Une bonne pension pour toutes et tous : repoussons chaque attaque, dure ou douce


Quelques éléments concernant la discussion actuelle sur les pensions… Les nouvelles propositions de la ministre fédérale des pensions Karine Lalieux (PS) représentent pour beaucoup un pas en arrière par rapport à la situation actuelle. L’idée serait notamment d’introduire un minimum de 42 ans de carrière pour bénéficier d’une retraite anticipée : beaucoup de personnes, tout particulièrement des femmes, n’atteindront jamais ce chiffre dans la pratique. Nombreux sont celles et ceux qui éprouveront toutefois un certain sentiment de soulagement en constatant que les propositions sur la table ne sont pas aussi mauvaise qu’on pouvait le craindre.

Par Tim (Gand)

Le projet a immédiatement été accueillis par un torrent de critiques de la droite reposant sur tous ses mythes concernant les pensions. Le plus important est de dire que nous devrions travailler plus longtemps puisque nous vivons plus longtemps. Ce dogme ne tient absolument pas la route. Il « oublie » de prendre en compte l’augmentation de la productivité. Oui, l’espérance de vie a bien augmenté au cours de ces 50 dernières années (une légère baisse a cependant été observée avec la crise du coronavirus et une tendance à la baisse était déjà précédemment à l’œuvre pour les travailleurs aux États-Unis notamment). Mais la productivité a augmenté bien plus rapidement. En d’autres termes : pour une même carrière, nous produisons beaucoup plus de richesses aujourd’hui qu’il y a quelques années.

Pourquoi ne pas utiliser une partie de cette richesse produite pour de meilleures pensions au lieu de laisser ça aux actionnaires ? Devoir travailler plus longtemps n’est pas une fatalité : c’est le résultat d’un choix politique visant à maximiser les profits. La part de cette nouvelle richesse qui revient aux plus riches augmente. Si nous voulons une véritable solidarité avec les générations futures, nous devons collectiviser les profits et les utiliser pour le bien commun.

Dans tout le débat sur le fait de « travailler plus longtemps », on oublie souvent que c’est tout simplement impossible pour beaucoup de gens. De nombreuses personnes qui ont commencé à travailler tôt ont un travail physiquement difficile. Après 30-40 ans de travail, ces personnes sont usées. Elles développent de plus en plus de problèmes physiques et leur santé se détériore considérablement. Ce n’est donc pas un hasard si ces personnes vivent beaucoup moins longtemps que la moyenne : en Belgique, la différence peut aller jusqu’à 5 ans. Si l’on prend également en compte l’espérance de vie en bonne santé, la différence est encore plus grande : alors que les personnes qui vivent au-dessus du revenu médian n’ont aucun problème physique dans 90 % des cas, ce chiffre n’est que de 60 % pour les personnes du décile de revenu le plus bas. Pour de nombreuses personnes occupant des emplois mal rémunérés, « travailler plus longtemps » signifie littéralement « travailler jusqu’à la tombe ». Beaucoup d’entre elles prendront de toute façon une retraite anticipée, avec une pension encore plus basse, donc.

L’intransigeance avec laquelle les journalistes, les décideurs politiques, les chefs d’entreprise et les pseudo-universitaires tentent de nous convaincre que de meilleures pensions sont « impayables » démontrent une chose : le capitalisme n’a plus rien à offrir à la majorité de la population. Il y a de plus en plus de richesses, mais de moins en moins de celle-ci va à la majorité de la population.

Il n’y a pas d’argent pour les soins de santé afin de faire face à une crise sanitaire telle que celle que nous traversons. Il n’y a pas d’argent faire face à la crise climatique, à ses catastrophes et aux inondations. Il n’y a pas d’argent pour l’enseignement ou les infrastructures. Il n’y a pas d’argent pour les salaires ou pour de meilleures conditions de travail. Il n’y a pas d’argent pour les pensions. Ce système ne fonctionne pas pour nous, la majorité, et il n’y a aucune chance que cela s’améliore un jour. Quelle différence avec le passé où – sous la pression incessante de l’action du mouvement ouvrier organisé – la classe capitaliste était obligée de fournir de meilleures conditions de vie aux nouvelles générations. Nous avons connu des décennies de progrès collectif et l’illusion se développait que ce système pouvait offrir des perspectives, si pas pour soi-même, au moins pour les enfants et petits-enfants.

Cette perspective n’existe plus pour une raison très claire : la classe capitaliste ne craint plus la classe ouvrière. Elle ne craint plus la force du mouvement ouvrier et des syndicats. Elle ne tremble plus à l’idée que le syndicat peut paralyser tout le pays et fermer le robinet à profits.

Aujourd’hui, une grande partie de la population a peur, elle craint l’avenir. Elle ne sait pas à quoi ressembleront ses vieux jours. La peur doit changer de camp : que la classe capitaliste ressente qu’elle n’a pas d’autre choix que de mettre ses profits à disposition de la prospérité de la majorité.

Commençons donc à nous organiser plus sérieusement. Refusons les projets de celles et ceux qui nous réservent des pensions plus basses. Nous voulons un régime de retraite qui va de l’avant pour la majorité. La productivité croissante doit se traduire par des heures de travail plus courtes, un travail plus sain et moins usant et de meilleures fins de carrière, surtout pour celles et ceux qui ont commencé à travailler très tôt.

Author

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop