Category: Syndical

  • Emploi: Il faut un plan d’action!

    Avant les élections, Verhofstadt avait promis, dans son inimitable style «optimiste», de créer 200.000 emplois pendant cette législature. Le maigre résultat de la Conférence sur l’Emploi – seulement 60.000 emplois et uniquement par une baisse générale des charges salariales et l’instauration de chèques-services – montre le petit jeu de poker menteur de Verhofstadt. Il n’a plus un seul atout en mains.

    Stef Saliën

    3.000 emplois vont passer à la trappe à Ford Genk. La fermeture à Genk de la ligne de production du modèle Ford Transit provoquera de solides pertes d’emplois chez les sous-traitants. Rien que dans les entreprises de transport et de nettoyage qui travaillent pour l’usine de Genk, cela représente plus de 1.100 emplois! En outre l’avenir proche du siège de Genk n’est pas du tout assuré. Il n’y a, pour l’instant, qu’une promesse de la direction d’assembler une nouvelle version de la Ford Mondeo, un modèle qui est déjà vieux de 15 ans. Il sera décidé le 15 novembre de l’installation d’une nouvelle plate-forme de production nécessaire à la production d’autres modèles. En 1992, il y avait encore à Ford Genk 13.864 travailleurs. La CSC estime que l’an dernier plus de 5.000 emplois ont disparu au Limbourg.

    A la SNCB, Vinck, le patron des chemins de fer, veut supprimer 4.540 emplois fin 2005: cela concerne 1.098 travailleurs du service d’entretien de l’infrastructure des voies ferrées, 1.088 postes techniques du matériel roulant, 1.055 travailleurs aux guichets et dans les gares ainsi que 284 postes dans les divisions du logement et du nettoyage.

    A la Poste, Thys veut diminuer l’effectif de 8.000 unités. L’instauration du système Géoroute fait que le système de tri rend superflu 80% du personnel dans les équipes de nuit. Par la suppression de la deuxième tournée, le nombre de facteurs de tournées va également fortement baisser. Belgacom fait son entrée en bourse en février 2004. La privatisation conduira également à une perte massive d’emplois.

    La baisse des charges salariales décidée par le gouvernement n’est pas une solution pour la création d’emplois. La conséquence de la crise économique mondiale est la surcapacité de production qui pousse les capitalistes à réduire leur appareil de production et à fermer les usines. Les gouvernements en Europe ainsi que les directions syndicales ne font rien contre une telle situation.

    Nous avons besoin d’une direction syndicale qui ne se contente pas de négocier des plans sociaux, mais qui organise la lutte pour défendre chaque emploi. C’est dans de tels moments que la solidarité se construit à l’intérieur d’un secteur, d’une région et au besoin nationalement. L’arme de la grève n’est pas faite pour reporter la pression à plus tard, mais pour construire un rapport de force pour gagner. En bref: il faut développer un plan d’action de mobilisation.

    Une diminution radicale du temps de travail à 32 heures sans perte de salaire et avec embauche compensatoire est indispensable. Tout comme un arrêt du démantèlement des services publics. Les grandes entreprises qui menacent de licencier ou de fermer doivent être nationalisées. Le gouvernement britannique est mis sous pression par la population pour renationaliser l’exploitation du chemin de fer. Car les privatisations dans les années 90 ont été un désastre: baisse de la qualité du service, dégradation des conditions de travail, catastrophes ferroviaires.

    Luttez avec le MAS pour dégager un solide courant combatif dans les syndicats, pour défendre nos droits et nos emplois!

  • Ford Genk: Les débrayages contraignent la direction à lâcher du lest

    Les travailleurs de Ford et les délégations syndicales ont obtenu une première victoire. Deux mois plus tôt que prévu la direction a promis sur papier de produire la nouvelle version du modèle Mondeo à Genk. De plus, le 15 novembre une autre décision importante sera prise: la direction de Ford décidera si le modèle Galaxy et le nouveau modèle cross-over seront produits à Genk.

    Eric Byl

    Si ces promesses se concrétisent il y aura, au moins jusqu’en 2012, du boulot pour 5 à 6.000 personnes. Dans la négative, seuls 3.000 à 3.500 postes de travail seront conservés. Naturellement cette victoire n’est que très conditionnelle. Par expérience nous savons que les promesses des capitalistes ne sont pas des garanties, même si elles sont mises sur papier. De plus, rien n’est clair sur le sort des 3.000 travailleurs considérés comme excédentaires et sur les 730 postes de travail déjà perdus chez les sous-traitants.

    Néanmoins il est significatif qu’une multinationale comme Ford soit contrainte à faire des concessions. Sans le blocage pendant trois semaines des pièces importantes et des véhicules produits, Ford n’aurait jamais reculé. La multinationale ne l’admettra pas volontiers, mais le blocage de la production de la Ford Transit à Southampton (Grande-bretagne) faute de pièces en provenance de Genk et la perspective qu’il en aille de même en Turquie ont été décisifs.

    Voilà une première bonne réponse aux “bons conseils” des politiciens qui affirmaient qu’on ne peut rien faire contre une multinationale et qui conseillaient aux travailleurs de ne pas mettre en danger les 6.000 emplois restants par des actions trop musclées. Il savaient pourtant, comme tout le monde à l’entreprise, que les contrats avec les sous-traitants n’étaient valables que jusqu’en 2006 et que sans lutte c’était la fin de Ford Genk après 2006.

    Deux poids, deux mesures

    Celui qui ne paie pas ses factures recevra en général la visite d’un huissier. Si l’on ne paie pas sa voiture ou sa maison, on risque de voir ses biens saisis. Si on est chômeur, on est considéré, après quelque temps, comme un “profiteur social” à sanctionner. Si on n’a pas de papiers? On est considéré comme illégal, on peut être incarcéré et expulsé. Par contre si vous êtes patron et que vous ne respectez ni la convention ni d’autres accords, et que vous privez des milliers de familles de leur revenu, vos biens ne seront pas saisis, vous ne recevrez pas d’amende, vous ne serez pas incarcéré ni expulsé, mais le gouvernement vous offrira en prime une baisse des charges sociales.

    La réponse du gouvernement Verhofstadt face au non respect par Ford des promesses d’investissement est: “Il faut rendre le travail en équipe plus attractif”. Bref, Verhofstadt veut puiser dans les caisses de l’État pour donner aux entreprises, comme Ford, qui détruisent la santé des travailleurs en organisant le travail en équipes. Après cela on accusera les travailleurs de surconsommation médicale pour tenir le rythme de travail.

    Selon Verhofstadt, Ford a une bonne raison de ne pas tenir ses promesses: les coûts salariaux “trop élevés”. Il faut donc les baisser en diminuant les charges salariales. En tenant le même raisonnement, Verhofstadt a-t-il déjà considéré que beaucoup de gens trouvent que leur loyer est trop élevé et que donc une baisse des loyers s’impose?

    Au parlement, une opposition digne de ce nom aurait déjà attaqué le double langage de Verhofstadt. Mais on n’a rien vu de tout cela. Bien que le coût salarial dans une entreprise comme Ford ne représente que 7% des coûts totaux, l’opposition s’est jointe à la majorité pour entonner le refrain de la baisse des charges salariales. Cette rengaine revient sans cesse, alors que le chômage continue de progresser… malgré les baisses répétées des charges salariales.

    Lobbying et manoeuvres politiciennes

    Comme c’est dans le cas lors de toute restructuration importante, on a assisté chez Ford à des manoeuvres politiciennes. Cela n’a encore jamais sauvé une entreprise, mais tout comme à Renault et à la Sabena, l’appareil syndical à placé le lobbying politique au centre de sa stratégie. Une équipe ministérielle a spécialement été constituée pour traîner de ministère en ministère les délégations syndicales. Elles ont même rencontré le ministre-président de la Région flamande Bart Somers.

    Le soutien des politiciens s’est limité à faire de la figuration à la manifestation de soutien à Genk. Un concert gratuit de “solidarité avec les travailleurs” a été organisé par le candidat VLD, Herman Schuurmans, son collègue Chokri Mahassine, candidat SP.a, et sponsorisé par des multinationales “amies” telles que Coca-Cola, Maes Pils et Pizza Hut.

    Ceux qui ont assisté à ce concert à l’issue de la manif du 18/10 se sont probablement demandé ce que cette kermesse au boudin avait à voir avec la lutte des travailleurs de Ford. N’était-ce pas plutôt une campagne publicitaire pour les partis au gouvernement? Il n’est pas surprenant que beaucoup de travailleurs grommelaient: “Nous n’avons pas besoin de musique, mais d’un emploi.”

    A cette manif du 18 octobre, des délégations des partis “démocratiques” s’étaient faites remarquer parmi les nombreuses délégations d’entreprises comme Opel et VW. Avec tant de soutien politique on s’attendrait à plus qu’une déclaration d’impuissance. Cette “impuissance” feinte est un rideau de fumée pour cacher la complicité des partis traditionnels dans les restructurations qui tournent en drames sociaux. Nous ne connaissons évidemment pas tout ce qui se dit dans l’antichambre du pouvoir. Mais il n’est pas exclus que le gouvernement ait été mis au courant, depuis des mois, de la restructuration chez Ford, et n’ait rien dit, comme cela a été le cas pour Renault et la Sabena. La Sûreté de l’État a déclaré qu’elle savait depuis juin que des choses se préparaient chez Ford.

    De la société industrielle à l’économie de la connaissance?

    Dès l’annonce de la restructuration chez Ford, la machine de propagande bourgeoise s’est mise en marche. Des “spécialistes” zélés tels les professeurs Blampain et De Grauwe, ou Hilde Houben-Bertrand (gouverneur du Limbourg) ont claironné que l’ère industrielle en Belgique était révolue et qu’il fallait passer à la “société des services et de la connaissance.”

    Yves Desmet, rédacteur en chef du Morgen et zélé trafiquant d’opium du peuple, résume ainsi: “Il y 40 ans la Flandre était agraire, alors a commencé le cycle industriel qui est maintenant en train de se terminer. A l’époque de la mondialisation un glissement des activités industrielles vers des pays à bas salaires est inévitable. On peut freiner cette évolution mais pas l’empêcher. Conclusion: la lutte pour défendre ces emplois n’a aucun sens. Nous ferions mieux d’investir dans des secteurs d’avenir où nous sommes encore compétitifs avec le reste du monde”.

    Les Desmet, Blampain, De Grauwe… semblent ignorer que le secteur de la recherche, “orienté vers le futur,” à perdu 15.000 emplois l’an dernier. Cette “tendance” s’est prolongée en 2003 avec 22.000 emplois perdus. C’est logique. Quelle entreprise voudrait séparer à moyen terme sa recherche et sa production? Si on ne peut pas garder la production en Belgique, les services et la recherche suivront. Desmet & Co ne doivent pas se faire des illusions: le 21eme siècle n’est plus l’époque coloniale, les pays à bas salaires ont de plus en plus de travailleurs qualifiés. Bientôt Desmet, Blampain et co seront peut-être aussi superflus, pour autant qu’ils ne l’aient pas toujours été.

    Ce que Blampain, De Grauwe et Desmet clament est fortement exagéré. Leurs thèses sont basées sur l’évolution du passé. La délocalisation de secteurs entiers, surtout des secteurs intensifs en main-d’oeuvre, vers des pays à bas salaires a été la règle pendant des dizaines d’années. L’industrie du textile en a le plus souffert.

    Désindustrialisation et délocalisation

    La croissance du marché mondial et la division mondiale du travail ont surtout pesé sur l’industrie lourde. En sera-t-il ainsi au cours des prochaines années?

    La science et la technique ont été développées à un tel niveau que dans tous les secteurs les demandes de capitaux – pour développer de nouvelles machines de plus en plus performantes – sont telles que les coûts salariaux ne représentent plus qu’une faible partie des coûts de production. La présence d’un marché, d’une bonne infrastructure et la stabilité politique deviennent plus importants.

    La mondialisation n’est pas seulement un phénomène économique. C’est d’abord un régime politique – de flexibilité terrible, de libéralisation des anciens services, de démantèlement des contrats de travail, etc. – que les pouvoirs impérialistes veulent imposer au reste du monde. L’essentiel en est que tous les obstacles au marché doivent être éliminés, et cela “dans l’intérêt de tout le monde”. Verhofstadt à expliqué cette fable quand il prétendait qu’il ne fallait pas moins, mais plus de marché libéré de toute contrainte, afin de combattre la pauvreté dans le monde.

    En période de récession économique les obstacles au commerce et les mesures protectionnistes vont se multiplier. Mais en même temps il sera de plus en plus important d’avoir une présence industrielle dans chaque région cruciale du monde. Et l’Europe reste potentiellement le plus grand marché du monde.

    Après la loi Renault, une loi Ford?

    On avance un tas d’arguments pour ne pas construire un rapport de forces. La fermeture de Renault a accouché de la loi Renault qui “oblige” les capitalistes à annoncer d’avance quand ils veulent jeter les travailleurs sur le pavé. Entre-temps l’ancien parlementaire Ecolo, Vincent Decroly, a déposé en mars dernier, en collaboration avec le groupe de travail Démocratie économique d’Attac, une proposition de loi plus sévère. Le MAS ne rejette pas une telle loi, mais il ne faut pas avoir d’illusions. Non seulement parce que les lois peuvent être contournées par les patrons, mais aussi parce qu’elles reflètent inévitablement un rapport de forces à un moment donné. En général ce genre de loi est vidée de son contenu au moment où change le rapport de forces. Decroly et Attac devraient en être conscients.

  • Comment se battre contre des multinationales à l’époque de la mondialisation

    Ni la baisse des charges sociales, ni le lobbying politique, ni la loi Decroly n’ont incité Ford à faire des concessions. Des politiciens, des académiciens et des bureaucrates syndicaux en concluront qu’ils sont impuissants contre l’arbitraire des multinationales. De cette manière ils échappent à leur responsabilité et ne doivent rien faire de sérieux. Le MAS sera le dernier à nier le pouvoir des multinationales. Mais aucun pouvoir n’est invincible surtout quand la classe ouvrière est unie.

    Eric Byl

    On vient de le voir chez Ford. Bien que les travailleurs de Genk doivent se battre seuls – à l’exception d’un peu de soutien moral et une manif/concert à Genk – ils ont amené la direction de Ford à faire des concessions. Imaginons-nous ce qui aurait été possible si les appareils syndicaux avaient vraiment mobilisé dans d’autres entreprises et organisé des grèves de solidarité. Une grève régionale au Limbourg ou une grève de solidarité à Volvo à Gand (qui fait partie du groupe Ford) et dans les autres entreprises d’assemblage automobile auraient pu forger un rapport de forces, non seulement envers Ford, mais surtout vis-à-vis du gouvernement qui aurait été contraint d’agir plus efficacement contre la direction Ford, y compris à travers la menace de mise sous séquestre des biens de Ford en Belgique et de redémarrer l’entreprise sous sa propre gestion.

    Une telle attitude n’aurait évidemment pas été bien accueillie par les gouvernements des autres pays et par la classe capitaliste. Par contre, cela aurait suscité beaucoup de solidarité de la part des travailleurs sur le plan international.

    N’oublions pas que tout emploi qui disparaît coûte à la communauté environ 25.000 euros en cotisations sociales, en rentrées fiscales et en allocations de chômage. Le licenciement de 3.000 travailleurs chez Ford coûtera, si on compte les pertes d’emplois directes chez les sous-traitants, 100 millions d’euros la première année. Une étude de la Banque nationale a indiqué que 75% des emplois perdus ne sont jamais compensés. Bref: dans le système capitaliste les travailleurs doivent défendre pied à pied chaque emploi. Dans la société capitaliste la hausse de la productivité signifie plus de chômage, plus de pauvreté et plus de drames sociaux et pas plus de temps libre. Et cela aucune loi ne pourra le changer.

    Sous le socialisme l’augmentation de la productivité allégera la charge de travail pour tous. La surproduction sera éliminée par une diversification graduelle et une transformation vers une production socialement utile. On peut battre les multinationales, même à l’ère de la mondialisation. Si, dans le passé, un compromis était parfois possible en raison d’une conjoncture économique favorable, une troisième voie (entre capitalisme et socialisme) est aujourd’hui exclue. Des victoires à court terme et partielles sur les multinationales sont possibles à condition de forger un rapport de forces. Mais une période de longue durée de concessions systématiques par les multinationales est exclue. Cela exigera une rupture fondamentale et la construction d’une société socialiste.

  • Après une fermeture… Quelle reconversion?

    un témoignage d’André Fontaine, ouvrier chez Renault Vilvorde pendant 25 ans, licencié lors de la fermeture en 1997

    Pour faire avaler plus facilement la fermeture, Renault avait organisé un certain show. D’abord en installant dans les locaux de l’usine de Vilvorde un show-room avec des fauteuils, des téléphones et des piles de journaux à la disposition des travailleurs cherchant un nouvel emploi. De nombreux panneaux reprenaient des offres d’emplois… mais beaucoup d’annonces étaient périmées.

    Renault s’était aussi engagé à reprendre sur le site de Vilvorde 400 travailleurs (au départ c’était même 1.500!): 200 la première année, 100 la suivante, puis encore 100. A l’heure actuelle il n’y en a jamais eu 400. Ces travailleurs font de petits travaux annexes: petits travaux de tôlerie, montage d’échappements ou de pneus sur jantes. Ils ont subi une diminution de salaire, plus de flexibilité et perdu leurs primes.

    Enfin, il y avait la promesse d’aider les travailleurs à retrouver un emploi grâce à une formation. Il faut essayer d’imaginer le choc psychologique subi par des travailleurs occupés chez Renault depuis de nombreuses années et qui doivent tout d’un coup apprendre un nouveau métier. Dans quelle branche? Quel métier? Avec quel salaire? Dans quelles conditions? La plupart n’étaient pas préparés à cela.

    La sélection s’est faite sur base du dossier au service du personnel. Avec un certain arbitraire. Je ne dis pas que n’importe qui peut faire n’importe quoi. Mais ce n’est pas, par exemple, parce qu’on a été soudeur pendant des années que l’on n’est pas capable de faire autre chose. Ensuite certains ont été écartés de certaines formations en raison de critères physiques ou psychologiques. Certains ont été tout de suite orientés, sans la moindre formation, vers des emplois mal payés (plongeurs dans l’Horeca, par exemple) afin de les faire vite disparaître des statistiques et de "prouver" ainsi qu’on pouvait rapidement trouver un autre emploi.

    Avant d’entrer chez Renault, j’avais travaillé comme photograveur dans les arts graphiques. J’ai donc demandé à suivre une formation d’infographiste (mise en page sur ordinateur). J’ai passé une sélection. Puis on nous a envoyés suivre pendant quatre mois une formation dans le privé. Du côté francophone, nous étions une trentaine. On nous a alors dit que cela coûtait trop cher et on nous a incité à poursuivre cette formation au FOREm. Nous avons donc été dispersés: chacun a dû aller s’inscrire au FOREm près de son lieu de domicile. Certains, découragés, ont abandonné. Je me suis en fin de compte retrouvé le seul à poursuivre cette formation pendant deux ans.

    Aux cours organisés par le FOREm, j’ai été étonné de constater que j’étais le seul demandeur d’emploi. Les autres étaient des infographistes qui avaient un emploi et qui étaient envoyés au FOREm par leur employeur pour parfaire, à moindre frais, leur formation sur l’un ou l’autre point. Et en fait le programme de formation était organisé en fonction de leurs besoins. J’ai trouvé cela choquant. Ces travailleurs ont bien sûr droit à des compléments de formation mais leur employeur a les moyens de s’adresser à une firme privée. Le FOREm devrait s’adresser en priorité aux sans emplois. D’autant plus que la formation est aussi financée avec l’argent des chômeurs qui paient des impôts.

    Il était prévu, en fin de formation, de faire un stage de trois mois en entreprise. Mais le FOREm m’a signifié que j’étais trop âgé (plus de 50 ans), que le marché était saturé et que cela n’avait plus de sens de continuer ma formation. Je suppose que depuis le début ils avaient quand même dû lire ma date de naissance dans mon dossier!

    J’ai tenté en vain de terminer les cours à l’ORBEm (Bruxelles) mais le transfert de mon dossier du FOREm vers l’ORBEm (j’habite dans le Brabant wallon) a été refusé. On m’a donc traîné en longueur pendant des années pour finalement me laisser sur une voie de garage.

    Propos recueillis par Guy Van Sinoy

  • SNCB: Vinck sabre dans l’emploi

    Les négociations sont en cours entre Vinck et les syndicats. Le plan “Move 2007” est mis de côté et la discussion porte actuellement sur un plan social pour 2004-2005. Même si Vinck est d’accord pour abandonner la date ultimatum de 2007, dans les faits rien ne change dans les plans de restructuration. L’incident sur le nombre exact de licenciements en était une première indication.

    Correspondant

    Vinck parlait de 4.544 emplois en moins pour 2005. Les syndicats auraient compris 5.828. Depuis le mois de mai 2003 (quand le chiffre de 10.000 pertes d’emploi a été avancé pour la première fois) 615 cheminots sont partis en prépension. Si on ajoute ce chiffre aux 4.544 on arrive à plus de 5.000 vers 2005 (ou 10.000 vers 2007).

    La diminution du personnel sera la plus sensible dans l’entretien et dans les gares (3.000 des 4.500 emplois). Cela va sans aucun doute occasionner plus de retard dans les trains. Le 24 octobre on a été confronté au premier gel. Conséquence: une rupture de caténaires à Anvers qui a perturbé tout le trafic ferroviaire, des problèmes d’aiguillages à d’autres endroits, des interférences dans les signalisations et une autre rupture de caténaires. A l’avenir cela sera plutôt la règle que l’exception. Les réparations préventives ne seront plus faites, on réparera le matériel seulement en cas de casse. Il n’y pas assez de temps actuellement pour réparer et entretenir les trains. Presque chaque jour il y a des retards à cause des problèmes techniques. Est-ce qu’on attend une nouvelle catastrophe ferroviaire? Alors que le prix des billets augmentera de 3,6 % en 2004, le service diminue à vue d’oeil.

    Pour le personnel il n’y a aucune sécurité d’emploi. Il y a des négociations avec Mobistar pour racheter B-Telecom, une des seules activités rentables de la SNCB. Le nettoyage des trains et des bâtiments va être sous-traité. Est-ce que B-Cargo va devenir une société privée avec toutes les conséquences pour le personnel? Même en maintenant le même statut pour les cheminots c’est le personnel qui payera la facture. L’Union européenne voudrait introduire, avec la libéralisation du trafic ferroviaire, une augmentation de la durée des journées de travail et une diminution de la durée des temps de repos. Cela se paiera cash sur le plan de la sécurité.

    Pour beaucoup de politiciens flamands, la régionalisation est la solution pour la SNCB. Les régions peuvent depuis peu avancer l’argent pour accélérer vestir 375,8 millions d’euros dans le tunnel de liaison vers le port d’Anvers et 40,9 millions dans la gare de formation à Zeebrugge. Les investissements serviront les entreprises et non les voyageurs.

    Les privatisations et la régionalisation ne sont pas des solutions ni pour les travailleurs de la SNCB ni pour les voyageurs. Ceux-ci doivent avoir leur mot à dire et la possibilité de prendre des décisions concernant les transports publics. Nous devons lutter tous ensemble pour que nos services publics restent à la disposition de la population plutôt qu’à celle des entreprises.

  • Luttons pour un enseignement de qualité!

    Tous nos acquis en matière d’enseignement – comme les restaurants sociaux, les kots bon marché, la démocratie étudiante (il fut un temps où les étudiants avaient leur mot à dire sur le contenu des cours!) – proviennent de la période de la fin des années soixante.

    Simon Van Haeren

    En 1968, lorsque les étudiants de la faculté de Nanterre à Paris ont complètement paralysé l’université parce qu’ils ne voulaient pas devenir les futurs «cadres du capitalisme», le recteur a réagi en appelant la police. C’est l’étincelle qui mit le feu aux poudres. La lutte des classes a embrasé toute la société. Le résultat fut une grève générale phénoménale à laquelle participèrent 10 millions de travailleurs. La voie était libre pour une révolution socialiste, mais les staliniens et les sociaux-démocrates ont commis une trahison scandaleuse qui a permis à la bourgeoisie de reprendre le contrôle de la situation.

    S’il ne devait y avoir qu’une seule leçon à retenir de cette période, c’est que nous ne pouvons compter que sur nos propres forces pour défendre le droit à un enseignement pour tous.

    A certains endroits, les étudiants de gauche ont continué à défendre leurs droits avec succès jusque dans les années septante. Mais depuis la défaite de 1968, depuis qu’on a laissé passer la chance d’en finir définitivement avec le capitalisme, la politique a viré vers la droite et le vent a commencé à tourner en faveur de la bourgeoisie. La séparation rapide du PS et du SP d’avec leur base ouvrière après la chute du Mur en est une illustration. Aujourd’hui, ils luttent côte à côte avec les libéraux… pour les intérêts des patrons! Qu’est-ce qui nous attend à présent?

    L’Union européenne (UE) a inscrit depuis des années l’objectif de privatiser complètement le secteur public dans l’Accord Général sur le Commerce et les Services (AGCS). La privatisation de la SNCB, de La Poste, de Belgacom,… démontre que le gouvernement est effectivement en train de mettre en oeuvre les préceptes de l’AGCS.

    L’enseignement n’est rien d’autre qu’une marchandise pour l’Union européenne. Le financement public doit par conséquent être limité, car l’Union économique y voit une «distorsion de concurrence»! La fameuse Déclaration de Bologne y ajoute que «l’enseignement doit être davantage orienté vers le marché». Merci d’éclairer ainsi notre lanterne. La ministre Françoise Dupuis, qui prépare un décret pour appliquer les préceptes de Bologne en Communauté française, n’en continue pas moins de nier l’évidence.

    Les Pays-Bas ont été l’un des premiers pays à jeter le masque. On y a modifié la loi pour autoriser l’instauration de minervals astronomiques (jusqu’à 7000 euros). En Belgique, il y a une proposition de doubler les droits d’entrée dans les hautes écoles: cette mesure est suspendue jusqu’à présent car la loi ne le permet pas encore! Entre-temps, l’enseignement en général doit constamment faire face à un manque de moyens. Dans les hautes écoles, plus de la moitié des professeurs sont au bout du rouleau à cause du manque chronique de support matériel pour leur travail. C’est pourquoi ils vont descendre dans la rue le 19 novembre à Bruxelles. Les universités ont privatisé leurs restaurants et/ou augmenté le prix des repas. A la VUB, les loyers des kots ont été relevés, les infrastructures sportives vendues, etc.

    Pour pouvoir résister aux attaques du gouvernement, les étudiants doivent construire un rapport de force vis-à-vis des autorités universitaires.

    Rejoignez Résistance Internationale, Etudiants de Gauche Actifs et Actief Linkse Studenten!

  • Universités: Unité du personnel et des étudiants contre l’austérité

    L’organisation étudiante du MAS/LSP, Etudiants de Gauche Actifs/Actief Linkse Studenten (ALS/EGA), s’oppose dans toutes les universités aux privatisations et aux mesures d’austérité dans l’enseignement supérieur. A l’université de Gand, le nouveau restaurant du campus Ardoyen est en voie de privatisation. C’est un premier pas vers la privatisation de tous les restaurants universitaires de Gand. La CGSP a décidé de fermer un par un tous les restaurants universitaires pendant un jour. Plusieurs membres d’ALS étaient présents aux piquets de grève pour manifester leur soutien au personnel et pour expliquer aux étudiants les conséquences de la privatisation.

    Tim Joosen

    A la Vrije Universiteit Brussel (VUB), le prix des repas au restaurant universitaire a augmenté de 85% pour les boursiers et de 39% pour les non boursiers. En outre, les autorités universitaires envisagent la fermeture du restaurant du campus de Jette (faculté de médecine), ce qui pourrait signifier la fin de cette faculté car le restaurant est le seul point d’attraction pour les nouveaux étudiants et le campus est peu attractif pour les nouveaux étudiants car très éloigné des centres de commerce et de loisirs.

    ALS a pris les devants dans la campagne contre la fermeture et les hausses de prix et lutte pour le maintien de repas de qualité et à des prix abordables sur les deux campus. ALS compte participer aux prochaines élections pour le Conseil social (l’instance où se décide notamment la politique en matière de restaurants).

    La Katholiek Universiteit Leuven refuse d’endosser les pertes des restaurants universitaires semi-privatisés. La direction de l’unif a décidé de placer le personnel devant un dilemme scandaleux: soit la semaine des 45h avec la possibilité de ne prendre congé que pendant les périodes calmes, soit la fermeture pure et simple des restaurants. Les syndicats ont accepté la première proposition. La direction a réussi à dresser les étudiants et les membres du personnel les uns contre les autres afin d’empêcher les actions communes.

    EGA/ALS lutte dans toutes les universités pour un enseignement de qualité à la portée de la bourse de chacun. La fourniture de repas, de kots, de soins médicaux,… fait pour nous partie intégrante d’un enseignement supérieur démocratique. Les coupes budgétaires et les privatisations ont des effets négatifs tant pour le personnel (détèrioration des conditions de travail, baisse des salaires,…) que pour les étudiants (hausses de prix, baisse de la qualité,…). Nous appelons les membres du personnel des universités et les étudiants à lutter côte à côte pour défendre leurs intérêts communs.

  • Dockers: Ils résistent au détricotage de leur statut

    Le lundi 29 septembre, il y a eu une grève de 24h dans les ports néerlandais, belges et français. Des milliers de dockers se sont rassemblés à Rotterdam pour protester contre le “port package”. C’est le “texte de compromis” qui traduit la volonté européenne de libéraliser les ports.

    Micha Teller

    Avec la possibilité pour les entreprises de faire charger et décharger les navires par leur propre personnel sans devoir recourir aux dockers patentés, c’est le statut des dockers, coulé dans la Loi Major, qui est menacé. La menace se situe autant sur le plan social que sur celui des salaires, des conditions de travail et de la sécurité.

    Les craintes des travailleurs du port ne sont pas sans fondement. Les 15 dernières années ont vu le détricotage progressif des statuts reconnus dans tous les ports européens. Non seulement du fait de l’abrogation du monopole des dockers, mais aussi à cause du recours à toutes sortes de statuts précaires, au travail intérimaire, etc. Dans le port d’Anvers, un millier d’ouvriers ont déjà repris les tâches des dockers attitrés, mais avec un salaire inférieur de 30% à celui des dockers! Outre l’abrogation du monopole honnie par les dockers, le “texte de compromis” prévoit à terme la libéralisation des services portuaires.

    Il y a de quoi être en colère! Surtout lorsqu’on sait que la ville d’Anvers a énormément investi dans le port jusque dans les années nonante. Alors que les autorités communales veillaient à la bonne marche des services portuaires, la société qui gère le port empochait les profits. Dans le même temps, la ville d’Anvers accumulait une montagne de dettes, ce qui a accru la pression pour privatiser différents secteurs de l’entreprise portuaire. Nous en sommes là aujourd’hui et les travailleurs du port n’ont pas lieu de réjouir.

    2500 dockers sont partis d’Anvers pour aller à la manifestation de Rotterdam. 2 partis politiques étaient présents au point de départ: le MAS/LSP et le Vlaams Blok. La présence des gens du Vlaams Blok, parmi lesquels il y avait un administrateur du Port, suscitait des réactions négatives de la part des dockers. Le Blok avait beau utiliser des formules ronflantes dans ses tracts – un tract qui commençait par l’interpellation “camarades” – pour gagner la sympathie des dockers, ceux-ci n’étaient pas dupes de l’écart béant qui existe entre les paroles et les actes du Blok.

    Au Parlement européen, les élus du Blok n’ont rien fait pour s’opposer à la libéralisation du travail portuaire. A Anvers, sa représentation dans le Conseil communal lui permet de siéger dans la direction de l’entreprise portuaire. Le Blok dit aux dockers qu’il est de leur côté, mais il dit la même chose aux patrons du port!

    Les dockers ont vivement pris à partie les représentants du Vlaams Blok sur leur double langage. Tant qu’il y avait peu d’actions, le Blok pouvait dissimuler sa véritable nature derrière une rhétorique démagogique. Maintenant que les dockers passent à l’action pour de bon, ils distinguent plus clairement leurs alliés de leurs adversaires. Le tract du MAS/LSP suscitait en revanche nombre de réactions positives en dépit du fait que notre parti est encore petit et assez peu connu.

    Les actions ne doivent pas en rester là. Il faut un plan d’action qui s’oriente résolument vers l’unité avec les autres secteurs qui sont menacés par la libéralisation et la privatisation. C’est tous ensemble que nous devons lutter pour la sauvegarde de notre statut!

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