Category: Ecologie

  • [VIDEO] System change, not climate change – Fight for a socialist alternative

    Nous faisons partie de l’écosystème, pas le capitalisme ! Rejoignez la lutte contre le capitalisme afin de remplacer ce système par une société reposant sur les besoins des gens et non sur les profits ! Faites un choix individuel qui compte vraiment : rejoignez la lutte pour une alternative socialiste internationaliste !

     

  • Brésil : Sauvez l’environnement, détruisez le système !

    Depuis les élections de 2018, l’orientation que prendraient les politiques environnementales avec Jair Bolsonaro à la présidence a suscité une vive inquiétude. Ses déclarations sur l’environnement ont toujours été controversées, parce qu’elles traitent toute considération pour la préservation de la forêt ou pour les peuples autochtones comme un obstacle à la croissance économique du pays.

    Par Bruna Leão, LSR (CIO=Brésil, article initialement publié le 29 août)

    Selon l’INPE (Institut national brésilien de recherche spatiale), entre août 2018 et juillet de cette année, 6 800 km² ont été déboisés, contre 4 500 km² pour la même période entre août 2017 et juillet 2018. Cela représente une augmentation de 64,8%. Selon l’agence gouvernementale IBAMA (Institut brésilien de l’environnement et des ressources naturelles renouvelables), les amendes infligées aux contrevenants en matière d’environnement en 2019 ont diminué d’un tiers par rapport à la même période l’an dernier. La baisse du nombre de sanctions coïncide avec une augmentation du nombre de cas de déforestation et d’incendies de forêt enregistrés en 2019.

    Le chaos environnemental dans lequel nous vivons est devenu évident le 19 août 2019, lorsque le ciel de la ville de São Paulo s’est obscurci à 15 heures en raison d’un nuage de fumée dû à l’incendie qui durait déjà depuis 16 jours en Bolivie, au Paraguay et dans les États brésiliens de Rondônia et d’Acre. Le vent des couches supérieures de l’atmosphère a changé de direction avec l’entrée d’un front froid, dirigeant la fumée vers São Paulo, mais aussi vers la région sud qui comprend les Etats de Mato Grosso, de Mato Grosso do Sul et de Paraná.
    Les feux de forêt ne sont pas rares à cette période de l’année, mais jamais à cette échelle. Selon l’IPAM (Amazon Environmental Research Institute), cette année a été la moins sèche des trois dernières années, de sorte que le temps sec ne peut être blâmé pour les incendies. Cependant, il y a eu une augmentation significative des incendies illégaux, d’environ 70 %, qui a contribué à l’augmentation des flambées de feux de forêt dans la région amazonienne.

    L’avancée de la déforestation est liée à la chasse aux profits écologiquement insoutenable des agro-industries qui contrôlent aujourd’hui le gouvernement. Même avant les coupes dans le Fonds Amazone, nous avons assisté à une augmentation drastique des incendies de forêt dans la forêt amazonienne. Les données de l’imagerie satellitaire quotidienne de l’INPE montrent qu’entre le 18 et le 19 août, 1 346 nouvelles flambées ont été observées dans le pays. Depuis le 15 août, il y a eu 9 507 nouveaux points de combustion. L’administration Bolsonaro avait déjà réduit les fonds de l’IBAMA, en particulier ceux destinés aux inspections et à la surveillance. Puis vint le licenciement récent du directeur de l’INPE, qui a défié le président en défendant les données techniques et scientifiques recueillies par l’institut. Dans le cadre de ce même processus de démantèlement de la protection de l’environnement, les universités publiques qui produisent les connaissances scientifiques et les professionnels qualifiés pour faire face à la situation environnementale du pays sont victimes de coupes budgétaires.

    L’intense soif de profit à tout prix, le renforcement du bloc “ruraliste” (représentant les intérêts des grands propriétaires fonciers) au Congrès, les attaques contre les territoires indigènes et les crimes contre l’environnement comme la rupture des barrages de Brumadinho et Mariana, font du Brésil un des plus grands pays victimes de la déforestation et l’un des plus grands utilisateurs de pesticides au monde. Tout cela s’est intensifié sous le gouvernement Bolsonaro, qui a déclaré la guerre à l’environnement avec ses politiques dévastatrices.

    Grève globale pour le climat

    Les grèves climatiques sont un phénomène en pleine expansion. Ils sont marqués par des jeunes insatisfaits de l’inaction des gouvernements et inquiets pour leur propre avenir, ce qui reflète une politisation croissante chez les jeunes. Un mouvement précurseur des grèves climatiques a eu lieu avant la Conférence de Paris sur le climat en 2015. Dans plus de 100 pays, environ 50 000 personnes sont descendues dans la rue, en arborant des banderoles qui liaient la crise environnementale à la crise sociale. L’intensification de la lutte contre le changement climatique a commencé à la fin de l’année dernière. C’est une jeune Suédoise du nom de Greta Thunberg, alors âgée de 15 ans, qui en est à l’origine. En août 2018, Greta a entamé une série de manifestations qui se sont transformées par la suite en mouvement “Fridays for Future”.

    Un certain nombre de mouvements différents au Brésil ont décidé de se joindre à la construction de la Grève mondiale du climat, appelée dans des dizaines de pays pour la semaine du 20 septembre. Cette mobilisation est aussi une réponse aux attaques du gouvernement Bolsonaro contre les peuples indigènes, l’Amazonie, le Cerrado (vaste région de savane tropicale au centre du Brésil), l’agroécologie et toute initiative qui propose une nouvelle relation entre l’être humain et la nature. Il y a une forte participation, en particulier des jeunes, à la grève mondiale comme moyen d’exprimer cette indignation dans la rue.

    Luttons pour le socialisme !

    Ce moment appelle à la construction d’un nouveau pôle d’attraction pour les luttes des travailleurs et des jeunes en faveur de l’environnement. L’État de São Paulo, comme une grande partie du nord-est et du milieu du Brésil, a déjà connu des crises de gestion de l’approvisionnement en eau (dues à la sécheresse ces dernières années), et connaît actuellement de graves problèmes de santé publique liés à la qualité de l’air. La population subit les conséquences directes sur l’environnement et la qualité de vie des décisions des gouvernements qui ne pensent qu’à eux-mêmes et non au peuple.

    Il est urgent de s’engager dans la lutte pour l’environnement et le climat. Le changement climatique aura des conséquences désastreuses, en particulier pour la classe ouvrière, comme les glissements de terrain, les incendies de forêt, les mauvaises récoltes, la faim, les maladies, les pluies extrêmes, les vagues de chaleur, les inondations et la sécheresse prolongée. La priorité pour nous, à gauche, est de tenir tête à ce système économique à courte vue, un système qui ignore la nécessité de conserver les ressources naturelles et qui n’est motivé que par le profit. Dans son livre Capital, Marx affirme que “tout progrès dans l’agriculture capitaliste est un progrès dans l’art non seulement de piller l’ouvrier, mais aussi de piller le sol”.

    Le système capitaliste conduit notre monde au chaos. Nous devons renverser ce système ! Nous ne pouvons changer les choses qu’en luttant pour une transformation socialiste de la société, avec les travailleurs aux commandes celle-ci. Nous disposons déjà des moyens techniques de planifier la production en fonction de nos besoins plutôt qu’en fonction du profit, et nous pouvons établir une utilisation rationnelle de toutes les ressources de la planète. Cela signifie de lutter pour une société socialiste démocratique, avec une planification démocratique des ressources à l’échelle internationale.

    La construction d’une force de lutte socialiste est la stratégie nécessaire pour répondre aux attaques du gouvernement Bolsonaro et du capitalisme. Construisons la grève internationale du climat en septembre et allions la force de la jeunesse à celle de la classe ouvrière et de tous ceux qui luttent contre la destruction de notre planète !

  • Grève climatique mondiale. Quelle doit être la suite du mouvement ?

    Cartoon de Naor Kapulnik

    L’année scolaire 2018-2019 a été marquée par les grèves climatiques de la jeunesse qui ont ébranlé le monde. Ce mouvement a été lancé par Greta Thunberg, une élève suédoise de 15 ans, qui a séché les cours pour aller protester devant le parlement de son pays et exiger que le gouvernement traite le changement climatique comme une crise, et agisse en conséquence. La Suède venait en effet de connaitre l’été le plus chaud de son histoire, et plus de 60 incendies de forêt.

    Par Eleni Mitsou, Xekínima (CIO-Grèce)

    La grève de Greta a inspiré des centaines de milliers d’élèves dans le monde entier. Des grèves et des manifestations climatiques hebdomadaires ont éclaté de l’Australie au Canada en passant par l’Allemagne, la Belgique, l’Angleterre, etc. Au plus fort du mouvement, il y a eu les deux journées de grèves et de marches mondiales pour le climat, en mars et en mai, auxquelles ont participé plus d’un million d’élèves et de jeunes dans 128 pays du monde.

    Alors que de nouvelles grèves et marches mondiales pour le climat sont prévues entre le 20 et le 27 septembre, la question qui se pose est : comment ce mouvement peut-il avancer, se développer et atteindre ses objectifs ?

    Dans quel camp sont nos dirigeants ?

    Sous la pression du mouvement pour le climat, les gouvernements britannique, français, canadien et irlandais ont déclaré une « urgence climatique ». Cependant, ils n’ont pris aucune mesure concrète pour lutter contre le réchauffement de la planète et les changements climatiques qui en découlent. Au contraire, ils continuent de donner 28 milliards de dollars par an à l’industrie des hydrocarbures, tant au pays qu’à l’étranger, sous la forme de subventions, de réductions d’impôt et d’autres aides financières.

    Un certain nombre de directeurs de multinationales, qui ont formé un groupe appelé la « B Team », prétendent également soutenir les grèves pour le climat et travailler sur des solutions et politiques durables dans leurs entreprises. Cependant, si l’on examine de plus près les propositions et les politiques « durables » de ces grands patrons, on s’aperçoit qu’il s’agit soit de pseudo-solutions, soit d’un simple « greenwashing ».

    Par exemple, Sir Richard Branson, le cofondateur de la « B Team » et propriétaire du groupe Virgin, a déclaré que Virgin Airlines utilise des biocarburants dans un certain nombre de vols. Cependant, les biocarburants ne sont ni une solution écologique, ni une solution durable. Il y a un an, le même Sir Branson célébrait l’utilisation sur un vol commercial d’un autre type de kérosène prétendument « durable ». Encore une fois, le carburant ne provenait pas de sources d’énergie renouvelables, de la technologie de l’hydrogène ou de toute autre technologie écologique, mais de « gaz industriels recyclés riches en carbone ». Virgin affirme que le carburant produit par le recyclage des gaz industriels émet beaucoup moins de gaz à effet de serre. Bien que cela reste à prouver par des scientifiques qui ne travaillent pas pour Virgin, il est clair qu’il est toujours question de combustible fossile, que le processus de « recyclage » ne rend pas plus « vert ».

    On ne peut pas faire confiance aux grands patrons et aux politiciens des partis pro-capitalistes qui prétendent être du côté du mouvement. Depuis le début des années 1960, les scientifiques mettent en garde contre les effets des émissions de gaz à effet de serre sur la planète. Cependant, le premier sommet sur le climat, à Genève, n’a eu lieu que près de 20 ans plus tard, en 1979 ! C’est à peu près au même moment que les grandes entreprises pétrolières comme Exxon sont arrivées à la conclusion que la combustion de combustibles fossiles affecte le climat de la Terre et que dans les décennies à venir, la température allait augmenter de +1 à +2 °C. Quarante ans plus tard, les gouvernements du monde entier n’ont toujours pas pris la moindre mesure substantielle pour arrêter ou du moins ralentir le réchauffement planétaire et le changement climatique.

    Face à une crise climatique qui menace la vie sur terre telle que nous la connaissons, les gouvernements capitalistes ne sont toujours pas prêts à prendre les mesures radicales qui s’imposent pour faire face au réchauffement climatique. La raison en est qu’ils ne sont pas prêts à entrer en conflit avec certains des « membres » les plus éminents de la classe dont ils représentent les intérêts, à savoir les grandes sociétés pétrolières, gazières et charbonnières et d’autres industries qui dépendent absolument du pétrole et du gaz pour leurs produits et leurs profits, telles que l’industrie plastique.

    L’industrie des combustibles fossiles produit 86 % de l’énergie de la planète (électricité, chauffage, combustibles, etc.) et, selon l’une des dernières études du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), « l’utilisation des énergies fossiles est responsable d’environ 85 % des émissions anthropiques de CO2 produites chaque année ». Il n’y a donc pas d’autre moyen d’enrayer le réchauffement de la planète et les changements climatiques que de cesser d’extraire et de bruler du pétrole, du gaz et du charbon et de se tourner vers les sources d’énergie renouvelables et d’autres technologies véritablement écologiques.

    Renforcer le mouvement de grève de la jeunesse pour le climat

    Les grèves climatiques doivent donc se poursuivre et s’amplifier, tant du point de vue du nombre de jeunes qui y participent et du nombre de pays où elles ont lieu, que du point de vue de leur extension vers des grèves des travailleurs, notamment des grèves générales capables de paralyser la production capitaliste et de menacer les profits des élites capitalistes. Et, bien sûr, ces actions de grève doivent être organisées de façon plus démocratique et plus efficace.

    Les médias sociaux et les initiatives personnelles ont largement contribué à construire ce mouvement et à organiser les journées de grève mondiale, mais ils ont aussi ouvert la voie aux « leaders » autoproclamés, qui se font souvent concurrence les uns les autres. Pareil fonctionnement empêche aussi de mener un véritable débat sur les revendications à présenter au nom du mouvement, puisque n’importe qui est libre de parler en notre nom, et laisse de la place aux représentants des multinationales et des partis pro-capitalistes, qui n’ont pas honte de se joindre à nos actions, prétendant soutenir le mouvement et sa cause.

    Si des réunions sur le climat se tenaient dans toutes les écoles chaque semaine ou chaque mois, et si chaque école élisait un comité ou un groupe de représentants pour discuter des revendications, et pour planifier et coordonner les actions de grève avec les comités des autres écoles, ce serait un grand pas vers une organisation plus efficace et plus démocratique du mouvement, pour mobiliser encore plus de monde. De plus, si les comités de jeunes se coordonnaient de la même manière avec des comités de travailleurs élus sur le lieu de travail ou dans les quartiers, on pourrait voir l’émergence d’un mouvement extrêmement puissant unissant les jeunes et la classe des travailleurs.

    Les élèves ne peuvent à eux seuls contraindre les capitalistes qui contrôlent l’économie et prennent toutes les décisions politiques à prendre les mesures radicales coordonnées qui s’imposent à l’échelle mondiale pour sauver la planète.

    Le mouvement pour le climat peut croître en nombre et en force en s’associant à d’autres mouvements et luttes pour l’environnement implantés « localement », comme la lutte contre l’extraction du lignite (charbon) en Allemagne, contre les mines d’or hyperpolluantes en Grèce, en Turquie et en Roumanie, contre l’extraction des gaz de schiste, contre le forage en haute mer, contre les nouveaux oléoducs au Canada, en Angleterre, aux Etats-Unis et ailleurs. Il est également important d’agir de concert avec les peuples autochtones des Amériques qui se battent pour préserver leurs terres et leurs réserves d’eau, ou contre la destruction de la forêt en Indonésie, au Brésil et en Afrique, comme la lutte menée contre Shell par le peuple Ogoni au Nigeria.

    Il faut également nouer des liens en vue d’actions communes avec d’autres campagnes et mouvements tels que le mouvement mondial de lutte pour les droits des femmes (qui a organisé des mobilisations incroyables ces dernières années et remporté un certain nombre d’importantes victoires), le mouvement pour les droits des LGBTQ+, et le mouvement antiraciste et antifasciste – n’oublions pas que les partis et groupes d’extrême-droite nient pratiquement tous la réalité du changement climatique ou, dans le meilleur cas, nient le fait que le changement climatique soit causé par les émissions de gaz à effet de serre provoquées par l’homme.

    Plus important encore, les grèves des jeunes pour le climat doivent être associées au mouvement des travailleurs et travailler à un mouvement unifié et consolidé des travailleurs et des jeunes. Les grèves des travailleurs ont le pouvoir de renverser les gouvernements, d’imposer des changements radicaux dans la société et, sous certaines conditions, de provoquer des révolutions. Ils ont ce pouvoir parce que les travailleurs sont ceux qui produisent tous les biens et services de la société : ce sont eux qui produisent toutes les richesses, y compris les profits qui font les riches.

    Construire un tel mouvement ne sera pas une tâche facile. À une époque où la grande majorité des dirigeants syndicaux ont atteint un nouveau niveau de bureaucratie et de dégénérescence et n’appellent même pas à faire grève pour lutter contre les licenciements, les fermetures d’entreprise, les réductions de salaires ou les mauvaises conditions de travail, il est très peu probable qu’ils appellent à une action réelle sur l’environnement. La majorité des responsables syndicaux ferment les yeux sur le mouvement de grève pour le climat et, dans les rares cas où ils le soutiennent en parole, ils ne sont pas prêts à prendre l’initiative. Par exemple, Verdi, qui est le syndicat allemand des travailleurs des services, fort de 2 millions de membres, en cherchant à se présenter comme luttant contre le changement climatique, a appelé ses membres à se joindre, s’ils le pouvaient, aux grèves pour le climat, mais tout en indiquant clairement qu’il n’appellerait pas à une grève officielle.

    Ainsi, là où les syndicats sont contrôlés par des directions bureaucratiques et dégénérées, les militants environnementaux doivent s’adresser à la base syndicale, aux délégués et aux larges fronts de gauche, pour les rallier au mouvement de grève pour le climat et essayer de créer des comités de grève dans les syndicats qui organiseront la base et feront pression sur les directions syndicales pour lutter activement contre le changement climatique. D’ailleurs, cela renforcera du même coup la capacité de résistance des travailleurs face à toutes les attaques contre leurs droits, leur salaire et leur emploi.

    Les luttes pour l’environnement et les luttes des travailleurs ne sont pas opposées l’une à l’autre. Dans de nombreux pays, les capitalistes et les bureaucrates syndicaux s’opposent à ces deux formes de lutte, en les divisant. Ils affirment qu’une politique environnementale, la transition des énergies fossiles à l’énergie verte, etc. mèneront forcément à des pertes d’emplois et à une hausse des taxes.

    Cependant, si les syndicats et les comités des travailleurs, des jeunes, des communautés locales, etc. élus démocratiquement prenaient le contrôle du processus de transition à une économie verte et durable, ils pourraient garantir qu’aucun emploi ne serait perdu, que les travailleurs seraient au besoin réorientés vers d’autres secteurs de l’économie, sans perdre leur salaire au cours de ce processus de transition. D’ailleurs, dans de nombreux cas, le passage aux technologies vertes est justement la solution idéale pour garantir l’emploi des travailleurs. Prenons l’exemple des travailleurs du chantier naval emblématique Harland & Wolff en Irlande du Nord, qui luttent pour sauver leur emploi : ces travailleurs exigent que le gouvernement nationalise le chantier naval pour sauver son avenir. Ils expliquent qu’avec leur savoir-faire et leur équipement, ils pourraient produire des éoliennes pour jouer un rôle important dans la transition de l’Irlande vers l’énergie verte et une économie verte.

    Se battre pour l’avenir

    L’ONU a averti que nous ne disposons que d’à peine dix ans pour prendre les mesures qui s’imposent pour maintenir l’augmentation de la température mondiale à 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle entre 2030 et 2052.

    Si nous parvenons à maintenir l’augmentation de la température mondiale à 1,5 °C, la prochaine génération aura encore la possibilité de revenir à « l’Holocène » – l’ère de l’homme moderne – ou du moins à une époque proche de celle-ci – l’ère où la civilisation humaine s’est développée, et qu’elle risque à présent de quitter. Certes, une hausse de température de plus de 1,5 °C ne signifiera pas la fin de la vie sur Terre. Mais elle signifiera bel et bien la fin de la vie sur Terre telle que nous la connaissons. La vie de centaines de millions, voire de milliards de personnes sera gravement menacée, des millions d’espèces vivantes seront perdues et une grande partie de notre planète deviendra inhabitable.

    Les jeunes et les travailleurs, les mouvements de lutte pour l’environnement, pour les droits des femmes, pour les droits des LGBTQ+ et antifasciste doivent lutter ensemble contre le réchauffement climatique et le changement climatique. Et nous devons être conscients qu’il s’agit d’un combat qui remet en question le système capitaliste lui-même, parce que les mesures et les actions nécessaires pour sauver la planète sont incompatibles avec le fonctionnement de ce système.

    • La consommation d’énergie fossile est responsable d’environ 85 % des émissions anthropiques de CO2 produites chaque année. Nous devons mettre fin à la combustion d’hydrocarbures pour la production d’énergie et de plastique au cours des prochaines années et nous tourner radicalement vers des technologies qui utilisent des sources d’énergie renouvelables (vent, soleil, vagues, etc.) et l’hydrogène. La technologie pour ce faire est disponible. Ce qui manque au système, c’est la volonté politique de faire la transition.
    • L’industrie des combustibles fossiles et ses produits sont responsables de 91 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre industrielles et d’environ 70 % des émissions de gaz à effet de serre liées à l’activité humaine. Une centaine de multinationales seulement sont responsables à l’échelle mondiale d’environ 71 % des émissions industrielles de gaz à effet de serre et de la moitié des émissions sur la planète liées à l’activité humaine ! Aucune d’entre elles n’abandonnera volontiers les bases sur lesquelles ses profits prospèrent. Nous devons donc faire en sorte que ces entreprises deviennent la propriété de la collectivité pour être contrôlées par elle, en utilisant leurs richesses pour les convertir, sans perte d’emplois, en entreprises qui produiront de l’énergie et du carburant provenant de sources d’énergie renouvelables et de la technologie de l’hydrogène, et pour planifier la production énergétique en fonction des besoins sociaux et non des profits capitalistes.
    • Un très petit nombre d’entreprises contrôlent la grande majorité de la production et du commerce des denrées alimentaires dans le monde. Ces multinationales sont responsables de 75 % de la déforestation dans le monde (qui représente 15 à 20 % des émissions de CO2), de la destruction d’autres écosystèmes précieux et de l’utilisation massive de produits agrochimiques qui affectent la nature et notre santé. L’alimentation et l’agro-industrie sont également les deuxièmes plus importantes sources d’émissions d’autres gaz à effet de serre, tels que le méthane (56 %). Elles sont responsables de 19 à 29 % des émissions totales de gaz à effet de serre liées à l’activité humaine. Nous devons arracher ces entreprises des mains des capitalistes, arrêter la déforestation, organiser un programme de reforestation massive à l’échelle mondiale et planifier la production alimentaire de manière durable et respectueuse de l’environnement, ce qui implique de cultiver davantage notre nourriture localement, en utilisant des variétés traditionnelles de semences et de bétail, et de (re)sensibiliser la population au problème de la consommation excessive de viande et de ses effets négatifs tant sur l’environnement que sur la santé personnelle.
    • Nous devons mettre en œuvre un plan d’investissement public de masse pour construire des logements et moderniser les logements actuels, assurer un service gratuit et efficace de recyclage et de réparation de nos biens plutôt que d’incinérer les déchets et/ou de les envoyer pourrir dans des pays pauvres. Toutes ces mesures seraient plus qu’abordables si les richesses que nous produisons tous n’étaient pas accaparées par une petite élite qui contrôle l’économie et l’élite politique.
    • Toutes ces actions, ainsi que celles qui sont nécessaires pour réparer les dommages environnementaux infligés aux écosystèmes, pourraient créer des millions de nouveaux emplois décents. Les travailleurs des industries et des secteurs touchés par la transition écologique doivent se voir garantir des emplois et une reconversion sans perte de salaire. Investir dans les énergies renouvelables crée beaucoup plus d’emplois : pour chaque emploi créé par un investissement dans les énergies fossiles, le même montant produit 5 à 7 emplois « verts ».
    • Nous avons besoin d’une forte hausse du financement public de la recherche scientifique démocratique et indépendante pour mieux comprendre et combattre le changement climatique, pour développer davantage les technologies de production et de stockage de l’énergie verte, pour développer davantage les matériaux respectueux de l’environnement (par exemple les matériaux qui remplaceront le plastique, tels que le béton écologique et autres matériaux de construction), etc. L’argent du gouvernement qui est actuellement dépensé en subventions, en allègements fiscaux et en mesures incitatives pour les entreprises de combustibles fossiles devrait être consacré à la recherche. Il n’est pas nécessaire de souligner que les résultats de cette recherche doivent appartenir à l’ensemble de la société et être utilisés pour le bien commun : ils ne devraient pas pouvoir être achetés, brevetés et utilisés à des fins lucratives par les multinationales.
    • C’est NOTRE planète : nous devons donc planifier et gérer démocratiquement l’économie, avec pour principe de base le droit de chacun à une vie exempte de pauvreté, d’oppression et de destruction ; une économie fondée sur la durabilité pour assurer que nous ayons tous un avenir sur cette planète. Combattre le capitalisme pour le remplacer par une société aspirant à satisfaire les besoins des gens et non les profits des entreprises, une société qui respecte l’environnement au lieu de le détruire, dirigée par une vraie démocratie et non par les multinationales qui contrôlent notre l’économie et notre vie politique : une société socialiste démocratique !
  • Changeons le système, pas le climat – luttons pour une alternative socialiste

    Nous sommes organisés internationalement au sein du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), qui dispose de section dans plus de 35 pays. Lors des prochaines mobilisations pour le climat, nous interviendrons mondialement autour d’un programme commun dont voici les principales revendications :

    1. Pas de temps à perdre : il faut un virage radical et la fin de la combustion de combustibles fossiles pour la production d’énergie et de plastique au cours des prochaines années. Nous avons besoin d’aliments qui ne ruinent ni la planète ni notre santé. Cela exige des changements urgents et qualitatifs dans la production énergétique, industrielle, alimentaire et agricole, dans les transports et dans le logement.

    2. Les besoins des gens, pas les profits : Les solutions individuelles sont insuffisantes face à un problème global. La majorité des habitants de la planète n’ont tout simplement pas le choix. Même si nous nous comportions tous de manière extrêmement écologique, cela ne suffirait en aucun cas à résoudre le problème. Nous avons besoin d’un plan d’investissements publics massifs dans les énergies renouvelables ; dans des transports en commun publics de haute qualité, efficaces et gratuits ; dans des bâtiments et des logements écologiques pour tous ; dans le recyclage et la réparation de l’infrastructure. Tout cela est plus qu’abordable – pour autant que la richesse que nous produisons ne soit pas accaparée par une petite élite.

    3. Stoppons les 100 principaux pollueurs : Au cours des trois dernières décennies, plus de 70% des émissions industrielles de gaz à effet de serre ont été produites par 100 entreprises. Mais les grandes entreprises ignorent les recommandations ou la législation et les partis et politiciens établis sont leurs marionnettes. Nous ne pouvons contrôler que ce que nous possédons. Par conséquent, la première étape consiste à faire passer les grandes industries énergétiques ainsi que les grandes banques et les grandes entreprises de la construction, du transport et de l’agro-industrie des mains des capitalistes à celles du secteur public.

    4. Une société à notre service : Avec ces ressources, il est possible de libérer la science des limites du capitalisme et de la recherche de profits. Au lieu d’investir des milliards de dollars dans des subventions aux sociétés pétrolières, nous pourrions développer des technologies et des matériaux écologiques. Nous défendons le droit de chacun à un bon emploi et à une vie exempte de pauvreté, d’oppression, de dévastation et de destruction. Les grandes entreprises et leur puissance colossale doivent être contrôlés et gérés démocratiquement par la classe des travailleurs et la société dans son ensemble. Cela garantira qu’aucun emploi ne serait perdu, mais converti en emplois socialement utiles et sans perte de salaire.

    5. La planification, pas le chaos : Les programmes de “Green New Deal” ou de “Green Industrial Revolution” vont dans la bonne direction. Mais nous devons aller plus loin, au-delà des limites du système capitaliste. Au lieu de l’anarchie capitaliste de la production pour le profit, nous devons planifier comment utiliser durablement les ressources de la planète afin de répondre aux besoins de la majorité.

    6. Faisons grève ensemble : Ce sont les gens ordinaires qui souffrent le plus du changement climatique. Et c’est la classe des travailleurs qui a le pouvoir de changer l’histoire. Nous devons poursuivre les grèves des jeunes pour le climat et les élargir en tendant la main aux travailleurs et aux syndicats afin de nous unir dans une grève puissante : le blocage de l’économie capitaliste. Cela montre aussi notre potentiel pour prendre le pouvoir économique entre nos mains.

    7. Changeons le monde : Les êtres humains font partie de l’éco-système – le capitalisme n’en fait pas partie. Combattons le capitalisme pour le remplacer par une société reposant sur les besoins des gens et non sur les profits – une société socialiste démocratique ! Faites une réelle différence en rejoignant une alternative combative, internationaliste et socialiste !

  • Catastrophe climatique et nécessité d’une économie planifiée

    Les 20 années les plus chaudes jamais enregistrées se sont produites au cours des 22 dernières années et la hausse des températures n’est qu’un des symptômes de la catastrophe climatique que nous connaissons actuellement. 8% des espèces sont menacées d’extinction. L’État de Louisiane perd la surface d’un terrain de football toutes les 45 minutes en raison de l’élévation du niveau de la mer. Les feux de forêt ravagent l’Ouest des États-Unis et les ouragans ont ravagé la côte sud-est.

    Par Keely Mullen, Socialist Alternative (USA)

    L’humanité est à la croisée des chemins. L’un après l’autre, les rapports nous avertissent qu’à moins que des mesures décisives ne soient prises pour réduire les émissions de carbone, nous risquons d’atteindre des points de non-retour après lesquels les effets sur l’environnement ne pourront être inversés. Un rapport de Columbia Engineering prévoit que la capacité de la planète à absorber le dioxyde de carbone pourrait commencer à diminuer en 2060. Notre filet de sécurité contre l’excès de dioxyde de carbone dans l’atmosphère s’érode, accélérant considérablement les pires effets du changement climatique.

    Un autre de ces points de non-retour est la fonte de la glace polaire. La glace aux pôles agit comme un réflecteur qui renvoie une partie des rayons du soleil dans l’espace et refroidit la planète. Lorsque cette glace fond, elle révèle l’eau plus foncée qui se trouve en dessous et qui absorbe beaucoup plus de chaleur, déclenchant ainsi une boucle de réaction qui augmente de plus en plus le réchauffement. Un autre danger de la fonte des glaces est qu’elle finira par découvrir les couches de pergélisol existantes qui contiennent actuellement d’énormes quantités de méthane. Si le pergélisol fond, ce méthane – qui a un effet de réchauffement beaucoup plus important que le dioxyde de carbone – sera rejeté dans l’atmosphère.

    L’enjeu de l’aggravation de la crise climatique n’est pas seulement notre confort, mais aussi l’accès aux ressources collectives de la terre, à l’eau, à la terre et à l’air pur, ainsi que le déplacement massif de millions de personnes qui deviendront des réfugiés climatiques.

    Les climatologues sont particulièrement préoccupés par l’effet du changement climatique sur le cycle de l’eau de la planète. La hausse des températures a entraîné une augmentation de la quantité de vapeur d’eau contenue dans l’atmosphère, ce qui rend la disponibilité de l’eau très difficile à prévoir. Cela peut entraîner à la fois des pluies torrentielles plus intenses et des sécheresses plus graves.

    Bien que les tempêtes tropicales, les ouragans et les pluies de mousson fassent partie du régime météorologique normal des États-Unis, l’augmentation de la fréquence et de la gravité de ces phénomènes entraînent des inondations plus intenses qui menacent la qualité générale de notre eau. En effet, les eaux d’inondation recueillent les eaux usées, les pesticides, l’huile de moteur, les eaux usées industrielles et toutes sortes de contaminants et les rejettent directement dans nos cours d’eau. En 2014, l’ouragan Sandy a inondé 10 des 14 stations d’épuration des eaux usées de la ville de New York, provoquant le rejet d’eaux usées partiellement traitées ou non traitées dans les cours d’eau locaux.

    Les entreprises sont responsables

    Quand Al Gore a sorti Une vérité qui dérange en 2006, il a eu un effet retentissant, expliquant en termes simples la science derrière le réchauffement climatique et le danger que cela représente pour l’humanité. Ce film a lancé un réel débat étant donné que pendant des décennies, les grandes entreprises se sont engagées dans une campagne déterminée pour cacher les faits sur le changement climatique afin d’éviter toute perturbation de leurs activités extrêmement rentables. Cette campagne écœurante a sans doute déjà causé la mort de milliers de personnes.

    La conclusion d’Al Gore, c’est que le ralentissement ou l’inversion des effets du changement climatique reposent sur les épaules des individus et leurs choix de consommation. Changez vos ampoules, prenez des douches plus courtes, achetez une voiture hybride, n’utilisez pas de pailles en plastique. Bien que certains de ces changements à notre consommation quotidienne pourraient avoir un impact, même si tout le monde aux États-Unis suivait chaque suggestion d’Une vérité qui dérange, les émissions de carbone aux États-Unis ne diminueraient que de 22 % ! Le consensus scientifique est qu’il doit être réduit de 75 % à l’échelle mondiale. D’où la question de savoir qui sont les véritables responsables de la crise climatique et comment les affronter ?

    Les rapports ont révélé que 100 entreprises sont à elles seules responsables de 71 % des émissions mondiales depuis 1988, la plupart d’entre elles étant des sociétés productrices de charbon et de pétrole comme Exxon, Shell et BP.

    Ce n’est ni une coïncidence ni un accident que ces entreprises soient les principaux moteurs du réchauffement climatique. Il est inhérent à la logique du capitalisme que, pour rester viables, les entreprises doivent maximiser leurs profits. Cela signifie qu’il faut rechercher tous les raccourcis possibles, toutes les dépenses qui peuvent être évitées et toutes les mesures de sécurité qui peuvent être contournées.

    Lors de l’horrible marée noire de Deepwater Horizon en 2010, 4,9 millions de barils de pétrole ont été déversés dans le golfe du Mexique. Une commission de la Maison-Blanche a confirmé qu’avant l’explosion, BP, Transocean et Halliburton ont pris une série de décisions pour réduire les coûts, qui ont finalement causé l’explosion de la plate-forme pétrolière et la mort de 11 travailleurs. Cette commission de la Maison-Blanche a elle-même confirmé que cela allait probablement se reproduire en raison de la “complaisance de l’industrie”. En d’autres termes, cela se reproduira probablement parce que le coût du nettoyage d’une catastrophe n’est rien comparé aux profits réalisés en la provoquant.

    Diverses initiatives politiques ont été proposées pour faire face à cette crise, dont la plupart n’arrivent pas à la cheville de ce qu’il est nécessaire de faire. Le Green New Deal (GND) d’Alexandria Ocasio-Cortez est celui qui va le plus loin, appelant à une transition rapide vers une énergie 100% renouvelable, à un remaniement des systèmes de transport et à une imposition progressive. Gagner le GND représenterait un énorme pas en avant vers une société durable, mais son talon d’Achille, c’est son approche de la puissance structurelle du secteur de l’énergie. Si le secteur de l’énergie reste entre les mains du secteur privé, ils feront tout ce qui est en leur pouvoir pour saper le GND, qui ferait passer la valeur de leurs réserves inexploitées de centaines de milliards de dollars à zéro. Les objectifs contraires des chefs d’entreprise, dont le but est de réaliser des bénéfices, et des forces qui tenteraient de mettre en œuvre le GND rendront pratiquement impossible une transition rapide vers les énergies renouvelables.

    Arguments pour la propriété publique

    Il n’est pas du tout impossible que la pression des masses conduise à des mesures qui amorcent la transition des combustibles fossiles aux énergies renouvelables, même sous le capitalisme. Toutefois, sans intégrer d’importants secteurs de l’économie (à commencer par le secteur de l’énergie) au secteur public, cette transition serait lente et largement désorganisée. Pour changer radicalement de cap et éviter les pires effets du changement climatique, nous devons nous mettre sur le pied de guerre. Cela signifie une approche rapide et organisée pour mettre le secteur de l’énergie sous propriété du secteur public et le ré-équiper sur une base renouvelable.

    Pour opérer une transition rapide vers l’abandon des combustibles fossiles – même dans le cas d’un secteur énergétique public – il faudrait également faire entrer d’autres secteurs de l’économie dans le domaine public. La reprise d’une partie importante du secteur manufacturier permettrait l’expansion rapide des voitures électriques et des transports publics. Au-delà de cela, nous avons besoin de banques publiques pour aider les familles et les petites entreprises à faire la transition vers des logements et des commerces éconergétiques. Un changement aussi profond indique une réorganisation complète de la production sur une base socialiste avec une économie démocratiquement planifiée.

    Historiquement, le capitalisme a libéré la productivité humaine à grande échelle. Cependant, les caractéristiques déterminantes du capitalisme – la propriété privée et l’État-nation – sont maintenant devenues un obstacle au développement futur de notre économie et de notre société. C’est ce qui ressort clairement de la série d’accords internationaux sur le climat qui ont eu très peu d’effet en raison de la réticence des États-nations concurrents à faire des concessions qui profiteraient à leurs rivaux.

    À l’heure actuelle, toutes les grandes décisions sur la façon d’utiliser les ressources de la société sont prises par quelques dirigeants d’entreprises extrêmement riches. Les décisions sont prises en fonction de ce qui rapporte le plus d’argent. Cela signifie souvent l’utilisation de méthodes totalement inefficaces pour produire. Par exemple, lorsqu’une voiture est en cours d’assemblage, presque toutes les pièces se rendent au Mexique, au Canada et aux États-Unis avant que les pièces ne s’assemblent pour former une voiture. La base métallique d’un volant fabriqué aux États-Unis est envoyée au Mexique pour être recouverte et cousue avant d’être renvoyée aux États-Unis. C’est simplement pour que l’entreprise puisse trouver la main-d’œuvre et les matériaux les moins chers pour fabriquer son produit final.

    L’industrie dite de la “mode rapide” est un autre exemple de production inefficace et gaspilleuse sous le capitalisme. L’industrie de la mode est le deuxième plus grand pollueur au monde. Créer des tendances qui changent si rapidement que personne ne peut les suivre garantit que les gens continuent d’acheter des vêtements jetables bon marché, de les jeter et d’en acheter d’autres. Quatre-vingts milliards de vêtements sont produits en série chaque année, presque exclusivement à partir de textiles gourmands en eau mais bon marché comme le coton. Afin d’obtenir la bonne couleur pour une paire de jeans, 10 849 litres d’eau sont utilisés !

    S’il s’agit là d’exemples choquants de gaspillage et de manque total d’innovation, c’est typique de la façon dont la société est organisée sous le capitalisme. La question est donc, quelle est l’alternative ? Comment organiser la société plus efficacement, et dans l’intérêt des personnes et de la planète plutôt que dans celui du profit ?

    Besoin d’un système planifié

    Nous avons besoin d’une économie démocratiquement planifiée dans laquelle les 500 plus grandes entreprises sont mises sous propriété publique, et où les décisions sur la façon dont une industrie donnée est gérée sont prises par des organes élus de travailleurs et de consommateurs. La crise climatique est peut-être la crise la plus existentielle à laquelle l’humanité est confrontée, mais le capitalisme engendre inévitablement des inégalités massives, la pauvreté, et le racisme structurel. Pour répondre à toutes ces questions, il faut une société où les décisions économiques clés sont prises démocratiquement par les masses populaires.

    Mettre une entreprise en propriété publique, c’est retirer ses ressources matérielles – usines, outils, réseaux de distribution, technologies, infrastructures – et ses réserves financières existantes des mains d’investisseurs fortunés et les remettre entre les mains de la société dans son ensemble. Une fois cette étape critique franchie, des conseils démocratiques peuvent remplacer les patrons capitalistes et faciliter le fonctionnement de cette entreprise ou industrie. Ces conseils devraient refléter l’expertise des travailleurs de cette industrie, qui sont intimement familiers avec la façon dont elle fonctionne, ce qu’elle produit et ce qui peut être amélioré. Afin d’empêcher le développement d’une bureaucratie, toute personne élue à un comité d’entreprise ne gagnerait pas plus d’argent que le travailleur moyen de cette industrie et serait révocable.

    Le but de ces conseils ne serait pas de maximiser la rentabilité de leur industrie, mais plutôt de maximiser la capacité de cette industrie à répondre aux besoins de la société. Cela conduirait à une augmentation substantielle du niveau de vie général de la grande majorité de la population parce qu’il n’y aurait aucune raison de maintenir des salaires bas, des semaines de travail inutilement longues, ou de sous-financer les services publics.

    La transition vers une économie planifiée peut très bien commencer dans un pays, mais pour qu’elle réussisse, elle devra s’étendre à l’échelle internationale. Nous vivons dans une économie mondiale créée par le capitalisme, mais pour en tirer pleinement parti, il faut une planification socialiste mondiale. Dans le cadre d’une économie planifiée démocratiquement, des structures internationales devraient être mises en place pour faciliter la coordination maximale des conseils ouvriers dans les différentes industries au-delà des frontières.

    Comme on l’a vu plus haut, la plupart des grandes industries du capitalisme sont pieds et poings liés par la nécessité constante de réduire les coûts. Les patrons chercheront des raccourcis pour s’assurer qu’ils obtiennent les biens et la main-d’œuvre les moins chers. La tâche des conseils démocratiquement élus pour la gestion des lieux de travail et des industries serait d’identifier les domaines où les choses peuvent être rendues plus efficaces et plus durables sur le plan environnemental. Par exemple, à l’heure actuelle, les vastes réseaux de logistique et de chaîne d’approvisionnement qui existent chez Amazon et Walmart sont complètement séparés l’un de l’autre parce qu’ils sont en concurrence directe. Une fois cette concurrence éliminée, ces réseaux incroyablement utiles peuvent être combinés et réoutillés. Le modèle de flux tendu adopté par Amazon et d’autres grands détaillants, grâce auquel un produit peut être commandé et livré en quelques jours, pourrait être d’une grande utilité pour la société s’il n’était pas motivé par le profit. La vaste entreprise de Walmart est elle-même planifiée – avec une coordination à tous les niveaux de la chaîne d’approvisionnement. Cela jette les bases d’une transition relativement facile vers une entreprise coopérative, planifiée démocratiquement.

    Alors, comment tout cela est-il lié à la menace existentielle du changement climatique, et comment une économie planifiée pourrait-elle y répondre ?

    Planifier un avenir vert

    Le capitalisme génère des innovations importantes – mais celles-ci sont motivées par la rentabilité, pas forcément la nécessité.

    Sur la base d’une économie planifiée démocratiquement, la recherche peut se faire dans l’intérêt de la population et du climat. Nous pouvons investir dans une véritable transformation des grandes industries sur une base durable. Nous pouvons investir dans le reconversion de millions de travailleurs dans les industries actuellement polluantes et créer des millions d’emplois syndiqués bien rémunérés en exploitant l’énergie renouvelable grâce aux technologies solaire, éolienne et marémotrice. De nouvelles formes d’énergie renouvelable seront sans aucun doute découvertes, et le perfectionnement de la technologie pour exploiter cette énergie exigera la formation d’un plus grand nombre de scientifiques et d’ingénieurs, ainsi que le transfert des scientifiques qui travaillent actuellement au développement d’armes vers des travaux beaucoup plus utiles.

    Afin d’inverser certains des pires effets de la crise climatique, un projet de reboisement mondial devrait être mis en œuvre. La reforestation par la plantation de millions d’arbres endémiques réduirait considérablement la pollution de l’air et rétablirait les habitats naturels et les écosystèmes qui ont été détruits par la déforestation. Parallèlement, il faudra procéder à une réorganisation importante de l’agriculture mondiale afin de réduire la superficie des terres consacrées à l’élevage, ainsi qu’au développement de substituts sains de la viande.

    Dans la plupart des grandes villes, les transports publics s’érode complètement, pendant que les Américains passent 19 jours complets par an coincés dans les embouteillages sur le chemin du travail. Si les gens devraient avoir le choix de posséder et d’utiliser leur propre véhicule, l’expansion massive du transport en commun et son électrification totale permettraient à beaucoup plus de gens de se déplacer plus rapidement et plus facilement que la voiture. Au-delà du transport en commun local, il faut également davantage de trains longue distance. Les trains électriques à grande vitesse pourraient constituer une alternative moins coûteuse et beaucoup moins polluante que le transport aérien.

    L’expansion du transport en commun durable permettrait non seulement d’améliorer le niveau de vie de nombreuses personnes, mais aussi de faire un bond en avant dans la transformation de la société sur une base écologique.

    Une société libérée des contraintes du profit pourrait s’engager dans un certain nombre de projets révolutionnaires pour changer la société : la création de logements à haut rendement énergétique avec une isolation plus efficace, la recherche de stations de purification de l’air pollué, et le développement de routes électrifiées pour charger les véhicules électriques lorsqu’ils circulent.

    La solution à cette crise ne se fera pas par en haut, elle ne sera pas initiée par Elon Musk, elle ne résultera pas d’un simple vote tous les quatre ans. Le rééquipement de la société sur une base véritablement durable et la garantie d’un avenir pour l’humanité reposent sur la fin de la domination anarchique et chaotique du capitalisme et son remplacement par une économie planifiée véritablement démocratique.

    Quelle est la prochaine étape ?

    Gagner un changement révolutionnaire et transformer notre société sur une base socialiste exigera une confrontation historique avec les super riches qui dominent actuellement notre société. Il y a des signes très encourageants aux États-Unis et à l’échelle internationale quant à la possibilité de relever ce défi, des grèves historiques des enseignants qui ont eu lieu aux Etats-Unis au cours de la dernière année et demie et qui pourraient s’étendre à d’autres secteurs, au mouvement grandissant des jeunes pour le climat qui prévoit maintenant une journée internationale d’action le 20 septembre.

    C’est la force unie et organisée des travailleurs et des jeunes qui peut ouvrir la voie au changement socialiste. Une étape critique dans ce processus sera la construction de notre propre parti politique de masse avec un programme socialiste clair et une direction déterminée. Depuis 2015, nous avons mis l’accent sur le rôle que Bernie Sanders – et maintenant Alexandria Ocasio-Cortez – pourraient jouer dans ce processus, en utilisant leur énorme base de soutien pour une politique progressiste et ouvrière, et en lançant une nouvelle organisation de masse.

    Nous devons continuer à construire et à renforcer les organisations de la classe ouvrière en vue des luttes décisives qui nous attendent. Cela signifie construire sur nos lieux de travail des syndicats de lutte bien organisés, véritablement démocratiques, avec la participation active de tous les travailleurs et travailleuses et qui sont prêts à faire tout ce qui est nécessaire pour se défendre contre les attaques de nos patrons. Les syndicats doivent s’associer aux mouvements sociaux dynamiques qui luttent actuellement contre le changement climatique, le sexisme et le racisme, et montrer la voie à suivre sur une base ouvrière.

    Afin de prendre les mesures nécessaires pour sauver la planète de sa destruction par le profit, nous devons fondamentalement rompre avec le capitalisme et lutter pour la transformation socialiste de la société sur la base de l’innovation, la coopération et l’égalité.

  • Changements climatiques : l’équilibre fragile de l’extrême Nord

    Durant les dernières années, voire les derniers mois, différents phénomènes météorologiques inusités – que ce soit par leur force ou leur manifestation plus fréquente qu’à l’accoutumée – se sont produits. Que ce soit les tornades, les crues printanières, les canicules à répétition ou les trop nombreuses périodes de gel-dégel, tout le monde est affecté à divers degrés. Et ça, c’est juste pour le Québec. Ou plutôt, juste pour la partie la plus au sud du Québec.

    Par Alexandra L., Alternative Socialiste (CIO-Québec)

    L’extrême Nord canadien est pourtant un écosystème fragile dont nous dépendons toutes et tous. L’Inuit Nunangat est cette partie de l’Arctique canadien qui est composée de 51 collectivités réparties sur 4 territoires : l’Inuvialuit, le Nunavut, le Nunavik et le Nunatsiavut. Le mot inuit Nunangat sert à désigner la terre, l’eau et la glace. Les Inuits considèrent que leur terre natale fait partie intégrante de leur culture et de leur mode de vie.

    Un équilibre fragile

    Selon certaines sources, on évalue que dans un peu plus de 10 ans, la température annuelle moyenne du Nunangat sera proche de 2°C. La température annuelle moyenne est actuellement de -4,4°C à Kuujjuarapik. Le réchauffement climatique fait fondre des glaces éternelles causant une augmentation du niveau de la mer. Aujourd’hui, pas loin de 40% de la couverture de glace de mer a pratiquement disparu dans le Nunangat.

    Dans une région où règne l’insécurité alimentaire, la chasse et la pêche sont des moyens de subsistance essentiels à la survie des communautés. Les personnes autochtones aînées ont constaté des changements dans les vents et les nuages, rendant difficile de prévoir la météo selon l’expertise traditionnelle. Certaines routes traditionnelles sont maintenant inaccessibles. Maintenant que les lacs et les rivières fondent plus vite, les routes sont dangereuses au printemps et le dégel du pergélisol rend les déplacements en VTT plus laborieux l’été.

    L’insécurité alimentaire

    De nos jours, 7% de la population canadienne vit dans l’insécurité alimentaire contre plus de 25% des Inuits, voire jusqu’à 70% selon certaines sources. Le coût des denrées de base est souvent de deux à trois fois plus élevé que dans les grands centres urbains. Les moyens de subsistance traditionnels sont donc essentiels pour la survie des Inuits. Malheureusement, les changements climatiques affectent aussi les animaux et les plantes. Les changements dans les courants marins apportent des contaminants. Les changements dans la végétation affectent la survie du gibier.

    Le passage du Nord-Ouest

    Depuis le début de la colonisation, on rêve de ce passage du Nord-Ouest qui aurait permis aux commerçants européens d’arriver en Asie plus rapidement. Pour les États impérialistes que sont les États-Unis, la Russie et le Canada, il est essentiel d’assurer le contrôle des eaux et des terres arctiques. Que ce soit dans le but de prospecter et d’extraire des ressources naturelles ou encore d’assurer sa prédominance militaire, la région est stratégique. La délocalisation forcée de familles d’Inukjuak à Grise Fiord et à Resolute dans les années 50 témoigne de cette volonté du gouvernement canadien d’occuper ces terres nordiques.

    L’exploitation des ressources naturelles dans ces régions est potentiellement nuisible aux communautés y vivant. Elle a aussi un impact environnemental certain. Par exemple, l’exploitation par Baffinland Mining du secteur de Milne Inlet pourrait avoir un impact négatif sur les narvals qui fréquentent les lieux. L’augmentation du trafic maritime qui sera généré aura, elle aussi, un impact sur les écosystèmes de l’Arctique.

    Il ne faut pas non plus négliger l’impact social, culturel et communautaire que pourrait avoir l’arrivée massive d’entreprises capitalistes sur les territoires Inuit. Le mode de vie des peuples inuits est basé sur des traditions ancestrales, la chasse et la pêche. Les ressources alimentaires traditionnelles se font plus rares et le coût du transport de denrées provenant du sud accentue l’insécurité alimentaire de plusieurs familles.

    Dans le respect de la communauté

    Il ne faut pas refuser d’emblée tout changement dans le Nunangat et les autres régions nordiques. La création d’emplois ainsi que le développement économique écologiquement responsable peuvent être profitables à toutes les communautés, à condition que celles-ci soient impliquées démocratiquement dans les décisions et qu’elles rompent avec la logique du libre marché. Il en va du droit fondamental de ces peuples à l’autodétermination. Personne ne connaît mieux qu’eux les enjeux de leurs territoires. Personne n’est mieux placé qu’eux pour les gérer.

    Les États capitalistes comme le Canada rechignent à reconnaître le droit à l’autodétermination des peuples autochtones, car ils veulent contrôler les ressources pour les exploiter en toute impunité. Leurs profits en dépendent. Dans ce contexte, la lutte pour l’indépendance politique et économique du Nunangat est une lutte contre les intérêts des capitalistes canadiens et québécois.

  • Manifestations à travers le monde contre les incendies en Amazonie

    Ces derniers jours, les dirigeants du G-7 se sont réunis à Biarritz, en France. Le Président français Macron, entre autres, a continué à prétendre qu’il se soucie du climat. Il a promis plusieurs millions d’euros d’aide contre les incendies de la forêt amazonienne ce que le président brésilien Bolsonaro a rapidement refusé. Quelques millions, c’est de la poudre aux yeux ces dirigeants mondiaux : leur réunion a, en soi, coûté des millions d’euros et, pour accroître son propre prestige, Macron a même fait venir un ministre iranien. En outre, une série de multinationales basées dans leurs pays respectifs sont actives dans le pillage de la forêt amazonienne. Ce sont toujours les intérêts économiques qui prévalent pour les dirigeants du capitalisme. Le résultat est tout ce que nous voyons en Amazonie : les poumons de notre planète sont en flammes !

    Nous ne devons pas nous attendre à des actions audacieuses de la part du monde des affaires. Un certain nombre de grandes banques dans notre pays ont signé l’appel ” Sign for my future ” afin de relever ” tous ensemble ” les défis climatiques. Nous avons immédiatement mis en garde contre cette hypocrisie. Nous avons par exemple rappelé que selon un rapport du 11.11.11, BNP Paribas, ING et KBC ont des prises de participation importantes dans des sociétés minières telles que Glencore, Vale et BHP Billiton. Ces compagnies minières sont impliquées dans le pillage de la forêt amazonienne. Quelqu’un pense-t-il que nous arrêterons la catastrophe climatique en comptant sur la bonne volonté de ceux qui en sont responsables ?

    Nous devons nous organiser par nous-mêmes. L’avenir de la planète est trop important pour être laissé aux grandes entreprises et à leurs marionnettes politiques qui, au cours des dernières décennies, ont démontré qu’elles nous entraînent directement dans l’abîme de changements climatiques irréversibles. Nous entendons par ” par nous-mêmes ” les travailleuses et travailleurs ordinaires et leurs familles : la très grande majorité de la population. Beaucoup s’inquiètent de l’avenir des prochaines générations. Ils ont raison : nous devons nous en inquiéter. Dans le même temps, nous devons nous rendre compte qu’il est possible de forcer le changement, mais pas en le demandant gentiment. En construisant un rapport de force, l’establishment devra nous prendre en compte. Les manifestations de masse constituent un pas important dans cette direction. Nous devrons aller encore plus loin et, s’il n’y a pas de changement, utiliser notre force la plus importante : notre nombre. Sans les travailleurs, le système capitaliste ne peut fonctionner. Des actions dynamiques sont nécessaires pour établir un rapport de force dans lequel les grèves feraient la différence.

    L’appel international à l’action lancé fin septembre – du 20 au 27 septembre – est donc important. La ‘grève de la terre’ (Earth strike) peut devenir importante et donner une nouvelle dynamique au mouvement climatique dans notre pays. Les médias tentent de réduire le mouvement dans notre pays à quelques porte-parole connus, mais la force de la protestation est qu’elle est portée par des dizaines de milliers de jeunes. Leur mécontentement n’a pas disparu. Organisons-le en comités pour que les jeunes puissent contrôler démocratiquement leur propre mouvement de protestation et discuter ensemble des prochaines étapes et du changement de système que nous voulons.

    Lundi, une action réussie à l’initiative de Extinction Rebellion a réuni quelque 400 manifestants devant l’ambassade du Brésil à Bruxelles. Dans le monde entier, de multiples actions ont été menées. Le PSL et le CIO, l’organisation internationale dont nous sommes la section belge, étaient présents à nombre d’entre elles pour défendre une alternative socialiste au capitalisme. Voici quelques photos de différentes actions : Bruxelles, Dublin, Göteborg, Tel-Aviv, Vienne, Sao Paulo.

    Bruxelles

    Tel Aviv

    Viennes

    Dublin

    Goteborg

    Sao Paulo

  • Pourquoi l’Amazonie est-elle détruite ?

    En juillet dernier, une nouvelle très inquiétante a circulé : on estime que depuis le début de l’année, lorsque Jair Bolsonaro a pris en main la présidence du Brésil, l’Amazonie a perdu une superficie forestière égale à un terrain de football par minute. Cette information est maintenant dépassée par une réalité encore plus sombre. Les innombrables incendies qui se sont déclarés au cours des dernières semaines dans la forêt tropicale détruisent des écosystèmes extrêmement importants et aggravent encore l’effroyable déforestation de l’Amazonie.

    Par Electra Klitsa, Xekinima (Grèce)

    Le ciel de villes majeures du Brésil et d’autres pays d’Amérique latine s’est noirci de fumées. L’impact de cette catastrophe aura de terribles effets sur l’atmosphère, non seulement à la suite des incendies eux-mêmes, mais également en raison de la destruction d’une forêt qui absorbe de grandes quantités de dioxyde de carbone. Le climat de la région en souffrira car il dépend de la forêt amazonienne, mais il faut également penser à la perte d’une partie considérable de la biodiversité de la forêt amazonienne, que l’on ne retrouve nulle part ailleurs sur le globe.

    Pour comprendre l’ampleur du phénomène, il suffit de savoir que d’après un article de 2017, une nouvelle espèce de flore ou de faune est découverte en Amazonie tous les deux jours. Nous perdons donc aujourd’hui des espèces donc ne connaissons même pas l’existence. Certaines d’entre elles auraient pu être utiles à toute l’humanité pour leurs propriétés curatives. D’autres jouaient peut-être un rôle clé dans l’équilibre de la chaîne alimentaire et leur extinction va peut-être contribuer à celle de nombreuses autres.

    Les Amérindiens

    Au-delà des plantes et des animaux, cependant, il y a des êtres humains. Non seulement les habitants de la planète et les générations futures qui seront touchées indirectement et à long terme par la catastrophe, mais aussi les habitants de la forêt amazonienne d’aujourd’hui.

    Des tribus autochtones persistent à vivre dans la forêt, la protègent et en dépendent pour leur existence. Certaines de ces tribus disparaîtront avec la nature de la région sans que leur existence ne nous ait jamais été connue. D’autres sont connues non seulement pour leur grand patrimoine culturel, mais également pour leurs grandes luttes contre l’épidémie de “croissance” dévastatrice en Amazonie. L’une des figures les plus emblématiques de cette lutte est Chico Mendes, assassiné en 1988 pour avoir tenté d’organiser les peuples autochtones contre la destruction de la forêt qui était leur foyer et leur moyen de survie.

    Aujourd’hui, ses assassins – les grandes entreprises agricoles et minières et les gouvernements qui les servent – continuent leur oeuvre destructrice en brûlant l’Amazone.

    Une forêt géante “dérangeante”

    Dans la plupart des cas d’incendies de forêt, il faut être prudent et disposer de preuves concrètes avant de parler d’incendie criminel, voire même spécifiquement planifié. Mais dans le cas de l’Amazonie menacée depuis des décennies et tout particulièrement lorsque d’innombrables incendies éclatent simultanément dans d’innombrables endroits, il est pour le moins naïf de parler de hasard. Après les bulldozers, visiblement trop lent, le big business a fait appel aux incendies.

    Mais pourquoi l’Amazonie est-elle détruite? Que veulent ceux qui s’attaquent au cœur de cette « inutile » forêt ? Dernièrement, les sociétés d’extraction de pétrole et d’or harcèlent de plus en plus les communautés autochtones qui protègent les forêts amazoniennes. Les entreprises agricoles et d’élevage rêvent de convertir encore plus de forêt en cultures et en pâturages. La plus grande partie de la forêt tropicale n’est plus que cela: de nouvelles fermes et de nouveaux champs. Mais de combien de champs a-t-on besoin sur la planète? Les champs existants ne leur suffisent-ils pas ? Après tout, la destruction de l’Amazonie ne date pas d’aujourd’hui, mais dure depuis de nombreuses décennies.

    Des champs à usage unique

    Non, les champs ne leur suffisent pas, car le sol de l’Amazone n’est pas fait pour produire du soja. Il convient à la préservation de forêts tropicales séculaires, mais est très pauvre en éléments nutritifs nécessaires à la production agricole.

    Ainsi, après un ou deux ans de production, le “champ” devient obsolète. Rapidement, les entreprises agroalimentaires recherchent un autre “champ” dans un autre endroit tout aussi inapproprié de l’Amazonie. Des siècles d’histoire naturelle, des richesses naturelles incalculables, un patrimoine culturel, une biodiversité non cartographiée, des vies humaines sont en train d’être détruites pour une production agricole qui n’a une durée de vie que d’un an ou deux. Cette image résume l’absurdité absolue que l’on appelle le système capitaliste.

    Un pantin efficace

    Si la situation n’était pas si tragique, il y aurait presque de quoi en rire. Le président brésilien a clairement expliqué dès le premier jour de son accession au pouvoir que la forêt amazonienne est un obstacle pour les grandes entreprises. Et sa principale vocation est de servir les intérêts de ces dernières. Selon lui, ce sont les organisations environnementales actives dans la région qui sont responsables des incendies alors qu’il a livré l’Amazonie aux grands intérêts commerciaux qui déterminent le destin de la planète !

    Ces entreprises mettent en jeu la survie de la nature et des êtres humains. Cette absurdité n’a qu’une issue. Nous la renverserons ou elle nous détruira.

    Notre section-soeur brésilienne, LSR, a participé aux actions contre Bolsonaro et le big business
  • Rassemblement à Bruxelles : Rebel for the Amazon

    Rassemblement devant l’ambassade du Brésil ce lundi à Bruxelles

    A l’initiative d’Extinction Rebellion Belgium.

    11h, devant l’ambassade d’ambassade du Brésil à Bruxelles, 350 Avenue Louise, 1050 

    La forêt amazonienne est en flammes. Elle représente 20% de la production mondiale d’oxygène et est essentielle dans la lutte contre le changement climatique !

    Sous le régime de droite dure de Bolsonaro, la déforestation industrielle est montée en flèche. Les mesures de protection ont été abolies et l’agro-industrie se frotte les mains. L’Institut national de recherche spatiale (INPE) a annoncé que 3.500 kilomètres carrés de forêt vierge avaient déjà disparu cette année. La réaction de Bolsonaro ? Démettre immédiatement de ses fonctions le directeur de l’institut.

    Depuis le début de l’année, 75.000 incendies ont été recensés, soit presque deux fois plus que l’an dernier. On peut supposer qu’il ne s’agit pas d’incendies spontanés, il y a eu trop de pluie ces derniers mois pour cela. Il s’agit d’une intervention délibérée de l’agro-industrie dans la recherche de nouveaux et plus grands profits. C’est un exemple clair de la façon dont des représentants du capitalisme comme Bolsonaro contribuent à la destruction de notre planète par de grandes entreprises. Nous avons besoin d’une alternative socialiste à ce système pourri !

  • Le socialisme écologique de Karl Marx est un guide pour la lutte d’aujourd’hui

    Par Arne Johansson. Première publication le 18 juillet dans Offensiv, hebdomadaire de Rättvisepartiet Socialisterna (CIO Suède)

    Trop de socialistes, même parmi ceux qui se considèrent comme des marxistes révolutionnaires, ont malheureusement tardé à découvrir et à comprendre l’analyse écologique de la rupture métabolique irréparable du capitalisme avec la planète et la nature, sur laquelle Karl Marx et Friedrich Engels ont commencé à travailler au XIXème siècle.

    Dans son livre Karl Marx’s Ecosocialism: Capital, Nature and the Unfinished Critique of Political Economy (“L’écosocialisme de Karl Marx : le capital, la nature et la critique inachevée de l’économie politique»), Kohei Saito, un chercheur marxiste japonais, a apporté une nouvelle contribution importante pour remédier à cette lacune, à un moment où l’attitude prédatrice du capitalisme envers les personnes et la nature approche des points de basculement qui menacent de rendre inhabitables de grandes parties de la planète.

    Saito, professeur agrégé d’économie politique à l’Université d’Osaka, s’appuie en grande partie sur les nombreuses notes inédites de Marx. sur lesquelles il travaille en tant qu’éditeur du Marx-Engels-Gesamtausgabe (MEGA), un projet encore inachevé qui vise à rassembler les œuvres de ces deux pionniers.

    Un compte rendu détaillé de la façon dont Marx a développé son immense intérêt pour les recherches les plus récentes en sciences naturelles, et dans des sujets tels que la biologie, la chimie, la géologie et la minéralogie, vient de s’ajouter à ce matériel. Son point de départ a été la crise créée par l’industrialisation de l’agriculture par le capitalisme, et le clivage qu’il a décrit dans le métabolisme entre l’homme et la nature, ce qu’on appelle aujourd’hui le cycle écologique. Saito montre comment ces questions ont énormément intéressé Marx au cours de son travail inachevé sur le Capital, après la publication de sa première partie en 1867.

    Même si Friedrich Engels est, à ce jour, le plus connu du duo Marx-Engels en matière d’écrits scientifiques comme “Anti-Dühring” et “Dialectique de la nature”, son ouvrage inachevé, mais publié à titre posthume, Saito souligne que Marx était tout aussi intéressé par ces questions – toujours en contact étroit avec Engels.

    Pas moins d’un tiers des carnets de Marx – remplis de fragments, d’extraits et de commentaires – ont été écrits au cours des 15 dernières années de sa vie et, de ce nombre, près de la moitié traitent de sujets scientifiques. Cela réfute la position des soi-disant “marxistes occidentaux” (l’Ecole de Francfort, entre autres), qui critiquent depuis longtemps le fait qu’Engels tire les lois dialectiques du mouvement de la nature comme une distorsion non marxiste, et qui ont soutenu que le matérialisme historique de Marx ne peut être appliqué qu’à la société humaine.

    Dans la préface, Saito loue les efforts importants pour redécouvrir l’analyse de Marx de l’irréparable rupture métabolique du capitalisme, auxquels les professeurs socialistes Paul Burkett et John Bellamy Foster ont ouvert la voie depuis Marx and Nature de Burkett (1999) et Marx’s Ecology (2000) de Foster.

    Avec l’aide de la revue Monthly Review, dont Foster est le rédacteur en chef, tous les deux ont, de manière efficace, combattu la vision illusoire d’un Marx partisan de la croissance industrielle (“prométhéisme”) écologiquement naïf, vision qui a longtemps prospéré tant chez les théoriciens verts que chez les “éco-socialistes de première vague” tels Ted Benton, André Gorz, Michael Löwy, James O’Connor et Alain Lipietz.

    Le fait que Marx inspire aujourd’hui la recherche écologique dans le monde entier est une victoire importante pour cette lutte théorique, de même que les échos qui apparaissent de plus en plus dans les travaux des chercheurs en environnement et des débatteurs tels que This changes everything – capitalism versus the climate (“Ça change tout – le capitalisme contre le climat”) de Naomi Klein.

    Dans “L’écosocialisme de Karl Marx”, Saito montre comment Marx a progressivement développé son analyse de la “rupture métabolique” du capitalisme. Saito admet que la fascination du jeune Marx pour l’énorme développement des forces productives par le capitalisme peut parfois être perçue comme “productiviste”, même si dans ses “Cahiers de Paris” et les “Manuscrits économiques et philosophiques” de 1844, il décrit la division croissante du capitalisme (aliénation) entre ouvriers et fruits de la production, entre hommes et hommes, et entre les travailleurs et la nature, lorsque durant l’industrialisation, les ouvriers ont été séparés de la terre.

    A ce stade, Marx avait déjà formulé la tâche du communisme de restaurer une unité complète et rationnellement régulée entre l’humanité et la nature à un niveau supérieur. Mais ce n’est qu’après que Marx ait tourné le dos à la philosophie abstraite des Jeunes Hégéliens, avec Misère de la philosophie en 1847 par exemple, et connu la défaite des révolutions de 1848, qu’il commence sérieusement à approfondir ses études matérialistes sur le fonctionnement du capitalisme.

    Une partie centrale de la critique de Marx à l’égard de certaines théories classiques des économistes bourgeois sur les valeurs était que celles-ci considéraient le travail comme la source de toute valeur, alors que Marx démontrait minutieusement qu’ils regardaient aveuglément les valeurs d’échange du marché fournies par la force de travail. L’une des conclusions que Marx en tirera au cours de ses études économiques est qu’ils oublient alors les valeurs d’usage de la nature qu’ils considèrent comme “un don gratuit au capital”. Cela signifie que le capital, avec son accumulation compétitive, sape à la fois les travailleurs et la Terre, “les sources originelles de toute richesse”.

    Il semble que c’est par le contact avec son ami le physicien socialiste Roland Daniel et son intérêt pour l’écocycle entre animaux et plantes que Marx a noté pour la première fois le concept du métabolisme. L’homme existe, comme l’expliquerait Marx, dans “le métabolisme universel de la nature”, où il peut extraire de la nature des valeurs d’usage, dans le cadre du “métabolisme social”.

    Mais c’est quelques années plus tard, lors de ses recherches préliminaires pour le Capital et dans le contexte de la crise croissante de l’agriculture britannique, que Marx commence à s’intéresser sérieusement aux critiques du pillage industriel de la Terre, développées par l’agrochimiste allemand Justus von Liebig.

    Ici, Marx a également trouvé un appui à ses critiques de la méthode d’analyse non-historique de la rente foncière par l’économiste David Ricardo et de la question démographique par Thomas Malthus. Le rapport de l’homme à la nature a changé avec le développement de nouvelles méthodes de production. Mais c’est sous le capitalisme que se produisent les fractures les plus radicales dans la relation entre l’homme et la nature.

    Et c’est surtout sous l’influence de Liebig que Marx, en 1865-66, commença à réviser sa croyance antérieure, plus optimiste, dans les progrès technologiques contemporains et à comprendre comment les approches à court terme du capitalisme pour contrer la baisse de fertilité de la terre tendaient seulement à créer de nouvelles “fractures métaboliques irréparables” à un niveau plus élevé, et même à un niveau mondial.

    Saito explique comment Liebig, dans son livre pionnier, “Agricultural Chemistry”, a décrit comment la forte croissance urbaine des villes britanniques pendant l’industrialisation a considérablement augmenté la demande des produits agricoles des campagnes dépeuplées, alors qu’en même temps, les minéraux des aliments n’étaient pas retournés à la terre comme engrais mais, via les nouvelles toilettes de Londres et des autres villes, étaient rejetés avec les eaux usées dans les rivières et les mers polluées.

    Ainsi, non seulement la fertilité des champs britanniques a été épuisée, mais aussi celle des pays dont le guano (fèces d’oiseaux marins d’Amérique du Sud) et les os ont été importés comme engrais : “La Grande-Bretagne prive tous les pays des conditions de leur fertilité ; elle a déjà ratissé les champs de bataille de Leipzig, Waterloo et la Crimée à la recherche d’ossements, et consommé plusieurs générations de squelettes des catacombes siciliennes. […] On peut dire qu’elle est accrochée comme un vampire au cou de l’Europe”, écrit Liebig.

    Dans le Capital, Marx résume : “tout progrès dans l’agriculture capitaliste est un progrès dans l’art, non seulement de voler l’ouvrier, mais de voler le sol ; tout progrès dans l’augmentation de la fertilité du sol pendant un temps donné est un progrès vers la destruction des sources plus durables de cette fertilité” et : “la production capitaliste, par conséquent, ne développe les techniques et le degré de combinaison du processus social de production qu’en sapant simultanément les sources originelles de toute richesse – le sol et le travailleur”.

    La recherche désespérée du guano et du salpêtre par l’Angleterre et les États-Unis pour leur sol appauvri a poussé les États-Unis à annexer des dizaines d’îles riches en guano en 1856. Elle a également conduit, comme le souligne Saito, à la violente répression des peuples autochtones de la côte ouest de l’Amérique du Sud, ainsi qu’à la Guerre du Guano de 1865-66 et à la Guerre du Pacifique de 1879-84 pour le salpêtre.

    Dans le Capital, Marx montre aussi comment la nécessité sociale d’essayer de contrôler et d’apprivoiser une ressource naturelle tout en essayant de la protéger contre son exploitation a joué un rôle crucial dans l’histoire. Les travaux d’irrigation en Egypte, en Lombardie et en Hollande et les canaux artificiels comme en Inde et en Perse ont non seulement arrosé le sol, mais l’ont également fertilisé avec des minéraux apportés des collines comme sédiments. “Le secret de l’essor de l’industrie en Espagne et en Sicile sous la domination des Arabes réside dans leurs travaux d’irrigation”.

    Si Marx avait pu auparavant parler occasionnellement du rôle civilisateur du capitalisme pendant le colonialisme, il voyait maintenant, sans idéaliser les sociétés précapitalistes, principalement la souffrance et la misère après la dissolution des communautés locales traditionnelles, qui avait rompu la relation intime entre les hommes et la nature. Lorsqu’en 1856, le régime britannique de l’époque coloniale en Inde, selon Marx, “introduisit une caricature des grandes propriétés foncières anglaises” et abandonna le système de barrages et de drains précédemment contrôlé par l’Etat, il en résulta une sécheresse et une famine terribles qui causèrent un million de morts.

    Selon Marx, dans toutes les sociétés et tous les modes de production, l’homme doit faire face à la nature pour satisfaire ses besoins : “La liberté dans ce domaine ne peut consister qu’en ce que l’homme socialisé, les producteurs associés, régulent rationellement leurs échanges avec la Nature, les mettant sous leur contrôle commun, au lieu d’être dirigés par eux comme par les forces aveugles de la Nature ; et que cela se fasse avec le moins de dépense d’énergie et dans les conditions les plus favorables à, et les plus dignes de, leur nature humaine. »

    Dans son “Manuscrit économique de 1864-1865”, Marx avertit qu’avec le capitalisme, “au lieu d’un traitement conscient et rationnel de la Terre comme propriété collective permanente, comme condition inaliénable de l’existence et de la reproduction de la chaîne des générations humaines, nous avons l’exploitation et le gaspillage des pouvoirs de la Terre”.

    Dans un chapitre sur l’écologie de Marx après 1868, Saito souligne le grand intérêt de Marx pour les débats entre différents experts agricoles, par exemple ceux des écoles “physique” et “chimique”, sur les substances les plus importantes à ajouter pour augmenter la fertilité du sol, les minéraux ou les nitrates. Il note, par exemple, l’impression significative qui semble avoir été faite sur Marx par le chimiste James Johnston et, en particulier, par l’agronome allemand Karl Fraas, qui, en partie dans une polémique avec Liebig, a souligné le grand rôle que joue le changement climatique lorsque la déforestation réduit l’humidité du sol et l’approvisionnement naturel du sol en nutriments.

    Dans une lettre à Engels en 1868, Marx écrit que Fraas a “une tendance socialiste inconsciente”. Selon Marx, dans son livre Climate and the Vegetable World throughout the Ages, a History of Both (« Le climat et le monde végétal à travers les âges»), Fraas a montré comment “la culture, quand elle progresse de manière primitive et n’est pas consciemment contrôlée (en tant que bourgeois, bien sûr, il n’y arrive pas), laisse derrière elle des déserts, Perse, Mésopotamie, Grèce”.

    Fraas a été alerté des conséquences de la déforestation rapide dans des pays comme l’Angleterre, la France et l’Italie, même en altitude, dans des zones montagneuses auparavant inaccessibles, ce qui, selon lui, a soulevé la nécessité d’une réglementation. Par sa lecture de Fraas et d’un certain nombre d’autres chercheurs tels que John Tuckett et Friedrich Krichhof, Marx avait également noté dans ses manuscrits du troisième volume du Capital (les deuxième et troisième volumes ont été publiés après la mort de Marx par Engels sur la base des manuscrits incomplets de Marx) que ni l’agriculture ni la foresterie capitaliste ne pouvaient être durables et que la rupture irrémédiable entre société et nature n’était donc pas limitée à la dégradation des terres.

    “Le développement de la culture et de l’industrie en général s’est manifesté par une telle destruction énergétique de la forêt que tout ce qui est fait pour sa préservation et sa restauration semble infinitésimal “, note aussi Marx dans le manuscrit du volume deux du Capital.

    Cette tendance capitaliste à exploiter violemment la nature jusqu’à ses limites, qu’il voyait dans la sylviculture non durable, il la voyait également d’une manière qu’il trouvait “abominable” dans l’élevage des animaux. Dans un commentaire sur un extrait de l’éloge de Wilhelm Hamm à l’égard de l’élevage intensif de viande, Marx se demandait également si ce “système de prison cellulaire” et l’élevage grotesque d’animaux anormaux pouvaient finalement aboutir à “un affaiblissement grave de la force vitale”.

    Saito explique comment le grand intérêt de Marx pour les polémiques entre Liebig et Fraas et le développement rapide de la science et de la technologie l’a amené à la conclusion que des études approfondies étaient nécessaires pour voir combien de temps le capitalisme pouvait résister à sa crise écologique et que ce sont des questions qu’il estimait nécessaires de développer, ce qui, selon Saito, retarda le travail de Marx sur le deuxième et troisième volumes incomplets du capital.

    Même dans les études de l’historien Georg Ludwig von Maurer sur les sociétés précapitalistes égales et la nécessité d’essayer de réguler le métabolisme entre l’homme et la nature, dans ses “Cahiers ethnologiques” ultérieurs, Marx a vu “une tendance socialiste inconsciente”. Marx a été impressionné par la “vitalité naturelle” et la durabilité écologique des villages allemands autosuffisants qui, selon lui, étaient au Moyen Âge “uniquement axés sur la liberté et la vie publique”.

    Dans une lettre adressée à la Narodnik Russe Vera Zasulich, Marx n’exclut pas qu’une révolution socialiste en Russie puisse se baser sur des communes villageoises similaires et explique que le système capitaliste en Europe occidentale et aux Etats-Unis est “en conflit avec les masses ouvrières, avec la science et avec les forces très productives qu’il génère – bref, dans une crise qui va se résoudre par son élimination, par le retour des sociétés modernes à une forme supérieure de propriété et de production collectives “archaïque”.”

    Saito souligne qu’il est impossible de comprendre pleinement la critique inachevée de Marx sur l’économie politique si l’on ignore sa dimension écologique. Selon Saito, le manuscrit original de Marx pour le volume trois du Capital montre quelques différences par rapport à ceux publiés par Engels après la mort de Marx, avec des exemples dans une note de bas de page concernant l’analyse du système de crédit. En dehors de (petites) clarifications sur ce que Marx a exprimé par rapport à ce qu’Engels a publié par ses écrits, Saito affirme que la quatrième partie des nouvelles œuvres rassemblées comprendra des cahiers d’autant plus importants que le Capital est incomplet.

    Selon Saito, la lecture de ces sources originales en parallèle avec ce qui a été publié jusqu’à présent dans le Capital convaincra les chercheurs que l’écologie de Marx est un élément fondamental de sa critique de l’économie politique. Il croit même que “Marx aurait plus fortement insisté sur le problème de la crise écologique comme contradiction centrale du mode de production capitaliste s’il avait pu compléter les volumes 2 et 3 du Capital”.

    L’écosocialisme de Karl Marx de Saito parle très peu des contributions importantes d’Engels pour généraliser leurs conclusions communes. Dans son ingénieux petit pamphlet, Le rôle du travail dans la transformation du singe en homme, Engels explique que l’animal utilise simplement sa nature environnante tandis que l’homme la contrôle, mais ajoute une longue liste d’exemples frappants :

    “Mais ne nous flattons pas trop de nos victoires humaines sur la nature. Pour chacune de ces victoires, la nature se venge de nous. Chaque victoire, c’est vrai, apporte d’abord les résultats escomptés, mais en deuxième et troisième position, elle a des effets tout à fait différents, imprévisibles, qui annulent trop souvent la première. [….] “Ainsi, à chaque pas, il nous est rappelé que nous ne régnons pas sur la nature comme un conquérant sur un peuple étranger, comme quelqu’un qui se tient à l’extérieur de la nature, mais que nous, avec notre chair, notre sang et notre cerveau, appartenons à la nature, et que nous existons en son sein et que toute notre maîtrise consiste dans le fait que nous avons l’avantage, sur toute autre créature, de pouvoir apprendre ses lois et les appliquer correctement”.

    Ce qu’il faut pour réparer cette rupture métabolique, qui a été poussée à son paroxysme sous le capitalisme, et pour établir ce qu’on appelle aujourd’hui une société durable, c’est, d’après Marx dans Capital, une société supérieure, c’est-à-dire le socialisme :
    “Du point de vue d’une formation socio-économique supérieure, la propriété privée de certains individus sur la Terre apparaîtra aussi absurde que la propriété privée d’Hommes par un autre Homme. Même une société entière, une nation, ou toutes les sociétés existantes simultanément, prises ensemble, ne sont pas propriétaires de la Terre. Ils en sont simplement les administrateurs, les bénéficiaires, et doivent la léguer dans un état amélioré aux générations futures”.

    Il est certain que si Marx et Engels étaient encore en vie aujourd’hui – alors que la rupture métabolique irréparable du capitalisme est devenue une menace existentielle pour toute vie civilisée – ils porteraient une attention décisive à suivre et à comprendre les toutes dernières recherches actuelles sur le climat et le système terrestre.

    Une tâche centrale pour les marxistes d’aujourd’hui est de renouer le fil rouge avec les études des pionniers de l’écologie et, comme eux, de comprendre le socialisme comme la clé vitale pour une régulation rationnelle du métabolisme entre l’homme et la nature.

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