouvons parier que cela sera ensuite généralisé. Nous le voyons aujourd’hui avec les possibilités de départ anticipé pour les travailleur·ses exerçant une profession pénible. Le travail dominical peut être imposé unilatéralement et la compensation est remise en question. Nous travaillons souvent le week-end et à des heures impossibles pendant la nuit. Les primes pour ces heures constituent une part importante de notre rémunération. »

    « Il y a aussi, entre autres, la modification proposée dans le cadre de la concertation sociale. La majorité des deux tiers au sein de la Commission paritaire nationale est remise en cause, ce qui signifie, par exemple, que pour modifier les temps de conduite et de repos, il ne sera plus nécessaire qu’au moins un·e grand·e syndicat·e donne son accord à la direction. Cela pourrait ouvrir la voie à une remise en cause du paiement des pauses entre deux trajets. L’affaiblissement de HR Rail, notre véritable employeur, pourrait conduire à ce que les futur·es employé·es de la SNCB ou d’Infrabel ne soient plus statutaires et que tout le monde n’ait plus le même employeur. »

    Et puis, il y a bien sûr les coupes budgétaires : le gouvernement veut économiser 675 millions sur la SNCB, l’opérateur. La N-VA veut privatiser la SNCB ou en vendre 49 %, ce qui revient au même : l’objectif est de gérer encore davantage la SNCB comme une entreprise privée. Infrabel n’est pas dans le collimateur. L’expérience britannique a conduit à des catastrophes ferroviaires et l’infrastructure est considérée comme stratégique, ce qui n’est pas négligeable dans le contexte actuel de rhétorique guerrière.

    Nous en sommes désormais à plus de 20 jours de grève, tous suivis de manière significative. Pour la première fois, les grands et petits syndicats ont formé un front commun. Mais existe-t-il un véritable plan d’action ?

    « Tout a commencé par la manifestation du 13 janvier, qui a suscité beaucoup de colère. L’impact sur le trafic ferroviaire a été important : moins d’un quart des trains circulaient. La manifestation a rassemblé de nombreux·ses collègues, au moins 500. »

    « Elle a été suivie par la grève de neuf jours de l’OVS et de l’ASTB. Il s’agissait de grèves tournantes par catégorie professionnelle. L’impact variait d’un jour à l’autre, mais les jours où les accompagnateur·rice·s et les conducteur·rice·s de train étaient appelé·e·s à la grève, le mouvement était très important. Le poste d’aiguillage de Namur a été complètement paralysé pendant deux jours, ce qui a rendu tout trafic impossible dans cette région. Les deux syndicats ont joué dans la cour des grands. »

    « Une grève de neuf jours met le service minimum sous forte pression. Ce service est prévu pour des grèves de 24 heures. Une grève plus longue, au cours de laquelle différents groupes professionnels se relaient, met toute la chaîne sous pression. Si, par exemple, le personnel chargé de mettre en place le service de remplacement se met en grève, il devient très difficile d’organiser le service pour les deux jours suivants. En effet, tout doit être parfaitement coordonné : le matériel doit être planifié, il faut des chauffeur·e·s et des accompagnateur·rice·s… Tout est lié. Cette tactique est intéressante car elle permet d’obtenir un effet maximal pendant un plus grand nombre de jours avec un minimum de jours de grève par membre du personnel. »

    « La semaine précédant le 31 mars, Metisp, un petit syndicat, avait appelé à la grève. Cet appel a été moins suivi, mais il y a tout de même eu beaucoup de grévistes. Cela montre la colère du personnel. Il est d’ailleurs remarquable que la plupart des jours de grève aient été effectués sans indemnité : la CGSP et la CSC ne paient que les jours qu’elles reconnaissent, le SACT ne verse aucune indemnité, le SIC ne peut verser qu’une petite indemnité pour un nombre limité de jours. Quand autant de collègues font grève sans indemnité, c’est que le personnel est vraiment en colère. »

    « Il est positif qu’un front ait été formé pour la première fois par cinq syndicats : le SIC et le SACT d’une part, et les syndicats classiques CGSP, CSC et SLFP d’autre part. Le SACT et le SIC ont suspendu leur semaine de grève prévue en avril et se sont rallié·e·s, tout comme le SLFP, au plan de la CGSP et de la CSC qui prévoit une grève générale le 31 mars, suivie de grèves régionales les 8, 15 et 22 avril, puis d’une grève générale le 29 avril. L’impact reste très important, avec parfois moins de la moitié des trains en circulation et une forte participation dans les ateliers, par exemple. Ce front commun est sans précédent et important : il renforce notre pouvoir de négociation et traduit la demande d’un plan d’action clair soutenu par tou·te·s.

    Une partie des collègues veut vraiment s’engager et faire grève avec détermination. Pour d’autres, les conséquences financières commencent à se faire sentir. De plus, les situations varient considérablement d’un·e collègue à l’autre, selon qu’iels sont statutaires ou non, qu’iels sont conducteurs·rices ou sédentaires, leur âge ou s’ils travaillent uniquement à temps partiel. La propagande du gouvernement, qui tourne à plein régime, sème la confusion. Certain·e·s collègues ne voient pas d’autre solution que de faire des économies. Les syndicats apportent des réponses, mais à trop petite échelle. Les réunions du personnel restent trop limitées et des campagnes d’information plus larges sont nécessaires à l’intention des voyageur·euse·s et de l’opinion publique. »

    Il y a encore des incertitudes quant à ce qui se passera en mai et juin. Certain·e·s plaident pour attendre après l’été. Cela n’arrêtera pas la propagande et la confusion. D’autres plaident pour des actions isolées, comme de nouvelles grèves régionales. Une autre possibilité serait de développer davantage la tactique du SIC et du SACT et, par exemple, de faire grève pendant 5 à 6 jours avec un roulement par groupe professionnel.

    « Il va sans dire que d’autres actions suivront. Jambon ne veut parler que de mesures transitoires. Le ministre compétent, Crucke, est disposé à discuter, mais de quoi ? La CGSP a déjà posé comme conditions que HR Rail reste l’unique employeur de tout le personnel et que les recrutements statutaires soient maintenus. »

    Les médias parlent surtout des « désagréments » pour les voyageur·euse·s. Existe-t-il une stratégie pour répondre à cette propagande ?

    « L’offensive médiatique est plus importante et plus large, tant sur le plan quantitatif que qualitatif. Les réponses sont pour le moins maigres. Concernant la possibilité de prendre sa retraite à 55 ans après 30 ans de service, on ne dit pas qu’il s’agit uniquement du personnel roulant et on ne dit rien sur les heures auxquelles nous travaillons. On ne précise pas qu’il n’y a pratiquement aucun·e collègue qui remplit les conditions pour partir à 55 ans. L’argument selon lequel nous vivons tou·te·s plus longtemps et devons donc travailler plus longtemps est injuste. Il existe de grandes différences selon le travail que l’on effectue. Il existe également la notion d’espérance de vie en bonne santé. Je travaille depuis plusieurs années dans le secteur ferroviaire et j’ai déjà assisté à trop d’enterrements de collègues qui venaient de prendre leur pension alors qu’iels n’avaient qu’une soixantaine d’années. »

    « Il est ridicule que le gouvernement et les médias prétendent que nous prenons les voyageur·euse·s en otage, alors que le gouvernement veut économiser près de 700 millions d’euros sur la SNCB. Le mythe des investissements supplémentaires pour attirer plus de voyageur·euse·s sonne creux et se limite aux lignes entre les grandes villes. Les arrêts peu fréquentés sont supprimés, comme si les habitant·e·s des banlieues ne payaient pas d’impôts et n’avaient pas droit aux transports publics. L’argument selon lequel il n’y a pas d’argent pour améliorer les services est absurde, il suffit de regarder les cadeaux faits aux employeurs. Ce sont les politicien·ne·s traditionnel·le·s qui ont eux·elles-mêmes créé les déficits. »

    « Certains médias affirment que nous abuserions de notre droit de grève. Comment peut-on abuser du droit de retirer son travail ? Il y a des tentatives pour limiter davantage le droit de grève et aller vers des réquisitions de personnel. Le ministre Crucke veut examiner juridiquement si les préavis de grève peuvent être refusés. Au lieu de s’attaquer aux raisons de notre mécontentement, iels veulent limiter notre protestation. »

    « Si on nous présente comme des profiteur·euse·s paresseux·ses, cela ne fait qu’alimenter la colère. Ces politicien·ne·s et commentateur·rice·s qui savent tout mieux que tout le monde devraient passer un mois à travailler avec nos horaires impossibles et à faire face à des voyageur·euse·s agressif·ve·s. Mais nous ne devons pas compter sur iels pour changer d’avis, nous devons construire nous-mêmes un rapport de force. Nous devons continuer à y travailler, tant parmi nos collègues que parmi les voyageur·euse·s, avec un plan d’action clair et en allant crescendo. »

  • Stopper le trumpisme par la lutte

    Un raciste imprévisible, condamné pour sexisme, narcissique et queerphobe trône à la Maison Blanche. L’avenir s’annonce de plus en plus effrayant. Trump veut faire de Gaza un projet immobilier expurgé des masses palestiniennes, un appel du pied évident au régime sioniste pour qu’il intensifie le génocide. Pour être plus fort face au régime chinois, il cherche à se rapprocher de Poutine, ce qui ne fait qu’augmenter le danger de guerres. Aux États-Unis, les réfugié.es et les personnes dont l’expression de genre ne correspond pas aux normes traditionnelles sont en ligne de mire. Elon Musk sort sa tronçonneuse pour s’attaquer aux fonctionnaires fédéraux. La crise climatique est niée et un complotiste anti-vaccin se retrouve ministre de la Santé. La situation pourrait-elle être encore pire ?

    Le fait de se voir refuser le droit d’être soi-même ou de craindre les rafles suivies d’expulsions humiliantes est très concret, les victimes ressentent l’attaque au plus profond de leur chair. La peur est loin d’être abstraite, elle est existentielle. Elle entraîne une certaine paralysie, tout particulièrement dans un contexte international où l’extrême droite semble progresser partout et remet en cause toutes les conquêtes sociales et toutes les certitudes. Nous n’avons pas le choix. Il faut mener le combat.

    L’extrême droite au pouvoir fait inévitablement penser aux années 1930. Mais cette décennie était aussi une période de résistance et de luttes qui avaient le potentiel de vaincre le fascisme. De la révolution espagnole à la grève générale en Belgique en 1936, en passant par le potentiel révolutionnaire en France en 1936, de grandes opportunités se sont présentées. Si nous assistons aujourd’hui à une offensive réactionnaire de grande ampleur, soyons assuré.es qu’il y aura une riposte. Des activistes courageux.euses prennent déjà les devants. Il est essentiel d’organiser une résistance de masse en visant l’objectif d’une transformation totale de la société.

    Le trumpisme fait des émules en Belgique. Le gouvernement De Wever, par exemple, représente une attaque sans précédent contre les réfugié.es. Le gouvernement Arizona prend des mesures pour criminaliser l’opposition au génocide à Gaza. Les attaques contre les droits à la retraite et les conditions de travail puent la tronçonneuse d’Elon Musk.

    Ne nous y trompons pas : cette tendance réactionnaire ne sert que les intérêts d’une petite minorité, celle des super-riches. C’est pourquoi tous les grands patrons de la big tech aux États-Unis s’en remettent à Trump. Il s’agit en partie d’ouvrir toutes les vannes par lesquelles la propagande de haine et de division peut avoir un impact.

    Tout ce qui divise la classe travailleuse dans toute sa diversité l’affaiblit. C’est l’objectif explicite du trumpisme, y compris ses variantes belges dans les figures de De Wever et Bouchez. Trump s’attaque aussi directement à la classe travailleuse. Par exemple, le National Labor Relations Board, qui veille au respect du droit d’organisation des travailleur.euse.s, a été immédiatement mis sur la sellette. Que ce conseil soit intervenu contre des licenciements abusifs chez SpaceX, l’entreprise spatiale de Musk, n’est pas étranger à la décision de Trump.

    La résistance à l’extrême droite est nécessaire et possible. Il est crucial que nous partions d’une approche de solidarité qui reconnaisse et inclue toutes les victimes des politiques d’extrême droite dans cette résistance. Nous devons lutter activement contre les préjugés qui sèment la discorde, y compris au sein du mouvement des travailleur.euses dans son ensemble. À partir d’une solidarité active, nous pouvons construire la résistance, créer des liens entre activistes et être plus fort.es ensemble. Cela peut jeter les bases non seulement pour repousser l’extrême droite, mais aussi pour lutter en faveur d’une rupture avec le capitalisme et pour une société socialiste qui élimine l’exploitation et toutes les formes d’oppression une fois pour toutes. C’est ce que nous, marxistes révolutionnaires, défendons !

  • L’Arizona doit disparaître, nos actions doivent le refléter

    Le gouvernement Arizona a l’avantage de la clarté. Il n’essaye même pas de camoufler son caractère brutalement antisocial avec un vernis d’apparence sociale. Ce gouvernement veut s’en prendre structurellement à nos droits sociaux, et à la tronçonneuse. Dans une société qui s’endurcit, ses victimes ne peuvent généralement compter que sur peu de compassion. C’est ainsi que les personnes migrantes devront remuer ciel et terre pour tenter vivre une vie digne ici.

    par Bart Vandersteene

    L’Arizona s’inscrit explicitement dans le courant trumpiste international, qui vise à éliminer tout semblant de progressisme ou de diversité. Le capitalisme actuel évolue vers une forme plus nue et plus brutale, caractérisée par la concurrence internationale, les guerres commerciales et les confrontations militaires. Cela s’accompagne de politiques nationales où l’État sert radicalement ses propres capitalistes. Les fonds publics sont utilisés pour subventionner les entreprises, des armées sont constituées et les mouvements d’opposition sont écrasés par la répression. Vooruit, la sociale-démocratie flamande, n’a apparemment aucun problème à accepter cela.

    De ce gouvernement et de l’élite capitaliste se dégage une assurance qui sert d’écran de fumée face à leur nervosité. L’opinion publique ne soutient pas ces politiques, ce sera encore plus le cas lorsqu’elles seront réellement appliquées. Le ton agressif et viriliste n’a qu’un but : intimider l’opposition et donner l’impression qu’aucune alternative n’est possible. Lorsqu’un contre-mouvement se mettra en marche, il sera combattu par une tirade agressive anti-woke, destinée à attiser les idées sexistes et racistes afin de détourner l’attention des mesures antisociales et de leur impact sur l’ensemble de la classe travailleuse.

    Négocier avec l’Arizona n’est pas une option

    Notre ambition doit aller bien au-delà de la protestation pour obtenir quelques petites concessions à la table des négociations. C’est pourtant ce à quoi nous conduit la stratégie syndicale dominante actuelle. La plupart des directions syndicales s’accrochent obstinément à un modèle de concertation sociale qui a été abandonné depuis longtemps par les capitalistes. Ce gouvernement et la classe capitaliste qu’il représente n’ont aucune intention de « négocier ».

    Le nouveau secrétaire général de la FGTB, Bert Engelaar, a apporté une bouffée d’air frais à la communication. Mais il apparaît surtout comme un représentant plus lisse et plus jeune du même groupe au sein de la FGTB, qui persiste à entretenir des relations étroites avec Vooruit. Un lien de plus en plus difficile à justifier auprès des membres. Au lieu de s’en tenir à des négociations qui ne mènent à rien, nous avons besoin d’une stratégie basée sur un rapport de force, pour stopper ce gouvernement avant de le faire tomber.

    La Gazet van Antwerpen a interrogé Engelaar concernant la chute du gouvernement : « Les gens ont voté à droite, alors un gouvernement de droite n’est pas illogique. Dire maintenant que ce gouvernement devrait tomber… Ecoutez, ce ne sera jamais mon gouvernement, mais je vais essayer d’en tirer le meilleur parti. L’équilibre entre les employeurs et les employés n’est tout simplement pas bon. Je vais essayer de trouver un équilibre ».

    Ce n’est pas seulement naïf, cela trahit l’intention de la direction syndicale. D’abord, utiliser un langage grandiloquent pour déclarer une grève générale, puis l’organiser sans enthousiasme et enfin s’asseoir à la table des négociations. Ensuite, lorsqu’une miette tombera de la table, les dirigeants syndicaux, bras dessus bras dessous avec Vooruit, loueront le modèle de concertation sociale et affirmeront qu’ils ont tout fait pour obtenir cette miette. Lorsque les critiques viendront de leurs propres rangs, ils prétendront que les électeur.trices ont simplement choisi ce gouvernement, et que c’est donc de leur faute. La vérité, c’est que cet accord de coalition n’aurait jamais obtenu de majorité s’il avait été mis sur la table avant les élections.

    L’Arizona doit tomber

    Nous devons stopper ce gouvernement et ne pas lui permettre de mettre en œuvre son programme. D’importantes conquêtes sociales risquent d’être structurellement effacées. Ce gouvernement doit être renversé. Cela aura directement un impact sur le gouvernement suivant, quelle que soit sa composition. Sans compter qu’un mouvement social plus fort, doté d’une capacité organisationnelle qualitativement élargie et d’une expérience enrichie par la victoire, affrontera tout nouveau gouvernement avec confiance et audace.

    Une première grève générale suivra le 31 mars. Elle doit être préparée à la perfection et soutenue le plus largement possible. Mais nous n’avons pas seulement besoin d’une grève forte et générale. Nous devons également nous engager dans une mobilisation totale et diversifiée de la résistance. Le 31 mars doit être un jour où chacun peut exprimer son opposition au gouvernement Arizona – des jeunes aux plus âgé.es, dans tous les secteurs et à travers une large mobilisation de tous les mouvements contre l’oppression. Les manifestations locales peuvent renforcer cette dynamique, avec des actions dans et autour des écoles, la participation des jeunes aux manifestations et des blocs organisés de mouvements de femmes, le mouvement de solidarité avec les Palestinien.nes, les organisations de réfugié.es, les coalitions pour le climat, etc. Ce n’est que par une mobilisation massive et plurielle que nous pourrons construire une force capable de stopper la version belge du trumpisme.  

  • Davantage de génocide et de Trump ? La résistance et la lutte sont nécessaires !

    La première phase du cessez-le-feu à Gaza expire le 1er mars. Entre-temps, des négociations ont commencé sur la deuxième phase, qui viserait à libérer les derniers otages israélien.ne.s et prisonnier.e.s de guerre en échange d’otages palestinien.ne.s, d’aide humanitaire, du retrait de tou.te.s les soldat.e.s israélien.ne.s de Gaza et d’un cessez-le-feu permanent.

    Article par Thomas en Suheil (Bruxelles)

    La troisième phase comprendrait le retour des corps des personnes décédées et le début de la reconstruction de Gaza sous la supervision de l’Égypte, du Qatar, des Nations unies et des États-Unis. Mais avant même que les fragiles négociations sur la deuxième phase n’aient commencé (qui portent également sur la gouvernance et la reconstruction de la bande de Gaza d’après-guerre), Trump était déjà là avec une proposition visant à accroître le chaos et la misère. Cela a éclipsé le soulagement suscité par le cessez-le-feu dans le mouvement de solidarité internationale. La lutte pour la libération de la Palestine est loin d’être terminée.

    Le « plan » de Trump et de Netanyahou : nettoyage ethnique et projet immobilier

    La proposition de Trump est révoltante : placer Gaza sous le contrôle des États-Unis pour la nettoyer et la transformer en « Riviera du Moyen-Orient ». En attendant, les habitant.e.s devraient déménager ailleurs, ce qui équivaudrait à un nettoyage ethnique de Gaza et donc une poursuite du génocide du peuple palestinien.

    La proposition a été immédiatement rejetée par les gouvernements arabes et les alliés occidentaux, mais Trump continue de la répéter sous les applaudissements de Netanyahou et des ministres de l’État sioniste.

    En outre, le ministre de la Défense, Katz, a déjà commencé à mettre en place une nouvelle unité chargée de reloger les habitant.e.s de Gaza dans un autre pays, et le ministre des Finances, Smotrich, a annoncé que la relocalisation pourrait commencer dans les semaines à venir.

    La question de savoir si les États-Unis prendront effectivement le contrôle de Gaza n’a plus d’importance. Netanyahou saisit ce moment pour atteindre son objectif initial : une « victoire complète » sur la résistance palestinienne, ce qui est directement conforme à l’objectif initial de l’État sioniste : l’accomplissement de la Nakba. En d’autres termes, la survie de la résistance palestinienne est en jeu et, avec elle, la survie du peuple palestinien.

    La proposition de Trump ne sort pas de nulle part. Dès son premier mandat, Trump a lancé le « Deal du siècle » avec Netanyahou. Ce plan a été conçu sous la direction de son gendre et ancien investisseur immobilier Jared Kushner, mais n’a jamais été mis en œuvre, malgré son accueil positif par les chefs de gouvernement arabes (à quelques réserves ou exceptions près). Le plan comprend une partie économique visant à investir dans les infrastructures et le tourisme par les États arabes et les entrepreneurs privés, et une partie politique visant à créer un État palestinien qui serait complètement dépouillé de sa souveraineté et de sa dignité nationales. Les représentants palestiniens n’ayant pas été consultés, ils ont unanimement rejeté le plan (même l’Autorité palestinienne, qui danse habituellement au diapason des États-Unis et d’Israël). En revanche, le président égyptien El-Sisi a été impliqué dans la préparation du plan, qui prévoit une infrastructure logistique stratégique entre les mains des Égyptiens et des Israéliens pour développer les activités économiques dans la région.

    Il est clair que la violence coloniale en Palestine est tout à fait conforme à la folie capitaliste de l’impérialisme américain et de ses alliés sionistes.

    Le mouvement de protestation rend le plan inacceptable pour les dirigeants de la région

    Cette fois-ci, la violence coloniale a complètement déraillé, entraînant une colère et une protestation de masse. Les dirigeants des gouvernements arabes doivent en tenir compte, même si c’est par souci d’autopréservation.

    Le roi Abdallah II de Jordanie a dû se taire devant les caméras à Washington et avaler l’humiliation, mais selon les autorités égyptiennes, le roi aurait pu s’insurger contre Trump. Auparavant, El-Sisi avait organisé une grande manifestation contre la proposition de Trump à la frontière palestinienne près de Rafah, qui a été retransmise à la télévision nationale : une démonstration remarquable de soutien nationaliste à un président corrompu.

    D’une part, Abdallah et El-Sisi ne peuvent pas se permettre de soutenir ouvertement Trump étant donné la colère et l’indignation des masses jordaniennes et égyptiennes, mais d’autre part, ils sont parmi les principaux bénéficiaires de l’aide étrangère américaine, tant sur le plan économique que politique. Après tout, tous deux refusent une nouvelle vague de migration palestinienne dans leur pays qui mettrait en péril le traité de Camp David et la stabilité nationale et régionale.

    En bref, les dirigeants égyptiens et jordaniens tentent de se tenir la main alors qu’ils sont eux-mêmes pris en tenaille entre les sponsors impérialistes, les populations nationales et les voisins régionaux. Les contradictions ne s’expliquent pas simplement par les intérêts économiques occidentaux, mais impliquent une dynamique complexe de forces matérielles et de relations sociales à différents niveaux. Alors que la machine à tuer sioniste poursuit ses aventures militaires au Liban, en Syrie et en Cisjordanie, l’Arabie saoudite prend l’initiative d’élaborer la réponse de l’unité arabe à Trump avec l’Égypte, la Jordanie et les États du Golfe. La situation est unique, mais les perspectives sont extrêmement désespérées. Une approche différente est nécessaire !

    Les manifestations de masse se poursuivent

    Des actions de solidarité se poursuivent dans le monde entier et des manifestations de masse ont eu lieu à plusieurs endroits pour protester contre la proposition de Trump. Au Maroc, une grande manifestation a eu lieu à Rabat la même semaine et quelques jours plus tard, plus de 100 manifestations ont eu lieu dans tout le pays. À Ankara et à Istanbul, des milliers de personnes ont manifesté devant l’ambassade des États-Unis et les Trump Towers. Dans la capitale jordanienne, des dizaines de milliers de personnes ont marché jusqu’à l’aéroport pour soutenir leur roi après l’humiliation subie à Washington, etc. Londres a également connu des manifestations de masse contre la proposition de Trump.

    Les milliers de manifestant.e.s ont exprimé leur solidarité avec la résistance palestinienne, exigé un embargo sur les armes et rappelé la complicité de leur gouvernement avec la politique génocidaire d’Israël. Iels ont exigé, par exemple, que le mandat d’arrêt international contre Netanyahou soit suivi sans équivoque, ce qui n’est actuellement pas le cas au Royaume-Uni, mais aussi en France, en Italie ou en Allemagne. L’Europe est manifestement incapable de reconnaître ses liens historiques avec le sionisme et l’impérialisme américain, en particulier maintenant que l’extrême droite est au pouvoir ou sur le point de l’être dans de nombreux pays.

    Il est nécessaire de rassembler systématiquement la lutte pour la libération de la Palestine et la lutte contre les gouvernements (d’extrême droite), car l’impérialisme n’est pas un système local, mais un système mondial qui exploite et opprime les peuples du monde entier. De nombreuses personnes comprennent spontanément que des politiques socio-économiques dures favorisent immédiatement des idéologies racistes et coloniales qui, à leur tour, justifient ces politiques.

    Solidarité dans les luttes communes

    Les possibilités de lutte commune sont nombreuses : le mouvement de libération palestinien peut considérer le mouvement anti-Arizona comme une occasion de maintenir la cause palestinienne parmi les priorités de la lutte en Belgique et de se mobiliser autour d’actions concrètes contre les sionistes de l’Arizona. Inversement, les syndicats peuvent inclure des revendications claires en solidarité avec la Palestine (comme les féministes le font pour le 8 mars) et contre les plans militaires visant à la confrontation impérialiste.

    L’accord du gouvernement cherche explicitement à créer un cadre juridique pour interdire des organisations comme Samidoun. Cette organisation lutte au niveau international pour la libération des prisonnier.e.s palestinien.ne.s. Une telle interdiction représente une atteinte à la solidarité avec la résistance palestinienne et s’inscrit dans la campagne internationale visant à qualifier d’antisémite toute opposition au génocide et plus généralement au sionisme. Elle s’inscrit également dans les attaques de l’Arizona contre le droit d’action des opprimé.e.s et des exploité.e.s.

    Enfin, les différents mouvements peuvent organiser des boycotts et des grèves contre les entreprises qui facilitent la politique de Trump et de ses alliés (d’extrême droite) : fabricants d’armes, promoteurs de construction, entreprises de transport, investisseurs dans la misère en Palestine, en Belgique et au niveau international.

    Personne n’est libre tant que tout le monde ne l’est pas

    Le capitalisme est dans son élément impérialiste ultime alors que les capitalistes se réorganisent avec empressement sous Trump et sentent de nouvelles opportunités d’investissement : les profits via l’industrie de la guerre et ses copains financiers sont convertis en nouveau capital qui exploite davantage le travail des populations opprimées jusqu’à ce que le temps soit à nouveau à la guerre et au génocide et à l’exploitation de nouvelles opportunités d’investissement et de profit. Un cycle infernal !

    Pendant ce temps, les dirigeants du Sud font savoir qu’ils n’accepteront pas un monde unipolaire ou bipolaire où Trump distribuerait les cartes. Soyons clairs : nous n’acceptons pas un monde capitaliste, bipolaire ou multipolaire ! Depuis les différentes régions du monde, un mouvement révolutionnaire internationaliste est possible et nécessaire.

    Pour la Palestine, cela signifie que ce mouvement doit se concentrer sur les masses et la classe ouvrière du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Des syndicats combatifs et des organisations politiques doivent être créés ou renforcés afin que les populations soient prêtes à rompre avec leurs dirigeants corrompus. Il faut créer les conditions et formuler les bonnes revendications pour qu’une vague révolutionnaire, comme les soulèvements de 2011 au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, puisse s’étendre à la libération de la Palestine et au socialisme démocratique, ce qui signifie une véritable liberté de la rivière à la mer dans toute la région et dans le monde entier. Une seule lutte, une solidarité internationale !

  • Dévoilons les mensonges de la politique d’austérité

    Article par Nick (Anvers)

    https://fr.socialisme.be/98440/faire-contribuer-toutes-les-epaules-non-larizona-accroit-les-inegalites

    1) « Nous vivons plus longtemps, il est donc normal de travailler plus longtemps »

    L’allongement de l’espérance de vie concerne principalement les hauts revenus. Les travailleur.euses exerçant des professions pénibles et les couches les plus pauvres de la population ne voient guère leur espérance de vie augmenter, elle diminue même. De plus, une espérance de vie plus élevée ne dit rien sur le fait de vivre en bonne santé. Une masse de travailleur.euses souffrent de problèmes de dos, de maladies cardiovasculaires et de douleurs chroniques dès l’âge de 60 ans. Les obliger à travailler plus longtemps n’est rien d’autre qu’une atteinte à leur santé. S’il y a aujourd’hui plus de malades de longue durée, c’est en partie à cause des mesures qui obligent tout le monde à travailler plus longtemps.

    2) « Nous devons faire des économies pour que les pensions restent abordables »

    Le coût des pensions n’est qu’une excuse pour une politique délibérée au service des grandes entreprises. Le gouvernement prétend qu’il n’y a pas d’argent pour des pensions décentes alors qu’il dépense des milliards en réductions d’impôts pour les entreprises et les riches. Les réductions d’impôts accordées aux entreprises en 2017 ont coûté 8 milliards d’euros par an au Trésor public. C’est plus qu’il n’en faut pour renforcer les pensions au lieu de les démolir.

    3) « Le travail de nuit et la flexibilité du travail sont nécessaires pour faire tourner notre économie »

    Le travail de nuit et la flexibilité extrême ne sont pas seulement source d’exploitation, mais aussi de crise sanitaire. Les travailleur.euses de nuit sont beaucoup plus exposés aux troubles du sommeil, à la dépression et aux maladies cardiovasculaires. Pourtant, les entreprises ne sont pas tenues responsables de ces conséquences. Au lieu de cela, les travailleur.euses de nuit se retrouvent dans un système de soins de santé qui s’érode de plus en plus. Il s’agit là d’une forme typique de transfert des coûts sociaux : les entreprises font des bénéfices, la société en paie le prix.

    La coalition Arizona veut faciliter le travail de nuit en ne considérant que les heures de travail après minuit comme du travail de nuit. Cela signifie que les primes pour le travail de nuit disparaîtront pour les quatre heures entre 20 heures et minuit. Pour un.e travailleur.euse de la logistique dans le commerce alimentaire, cela signifie une perte pouvant atteindre jusqu’à 434 euros par mois en primes de nuit – une attaque brutale contre le pouvoir d’achat des travailleur.euses. Cette politique n’entraîne pas seulement une baisse des salaires, mais ouvre la porte à une flexibilisation accrue et à des conditions de travail précaires.

    4. « Une politique d’activation est nécessaire pour sortir les gens du chômage »

    Le gouvernement présente ses mesures de lutte contre le chômage comme « activantes », mais en réalité, il s’agit simplement d’un mécanisme punitif. Les demandeur.euses d’emploi sont traqué.es, sans qu’il y ait suffisamment d’emplois décents. Les emplois flexibles et les contrats précaires se multiplient, tandis que les emplois stables à temps plein disparaissent. Les jeunes et les femmes sont particulièrement touché.es en étant contraint.es d’accepter des emplois précaires sans protection sociale.

    5. « Les personnes malades doivent être activées plus rapidement »

    La chasse aux malades bat son plein. Le patronat peut lancer des programmes de réintégration dès le premier jour de maladie, et les personnes souffrant d’une maladie de longue durée sont obligées de s’inscrire comme demandeur.euses d’emploi. Et ce, alors que la pression au travail et l’épuisement professionnel augmentent de façon vertigineuse. Le gouvernement réduit les soins de santé et la prévention, tout en affaiblissant la sécurité sociale. Il en résultera une augmentation du nombre de malades, de la pauvreté et de la pression sur le secteur des soins de santé.

    6. « Nous devons économiser pour ne pas transmettre la dette aux générations futures »

    Il s’agit là de l’hypocrisie ultime. L’argument des « générations futures » est utilisé depuis les années 1980 et recyclé à l’infini. Le véritable héritage que nous transmettons est une société où le profit prime sur la santé et la protection sociale. Une fois diplômés dans un système d’enseignement sous-financé, les jeunes sont confronté.es à des conditions de travail dégradées, à des carrières plus longues et à un secteur des soins de santé inabordable. Les gouvernements actuels font délibérément des choix qui accroissent les inégalités et érodent la sécurité sociale. Il ne s’agit pas d’une nécessité financière, mais d’une politique de classe.

    La vraie solution : la lutte et la redistribution des richesses

    Si nous voulons assurer un avenir décent, nous devons rompre avec les politiques de casse sociale. Nous avons besoin :

    • D’investissements massifs dans le secteur des soins au lieu de coupes budgétaires et des privatisations.
    • D’une réduction collective du temps de travail sans perte de salaire, afin que les gens puissent travailler en bonne santé.
    • De récupérer l’argent des grandes fortunes au lieu d’accorder des réductions d’impôts aux entreprises.
    • D’une sécurité sociale forte, afin que les travailleur.euses ne soient pas obligé.es de travailler jusqu’à leurs dernières forces.

    Nous n’obtiendrons pas tout cela gratuitement, nous devrons nous battre. Dans cette lutte, nous remettrons en question l’ensemble de l’organisation sociale. En effet, pour décider de notre avenir avec la majorité de la population, nous devons briser le pouvoir du petit groupe de capitalistes super-riches.

  • Ils sont d’abord venus pour les migrant.es…

    La déshumanisation dans le cadre d’une surenchère internationale pour « la politique d’asile la plus stricte possible ». C’est ce que représente l’Arizona. À la faveur du vent trumpiste, les droits des personnes migrantes sont quasiment réduits à néant, à tel point que les experts se demandent si cela respecte la Constitution. Le gouvernement s’attaque durement aux plus vulnérables. Et ce n’est qu’un début. Nous pensons immédiatement à la célèbre citation du pasteur Martin Niemöller « Quand ils sont venus chercher… » (*)

    par Geert Cool

    L’extrême droite ne fait officiellement pas partie de ce gouvernement, il n’en reste pas moins que la politique d’asile ne peut être qualifiée que d’extrême droite. Reste-t-il quelque chose de l’ancien programme anti-immigration en 70 points du Vlaams Blok qui n’ait pas été transformé en politique concrète depuis lors ?

    Inouï et inacceptable

    L’accueil des migrant.es se limite à « un lit, un bain, du pain et un accompagnement », et même cela n’est pas garanti. Après d’innombrables condamnations parce que le gouvernement belge fournit insuffisamment de places d’accueil, l’Arizona veut encore réduire la capacité existante et modifier la loi afin de pouvoir invoquer la « force majeure ». La protection sociale est progressivement supprimée, par exemple le droit à un revenu d’intégration ne peut être accordé qu’après cinq ans.

    Les arrestations de personnes sans papiers dans les maisons, sans mandat de perquisition et sans consentement, deviendront possibles. Cela ouvre la porte à des raids qui ne se limiteront pas aux espaces publics.

    Le regroupement familial deviendra encore plus difficile. Aujourd’hui, il n’est déjà pas évident pour les personnes migrantes de faire venir leur partenaire et/ou leurs enfants. Désormais, une période d’attente de deux ans est prévue pour les réfugié.es de guerre. Toute personne fuyant le génocide à Gaza devra donc attendre deux ans avant que le reste de la famille ne soit autorisé à venir en Belgique. Ceux qui inventent ce genre de chose feraient mieux d’essayer de survivre ne serait-ce qu’une semaine ou un mois à Gaza. Dans la pratique, cette période d’attente s’appliquera à la plupart des réfugié.es. En 2024, 39 615 demandes d’asile ont été introduites en Belgique, dont 14 % en provenance de Palestine, 11 % de Syrie et 10 % d’Afghanistan. Ce n’est pas la protection de plus en plus inexistante des réfugié.es qui crée un « effet d’aspiration », c’est la politique de guerre soutenue par le gouvernement belge qui crée un « effet de départ ».

    Dans la procédure, même le semblant de « justice » est jeté par-dessus bord. Le Conseil du Contentieux des Étrangers (CCE) est en train d’être « réformé » pour permettre des procédures plus courtes et entièrement écrites, avec des décisions moins motivées et des possibilités d’appel limitées. L’aide juridictionnelle sera « évaluée », les procédures devant le CCE deviendront plus coûteuses, et il sera même possible de pénaliser les avocats pour les « recours manifestement illicites ». Certains professeurs de droit constitutionnel, de droits humains et de droit des migrations qualifient les mesures proposées de « sans précédent et aussi d’inédites, parce qu’elles violent la séparation des pouvoirs, l’indépendance du pouvoir judiciaire et/ou les droits fondamentaux ».

    Les personnes qui souhaitent obtenir la nationalité belge et qui passent un « examen de nationalité » devront payer 1 000 euros au lieu des 150 euros actuels. Et pour cette somme-là, pas question d’en remettre en cause l’indexation, même à partir de 2027, contrairement à nos salaires et allocations… Là aussi, Conner Rousseau (Vooruit) peut s’en tirer à bon compte…

    Solidarité et lutte

    La vive polémique entre Musk et les partisans du MAGA autour de la migration a été l’expression des contradictions de la droite. D’un côté, ils surfent sur le racisme qu’ils alimentent autant que possible ; de l’autre, en tant que patrons, ils ne sont que trop heureux de faire appel à une main-d’œuvre bon marché qui peut être exploitée à outrance.

    En Belgique aussi, des dizaines de milliers de sans-papiers travaillent chaque jour pour des salaires de misère et sans aucune protection. Par le biais de systèmes de sous-traitance, ils travaillent à la rénovation de stations de métro ou encore au nettoyage de palais de justice et d’autres bâtiments publics. La surexploitation exerce une pression à la baisse sur l’ensemble des salaires et des conditions de travail.

    Les sans-papiers s’opposent à l’Arizona. Une délégation était présente à la manifestation du 13 février. La solidarité est nécessaire. Si le gouvernement s’en tire en déshumanisant une couche de travailleur.euses vulnérables, il continuera à le faire pour d’autres couches. En fin de compte, c’est l’ensemble des salarié.es qui seront visés ; c’est inhérent à la machine à profit du capitalisme. Au lieu de laisser les patrons et leurs politiciens nous briser doigt par doigt, faisons tout de suite un poing combatif ensemble.

    (*) La citation du pasteur Martin Niemöller :

    Quand les nazis sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste.

    Quand ils ont enfermé les sociaux-démocrates, je n’ai rien dit, je n’étais pas social-démocrate.

    Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.

    Quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour protester.

  • Comment continuer la lutte dans l’enseignement pour les élèves, les profs et tout le personnel ?

    Depuis le mois de septembre, on assiste à un mouvement qui va crescendo dans l’enseignement francophone. La manifestation de 35 000 enseignant.e.s le 27 janvier à Bruxelles et la forte participation des enseignant.e.s à la grève et à la manifestation contre l’Arizona du 13 février ont montré que le mouvement était loin de s’essouffler. Et les attaques continuent avec les coupes budgétaires annoncées par l’Arizona dans tous les services publics et les attaques sur les pensions. Les élèves du qualifiant qui sont sortis dans les rues donnent le ton : « De cette société-là, on n’en veut pas ! ».

    par Elise, enseignante à Soignies

    Un mouvement inédit qui rappelle 1996

    C’est du jamais vu depuis plus de 20 ans dans l’enseignement francophone. Le mouvement qui a pris place depuis septembre a mobilisé toute une nouvelle couche d’enseignant.e.s, dont certain.e.s qui ont fait grève pour la première fois. Lors de la journée de grève du 7 novembre, quasi toutes les écoles étaient bloquées par des piquets, et ce malgré la réaction très tardive des directions syndicales (rappelons que les attaques avaient été annoncées dès le mois de juin par le nouveau gouvernement MR-Engagés…).

    La grève de 48h des 27 et 28 janvier était un pari risqué car il est toujours plus difficile de se mobiliser pendant deux jours, et pourtant pas moins de 35.000 enseignant.e.s se sont rendu.e.s à Bruxelles pour manifester. Outre le fait que beaucoup de profs ont fait grève pour la première fois, les travailleur.euse.s des secteurs périphériques se mobilisent également, comme le personnel des académies de musique et des écoles des arts qui se voit également menacé par les nouvelles mesures. Les élèves du qualifiant, directement attaqués et provenant souvent de famille moins aisées, n’ont pas hésité à descendre dans les rues : on a vu des manifestations spontanées devant les écoles, et même des élèves accompagner leurs profs lors des actions des 27 et 28 janvier.

    C’est bien plus que des profs qui se battent pour leurs conditions de travail : c’est un véritable mouvement de société qui se préoccupe de l’avenir de nos élèves. La comparaison avec les luttes des années 1990 vient immédiatement à l’esprit lorsque l’on voit l’ampleur de la mobilisation et l’implication des élèves dans la lutte. Mais le spectre de 1996 est aussi un poids, beaucoup d’ancien.ne.s se rappelant avec déception comment leur salaire a été perdu sans avoir été entendus, les directions syndicales ayant mis fin au mouvement sans que les mesures d’économie ne soient retirées. Par exemple, des enseignantes qui sont aussi mères célibataires se demandent si elles pourront tenir sur la distance avec les multiples jours de grève et les pertes de salaire qui vont avec.

    Jusqu’ici, les actions n’ont pas donné de résultat direct. Au contraire, les pensions des fonctionnaires sont maintenant attaquées, le régime des DPPR est mis à mal et la ministre Glatigny semble vouloir revenir sur le tronc commun, une mesure qui devait amener plus d’égalité sociale.

    Une mobilisation par en bas pour répondre aux défis du mouvement

    Pour éviter un découragement et une perte de repères, il est essentiel d’avoir des perspectives plus claires sur la suite du plan d’action. Les directions syndicales ont évoqué des actions en avril, sans toutefois préciser de quoi il s’agira. L’organisation d’assemblées générales régulières dans les écoles par les équipes syndicales sur le terrain peut être une bonne manière d’endiguer le sentiment de flou pour l’avenir du mouvement. On peut parler ensemble des projets d’actions qui sont sur la table, mais aussi de l’actualité et des réels besoins dans chaque école pour construire par en bas des revendications qui parlent à tout le personnel et aux élèves. C’est seulement en mettant la pression sur les directions syndicales et en montrant aux collègues que nous pouvons donner le ton dans les mobilisations que l’on pourra maintenir l’enthousiasme.

    Un autre défi du mouvement est celui de construire des ponts avec les mobilisations des élèves qui sont sorti.e.s spontanément pour défendre leur avenir. Des obstacles très terre-à-terre compliquent la solidarité : les enseignant.e.s ont un devoir de « neutralité » qui peut se retourner contre eux s’ils essayent de mobiliser les élèves, et les éducateur.trice.s doivent parfois sanctionner les élèves qui sont partis en grève lorsque la direction de l’établissement ne soutient pas le mouvement. Utiliser les groupes jeunes des syndicats pour offrir un soutien à l’organisation des luttes des élèves pourrait être une piste.

    Elargir la lutte pour un refinancement de l’enseignement et de tous les services publics

    Le gouvernement MR-Engagés de la Fédération Wallonie-Bruxelles n’est pas prêt à entrer en négociation et à revenir sur les mesures d’économie : c’est un gouvernement de confrontation, tout comme le gouvernement fédéral. Les attaques contre l’enseignement ne sont pas isolées et font partie d’une vague de mesures d’économie dans les services publics qui touchent toute la classe des travailleur.se.s. Utilisons cette situation à notre avantage : ne nous limitons pas à une lutte sectorielle mais construisons l’unité avec toutes les luttes contre le gouvernement Arizona ! La manifestation du 13 février était une bonne première étape pour construire un rapport de force suffisant pour faire plier ces gouvernements de droite.

    Pour quoi luttons-nous aujourd’hui? Est-ce uniquement une lutte défensive contre les attaques dans l’enseignement qualifiant, dans le spécialisé, sur nos pensions ? Ou bien voulons-nous autre chose pour nos élèves : des classes à taille humaine, des locaux rénovés, du personnel disponible (et donc en suffisance et pas surchargé) ? Nous ne nous battons pas pour supprimer les mesures, ou bien pour que les économies soient faites dans d’autres services publics à la place de l’enseignement : les besoins sont criants dans tous les secteurs, et l’argent existe dans la société (n’oublions pas qu’en Belgique, les multinationales ne payent quasiment pas d’impôts…). En clarifiant de la sorte pour quoi nous luttons, en mettant en avant les besoins de notre enseignement, nous pouvons également assurer la solidarité des élèves, des parents, et enfin de toutes les couches de la société !  

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