Category: Syndical

  • Soins de santé : « Le patient au centre ? C’est du pipeau. On travaille en service minimum au quotidien »

    Des applaudissement aux gifles… La désagréable impression se retrouve dans le secteur de la distribution, celui de l’enseignement ou encore dans les soins de santé. On les qualifiait hier de héros de la crise. Ils et elles étaient loués sur les plateaux télé par les ministres et commentateurs, qui leur demandaient également – et surtout – de rester calme et de démontrer un « sens des responsabilités » (!). On leur promettait des jours meilleurs une fois l’urgence pandémique passée. On a vu ce qu’il en a été… Les soins de santé manifesteront à Bruxelles le 13 juin pour faire à nouveau entendre la réalité du secteur. Nous en avons discuté avec Karim Brikci, délégué CGSP à l’Hôpital Brugmann et militant de La Santé en Lutte, à son retour d’une assemblée générale dans cet hôpital bruxellois.

    Article tiré de l’édition de juin de Lutte Socialiste

    Qu’est-ce qui a changé dans le secteur avec la pandémie ?

    Ce qui est évident et indiscutable, c’est que dans l’ensemble des soins de santé (même si je connais un peu moins les maisons de repos), la situation est 1000 fois plus dramatique qu’avant. Le secteur s’en est pris plein la gueule, comme les autres secteurs dits de première ligne. Les travailleurs du secteur en ressortent épuisés moralement, psychologiquement et physiquement.

    Il y a très clairement une nécessité de réagir et d’arriver à obtenir de sérieuses améliorations des conditions de travail et des solutions concrètes face au manque de personnel au chevet du patient, au manque de moyens matériels, etc. Par rapport à tout ça, de mon point de vue, la mobilisation d’aujourd’hui est tardive. La mobilisation n’est pas évidente, beaucoup de collègues ont continué à quitter le secteur, beaucoup de collègues sont épuisés.

    L’enthousiasme et la colère à la fin de la pandémie auraient pu être utilisées pour se mobiliser, mais cette énergie a été vendue pour un semblant d’augmentation de salaire, certes nécessaire, mais qui a mis de côté les véritables questions et qui n’a surtout pas vu les plus bas salaires du secteur réellement augmenter. La demande principale du personnel sur le terrain aujourd’hui, c’est d’être assez d’effectifs pour assurer des soins de qualité aux patients. La Belgique est d’ailleurs l’un des pays les moins bien lotis d’Europe comme ont pu l’attester plusieurs études. Le langage managérial « Care together », « le patient au centre », c’est du vaste pipeau. Que tout le monde le sache, on travaille en service minimum au quotidien.

    De quel désertion sur le terrain parle-t-on ?

    C’est assez difficile à quantifier car on n’a pas de chiffres précis. Mais c’est très clair dans le personnel infirmier, dans un contexte évident de pénurie. Ceci dit, la pénurie est relative. Il y a du personnel infirmier formé en suffisance. Mais il n’y a pas assez d’infirmiers et d’infirmières qui acceptent de poursuivre avec les conditions de travail actuelles dans les institutions de soins. La manière dont on leur demandait de travailler était contraire aux valeurs du personnel soignant : s’occuper des patients avec humanité.

    Dans mon hôpital, le « turn over » est gigantesque. Beaucoup de collègues quittent l’institution et sont remplacés par des nouveaux, ce qui complique la riposte syndicale car il faut constamment tout reconstruire.

    C’est pour ça que la mobilisation du front commun syndical public privé des hôpitaux et maisons de repos de Belgique du 13 juin est une très bonne chose. C’est ce à quoi La Santé en Lutte appelait déjà depuis 2019 : une réaction unifiée de l’ensemble du secteur. Mais les revendications officielles sont très vagues. « A la recherche du collègue fantôme. » Très bien. Mais concrètement, pourquoi nous mobilisons nous ? Et avec quelle stratégie sur le long terme pour y parvenir ?

    A la CGSP Bruxelles, nous exigeons une révision à la hausse des normes d’encadrements, c’est-à-dire du nombre de personnel soignant au chevet du patient, combinée à la réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires. C’est ce qu’on estime crucial dans le secteur, comme dans toute la société de manière générale. Crucial pour éviter les situations d’épuisement et prodiguer des soins de qualité. On nous dit qu’il y a déjà pénurie de personnel infirmier. Nous répondons que la réduction du temps de travail sans perte de salaire pourrait ré-attirer du personnel qui a quitté le métier. C’est en améliorant les conditions de travail qu’on peut à nouveau attirer dans les professions de soins.

    La logique à l’œuvre dans le secteur est aujourd’hui inverse : des économies budgétaires et l’obligation de faire plus avec moins. Les employeurs font très certainement face à des difficultés budgétaires, mais leur ambition est de tout faire porter sur le personnel. Les difficultés budgétaires sont systématiquement utilisées comme prétexte pour de nouvelles attaques sur les conditions de travail. Tout ce qui a été dit sur les plateaux de télé à l’époque de la pandémie a été bazardé. Les promesses et les applaudissements ont vite été oubliés. On s’en doutait, mais c’est très clair aujourd’hui. D’ailleurs, on se moque de nous quand on le rappelle.

    Tu reviens d’une assemblée générale à l’Hôpital Brugmann, de quoi a-t-il été question ?

    Dans les hôpitaux publics à Bruxelles, il y a une volonté des organisations syndicales et des affiliés les plus actifs de passer à l’offensive. On a déposé un cahier de revendications le 15 mars dernier à la faitière IRIS, l’employeur des hôpitaux publics bruxellois. Tout ça a été fait avec une dynamique d’assemblées générales et validation du cahier de revendications également en assemblées générales. On a eu deux négociations où le ton a vite été donné. A peine avions-nous mis nos revendications sur la table qu’on a eu droit à leur « cahier de revendications patronales ». C’est leur terme, patronal, alors qu’on parle d’employeurs publics…

    Les priorités des patrons, donc (on va utiliser leur terme ), c’est en premier lieu la limitation du statut syndical, une nouvelle vague d’attaques sur le droit de grève et le droit de mener des actions collectives, totalement en phase avec ce qui se passe dans d’autres secteurs en Belgique. Ensuite l’accélération et la facilitation du licenciement du personnel statutaire et enfin la suppression du pointage, ce qui permet aux patrons de ne plus payer les heures supplémentaires qui sont légion dans le secteur. Voilà les priorités patronales. Pas une proposition sur les conditions de travail ou le bien-être. Chacun ses priorités !

    Nous avons clairement signifié notre refus. Il sont ensuite élaboré un texte de protocole qui ne répond à quasi aucun de nos dix points de revendications prioritaires. Ils ont fait un « protocole de remplissage », c’est-à-dire en prenant la législation sociale et le code du bien-être pour noircir des pages. On peut y lire qu’ils comptent – peut -être – respecter le code du bien-être qui est une obligation légale… C’est une blague. Par contre, l’entièreté de leurs revendications est incluse. Et cerise sur le gâteau, la disposition finale : les organisations syndicales ne réclameraient rien jusqu’au 31 décembre 2025 puisque l’on a obtenu une augmentation de l’indemnité kilométrique vélo. Donc vous comprenez, ils ont déjà été trop généreux… Bref. Le 30 mai, l’ensemble des hôpitaux IRIS partiront en grève, ce qui servira de tremplin vers la manifestation du 13 juin. On espère bien que les prochaines dates de mobilisation seront annoncées ce jour-là. Ce n’est pas avec une manifestation tous les six mois qu’on va arracher ce dont nous avons besoin.

    Nous avions invité un camarade du commerce pour discuter de la situation chez Delhaize et dans le secteur lors de cette assemblée du personnel. L’expérience est plutôt un succès. Les camarades étaient très contents de discuter de la situation en vigueur ailleurs. Ça a boosté la volonté de participer à la manifestation en défense du personnel de la distribution et du droit de grève du 22 mai. Cela a permis de clarifier les choses chez pas mal de monde. Les attaques contre le droit de grève dans le privé arriveront demain chez nous, elles se préparent déjà. Le 22 mai, on sera présents, avec une grève du brancardage et du nettoyage à Brugmann, avec piquet le matin et puis départ vers la manifestation.

    Un dernier mot ?

    Ce que la pandémie a montré, c’est qu’on a besoin d’un véritable système de santé public financé à hauteur des besoins, ce qui n’est clairement pas le cas aujourd’hui. Une partie du financement pourrait être trouvée dans un secteur pharmaceutique nationalisé qui deviendrait partie intégrante d’un service national de soins de santé.

    Mais se pose aussi et surtout la question du contrôle des décisions prises. A titre personnel, je pense que ce sont les usagers et le personnel qui sont les plus à même de prendre les décisions. Dans le public, on a une armée mexicaine de managers du privé totalement déconnectés des réalités de terrain. Il y a des disfonctionnements, leur discours est simplement de dire qu’il faut fonctionner comme dans le privé. En fait, je pense qu’ils organisent l’inefficience du service publics pour préparer la privatisation. C’est un combat de l’ensemble de la population pour obtenir à terme un système national de soins de santé géré et contrôlé démocratiquement.

  • Syndicalistes, pas criminels ! Contre la répression, la solidarité dans l’action

    Conflit social chez Delhaize. Des huissiers et la police brisent les piquets. Des huissiers se rendent au domicile de syndicalistes pour signifier une contrainte. Un canon à eau est placé devant une réunion de conciliation. Des syndicalistes sont emmenés menottés. Un juge outrepasse sa compétence territoriale en interdisant des actions dans tout le pays. Un autre estime que le droit commercial est plus important que le droit de grève. La police arrête des voitures de syndicalistes « à titre préventif » et leur interdit de mener des actions. Et que fait le gouvernement ? A la veille de la manifestation du 22 mai en défense du personnel de Delhaize et des droits syndicaux, la coalition Vivaldi (y compris PS et ECOLO, donc) discute d’un projet de loi introduisant dans le code pénal une nouvelle peine d’interdiction de manifester sur la voie publique.

    Par un syndicaliste

    L’année 2022 fut chargée en mobilisations intersectorielles et syndicales avec une série d’actions et de manifestations (certaines spontanées, la base débordant l’appareil syndical) concernant une hausse des salaires et la défense du mécanisme d’indexation. Elle s’est clôturée avec la grève générale en front commun syndical du 9 novembre et les dizaines de milliers de manifestants du 16 décembre à Bruxelles, également en front commun.

    Au lendemain de cette nouvelle démonstration de force, la FGTB avait conclu son communiqué de presse en ces termes : « Si aucun consensus ne peut être trouvé avec les représentants patronaux, la FGTB réunira à nouveau son comité fédéral mi-février, pour décider de nouvelles actions qui pourront aller jusqu’à 24 heures de grève. » En lieu et place d’une nouvelle grève générale ou de n’importe quel type d’action d’envergure, une série d’actions d’enterrement du mouvement ont été organisée le 14 février 2023. Alors que la revendication de la nationalisation du secteur de l’énergie avait refait surface durant tout ce mouvement, la communication des actions du 14 février se concentrait sur la « justice fiscale ». Les vieux briscards des mobilisations syndicales le savent bien, quand on en arrive là, ça sent le sapin.

    A côté de cette mobilisation interprofessionnelle, divers secteurs ont connu leur dynamique propre : enseignement francophone, soin de santé, non-marchand, pompiers, cheminots, petite-enfance en Flandre, puis du côté francophone,… Il y a même eu la grève générale des services du 10 mars. Une multitude de démonstrations de force en ordre dispersé sans stratégie à moyen ou long terme. Tout le monde sent bien la colère monter, patronat et gouvernements compris.

    La faiblesse appelle l’agression

    On se rappelle du plan d’action crescendo de l’automne 2014 (une série de mobilisations annoncées ensemble culminant avec la monumentale grève générale nationale du 15 décembre). L’année 2014 fut une année record en termes de grèves (depuis 1993) : 760.297 jours de grève contre 206.974 en 2013. Le gouvernement avait vacillé. Les divisions (et la crainte) dans les sommets syndicaux face au mouvement de masse déclenché ont conduit la lutte dans l’impasse (par le biais de l’entourloupe du « tax shift »).

    Une fois la pression de la rue retombée d’un cran, le débat sur le droit de grève a soudainement ressurgi. Les condamnations de syndicalistes pour « entrave méchante à la circulation » ont été utilisées à la suite d’une grève en octobre 2015 à Liège et d’une autre en juin 2016 à Anvers. Le camp d’en face a eu peur, et a cherché à saisir la moindre opportunité pour affaiblir les mouvements sociaux à venir. Et rebelote cette année.

    Delhaize, un précédent pour tout le mouvement ouvrier

    Delhaize est un ballon d’essai pour le patronat et le gouvernement. Des libertés syndicales taillées à la hache aux portes des magasins ou au dépôt de Zellik resteront dans le même état pour d’autres combats.

    Dans le feu de l’année d’action 2022, en juin, à l’occasion de son Congrès fédéral, la FGTB avait annoncé qu’elle lancerait une grève de 24 heures si un militant syndical est à nouveau condamné pour avoir exercé son droit de faire grève. Thierry Bodson avait déclaré : « Cela fait trois ans que ça dure, on a tous des difficultés à mettre en place des actions radicales, c’est un manque de respect pour nos délégués et nos militants. Une chose est certaine : il y aura encore des condamnations. Il faut le faire savoir au monde patronal, au gouvernement, à la justice. On doit prendre ensemble la décision : on réagira plus fortement la prochaine fois. » Il n’y a pas encore eu de condamnation dans la lutte chez Delhaize, mais ne jouons pas sur les mots, ce qui s’y produit est encore pire.

    Défendons nos droits avec tout le poids du mouvement des travailleurs, en attirant à sa suite toutes celles et ceux pour qui l’action collective est la seule voie (féministes, LGBTQIA+, activistes du climat, étudiants…). La solidarité est notre meilleure arme.

    Début mai, la CSC et la FGTB ont porté plainte contre un huissier intervenu sur le piquet Delhaize de Gand. Peu après, une centaine de militants se sont mobilisés devant le Tribunal de Première Instance de Mons pour soutenir plusieurs travailleurs et permanents syndicaux. La bataille juridique doit être menée, mais en faire un substitut à la mobilisation de masse est une lourde erreur.

    Certains estiment pouvoir contourner la répression en organisant des « actions surprises ». Dans la pratique, la police est assez vite au courant. Et face à une poignée de manifestants, la répression est facile à instaurer. La riposte la plus efficace repose sur une meilleure organisation du plus grand nombre. C’est ce qui a rendu impensable à la direction de la chaîne de vêtements Zara d’envoyer des huissiers lorsque l’ensemble du personnel du magasin de la Chaussée d’Ixelles à Bruxelles a fait grève le 6 mai dernier. Fin avril, dans le Limbourg, une rave clandestine a réuni 5.000 personnes sur le domaine militaire de Brustem. Aucune interpellation n’a eu lieu : trop de monde était présent.

    Le 13 mai dernier, le « Comité de solidarité avec les grévistes de Delhaize » a organisé un rassemblement devant le Delhaize « Chazal » à Schaerbeek. Environs 250 personnes se sont réunies et ont même pu manifester à l’intérieur du magasin sans qu’aucune astreinte ne soit délivrée, et ce alors que les huissiers étaient présent dès le début de l’action. Cet exemple devrait être discuté partout, au travers d’assemblées générales sur les lieux de travail et dans les quartiers (autour des Dehaize par exemple), dans les universités… en parallèle au débat plus global sur le plan d’action et la stratégie à suivre.

  • Delhaize et les droits syndicaux : que faire après la manifestation ?

    Un appel national à manifester est finalement enfin arrivé pour riposter à l’attaque scandaleuse contre les conditions de travail et de salaire chez Delhaize ainsi qu’en défense des libertés syndicales. Avec 20 000 manifestants et des délégations de différents secteurs, l’action a été couronnée de succès. Cependant, le potentiel est bien plus important : le soutien au personnel de Delhaize est élevé et il manque une perspective pour la lutte et un plan d’action en escalade visant à mobiliser l’ensemble du mouvement ouvrier.

    Le patronat passe à l’offensive. Alors que le personnel des supermarchés a été loué ces dernières années comme faisant partie des « héros de la crise sanitaire », on lui demande maintenant de s’écraser pour alimenter les profits déjà considérables des enseignes dans la lutte concurrentielle qu’elles se mènent entre elles. Dire non, défendre ses droits ? C’est immédiatement réprimé, y compris de façon préventive dans certains cas.

    La direction d’Ahold-Delhaize a annoncé sa volonté de faire passer la totalité de ses magasins sous franchise le 7 mars. Le 17 avril, une action nationale de tout le secteur a eu lieu et une manifestation interprofessionnelle a eu lieu aujourd’hui. Le personnel de Delhaize s’est déjà bien battu ces dernières semaines, en affrontant une répression policière et judiciaire inédite. La direction de Delhaize veut s’attaquer aux conditions de travail et, comme si ça ne suffisait pas, on veut renvoyer le droit de grève au 19ème siècle ! Tout cela sous couvert de “progrès”. Le progrès des profits et des dividendes aux actionnaires, ça c’est certain. Et tant pis pour nos salaires et nos conditions de travail.

    Après Delhaize, les patrons voudront aller plus loin, c’est déjà évident. Aujourd’hui, Dominique Michel, de l’organisation patronale Comeos, s’est exprimée dans les pages du Standaard en affirmant que les magasins doivent tout simplement être plus flexibles, car le secteur est sous pression. « Les marges diminuent et la concurrence étrangère s’intensifie », explique Dominique Michel. Si les marges sont sous pression, c’est notamment parce que les chaînes continuent d’ouvrir des supermarchés dans leur élan concurrentiel pour bloquer les nouveaux arrivants sur le marché. De nouveaux points de vente s’ajoutent sans cesse. La concurrence est acharnée, et c’est le personnel qui doit payer les pots cassés.

    Dans la pratique, Comeos prône un modèle néerlandais où l’on utilise massivement des étudiants jobistes, souvent des jeunes de 13 ou 14 ans à peine, qui travaillent quelques heures dans le supermarché avant ou après l’école pour un salaire de moins de 5 euros de l’heure ! Ça aussi, ça rappelle le 19e siècle… Les dirigeants de Comeos ont immédiatement indiqué que l’amélioration des conditions de travail dans les magasins franchisés est inenvisageable et que la présence syndicale dans les magasins constitue un point de rupture.

    Pour imposer ce principe chez Delhaize, le droit à l’action collective a déjà été jeté à la poubelle. Un juge bruxellois peut émettre des injonctions valables dans tout le pays (en dehors de sa juridiction, donc). La police peut arrêter préventivement des syndicalistes s’ils sont “soupçonnés” de se rendre à une manifestation… Entre-temps, Delhaize-Ahold ne lésine pas sur les huissiers. S’adresser aux clients est assimilé à un blocage d’accès. Et les juges, eux, estiment que le droit du commerce prime sur le droit à l’action collective ! Si les syndicats se laissent faire, c’en est fini du droit de grève. Qu’en est-il de la promesse d’organiser immédiatement des grèves interprofessionnelles dès que le droit d’action syndicale sera à nouveau attaqué ?

    La manifestation d’aujourd’hui a exprimé en partie une large solidarité avec le personnel de Delhaize. Le potentiel est sans aucun doute beaucoup plus grand que ce qui était dans la rue ce 22 mai. Les discours prononcés avant le début de la manifestation mettaient en garde le gouvernement et les employeurs et dénonçaient les attaques. Mais nous n’avons pas entendu le moindre mot d’ordre concret au sujet des prochaines étapes. C’est pourtant absolument nécessaire pour remporter des victoires. L’organisation de manifestations locales autour des magasins touchés et d’une grève de l’ensemble du secteur serait une étape logique.

    Comme l’indique le tract distribué aujourd’hui par le PSL, « Les actions sont toujours plus fortes si l’étape suivante est claire et connue à l’avance. On pourrait ainsi construire un élan vers une grande grève de l’ensemble du secteur de la distribution, avec la possibilité pour tous les travailleur.euse.s des autres secteurs de se joindre à l’action sous couvert d’un préavis de grève ! La grève, ça marche ! Aux Pays-Bas, les travailleur.euse.s des centres de distribution d’Albert Heijn sont entré.e.s en grève, la direction promettant ensuite de négocier une augmentation salariale de 10 % et d’accepter d’autres revendications. L’impact d’une grande grève avec la solidarité d’autres secteurs peut être énorme. »

    https://fr.socialisme.be/95716/un-plan-daction-en-escalade-pour-stopper-la-mise-sous-franchise-et-les-attaques-contre-nos-droits-syndicaux

    La lutte contre cette spirale infernale qui nous conduit vers un monde où l’on aura besoin de deux ou trois emplois pour survivre concerne l’ensemble du mouvement ouvrier et la société dans son ensemble. Ces dernières semaines, les preuves n’ont pas manqué pour souligner que c’est la soif de profit des grandes entreprises, et non nos salaires, qui est le principal moteur de l’inflation. On parle ainsi de « Greedflation ». En haut de l’échelle, on s’empare tranquillement de l’argent, ici et là une miette tombe dans les poches de politiciens bienveillants et nous, pendant ce temps, nous devons travailler de manière de plus en plus flexible, de plus en plus dure et dans des conditions de plus en plus mauvaises.

    Alors, qu’en est-il, messieurs les dirigeants syndicaux ? Allons-nous évaluer la situation dans un mois ou deux ? Ou y aura-t-il enfin un plan d’action en escalade qui s’appuiera sur le succès de la manifestation pour impliquer dans l’action la solidarité la plus large possible ? Qui transforme tous les magasins concernés en centres d’action, qui invite des membres du personnel de Delhaize dans des réunions de délégations syndicales et des rassemblements syndicaux, avec du matériel de mobilisation comme des pétitions et des tracts à diffuser de façon conséquente dans les quartiers et dans l’ensemble du secteur ? Ces actions pourraient déboucher sur une puissante grève de tout le secteur, soutenue par des militants d’autres secteurs couverts par un préavis de grève.

    Reportage photo de Liesbeth:

  • Un plan d’action en escalade pour stopper la mise sous franchise et les attaques contre nos droits syndicaux

    Pour gagner, sur base de la manifestation d’aujourd’hui et de toute la série de grèves et d’actions de solidarité qui l’ont précédée, nous devons passer à la vitesse supérieure. La mise sous franchise et les attaques contre le droit de grève chez Delhaize concernent l’ensemble du mouvement des travailleur.euse.s. Il faut un plan d’action à la hauteur des enjeux !

    La solidarité de masse, ça marche !

    Transformer la solidarité en actions, c’est la clé. D’excellentes initiatives ont eu lieu comme la manifestation locale interprofessionnelle à Liège du 7 avril avec 1.500 participant.e.s. Cette manifestation était une initiative de la CSC et de la CNE, rejointe par le SETCa quand il était évident que le succès serait au rendez-vous. Depuis, lorsque des piquets sont organisés avec plus de 100 personnes à Liège, l’intervention de la police ou des huissiers est difficile. La mobilisation construit une force de frappe capable de faire barrage à cette justice de classe.

    A Bruxelles aussi, l’action nationale de tout le secteur du 17 avril a été suivie d’une manifestation spontanée et combattive. Celle-ci a été portée par des militant.e.s de la CNE, qui organise des réunions du personnel dans différentes régions. Des militant.e.s de la FGTB étaient également présent.e.s, notamment de la CGSP ALR Bruxelles et du SETCa chez Albert Heijn, où une grève a été organisée dans un magasin de Gand. Une première action d’un comité de soutien à Bruxelles a rassemblé 250 personnes devant un magasin, puis dedans ! Le rendez-vous était publiquement connu à l’avance, ce qui a renforcé la mobilisation.

    Les magasins comme centres d’un plan d’action en escalade!

    Un réservoir de soutien attend encore d’être activé sur le terrain, dans l’ensemble du secteur de la distribution et ailleurs. Cette résistance doit être davantage organisée. Les délégations syndicales peuvent organiser des réunions du personnel au cours desquelles un.e délégué.e de Delhaize est invité.e. A l’hôpital Brugmann à Bruxelles, par exemple, un représentant du secteur du commerce a été invité à une assemblée générale du personnel. Des assemblées régionales interprofessionnelles reliant les militant.e.s et délégué.e.s des différents secteurs dans cette lutte pourraient organiser la mobilisation autour des magasins comme centres d’actions dans le cadre d’un plan d’action national et interprofessionnel en escalade.

    Les actions sont toujours plus fortes si l’étape suivante est claire et connue à l’avance. On pourrait ainsi construire un élan vers une grande grève de l’ensemble du secteur de la distribution, avec la possibilité pour tous les travailleur.euse.s des autres secteurs de se joindre à l’action sous couvert d’un préavis de grève ! La grève, ça marche ! Aux Pays-Bas, les travailleur.euse.s des centres de distribution d’Albert Heijn sont entré.e.s en grève, la direction promettant ensuite de négocier une augmentation salariale de 10 % et d’accepter d’autres revendications. L’impact d’une grande grève avec la solidarité d’autres secteurs peut être énorme.

    Les magasins peuvent être transformés en centres d’action à partir desquels des tracts, des affiches et des pétitions sont distribués. Nous pouvons transformer nos lieux de travail en autant d’outils de lutte. C’est ainsi que les sidérurgistes des Forges de Clabecq ont réagi à la menace de fermeture en 1997. Ils se sont mobilisés aux quatre coins du pays et se sont tournés vers les autres travailleur.euse.s et la jeunesse. Des délégués des Forges de Clabecq se sont rendus dans des universités, sur des marchés pour distribuer des tracts, dans des réunions de délégations syndicales… Ils ont ainsi réussi à mobiliser 70.000 personnes à Tubize en février 1997 ! Imaginez demain des dizaines de milliers de personnes devant les dépôts Delhaize à Zellik ! Les huissiers n’oseraient pas montrer le bout de leur nez…

    Nous sommes toutes et tous concerné.e.s ! Bloquons la franchise par une résistance de masse !

    Une stratégie d’acceptation de la franchise sous certaines conditions n’arrêtera pas la spirale vers le bas dans le secteur de la distribution. Le patronat veut tailler à la hache nos conditions de travail, avec le secteur du commerce de détail comme pied de biche vers un monde de travailleur.euse.s pauvres où plusieurs emplois sont nécessaires pour (sur)vivre. C’est pourquoi il veut supprimer l’organisation et la représentation des travailleur.euse.s sur le lieu de travail.

    Ce n’est pas une fatalité ! De son côté, Ahold Delhaize a dégagé un chiffre d’affaire de 21,6 milliards d’euros au premier trimestre 2023 (une forte augmentation comparée à l’année précédente). Mais ce n’était pas assez. Au lieu de racheter ses propres actions pour un montant d’un milliards d’euros (en en faisant porter le coût sur le personnel) afin d’augmenter les dividendes aux actionnaires, les énormes profits peuvent être utilisés pour des emplois décents et l’amélioration des conditions de travail.

    Si la direction s’entête dans son projet, exigeons la nationalisation de Delhaize afin de sauver les emplois et les conditions de travail : reprenons collectivement le contrôle et la gestion de l’entreprise et mettons les actionnaires à la porte, ils ont déjà suffisamment abusé de l’entreprise. De plus la nationalisation de cette entreprise permettrait d’organiser la distribution de manière beaucoup plus rationnelle que sur la base de la logique du privé.

    Participez à nos réunions locales avec des intervenants du secteur de la distribution !

    Afin d’évaluer ensemble la manifestation du 22 mai et de développer un plan d’action crescendo et un programme de lutte, le PSL/LSP vous invite à participer à l’une de ses réunions. Avec des intervenants du secteur de la distribution et de la Campagne ROSA, nous tirerons les leçons des semaines passées et discuterons des prochaines étapes pour remporter cette bataille ensemble!

    Gand – 30 mai 19h30 – ‘t Postje, Korenmarkt 22, 9000 Gent – avec Thomas Baeyens, délégué Setca Albert Hein

    Liège – 31 mai 19h – 5 Quai du Roi Albert, 4020 Liège – avec un responsable CNE Commerce

    Bruxelles – 1 juin 19h30 – Pianofabriek, rue du fort 35, 1060 Saint-Gilles – avec un responsable CNE Commerce

    REJOIGNEZ LE PSL-LSP!

    Le Parti Socialiste de Lutte (Linkse Socialistische Partij en Flandre) est un parti présent en Flandre en Wallonie et à Bruxelles qui organise travailleur.euse.s, jeunes et féministes pour renverser le capitalisme et changer de société.

    Le capitalisme repose sur notre exploitation afin de maximiser les profits des entreprises et d’assurer leur position sur le marché. Si elles ne suivent pas cette logique, la concurrence les mettent à mort. En finir avec la dictature des marchés est une absolue priorité !

    Nous défendons la nationalisation des secteurs clés de l’économie (finance, énergie, industrie pharmaceutique, distribution et production alimentaire, etc.) afin de parvenir à une société socialiste démocratique où la barbarie des marchés sera remplacée par une économie rationnelle planifiée démocratiquement afin de répondre aux besoins de la collectivité tout en respectant la planète.

    Cette lutte est par nature internationale, c’est pourquoi nous sommes organisés sur tous les continents à travers un parti mondial : Alternative Socialiste Internationale (ASI).

    Contactez-nous: info@socialisme.be ou 0472436075 (Michael)

    LA CAMPAGNE ROSA : POUR L’UNITÉ DANS LA LUTTE !

    La Campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression le Sexisme et l’Austérité) soutient la grève chez Delhaize : c’est un combat féministe.

    Le secteur de la distribution emploie de nombreuses femmes. Les bas salaires et le travail flexible s’ajoutent souvent au travail gratuit à la maison. L’écart salarial et d’autres formes d’oppression économique assurent que les femmes sont davantage victimes de violences. Elles sont plus susceptibles d’être victimes d’une position de dépendance financière. Le combat féministe est une lutte sociale qui concerne des salaires décents, de bonnes conditions de travail et des services publics de qualité!

    La Campagne ROSA veut renforcer la lutte du mouvement des travailleur.euse.s contre toutes les formes d’oppression, car en divisant la classe travailleuse, on facilite l’exploitation capitaliste.

  • Bruxelles. Action du comité de soutien aux grévistes de Delhaize

    La lutte continue à Delhaize. Ce samedi 13 mai, le comité de soutien aux travailleur.euse.s de Delhaize a organisé une action de solidarité au Delhaize Chazal à Schaerbeek. Environ 250 personnes dont des clients, des travailleur.euse.s de l’enseigne et des délégué.e.s syndicaux solidaires ont participé à l’événement.

    En annonçant à l’avance le rendez-vous, la mobilisation s’est vue renforcée et ni la police ni les huissiers n’ont pu intervenir alors que les manifestant.e.s ont fait irruption dans le magasin pour une petite manifestation et un appel au boycott. Le personnel du magasin Chazal était solidaire de l’action.

    Dans une interview pour la RTBF, un travailleur sur place déclarait qu’il espère que l’initiative sera réitérée dans la durée. La répression est forte et toute la solidarité possible est la bienvenue. Une action similaire devrait avoir lieu le samedi 27 mai tandis qu’une prochaine réunion du comité de soutien aux travailleurs.euses.s de Delhaize aura lieu le 25 mai au DK (Rue de Danemark 70B, à Saint-Gilles).

    D’ici là, le rendez-vous à ne pas manquer est bien entendu la manifestation interprofessionnelle du 22 mai. Construire la solidarité via le mouvement ouvrier en mobilisant le secteur de la distribution et l’ensemble des travailleurs est plus que nécessaire. Ce lundi 15 mai, un représentant syndical du secteur du commerce s’est d’ailleurs exprimé lors d’une assemblée générale du personnel du CHU Brugmann. Ce type d’initiative est a réitérer autant que possible pour construire la solidarité et la mobilisation vers le 22 mai.

    https://fr.socialisme.be/95680/manifestation-du-22-mai-mobilisons-nous-en-masse

  • La crise mondiale du capitalisme en matière de soins et de reproduction sociale et les luttes des professionnel·les de la santé

    Le 12 mai est la Journée internationale de l’infirmier·ère·x. Quelles sont les raisons de la crise de la reproduction sociale ? Quelles en sont les conséquences ? Et comment les travailleuses et les travailleurs de tous les genres luttent-iels contre cette crise ?

    Contribution d’Anne Engelhardt, militante de ROSA International Socialist FeministsAllemagne — préparée par Anne pour une réunion du Bureau des femmes de l’Alternative Socialiste Internationale en avril 2023.

    ROSA, les syndicats et les professionnel.les du secteur des soins se concentrent sur cette date pour mettre en lumière et combattre la grave crise de la reproduction sociale qui est à l’origine de la crise actuelle des soins dans le monde entier.

    Quelles sont les raisons de la crise de la reproduction sociale ? Quelles en sont les conséquences ? Et comment les travailleuses et les travailleurs de tous les genres luttent-iels contre cette crise ?

    La crise de la reproduction sociale est visible à bien des égards, mais pas de la même manière que la crise climatique, l’inflation, etc. En effet, les membres de la classe ouvrière mondiale qui exercent des tâches reproductives (non rémunérées) n’ont souvent pas le temps d’écrire leur histoire et leurs expériences.

    La théorie féministe de la reproduction sociale est une analyse féministe marxiste qui s’appuie sur la méthode des relations internes de Marx.

    Cela signifie qu’il faut comprendre le capitalisme comme le tout social dans lequel nous vivons et les différents processus sociaux tels que le racisme, les luttes, le patriarcat comme des parties co-constituantes. Ni le capitalisme, ni ses autres aspects n’existent l’un sans l’autre ou ne sont explicables sans l’autre.

    L’opposé d’une telle théorie serait une forme d’atomisme, que l’on retrouve chez de nombreux commentateurs pro-capitalistes et qui prévaut également dans les méthodes sociales-démocrates et staliniennes.

    Dans ce cas, le capitalisme est une partie et non un tout social, et d’autres aspects tels que le racisme, la classe, le genre existent comme d’autres atomes en relations lâches les uns avec les autres. À mon avis, l’intersectionnalité court également le risque d’une méthode atomiste.

    Elle superpose les atomes des processus d’oppression mais ne perçoit pas comment ils co-constituent le capitalisme et comment le capitalisme les co-constitue. En ce sens, il leur manque une réflexion sur les processus, les contextes et les différents espaces, ainsi qu’une réflexion sur l’interrelation et la mutualité avec l’histoire et la totalité capitaliste, qui doit être combattue dans son ensemble.

    La théorie féministe de la reproduction sociale part délibérément de Marx et de son analyse de la lutte des classes.

    Il explique les conditions préalables de ces luttes dues aux processus économiques et ne perd jamais de vue la vie difficile des travailleur.euse.s et leur courageuse résistance.

    Des féministes comme Maria MiesLise VogelSilvia Federici ou Tithi Bhattacharya ont fait progresser ce marxisme centré sur la lutte des classes ou l’ont élargi en y intégrant davantage de nuances et d’aspects, tels que la nature, les devoirs, la procréation, les trajets quotidiens, la sexualité, la violence, le sexisme, etc.

    Marx lui-même a écrit dans le premier volume du Capital, au chapitre 8, sur la brutalité de l’exploitation de la force de travail avec des équipes de 20 heures dans les boulangeries, la baisse de la qualité du pain et les scandales alimentaires [les inspecteurs ont trouvé du sable et des pierres dans les pains], à cause de ces conditions. Les horribles visages et corps déformés des travailleuses et travailleurs des usines d’allumettes dont la salle de pause déjeuner se trouve au milieu d’un phosphore toxique, etc.

    A ce titre, nous venons de commémorer les grèves des travailleur.ses des usines d’allumettes du 19ème siècle dans lesquelles les femmes et les filles ont joué un rôle de premier plan, lors du congrès de ROSA en mars de cette année.

    Marx n’a pas oublié les femmes et les enfants dans son analyse du capitalisme, mais il n’a pas poussé sa théorie de la classe ouvrière au sein du capitalisme au maximum. Son travail passe largement à côté du travail en dehors des usines, ou en dehors de la création de capital variable.

    La théorie féministe de la reproduction sociale n’est pas en désaccord avec Marx, mais déclare : « Il aurait pu être plus clair et plus précis s’il avait approfondi sa compréhension de la manière dont la force de travail est créée elle-même.

    Qu’entendons-nous lorsque nous parlons de reproduction sociale ?

    Il s’agit de la reproduction de la force de travail de trois manières :

    1. En donnant naissance à des travailleur.ses potentiels

    2. Éduquer, nettoyer, enseigner, soigner, nourrir, prendre soin de la force de travail, se reposer, dormir, guérir en tant que processus que les travailleurs qui doivent retourner à l’usine à chaque quart de travail doivent également faire pour eux-mêmes.

    3. La reproduction de la société capitaliste.

    Différents courants

    La théorie féministe de la reproduction sociale a, à mon avis, la faiblesse de s’intéresser surtout (et presque que) aux travailleuses et aux ménages, aux soins, à l’éducation, etc.

    Il existe également des courants qui tentent d’intégrer le travail domestique directement dans la théorie de la valeur, ce qui est problématique pour différentes raisons et conduit à des idées telles que les « grèves des ménages » ou les modèles de « revenu de base conditionnel », qui laissent de côté la lutte pour la société dans son ensemble et individualisent cette lutte.

    Cependant, la reproduction sociale, telle qu’elle est théorisée par certains courants féministes marxistes, est un processus nécessaire qui imprègne naturellement l’ensemble de la classe ouvrière.

    La rupture métabolique* et les conséquences du capitalisme sur notre corps et notre être

    *La rupture métabolique est la conception clé de Karl Marx des tendances à la crise écologique sous le capitalisme, ou selon les propres mots de Marx, c’est la « rupture irréparable dans le processus interdépendant du métabolisme social ».

    Nous commençons par Marx et sa façon d’envisager la destruction de la nature et le capitalisme. Marx a développé l’idée d’un métabolisme entre le capital et la nature. La société en général, et le capitalisme en particulier, dépendent des « dons gratuits » de la nature tels que l’air, le vent, l’eau, le soleil, le sol et les matières premières.

    Marx a observé que les centres capitalistes, les villes industrialisées exploitaient la terre, comme le capitalisme exploite la nature. En raison des changements intervenus dans la manière dont la classe ouvrière devait vivre et se nourrir dans les villes et en raison de la dureté du travail, elle avait besoin d’un nouveau mode d’alimentation (plus d’hydrates de carbone et d’aliments protéinés), mais elle était elle-même coupée du travail de subsistance.

    Les paysans et les terres devaient produire plus de blé, de foin, de viande et d’autres produits. Le sol est devenu de moins en moins fertile en raison de la surexploitation. Marx a décrit cette crise écologique continue du capitalisme comme une rupture métabolique : Le métabolisme entre la terre et la ville se rompt et crée des crises qui ont par exemple conduit à une guerre pour l’engrais pour oiseaux du Pérou, à une nouvelle vague de colonialisme africain au milieu du 19e siècle, à la famine, etc.

    Elle a également conduit à la destruction des forêts, afin d’accéder à davantage de terres et d’exploiter leurs sols fertiles.

    Lorsque nous revenons à la classe ouvrière et au féminisme de reproduction sociale, nous devons placer le corps ouvrier au centre de notre analyse. Marx dit que le capital variable que les travailleurs produisent – et qu’ils produisent par l’intermédiaire de leur corps – est la seule source de profit. Nous sommes un corps et nous avons un corps.

    Nous ne pouvons rien faire en dehors de lui. Physiquement, notre corps est aussi une nature. À un certain âge, nous sommes capables de travailler plus que ce dont nous avons besoin pour nous-mêmes ou pour nos proches. Mais notre corps change beaucoup.

    En tant que bébés, enfants et personnes âgées, nous avons des limites physiques à ce que nous pouvons faire et nous pouvons même prendre ou avoir besoin de plus de travail d’autres travailleurs que ce que nous pouvons donner. Notre corps est également un processus qui évolue au fil des ans.

    Cela semble tout à fait évident, mais la bourgeoisie, son idéologie et sa façon atomiste de considérer les travailleurs comme une source de main-d’œuvre et non comme un être humain en évolution, nous font oublier les différentes caractéristiques naturelles de notre vie.

    Marx a écrit des textes remarquables à ce sujet et voici ma citation préférée : « Le capital ne s’interroge pas sur la durée de vie de la force de travail : Ce qui l’intéresse, c’est uniquement le maximum de force de travail qui peut être rendu liquide au cours d’une journée de travail. Il atteint cet objectif en raccourcissant la durée de la force de travail, tout comme un agriculteur avide obtient un rendement accru du sol en le privant de sa fertilité« . (Marx 1867 / 1957, 275-76)

    Les capitalistes privent les travailleur.se.s de leur énergie et littéralement, dans certains processus de travail, de leur fertilité même. Il existe des myriades d’exemples de la manière dont les matériaux toxiques que les nettoyeurs doivent utiliser, le travail avec l’argent, le cuir, l’huile, etc. peuvent conduire à l’infertilité, en plus des horaires de nuit, du manque de sommeil, de la nourriture, etc.

    Lorsque nous considérons le travailleur et son corps dans l’ensemble social du capitalisme, il est fait et refait par le métabolisme entre la production et la reproduction. Sans produire de capital variable, les travailleurs ne reçoivent pas les salaires dont ils ont besoin pour se reproduire. Et ce métabolisme de la reproduction sociale est également en crise – c’est ce que nous pouvons appeler la crise de la reproduction sociale.

    Il est en crise parce que les conditions de travail sous le néolibéralisme ont été « flexibilisées », les salaires ont diminué, les conditions de santé et de sécurité au travail ont été démantelées au fil des ans. Les temps de pause ont été réduits. La production allégée s’est imposée dans tous les domaines du travail.

    Ainsi, le métabolisme de la reproduction sociale est constamment au bord d’une faille métabolique, tout comme la nature et le climat eux-mêmes.

    La marchandisation des soins et de la vie sous le néolibéralisme

    Dans les hôpitaux, nous constatons que dans de nombreux pays, chaque patient.e et son diagnostic ont un prix spécifique. C’est ce qu’on appelle le DRG (Diagnosis Related Group). Il peut s’agir du lit, des frais de nettoyage et de chauffage de la chambre, de la nourriture, de l’eau des toilettes, etc. Le type de calcul permettant de tirer des bénéfices du travail de soins est basé sur un modèle de somme globale.

    Il s’agit en fait du même modèle que celui utilisé dans la production à flux tendu pour les voitures, l’électronique, etc. Toutefois, les usines et les hôpitaux diffèrent, par leur nature même, des industries de production. Lorsque, pour diverses raisons, le patient a besoin de plus de temps pour guérir que ce que prévoit le calcul de la gestion de la production à flux tendu, l’hôpital est déficitaire.

    Toutefois, la privatisation des hôpitaux n’est rentable que si cette logique de production fonctionne dans toutes les parties des processus de soins. Dans certains hôpitaux allemands, les infirmières se sont battues pour obtenir plus de gants, de masques, etc. car ces « calculs » étaient bien trop bas pour garantir un processus de travail sain.

    La plupart des patients sont des travailleur.ses. L’augmentation du nombre de patients s’explique non seulement par la pandémie de Covid-19 et l’augmentation de l’âge, mais aussi par l’augmentation des accidents du travail, des maladies mentales et des épuisements professionnels au cours des dernières années.

    En France, le cancer du sein a été reconnu comme une maladie professionnelle possible. Le risque de cancer du sein est 30 % plus élevé chez les travailleuses de nuit. La plupart des travailleurs de nuit travaillent dans les hôpitaux, le nettoyage, l’hôtellerie et le commerce de détail – la plupart d’entre eux sont des femmes et des personnes queer.

    Cela signifie que : D’une part, le risque de se retrouver à l’hôpital à cause d’un système de travail capitaliste dérégulé et surexploitant a augmenté. D’autre part, les hôpitaux sont préparés depuis des années à devenir un nouveau domaine de profit. Cela n’est possible qu’en les transformant en une industrie similaire à l’industrie automobile, etc.

    Cependant, comme nous traitons de la matérialité de notre monde, des limites physiques de la nature, l’industrialisation des soins ne peut que mal tourner et créer une crise grave et des mouvements de résistance. Nous observons déjà un système de soins de classe dans lequel les pauvres ont moins accès aux soins et meurent en moyenne plus tôt de maladies curables que les riches.

    En outre, les maladies qui accompagnent la surexploitation sur le marché du travail ne sont pas très rentables. Elles nécessitent plus de médecins, plus de soins, plus de médicaments et plus de temps pour guérir. Les maladies des travailleur.ses ne sont donc pas assez rentables.

    Crise des soins capitalistes dans les pays en développement, les villes, le climat et bien d’autres choses encore

    Dans de nombreux pays, les enfants souffrent de symptômes post-covidiques. Ce sont surtout les enfants des familles de la classe supérieure qui sont traités. Cependant, dans les familles plus pauvres où les parents ont été beaucoup plus souvent exposés à la pandémie, car ils travaillaient dans des « infrastructures critiques », le nombre réel de cas de post-covid pourrait être encore plus élevé. Cependant, le traitement n’est pas facilement accessible. Nous savons que la raison d’être de la Covid-19 est la surexploitation de la nature et le franchissement de plusieurs frontières physiques, la destruction des habitats naturels des animaux, le changement climatique et ainsi de suite, qui ont conduit à une zoonose et à une crise de la santé et des soins au cours des dernières années.

    À tout cela s’ajoute la façon néolibérale dont les villes et les modes de vie ont changé. Ces dernières années, le logement est devenu l’un des biens de consommation courante, ce qui empêche de nombreux travailleur.euse.s de vivre à proximité des centres-villes ou de leur lieu de travail. De nombreux travailleur.euse.s doivent faire la navette et n’ont donc ni le temps de travailler, ni celui de récupérer. Les centres commerciaux où les travailleur.euse.s les plus pauvres pourraient trouver des offres moins chères sont souvent très éloignés des zones où ils.elles vivent et il faut plus de temps pour y accéder.

    Dans certaines régions, les crises climatiques obligent même les travailleur.euse.s, pour la plupart des femmes, à parcourir des kilomètres pour aller chercher de l’eau, de la nourriture ou du carburant, ce qui augmente considérablement le temps qu’elles consacrent au travail reproductif.

    La crise des soins touche également tout ce qui concerne les soins aux personnes âgées. Lorsque les travailleur.euse.s ont été suffisamment exploité.e.s – dans certains pays, les travailleur.euse.s se sont battu.e.s pour obtenir des droits à la retraite – c’est-à-dire des paiements dont les travailleur.euse.s ont besoin pour à peine survivre.

    Dans de nombreux pays, les soins aux personnes âgées dépendent des revenus des travailleur.euse.s et de leurs familles. La crise de Covid-19 a mis en lumière les conditions dramatiques et horribles dans lesquelles les travailleur.euse.s pauvres, et même les travailleur.euse.s qualifié.e.s, doivent endurer jusqu’à la fin de leur vie. Les mauvais soins aux personnes âgées touchent souvent davantage les femmes, car leurs pensions sont beaucoup plus faibles. Avec de faibles pensions, elles ne peuvent pas s’offrir de meilleurs soins lorsqu’elles sont âgées.

    En France, les travailleuses sont en première ligne du mouvement de grève actuel. En raison de leurs bas salaires et de leurs emplois à temps partiel, elles devront, dans le cadre de la nouvelle réforme des retraites, travailler plus longtemps que les travailleurs masculins pour une pension encore plus faible. En Allemagne, l’écart entre les pensions des hommes et des femmes est de 46 %. En France, il est déjà de 33 %.

    Dans un tel système, les femmes, et en particulier les travailleuses migrantes, sont encore plus exploitées en travaillant pour entretenir la famille et pour le salaire. En outre, les travailleuses assument la charge mentale de la planification, de la gestion, de la programmation des besoins et des projets de tous les autres, perdant souvent les leurs dans le processus. Il n’est donc pas surprenant que plus de 70 % des personnes diagnostiquées comme souffrant d’épuisement professionnel soient des femmes.

    Exploiter les travailleuses tout au long de la chaîne mondiale de soins

    Sous le néolibéralisme, par rapport à la période d’après-guerre, les soins privés des travailleuses sont souvent devenus un obstacle à la surexploitation dans de nombreux pays, en particulier dans les pays du Nord. Ici, dans les centres impérialistes des chaînes de valeur mondiales, on a besoin de plus de techniciens et de cols blancs pour gérer et digérer les marchandises et les flux de capitaux provenant de l’extraction de la valeur dans d’autres parties du monde.

    C’est un mythe de croire que les travailleuses sont arrivées dans le monde du travail dans les années 1970. Comme dans de nombreuses régions du monde, les femmes n’ont jamais disparu de la population active. Elles ont surtout travaillé dans l’agriculture, la vente, la couture, etc. et ont été exploitées dans les ateliers, les hôpitaux, le nettoyage, etc.

    Toutefois, dans les centres impérialistes, on observe une tendance à « libérer » les travailleuses des tâches domestiques et des soins non rémunérés et à les remplacer par des travailleuses migrantes provenant principalement des régions les plus pauvres du monde. Les travailleuses qui emploient d’autres travailleuses plus pauvres pour nettoyer leur maison, s’occuper de leurs personnes âgées et de leurs enfants, travaillent souvent elles-mêmes dans le secteur des soins.

    Dans le même temps, les travailleurs migrants qui effectuent ce type de travail mal rémunéré, laissent leur travail de soins, lorsqu’ils quittent le pays, à des travailleurs migrants encore plus pauvres ou à des parents non rémunérés, tels que des frères et sœurs plus jeunes ou des enfants plus âgés. Souvent, ces travailleurs migrants sont des femmes et des personnes queer originaires des anciens États coloniaux, qui sont en quelque sorte réexploitées dans des conditions capitalistes.

    Cette interconnexion entre les différents travaux de soins est connue sous le nom de « chaîne mondiale de soins » – et elle exprime clairement que le travail social reproductif ne peut être éliminé ou mis de côté. Il s’agit au contraire d’un élément intrinsèque du fonctionnement du capitalisme.

    Les tentatives visant à réduire le travail de soins pour une partie de la société conduiront immédiatement à ce que d’autres travailleur.euse.s doivent effectuer davantage de travaux de soins dans de moins bonnes conditions. C’est un équilibre qui ne peut être résolu. Pas par l’automatisation, pas par la machine, parce qu’il s’agit d’une matérialité, d’un besoin fondamental d’être soigné, de parler à d’autres personnes, d’être aimé, d’être soigné, de parler, d’écouter, de manger ensemble et de sortir de l’isolement.

    La méthode atomiste que j’ai décrite au début n’est pas seulement une méthode analytique. C’est une abstraction réelle, une réalité violente que le capitalisme nous impose. Les processus d’accumulation du capital ont besoin d’une société pour maintenir un système qui exploite le travail excédentaire d’êtres humains naturellement sociaux qui prennent la quantité d’énergie supplémentaire dont ils auraient normalement besoin pour prendre soin les uns des autres et d’eux-mêmes.

    Dans le capitalisme, le lien entre les soins et le travail est rompu. Ce que nous produisons est privatisé dans des mains privées. C’est de l’énergie et du temps qui nous sont retirés, à nous et à nos communautés. Nous diviser en individus et nous détacher les uns des autres signifie nous aliéner du travail, mais aussi nous aliéner de notre propre reproduction sociale.

    Dans le capitalisme, nous ne travaillons pas en fonction de notre libre choix, mais parce que nous sommes obligés de le faire. Le patriarcat est un outil supplémentaire pour maintenir la division du travail et nous forcer à faire du travail de soins non rémunéré pour des travailleurs essentiellement masculins qui font trop de travail productif et n’ont plus guère d’énergie pour se reproduire ou reproduire les autres.

    L’atomisme est une réalité violente qui tente de transformer les travailleur.euse.s en robots – ce qui est toutefois impossible par nature.

    La crise de la reproduction sociale frappe tous.tes les travailleur.ses

    La reproduction sociale n’a pas lieu uniquement au sein du foyer et n’est pas uniquement assurée par les femmes. La récente grève des chemins de fer au Royaume-Uni était beaucoup plus liée au travail de reproduction sociale qu’elle n’en a été discutée. Les organisations de personnes handicapées et les personnes handicapées se sont exprimées en faveur de cette grève, parce qu’il s’agissait aussi de maintenir le personnel dans les trains, dans les gares et dans les guichets.

    Pour les personnes ayant des besoins particuliers, il est impératif qu’il y ait des travailleur.euse.s dans les trains et sur les quais pour les aider, qu’elles soient aveugles, temporairement blessées, incapables de marcher ou autre. Sans aide pour accéder au bon train dans la bonne direction, sans assistance pour ouvrir et fermer les portes des toilettes dans le train ou pour être accompagné la nuit sur le quai ou dans le train, la mobilité devient immédiatement inaccessible pour de nombreuses personnes.

    Mais les compagnies ferroviaires ne sont pas disposées à payer pour ce travail supplémentaire. En réduisant le personnel sur les quais, dans les trains et dans les bureaux, elles détruisent – ce que nous pouvons appeler – le tissu social de la société et la mobilité pour tous.

    Aux États-Unis, les travailleur.euse.s du secteur ferroviaire ont tenté de lancer une grève que le gouvernement « pro-travail » de Biden a honteusement interdite. La raison du conflit n’est pas l’argent, mais le droit de prendre des congés de maladie. Il est incroyable que les cheminots, tels que les conducteurs de train, les ingénieurs, etc. perdent des points de salaire et de pension lorsqu’ils décident d’aller chez le médecin. Des cas de conducteurs décédés d’une crise cardiaque pendant leur service ont été rapportés.

    Les discussions sur la réduction de la semaine de travail, le « quiet quitting », le « lying flat » ne sont pas l’expression d’un quelconque type de paresse (si ce terme n’est pas une invention de la classe capitaliste pour domestiquer les travailleur.euse.s), mais l’expression de la manière dont le néolibéralisme a avant tout intensifié les tâches et la productivité sur le dos du corps et de l’esprit des travailleur.euse.s. La crise de la reproduction sociale est un symptôme de la crise de l’emploi et du chômage.

    La crise de la reproduction sociale est un symptôme d’un système capitaliste en crise, avide de profits illimités, qui détruit toutes les frontières et les structures physiques naturelles.

    Comment les travailleur.euse.s se défendent-ils.elles ?

    La crise économique de 2007/2008 a accentué les contradictions dans la reproduction sociale mondiale. Les hôpitaux et autres infrastructures ont été privatisés, fermés ou soumis à des coupes sombres pour « économiser » l’argent nécessaire au sauvetage des banques et du système financier. La marchandisation de la santé a entraîné une diminution spectaculaire du personnel soignant dans ces secteurs, qui ne sont rentables que lorsqu’ils ne fonctionnent qu’avec quelques employés.

    Quelques exemples en Allemagne : les travailleuses et les travailleurs migrants ont longtemps été considérés comme « inorganisables » par les syndicats conservateurs. Mais la crise a radicalement changé cette image. À Berlin, en 2009, l’IG BAU, le syndicat des travailleurs de la construction, a organisé la « révolte des invisibles », une grève des femmes de ménage, qui étaient souvent invisibles, car elles nettoyaient la nuit ou tôt le matin et s’habillaient comme des fantômes, et ont organisé des manifestations pour rendre leur cause visible.

    La même année, la première grève des jardins d’enfants a eu lieu avec un fort taux de militantisme, qui devait revenir six ans plus tard, en 2015, avec une grève nationale de quatre semaines des jardins d’enfants et des travailleur.euse.s sociaux.ales. En 2011, la première grève des hôpitaux de la Charité de Berlin a été déclenchée pour quatre jours, ce qui a permis d’apprendre beaucoup de choses sur la différence entre une grève dans une usine automobile et dans un hôpital, en termes de type de pression implacable et hypocrite qui peut être exercée par l’establishment capitaliste.

    En cas de grève, les médias et les hommes politiques se mettent soudain à se préoccuper de la vie des patients de manière hypocrite. Mais ils n’ont aucune importance dans la crise des soins quotidiens. Souvent, ils ne demandaient même pas d’augmentation de salaire, mais davantage de personnel et le droit de fermer des lits lorsqu’il n’y avait pas assez de personnel pour une équipe.

    De même, les travailleur.euse.s des jardins d’enfants demandaient le droit de fermer les groupes les jours où ils.elles seraient seul.e.s avec plus de 15 enfants – car il y a eu des situations où les enseignant.e.s des jardins d’enfants sont resté.e.s seul.e.s avec une trentaine d’enfants de moins de six ans, ce qui a conduit à un épuisement professionnel massif.

    En Belgique et en Autriche, ROSA et les militants de l’ISA ont pu lancer des campagnes telles que « Santé en Lutte » et « Sozial aber nicht blöd » – en Belgique, en collaboration avec le syndicat – en Autriche, plutôt en tant que réseau de collègues. Dans de nombreux hôpitaux aux États-Unis, et maintenant aussi en Allemagne, les syndicats les plus à gauche se concentrent sur l’organisation en profondeur.

    Les groupes de travail lancent d’abord des campagnes de signatures auprès de tous leurs collègues et identifient les travailleur.euse.s les mieux organisé.e.s, les plus connu.e.s et les plus dignes de confiance, qui sont ensuite élu.e.s comme délégué.e.s syndicaux.ales au sein de leur équipe, à laquelle ils.elles font également rapport sur les négociations.

    En ce qui concerne la lutte contre le racisme et la xénophobie enracinés dans ce que l’on appelle la « chaîne mondiale des soins », Ruth Coppinger, de ROSA en Irlande, travaille avec des groupes d’infirmières migrantes qui sont organisées à la fois dans le syndicat des infirmières au sens large, mais aussi au sein de leur propre association d’infirmières migrantes – elles se battent pour l’égalité et la reconnaissance de leur formation exemplaire, le manque de reconnaissance de cette même formation voit des infirmières migrantes pleinement qualifiées travailler pour un salaire inférieur à celui de leurs collègues déjà sous-payés, et pour l’assistance et les droits en termes de visas pour elles-mêmes et les membres de leur famille, entre autres questions.

    L’Afrique du Sud a connu une grève de dix jours dans les hôpitaux en mars 2023, et une grève des médecins au Zimbabwe. En Chine, des grèves ont eu lieu dans les hôpitaux en raison du manque de personnel et de matériel de protection pour les étudiants en médecine. L’année 2022 a également été marquée par le retour de la « vague blanche » de grèves du personnel hospitalier et soignant en Espagne qui, en décembre 2022, a conduit à l’occupation du ministère de la santé à Madrid. En Russie, une grève de ralentissement a eu lieu dans plusieurs villes, les médecins luttant contre les coupes budgétaires et les bas salaires.

    Un médecin a écrit sur Twitter : « Une grève est la plus grande déclaration d’amour à notre système de santé et le seul moyen de l’améliorer ».

    Alternative Socialiste met l’accent sur les soins et non sur le profit

    ROSA soutient les luttes menées dans le monde entier par les travailleur.se.s.x de la santé, pour améliorer leurs conditions de travail, pour former et employer plus de personnel, pour des augmentations de salaire immédiates supérieures à l’inflation, etc.

    Nous demandons l’arrêt immédiat de la privatisation dans le secteur des soins ; la resocialisation des soins, leur retrait complet des mains du secteur privé et le démantèlement de Fresenius, Helios, Orpea, etc.

    Nous sommes favorables à des soins universels entièrement publics, de qualité et gratuits au point de prestation – ces soins devraient être financés par l’utilisation des richesses détenues par le secteur privé qui doivent être reprises dans l’intérêt de l’humanité.

    Pour que les soins de santé et les services sociaux soient publics, laïques et progressistes, ils doivent être complètement retirés des mains des églises et autres institutions religieuses.

    Outre les services publics tels que les crèches universelles et gratuites, les écoles locales de qualité, les soins aux personnes âgées, etc., nous reconnaissons que l’accès libre et sans entrave à l’avortement, à la contraception et aux soins de santé pour les personnes transgenres sur demande, sans honte, sans barrières juridiques ou sans contrôle, sont des droits essentiels pour les personnes qui travaillent dans le secteur des soins et pour celles qui sont chargées de soins non rémunérés.

    Les travailleur.se.s du secteur des soins, en particulier les infirmier.ère.s, sont fréquemment victimes d’agressions, de harcèlement sexuel et de racisme sur leur lieu de travail. En outre, la misogynie médicale, les disparités raciales dans les soins, le traitement brutal des personnes transgenres et l’interconnexion des deux sont quelques-uns des problèmes auxquels les patients sont confrontés.

    Ainsi, la lutte pour des soins adéquats doit être intrinsèquement une lutte anti-sexiste, anti-transphobe et anti-raciste.

    Les soins devraient être démocratisés, par exemple en confiant la gestion des prestataires de soins publics à des comités élus composés de représentants des travailleur.se.s du secteur des soins, des patient.e.s/client.e.s et du mouvement syndical dans son ensemble.

    Fondamentalement, le système capitaliste et sa recherche brutale du profit constituent un danger pour la santé humaine et la planète. La recherche du profit au cœur du capitalisme est diamétralement opposée à la centralité des soins. Le profit et les soins s’opposeront toujours. Ce fait est au cœur de la crise insoluble du capitalisme en matière de soins.

    Les luttes des travailleur.se.s du secteur des soins, les mouvements pour l’amélioration des droits et de l’accès aux soins, à la santé, aux aides et aux services sociaux, sont des luttes situées sur le site de cette collision – et sont des luttes intrinsèquement liées aux besoins et aux intérêts de l’ensemble de la classe ouvrière mondiale.

    Les luttes liées à la crise des soins doivent être associées à d’autres luttes des travailleur.euse.s et des opprimé.e.s du monde entier dans un mouvement socialiste contre la loi du profit – une lutte pour retirer les richesses et les ressources des mains du secteur privé.

    Avec les leviers clés de l’économie en propriété publique – combattus et gagnés par une classe ouvrière active, consciente, organisée et socialiste et par les masses pauvres qui se sont levées contre la propriété privée de la richesse et l’État qui la défend – un plan démocratique de l’économie pourrait mettre les soins aux personnes et à la planète au centre même de tout. Cela fait partie intégrante de la lutte socialiste et du changement socialiste.

  • Manifestation du 22 mai: Mobilisons-nous en masse !

    10h, Bruxelles Nord

    Construisons la résistance dans toutes les villes et sur tous les lieux de travail !

    La participation la plus large possible à cette manifestation nationale renforcera activement la grève historique chez Delhaize, en cours depuis plus de deux mois. Le slogan de la FGTB « Aujourd’hui Delhaize, à qui le tour demain? » souligne à juste titre l’importance de ce combat pour tou.te.s les travailleur.euse.s. Outre une série d’attaques contre les conditions de travail dans le secteur, d’autres patrons ne sont que trop heureux de profiter de l’interdiction des piquets de grève. Chaque faiblesse dans la résistance est instrumentalisée à son encontre.

    De la solidarité à l’action!

    Comment riposter ? Nous avons le soutien et la solidarité des clients, du personnel du secteur et du mouvement syndical dans son ensemble. En transformant les magasins en centres d’action remplis de tracts et d’affiches, des actions plus importantes pourraient être préparées, comme des manifestations locales et bien entendu la manifestation du 22 mai. Mobilisons le soutien pour le personnel de Delhaize et le secteur de la distribution !

    La manifestation de 1.500 manifestant.e.s à Liège le 7 avril dernier, à l’initiative de la CSC, a illustré le front uni que peuvent constituer travailleur.euse.s du secteur de la distribution ainsi que les client.e.s. Quand des piquets de grève sont organisés à Liège avec plus de 100 personnes, la police ou le huissier sont invisibles. La mobilisation construit une force capable de grandement compliquer la répression.

    Chaque semaine, des délégué.e.s de différents secteurs renforcent les piquets et les actions de blocage. Cette résistance doit être davantage organisée autour d’un plan d’action en escalade, crescendo, avec le clair objectif de gagner. A Bruxelles est né un comité de solidarité où a été fixé l’objectif de bloquer un des plus grands magasins de Bruxelles le 13 mai en renforçant en masse le piquet de grève. Organisons la résistance dans toutes les villes et assurons une mobilisation de masse pour la manifestation nationale du 22 mai!µ

    Un réservoir de soutien attend encore d’être activé sur le terrain, dans l’ensemble du secteur de la distribution et ailleurs. Les délégations syndicales d’autres secteurs peuvent organiser des réunions du personnel où inviter un.e délégué.e de Delhaize. Le 22 mai, les délégations d’entreprise devraient être visibles en tant que tel, avec banderoles ou pancartes spécifiques, pour montrer au grand jour toute l’ampleur et la diversité de la résistance. Les délégué.e.s peuvent également être invité.e.s à des réunions syndicales interprofessionnelles. C’est idéal concernant la mobilisation dans l’action, mais également pour alimenter le fonds de grève : le personnel doit disposer du poids financier nécessaire pour continuer la grève.

    Stop à la franchisation !

    La direction de Delhaize est prête à conclure un accord lui permettant de poursuivre la mise sous franchise. Garantir que l’ouverture de magasins quelques années de plus, préserver certaines conditions salariales et de travail pour le personnel actuel,… c’est la rançon qu’ils sont prêts à payer. Dans une économie de marché, tout ça est marqué d’une date de péremption très proche.

    La croissance d’une enseigne se fait au détriment d’une autre, avec des conséquences désastreuses pour le personnel et les clients. Sortons de cette logique concurrentielle infernale ! Chez Lidl et Aldi, la charge de travail a encore augmenté. Chez Dreamland et Dreambaby, les licenciements sont imminents. Albert Hein et Action augmentent encore la part de main-d’œuvre bon marché avec les jobs d’étudiants. Chez Carrefour et Intermarché, on trouve une évolution identique à celle de Delhaize. STOP !

    Quel est l’avenir du secteur si cette mise sous franchise entre en vigueur ? Salaires plus bas, personnel raboté, charge de travail accrue, moins de primes pour le travail de week-end, extinction des contrats à durée indéterminée et/ou à temps plein, horaires variables, ouvertures plus fréquentes le dimanche, utilisation de flexijobs… La casse sociale ne s’accepte pas, elle se combat ! La mise sous franchise rend d’ailleurs également pratiquement impossible toute représentation syndicale. Et soyons clairs : c’est l’ensemble des travailleur.euse.s qui va en pâtir, car cette spirale infernale va entraîner les autres secteurs vers le bas.

    Disons-le nettement : un plan social n’offre aucune solution fondamentale ! Nous comprenons que des travailleur.euses concerné.e.s cherchent à se préserver eux-mêmes avant tout. Mais la seule façon d’y arriver vraiment, c’est de lier leur sort aux autres travailleur.euse.s et de tout d’abord enterrer la franchisation comme première étape vers l’augmentation des salaires, l’engagement de plus de personnel et l’instauration de la réductions collective du temps de travail sans perte de salaire. La solidarité de masse est la clé pour conserver nos acquis et en arracher d’autres !

    Un plan d’action crescendo pour gagner qui s’appuie sur le 22 mai !

    Que se passera-t-il après le 22 mai? Comment gagner? Ces questions méritent une réponse avant la manifestation. On mobilise mieux avec une perspective claire. Un plan d’action crescendo, en escalade, pour imposer le retrait de l’ensemble du plan est absolument nécessaire pour remporter cette bataille. Des initiatives locales et la manifestation du 22 mai peuvent ouvrir la voie à une grande grève dans l’ensemble du secteur de la distribution, avec la possibilité pour tous les travailleur.euse.s de tous les secteurs de se joindre à l’action !

    La grève, ça marche ! Aux Pays-Bas, les travailleur.euse.s des centres de distribution d’Albert Heijn sont entré.e.s en grève, la direction promettant ensuite de négocier une augmentation salariale de 10 % et d’accepter d’autres revendications. Une grande grève avec la solidarité d’autres secteurs peut tout changer. Les travailleur.euse.s des autres secteurs doivent pouvoir participer à toutes les étapes de ce plan et être couverts d’un préavis de grève. C’est ainsi qu’on construit une résistance de masse. C’est ainsi qu’on peut briser l’évolution vers une société où un seul emploi ne suffit plus. Veillons d’ailleurs à engager dans la lutte les travailleur.euse.s des magasins déjà franchisés !

    Si la direction s’entête dans son projet, exigeons la nationalisation de Delhaize afin de sauver les emplois et les conditions de travail : reprenons collectivement le contrôle et la gestion de l’entreprise et balançons les actionnaires à la poubelle, ils ont déjà suffisamment profité de l’entreprise.

    La Campagne ROSA : pour l’unité dans la lutte !

    La Campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression le sexisme et l’austérité) soutient la grève chez Delhaize : c’est un combat féministe.
    Le secteur de la distribution emploie de nombreuses femmes. Les bas salaires et le travail flexible se combinent souvent au travail non rémunéré à la maison. L’écart salarial et d’autres formes d’oppression économique assurent que les femmes sont davantage victimes de violence. Elles sont plus susceptibles d’être victimes d’une position de dépendance financière. Le combat féministe est une lutte sociale qui concerne des salaires décents, de bonnes conditions de travail et des services publics de qualité!

    La Campagne ROSA veut renforcer la lutte du mouvement des travailleur.euse.s contre toutes les formes d’oppression, car en divisant la classe travailleuse, on facilite l’exploitation capitaliste.

    Rejoignez le PSL/LSP

    Le Parti Socialiste de Lutte (Linkse Socialistische Partij en Flandre) est un parti national qui organise travailleur.euse.s, jeunes et féministes pour renverser le capitalisme et changer de société.

    Le capitalisme repose sur notre exploitation afin de maximiser les profits des entreprises et d’assurer leur position sur le marché. Si elles ne suivent pas cette logique, la concurrence des autres les mettent à mort. En finir avec la dictature des marchés est une absolue priorité !

    Nous défendons la nationalisation des secteurs clés de l’économie (finance, énergie, industrie pharmaceutique, distribution et production alimentaire, etc.) afin de parvenir à une société socialiste démocratique où la barbarie des marchés sera remplacée par une économie rationnelle planifiée démocratiquement afin de répondre aux besoins de la collectivité tout en respectant la planète.

    Cette lutte est par nature internationale, c’est pourquoi nous sommes organisés sur tous les continents à travers un parti mondial : Alternative Socialiste Internationale (ASI).

  • Portugal. Les travailleurs de l’enseignement se soulèvent contre la précarité

    Cent-cinquante mille travailleurs de l’éducation sont descendus dans les rues de Lisbonne pour manifester contre la précarité qui touche leur profession. L’apparition de nouveaux syndicats et de nouvelles méthodes de lutte vient troubler les eaux devenues stagnantes des syndicats traditionnels.

    Par Cristina, ASI-Portugal

    Le déclin de l’enseignement public et les défis auxquels les travailleurs sont confrontés chaque jour

    Au cours des cinq dernières décennies, le Portugal a connu une forte diminution de ses taux d’échec et d’abandon de scolarité : actuellement, la moitié des étudiants obtient un diplôme de l’enseignement supérieur. Il s’agit là d’un résultat louable, surtout si l’on songe aux taux d’analphabétisme ahurissants des années précédant la révolution de 1974-1975. Malheureusement, la part du budget allouée aux écoles publiques a également diminué au cours des trois dernières décennies, passant sous la barre des 5% du PIB en 2016, taux qui n’avait pas été aussi faible depuis 1995.

    Pas plus tard que l’année passée, les subventions de l’Etat à l’enseignement spécialisé ont été réduites sans réflexion, sans qu’un effort ne soit fait pour donner la priorité aux enfants en ayant le plus besoin. Avec un financement moindre et moins de soutien, il n’est pas étonnant que la plupart des écoles se plaignent du manque de ressources pour entretenir les bâtiments (de plus en plus froids et anciens) ou pour obtenir du matériel pédagogique et engager le personnel adéquat.

    Mais il n’y a pas que les moyens qui manquent : les écoles publiques sont clairement en sous-effectif ces dernières années. Il y a vingt ans, 6 000 jeunes motivés obtenaient chaque année leur diplôme d’enseignant. Aujourd’hui il ne sont plus que 1 500. Le vieillissement du corps enseignant est donc inéluctable : dans les écoles publiques, la moitié des enseignants ont plus de 50 ans. Une étude publiée par le Ministère de l’Education portant sur l’offre et la demande d’enseignants dans les écoles publiques à l’horizon 2030/2031 estime qu’il serait nécessaire d’embaucher 34 500 professionnels, particulièrement au sein des collèges (élèves de 10 à 15 ans) et ses lycées (élèves de 15 à 18 ans). Dans les circonstances actuelles, ces besoins ne risquent pas d’être satisfaits rapidement, ce qui signifie que des pénuries du personnel enseignant plus importantes sont à prévoir dans les prochaines années. À titre d’exemple, en 2021, seules trois personnes diplômées en physique et en chimie ont suivi une formation d’enseignants, alors que les besoins s’élèvent à 104 personnes. Des milliers d’élèves débutent donc chaque année scolaire sans enseignants, et donc sans cours. Pour faire face à cette situation chronique, le gouvernement du PS (Partido Socialista) a ouvert l’enseignement dans les écoles aux étudiants en éducation et à aux diplômés d’autres disciplines, ce qui induit directement une baisse de la qualité de l’enseignement public.

    Mais pourquoi si peu de gens veulent-ils devenir enseignants ? Durant les 16 premières années de sa carrière (en moyenne), un jeune enseignant ne dispose d’aucune stabilité ou sécurité professionnelle. D’une année à l’autre, il se verra affecté à différentes écoles, dans différentes régions (parfois à 300 km de distance), sans jamais savoir s’il sera au chômage à la rentrée suivante ou s’il bénéficiera d’une charge horaire suffisante pour gagner sa vie. Ce n’est qu’au terme de cette longue période qu’il pourra monter l’échelle d’une carrière stable dans l’enseignement public. Au sommet de cette échelle, l’âge moyen est de 60,7 ans, avec 38,6 années de service, tandis qu’au premier échelon, les enseignants ont un âge moyen de 45,4 ans et 15,7 années de service. Si, dans les écoles primaires (élèves de 6 à 10 ans), plus de 85 % des enseignants sont nommés, il n’en va pas de même dans les collèges et les lycées, où les enseignants ayant un contrat d’un an (ou moins) représentent près d’un quart du personnel. Et lorsqu’ils sont enfin nommés dans une école et obtiennent la stabilité dont ils rêvent, un goulot d’étranglement sous forme de quotas rigides bloque leur progression. Et il en va malheureusement de même pour tous les autres travailleurs de l’éducation, puisque la plupart des travailleurs de l’administration publique auraient besoin de 120 ans de service pour atteindre le sommet de leur carrière !

    Le peu d’engouement pour devenir enseignant pourrait également être dû aux classes surchargées et à l’extrême bureaucratie. Lorsque les cours sont terminés pour la journée, les enseignants sont contraints d’accomplir quotidiennement un flot ininterrompu de tâches bureaucratiques, à savoir remplir des formulaires et des documents, identifiés par des acronymes incompréhensibles enfilés les uns à la suite des autres, auxquels s’ajoutent entre autres des piles de plans, de listes, de dossiers, de justifications, de plans de redressement et de rapports. Sans parler des réunions des parents, des réunions de groupe et des réunions de département. Il est tout simplement impossible qu’un enseignant ne travaille que 35 heures par semaine, comme le prouve une enquête de la FENPROF, un syndicat enseignant, sur le temps de travail des enseignants de collège et de lycée, qui montre qu’ils travaillent en moyenne plus de 46 heures par semaine.

    Le collège et le lycée sont les niveaux les plus touchés par l’état de plus en plus dégradé de l’enseignement public et, incidemment, ceux où les taux d’échec scolaire et d’abandon tendent à être les plus élevés. Compte tenu des défaillances successives des écoles publiques, il n’est pas surprenant que certaines familles dont les revenus le permettent  préfèrent payer et inscrire leurs enfants dans des écoles privées, dont la fréquentation est en hausse : un cinquième des élèves les fréquentent, voire un quart au lycée. L’éducation différenciée en fonction des revenus et des biens est synonyme d’un accroissement des inégalités sociales.

    Il est urgent d’investir fortement dans les écoles publiques et de revoir le système de progression de carrière des  travailleurs de l’école ! La formation d’enseignant, et l’enseignement supérieur dans son ensemble, doivent être gratuits et subventionnés afin d’attirer de nouveaux enseignants et de les former selon les meilleures normes de qualité. L’État doit offrir des avantages attrayants et des contrats stables pour embaucher efficacement les enseignants en début de carrière, tout en réduisant le nombre d’élèves par classe et en améliorant l’éducation pour tous. Pour garantir cela, les travailleurs doivent prendre le contrôle de leurs écoles par le biais de commissions scolaires démocratiques, avec la participation des élèves, des familles et des communautés.

    La lutte des travailleurs de l’école s’emballe

    Au cours des derniers mois, le Portugal a assisté à l’une des plus grandes mobilisations de la dernière décennie, menée par les travailleurs de l’éducation, y compris les enseignants, les travailleurs sociaux, les techniciens spécialisés et d’autres membres du personnel scolaire. Elle a commencé en septembre dernier (2022), lorsque le Ministère de l’Éducation a proposé de modifier le modèle de recrutement des enseignants lors d’une phase de négociations avec les syndicats, en plaidant en faveur d’une gestion municipale et de contrats gérés directement par les directions d’école. La proposition a été mal accueillie et immédiatement contestée en septembre, puis en novembre, lors d’une seconde phase de négociations. La FENPROF (l’une des plus grandes fédérations syndicales d’enseignants, membre de la confédération syndicale CGTP dirigée par le parti communiste) a ainsi déclaré : “Nous défendons la primauté de l’affectation des enseignants par le biais du concours national de recrutement et de leur diplôme professionnel (calculé sur la base de l’ancienneté)”. Selon eux,  la municipalisation des écoles conduirait à une éducation à deux vitesses dans le pays. Rendre chaque municipalité responsable des budgets alloués aux établissements et de leur éventuelle privatisation ouvrirait la voie à un système éducatif plus inégalitaire, et à une précarisation des conditions de travail de tous les professionnels de l’éducation.

    La réforme proposée a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, déjà bien rempli par des années de conditions de travail misérables. Alors que grandissait la colère des travailleurs, leurs réclamations s’affirmaient :  suppression des quotas et de progression de carrière, régularisation des horaires de travail à 35 heures par semaine, réduction de la distance entre le domicile des travailleurs et l’école où ils sont placés, augmentation des salaires en fonction de l’inflation et  départ à la retraite anticipé. Sur la base de cette colère et de ces revendications, il devenait possible de mobiliser les travailleurs dans les rues, et ainsi montrer au gouvernement l’indignation du corps enseignant tout entier  face à l’exploitation et au manque de respect dont il est victime. Et cela aurait également renforcé la position des syndicats d’enseignants à la table des négociations, car le gouvernement, lui, ne cédait pas.

    Le mouvement

    Le 5 décembre, huit syndicats enseignants traditionnels, menés par la FENPROF, ont finalement appelé à une manifestation pour le 4 mars, un samedi. La grève n’était pas à l’ordre du jour pour ces syndicats puisque les négociations étaient toujours en cours, la direction de la FENPROF arguant que “le moment n’est pas propice”, une attitude conforme à la posture de “négociateur” qu’adopte habituellement la direction de la CGTP. Cette stratégie est une erreur, car ce qui est obtenu à la table des négociations est directement lié à l’équilibre des forces dans les rues et sur les lieux de travail. Les travailleurs doivent compter sur leur propre force et leur organisation, sans se contenter d’attendre des accords avec l’État capitaliste.

    Pendant ce temps, un ensemble de travailleurs de l’éducation cherchait un moyen plus combatif de lutter pour les intérêts de l’éducation publique. Un syndicat indépendant de travailleurs de l’éducation moins connu (ne faisant pas partie des confédérations syndicales, ni de la CGTP ni de l’UGT), “STOP” (Sindicato de Todos Os Profissionais da educação, syndicat de tous les travailleurs de l’éducation), a pris cette initiative en charge.

    STOP a vu le jour en 2018, sous la direction d’André Pestana, actif dans les luttes pour l’éducation depuis 2013 et critique à l’égard des dirigeants du FENPROF. Deux cent enseignants ont rédigé et signé un manifeste réclamant la création d’un un nouveau syndicat qui aurait “une manière différente de faire du syndicalisme et chez lequel le processus de prise de décision serait complètement démocratique et non partisan”.

    Bien qu’il soit relativement petit (représentant environ 1 300 travailleurs), STOP a appelé à des “actions de grève illimitées” à partir du 9 décembre, une nouvelle forme de lutte dans le paysage syndical portugais. En novembre, environ 2 000 enseignants ont déclaré soutenir ce modèle dans un sondage réalisé sur un blog consacré à l’éducation. Les travailleurs de l’éducation ont rejoint cette grève lors d’un mouvement massif et inattendu, entraînant la création de comités de grève démocratiques, la fermeture d’écoles et  l’organisation de manifestations devant les écoles pendant plusieurs jours d’affilée. Ces mouvements ont touché l’entièreté du pays, mais plus particulièrement les régions métropolitaines de Porto et de Lisbonne, ainsi que l’ Algarve. Concrétisant la solidarité par la lutte commune, STOP a lancé un appel à tous les travailleurs de l’école, et pas seulement aux enseignants.

    Cette grande mobilisation des travailleurs scolaires, ainsi que le peu d’ouverture du ministère à de nouveaux processus de négociation sur d’autres questions (liées notamment à la carrière des enseignants) ont mis sous pression les huit syndicats enseignants traditionnels. Ils ont eux aussi fini par appeler à une grève de 18 jours, c’est-à-dire un jour par région (distrito) du pays, à partir du 16 janvier, ainsi qu’à une manifestation en février. Le 17 décembre, une manifestation convoquée par STOP a rassemblé 20 000 travailleurs de l’éducation dans les rues. “Les enseignants qui se battent enseignent toujours” a été l’un des slogans les plus entendus tout au long de la manifestation qui les a menés jusqu’au parlement portugais. Si 20 000 personnes ont un temps semblé beaucoup, ce n’est rien comparé à la deuxième manifestation organisée par STOP le 14 janvier,  qui a rassemblé 100 000 personnes Des dizaines de milliers de travailleurs non syndiqués l’ont rejointe, inspirés par la manifestation précédente. Le désespoir du gouvernement était tel qu’il a eu recours à la police pour tenter d’empêcher les bus destinés à la manifestation d’atteindre Lisbonne en les arrêtant pour les fouiller, dans une tentative évidente de saboter la manifestation.

    Le gouvernement PS utilise la carotte des concessions et le bâton des services minimums

    En février, face à la force écrasante du mouvement des travailleurs, le Premier Ministre (PS) Antònio Costa a finalement été contraint de céder et de faire quelques concessions.

    Ont par exemple été obtenus : 1. le maintien du diplôme professionnel comme critère principal lors du concours national de recrutement qui fait office de processus de désignation dans les écoles (faisant ainsi reculer le gouvernement sur sa proposition d’embauche directe) ; 2. l’organisation plus fréquente (annuelle) du concours national de recrutement, tant pour le personnel nommé que temporaire, ce qui permettra de combler immédiatement les lacunes dues au départ à la retraite des enseignants plus âgés ; 3. la réduction de la distance entre le domicile de l’enseignant et l’école à laquelle ce dernier peut postuler ; 4. L’assouplissement des quotas qui restreignent l’évolution de carrière. Il est toutefois à noter qu’en dépit de ces concessions, le gouvernement n’a rien proposé  quant aux problèmes à long terme de l’enseignement public, et n’a pas non plus accédé aux principales demandes du mouvement.

    Le gouvernement a également demandé à la Cour d’imposer aux enseignants grévistes un “service minimum” à partir du 1er février, et ainsi forcer les travailleurs en grève à prester un certain nombre d’heures pendant l’action de grève. Mais en pratique, seules les actions de grève illimitées menées par STOP ont été visées, ce qui constitue une attaque directe à l’encontre d’un syndicat. Dans une déclaration, le Ministre de l’Éducation s’est justifié en invoquant “la durée et l’imprévisibilité des grèves menées par STOP ainsi que l’ensemble des conséquences pour les élèves, concernant leur protection, leur alimentation et leur soutien dans des contextes de vulnérabilité”. Dans une tentative évidente de monter les parents contre le mouvement enseignant, le monde médiatique dans son ensemble s’est exprimé dans les même termes, évoquant à chaque fois des « parents risquant de perdre leur emploi » et de « dommages irréparables pour les élèves ».

     Le service minimum dans les écoles, censé garantir les repas des élèves et la prise en charge des enfants ayant des besoins éducatifs spéciaux, A en réalité enchaîné tout le personnel scolaire à des horaires obligatoires, empêchant les écoles de fermer à nouveau et niant ainsi le droit de grève des travailleurs.

    Le gouvernement a également mis en doute la “légalité” des fonds de grève et a demandé au bureau du procureur général d’émettre un avis sur la question et à l’inspection générale de l’éducation et de la science d’enquêter sur le sujet  . Ces méthodes avaient été utilisées pour arrêter la grève des infirmières de 2018 et 2019, qui avaient été déclarées “illégales” pour avoir collecté des fonds par le biais du crowdfunding. La solidarité entre travailleurs de différents secteurs fait donc manifestement trembler l’ordre établi. Cette fois encore, le bureau du procureur général a qualifié d’illégale la grève de STOP.

    Le besoin d’unité

    En réponse à cette attaque contre le droit de grève, STOP a appelé à une nouvelle manifestation le 28 janvier, qui a elle aussi atteint près de 100.000 manifestants. La FENPROF et les autres syndicats traditionnels ont appelé à une manifestation le 11 février, rassemblant environ 150 000 personnes, ce qui montre la volonté de leurs membres de se battre et leur capacité de mobilisation. STOP n’a pas participé à l’organisation de cette manifestation, mais a appelé à la participation de ses membres. Le 25 février, STOP a organisé une autre très grande manifestation pour l’éducation publique. Enfin, le 4 mars, FENPROF a organisé une autre manifestation, divisée en deux villes, rassemblant 40 000 personnes à Lisbonne et 40 000 autres à Porto.

    Malgré les appels de STOP à s’unir en front commun, la lutte a continué d’avancer avec d’un côté une coalition de huit syndicats dirigée par la FENPROF et de l’autre côté STOP, en concurrence. Le fossé entre les deux syndicats est devenu particulièrement visible lors de la manifestation du 11 février, lorsque le dirigeant de STOP, André Pestana, a organisé un rassemblement parallèle qui, pendant le discours de Mário Nogueira, pointait du doigt le dirigeant du FENPROF, l’accusant d’avoir empêché STOP de monter sur scène pour prendre la parole.

    Un front uni de tous les syndicats appelant à des grèves aux mêmes dates  pourrait avoir un impact plus fort que l’approche disjointe actuelle. L’expansion des comités de grève démocratiques promues par STOP mènerait à la coordination des travailleurs de l’éducation et le front commun permettrait une implication démocratique maximale.

    Prochaines étapes

    Malgré la volonté toujours inébranlable de lutte des travailleurs de l’éducation, le mouvement est aujourd’hui plus dispersé qu’il ne l’était à son apogée. L’appel continu de STOP à des “actions de grève illimitées”, bien que motivant au départ, est devenu fatigant et dispersant, les travailleurs menant des actions de grève à des dates différentes dans des écoles différentes, le plus souvent de manière non coordonnée.

    Alors que la réaction du gouvernement commence à peser sur la lutte, les syndicats envisagent de nouvelles stratégies et approches. FENPROF a appelé à une nouvelle grève le 20 mars, visant particulièrement les heures supplémentaires, la charge de travail, la composante non enseignante et le dernier cours de la journée, mais aucune donnée ne permet de savoir combien d’enseignants ont rejoint le mouvement jusqu’à présent. De nouvelles grèves par région (distrito) sont également prévues entre le 17 avril et le 12 mai, ainsi qu’une grève nationale le 6 juin et une grève pour les examens finaux de l’année scolaire.

    Le 18 mars, une réunion nationale des commissions syndicales et de grève de STOP s’est tenue et a pris la décision de limiter la grève indéfinie dès le 16 avril et d’appeler dès lors à des action ponctuelles, locales et nationales, en fonction des besoins particuliers de chaque école, des régions et de l’ensemble des travailleurs de l’enseignement. Les problèmes les plus fréquemment rencontrés sont liés aux conditions de travail, à la violence et l’indiscipline rencontrées par le corps enseignant, à l’encadrement de l’enseignement spécialisé, à la pénurie de personnel, aux infrastructures amiantées et malsaines. Parmi les actions envisagées, STOP mentionne vouloir tester des actions locales d’une journée ou d’une matinée.  En outre le syndicat a encouragé, parmi d’autres propositions, à poursuivre les formes locales de lutte, telles que les camps, les veillées, les manifestations devant les écoles ou sur les ponts. Il a également suggéré d’accueillir les touristes avec des  affiches gênantes pour le Portugal rédigées en plusieurs langues.

    STOP appelle à une grève d’une semaine, du 24 au 28 avril, ainsi qu’à une manifestation le 25 avril (anniversaire de la Révolution des Oeillets de 1974 [qui a mené à la fin de la dictature de Salazar, NDTR]). Le slogan de cette action sera :  “Ils trouvent toujours de l’argent, sauf pour les travailleurs”. (“Só não há dinheiro para quem trabalha !”)., et son but est d’unir ceux qui ressentent la dégradation des services publics et la perte du pouvoir d’achat. L’appel à une grève nationale de l’éducation concentrée sur une semaine entière est prometteur, mais l’économie capitaliste ne pourra être réellement ébranlée sans unité, une grande mobilisation et une coordination importante. La collaboration au sein des écoles et entre les écoles donnerait aux  fermetures d’écoles un impact plus important et mettrait en évidence le pouvoir et la puissance de la classe ouvrière.

    Les luttes scolaires sont une source d’inspiration. Construisons une lutte commune vers la grève générale

    La révolte des travailleurs de l’éducation contre la précarité est commune à la majeure partie de la classe ouvrière, en particulier dans le contexte actuel de crise du coût de la vie et du logement.  La lutte commune de l’ensemble de la classe ouvrière est et reste le moyen le plus efficace de battre le gouvernement et la classe capitaliste et de récupérer les services publics. Les luttes des travailleurs de l’éducation devraient servir de pilier à un mouvement plus large qui doit viser à unir les différentes luttes en cours pour des salaires et des conditions de vie dignes en menant des actions de grève coordonnées par tous les syndicats et en conduisant à une grève générale efficace. Inspirons-nous des comités de grève démocratiques et des fonds de grève solidaires constitués dans le cadre des luttes scolaires pour promouvoir davantage l’engagement de tous les travailleurs en lutte, syndiqués ou non, pour organiser et coordonner démocratiquement les grèves et pour que le mouvement gagne en force et résiste à l’usure naturelle qu’une longue lutte peut engendrer.

  • Les capitalistes n’en ont jamais assez – Tract de 1er mai du PSL/LSP

    Soutenez la lutte du personnel de Delhaize – Leur combat, c’est aussi le nôtre !

    Dessin réalisé par Ximi pour l'édition d'avril de Lutte Socialiste

    Le patronat veut nous faire les poches à deux reprises : en augmentant les prix à la caisse et en faisant baisser le « coût » de notre travail, alors que c’est NOUS qui produisons les richesses ! Si la mise sous franchise passe chez Delhaize, d’autres patrons suivront la voie.

    Pour stopper ça – et les nombreuses attaques contre le droit de grève – nous avons besoin de tout le poids du mouvement des travailleur.euse.s ! Participez à la manifestation nationale de l’ensemble du secteur de la distribution le 10 mai et à la grève nationale de la distribution couplée à une manifestation interprofessionnelle le 22 mai en solidarité avec le personnel de Delhaize. Tou.te.s ensemble, nous pouvons vaincre !    

    Les patrons veulent une société où les emplois flexibles mal payés constituent la norme et où faire grève est plus difficile. C’est tout le contraire que nous voulons ! Le 1er mai ne doit pas seulement être un jour férié pour commémorer les luttes de la classe travailleuse des siècles passés. C’est aussi une journée de lutte pour les revendications urgentes dont nous avons besoin face à l’horreur du capitalisme du 21e siècle.  

    La classe travailleuse française nous montre la voie

    Partout, les salaires sont à la traine sur la cherté de la vie. Partout, les gouvernements tentent de s’en prendre à nouveau aux travailleur.euse.s et à leurs familles. Ici aussi, les partis de l’austérité se préparent pour de nouvelles attaques. La lutte en France est riche d’enseignements cruciaux.

    93 % de la population active s’oppose à la réforme des retraites. Pourtant, Macron a imposé sa loi de malheur. Un mouvement historique a vu le jour, rassemblant tous les secteurs en lutte. Et ce n’est pas fini. Tous les grands syndicats appellent à une mobilisation de masse ce 1er mai. Notre organisation sœur Alternative Socialiste Internationale (ASI) – France appelle à l’organisation de la « grève générale reconductible » avec des comités d’action et de grève anti-Macron pour transformer ce que veulent les travailleur.euse.s en force réelle !  

    Les années de pandémie ont illustré qui fait réellement tourner la société. Aujourd’hui, avec les actions « Robin des Bois » en France, la classe travailleuse a également montré un aperçu de ce à quoi pourrait ressembler une autre société. Les grévistes de l’énergie ont organisé la fourniture gratuite de gaz et d’électricité à travers le pays pour des écoles, des hôpitaux, des HLM, des centres sportifs publics et des associations. Ils et elles ont rétabli la distribution pour les personnes déconnectées pour défaut de paiement et offert un tarif réduit allant jusqu’à 60 % pour les petits commerçants. L’initiative et la mise en place de ces actions ont été décidées et coordonnées sur le lieu de travail. Voilà comment la richesse produite par les travailleur.euse.s peut être gérée de manière démocratique et socialement juste.

    Pour des coalitions de gauche et un impôt sur la fortune ! Mais sous quelles conditions ?  

    Le scandale des pensions des députés montre l’hypocrisie des partis de l’austérité. Celles et ceux qui veulent économiser sur tout n’hésitent pas à se servir pour eux-mêmes. Grâce aux élu.e.s du PTB, qui vivent avec l’équivalent du salaire moyen d’un.e travailleur.euse, cette hypocrisie est enfin combattue !

    En Wallonie et à Bruxelles, le PTB peut même devenir le deuxième parti et, en Flandre, il peut également faire un grand bond en avant. Avec des coalitions conclues avec le PS et Vooruit, le PTB pourrait obtenir plusieurs bourgmestres et échevins et, en Wallonie, la possibilité d’un gouvernement de gauche suscite beaucoup d’enthousiasme. Un tiers des Bruxellois.es et des Wallon.ne.s souhaitent que le PTB participe à un gouvernement. La perspective d’un gouvernement qui donnerait enfin une voix à la classe travailleuse est un grand pas en avant.

    Ce débat public doit être l’occasion de discuter au sein du mouvement des travailleur.euse.s du programme d’une telle coalition. Il devrait partir des besoins existants et ne pas se limiter à ce qui serait possible en respectant le carcan budgétaire. Si un tel gouvernement veut réellement appliquer son programme, la confrontation avec l’élite capitaliste est inévitable. Le mouvement des travailleur.euse.s doit s’y préparer. Belfius menace déjà d’assécher financièrement le gouvernement wallon si le PTB y rentre après 2024. Une telle asphyxie financière a été utilisée en Grèce à l’époque pour faire capituler Syriza. Le PTB semble vouloir calmer les esprits en faisant la concession de rester dans le cadre du système. Ce serait une erreur.

    Dans un tel scénario de grève du capital, la question de la nationalisation de l’ensemble du secteur financier sous contrôle de la collectivité doit être mise à l’ordre du jour, afin de mobiliser les financements nécessaires et de mettre fin à la spéculation. Les entreprises qui s’enfuient avec leurs capitaux devront être saisies par le mouvement des travailleur.euse.s. Une stratégie parlementaire et électorale qui ne nous prépare pas à affronter le capitalisme restera impuissante. Nous avons besoin d’une politique révolutionnaire. Voter pour le PTB est la meilleure option électorale. Mais la construction du PSL, un parti révolutionnaire, est absolument indispensable pour triompher !

    Stop au Vlaams Belang, stop à l’extrême droite ! Contre toute forme d’oppression – Pride is a protest !  

    Si nous n’y parvenons pas, l’extrême droite risque de parvenir à dévier la colère. Dans les sondages, le Vlaams Belang est d’ores et déjà le plus grand parti de Flandre. C’est un danger non seulement pour beaucoup de personnes LGBTQIA+ et de personnes issues de l’immigration, mais aussi pour l’ensemble de la classe travailleuse ! Pendant ce temps, leur discours « anti-woke », ainsi que celui de la NVA et d’autres conservateurs de droite, encourage l’intimidation et la violence LGBTQIA+phobe suivant la logique de « diviser pour régner ». Le meilleur antidote, c’est la lutte, l’organisation et un programme qui répond concrètement aux besoins sociaux.

    La Campagne ROSA organise des actions, des délégations et des campagnes « Pride is a protest » à Bruges, Bruxelles, Gand, Liège et Anvers dans les mois à venir ! Contactez-nous pour y participer !

    La lutte pour une alternative socialiste révolutionnaire, ça vous parle ?

    Rejoignez le PSL – Parti Socialiste de Lutte (Linkse Socialistische Partij en Flandre) et son organisation internationale, Alternative Socialiste Internationale (ASI)

    C’est évident : les crises du capitalisme menacent l’humanité et la planète. Plus que jamais, Marx et le socialisme révolutionnaire sont d’actualité. Mais comment transformer les idées en une force politique et sociale capable d’arracher un changement de société ?

    Rejoignez un parti qui en fait sa raison d’être. Contactez-nous, discutez avec un.e de nos membres et découvrez-nous en participant à nos activités et à nos réunions ! info@socialisme.be ou 0472436075 (Michael)

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  • [CGSP-ALR] L’attaque contre les Delhaizien.ne.s est une attaque contre l’ensemble du monde du travail !

    L’attaque contre les Delhaizien.ne.s est une attaque contre l’ensemble du monde du travail !

    Communiqué de presse de la CGSP ALR (Administrations locales et régionales) Bruxelles

    Le 7 mars dernier, la direction du groupe Delhaize a annoncé un plan qui vise à franchiser les 128 magasins du groupe en Belgique. Depuis, des milliers de travailleur.euse.s de l’enseigne ont entamé un combat exemplaire pour la sauvegarde de leurs emplois et de leurs conditions de travail.

    Malgré la propagande patronale et médiatique contre les travailleur.euse.s en lutte, ils et elles tiennent bon. La situation s’est pourtant aggravée ces dernières semaines avec des atteintes graves au droit de grève. La justice s’est effectivement rangée du côté de la direction de Delhaize et a approuvé, à la demande des patrons, l’envoi d’huissiers pour littéralement casser les piquets de grève. Prétextant le droit au travail, les patrons, aidés par la justice et les huissiers, ont dès lors mis tout en branle pour tuer la mobilisation en cours. Arrestations de travailleur.euse.s en grève, interdiction de piquet, interdiction d’action de sensibilisation des clients, un déni total des droits et libertés (art 23 de la Constitution) constituant un véritable recul de notre démocratie, … bref interdiction de toute forme d’expression de la colère sociale !

    Face à l’argument fallacieux du droit au travail qui s’opposerait au droit de grève, n’oublions jamais que celles et ceux qui se battent aujourd’hui pour un véritable droit au travail sont les travailleur.euse.s en lutte pour sauvegarder leurs emplois et la possibilité de mener une vie digne !

    La colère parmi la base syndicale et une partie de la population est importante. Force est de constater que ces attaques inédites sur le droit de grève n’ont pas suscité une réaction digne de ce nom dans l’ensemble du mouvement syndical ainsi qu’au sein de la population. Si nous acceptons aujourd’hui ce qu’il se passe chez Delhaize, sans réagir à la hauteur des enjeux, il est évident que demain, cela sera à notre tour de ne plus pouvoir user librement de notre droit à l’action collective et à la grève.

    Par cette motion la CGSP ALR Bruxelles appelle urgemment les instances syndicales de la FGTB, conformément aux discussions de notre Congrès Fédéral, à :

    • soutenir les prochains mots d’ordre de mobilisation du secteur du commerce en déposant un préavis de grève interprofessionnel en solidarité avec les travailleur.euse.s de Delhaize et pour défendre le droit de grève !
    • organiser des Assemblées interprofessionnelles régionales afin de réfléchir et organiser ensemble la réaction nécessaire aux attaques actuelles sur le droit de grève.
    • organiser des actions de blocage des magasins Delhaize à minima les samedis du mois de mai en appelant la population à nous y rejoindre.

    Bruxelles, le 28.04.2023

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