Category: Politique belge

  • Un clivage gauche-droite met la Vivaldi sous tension

    D’ici la fin de l’année, le gouvernement fédéral devra trouver des accords « pragmatiques » – c’est à dire acceptables pour les capitalistes – dans nombre de domaines sur le plan socio-économique : budget, plan de relance, réforme du marché du travail, réforme des pensions,… La rentrée politique sur des propositions des uns et des autres ressemble à une séance de musculation sur le clivage gauche-droite au sein de la coalition Vivaldi : PS-Groen-Ecolo d’une part et Open Vld-MR-Cd&V d’autre part.

    Par Boris (Bruxelles)

    La Vivaldi : le résultat de circonstances exceptionnelles

    La formation d’un gouvernement a été particulièrement difficile, notamment parce que la stabilité politique appartient au passé en raison de la fragmentation du paysage politique. Il a fallu un choc exceptionnel pour parvenir à la Vivaldi. La crise économique de 2020 et la pandémie ont mis à mal les dogmes néolibéraux. La sécurité sociale a servi de stabilisateur, l’orthodoxie budgétaire a été suspendue, les robinets d’argent ont été partiellement ouverts et la politique d’intervention de l’Etat dans l’économie a pris une place prépondérante.
    Ce contexte a permis au PS de conclure un accord avec les libéraux pour parvenir à une coalition fédérale hétéroclite à sept : la Vivaldi. Son accord de formation marque une rupture avec les gouvernements précédents qui, depuis les années 1980, ont toujours reposé sur une obsession croissante pour la réduction de la dette et du déficit budgétaire.

    Depuis lors, une reprise économique s’est installée et semble impressionnante. Mais elle survient après la pire contraction économique depuis la Seconde Guerre mondiale. Elle est alimentée par des interventions monétaires et fiscales massives dans les pays capitalistes avancés. Il s’agit d’un changement majeur dans les politiques économiques de la classe dirigeante.

    Des tensions croissantes

    Aujourd’hui, les tensions sont croissantes au sein du gouvernement. L’accueil du patronat et de la droite aux projets issus du PS, concernant la réforme des pensions et une ou deux des 25 propositions pour réformer le marché du travail, est glacial. « Chaque proposition du PS est d’avance suspecte pour certains », selon Wouter De Vriendt, chef de file de Groen à la Chambre. De l’autre côté, l’effort budgétaire fédéral de 3 milliards d’euros en 2022 réclamé par Eva de Bleeker (Open Vld), secrétaire d’Etat au Budget, est qualifié de « recettes de la suédoise » en référence aux mesures antisociales du gouvernement Michel.

    Alors que les libéraux veulent économiser 3 milliards d’euros, le PS réclame 1,2 milliard d’euros de mesures de relance supplémentaires pour atteindre 3,5 % du PIB d’investissements publics d’ici la fin de la législature. Les négociations sur la réforme du marché du travail et des pensions y seront liées.

    Le débat au sein du gouvernement fédéral porte principalement sur la question de savoir si les dépenses publiques doivent être réduites dès les premiers signes de reprise économique ou si les instabilités liées à cette reprise appellent à plus de prudence. Ce débat ne porte pas tant sur les conditions de vie des travailleurs et de leurs familles que sur la politique qui est la meilleure pour le capitalisme.

    Lorsque le PS préconise aujourd’hui des dépenses supplémentaires, il ne les associe pas à une action décisive pour trouver les moyens nécessaires auprès des plus riches. Cela signifie de simplement reporter, et non d’abandonner, le programme d’austérité que les partis de droite de la Vivaldi préconisent.

    A quoi devons-nous nous attendre ?

    Le gouvernement Vivaldi a conclu un premier accord sur la suppression progressive des mesures Covid. Celles-ci seront réduites au minimum. La dégressivité des allocations de chômage sera réintroduite et, au dernier trimestre de 2021, la réduction de la TVA à 6 % pour soutenir le secteur de l’hôtellerie sera finie. Toutes les dernières mesures de chômage temporaire et du simple droit de passerelle pour les indépendants prendront fin au 1er janvier prochain.

    La droite a obtenu que le budget de la prolongation des mesures Covid soit limité à 90 millions d’euros pour le trimestre à venir, onze fois moins qu’au précédent. En contrepartie, le PS a obtenu une bien maigre aide mensuelle de 25 euros pour les bénéficiaires d’une forme de revenu d’intégration (CPAS, Grapa, allocation pour personnes handicapées). Une aumône alors que les revenus les plus modestes subissent de plein fouet l’augmentation des prix.

    Les accords « pragmatiques » devront inclure certaines concessions sociales. Le retour aux attaques brutales contre la sécurité sociale ou aux provocations frontales contre le mouvement ouvrier ne sera peut-être pas immédiat. Cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas de mesures antisociales à l’ordre du jour : flexibilisation du marché du travail, facilitation des licenciements, mesures contre les chômeurs et les malades de longue durée. De plus, le gouvernement De Croo n’a pas l’intention de revenir sur les contre-réformes antisociales du gouvernement Michel.

    Les liens entre PS-Vooruit et les dirigeants de la FGTB d’une part, et entre le CD&V et le sommet de l’ACV d’autre part seront utilisés pour tenter de maintenir la paix sociale. Certains travailleurs peuvent éprouver un soulagement relatif, surtout maintenant que le souvenir du gouvernement Michel est encore si vif. D’autres se concentrent principalement sur les prochaines élections, en espérant qu’une nouvelle croissance électorale du PTB puisse offrir une porte de sortie.

    Une perspective de lutte

    La classe ouvrière n’a pas le luxe d’attendre. Une stratégie est nécessaire pour imposer des progrès significatifs aux travailleurs et à leurs familles.

    Nous ne devons pas partir de ce qui est acceptable pour les capitalistes, quand bien même une partie de l’establishment politique préconise des mesures sociales et les met même en œuvre ici et là. Il suffit de penser à la réduction de la TVA sur l’énergie en Espagne. Les impôts antisociaux qui ne dépendent pas du revenu mais de la consommation doivent en effet être supprimés. Mais il faut aller plus loin : nous voulons une énergie abordable qui soit également respectueuse du climat. La régulation du marché ne nous permettra pas d’y parvenir : l’ensemble du secteur énergétique doit être aux mains des pouvoirs publics. Ce n’est qu’alors que nous pourrons faire face aux défis climatiques et à l’augmentation des prix.

    Notre point de départ doit être les besoins et les revendications de la classe ouvrière : des emplois décents avec de bons salaires, des logements abordables, des soins de santé et un enseignement gratuits et de qualité, le respect de l’environnement… Toutes ces questions affrontent directement les intérêts du capital. Et quand une réforme nous permet d’avancer, les capitalistes font tout pour revenir dessus. Il nous faut un changement de société pour pérenniser nos conquêtes sociales.

    Nous n’avons pas d’autre choix que de nous battre. Après des années d’austérité et dans un contexte de crise écologique et sociale, nous devons augmenter drastiquement les moyens consacrés à nos conditions de vie et de travail. Pour obtenir un changement significatif et éviter de devoir payer la facture tôt ou tard, nous avons besoin d’un programme ambitieux de mesures socialistes. Les patrons ne nous cèderont rien gratuitement : nous devrons les exproprier pour prendre en charge, avec la communauté, la gestion et le contrôle de la production.

    Un plan radical d’investissement public est nécessaire pour répondre aux besoins sociaux et environnementaux. Cela doit aller de pair avec le refus de rembourser les dettes publiques, sauf en cas de nécessité avérée. La nationalisation des secteurs clés sous le contrôle et la gestion des travailleurs permettrait une planification démocratique de l’économie dans la perspective d’une transformation socialiste de la société.

  • Nos factures vont crever le plafond… L’énergie doit devenir un bien public !

    Les prix du gaz et de l’électricité s’envolent. Un ménage moyen paie désormais 1.609 euros par an pour le gaz, contre 824 euros il y a un an (et 1.031 euros en 2019). C’est en Wallonie que la facture est la plus salée : 1. 760 euros par an. La facture annuelle d’électricité est passée de 891 euros à 1.014 euros depuis 2019. Ce sont les chiffres du régulateur de l’énergie, la Creg, qui suit les offres des différents fournisseurs d’énergie. L’enchevêtrement des entreprises et des tarifs rend difficile la comparaison de chiffres exacts. Ce qui est clair, c’est que nous payons beaucoup plus cher qu’avant, et il était déjà difficile de s’en sortir. Les Gilets jaunes pourraient bien faire leur retour d’une manière ou d’une autre.

    La hausse des prix est attribuée au stockage limité du gaz en Europe, à l’augmentation de la demande due à la reprise économique, à l’approvisionnement plus limité en provenance de Russie (qui fait pression sur l’autorisation du gazoduc Nord Stream 2 vers l’Allemagne) et aux mesures environnementales, notamment les taxes sur le CO2 appliquées au gaz. Si vous laissez la politique climatique aux décideurs politiques traditionnels, la facture sera répercutée sur la population laborieuse plutôt que sur les multinationales polluantes et leurs actionnaires.

    Une grande partie de notre facture énergétique est constituée de taxes et d’accises : pour l’électricité, cela représente 45%. Nous payons 21% de TVA sur l’énergie comme s’il s’agissait d’un produit de luxe. Pour réduire l’impact de la hausse des prix, le gouvernement espagnol a déjà décidé de réduire la TVA de 21% à 10%. En France, il existe un chèque énergie de 150 euros pour environ 6 millions de personnes. En Belgique, la ministre de l’Énergie Tinne Van der Straeten (Groen) veut étendre le tarif social de l’énergie : un tarif fixe pour près d’un million de familles à faibles revenus. La Commission européenne a rapidement annoncé que des directives seraient publiées pour déterminer les mesures que les États membres sont autorisés à prendre. Cependant, garder les prix sous contrôle ou faire quelque chose pour les 3 millions d’Européens qui ne peuvent pas se permettre de payer leur chauffage n’est pas une priorité pour la Commission européenne.

    Le gouvernement Vivaldi avait promis en septembre 2020 que les factures d’énergie n’augmenteraient pas. Les politiciens attribuent la rupture de cette promesse à l’évolution du marché, à laquelle ils ne peuvent rien. C’est tout de même très problématique qu’un élément aussi important que l’énergie soit laissé aux aléas du marché ! L’absence de possibilités de planification entraîne des prix inabordables. Il est scandaleux que le manque d’investissements dans la transition énergétique soit exploité pour imposer toutes sortes de taxes environnementales au consommateur. Mike Writh, le PDG de Chevron, a admis dans une interview accordée à Bloomberg que les multinationales de l’énergie disposent de suffisamment de ressources pour investir. Pourquoi n’est-ce pas le cas ? « Le marché boursier nous envoie le signal que nous ne devrions pas le faire », a-t-il déclaré. Réaliser des profits plus élevés à court terme est plus intéressant pour ces actionnaires.

    L’ensemble du secteur de l’énergie doit être placé dans les mains de la collectivité afin que l’accent ne soit pas mis sur les profits d’un petit groupe de capitalistes, mais sur la satisfaction des besoins de la population. L’énergie est trop importante pour l’abandonner à la loi profit. Elle doit être placée dans des mains du secteur public sous la gestion et le contrôle démocratiques du personnel du secteur et de la collectivité, afin de permettre une planification démocratique. Cela permettrait d’avoir une facture abordable, mais aussi de disposer des investissements nécessaires à la transition écologique.

  • [PHOTOS] Manifestation WE ARE BELGIUM TOO pour la régularisation des sans-papiers

    Photo : James

    Nous étions 3000 hier dans les rues de Bruxelles pour réclamer la régularisation des sans-papiers à l’appel de la Coordination des sans-papiers et de multiples organisations, notamment syndicales !

    Le combat des sans-papiers contre les conditions de vie désastreuses auxquelles les condamne le statut d’illégaux ne connaît pas de répit. En 2020, ils ont été les premiers à sortir la lutte sociale du confinement. Les occupations politiques ont imposé leur combat au-devant du débat public. Mais la politique inhumaine mené par le gouvernement, a poussé les sans-papiers à entamer une grève de la faim. Face à ces circonstances dramatiques et aux mobilisations en soutien aux grévistes, Sammy Mahdi (CD&V) n’a cessé de répéter qu’il n’y aurait pas de régularisation collective ou d’exception. Finalement, un « accord » a été trouvé reposant uniquement sur des procédures individuelles, sans aucune certitude de régularisation.

    Le PSL/LSP continue à participer à la construction du mouvement tout en soulignant qu’une réelle victoire exige d’élaborer un plan d’action national qui se lie aux autres mouvements des jeunes et des travailleur.euse.s.

     

    • Régularisation immédiate et permanente de toutes les personnes sans-papiers!
    • Jamais plus d’impunité policière ! Stop à la criminalisation des sans-papiers !
    • Des solutions sociales pour les problèmes sociaux: il faut des investissements publics massifs dans l’enseignement, les soins de santé, les logements sociaux et la création d’emplois décents.
    • Pour un salaire minimum de 14€/h pour toutes et tous. Répartissons le travail disponible en commençant par la semaine des 30h sans perte de salaire, avec embauche compensatoire et diminution de la charge de travail.
    • Malcolm X a dit : “Il n’y a pas de capitalisme sans racisme”. Renversons le système capitaliste, un système d’exploitation économique qui sacrifie les intérêts de la majorité pour les profits d’une infime élite. Pour un monde socialiste, respectueux de notre environnement qui met fin aux guerres, à la misère et à l’exploitation !

    Photos de James et Els :

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  • Réforme du Code pénal en matière de violence sexuelle : un mieux ?

    Avec une législation qui date de 1867, il est plus que temps de réformer le Code pénal en matière de violence sexuelle. Le ministre de la Justice Van Quickenborne (Open VLD) en collaboration avec la Secrétaire d’État à l’Égalité des genres Sarah Schlitz (Ecolo) ont travaillé sur un projet de loi ayant pour but de moderniser la terminologie, lever une série d’ambiguïtés législatives et de remédier aux sanctions faibles. Il comporte deux volets : agressions sexuelles et prostitution.

    Par Emily (Namur)

    Culture du viol : restreinte ou renforcée ?

    On le sait, à peine 10% des victimes de viol osent porter plainte et plus de la moitié des affaires sont classées sans suite. Seuls 4% des plaintes aboutissent à une condamnation. De plus, 91% des victimes ayant été à la police soulignent leur mauvaise prise en charge (découragées à porter plainte, minimisation des faits, culpabilisation, etc.). En somme, le victim blaming est très présent dans les commissariats et les tribunaux, comme ailleurs.

    L’inceste fait son entrée dans le Code pénal. Cependant, d’une part, la définition retenue ne concerne que les mineurs et, d’autre part, la victime, en plus de prouver l’agression, devra prouver que l’agresseur a intentionnellement abusé de sa position de confiance ou d’autorité. Comment? Cela reste sans réponse.

    De plus, dans la note accompagnant le projet de loi, le ministre soulève l’importance de lutter contre les fausses accusations (elles sont extrêmement rares), mais ne dit mot de la nécessité d’améliorer le suivi des victimes, en ce compris au niveau judiciaire.
    Le projet de réforme sort la prostitution du Code pénal. Il prévoit également la légalisation de la publicité et du proxénétisme, sauf s’il est possible de prouver que des profits “anormaux” ont été réalisés (sans que ce terme soit défini). Les associations de lutte contre la traite d’êtres humains s’inquiètent d’une augmentation de la criminalité comme cela a été constaté dans les pays ayant adopté une législation similaire (Allemagne, Pays-Bas).

    Le projet de loi assimile aussi la prostitution à “une mission de service public” dans le cadre d’Éros center. L’État semble opter pour un renflouement de ses caisses par la marchandisation la plus absolue du corps des femmes…

  • Débat sur la gratuité des transports en commun : mobilisons-nous pour en faire une réalité

    Le PS défend la nécessité d’un « électrochoc » dans la crise climatique, il en a assurément créé un dans les médias cette fin septembre… Dans les pages du Soir, le président Paul Magnette a défendu à nouveau des investissements d’ampleur et, chose neuve, la gratuité totale des transports en commun.

    Par Nicolas Croes

    Il faut dire que le PS a bien besoin d’un électrochoc qui attire l’attention de l’opinion… Dans le sondage RTL-Le Soir-HLN-VTM publié le 17 septembre dernier, le parti de Paul et d’Elio était à 21,4% des intentions de vote en Wallonie (4,7% de moins qu’aux élections de mai 2019), talonné par le MR à 20,3% et surtout par le PTB à 18,7%. A Bruxelles, ECOLO, PS et MR sont dans un mouchoir de poche (avec respectivement 19,1%, 18,6% et 18,5%) avec le PTB en embuscade à 15,1%. Le PS a tout intérêt à bander ses muscles et à jouer à l’opposition au sein du gouvernement, rôle qu’il a toujours affectionné ces dernières décennies avant de plier « à cause des libéraux », « à cause des partis flamands », « à cause de l’Europe ». Mais si le PTB dispose d’un tel soutien électoral, c’est justement parce que ça ne fonctionne plus si bien.

    Les temps changent

    Faisant référence à la suspension des normes budgétaire du Traité de Maastricht, Magnette explique : « Le carcan européen épouvantable est suspendu, il faut se battre pour qu’il ne revienne pas. Aujourd’hui, on peut investir massivement. À la limite, le vrai défi c’est de trouver les ressources humaines pour tenir le rythme des investissements. En Wallonie pour arriver à produire les logements, à rénover, aménager les berges, planter des haies, on a presque besoin d’une mobilisation à la Roosevelt. » Un espace s’est effectivement dégagé pour des investissements à la suite de la crise sanitaire et de la crise économique, pour tenter de sauver le capitalisme de lui-même. Qui payera la facture de ces investissements ? Le PS parle encore de la lutte contre la fraude fiscale, prétexte qui par le passé a toujours servi de très inoffensive pour des attaques dures contre la sécurité sociale, les services publics,…

    Comme mesure concrète, Magnette défend la gratuité des transports en commun en se basant sur la réduction de 70 % du tarif TEC pour les jeunes de 18 à 24 ans entrée en vigueur ce 1er septembre. Il annonce du reste une mesure similaire est en préparation pour les Wallons de plus de 65 ans. S’il ne dit rien pour le reste de la population, il parle de suite de la SNCB : la gratuité du rail signifie qu’il y a « 700 millions à récupérer à la SNCB, on peut les trouver » avant de préciser de suite que limiter la mesure aux moins de 24 ans et aux plus de 65 ans ne coûterait que 150 millions.

    Le PS est le champion des promesses non tenues, on le sait. Le Soir rappelait d’ailleurs que Magnette avait en son temps appelé à la gratuité des repas scolaires, ou défendu le retour de la pension à 65 ans. La meilleure manière de voir s’il est sérieux cette fois-ci, c’est de faire vivre la revendication de la gratuité des transports en commun et un refinancement public massif des transports en commun avec un plan d’action concret unissant usagers et personnel des TEC, de la STIB, de De Lijn et de la SNCB. Les syndicats pourraient dans un premier temps prendre l’initiative d’organiser des manifestations locales développant un élan vers une manifestation nationale autour de la tenue de la conférence de l’ONU sur le climat de novembre prochain.

    Une telle campagne active pourrait avoir un succès dans tout le pays, la popularité de la gratuité des transports en commun et son intérêt dans la lutte contre la pollution ne connaissent pas de frontière régionale. Et cela serait aussi l’occasion de mettre à mal le Vlaams Belang et la N-VA.

  • Manifestation du 24/09. Renforcer le syndicalisme de combat pour arracher de meilleurs salaires et allocations

    Tout augmente, sauf nos salaires!

    Les prix de l’énergie flambent. Le gaz naturel coûte presque 50% de plus qu’il y a un an : plus de 130 euros supplémentaires sur la facture annuelle. L’électricité coûte 17% de plus qu’il y a un an et dépasse son record historique. Le carburant a augmenté de 15% en un an. Pain, céréales, logement,… à l’exception d’un pic en 2017, le coût de la vie n’avait pas augmenté ainsi depuis 10 ans. En août, l’inflation était de 2,73% en Belgique par rapport au mois d’août précédent.

    Tract du PSL/LSP // Tract en version PDF

    Et nos salaires ? Ils ne suivent pas ! Les salaires pour un premier emploi sont même 2,4% plus bas qu’en 2019, avant la crise COVID ! Dans le secteur bancaire, on commence même avec 3,7 % de moins qu’avant.

    Au printemps, nous sommes entrés en action et partis en grève contre la norme salariale scandaleuse de 0,4% d’augmentation au-delà de l’indexation pour cette année et la suivante, un diktat patronal imposé par leurs serviteurs au gouvernement. Mais l’indexation des salaires ne suit pas l’augmentation réelle du coût de la vie. Ainsi, l’augmentation prévue par « l’indice santé lissé » n’est que de 2,3% pour une inflation de 2,73% et même de 2,88% pour le quart des familles les plus pauvres (l’énergie et le loyer pèsent beaucoup plus lourd dans leur budget).

    Ce sont les gouvernements Dehaene I et II (chrétiens-démocrates et sociaux-démocrates) qui ont introduit l’indice santé (1994) qui a retiré le tabac, l’alcool et les carburants du panier de produits de référence afin d’en amoindrir l’effet ainsi que la loi sur la norme salariale (1996). L’indice a encore été affaibli par la suite avec l’introduction de « l’indice santé lissé » et diverses manipulations du panier de référence. Le prix de l’électricité n’intervient que pour environ 3% dans cet indice des prix et le logement de 17% ! Quant à la loi sur les salaires, la conclusion honteuse du dernier Accord interprofessionnel a encore illustré à quel point il s’agit d’une camisole de force à l’avantage exclusif des patrons.

    Pour un syndicalisme de combat !

    La FGTB demande une « révision en profondeur de la loi ». Le projet de loi défendu par le PTB et Marc Gobelet juste avant son décès propose une norme salariale indicative plutôt que contraignante. Mais même cela, alors que c’est largement insuffisant, exigera une bataille de grande envergure.

    Mais si on se bat, on peut gagner. Les soins de santé ont récemment reçu plus de moyens. C’est encore bien trop peu au regard des défis à relever après des décennies de sous-financement, mais ce pas en avant a été obtenu par une lutte dans laquelle le réseau d’action militant La Santé en Lutte a joué un rôle crucial. En 2018, le projet de pensions à points du gouvernement Michel a été coulé par une manifestation de masse – 80.000 personnes – préparée par la diffusion du « Journal des pensions ». Plus récemment, à Gand, le salaire minimum de 14 euros de l’heure a été arraché, y compris pour le personnel des sous-traitants, grâce au travail de la délégation CGSP qui a utilisé la pétition nationale de la FGTB pour populariser la revendication, consolider et élargir le noyau militant, chercher des alliés et préparer diverses actions jusqu’à une grève réussie le 9 mars 2020.

    Il nous faut un plan d’action qui repose sur une dynamique similaire : qui cherche à construire progressivement un rapport de force et non à relâcher la pression de la base. Des assemblées générales ouvertes dans chaque région pourraient servir à élaborer des revendications partant de ce dont nous avons besoin et à définir un plan d’action. Il faudra d’autres manifestations nationales et des journées de grèves régionales et nationales, mais nous ne devons certainement pas négliger l’impact sur les collègues moins engagés d’actions locales devant des entreprises, dans des zonings industriels, sur des places publiques,… Les militants FGTB seront peut-être seuls au début, mais s’ils démontrent à quel point ils sont sérieux et déterminés dans des actes qui ont une perspective, les autres vont devoir suivre.

    Avec l’organisation d’une pareille lutte allant crescendo, il sera possible de balancer la loi de 1996 à sa place : à la poubelle ! Nous pourrons même aller beaucoup plus loin : il faut en finir avec le statut de cohabitant et assurer l’individualisation de toutes les allocations sociales, au-delà du seuil de pauvreté ; imposer un salaire minimum à 14€ de l’heure ; restaurer complètement le mécanisme d’indexation et assurer qu’il représente réellement le coût de la vie ; nationaliser le secteur de l’énergie sous contrôle et gestion démocratiques des travailleurs et des usagers ; etc.

    Faute de s’engager sérieusement dans la lutte par excès de prudence ou manque de confiance, le mouvement ouvrier risquerait de perdre encore plus. La condamnation récente des 17 syndicalistes FGTB à Liège est à ce titre un dangereux avertissement. Le capitalisme est aujourd’hui en crise dans tous les domaines, nous n’avons pas d’autre choix que de nous battre pour les intérêts de celles et ceux qui font tout tourner : les travailleurs. Il est grand temps qu’ils prennent le monde en main et assurent que l’économie ne fonctionne plus sous la dictature du marché, mais dans le cadre d’une économie socialiste démocratiquement planifiée.

  • Témoignage. Le drame des inondations atténué par une extraordinaire solidarité

    Photo : Wikimedia Commons

    41 personnes ont perdu la vie en Belgique au cours des inondations de cet été. Plus de 50.000 foyers ont été sinistrés. Nous avons tous en tête les images dramatiques de la montée des eaux, de la force du courant dans les rues inondées, de l’effondrement de certains bâtiments… Mais nous retenons aussi l’esprit d’initiative solidaire de la population.

    Partout, des voisins ont prêté leurs pompes pour vider les caves et se sont organisés pour bloquer les soupiraux de leurs rues tandis que les propositions d’hébergement et d’aide ont foisonné sur les réseaux sociaux. La réponse de la population ordinaire a été très impressionnante : de nombreux foyers se sont transformés en « centres de crise » pour héberger des dizaines de personnes. Des agriculteurs ont amené leurs tracteurs, des ouvriers du bâtiment ont acheminé des engins de génie civil… D’autres des canots à moteur ou autres engins flottants. Cette solidarité n’a pas cessé au lendemain du drame. Nous en avons discuté avec Clément, une personne parmi les milliers d’autres venue en aide aux sinistrés.

    « C’est peu dire que nous avons tous été profondément choqués par les images sur les réseaux sociaux et dans les médias. Avant même d’avoir fini de ranger ce qu’on avait mis en hauteur face au risque d’inondation, nous avons été gagnés par un sentiment d’urgence pour aller porter assistance dans les zones qui avaient eu moins de chance.

    « Dès le samedi, le surlendemain, nous nous sommes rendus sur place, sans trop savoir quoi faire ni comment. On était très nombreux dans ce cas, au point qu’il était très difficile de se garer à proximité des points d’entrée dans les zones sinistrées.

    « Sur place, nous avons d’abord vu les services communaux à pied d’œuvre qui déblayaient le plus gros, les axes routiers,… Plus loin dans la zone, on a tout de suite trouvé du travail, ce n’est pas ce qui manquait. Il n’est pas exact de dire que la police et les pompiers n’étaient pas présents. Ils étaient là, mais noyés dans la masse des personnes venues aider.

    « La solidarité s’est organisée relativement spontanément. À côté du déblayage, on a rapidement vu venir des gens avec des colis de première nécessité (dentifrice, brosses à dents, savon…), de la nourriture… Toute cette auto-organisation était très impressionnante. Des dizaines de groupes d’entraide ont été créés sur les réseaux sociaux avec des propositions très généreuses, y compris des meubles et de l’électroménager alors que le nettoyage commençait à peine.

    « À côté de cela, il y a eu les initiatives de la ville ou de la croix rouge, que les autorités avaient demandé de contacter au lieu de se rendre directement sur place. Mais je connais des gens qui attendent toujours d’être recontactés aujourd’hui après avoir rempli leurs formulaires… Ils ont bien fait d’aller sur les lieux au petit bonheur la chance. Sans doute n’étaient-ils pas préparés à gérer un tel afflux de propositions.
    « Dès le deuxième week-end, les choses ont commencé à s’organiser de manière plus sérieuse. On a rencontré des gens qui ont installé une sorte de « base arrière » avec du matériel, des repas et des boissons dans une maison après l’avoir nettoyée. Un d’entre eux assurait la permanence, faisait le tour du quartier pour identifier les demandes d’aide et les besoins, puis établissait un parcours pour une équipe d’une bonne dizaine de personnes. Le tout via un simple groupe messenger.

    « C’est impossible de faire état de toutes les initiatives. J’ai rencontré des gens du Hainaut – une demi-douzaine de gros bras – qui sont passés de porte en porte pour proposer de déplacer les objets les plus lourds. D’autres passaient à leur suite pour nettoyer, ranger… Le gérant d’un magasin de bricolage a vendu du gros matériel à prix coûtant et offrait du matériel de base (des gants, des raclettes…). Quelqu’un s’est installé dans la maison d’un ami relogé ailleurs et, après avoir remis la cuisine en état de marche, a improvisé une cantine en affichant à quelle heure les plats allaient être disponibles. Durant des semaines, des gens ont fait les vas-et-viens pour apporter aux sinistrés des centaines et des centaines de plats préparés ailleurs.

    « Autre élément : le racisme a clairement reculé sous les coups de la solidarité. Unis dans l’effort porté à l’autre, les préjugés ne tiennent pas. J’ai pu entendre quelqu’un dire, épaté : « je viens d’un petit village, je n’imaginais pas toute cette diversité » en regardant les équipes à l’œuvre où se mélangeaient les origines et les couleurs de peau.

    « Bien entendu, cette énergie incroyable a besoin d’être organisée pour tenir le coup sur le long terme et être plus efficace. Il faut drastiquement augmenter les moyens de la protection civile, des services de pompiers, des services communaux… Je parlais tout à l’heure de gens qui n’ont pas été recontactés par les autorités, il y a fort à parier que c’était parce qu’ils étaient débordés. Imaginons quel rôle pourrait jouer une protection civile démocratiquement organisée et financée à hauteur des défis actuels pour donner tout son poids à la solidarité spontanée de la population que nous avons si merveilleusement vue à l’œuvre ? »

  • Vers une vaccination obligatoire ? Les autorités cherchent des boucs émissaires…

    Avec l’émergence du variant Delta, la pandémie n’est pas encore sous contrôle. Le système capitaliste mondial repose sur la concurrence et la course au profit, il est donc impossible d’élaborer une réponse globale coordonnée. Face à l’anarchie capitaliste, le monde politique traditionnel préfère désigner des boucs émissaires. Le débat sur le pass-sanitaire et la vaccination obligatoire doit être considéré dans ce cadre.

    Par Alain (Namur)

    Les responsables politiques tentent de faire oublier leur gestion calamiteuse de la crise en faisant porter le chapeau aux personnes non vaccinées. L’émergence du variant delta n’est pourtant pas dû aux « sceptiques de la vaccination » mais bien aux grandes entreprises pharmaceutiques qui ont empêché la mise à disposition de leurs installations pour produire suffisamment de doses afin de vacciner l’ensemble de la population mondiale. Mais ça, c’est à peine si les médias de masse en parlent. Comment s’étonner que ces multinationales suscitent une large méfiance ?

    En Belgique, les autorités pointent du doigt le personnel soignant non vacciné. L’ensemble du monde médical a collectivement effectué un travail remarquable durant la crise sanitaire dans des conditions très dures. Les travailleuses et travailleurs du secteur ont dû se battre pour arracher quelques moyens supplémentaires, notamment sous l’impulsion du groupe d’action La Santé en Lutte. Il est particulièrement immonde de s’en prendre aujourd’hui à une partie de ce personnel à bout de souffle.

    La crédibilité et la confiance sont primordiales dans les questions de santé. Nous ne devons pas nous étonner que les mots d’ordre lancés par des partis responsables du manque de moyens dans les soins de santé rencontrent l’hostilité d’une partie du personnel du secteur. Rappelons tout de même qu’à la mi-juillet, les 3/4 du personnel soignant avaient reçu une première dose de vaccin. Pour les réfractaires, tant dans les soins de santé qu’ailleurs, une approche répressive ne pourrait que renforcer la méfiance dans de larges couches de la population, tout en aggravant la pénurie de personnel dans ce secteur crucial. Une vaste campagne menée par les Comités pour la prévention et la protection au travail (CPPT) et la médecine du travail serait bien plus efficace.

    Bien entendu, les patients ont le droit d’être soignés dans un environnement sain, tout comme les collègues doivent pouvoir travailler en toute sûreté. Face au personnel qui refuse jusqu’ici d’être vacciné, des tests de dépistage obligatoires ainsi qu’une réorganisation des responsabilités professionnelles devraient être instaurés, sous gestion et contrôle des CPPT.

    Plus globalement, il faut constater que la fabrication de la pauvreté est en soi un plus grand obstacle dans la réponse à la crise sanitaire que la fabrication de fake news. Chiffres à l’appui, le 23 août, le quotidien Le Soir a déclaré que « la précarité est un obstacle majeur à la vaccination ». Les inégalités croissantes s’expriment notamment par le fait que 40% des Bruxellois n’ont pas de généralistes, contre 20% en Flandre et 30% en Wallonie.

    La fracture sociale et la fracture vaccinale vont de pair. Il est plus que temps que les organisations syndicales répondent à la situation de crise actuelle et entrent en action en faveur d’une augmentation massive des moyens publics pour les soins de santé, de l’instauration d’un véritable service public national de soins de santé démocratiquement géré par les travailleurs et de la nationalisation sous contrôle et gestion des travailleurs des entreprises pharmaceutiques. C’est la meilleure manière de convaincre les sceptiques et même de les impliquer dans le combat pour une société débarrassée de la soif de profit et du chaos de l’économie de marché.

  • Une bonne pension pour toutes et tous : repoussons chaque attaque, dure ou douce


    Quelques éléments concernant la discussion actuelle sur les pensions… Les nouvelles propositions de la ministre fédérale des pensions Karine Lalieux (PS) représentent pour beaucoup un pas en arrière par rapport à la situation actuelle. L’idée serait notamment d’introduire un minimum de 42 ans de carrière pour bénéficier d’une retraite anticipée : beaucoup de personnes, tout particulièrement des femmes, n’atteindront jamais ce chiffre dans la pratique. Nombreux sont celles et ceux qui éprouveront toutefois un certain sentiment de soulagement en constatant que les propositions sur la table ne sont pas aussi mauvaise qu’on pouvait le craindre.

    Par Tim (Gand)

    Le projet a immédiatement été accueillis par un torrent de critiques de la droite reposant sur tous ses mythes concernant les pensions. Le plus important est de dire que nous devrions travailler plus longtemps puisque nous vivons plus longtemps. Ce dogme ne tient absolument pas la route. Il « oublie » de prendre en compte l’augmentation de la productivité. Oui, l’espérance de vie a bien augmenté au cours de ces 50 dernières années (une légère baisse a cependant été observée avec la crise du coronavirus et une tendance à la baisse était déjà précédemment à l’œuvre pour les travailleurs aux États-Unis notamment). Mais la productivité a augmenté bien plus rapidement. En d’autres termes : pour une même carrière, nous produisons beaucoup plus de richesses aujourd’hui qu’il y a quelques années.

    Pourquoi ne pas utiliser une partie de cette richesse produite pour de meilleures pensions au lieu de laisser ça aux actionnaires ? Devoir travailler plus longtemps n’est pas une fatalité : c’est le résultat d’un choix politique visant à maximiser les profits. La part de cette nouvelle richesse qui revient aux plus riches augmente. Si nous voulons une véritable solidarité avec les générations futures, nous devons collectiviser les profits et les utiliser pour le bien commun.

    Dans tout le débat sur le fait de « travailler plus longtemps », on oublie souvent que c’est tout simplement impossible pour beaucoup de gens. De nombreuses personnes qui ont commencé à travailler tôt ont un travail physiquement difficile. Après 30-40 ans de travail, ces personnes sont usées. Elles développent de plus en plus de problèmes physiques et leur santé se détériore considérablement. Ce n’est donc pas un hasard si ces personnes vivent beaucoup moins longtemps que la moyenne : en Belgique, la différence peut aller jusqu’à 5 ans. Si l’on prend également en compte l’espérance de vie en bonne santé, la différence est encore plus grande : alors que les personnes qui vivent au-dessus du revenu médian n’ont aucun problème physique dans 90 % des cas, ce chiffre n’est que de 60 % pour les personnes du décile de revenu le plus bas. Pour de nombreuses personnes occupant des emplois mal rémunérés, « travailler plus longtemps » signifie littéralement « travailler jusqu’à la tombe ». Beaucoup d’entre elles prendront de toute façon une retraite anticipée, avec une pension encore plus basse, donc.

    L’intransigeance avec laquelle les journalistes, les décideurs politiques, les chefs d’entreprise et les pseudo-universitaires tentent de nous convaincre que de meilleures pensions sont « impayables » démontrent une chose : le capitalisme n’a plus rien à offrir à la majorité de la population. Il y a de plus en plus de richesses, mais de moins en moins de celle-ci va à la majorité de la population.

    Il n’y a pas d’argent pour les soins de santé afin de faire face à une crise sanitaire telle que celle que nous traversons. Il n’y a pas d’argent faire face à la crise climatique, à ses catastrophes et aux inondations. Il n’y a pas d’argent pour l’enseignement ou les infrastructures. Il n’y a pas d’argent pour les salaires ou pour de meilleures conditions de travail. Il n’y a pas d’argent pour les pensions. Ce système ne fonctionne pas pour nous, la majorité, et il n’y a aucune chance que cela s’améliore un jour. Quelle différence avec le passé où – sous la pression incessante de l’action du mouvement ouvrier organisé – la classe capitaliste était obligée de fournir de meilleures conditions de vie aux nouvelles générations. Nous avons connu des décennies de progrès collectif et l’illusion se développait que ce système pouvait offrir des perspectives, si pas pour soi-même, au moins pour les enfants et petits-enfants.

    Cette perspective n’existe plus pour une raison très claire : la classe capitaliste ne craint plus la classe ouvrière. Elle ne craint plus la force du mouvement ouvrier et des syndicats. Elle ne tremble plus à l’idée que le syndicat peut paralyser tout le pays et fermer le robinet à profits.

    Aujourd’hui, une grande partie de la population a peur, elle craint l’avenir. Elle ne sait pas à quoi ressembleront ses vieux jours. La peur doit changer de camp : que la classe capitaliste ressente qu’elle n’a pas d’autre choix que de mettre ses profits à disposition de la prospérité de la majorité.

    Commençons donc à nous organiser plus sérieusement. Refusons les projets de celles et ceux qui nous réservent des pensions plus basses. Nous voulons un régime de retraite qui va de l’avant pour la majorité. La productivité croissante doit se traduire par des heures de travail plus courtes, un travail plus sain et moins usant et de meilleures fins de carrière, surtout pour celles et ceux qui ont commencé à travailler très tôt.

  • Inondations. Encore à nous de payer? Nationalisation du secteur des assurances et indemnisation de tous les sinistrés!

    Routes et chemins de fer détruits, maisons démolies, réseau d’électricité endommagé, dépollution et traitement des déchets charriés par les eaux, dératisation,… Plus d’un mois après les événements, il est encore bien difficile de chiffrer les dommages des inondations. Rendons-nous compte déjà que pas moins de 202 des 262 communes de Wallonie sont admises au fonds des calamités. On estime que 42.000 tonnes de terre polluée doivent être traitées, alors que plus de 11.700 km de cours d’eau doivent être vérifiés et éventuellement assainis.

    Editorial de l’édition de Septembre de Lutte Socialiste, par Nicolas Croes

    L’accord scandaleux du gouvernement Di Rupo

    L’intervention des compagnies d’assurances lors de catastrophes naturelles est réglée par la Loi du 4 avril 2014 relative aux assurances proposée par le gouvernement fédéral, dirigé à l’époque par Elio Di Rupo. Lors d’une catastrophe de type « inondations », les assureurs peuvent plafonner le montant total de leurs dépenses à 375 millions d’euros, le reste étant à la charge du Fonds des calamités. Suite à de récentes négociations, le secteur des assurances a accepté d’augmenter le plafond de son intervention à 590 millions d’euros. L’estimation actuelle des dommages assurés oscille entre 1,3 et 1,7 milliard d’euros. Plus de la moitié sera donc à charge de la collectivité !

    Le PTB a dénoncé à très juste titre cette situation parfaitement aberrante. Il souligne que les bénéfices nets cumulés du secteur des assurances en Belgique se sont élevés à 14,72 milliards d’euros entre 2012 et 2019, grâce aux primes de plus en plus élevées payées par les assurés. Constatant que les bénéfices de ces entreprises sur cette période sont dix fois plus importants que l’estimation actuelle des dommages, le PTB défend que les compagnies d’assurances couvrent l’entièreté des dégâts subis par les victimes assurées et que le milliard d’euros ainsi libéré soit investi dans la construction de 8.000 nouveaux logements sociaux publics de qualité pour les sinistrés. C’est un bon pas en avant, mais il faut aller plus loin.
    Revoir l’urbanisme et l’aménagement du territoire… et s’en donner les moyens !

    Nous manquons de logements sociaux, ce n’est pas neuf. Cela à nouveau été souligné par les inondations, de même que l’absence de structures d’accueil d’urgence, de services de secours… Le gouvernement wallon cherche aujourd’hui à emprunter 1 milliard d’euros sur sa première enveloppe budgétaire de 2 milliards d’euros consacrée à la reconstruction. D’autres enveloppes suivront, c’est certain.

    Il faudra bien plus pour ne pas se contenter de reconstruire à l’identique et repenser le territoire, son urbanisme, la gestion des rivières. Nous sommes passés à un cheveu d’une inondation complète de Liège en juillet, ce qui aurait considérablement aggravé les dégâts matériels et humains. Nous ne devons pas nous contenter de prier que le risque ne se présente plus. La reconstruction doit être pensée pour s’adapter à la nouvelle norme des événements climatiques extrêmes et encaisser des chocs d’inondations de plus en plus fréquents. Elle doit également comporter un volet portant sur un plan public d’isolation des bâtiments quartier par quartier sur la totalité du territoire de manière à limiter les émissions de gaz à effet de serre liées au chauffage. Elle doit encore s’axer sur la gratuité des transports en commun et leur extension. Etc. Etc.

    Pour tout cela il faudra nous battre. Moins d’un mois après les inondations meurtrières, le secteur de la construction a critiqué la circulaire visant à interdire de bâtir dans les zones les plus à risque en prévenant : les prix vont augmenter. Certaines personnes étaient encore portées disparues que les promoteurs immobiliers parlaient de reconstruire sur des zones inondables…

    Les bâtiments inoccupés pour raison spéculative doivent être de toute urgence expropriés et rénovés pour y loger les personnes sinistrées. Les grandes entreprises du secteur des assurances et celles de la construction doivent être expropriées et placées sous contrôle et gestion démocratiques de la collectivité. De cette manière, nous aurons non seulement les moyens d’indemniser la totalité des victimes et pas seulement les assurées (les personnes non assurées étant par ailleurs des personnes précarisées) mais aussi de mobiliser les moyens nécessaires à faire face à la situation actuelle : réduire nos émissions tout en protégeant la population et ses conditions de vie.

    Les organisations de gauche et les syndicats doivent impérativement axer leurs propositions et leur action sur ce qui est nécessaire pour faire face au péril climatique, pas sur ce qui est acceptable en restant dans le carcan du système capitaliste. C’est ce système qui est responsable du drame auquel est confrontée l’humanité ! Nous devons aujourd’hui plus que jamais faire résonner la nécessité d’une approche rationnelle et démocratiquement planifiée de l’économie contre le chaos de l’économie de marché. Chacune de nos mobilisations doit s’en faire l’écho. Faute d’atteindre cette issue, la civilisation humaine s’enfoncera dans une barbarie telle qu’elle n’en a encore jamais connu.

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