Category: International

  • Stop au massacre à Gaza!

    • Solidarité avec toutes les victimes
    • Pour des mobilisations internationales contre le bain de sang à Gaza
    • Stop aux livraisons d’arme à Israël

    De la démonstration de solidarité à la construction d’un rapport de force

    Jour et nuit, les masses palestiniennes sont confrontées à l’horreur. À travers le monde, les foules expriment leur dégoût et leur solidarité dans la rue et sur les réseaux sociaux. Par-delà les frontières, nous sommes unis dans notre indignation et notre volonté d’agir, comme nous l’avons déjà constaté avec la nouvelle vague de luttes féministes, avec Black Lives Matter ou encore avec les grèves pour le climat. Les jeunes et les travailleuses et travailleurs ont immédiatement manifesté leur solidarité avec les masses palestiniennes opprimées ainsi qu’avec toutes les victimes du terrorisme d’État et du terrorisme.

    Les gouvernements occidentaux ont en revanche soutenu le déluge de feu sur Gaza, jusqu’à même interdire les manifestations, comme en France. Sous la pression grandissante de l’horreur du massacre aveugle perpétré à Gaza et des protestations grandissantes, de premières fissures apparaissent toutefois. On entend des appels au « respect du droit international » et à la « prise en compte des besoins humanitaires ». Comme si les masses palestiniennes n’étaient pas déjà victimes d’une oppression brutale avant les débuts de l’actuelle offensive israélienne…

    Contre l’hypocrisie, la force de la classe travailleuse

    Le CD&V, ECOLO/GROEN, Vooruit et le PS se sont prononcés en faveur du boycott des produits issus des territoires occupés. En sachant bien qu’aucune majorité parlementaire n’existait pour cela… Par contre, le ministre-président de la Région wallonne, Elio Di Rupo (PS), peut décider en une minute de stopper les exportations d’armes de la FN-Herstal (détenue à 100% par la Région) vers Israël. Mais dès qu’il s’agit de sortir de la mascarade électorale, c’est silence radio.

    N’attendons pas ces hypocrites ! En front commun, les syndicats du secteur transports CNE, UBT, Setca et Transcom ont appelé à ne plus charger ou décharger du matériel militaire à destination d’Israël dans les différents aéroports du pays. Les dockers de Catalogne ont fait de même. Ils répondent ainsi à l’important appel international des syndicats palestiniens pour refuser de fabriquer ou transporter des armes destinées à Israël. Les syndicats des autres secteurs doivent suivre cet exemple !

    Les gouvernements capitalistes, même lorsqu’ils sont sous pression, pensent tout d’abord aux intérêts géopolitiques et à la défense des intérêts de leurs commanditaires, ceux qui détiennent les leviers du pouvoir économique.

    La résistance contre le bain de sang à Gaza peut être organisée avec les collègues, en organisant des assemblées pour voter démocratiquement des motions de soutien à l’appel des syndicats palestiniens, en organisant une participation aux manifestations antiguerre en tant que délégation syndicale (avec banderoles et pancartes), en diffusant les appels aux actions, etc. La solidarité, c’est l’outil par excellence de la classe travailleuse et de la jeunesse.

    À partir de ces premiers pas, qui peuvent être très rapidement franchis, nous pouvons construire un mouvement international de masse reposant sur des comités démocratiques d’action dans les quartiers, sur les lieux de travail, dans les écoles et les universités. Nous avons eu en 2019 les grèves dans les écoles pour le climat, pourquoi ne pas organiser des grèves contre l’occupation et l’offensive contre Gaza ? C’est ainsi que nous pouvons au mieux, du local à l’international, instaurer une pression mondiale sur la machine à tuer israélienne et mettre fin à l’occupation, la cause fondamentale de toutes ces souffrances.

    L’auto-organisation et la solidarité de classe

    Un tel mouvement renforcerait la classe ouvrière, les pauvres et les opprimés palestiniens en soulignant des méthodes déjà éprouvées dans le combat pour l’émancipation nationale et sociale : les grèves et les manifestations de masse, comme durant la première Intifada (1987-1993) ou durant la récente Grève de la Dignité en mai 2021.

    Comme à l’époque, des comités de base démocratiquement élus pourraient être créés et prendre en charge les mesures de sécurité et l’autodéfense du mouvement lors de manifestations contre les bombardements, l’occupation et les colonies. C’est également sur cette base que l’on pourra lutter pour aller chercher les moyens d’assurer un droit au retour décent pour tous les réfugiés, la reconstruction des quartiers dévastés, l’aide médicale et psychologique de toutes les victimes du conflit,… 

    Cette autre voie est nécessaire face aux méthodes désespérées reposant sur la violence aveugle au lieu de l’auto-organisation des masses et de leur action. La stratégie de violence aveugle et désespérée du Hamas n’offre pas d’issue. Sa violence s’exerce d’ailleurs aussi contre les masses palestiniennes : il y a peu, il a réprimé les manifestations à Gaza contre la crise énergétique et les prix élevés, tout comme l’Autorité palestinienne a réprimé en Cisjordanie les manifestations contre l’offensive israélienne à Gaza.

    En temps de guerre, les moyens semblent inépuisables. Ils donnent une idée de ce qui peut être utilisé pour assurer le bien-être de chaque personne dans la région avec l’expropriation des gigantesques profits de guerre et du secteur bancaire et leur prise en charge publique sous contrôle et gestion démocratiques.

    Pour une lutte contre le capitalisme et l’impérialisme

    Chez les Palestiniens, c’est actuellement le soutien au Hamas qui domine, inspiré par la volonté justifiée de résistance contre l’horreur de l’offensive israélienne. Chez les Israéliens, ce sont les appels à la vengeance pour le massacre du 7 octobre qui l’emportent. Ce fossé dans la conscience nécessite une approche sensible qui tienne compte des dommages et des traumatismes subis, offre une perspective de sécurité et de prospérité pour toutes les communautés et reconnaît et réalise le droit à l’autodétermination d’une manière acceptable et attractive pour les deux communautés.

    Il faut saisir toutes les occasions de briser le cycle de la haine et de la violence. Le Parti Socialiste de Lutte / Linkse Socialistische Partij (PSL/LSP) est la section belge d’Alternative Socialiste Internationale, qui comporte également une section en Palestine-Israël : le Mouvement de Lutte Socialiste. Nos membres sur place participent par exemple activement à la résistance sur les campus israéliens contre les tentatives de l’extrême droite d’expulser des universités celles et ceux qui expriment leur soutien aux Palestiniens. Comme toujours en situation de guerre, la cherté du coût de la vie augmente à vue d’œil, de même que les profits d’une petite clique de parasites capitalistes (grandes entreprises de l’armement, distribution, etc.) : cela assistera la compréhension des véritables mécanismes derrière cette logique d’occupation et de massacre.

    La classe ouvrière israélienne a un rôle important à jouer, qu’il est parfois difficile de comprendre aujourd’hui. La propagande de guerre et d’occupation est une pierre angulaire de la société de classe israélienne. Cette méthode de « diviser pour régner » sert à garantir les intérêts de la classe capitaliste et offre aux puissances impérialistes et aux multinationales le contrôle de la région.

    Par conséquent, la lutte pour l’émancipation palestinienne est également une lutte contre l’impérialisme, le capitalisme et la société de classe. La lutte pour les besoins sociaux des travailleuses et travailleurs peut arracher des conquêtes sociales dans le cadre du capitalisme, mais une transformation socialiste de la société est nécessaire pour élever le niveau de vie des masses palestiniennes et israéliennes au-dessus des meilleures conditions permises par la société d’exploitation capitaliste.

    Parvenir à l’unité dans la lutte pour une transformation socialiste exige de reconnaître le droit à l’autodétermination de tous les peuples. Ce n’est que sur cette base que l’on pourra obtenir une égalité totale des droits dans tous les domaines et que l’on pourra assurer une Palestine socialiste indépendante avec sa capitale à Jérusalem-Est et une transformation socialiste en Israël dans une confédération socialiste volontaire du Moyen-Orient, avec une garantie d’égalité des droits pour toutes les nations et minorités.

  • Gaza. « Il n’y ni pain, ni eau, ni électricité et les avions font pleuvoir la mort »

    Les habitants de la bande de Gaza vivent l’enfer sur terre, tandis que le massacre de la vengeance mené par le gouvernement Netanyahu-Ganz s’intensifie. Le poète, journaliste et activiste social Ahmed Abu Artema a été blessé dans le bombardement qui a également coûté la vie à son fils Abdullah, âgé de 12 ans, à ses deux frères et à sa belle-mère.

    Par Uri Bar-Shalom Agmon et Tuvaal Klein, Mouvement de lutte socialiste (ISA en Israël-Palestine)

    « Face au spectacle de la mort, s’occuper des nombreux détails de la vie semble insignifiant, même si, dans une situation normale, ils constituent une partie fondamentale de la vie à laquelle on ne peut renoncer. Il n’est pas possible d’obtenir du pain du tout. Je dis à mes enfants : peut-être qu’un biscuit est une bonne option pour l’instant, au lieu du pain, jusqu’à ce que nous voyions où en sont les choses. L’électricité est complètement coupée. Des sentiments étranges naissent en moi. Dois-je rester avec tous mes enfants au même endroit ? Si nous vivons, nous vivrons ensemble, et si nous mourons, nous mourrons ensemble… Quelle mort est préférable ? Que nous mourions tous ensemble ou que certains d’entre nous meurent et que d’autres restent en vie ? »

    C’est ainsi qu’Ahmed Abu Artema décrivait l’enfer sur terre qui se déroule à Gaza dans une vidéo publiée sur Al-Jazeera, quelques jours avant le bombardement qui l’a touché, lui et sa famille le week-end dernier.

    Les bombardements étaient  incessants. La poussière de destruction que l’armée israélienne a déchaînée sur Gaza dans une attaque sans précédent depuis les airs, la mer et la terre, n’est pas encore retombée. Le nombre de morts, de blessés et de déplacés est encore inconnu, notamment en raison de la coupure des réseaux Internet et de téléphonie mobile dans les minutes qui ont précédé l’attaque. Dans le même temps, nous avons été informés que quelques jours auparavant, les tirs avaient également fait de nombreuses victimes dans la famille d’Ahmed Abu Artema, qui a été grièvement blessé et dont cinq membres ont été tués, y compris son fils Abdullah, âgé de 12 ans.

    En coupant l’internet et les communications mobiles, l’armée israélienne a coupé les habitants de Gaza les uns des autres. Les familles n’avaient aucun moyen de connaître le sort de leurs proches, et ceux qui étaient ensevelis sous les décombres ne pouvaient pas contacter les forces de secours. Cette coupure est également une déconnexion du monde, des masses au Moyen-Orient, en Europe, aux États-Unis, en Afrique, une déconnexion de ceux qui, au cours des quatre dernières semaines, ont pris part à des protestations croissantes après avoir vu les rapports, les photos et les vidéos des horreurs déchaînées par le régime israélien dans son massacre de vengeance à Gaza. Jusqu’à présent, l’attaque sanglante contre les habitants de la bande de Gaza a coûté la vie à plus de 9200 personnes, dont plus de 3800 enfants. Plus de 2000 personnes sont portées disparues sous les ruines des bâtiments.

    Nous exprimons notre douleur et notre colère face aux tueries, aux destructions et aux pertes que le gouvernement Netanyahu-Ben Gvir-Ganz fait pleuvoir du ciel sur Ahmed et sa famille, et face aux bombes qui ont emporté les vies et les rêves de tant d’autres familles, dont certaines ont été complètement anéanties. Nous sommes solidaires des gens ordinaires de toutes les communautés, des deux côtés de la barrière, qui ont perdu des proches.

    Ahmed est un poète, journaliste et activiste, l’un des initiateurs des « marches du retour » en 2018. Des dizaines de milliers de personnes s’étaient alors héroïquement dirigées vers la clôture de la plus grande « prison à ciel ouvert » du monde, dont environ 70 % de la population est constituée de « 48 réfugiés et de leurs descendants ». Bien que la manifestation populaire ait été accueillie par des tirs de sniper qui ont tué environ 200 manifestants non armés et laissé des milliers de personnes handicapées, les protestations se sont poursuivies et ont refusé de s’éteindre pendant de nombreuses semaines.

    Dans une interview d’Ahmed que nous avons réalisée en 2018 au sujet des « marches du retour », il a déclaré qu’il y avait eu « une participation populaire sans précédent – hommes, femmes, adultes et personnes âgées – tout le monde est venu » et a ajouté : « Nous espérons et essayons de créer un mouvement civil démocratique pour l’égalité des droits pour tous les gens, pour tous les civils, sans discrimination. Et nous essayons de nous battre avec tous nos partenaires dans la lutte et toutes les personnes qui croient en la liberté, de toutes les nationalités – Palestiniens, Israéliens, et partout dans le monde – et nous sommes confiants que nous allons encore gagner cette bataille. » Pendant la guerre, dans une vidéo publiée le 11 octobre, Ahmed a cherché à transmettre un message au monde entier : « Restez du bon côté de l’histoire, soutenez les hommes et les femmes qui se battent pour leur liberté. »

    Nous n’avons pas de mots de réconfort. Juste une promesse. Nous nous engageons à poursuivre la lutte pour mettre fin à la guerre de vengeance brutale du capitalisme israélien, dont les bombardements provoquent un désastre effroyable et menacent de déclencher une guerre régionale encore plus catastrophique.

    Contrairement aux mensonges des médias de l’establishment, des ministres et des généraux israéliens, cette guerre sanglante n’est pas une « guerre défensive », mais une guerre pour la réorganisation du siège de Gaza, du régime d’occupation et de l’oppression nationale du peuple palestinien. Elle constitue également une menace sérieuse pour la sécurité des gens ordinaires en Israël et dans la région.

    Nous nous engageons à continuer à travailler pour stopper la guerre, pour renverser le régime d’occupation et de siège et pour mettre fin à l’oppression nationale des masses palestiniennes, dans le cadre de la construction d’une lutte, avec nos camarades ici et dans le monde entier, pour une vie reposant sur l’égalité, le bien-être et la paix véritable pour tous les travailleurs, les pauvres et les jeunes, de toutes les communautés nationales, dans le cadre du changement socialiste nécessaire dans la région.

  • Podcast “Marx, la lutte et nous” : L’horreur à Gaza, une analyse marxiste

    Le PSL vient de lancer un podcast “Marx, la lutte et nous” pour assister les discussions sur toute l’actualité du marxisme. Après un épisode “zéro” qui reprenait les prises de paroles de Geert Cool et Arne Lepoutre lors du meeting de rentrée des Etudiant.e.s de Gauche en Action (EGA) à Liège consacré à la lutte antifasciste en Flandre, le premier véritable épisode est dorénavant disponible. Il aborde l’offensive israélienne contre Gaza et plus globalement le conflit israélo-palestinien, en compagnie d’Eric Byl, membre de l’Exécutif international d’Alternative Socialiste Internationale.

  • Chine. Aggravation de l’hostilité à l’égard de Xi Jinping autour de la mort de Li Keqiang

    La mort de Li Keqiang d’une crise cardiaque à l’âge de 68 ans a déclenché une nouvelle lutte entre le vaste appareil de censure en ligne de la dictature et les masses dont le seul canal d’expression semi-légal est l’internet.

    Par chinaworker.info

    Li, premier ministre chinois de 2013 à mars de cette année, nominalement classé comme le deuxième responsable le plus puissant derrière Xi Jinping dans l’État du PCC, est décédé à Shanghai ce 27 octobre.

    Ces deux derniers jours, au moins 10.000 personnes ont fait la queue pour rendre hommage à Li devant son ancienne résidence à Hefei, la capitale de la province d’Anhui. Un mur de fleurs s’est amoncelé devant l’entrée du bâtiment et la ville de 8 millions d’habitants s’est même retrouvée en rupture de stock. La phrase la plus souvent imprimée sur les cartes de condoléances accompagnant les fleurs est une citation de Li Keqiang lorsqu’il a quitté ses fonctions : « Le ciel regarde ce que font les humains. Le firmament a des yeux ». Cet ancien proverbe est une provocation pour Xi et le groupe dirigeant actuel. Il s’agit quasiment de l’équivalent d’une malédiction dont l’actuelle popularité illustre la façon dont les gens utilisent le deuil de Li Keqiang afin d’exprimer leurs critiques à l’égard de Xi.

    L’appareil de censure du PCC est immédiatement passé à la vitesse supérieure en demandant à diverses structures de l’État et des médias de réprimer les « commentaires trop élogieux » à l’égard de Li. Les directives de censure secrètes, qui ont fait l’objet d’une fuite et ont été publiées en ligne, invitent tous les médias à faire preuve de vigilance à l’égard des commentaires qui « font des éloges exagérés en apparence alors qu’il s’agit en réalité d’un acte de critique ». Un article affirmant que Li avait été emmené dans le mauvais hôpital à Shanghai (un hôpital de médecine traditionnelle chinoise au lieu d’un hôpital spécialisé dans les soins cardiaques) a été supprimé par les censeurs.

    La chanson de l’artiste malaisienne Fish Leong, « Malheureusement, ce n’est pas vous », a été partagée en ligne par de nombreuses personnes en guise de protestation. Cela s’est également produit l’année dernière lors du décès de l’ancien dirigeant Jiang Zemin, et du Japonais Shinzo Abe quelques mois auparavant. La chanson est donc régulièrement frappée d’interdiction en Chine. L’idée est assez évidente et met en lumière le puissant climat anti-Xi qui s’est installé en Chine.

    Un hashtag, « celui qui devrait mourir ne l’a pas fait », a rapidement été interdit. Des vidéos ou citations de Li Keqiang sont également apparues avec également une pointe de critique implicite, à l’image des vidéos de Li Keqiang en visite à Wuhan aux débuts de l’épidémie de COVID-19, en janvier 2020, soit deux mois avant son patron. Un autre exemple est la conférence de presse de Li à l’Assemblée nationale populaire en 2020, au cours de laquelle il a révélé que la Chine comptait plus de 600 millions de personnes dont le revenu mensuel était d’à peine 1.000 yuans, ce qui n’est « même pas suffisant pour louer une chambre dans une ville chinoise de taille moyenne ». Ce discours s’inscrivait dans le cadre d’une lutte de pouvoir interne au PCC largement cachée dans laquelle la faction Tuanpai de Li voulait mettre à mal les déclarations vantardes de Xi sur « l’éradication de la pauvreté ». (La faction Tuanpai regroupe l’ancienne garde politique rapprochée du précédent n°1 chinois, Hu Jintao, opposée aux « fils de princes », enfants de dignitaires du régime dont Xi Jinping est le chef de file, NDLR).

    Insécurité aiguë

    La répression actuelle du deuil et des discussions sur la mort de Li reflète l’insécurité aiguë du régime de Xi, qui sent un considérable mécontentement gronder à travers la société. Le PCC est embourbé dans une crise économique historique après l’effondrement de la plus grande bulle immobilière du monde. Le niveau de vie est en baisse alors que l’économie est sous assistance respiratoire. Jusqu’à la moitié des jeunes de moins de 25 ans sont au chômage, le régime de Xi réprimant la publication de données pertinentes à ce sujet. L’année dernière, selon Capital Economics, la richesse nette des ménages chinois s’est contractée de 4,3 %. Toutes les classes sociales se sont appauvries, la classe ouvrière étant toujours la plus grande perdante.

    Les universités sont bien sûr au centre des préoccupations du gouvernement. Cela est d’autant plus vrai après les manifestations de l’année dernière, parfois appelées « mouvement du livre blanc », qui ont été déclenchées par un incendie mortel dans la capitale du Xinjiang, Urumqi, et par la colère accumulée contre les confinements paralysants liés à la pandémie. Aujourd’hui, on craint manifestement que la mort de Li ne serve de paratonnerre à divers griefs sociaux et économiques. Les manifestations de 2022, les plus importantes en Chine depuis 1989, ont commencé à soulever des revendications politiques, notamment la démission de Xi Jinping, avant d’être rapidement écrasées.

    Selon le South China Morning Post de Hong Kong, l’université de Hainan a publié des instructions mettant en garde les étudiants contre la publication en ligne de commentaires sur la mort de Li. Un conseiller étudiant anonyme d’une grande université de Pékin a déclaré au journal : « Nous ne voulons pas que les étudiants organisent leurs propres événements de deuil. Ils pourraient devenir trop émotifs et causer des turbulences inutiles comme ce qui s’est passé il y a plus de 30 ans. »

    Il existe en Chine une tradition bien établie qui consiste à « pleurer les morts pour critiquer les vivants ». C’est ainsi qu’est né le mouvement démocratique de masse en 1989, à la suite du décès soudain de l’ancien dirigeant du PCC, Hu Yaobang. En 1976, bien que le premier ministre Zhou Enlai soit décédé en janvier, c’est trois mois plus tard, les 4 et 5 avril, à l’occasion de la fête de Qingming (jour traditionnel de commémoration des morts), que d’immenses foules se sont rassemblées sur la place Tiananmen à Pékin. Il s’agissait d’un mouvement spontané contre l’enlèvement des couronnes, slogans et autres objets commémorant Zhou, qui reflétait la colère des masses contre le régime maoïste.

    Une figure en retrait

    Li et le cabinet qu’il dirigeait (le Conseil d’État) ont été mis à l’écart par Xi Jinping, qui a concentré de plus en plus de pouvoir entre ses mains. La dictature du parti unique s’est transformée en dictature d’un seul homme. Ce processus de renforcement du contrôle autoritaire, aujourd’hui exacerbé par la grave crise économique, explique pourquoi Li est perçu favorablement par des pans entiers de la population. Cette sympathie est due à ce qu’il n’était pas, plutôt qu’à ce qu’il était.

    D’une certaine manière, Li en est venu à symboliser personnellement la brutalité du régime de Xi. Il a été réduit à un personnage secondaire, bien moins influent que ses prédécesseurs tels que Zhu Rongji et Wen Jiabao, qui ont occupé le poste de premier ministre avant lui. Même ses propres discours en tant que premier ministre ont parfois été censurés ou relégués en dernière page des journaux, tout comme la couverture des événements publics auxquels il participait. Si le numéro deux du PCC est lui aussi victime d’un contrôle autoritaire, de quelles libertés peuvent bien jouir les citoyens ordinaires ?

    Li a parfois exprimé, bien que sous une forme très réservée et sibylline, le mécontentement croissant à l’égard du pouvoir de Xi dans la société en général et au sein des sections de l’élite dirigeante, y compris les quelque 200 familles capitalistes dominantes du PCC. Il n’a jamais été question d’une opposition sérieuse ou coordonnée à la position de Xi. La faction Tuanpai de Li a été largement mise en déroute par Xi dans la lutte interne pour le pouvoir, comme l’a démontré de manière flagrante le 20e congrès du PCC de l’année dernière. Aucun représentant des Tuanpai ne siège aujourd’hui dans les organes dirigeants (Politburo et Comité permanent) et le vétéran des Tuanpai, Hu Jintao, ancien secrétaire général du PCC et président de l’État, a été publiquement humilié et « aidé » à quitter la tribune du congrès.

    Que représentait Li ?

    Les intérêts que Li Keqiang représentait au sein du régime étaient les restes de l’aile économique libérale, les partisans de la doctrine de « réforme et d’ouverture » de Deng Xiaoping (grâce à laquelle la restauration capitaliste a été réalisée) et certaines sections de la classe capitaliste qui s’opposent aux politiques capitalistes nationalistes de Xi en matière de « découplage », « d’autosuffisance » et d’escalade de la confrontation avec l’impérialisme américain.

    Le fait que ces forces se soient affaiblies au cours de la dernière décennie n’est pas dû aux compétences politiques de Xi ou aux déficiences personnelles de Li et d’autres dirigeants tuanpai, mais reflète les besoins sociaux et économiques objectifs du capitalisme chinois pour une dictature renforcée combinée à une orientation économique plus nationaliste. Dans les pays à développement tardif comme la Chine, le capitalisme a besoin d’un État fort en raison de ses propres faiblesses inhérentes lorsqu’il est en concurrence avec des économies capitalistes plus anciennes et plus développées.

    Plutôt que la démocratie bourgeoise qui existe (et qui est de plus en plus chancelante) dans les États capitalistes plus anciens, les capitalistes chinois ont besoin de la protection d’une dictature face à leurs ennemis et face à eux-mêmes. La concentration du pouvoir personnel de Xi en tant que « nouvel empereur » est enracinée dans ces contradictions sociales.

    Retour à l’ère Mao ?

    Lors d’une visite dans la province de Guangdong en août 2022, Li Keqiang a déclaré que « le fleuve Jaune et le fleuve Yangtze ne couleront pas en arrière », dans une allusion sibylline à la poursuite de la réforme et de l’ouverture économiques (capitalistes) telles que définies par Deng Xiaoping dans les années 1980. Le Guangdong est considéré comme le berceau de la restauration du capitalisme il y a 40 ans. Cette citation a été largement diffusée depuis la mort de Li. Elle implique une critique du renforcement du contrôle de l’État (capitaliste) par Xi et de son éloignement des réformes de Deng. Elle montre également que de nombreuses idées différentes sont prises dans le tourbillon de la commémoration de Li. Alors que l’humeur anti-Xi est prédominante et devient de plus en plus explosive, il n’y a pas encore de réelle clarté sur ce que devrait être l’alternative.

    Les politiques autoritaires et nationalistes de Xi Jinping sont décrites par certains critiques comme un retour à l’ère maoïste. Ce n’est pas le cas, car le régime de Mao reposait sur des bases économiques complètement différentes. La Chine de Xi est capitaliste. Jusqu’à la restauration du capitalisme dans les années 1980, l’État du PCC était une dictature stalinienne calquée sur le modèle de l’URSS et reposant sur une économie planifiée extrêmement bureaucratique, qui a toutefois été en mesure d’introduire d’importantes réformes sociales et de protection sociale – qui ont ensuite été anéanties par le capitalisme.

    Aujourd’hui, le régime de Xi utilise certains symboles et allusions à la période précapitaliste pour justifier la dictature et la répression, mais il le fait dans l’intérêt d’une économie capitaliste. Cela ne signifie pas un retour aux soins de santé de base gratuits, aux logements subventionnés, et encore moins l’abolition du capitalisme. De nombreuses personnes en deuil aujourd’hui citent le discours de Li Keqiang sur la réforme et l’ouverture en partie parce que cette idée – le programme de restauration capitaliste de Deng – est largement et faussement confondue avec l’opposition au prétendu « maoïsme » de Xi, qui à son tour est considéré comme ramenant la Chine à la pauvreté et à l’arriération par d’importantes couches de la population.

    Les marxistes accordent une grande attention à la lutte pour le pouvoir au sein de l’État-PCC, parce qu’il s’agit d’une mesure partielle – très déformée – des énormes pressions sociales qui s’accumulent dans la société chinoise. Aucune des factions ou des figures de proue du PCC ne représente une voie à suivre et aucune n’est du côté de la classe ouvrière. Leur lutte porte sur la manière de gérer la fortune du capitalisme chinois, y compris sur la meilleure façon de maintenir la dictature et de prévenir les défis révolutionnaires.

    Avec les mesures qu’il a prises, le régime de Xi peut réussir à contenir les retombées politiques de la mort de Li Keqiang et empêcher cet événement de déclencher des incidents de masse. Mais l’accumulation d’un mécontentement social explosif est inévitable compte tenu de la trajectoire économique désastreuse de la Chine et des conditions de plus en plus brutales du régime dictatorial.

  • La première Intifada (1987-1993) : une lutte des masses contre l’occupation israélienne

    Dans la nuit du 8 au 9 décembre 1987 un transporteur de chars israélien percutait un taxi qui attendait dans une file pour entrer à Gaza. Parmi les quatre morts, trois résidents d’un camp de réfugiés qui, comme 100.000 autres Palestiniens, étaient forcés d’effectuer le trajet quotidiennement pour aller bosser dans des emplois de misère en Israël. Le lendemain, un jeune manifestant fut abattu par les forces israéliennes. Le soulèvement allait faire tache d’huile.

    Par Christian (Louvain)

    Après les épurations ethniques de 1947 et 1967, l’occupation n’avait rien d’autre à offrir qu’exploitation, répression (200.000 Palestiniens étaient passés par les prisons israéliennes au cours des 20 années précédentes) et expansion inéluctable des colonies. Après des années de luttes intenses, la population avait appris à compter sur elle-même plutôt que sur des événements extérieurs ou sur l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) en exil. La stratégie de cette dernière consistait à gagner le soutien de régimes arabes afin notamment de lancer des offensives armées contre Israël (comme lors de la guerre des Six Jours en 1967 et de la guerre du Kippour en 1973). Elle était arrivée dans l’impasse.

    L’extrême jeunesse de la population palestinienne a joué un rôle d’accélérateur pour le mouvement : plus des deux tiers de celle-ci avaient moins de 24 ans. Cette jeunesse n’avait rien à perdre et ressentait moins le poids des défaites passées. La répression israélienne fut un autre accélérateur. Au cours de la première année seulement de l’Intifada, elle causa plus de 300 morts.

    Le rôle crucial de l’auto-organisation

    Si le soulèvement tout d’abord spontané a su à ce point persister dans la durée, ce fut grâce à la création de structures de pouvoir populaire. Un comité de coordination fut mis en place et, dès janvier 1988, des comités de lutte ont vu le jour. Ces comités étaient souvent le prolongement des organisations de bénévoles créées pour pallier diverses pénuries découlant de la colonisation. Ces comités constituaient un pôle d’attraction pour des gens souvent de gauche, des syndicalistes et des étudiants. Des comités de femmes ont non seulement organisé leur implication dans le soulèvement, mais ont aussi assuré qu’elles puissent jouer un rôle dans la direction de la lutte.

    Même si l’efficacité des comités populaires pouvait varier selon les domaines, il s’agissait d’importants symboles d’autogestion. Leur activité fut essentielle dans le ravitaillement des camps de réfugiés souvent placés en véritable état de siège. Sans surprise, l’État d’Israël a durement réprimé ces comités populaires. Quiconque y appartenait risquait 10 ans de prison.

    Les méthodes de lutte de masse et de grèves, voire d’émeutes, étaient au cœur du mouvement. L’image emblématique de l’époque reste celle de jeunes lanceurs des pierres affrontant les gaz lacrymogènes et les balles en caoutchouc ou réelles. Les comités insistaient sur la nécessité de garder les armes à feu hors des manifestations. L’État d’Israël fut ainsi incapable de déployer ses armes les plus modernes et destructrices. Le mouvement ouvrier joua un rôle considérable. Le 22 décembre 1987, une grève générale des travailleurs palestiniens en Israël a entraîné des centaines de milliers d’Arabes israéliens.

    Yasser Arafat a utilisé l’autorité de l’OLP pour s’assurer la tête de la lutte. Mais, durant longtemps, ce sont la rue et les comités populaires qui ont imposé leur agenda politique aux « dirigeants ». C’est ainsi que le roi de Jordanie abandonna ses prétentions territoriales sur la Cisjordanie et que l’OLP déclara la création d’un État palestinien en novembre 1988.

    L’OLP reprend la main… et trahit la lutte

    Cette rébellion de masse eut un impact non négligeable sur la société israélienne. Une partie croissante de la population vint à comprendre que l’occupation n’était pas une option viable. Les Israéliens étaient inspirés à soutenir les Palestiniens dans leur lutte. Plusieurs milliers de femmes palestiniennes et israéliennes ont par exemple manifesté ensemble en franchissant la frontière entre Jérusalem-Ouest et Jérusalem-Est. Dans l’armée israélienne, 1.500 soldats ont refusé de servir dans les Territoires occupés.

    Malgré son impact majeur, l’Intifada ne pouvait vaincre l’État israélien à elle seule seule. Un rapport de force international plus favorable était nécessaire. Si le mouvement palestinien avait pu s’allier à d’autres mouvements de la classe ouvrière à travers le Moyen-Orient pour renverser les régimes corrompus et dictatoriaux de la région, en affrontant ainsi également l’impérialisme et le capitalisme, la situation aurait été bien différente.

    Inexorablement isolé, le mouvement de contestation a connu un certain épuisement. À la répression s’ajoutait aussi l’impact économique pour les populations palestiniennes en raison des fermetures de commerces et des grèves. Avec le temps, les actes de désespoir et de terrorisme individuel ont pris plus de place.

    La direction de l’OLP a alors saisi l’occasion de reprendre la main. Réfugiée à Tunis, elle courait le risque d’être évincée par une nouvelle direction issue de l’auto-organisation des masses. Yasser Arafat a donc mené des négociations secrètes avec Israël qui ont abouti à la signature de l’accord d’Oslo en septembre 1993, prévoyant une autonomie limitée sur quelques parcelles de territoires occupés. Il a utilisé son immense autorité pour convaincre la direction intérieure de mettre fin au mouvement. Les comités populaires ont été remplacés par les fonctionnaires et la police : l’Autorité palestinienne était née. Dans les faits, elle devint la gérante du régime d’occupation tandis que le régime israélien multipliait les faits accomplis dans les territoires.

  • Climat. Devant nous le déluge ?

    Depuis la parution de cet article le 26 septembre sur le site de nos camarades allemands de Sozialistische Alternative, la ville de Volos en Grèce a connu de nouvelles inondations. À part les terribles pertes humaines, surtout en Libye, l’impact énorme sur la production agricole grecque est un présage de ce qui nous attend. L’article fait aussi mention des inondations qui en juillet 2021 firent de nombreuses morts en Allemagne et en Belgique. Les priorités du gouvernement allemand décrites ci-dessous nous démontrent que les leçons n’ont pas été tirées. Cela démontre encore une fois de plus que le capitalisme est soit incapable soit indifférent aux menaces de la crise écologique, même dans les pays impérialistes les plus riches.

    Par Conny Dahmen, Cologne

    Un été comme un cauchemar sans fin ; à peine les premières pelles s’étaient-elles attaquées à la boue à Volos en Grèce, que dans l’espace de quelques heures un raz-de-marée emporta en mer Méditerranée des quartiers entiers de la ville libyenne de Derna. Le bilan est d’au moins 11.000 morts. Peu avant la même tempête avait inondée de vastes zones en Turquie, en Bulgarie et en Grèce.

    Après que cet été plus de 1,7 million d’hectares de forêts et de villages ait brûlés en Grèce (d’après les données du système européen d’information sur les feux de forêts EFFIS), en septembre les pluies diluviennes de la tempête Daniel inondèrent 720.000 hectares tuant 16 personnes (selon les statistiques officielles). Des dizaines de milliers d’habitants à Volos et dans le Pélion se sont retrouvés privés d’électricité et d’eau potable pendant des jours. Ils se retrouvent aujourd’hui devant les décombres de leurs existences. La pleine de Thessalie n’est plus qu’un lac de boue où, selon Efthymios Lekkas, professeur en gestion de catastrophes naturelles, l’agriculture ne pourra y être reprise qu’après cinq ans au plus tôt. La région fournissait auparavant plus de 25% de la production agricole et près de 11% des emplois du pays.

    Depuis le début des relevés, jamais autant de pluie n’est tombée en Grèce. La station météorologique de la ville de Zagorá dans le Pélion a enregistré 734 litres de pluie par mètre carré en 20 heures. En guise de comparaison, lors des inondations de juillet 2021, dans la vallée de l’Ahr (région de l’Eifel en Allemagne) il était tombé jusqu’à 200 litres par mètre carré en deux à trois jours.

    L’accumulation rapide de conditions météorologiques extrêmes est un symptôme bien connu de l’avancé du changement climatique. Les ouragans méditerranéens (Medicanes) comme la tempête Daniel se forment plus rapidement et deviennent plus forts lorsque la température de l’eau est trop élevée. Même sans plus émettre de gaz à effet de serre, de tels événements climatiques extrêmes continueraient à se produire. Nous devons y faire face.

    Effondrement climatique et défaillance de l’État

    La situation des États des régions concernées rendent cependant une telle adaptation difficile, voire impossible. Ainsi, en Libye, les avertissements des météorologues furent initialement soit ignorés par les autorités, soit diffusés trop tard. Après le désastre, l’aide du gouvernement arriva trop tard et s’avéra insuffisante. Selon un rapport de la Banque mondiale d’avril de cette année, le PIB libyen a chuté de plus de 50 % depuis le début de la guerre civile en 2011. En conséquence, les infrastructures (tels les deux barrages qui se sont effondrés à Derna) et les systèmes d’alerte se sont détériorés. Les habitants des pays du Sud sont généralement touchés de manière beaucoup plus extrême par les conséquences du changement climatique. Ils les subissent au côté des conséquences des interventions néocoloniales des États impérialistes occidentaux et par le pillage opéré par les grandes entreprises.

    En Grèce non plus il n’y eu aucune évacuation. L’approvisionnement immédiat en biens essentiels, voire en eau, n’était initialement possible que grâce aux actions de solidarité de la population locale. Même après neuf jours, il restait encore des gens à secourir de leurs toits.

    Les véhicules de secours, les hélicoptères des pompiers ou de l’armée, les canots pneumatiques et les engins de chantier ne sont arrivés qu’après des heures interminables et la plupart des avions de sauvetage n’ont pas pu être utilisés. Ce n’est qu’au bout de quatre jours que le gouvernement a installé un centre de crise sur place.

    La pleine de Thessalie est connue comme une zone potentiellement inondable, ayant déjà subi une inondation en 1994 et plus récemment en 2020. Néanmoins, malgré toutes les promesses des gouvernements concernant l’expansion des infrastructures de protection contre les inondations, rien ne s’est produit. Les ponts, les barrages et les routes sont réparées et reconstruits de la même piètre manière (sinon au mauvais endroit) comme auparavant.

    Se protéger contre les catastrophes signifie lutter contre le capital

    En Allemagne aussi, les infrastructures et la protection contre les catastrophes ont été et sont toujours négligées. Alors que d’énormes sommes d’argent sont injectées dans l’armée et l’armement, la coalition au pouvoir («Ampelregierung» – gouvernement «feu de circulation» qui réunit les sociaux-démocrates, les libéraux et les verts) pratique l’austérité de tous les côtés avec des coupes budgétaires de 23 % chez l’Office fédéral de protection civile et d’aide en cas de catastrophe, de 9 % chez le Fonds fédéral pour la protection de la nature, de 34 % pour l’aide humanitaire et la prévention des crises, de 10% chez l’Agence fédérale des secours techniques (THW).

    Au lieu de réduire les dépenses, nous avons besoin d’investissements massifs dans la protection contre les catastrophes et encore davantage dans la protection du climat et de la nature. Afin d’atténuer directement les inondations, il est plus urgent que jamais de restaurer les rivières ainsi que les plaines inondables naturelles qui ont été nivelées. En Allemagne, 80 % des zones d’inondation naturelle des principaux fleuves ont déjà disparu. En raison de cela et des barrages, les rivières coulent beaucoup plus vite qu’auparavant, de sorte qu’un raz-de-marée dans le Rhin ne prend actuellement que 30 heures pour descendre de Bâle à Karlsruhe alors qu’en 1955 cela aurait encore pris 65 heures. Les forêts doivent être protégées et reboisées à grande échelle, notamment à proximité des cours d’eau.

    Mais rien de tout cela n’arrivera tant que les entreprises privées utiliseront leurs représentants politiques dans les groupes de pression pour déterminer où l’argent de l’État est investi et comment l’énergie est produite.

    Si l’on veut assurer que le réveil du cauchemar ne doit pas être un suicide, nous devons enfin priver de pouvoir ceux qui nous ont conduits au désastre. Les entreprises de l’énergie, de l’automobile et des matières premières, pour les profits desquelles des millions de personnes meurent de faim, sont brûlés ou se noient, doivent être transférées dans la propriété publique et organisées de manière démocratique. Ce n’est que si nous dépassons le capitalisme et organisons l’économie de manière démocratique que la production (y compris celle de l’énergie) pourra vraiment être transformée dans le sens de la durabilité.

  • Tragédie à l’hôpital Al-Ahli de Gaza

    La catastrophe survenue à l’hôpital Al-Ahli Al-Ma’amadani, dans le centre de la ville de Gaza, est effroyable. L’explosion dans la cour de l’hôpital a eu lieu le mardi 17 octobre, alors que 5.000 personnes fuyant d’autres parties de la bande de Gaza y avaient trouvé refuge, avec un grand nombre de blessés, de secouristes et de personnel soignant. Au moment où nous écrivons ces lignes, on estime que 500 Palestiniens ont perdu la vie dans ce qui est l’événement le plus meurtrier dans la bande de Gaza depuis 2008.

    Par Michael Kurtzer et Yasha Marmer (Mouvement de lutte socialiste, section d’ASI en Israël-Palestine)

    Aucune partie indépendante n’a pour l’instant réussi à déterminer avec certitude la source directe de l’explosion dans la cour de l’hôpital. Le contexte est toutefois clair : la décision politique du gouvernement Netanyahu, Ben Gvir et Ganz, soutenue par l’état-major militaire, de lancer une offensive sans précédent contre Gaza couplée à un blocus désastreux.

    Netanyahou, son gouvernement et le chef de l’armée ont cyniquement rejeté toute responsabilité dans cette atrocité. Trois jours avant l’attaque de l’hôpital, l’armée israélienne a demandé au Croissant-Rouge palestinien d’évacuer l’hôpital Al-Quds dans la ville de Gaza. Cela indique clairement que les installations médicales de la bande de Gaza sont prises pour cible.

    Plusieurs versions « officielles » israéliennes de la catastrophe sont contradictoires. À tout le moins, le changement précipité de versions indique que des conclusions ont été tirées avant qu’une enquête approfondie n’ait eu lieu. Par ailleurs, un porte-parole de l’armée israélienne a admis que l’armée de l’air avait mené des attaques dans la région à peu près au moment de l’explosion. Le Washington Post fait état d’une vidéo où l’on entend un bourdonnement avant l’explosion, probablement celui d’un avion.

    L’enquête sur la catastrophe de l’hôpital doit être totalement indépendante du gouvernement Netanyahou, de l’armée et des services de sécurité israéliens, qui ont tous intérêt à se décharger de toute responsabilité. Ce fut le cas dans le passé lorsque des écoles ou des hôpitaux ont été bombardés, ou encore lorsque la journaliste Shireen Abu Akleh a été tuée à Jénine l’année dernière.

    L’une des méthodes utilisées pour nier toute responsabilité consiste à transformer les atrocités en événements isolés. Mais est-il possible de dissocier l’explosion de l’hôpital de la pluie de bombes sans précédent qui s’abat sur Gaza ?

    Le choc et l’horreur ressentis par les gens ordinaires en réponse au massacre de l’hôpital ont déjà conduit à des manifestations de solidarité à travers le Moyen-Orient et dans le monde. Le soir de l’attaque de l’hôpital, des manifestations spontanées impressionnantes ont eu lieu en Égypte, en Jordanie, en Turquie, en Libye, en Tunisie, au Maroc, au Liban et ailleurs.

    L’Autorité palestinienne, dirigée par le Fatah, a décrété une journée de deuil. Cependant, lors des manifestations de solidarité à Jénine et à Ramallah, des unités de police de l’Autorité palestinienne ont tiré sur les manifestants. Cela souligne une fois de plus le rôle de l’Autorité palestinienne en tant que sous-traitant de l’occupation. Lors de la manifestation de Ramallah, des slogans ont également été scandés contre Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne. Des manifestations de masse au Moyen-Orient et dans le monde entier, et des deux côtés de la ligne verte, pourraient contraindre le gouvernement Netanyahu-Ben Gvir-Ganz à mettre fin à la guerre de vengeance.

  • Israël-Palestine – «La vérité est l’une des premières victimes de la guerre»

    Entretien avec Ariel Gottlieb, membre du conseil exécutif de l’Union des journalistes en Israël, du Comité uni des journalistes de Ynet et de Yediot Ahronot, et membre du Mouvement de lutte socialiste (section d’ASI en Israël-Palestine).

    Le gouvernement de droite de Netanyahou, Ben-Gvir et Smotrich s’est lancé dans la persécution politique et la censure dès sa création. Avec l’éclatement de la guerre, cette tendance s’est accentuée sous le gouvernement élargi. Le ministre des communications, Shlomo Deri, a pris des mesures visant à emprisonner les «citoyens qui sapent le moral national». Parallèlement, Deri, en collaboration avec le procureur général du gouvernement, a pris des mesures pour fermer Al-Jazeera en Israël. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’une tentative visant à limiter et censurer les médias qui ne s’alignent pas sur la propagande du gouvernement concernant la guerre.

    Le soutien du gouvernement à l’extrême droite, en particulier en temps de guerre, se traduit par des persécutions publiques et des menaces à l’encontre des voix critiques face à la guerre, y compris les journalistes, qu’ils soient palestiniens ou pas. Le journaliste indépendant Israel Frey et sa famille ont par exemple été menacés d’agression physique. Les éditeurs en chef et propriétaires des grands médias, qui se font eux-mêmes l’écho du nationalisme et du soutien à la guerre, ne sont pas là pour protéger les journalistes des pressions croissantes et des menaces politiques qui pèsent sur certains d’entre eux. Le secteur est également confronté depuis quelques années à une précarité croissante de l’emploi – avec notamment des licenciements au sein du groupe “Yediot” – ce qui, en soi, ajoute à la pression exercée sur les journalistes pour qu’ils s’autocensurent. Nous avons besoin de puissantes organisations syndicales de journalistes pour lutter contre ces attaques.

    Nous nous sommes entretenus avec Ariel Gottlieb, membre du conseil exécutif de l’Union des journalistes en Israël (UJI), du Comité uni des journalistes de Ynet et de Yediot Ahronot, et membre du Mouvement de lutte socialiste (ASI en Israël/Palestine), au sujet de ces développements, du rôle des syndicats dans l’industrie pendant la guerre, ainsi que des licenciements au sein du groupe “Yediot”. Il s’exprime ici à titre personnel.

    Interview effectuée par Neta Most

    Les journalistes se retrouvent souvent en première ligne de la guerre. Nous savons également que certains journalistes avec lesquels vous travaillez ont été assassinés.

    Oui, un photographe de la rédaction d’Ynet, Roee Idan, et sa femme ont été assassinés au kibboutz de Kfar Aza le premier jour de la guerre. Sa petite fille n’a pas été retrouvée. D’autres journalistes ont risqué leur vie, en particulier au cours des premiers jours de la guerre, et d’autres travaillent simplement 24 heures sur 24.

    Quatre autres journalistes ont été tués le premier jour de la guerre lors de l’attaque du Hamas dans le sud. Depuis lors, 21 journalistes ont été tués à Gaza, soit plus que le nombre total de journalistes tués à Gaza depuis 2001. Un photographe de Reuters a également été tué dans un attentat à la bombe au Liban.

    Outre la menace physique immédiate, il règne aujourd’hui une atmosphère de chasse aux sorcières nationaliste sur les lieux de travail et dans les écoles, visant en particulier les travailleurs ou les étudiants arabo-palestiniens. Cette persécution est-elle ressentie dans le domaine du journalisme ?

    Même s’il n’y a pas d’attaque physique contre les journalistes, nous sommes confrontés à des actes d’intimidation et au harcèlement. Le gouvernement a intentionnellement créé une atmosphère publique qui rend très difficile le travail des journalistes et crée une tendance à la surveillance étroite pour s’assurer que les journalistes ne rapportent que la ligne officielle. Nous avons déjà vu ce genre de choses : lors des escalades de guerre passées et lors du mouvement de protestation de masse en Israël cette année. Mais bien sûr, cela se fait maintenant à un niveau beaucoup plus élevé.

    Les médias étrangers, en particulier les médias arabophones qui opèrent encore ici, sont les plus durement traités. L’UJI a envoyé une lettre au département des médias du gouvernement, qui est chargé de veiller à ce que les médias étrangers puissent faire leur travail, pour exiger qu’il protège leurs droits et les défende.

    La situation s’est fortement aggravée avec les tentatives du ministre des communications, M. Deri, de fermer la branche locale d’Al-Jazira.

    Je pense qu’il existe en outre une influence beaucoup plus large : les journalistes réfléchissent à deux fois à ce qu’ils écrivent, à ce qu’ils disent à l’antenne, une sorte d’autocensure qui découle de la reconnaissance de la nouvelle situation. Je suppose que les journalistes palestiniens en Israël ressentent cela beaucoup plus fortement, tout comme les journalistes juifs plus critiques à l’égard des intérêts du gouvernement israélien.

    Pour que les journalistes puissent rendre compte de la guerre de manière plus honnête, sans s’autocensurer, nous avons besoin d’une organisation syndicale forte dans le secteur, d’abord pour garantir l’emploi et les droits des journalistes et des autres travailleurs des médias et, dans ce contexte, défendre également l’environnement de travail des journalistes contre les pressions du gouvernement.

    Dans le cadre des menaces gouvernementales, les militants d’extrême droite menacent également la liberté de la presse. Entre autres, “La Familia” (supporters d’extrême droite du club de football Beitar Jerusalem) a organisé une “manifestation” dans la nuit du samedi 14 octobre, avec des feux d’artifice, devant le journaliste indépendant Israel Frey. Ce dernier a été contraint de fuir avec sa femme et ses enfants et de se cacher dans un endroit secret. L’UJI n’a pas encore commenté cette persécution ou celle d’autres journalistes. Ne s’agit-il pas d’une question sur laquelle l’Union devrait faire une déclaration ?

    Le syndicat n’a pas encore fait de déclaration, le bureau exécutif en discute et je fais partie de ceux qui ont soutenu la publication d’une déclaration publique. L’allégation selon laquelle M. Frey a été persécuté parce qu’il soutenait le Hamas est totalement inacceptable, il a simplement fait un commentaire empathique sur la tragédie à laquelle sont confrontés les enfants des deux camps.

    Il s’agit d’une situation très extrême, où même pour un tel commentaire, vous pouvez être menacé et subir des persécutions qui mettent votre vie en danger. Je pense absolument que nous avons besoin d’une déclaration claire de l’UJI sur ce cas spécifique, en particulier parce que cela constitue un dangereux précédent : Si nous n’essayons pas de protéger Frey maintenant, d’autres journalistes et leurs familles risquent d’être victimes d’agressions physiques de la part de militants d’extrême droite.

    Si le syndicat n’élabore pas de déclaration, comme ce fut le cas pour d’autres questions politiques controversées, nous pourrions alors élaborer une déclaration signée uniquement par certains membres du conseil exécutif afin de garantir qu’il y ait au moins une déclaration claire, même si ce n’est pas sous le nom officiel du syndicat. Il en va de même pour les bombardements israéliens de journalistes tués dans l’exercice de leur métier à Gaza et au Liban.

    Parallèlement aux différentes menaces qui pèsent sur le journal pendant cette guerre, la direction du groupe de presse “Yediot” poursuit-elle en dépit du conflit son plan de consolidation, qui comprend des coupes budgétaire et des licenciements ?

    Les travailleurs travaillent beaucoup plus dur aujourd’hui qu’avant la guerre, qu’il s’agisse des travailleurs en première ligne, des journalistes ou des remplaçants, tout le monde travaille beaucoup plus dur et doit faire de plus grands sacrifices. Mais la direction n’était pas disposée à prendre en compte tout cela, même au niveau le plus élémentaire, en disant “ok, nous ne poursuivrons pas le plan pour l’instant”.

    En fait, une partie du plan a déjà été mise en œuvre, parce qu’ils ont lancé un plan de prétendue auto-retraite. Je dis “prétendu” parce que les gens ne veulent pas partir, mais ils subissent des pressions et reçoivent des compensations insuffisantes.

    La direction a maintenu la pression lors des discussions avec les travailleurs. Elle a encouragé les gens à partir, même si cela n’en valait pas la peine. De nombreuses personnes sont parties ou sont sur le point de partir.

    La direction a programmé deux sessions de négociation avec le syndicat avant la guerre pour préparer les audiences de licenciement, puis nous leur avons demandé de suspendre ce processus jusqu’à ce que la situation soit clarifiée. Ils n’ont même pas accepté la suspension. Lorsque nous avons constaté qu’ils organisaient des auditions sur Zoom au lieu d’organiser des réunions en personne, nous avons fait savoir aux travailleurs que nous avions décidé de ne pas y participer.

    Vous avez dit précédemment que les attaques du gouvernement et de l’extrême droite nuisaient à l’environnement de travail des journalistes. En plus de la ligne officielle présentée par les grands médias et du phénomène des “médias enrôlés” qui déforment déjà ce qui se passe, les journalistes pratiquent l’autocensure, en particulier en temps de guerre et en ce qui concerne ce qui se passe “de l’autre côté de la barrière”.

    C’est exact. C’est vrai en ce qui concerne ce qui est présenté au public israélien et en ce qui concerne ce qui se passera si Al-Jazeera est fermée en Israël. Cela signifie que les téléspectateurs internationaux d’Al-Jazeera ne seront pas exposés à certains aspects de l’impact de la guerre sur la société israélienne. En tout état de cause, il s’agit d’une attaque contre la capacité à recevoir une image plus large et plus honnête des faits. Cela montre une fois de plus que la vérité est la première victime de la guerre.

    Il n’y a pas longtemps, les syndicats palestiniens ont publié une déclaration appelant à mettre fin aux bombardements israéliens sur Gaza, déclaration également signée par l’association des journalistes palestiniens. Un syndicat de journalistes étranger a-t-il contacté l’UJI à ce sujet ?

    Je n’ai pas connaissance d’une quelconque tentative d’approche. S’il y en a eu, ils se sont probablement adressés au président du syndicat, mais nous n’avons reçu aucun message. Quoi qu’il en soit, le développement d’une discussion et d’une collaboration entre l’UJI et d’autres syndicats, au niveau local et international, ne peut qu’être utile, surtout si le syndicat des journalistes palestiniens y est associé.

    Je suis tout à fait d’accord avec les appels à prendre position et à agir contre les attentats dans cette crise difficile. L’UJI a tendance à s’abstenir d’adopter une position officielle claire, même lorsque ses membres sont d’accord sur différentes questions politiques, par volonté de représenter tous les journalistes, y compris ceux qui ont des opinions plus à droite. Je pense que dans cette situation, nous devons trouver des moyens de fournir aux membres de base un moyen de discuter des questions politiques et d’exprimer leur opinion. J’ai dit la même chose à propos de la discussion au sein du syndicat concernant le récent mouvement social contre le “coup d’État judiciaire” du gouvernement.

    Le fait qu’il y ait des désaccords ou des opinions différentes n’est pas une raison pour éviter d’exprimer des opinions ou d’avoir une discussion. Au contraire, c’est précisément la raison pour laquelle il faut avoir cette discussion et former une position qui présente les intérêts des journalistes et des travailleurs en général, en ce qui concerne les questions politiques, telles que la question de la guerre, qui est une question cruciale pour les travailleurs qui vivent ici.

  • Halte au massacre à Gaza! Stoppons cette guerre permanente!

    L’attaque surprise du Hamas le 7 octobre et les sanglantes représailles du régime israélien ont remis la situation en Israël-Palestine au premier plan de l’actualité au point d’éclipser même la guerre en Ukraine. Du côté israélien, au moins 1.400 personnes ont été tuées et 3.500 blessées. Parmi les victimes, 70 Bédouins arabes et plusieurs jeunes festivaliers. Du côté palestinien, le bilan s’élève à plus de 4.000 morts après 10 jours, dont 1000 enfants. Le 17 octobre, une frappe meurtrière à l’hôpital de Gaza a fait plus de 500 victimes à elle seule. Le dossier ci-dessous repose sur une introduction d’Éric Byl au Comité national du PSL/LSP.

    Une pluie de bombes sur Gaza

    Le 19 octobre, le bilan s’élevait à au moins 4.000 morts à Gaza et 61 en Cisjordanie, auxquels s’ajoutaient 12.500 blessés à Gaza. En sept jours seulement, 6.000 bombes ont été larguées sur Gaza selon l’armée israélienne. Un expert militaire américain a déclaré au Washington Post que ce chiffre est comparable à ce que les États-Unis ont largué sur l’Afghanistan, un pays environ 2.000 fois plus étendu, en une année entière, bien que les bombardements n’aient pas été d’une intensité égale partout dans ce pays. Dans la lutte contre Daesh, l’État islamique, environ 5.000 bombes ont été larguées par mois sur l’Irak et la Syrie. À cela s’ajoute la coupure par Israël du réseau électrique et de l’approvisionnement en eau, en carburant et en autres biens.

    En cas d’invasion terrestre, le nombre de morts et de blessés du côté palestinien augmentera de manière exponentielle. Le régime israélien a ordonné à 1,1 million d’habitants de la ville de Gaza de fuir en 24 heures vers le sud de Gaza, qui est également bombardé. Le Hamas a appelé la population à ne pas bouger. Même les alliés impérialistes du régime israélien, tels que l’UE, ont qualifié cet ordre d’irréaliste.

    Cet ordre rappelle inévitablement la Nakba de 1948, lorsque les Palestiniens ont également été exhortés à fuir la guerre, sans jamais pouvoir revenir par la suite. Un député du Likoud, le parti de droite au pouvoir, a appelé à une deuxième Nakba pour « éclipser la précédente ». Une invasion terrestre présenterait également des similitudes avec l’attaque de Beyrouth au Liban en 1982, avec les massacres dans le camp de réfugiés palestiniens de Chatila et dans le quartier voisin de Sabra. Ces massacres avaient fait au moins 50.000 morts.

    La politique de choc en Israël et les complications qui en découlent

    L’attaque du Hamas a causé le plus grand nombre de victimes en Israël depuis la création de l’État d’Israël. L’illusion d’un mur de fer derrière lequel construire un Israël sûr et prospère a volé en éclats. Soudain, le prix de l’occupation s’est révélé élevé également du côté israélien. Le régime profite de cet effroi pour appliquer sa propre version de la doctrine du choc afin de commettre une démonstration de force et de restaurer sa position. Le ministre de la Défense, Yoav Galant, a déclaré : « Nous combattons des bêtes humaines » et « nous agirons en conséquence ». Netanyahou a quant à lui déclaré : « Nous allons réduire Gaza en ruines ».

    L’attaque du Hamas s’est inscrite dans un contexte de crise de légitimité pour le gouvernement israélien après dix mois de résistance historiques contre la réforme judiciaire, une tentative de rendre la justice encore plus dépendante du gouvernement. L’escalade de violence actuelle a coupé court au mouvement de masse et a renforcé les éléments réactionnaires en Israël. Elle n’a pas approfondi les divisions internes entre les classes, mais les a rétrécies.

    Le renforcement d’éléments réactionnaires en Israël se reflète dans la formation du gouvernement d’unité nationale avec l’opposant Benny Gantz. Ce gouvernement d’unité nationale entend répondre aux craintes de la classe dirigeante et de l’impérialisme américain d’une politique aventuriste dans laquelle le régime israélien se surpasserait. C’est également la raison pour laquelle le secrétaire d’État américain Anthony Blinken, malgré son soutien explicite à Israël, a néanmoins averti qu’il faut « respecter les règles ». Des manifestations de solidarité de masse ont déjà eu lieu en Jordanie, entre autres. Une guerre terrestre entraînerait des mobilisations massives dans tous les pays arabes, en Turquie et aussi en Europe et ailleurs.

    À l’heure où nous mettons sous presse, les troupes terrestres étaient prêtes pour une invasion. L’attitude du régime israélien était encore inconnue. Une prise de contrôle direct de Gaza est justement ce qu’Israël a abandonné en 2005, car cela était devenu intenable. Une manœuvre similaire à la guerre de Gaza en 2014, plus limitée en termes d’objectif et de portée, est également possible. Le gouvernement évite de fixer des objectifs concrets, mais cela pourrait entraîner une nouvelle crise de confiance.

    Les ministres sont déjà critiqués pour ne pas avoir empêché l’attaque du Hamas, pour avoir concentré trop de troupes en Cisjordanie afin de protéger les colons et pour avoir sapé la vigilance de l’État avec leur réforme juridique. Le fait que beaucoup soient favorables à l’unité nationale en temps de guerre ne signifie pas qu’ils ont déjà oublié les politiques du gouvernement de droite de M. Netanyahou. Il y a aussi les exemples de solidarité de ceux, souvent bédouins, qui, au péril de leur vie, ont éloigné des jeunes du festival attaqué par le Hamas, ou encore ceux qui donnent leur sang pour les victimes.

    La menace d’une guerre régionale

    La menace d’une extension régionale de la guerre est réelle. Pour l’instant, il ne s’agit que d’escarmouches avec le Hezbollah libanais, plus fort et mieux armé que le Hamas. L’organisation est par ailleurs plus puissante que lors de la guerre israélo-libanaise de 2006. La Cisjordanie est également au bord de l’explosion, surtout avec les pogromes constants causés par des groupes d’extrême droite israéliens qui ont déjà coûté la vie à des dizaines de Palestiniens. Israël a également bombardé les aéroports syriens de Damas et d’Alep pour contrer le renforcement du Hezbollah par l’Iran. Il n’est même pas exclu qu’une escalade aboutisse à une attaque israélienne contre l’Iran sans l’accord préalable des États-Unis.

    Au cours des dernières décennies, le soutien à Israël en Occident a commencé à sérieusement s’user. Même au sein du parti démocrate américain, la sympathie pour les Palestiniens, en particulier parmi les jeunes générations, a commencé à prendre le pas sur les positions pro-israéliennes traditionnelles. L’acte terroriste brutal du Hamas a inversé cette tendance, du moins pour l’instant. Cela fait partie de la dynamique de la nouvelle guerre froide. L’ensemble du bloc occidental, sous la houlette des États-Unis, en profite pour s’unir derrière Israël. Les États-Unis ont envoyé des porte-avions pour dissuader une éventuelle ingérence des pays de la région et promettent des livraisons d’armes supplémentaires. Le Royaume-Uni a également envoyé des navires de guerre. En Europe, les drapeaux israéliens sont partout tandis que Macron a interdit les manifestations de soutien à la Palestine en France. Il a même été envisagé d’interdire toute aide humanitaire à Gaza. À l’OTAN, le tapis rouge a été déroulé pour le ministre israélien de la Défense Galant. En intégrant et en cooptant Israël dans le bloc occidental, les États-Unis tentent de restaurer leur perte de prestige pour intervenir militairement au Moyen-Orient. Une confrontation directe entre superpuissances, comme cela avait été craint lors de la guerre du Kippour en 1973, n’est pas envisageable dans l’immédiat. La Russie profite de la guerre parce que celle-ci détourne l’attention de l’Ukraine, mais même Poutine a jugé trop aventureux de se déclarer solidaire du Hamas. Cela pourrait toutefois changer si le régime syrien d’Assad est directement menacé.

    Le régime israélien et l’impérialisme occidental profitent pleinement de ces événements d’une ampleur historique. L’acte terrible du Hamas ne change par contre rien à l’occupation et au blocus, ni d’ailleurs à l’analyse des raisons sous-jacentes derrière ces événements.

    Une percée surprise hors de la plus grande prison à ciel ouvert du monde

    Le 7 octobre, à l’aide de bulldozers, de motos, de parapentes et de canots à moteur, les militants du Hamas ont surpris l’armée de la plus grande puissance impérialiste régionale. Le Hamas s’était auparavant imposé comme la principale organisation de la résistance palestinienne à l’occupation, aux dépens de l’Autorité palestinienne et du Fatah corrompu et collaborant avec le régime israélien. Le Hamas avait établi un quartier général commun avec d’autres factions de la résistance, mais il est resté discret durant les affrontements armés à Gaza et à Jénine en mai et juin dernier.

    Cette fois-ci, il a lui-même lancé une offensive qui comportait initialement des éléments de lutte de partisans contre l’occupation, mais dont le caractère réactionnaire est devenu plus dominant, tant sur le fond que sur la forme, au fur et à mesure que l’attaque progressait. L’attaque s’est accompagnée d’un massacre aveugle d’une ampleur sans précédent dans la lutte de libération palestinienne.

    La Hamas voulait créer l’illusion que l’armée israélienne ne pourrait plus commettre ses crimes en toute impunité et que, s’il n’allait peut-être pas remporter une victoire militaire, il allait tout de même blesser Israël. Même le grand nombre de victimes civiles du côté israélien n’a pas réussi à refroidir l’enthousiasme des Palestiniens et des Arabes qui espéraient que, cette fois-ci, le nombre de victimes serait plus symétrique et qu’il n’y aurait pas à nouveau 10 à 15 vies palestiniennes perdues pour chaque mort du côté israélien.

    Selon Le Monde, après 24 heures, le Hamas avait atteint tous ses objectifs : mettre fin au sentiment d’invulnérabilité et de sécurité du côté israélien et suspendre le rétablissement des relations avec les pays arabes (Maroc, Émirats arabes unis, Soudan) que les États-Unis et Israël voulaient couronner avec l’Arabie saoudite. La normalisation des relations avec l’Arabie Saoudite devait permettre à cette dernière d’accéder à un système de sécurité américain tout en représentant un contrecoup face à la restauration des relations entre l’Arabie Saoudite et l’Iran facilitée par la Chine. Le Monde a conclu que l’approche du Hamas consistait ensuite à attendre la riposte face à son attaque-surprise.

    L’attaque terroriste du Hamas ne saurait être dissociée de l’occupation, du blocus de Gaza et du nombre record de Palestiniens tués en Cisjordanie : 212 déjà avant le 7 octobre, soit le chiffre le plus élevé depuis 2005. Mais les méthodes ne sont pas non plus distinctes du contenu. Le Hamas défend un régime autocratique similaire à la dictature iranienne récemment contestée par une résistance de masse pour les droits démocratiques et contre l’oppression des femmes et des personnes LGBTQIA+. Ces idées réactionnaires sont liées aux actes terroristes qui ciblent des victimes au hasard.

    Nous ne sommes pas opposés à la lutte armée, mais en tant qu’outil, pas en tant que substitut à l’entrée en action des masses et certainement pas à la place d’une lutte politique. Nous défendons la constitution de comités démocratiques d’action de masse à l’image de ceux qui sont nés de la première Intifada (1987-1993), mais cette fois-ci avec un programme visant à la transformation socialiste démocratique de la société et non à s’aligner sur des régimes arabes capitalistes réactionnaires et dictatoriaux qui oppriment et exploitent leur propre peuple. Le soutien dont bénéficie l’attaque du Hamas est malheureusement le reflet de la faiblesse de la gauche qui, au lieu de défendre une position d’indépendance de classe internationaliste, soit soutient sans critique le régime israélien, soit laisse la juste lutte pour l’autodétermination dans les mains de forces aux méthodes réactionnaires. Le soutien à l’attaque du Hamas est une expression de désespoir, tout comme lors des attentats suicides de la seconde Intifada (2000-2005). .

    Une réponse socialiste

    • Stop au bombardement de Gaza ! Résistance contre l’offensive terrestre et contre l’expansion régionale du carnage ! Non au terrorisme, qu’il soit d’État ou non ! Solidarité avec toutes les communautés touchées !
    • Stop au blocus, au siège, aux colonies et à l’occupation ! Pour une mobilisation internationale et une lutte par-delà les frontières des communautés pour une trêve des armes !
    • Pour un échange rapide de tous les prisonniers et otages dans le cadre d’une trêve immédiate des armes !
    • Non à l’ingérence des principaux blocs impérialistes qui utilisent le massacre pour renforcer leurs positions ! Aucune confiance dans le gouvernement israélien « d’unité nationale » de la droite et de Gantz qui portent une lourde responsabilité dans l’escalade qui a conduit à la guerre !
    • Pas touche à nos droits démocratiques ! La guerre n’élimine pas les différences de classe, mais les exacerbe. Le mouvement de lutte avec grèves et manifestations en Israël doit être reconstruit, avec des mesures de sécurité supplémentaires bien entendu, pour mener une lutte conséquente en faveur de la démocratie, de l’égalité, de la prospérité et de la sécurité personnelle pour les deux communautés. Le bloc impérialiste occidental s’est aligné unilatéralement sur Israël et les manifestations ou prises de position propalestiniennes sont interdites dans de nombreux pays, ce qui va s’accentuer avec des attaques terroristes telles que celles d’Arras en France et de Bruxelles. Défendons notre droit de manifester et de protester !
    • Pour l’unité des travailleurs contre la politique de « diviser pour mieux régner » ! Non à la chasse aux sorcières contre celles et ceux qui s’opposent à la guerre et à l’oppression nationale sur les lieux de travail ou sur les campus. Le mouvement ouvrier ne doit pas laisser les frustrations grandir chez chaque individu jusqu’à ce qu’elles deviennent des bombes à retardement. Il doit lui-même s’engager dans le débat et défendre des solutions collectives. À cette fin, les discussions, les rassemblements de protestation avec toutes les communautés et les manifestations de solidarité sont importants dans le cadre de notre lutte pour une société fondamentalement différente.
    • Pour des manifestations et des grèves – telles que la Grève de la Dignité de mai 2021 – en Cisjordanie et à Jérusalem-Est dans le cadre d’une lutte de masse organisée démocratiquement par des comités élus pour la libération nationale et l’émancipation sociale ! Ces comités doivent prendre en charge les mesures de sécurité et l’autodéfense du mouvement lors de manifestations contre la guerre, l’occupation et les colonies. Pour des comités de défense démocratiquement élus dans les quartiers et les localités.
    • Pour une mobilisation internationale de masse contre la guerre. Pour un boycott ouvrier international des livraisons d’armements et d’équipements destinés à être utilisés par Israël dans l’oppression des Palestiniens, ce à quoi appellent les syndicats palestiniens.
    • Pour un plan massif d’investissements publics de reconstruction en faveur du bien-être pour toutes et tous ! Il est déchirant de voir comment, en temps de guerre, des ressources apparemment inépuisables peuvent être trouvées et concentrées au point d’attaque. La reconstruction des deux communautés, tant sur le plan matériel qu’en termes de soutien médical et psychologique, nécessitera une concentration et un engagement de ressources d’une taille au moins comparable. Les capitalistes et leurs gouvernements ne le permettront jamais. C’est impossible sans l’expropriation des gigantesques profits de guerre et du secteur bancaire et leur prise en charge publique sous contrôle et gestion démocratiques. Si ces ressources étaient utilisées sous contrôle démocratique et propriété publique pour assurer à toutes et tous de quoi bénéficier d’une vie digne dans le cadre d’une transformation socialiste de la région, alors une solution durable serait possible.
    • Pour une lutte de masse des travailleurs, des pauvres et de la jeunesse ! La situation actuelle est le produit du capitalisme et de l’impérialisme. Le tribut est particulièrement élevé pour les travailleurs et les pauvres. Nous sommes pour la création de partis de lutte de masse dans les deux communautés travaillant ensemble pour organiser la protestation et la lutte des travailleurs, des pauvres et des jeunes de toutes les communautés dans le cadre d’une lutte internationaliste et socialiste.
    • Pour une Palestine socialiste indépendante avec sa capitale à Jérusalem-Est et une transformation socialiste en Israël avec une garantie d’égalité des droits pour toutes les nations et minorités. Pour une solution juste pour les réfugiés palestiniens par le biais d’un accord qui reconnaisse l’injustice historique et permette à ceux qui le souhaitent de revenir, tout en garantissant la prospérité et l’égalité pour toutes et tous. L’idée de « deux États » est utopique dans le cadre du capitalisme ; elle reviendrait à créer un État fantoche néocolonial pour les Palestiniens. Cela ne résoudrait pas les problèmes fondamentaux des masses palestiniennes. Un État binational est également utopique dans un contexte capitaliste, une grande majorité des deux nationalités ne veulent pas renoncer à leur indépendance dans le cadre d’un seul État et cela ne mettrait pas fin aux craintes et aux suspicions. Pour parvenir à l’unité dans la lutte pour une transformation socialiste, il est nécessaire de reconnaître le droit à l’autodétermination de tous les peuples. La lutte peut arracher des conquêtes sociales, mais une transformation socialiste de la société est nécessaire pour élever le niveau de vie des travailleurs palestiniens et israéliens au-dessus des meilleures conditions possibles dans le cadre du capitalisme. Ce n’est que sur cette base que l’on pourra obtenir une égalité totale des droits dans tous les domaines. Une solution juste exige une lutte qui garantisse la prospérité et l’égalité dans la région et qui prône le dialogue direct et le consentement mutuel, y compris la reconnaissance des injustices historiques et le droit au retour. Dans ces conditions, la haine mutuelle et le schisme national diminueront et les fondements d’un État socialiste uni pourront être posés.

    Contre la guerre et le terrorisme d’État ou non : la solidarité

    Le régime israélien a cyniquement mobilisé sa puissante machine de guerre pour infliger une sanglante punition collective en considérant que la totalité de la population palestinienne est responsable de l’attaque aveugle du Hamas.

    Il a coupé les approvisionnements en électricité, en eau, en carburant et en marchandises à Gaza tandis que l’aide humanitaire est elle aussi bloquée au milieu des bombardements constants, alors que les hôpitaux manquent de médicaments et que les générateurs tombent en panne. L’opinion publique internationale est choquée, mais cela provoquera également l’horreur en Israël à mesure que ce drame se poursuivra. En maintenant fermé le poste-frontière de Rafah, le régime israélien, avec la complicité du régime égyptien, prend en otage toute la population de Gaza. Des deux côtés, le sort des otages n’est rien d’autre qu’un dommage collatéral, ce qui suscitera lui aussi une répulsion croissante.

    Chez les Palestiniens, c’est actuellement le soutien au Hamas qui domine, inspiré par la volonté justifiée de résistance contre l’occupant israélien. Chez les Israéliens, ce sont les appels à la vengeance pour le terrible massacre aveugle qui l’emportent. Ce fossé dans la conscience nécessite une approche sensible qui tienne compte des dommages et des traumatismes subis, offre une perspective de sécurité et de prospérité pour toutes les communautés et reconnaisse et réalise le droit à l’autodétermination d’une manière qui soit acceptable et attractive pour les deux communautés.

    Il faut saisir toutes les occasions de briser le cycle de la haine et de la violence. Nos membres sur place participent par exemple activement à la résistance sur les campus israéliens contre les tentatives de l’extrême droite d’expulser du campus celles et ceux qui expriment leur soutien aux Palestiniens. Comme toujours en situation de guerre, la cherté du coût de la vie augmente à vue d’œil, de même que les profits d’un certain nombre de grandes entreprises, évidemment dans l’industrie de l’armement et tout ce qui touche à la défense, mais aussi dans la distribution et d’autres secteurs. Cela peut permettre de mieux comprendre qui profite de la guerre et qui en paie le prix dans les deux communautés.

    La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens. Elle met à nu toutes les contradictions. Même la réalisation de revendications directes, y compris démocratiques, nécessite une mobilisation de masse, dans toute la région, mais aussi au niveau international, en raison de l’implication de toutes les puissances impérialistes. Nous sommes catégoriques : aucune solution durable n’est possible sans transformation socialiste de la société. Notre programme n’est pas une liste de souhaits, il part des besoins immédiats et les relie à des actions visant à une mobilisation de masse. Il formule des exigences objectivement nécessaires, mais qui ne seront satisfaites par aucun régime capitaliste de son plein gré. Il démontre en pratique la nécessité d’une transformation socialiste de la société, non pas pour un avenir lointain, mais comme une nécessité objective directe.

  • Israël-Palestine. Non à la chasse aux sorcières nationaliste sur les campus !

    Dans le contexte de l’offensive israélienne lancée contre Gaza, en Israël, les institutions universitaires et les organisations étudiantes se livrent à une dangereuse chasse aux sorcières contre les étudiants palestiniens ainsi que celles et ceux qui s’opposent à la guerre. Les membres du Mouvement de lutte socialiste (section d’ASI en Israël-Palestine) sur le campus ont initié, avec l’organisation Academia for Equality, une campagne de protestation contre la persécution au nom des étudiants et du personnel enseignant. Ils appellent à une lutte organisée contre cette persécution et à l’arrêt de la guerre.

    Par AV & TK, Mouvement de lutte socialiste (ISA en Israël-Palestine)

    La crise de la guerre – de l’horrible massacre dans le sud du pays aux bombardements à Gaza et à la menace d’une escalade militaire globale dans la région – a provoqué le choc, le chagrin et la peur, et a approfondi la fracture nationale au sein des territoires de 1948. Cette situation est illustrée par les réseaux sociaux, qui sont inondés d’incitations nationalistes.

    Dans ce contexte, les directions des institutions académiques, ainsi que les responsables des différents syndicats étudiants, jouent désormais un rôle destructeur en propulsant une campagne nationaliste de chasse aux sorcières. En raison de leur soutien politique aux opérations militaires menées par le gouvernement, ils excusent de manière cynique et démagogique les persécutions agressives fondées sur la nationalité ou l’opposition à la guerre et à l’oppression nationale, en les présentant comme une « lutte contre le terrorisme ».

    À ce jour, des centaines d’étudiants et de conférenciers ont été ajoutés à des listes de surveillance véritablement maccarthystes qui exigent – avant tout de la communauté arabo-palestinienne – d’éviter toute critique de la réalité de l’oppression nationale et de la vengeance menée par le gouvernement, une offensive qui a tué un nombre record de personnes dans la bande de Gaza, y compris des centaines d’enfants et de bébés. Les organisateurs de cette chasse aux sorcières belliciste s’efforcent, sur la base de leur agenda politique, d’attiser la division nationale et, en fin de compte, de perpétuer les causes profondes de la guerre.

    Dès le deuxième jour de la guerre et du massacre choquant dans le sud d’Israël, le recteur de l’université de Haïfa, Gur Alroey – qui avait précédemment annoncé son refus politique de servir en tant que réserviste pour protester contre un « gouvernement qui fait d’Israël un pays non démocratique » – a envoyé une lettre à quatre étudiants palestiniens, puis à deux autres, dans laquelle il les informait de leur suspension immédiate sans audience, ainsi que de leur expulsion des résidences universitaires. Cette lettre faisait suite à sa conclusion selon laquelle ils avaient « publié des messages exprimant un soutien clair au terrorisme du Hamas et au meurtre d’innocents ».

    En réponse, 25 maîtres de conférences ont attaqué cette décision, la qualifiant d’arbitraire et de dépourvue d’autorité, et se sont interrogés : « Quel processus d’établissement des faits avez-vous réussi à appliquer dans le court laps de temps avant de prendre la mesure agressive de la suspension et de l’expulsion, alors que, pour autant que nous le sachions, les étudiants suspendus n’ont même pas eu le droit de donner leur version des faits ? »

    L’action du recteur a jeté de l’huile sur le feu et encouragé les initiatives d’étudiants nationalistes extrémistes sur différents campus, qui ont commencé à établir des listes de surveillance contre les étudiants qui, selon eux, « soutenaient l’ennemi » sur les réseaux sociaux. Ils ont même fait pression sur les syndicats d’étudiants et la direction des établissements universitaires pour qu’ils dirigent officiellement la campagne de chasse aux sorcières politiques. Les administrateurs des universités ont accepté cette demande et ont publié des lettres incitant les étudiants à surveiller l’activité de leurs pairs sur les médias sociaux et à signaler toute expression de « soutien à l’ennemi ».

    Les dirigeants des syndicats étudiants soutiennent la persécution

    La direction du syndicat national des étudiants, dirigée par l’activiste de droite Elhanan Fellheimer, qui a œuvré contre le mouvement de protestation démocratique et a abandonné les étudiants au plus fort d’une grave crise économique, joue un rôle actif mais cynique dans cette campagne de persécution politique.

    Un message, publié par le syndicat dans le but d’encourager la persécution, et qui a été partagé des milliers de fois, présentait cinq exemples de messages sur les réseaux sociaux que la droite considère comme « soutenant le terrorisme ». Aucun d’entre eux n’exprimait un soutien concret à une attaque terroriste, ni ne soutenait le fait de blesser des civils – en fait, certains des posts incluaient une objection aux dommages causés à des bébés et à d’autres civils innocents, l’un d’entre eux étant apparemment marqué uniquement parce qu’il montrait un drapeau palestinien.

    En fait, le syndicat étudiant de l’université de Haïfa l’a admis publiquement : « la barre est plus basse que jamais et nous condamnons tout comportement pouvant être interprété comme un encouragement à la nation palestinienne et un soutien au terrorisme. La liberté d’expression, à notre avis, est réduite à néant en cette période ! » En d’autres termes, la droite cherche n’importe quelle excuse pour une chasse aux sorcières nationaliste, visant à faire taire toute critique de la guerre et même à étouffer toute empathie élémentaire avec la souffrance des masses assiégées à Gaza alors qu’elles sont bombardées par l’État israélien.

    Il est particulièrement grave que les syndicats étudiants locaux et nationaux – qui sont censés représenter les étudiants et protéger leurs droits – prennent une part active dans la conduite de cette campagne de persécution politique et encouragent les étudiants à dénoncer leurs pairs. La chasse aux sorcières est avant tout dirigée contre les étudiants palestiniens, les militants juifs de droite demandant que les étudiants palestiniens soient soumis à des tests de “loyauté” à l’égard des actions du gouvernement : s’ils ne soutiennent pas activement la guerre à Gaza, ils sont considérés comme des “partisans du terrorisme”.

    Incitation au racisme

    Dans le même temps, certains étudiants juifs ont appelé à “raser Gaza”, où vivent plus de 2 millions de personnes. Il s’agit essentiellement d’un appel à des actions terroristes d’État, y compris des punitions collectives et des massacres de masse, mais aucune institution universitaire ni aucun syndicat étudiant n’a pris de mesures contre ces appels à la haine en ligne.

    À l’université Ben-Gourion, la direction renonce activement à toute responsabilité dans la lutte contre l’incitation au racisme sur les groupes Facebook de l’université, comme l’a montré Wattan Madi, militante politique de “Hadash/al-Jabha” et candidate aux élections municipales d’Arraba. Elle a été victime d’attaques de la part de militants de droite qui ont affirmé qu’elle soutenait des terroristes, en réponse à un message qu’elle avait publié lors d’une assemblée électorale du Hadash, avant la guerre. L’année dernière, Wattan Madi a été prise pour cible et soumise à une procédure disciplinaire sous la pression de l’extrême droite, uniquement parce qu’elle avait lu un poème du célèbre poète palestinien Mahmoud Darwish lors d’un service commémoratif de la Nakba.

    Ainsi, la campagne de chasse aux sorcières fait suite à des années de persécution politique à l’encontre des étudiants palestiniens. Le cas de Madi n’est qu’un exemple parmi d’autres de harcèlement, notamment contre les cérémonies de commémoration de la Nakba dans les établissements universitaires. Même des activités de routine sur le campus ont été attaquées : au cours de l’année universitaire précédente, une foire du livre arabe a été annulée par la direction de l’université de Tel-Aviv.

    Pendant des années, les établissements universitaires ont laissé libre cours aux éléments racistes et d’extrême droite sur les campus. Cette situation permet aujourd’hui aux activistes de droite de mener une campagne de persécution politique de grande envergure, dont l’objectif est de semer la panique et la peur et de créer une atmosphère de surveillance et d’intimidation. La politique de suspension sans enquête crée une présomption de culpabilité jusqu’à preuve du contraire, ce qui encourage également les militants de droite à signaler d’anciens messages, voire de faux messages, afin d’inventer de toutes pièces des “preuves” pour leur plainte.

    Les directions académiques se conduisent de manière hypocrite et raciste. Il est également évident que la chasse aux sorcières ne s’arrête pas aux étudiants. Par exemple, la Jeunesse du Likoud à Haïfa a vilipendé et publié les noms des membres du personnel supérieur qui ont critiqué le recteur, appelant à leur licenciement. Ce phénomène ne s’arrête pas au monde universitaire : cette semaine, le ministre israélien des communications, Shlomo Karhi, a annoncé qu’il préconisait une réglementation d’urgence qui lui permettrait d’emprisonner les civils dont les messages “nuisent au moral national”, et il a préconisé l’interdiction d’Al Jazeera.

    S’organiser contre la politique de “diviser pour régner” et pour la fin de la guerre

    La persécution politique sur les campus ne fera qu’aggraver les incidents racistes et discriminatoires, accroître le manque de sécurité personnelle des étudiants contraints d’étudier sous un œil maccarthyste, et affaiblir la liberté d’expression nécessaire à l’activité académique. Même l’”Alliance des universitaires pour la démocratie israélienne”, une organisation du mouvement de protestation démocratique israélien qui a pris un virage à droite face à ces développements, l’a reconnu et a publié une déclaration contre le suivi et la surveillance des étudiants sur les réseaux sociaux. Dans le contexte des horreurs de la guerre, il est particulièrement important que les étudiants et le personnel prennent clairement position contre le racisme et la chasse aux sorcières, et insistent sur le fait qu’ils ont le droit de critiquer le gouvernement, ainsi que le droit de s’opposer à la guerre.

    Dans un premier temps, les membres du Mouvement de lutte socialiste sur le campus ont lancé une lettre de protestation contre la persécution politique qui a été signée par des centaines de personnes et envoyée lundi (16.10) au Conseil de l’enseignement supérieur en Israël. Cette lettre a été envoyée en collaboration avec Academia for Equality, une organisation représentant environ 800 membres du personnel, qui, avec le centre juridique Adalah, a également mis en place une ligne d’assistance pour les étudiants qui ont été persécutés politiquement ou qui ont fait l’objet de discrimination raciste.

    Quelques heures seulement après la diffusion de la lettre, nous avons reçu une réponse du directeur du syndicat national des étudiants, qui est membre du Conseil de l’enseignement supérieur. M. Fellheimer, qui choisit systématiquement d’investir les fonds du syndicat pour faire taire les positions anti-gouvernementales, a cyniquement utilisé la mémoire des victimes de l’horrible massacre dans le sud d’Israël dans sa lettre pour éviter de répondre aux arguments qui réfutent les exemples de “soutien au terrorisme” publiés par le syndicat.

    Dans sa réponse, il a affirmé que la liberté d’expression “ne peut pas se transformer en liberté d’incitation”, et a bien sûr omis de mentionner l’incitation à la haine raciste et nationaliste sur les réseaux sociaux publiée par les Juifs-Israéliens, y compris les commentaires postés en réponse à l’annonce du syndicat sur les réseaux sociaux.

    En outre, M. Fellheimer s’est engagé à promouvoir l’interdiction d’utiliser le drapeau palestinien. Cette interdiction a été vivement combattue par les directions des établissements universitaires lors du mouvement de masse contre la réforme judiciaire, car elle a été perçue comme une “tentative de faire de la direction de l’université des policiers, des juges et même des bourreaux pour des transgressions qui n’ont rien à voir avec le monde universitaire”.

    Pour s’opposer à cela, il est essentiel que les étudiants, le personnel enseignant et de recherche et les travailleurs des campus s’organisent contre la persécution politique et la guerre. A cette fin, nous devons organiser des réunions pour discuter concrètement des prochaines étapes de la lutte, y compris l’application d’une pression concentrée sur les syndicats pour exiger la fin de la chasse aux sorcières, et un appel aux syndicats du personnel universitaire pour protéger leurs membres et les autres travailleurs et étudiants, également spécifiquement contre la persécution politique nationaliste.

    Face à la chasse aux sorcières, à l’extrême droite et à l’exploitation des horreurs de la guerre pour promouvoir un programme politique répressif, ceux qui s’opposent à la guerre et à la persécution politique doivent s’organiser clairement et vocalement contre elles.

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