Category: Europe

  • [VIDEO] Référendum britannique sur l'UE: que doivent en penser les marxistes ?

    Lors du weekend 'Socialisme 2015' qui a pris place à Londres en novembre de l'an dernier, une discussion avait été organisée au sujet du référendum prévu en Grande-Bretagne concernant l'Union européenne. Notre camarade Hannah Sell y a développé l'approche défendue par notre parti-frère en Angleterre et au Pays de Galles, le Socialist Party.

  • Pologne: Le conflit dans la classe dominante n'offre pas d'alternative aux travailleurs

    pologneA peine entré en fonction, le nouveau gouvernement PiS (Droit et Justice) n’a pas perdu de temps pour montrer son côté autoritaire. Il s’est d’abord attaqué au tribunal constitutionnel, en refusant d’assermenter des juges élus sous l’ancienne majorité, et en faisant passer en pleine nuit une réforme qui entrave le travail du tribunal. Désormais, le président du tribunal ne pourra plus choisir l’ordre de traitement des dossiers, ce qui fait qu’une loi pourrait être appliquée pendant 3 ans avant d’être jugée anti-constitutionnelle. Le PiS a aussi annoncé le remplacement des dirigeants des médias publics, ce qui a provoqué des démissions de journalistes en chaîne.

    Par Tiphaine, Alternatywa Socjalistyczna (section polonaise du Comité pour une Internationale Ouvrière)

    En réaction, un Comité de Défense de la Démocratie (KOD) s’est créé, officiellement apolitique mais en fait influencé par les partis néolibéraux Platforma Obywatelska (PO) et Nowoczesna. PO vient de perdre sa majorité aux élections parlementaires de septembre, Nowoczesna pourrait donc devenir le principal parti d’opposition. Le KOD a appelé à des manifestations qui ont rassemblé jusqu’à 50 000 personnes à Varsovie.

    Il est courant en Pologne que les têtes des médias changent après un changement de majorité ; et les juges constitutionnels que le président Duda a refusé d’assermenter avaient été élus suite à une réforme du PO elle aussi controversée. Alors pourquoi les manœuvres du PiS ont-elles provoqué un tel tollé en Pologne et à la Commission Européenne ?

    C’est surtout la manière brutale et ouverte dont le PiS a opéré qui a choqué. L’ancien premier ministre Kaczynski, qui tire encore les ficelles du parti, a été jusqu’à avoir une réunion secrète avec le président hongrois Orban, connu pour son muselage des médias et les attaques contre sa propre constitution. Pour le camp des néo-libéraux polonais, c’est aussi une occasion de se restructurer après leur défaite et de faire une démonstration de force.

    Ces manifestations semi-massives attirent surtout les classes moyennes mais très peu la classe ouvrière. Le PiS a été élu sur base de promesses sociales qui lui ont permis de récupérer beaucoup des voix des travailleurs, par exemple l’augmentation du salaire minimum, la diminution de l’âge de la retraite et la création d’une allocation mensuelle de 500zl (125€) par enfant. Cependant, ces promesses sont loin d’être réalisées, et le gouvernement a déjà tenté d’en réduire la portée. Par exemple, l’allocation de 500zl ne sera versée qu’à partir du deuxième enfant. Les promesses sur les salaires et la retraite sont encore en discussion – les travailleurs polonais vont rapidement voir où se trouvent les vraies priorités du gouvernement.

    La plupart des travailleurs restent donc en retrait du mouvement en attendant de voir la réalisation de ces promesses. La majorité des dirigeants du syndicat Solidarno?? est d’ailleurs en faveur du gouvernement et on ne peut pas s’attendre à une lutte généralisée des travailleurs dans la prochaine période. Il y a par contre déjà eu des luttes sectorielles depuis l’élection du PiS, par exemple dans une centrale électrique et chez les travailleurs sociaux.

    Même chez les travailleurs qui ne partagent pas ces illusions, il n’y a pas grand enthousiasme à se lever pour des juges constitutionnels et des médias qui dénigrent leurs luttes et ne défendent pas leurs intérêts. Le journal Gazeta Wyborcza a interviewé des monteurs, cameramen et journalistes de base de la télévision nationale au sujet des changements dans les médias. Il se trouve que ceux-ci sont plus préoccupés par les contrats précaires, les faibles salaires et les statuts forcés d’auto-entrepreneur que par la direction de la chaîne, et que du reste eux-même doivent cacher leurs opinions politiques pour avoir des contrats.

    C’est pourquoi la nouvelle formation de gauche Razem a organisé ses propres rassemblements en défense de la constitution. Ce parti a été créé début 2015 et a connu une progression relativement forte. Il a appelé à défendre la constitution sur la base des droits sociaux et des principes de la « justice sociale » qui y sont inscrits.

    Pendant cette période, le parti a aussi participé à une campagne contre le licenciement de 4 syndicalistes de l’entreprise PolskiBus. Ce cas n’est pas isolé, la répression contre les syndicalistes est très forte malgré l’article 12 qui défend le droit de se syndiquer. Razem a donc déclaré que si le KOD et le PO défendent la constitution dans les mots, on ne les voit pas agir pour défendre les droits qu’elle garantit.

    Ce qu’ils ont surtout montré, c’est que même si les droits des travailleurs existent sur le papier, ils ne sont pas appliqués s’ils ne sont pas constamment défendus par les luttes. La constitution a été rédigée en 1997 sous un président social-démocrate (SLD), et il est vrai que le texte a une certaine phraséologie de gauche. Mais la constitution venait avant tout sanctionner la forme d’Etat qui convenait à la nouvelle classe dominante, après que l’économie capitaliste se soit stabilisée et la situation politique avec elle.

    Tous les droits démocratiques garantis sont limités par la formule « Les restrictions à l’exercice des libertés et droits constitutionnels ne peuvent être imposés que par la loi et seulement lorsque cela est nécessaire à la sécurité et l’ordre public de l’Etat démocratique » (Article 31). En d’autres termes, la démocratie s’arrête là où commence la sécurité de « l’économie sociale de marché » qui est la « base économique de la République Polonaise » (Article 20).

    C’est une bonne initiative de la part de Razem d’avoir mobilisé indépendamment du KOD. Mais la gauche polonaise doit montrer clairement qu’il s’agit d’un affrontement entre deux fractions de la classe dominante sur la façon de défendre ses intérêts. A ce jeu, il n’y a qu’un seul perdant : la classe ouvrière, soit par la politique autoritaire du PiS, soit par la politique économique des néo-libéraux s’ils reviennent au pouvoir dans 4 ans.

    Mais à ce jour, il n’y a pas d’organisation qui représente une alternative à ces deux partis, c’est à dire qui organise politiquement la classe ouvrière et qui défende ses intérêts contre la classe capitaliste. Razem est pour l’instant dans une position ambigüe en cherchant à défendre à la fois les intérêts des travailleurs et les institutions qui sont un outil de leurs exploiteurs. Alternatywa Socjalistyczna (section-soeur du PSL en Pologne) est intervenue dans les rassemblements de Razem en défendant l’indépendance politique de la classe ouvrière et la nécessité d’un programme clair de lutte contre le capitalisme.

  • Grande-Bretagne. La police a infiltré le Socialist Party

    carloneri

    Hier, les sites internet du Guardian et de la BBC ont dévoilé hier que «Carlo Neri», tel que nous l’avons connu, a infiltré le Socialist Party de 2001 à 2006 pour le compte la Metropolitan Police’s Special Demonstration Squad (SDS, équipe spéciale d’intervention en manifestation de la police métropolitaine). Ce n’est malheureusement pas surprenant.

    Déclaration de presse du Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles)

    C’est très loin d’être la première révélation de ce type. En 2013, Peter Francis a révélé qu’il a également infiltré le Militant Labour, organisation qui est aujourd’hui le Socialist Party (et constituait à l’époque l’aile marxiste au sein du Parti Travailliste, NDT) au nom de la SDS. Francis a également admis avoir infiltré Youth Against Racism in Europe (YRE, Jeunes contre le racisme en Europe), une organisation de jeunesse démocratique dans laquelle nous avons été impliqués.

    D’autres preuves des tentatives répétées visant à espionner le Socialist Party ont été révélées en 2002 dans un documentaire de la BBC (intitulé “True Spies”) qui avait mis en lumière que la police du West Midlands avait espionné Dave Nellist, qui est toujours aujourd’hui membre du Socialist Party, au moment où il était député du parti travailliste en tant que Militant Labour.

    Lois Austin, membre du Socialist Party et porte-parole de Youth against Racism in Europe (YRE) et membre de la Commission d’enquête Pitchford sur les infiltrations policières :

    YRE_inflitration
    Une des nombreuses actions menées par YRE

    « Ce n’est là que la dernière de toute une série de scandales ayant révélé que la police a utilisé ses ressources afin d’infiltrer des organisations de gauche démocratiques. Une des principales campagnes de YRE concernait le meurtre de Stephen Lawrence (un assassinat qualifié d’être « l’un des plus évidents meurtres raciaux jamais résolu », NDT). Il a fallu 18 ans à la police pour condamner ses meurtriers (une enquête publique suite à ces évènement conduite sous la supervision du juge Macpherson en vint à conclure que la police était « institutionnellement raciste », NDT) mais nous voyons maintenant qu’elle consacrait ses ressources à l’espionnage de militants antiracistes, y compris en essayant de couvrir de boue la famille endeuillée de Stephen Lawrence.

    « En agissant de la sorte, la police a causé une détresse indicibles aux familles dont le nom des enfants décédés ont été utilisés par les agents infiltrés ainsi qu’aux femmes qui ont construit des relations avec ces hommes qui, à leur insu, étaient en réalité des agents de police sous couverture.

    « Il n’y avait aucune raison d’infiltrer YRE ou Militant Labour. Nous avons publiquement annoncé nos évènements, la police n’avait qu’à lire nos tracts et nos journaux ou à assister à nos réunions publiques pour savoir ce qui se passait. »

    L’ancien député Dave Nellist a ajouté :

    Former Coventry MP and staunch socialist Dave Nellist gave a rousing speech to the protesters. Picture by Jon Mullis 49.010.026.cov.jm7 (www.buyphotos247.com)
    L’ancien député de Coventry Dave Nellist

    « Quand sont apparues ces révélations concernant l’espionnage de la police, le gouvernement s’est vu forcé de réagir en mettant en place la Commission d’enquête Pitchford sur l’espionnage policier. Cela est le bienvenu, mais c’est insuffisant.

    « La Commission d’enquête de Lord Pitchford devra passer outre les tentatives de masquer la réalité. Il est injustifiable que des policiers infiltrés aient espionné un député démocratiquement élu en raison de sa défense d’opinions de gauche. Nous exigeons de connaître les noms de tous les agents « sous couverture », c’est la seule manière de découvrir la pleine mesure de ce qui s’est produit.

    « Nous exigeons également que le mandat de la Commission d’enquête soit étendu à l’Ecosse.

    « Mais à côté de cette Commission d’enquête, le mouvement des travailleurs et les syndicats doivent organiser leur propre enquête indépendante, composée de représentants du mouvement syndical et des groupes antiracistes et écologistes qui ont subi des infiltrations. Une telle enquête pourrait également aller au-delà du rôle de la police et aussi déterminer d’où provenaient les ordres et quel a été le rôle du gouvernement lui-même.

    « Nous refusons de dire que de telles infiltrations sont choses du passé. La surveillance des manifestants pacifiques a considérablement augmenté dans la période récente. Nous exigeons de savoir ce que les Carlo Neris d’aujourd’hui sont en train de faire.

    «Aujourd’hui, une nouvelle génération commence à s’impliquer dans des campagnes contre l’austérité, contre le racisme et contre la guerre. Quelle que puisse être l’ampleur des infiltrations policières, cela ne pourra pas empêcher ce fait. La remise en cause des intérêts que servent la Loi et la police, au côté de revendications visant à les rendre démocratiquement responsables, sera un aspect important des campagnes actuelles et futures. »

  • France. A Goodyear, le cachot pour écraser la lutte

    Signez et partagez la pétition !

    Ce mardi 12 janvier, 8 syndicalistes de Goodyear ont été condamnés à 2 ans de prison, dont 9 mois fermes. Ces anciens salariés de cette usine du Nord de la France sont accusés de « séquestration » et pour certains d’entre eux même de « violence en réunion ». Pour la première fois depuis un demi-siècle, un gouvernement a demandé que des peines de prison ferme soient requises contre des syndicalistes pour avoir participé à des actions en vue d’empêcher la fermeture de leur usine.

    Par Nicolas P. (Bruxelles)

    Début 2014, les salariés s’étaient en effet mobilisés contre la suppression des 1143 emplois de leur entreprise. Une entreprise en bénéfice, et qui de ce fait ne pouvait justifier sa fermeture que par une avidité encore plus grande. Une avidité qui, même si elle empli un peu plus encore les coupes de champagne de sa direction et des actionnaires, entraine mécaniquement un accroissement de la pauvreté et des inégalités dans le pays.

    Après des dizaines d’actions d’occupation, de manifestations et de grèves, face au refus absolu de la direction de dialoguer, huit syndicalistes ont retenu pendant un peu plus d’une journée deux Directeurs des Ressources Humaines dans leur bureau, en exigeant un dialogue.

    On s’émeut du sort horrible de ces deux DRH, condamnés à rester quelques heures dans un bureau. Comme on s’émouvait il y a quelques mois d’une chemise déchirée. Mais combien de journalistes et de bien-pensant se révoltaient contre la violence de l’entreprise ? Combien se sont levés pour dire que non, les profits de quelques actionnaires ne peuvent pas justifier de jeter des centaines de familles dans la misère ?

    Mais pour ces syndicalistes, eux qu’on accuse de violence, de quoi s’agit-il ? Il s’agit de résistance. Une résistance contre une société qui accepte de laisser des gens perdre un emploi sans avoir le droit de lever le petit doigt pour contester. Il s’agit de milliers d’enfants, d’hommes et de femmes qui risquent de tomber à la rue, de ne plus pouvoir se payer de soins médicaux, qui en un mot comme en cent sont condamnés à la pauvreté sur l’autel du profit.

    Le gouvernement veut faire un exemple

    Hollande, Valls et leur gouvernement préparent la suppression dans quelques mois de plus de 1000 articles du Code du travail. Afin d’affaiblir la résistance, ils ont donc décidé de déclencher une répression sans précédent des syndicalistes qui luttent dans les entreprises. Ce jugement inacceptable est l’arme avec laquelle l’ensemble du gouvernement a décidé d’intimider tous les salariés qui se battent pour leur droit et leurs emplois. Le gouvernement affiche sa volonté de mettre les Procureurs et les forces de polices aux services des grands groupes et, évidemment, les militants de terrain en général et ceux de la CGT en particulier sont les plus touchés.

    En Belgique aussi, nous avons pu voir ces derniers temps les autorités cibler la résistance des travailleurs et plus particulièrement le droit de grève. Les grévistes de la SNCB ont été menacés d’astreintes. A Liège, un blocage routier a servi à accuser des manifestants d’avoir du sang sur les mains, des accusations proférées par ceux qui sont précisément responsables de l’austérité dans les soins de santé ! Le plaidoyer pour le service minimum et pour restreindre le champ d’action des syndicats a repris de plus belle.

    Suite au jugement rendu par le Tribunal correctionnel d’Amiens, la CGT Goodyear a décidé de lancer une grande campagne nationale de solidarité syndicale pour exiger que cesse la campagne de répression anti-sociale que le gouvernement a manifestement décidé de mener. En France comme en Belgique, il faut riposter à ces agressions en organisant la résistance la plus large possible. Résister n’est ni un crime ni un délit, mais une nécessité !
    => Signez et partagez la pétition !

    Mickael Wamen, délégué syndical CGT de Goodyear Amiens Nord : « On s’acharne sur nous. C’est plus qu’un choc, c’est un coup de massue (…) La justice veut faire un exemple, on est dans un contexte politique. C’est un message fort adressé à tous ceux qui veulent relever la tête »

    « Il faut remettre tout ça dans une perspective où on a lutté pendant 7 ans pour éviter la fermeture d’un site industriel d’un grand groupe qui fait 2,5 milliards de profit par an et qui a reversé 800 millions d’euros de dividendes l’année de la fermeture »

    « Tout ça alors que François Hollande, quand il était candidat, était venu nous dire qu’il ferait tout pour éviter la fermeture de l’usine s’il était élu. Non seulement aujourd’hui l’usine est fermée, mais en plus on s’acharne sur nous »

  • [VIDEO] Paul Murphy interviewé par Tariq Ali sur Tele Sur

    Paul_telesurLa chaîne Tele Sur a été lancée au Venezuela en 2005 à l’initiative du président défunt Hugo Chavez, en partenariat avec l’Argentine, l’Uruguay et Cuba dans l’objectif de contrecarrer l’hégémonie d’une information néolibérale et dépendante des intérêts de l’impérialisme américain.

    L’écrivain britannique Tariq Ali y anime une émission, The World Today with Tariq Ali, dans le cadre de laquelle il a interviewé notre camarade Paul Murphy, député irlandais membre de notre parti-frère en république irlandaise le Socialist Party ainsi que de l’Anti Austerity Alliance (AAA). Ce dernier aborde la situation actuelle en Irlande et démasque la réalité de la situation derrière le prétendu “miracle” irlandais sorti de l’austérité drastique imposée par les politiciens traditionnels du pays et par la Troïka.

    Ce mensonge néolibéral d’un pays sorti de la crise grâce aux mesures de la Troïka vise à aider l’application de cette logique austéritaire ailleurs. La réalité, c’est qu’un nombre impressionnant de jeunes a quitté le pays, que la pauvreté a augmenté,… Une nouvelle taxe visant à en finir avec la gratuité de l’eau a cristallisé toute la colère et a donné lieu à de nombreuses mobilisations impressionnantes. Paul Murphy revient sur tout ceci ainsi que sur les élections générales à venir, qui risquent d’être un véritable séisme politique pour l’establishment capitaliste.

  • Espagne : un virage à gauche à l'occasion des élections générales

    La mobilisation dans la rue sera déterminante dans le lutte pour nos droits

    espagneLes élections du 20 décembre 2015 ont constitué un changement fondamental au Parlement. Elles sont le reflet des changements survenus dans la rue et dans la conscience du peuple à travers la mobilisation de ces dernières années et aussi de l’essor des différents mouvements, surtout au niveau régional et local, avec Podemos et le succès de candidatures de confluence de gauche, les mairies de Barcelone et de Madrid en étant le meilleur exemple.

    Déclaration de Socialismo Revolucionario (section du Comité pour une Internationale Ouvrière dans l’État espagnol)

    En premier lieu, il faut souligner la rupture du système du bipartisme (droite et social-démocratie) qui perd dans son ensemble plus de 5 millions de voix. C’est surtout le PP (Parti Populaire, droite) qui a subi une perte de plus de 3,6 millions de voix, mais aussi le PSOE (social-démocratie) qui a obtenu les pires résultats de son histoire. Par contre, deux nouvelles forces font une percée dans le parlement, Ciudadanos (droite populiste) et, surtout, Podemos qui est la troisième force du pays avec 69 sièges et qui, en dépit de son récent virage vers la “modération”, a représenté une force opposée à l’austérité.

    Au même temps, on ne peut pas ignorer que le PP, avec 123 sièges, est toujours la première force politique avec une différence de plus de 1,7 million de voix par rapport à la deuxième, le PSOE. Ceci alors que le PP a souffert d’une usure considérable pendant son mandat due aux coupes budgétaires dans la santé et l’éducation ainsi qu’à la montée du chômage de longue durée, de la précarité, de la pauvreté et de l’inégalité. Le discours hypocrite concernant la relance économique – une maigre reprise que la majorité n’a pas remarqué – associé à une certaine stabilisation des données macroéconomiques, et surtout au reflux des manifestations contre l’austérité, ont empêché que la chute du PP ne soit encore plus spectaculaire. Ce parti perd toutefois sa majorité absolue et est en fait très loin d’en approcher.

    De son coté, le PSOE a obtenu ses pires résultats depuis la fin du régime franquiste. le parti considère cependant ce résultat comme un succès relatif étant donné que les sondages prévoyaient que le PSOE finirait la course électorale comme troisième ou même quatrième force politique.

    Ciudadanos parvient à engranger bien plus que ce qui était initialement prévu, même par ses propres dirigeants. Bien que le fait d’avoir un bloc important au Congrès soit un succès pour un parti presque sans structure, il semble que la situation ne lui sera pas très favorable car son caractère pro-austérité devient de plus en plus évident avec son soutien à la formation d’un gouvernement PP. La campagne électorale avait obligé le parti à faire tomber son masque vis-à-vis des thématiques sociales, la suite des évènements accentuera ce processus. De toute façon, Ciudadanos reste une option à utiliser pour l’establishment si le besoin s’en fait sentir.

    Percée de Podemos et occasion manquée pour la gauche

    Sans aucun doute, le changement le plus significatif dans le paysage électoral est la puissante percée de Podemos qui passe de rien à plus de 5 millions de voix. Le retour que Pablo Iglesias annonçait a été partiellement confirmé. Ces derniers mois, les sondages avaient montré une chute de soutien pour Podemos qui arrivait parfois à 10%. Ce retour est en partie dû à la performance d’Iglesias dans les débats télévisés comme à l’intervention de personnages clés associés aux mouvements sociaux qui restent immensément populaires dans la société espagnole (Ada Colau, porte-parole de la plateforme des personnes expulsées de leur logement (PAH) et aujourd’hui maire de Barcelone, etc.). Finalement, Podemos est très proche du PSOE en termes de nombre de voix, avec moins de 250.000 suffrages de différence. La différence de sièges s’explique du fait de la loi électorale et de la concentration de votes dans les grandes villes.

    En Catalogne, la victoire de la liste soutenue par Podemos (mais aussi soutenue par IU (Gauche Unie) et d’autres) – “En Comú Podem” – comme premier parti est un fait historique. Cela survient tout juste 3 mois après la tenue des élections régionales où la liste soutenue par Podemos avait obtenu un très mauvais résultat. Podemos a été également la force la plus soutenue en Euskadi (Communauté autonome basque) et la deuxième force partout où ils se sont présentés en coalition, comme en Galice et à Valence qui, curieusement, étaient auparavant des fiefs du PP.

    Cela nous amène à conclure que les résultats ont été franchement meilleurs là où Podemos a formé des larges candidatures qui réunissent d’autres forces de la gauche. Ils illustrent le potentiel qu’aurait eu une liste unitaire dans tout l’Etat espagnol. Non seulement elle aurait dépassé le PSOE, mais elle aurait été en mesure de contester la première position au PP. Tant l’expérience des élections locales que celle des élections générales nous livrent le message suivant: pour gagner il faut l’unité, construite à la base et au-delà des sigles partisans.

    Concernant la liste de IU “Unité Populaire”, il est très significatif qu’elle ait obtenu près d’un million des voix malgré la difficulté de présenter une candidature concurrente de Podemos et sans se présenter en Galice et en Catalogne parce que la formation était intégrée dans les listes de confluence. Malgré ses maigres résultats, la campagne d’Alberto Garzón a été vraiment bonne avec un profil très apprécié au-delà même de ses électeurs. Il a été le seul à mettre en avant des mesures de rupture réelles, comme la nationalisation des banques renflouées avec l’argent public, la renationalisation du secteur de l’énergie pour promouvoir les énergies renouvelables et mettre fin à la pauvreté énergétique, ou encore un plan ambitieux d’investissements publics visant à créer des emplois.

    Il faut garder à l’esprit que tous ces votes (ceux de Podemos plus ceux d’Unité Populaire plus ceux des listes de confluence de gauche en Catalogne, Galice et Valence) cumulent ensemble plus de six millions de voix favorables à un changement progressiste. Six millions de voix contre les coupes budgétaires et l’establishment.

    On peut conclure que la nouvelle carte électorale tend clairement vers la gauche, chose qui reflète les précédents combats sociaux. La construction de l’unité du mouvement sur base des intérêts de la majorité contre les plans d’austérité de tout nouveau gouvernement est l’une des principales tâches du moment.

    Que se passera-t-il avec le futur gouvernement?

    La situation est très ouverte et est très volatile. La formation d’un nouveau gouvernement et qui le dirigera est vraiment incertain, et la possibilité de nouvelles élections n’est pas exclue. En tout cas, tout nouveau gouvernement sera beaucoup plus faible et instable que le dernier et moins capable de parvenir à la fin de son mandat.

    Cette situation doit être utilisée par la gauche et le mouvements social et des travailleurs pour accroitre la mobilisation contre ce gouvernement car ce sera beaucoup plus facile d’arracher des victoires que dans la période précédente. Cette mobilisation ne doit pas seulement nous défendre contre de nouvelles mesures d’austérité, elle doit aussi lancer des luttes offensives pour récupérer nos droits et conditions de vie perdus.

    Comme nous le disions, il est difficile de prédire la composition du nouveau gouvernement, mais il y a un climat très généralisé contre la répétition d’un nouveau gouvernement du PP, anti-ouvrier, corrompu et brutal.

    Pour cette raison, avec la crainte d’une pasokisation (en référence à la perte fulgurante de soutien pour le PASOK, la social-démocratie grecque), nous croyons que le PSOE cherchera à constituer un gouvernement minoritaire (avec le soutien extérieur de Podemos et / ou autres), plutôt que de permettre l’arrivée d’un nouveau gouvernement du PP (avec un soutien de l’extérieur en en formant une grande coalition). Bien sûr, aucune option n’est à exclure.

    Cependant, nous ne devons pas oublier que ce nouveau gouvernement sera aussi clairement pro-austérité, quand bien même avec un caractère moins brutal que le précédent. Il est important que Podemos et les autres forces de gauche capables d’apporter leur soutien à l’investiture d’un gouvernement du PSOE pour éviter un nouveau gouvernement PP soient très claires quant aux conditions nécessaires pour permettre cette investiture. Ces conditions doivent se baser sur des mesures concrètes en faveur de nos intérêts et ceux de la classe des travailleurs et pas sur des mesures encore abstraites de changements constitutionnels qui s’écraseront probablement contre le PP et sa majorité absolue au Sénat. Il est essentiel que l’hypothétique soutien à une investiture d’un gouvernement PSOE n’aille plus loin que ça: un soutien ponctuel pour empêcher un nouveau gouvernement du PP. Les forces politiques de la classe des travailleurs doivent maintenir leur indépendance et éviter toute implication politique avec l’austérité de n’importe quel gouvernement.

    Un vrai gouvernement de gauche devrait d’abord abroger les deux réformes du travail du PP et du PSOE et la loi de “sécurité citoyenne” – aussi appelée loi bâillon -, revenir sur les coupes budgétaires dans la santé et l’éducation, renationaliser les services publics privatisés, mettre fin aux mesures d’austérité et appeler à la tenue d’un référendum contraignant en Catalogne. Nous savons que cela n’est pas compatible avec un gouvernement du PSOE sous la dictature actuelle des marchés.

    Mais le plus important pour obtenir des concessions d’un gouvernement minoritaire, soit du PP ou PSOE, c’est le début d’un nouveau cycle de protestations. Il ne faut pas uniquement compter sur le cadre institutionnel pour lutter pour nos conditions de vie. En fait, tout le travail institutionnel doit viser à renforcer cette mobilisation. Comme nous le disions, les possibles gouvernements du PP ou PSOE, faibles et instables, seront plus faciles à influencer, voire à renverser au travers des outils traditionnels de la lutte ouvrière (manifestations, grèves générales, occupations,…) que les gouvernements précédents que nous avons subis dans l’État espagnol. La chute d’un gouvernement d’austérité à la suite de ces méthodes ouvrirait la possibilité de se battre pour un véritable gouvernement des travailleurs.

    En outre, tant l’expérience de Grèce que celle des listes de confluence de gauche dans certains gouvernements locaux nous montrent les limites de l’action des gouvernements réformistes ou de ceux qui ne sont pas disposés à prendre des mesures de rupture véritables avec le régime et le système capitalistes.

    Par conséquent, il est nécessaire, à partir de maintenant, de nous préparer à prendre le pouvoir à travers des organisations avec un véritable programme socialiste de nationalisation des secteurs clés de l’économie afin de la planifier en fonction des besoins de la société plutôt que des grandes entreprises ou des grandes fortunes, et aussi pour la défense de tous les droits démocratiques, y compris l’autodétermination.

    Dans ces organisations doivent être inclues des forces politiques comme Podemos et IU, qui ont démontré leur potentiel pour attirer à elles de larges couches des classes populaires, et aussi les mouvements sociaux comme la PAH, les groupes environnementaux et autres. Ces organisations doivent également avoir un fonctionnement démocratique à partir de la base pour garantir la révocabilité des responsables et l’élaboration collective du programme et des listes de candidats.

  • Attaques terroristes à Paris. Des victimes d’une spirale réactionnaire

    Les attentats de Paris ont causé la mort d’au moins 130 personnes ainsi que plusieurs dizaines de blessés graves. Cette brutale et barbare escalade de violence prend place dans une plus large spirale sanglante de guerre et de terrorisme. En deux semaines à peine, plus de 400 personnes ont été tuées dans des attentats commis à Paris, Beyrouth, Bagdad, Bamako ainsi que dans un avion de ligne russe au-dessus de l’Egypte. Le PSL et les Etudiants de Gauche Actifs expriment leur solidarité avec toutes les familles et les proches des victimes.

    En tant que marxistes, nous répondons au danger croissant du terrorisme et de la haine par la solidarité et l’unité de la classe des travailleurs à travers le monde. Provoquer une fois de plus la mort et la destruction au Moyen-Orient sous une pluie de missiles affectera bien entendu les combattants de l’Etat Islamique mais aussi la vie des civils : cela ne nous protègera pas contre l’organisation de nouveaux attentats odieux.

    Dossier de Michael (Gand) paru dans l’édition de décembre/janvier de Lutte Socialiste

    Bruxelles dans le collimateur

    Au lendemain des attentats de Paris, le degré d’alerte terroriste en Belgique a été élevé au niveau 3, ce qui signifie que certaines indications faisaient état de possibles attaques sur le territoire. Lorsqu’il est apparu que le réseau ayant organisé les attentats de Paris étendait ses ramifications jusqu’à Molenbeek, le gouvernement a relevé le niveau de menace pour Bruxelles à 4, invoquant une menace ‘‘précise et imminente’’ d’un ‘‘attentat tel que déroulé à Paris’’. Le métro et les écoles ont été fermés tandis que des soldats patrouillaient dans les rues et que des véhicules blindés étaient déployés. Des perquisitions ont été menées dans des dizaines de maisons à Molenbeek. Le Ministre de l’Intérieur Jan Jambon (N-VA) a déclaré que l’opération continuerait jusqu’à ce que l’ensemble du réseau soit démantelé.

    Des attaques comme celles de Paris frappent des centaines de victimes innocentes. Il est compréhensible que la population craigne des attaques similaires en Belgique. Le thème de la sécurité ne doit pas être pris à la légère. Mais nous nous posons pas mal de questions quant à la façon dont le gouvernement s’y prend. La CGSP-Cheminots a, à juste titre, demandé pourquoi le trafic des métros a été arrêté mais pas celui des trains. Des hôtels de luxe se sont retrouvés avec des militaires à leur porte. Mais quand des conducteurs de bus ont demandé à percevoir une prime de risque, le ministre Weyts (N-VA) s’est immédiatement braqué. Tout le monde ne doit-il donc pas bénéficier de la même attention ?

    Le niveau de sécurité 4 a provoqué des pertes pour les employeurs. Pour les travailleurs indépendants de Bruxelles, la paralysie de la ville fut une catastrophe majeure. Était-ce la pression des employeurs qui a conduit à ce que le degré d’alerte passe à nouveau à 3 ? Cela poserait certainement question quant à la valeur des niveaux de menace. Tout cela avait-il pour but de sonder jusqu’où pouvait aller la répression et à quel point les droits démocratiques pouvaient être mis de côté? La situation a-t-elle été utilisée pour que certains politiciens puissent passer pour des dirigeants résolus?

    L’opposant à la politique d’austérité qui ose l’affirmer est réduit au silence ou traité d’irresponsable. Ce fut notamment le cas pour les grévistes du Hainaut le 23 novembre ou pour les manifestations dans le cadre du Sommet de l’ONU sur le Climat de Paris, en France et en Belgique.

    Pas de sécurité avec un désert social

    Mark Elchardus a fait en 2013 des recherches au sujet des opinions de la jeunesse en Belgique. Il est parvenu à la conclusion que les jeunes sont ‘‘enchainés à l’angoisse’’. Avant les dramatiques évènements de Charlie Hebdo, 69% des jeunes craignaient d’assister à une croissance du terrorisme en Europe. 83% estimaient que l’écart entre les riches et les pauvres n’allait faire que croitre. 77% ont déclaré qu’il sera nécessaire de combiner deux emplois à l’avenir, et seuls 16% des jeunes faisaient confiance aux politiciens pour leur fournir des réponses. L’étude en concluait que les jeunes sont des individualistes qui ne croient pas aux solutions collectives.

    C’est la peur de l’avenir qui transparait de ces chiffres, une crainte renforcée par l’austérité. Ce gouvernement ne protège pas nos conditions de vie, très certainement pas pour les travailleurs et pour les couches les plus pauvres ou marginalisées de la population.

    Un tel contexte de désespoir joue le même rôle que celui de l’humidité : on assiste au développement de moisissures, telle l’extrême droite. Le racisme trouve ainsi une porte d’entrée chez certaines franges de la classe des travailleurs. De la même manière, le courant particulièrement conservateur du salafisme, un fondamentalisme de droite de l’islam sunnite, peut trouver une entrée parmi des musulmans. L’extrême droite prétend représenter les intérêts des ‘‘autochtones’’ belges de la même manière que les fondamentalistes religieux prétendent défendre la population musulmane.

    La meilleure réponse à la rhétorique du diviser-pour-mieux-régner des divers courants de droite ainsi qu’à l’individualisme, au désespoir et à la division, c’est l’action collective. Toutes les divisions ont été surmontées grâce au plan d’action syndical contre l’austérité de l’automne 2014. Il a illustré à quel point de nombreux travailleurs ne font pas confiance au gouvernement, que soit pour assurer de bonnes conditions de travail, la sécurité d’emploi ou plus fondamentalement un bon avenir. A Gand, la jeunesse avait ouvert la voie avec deux mois de lutte collective et une grève des étudiants du secondaire, contre l’augmentation du minerval en Flandre et pour un refinancement public de l’enseignement. Aux piquets de grève et aux manifestations syndicales également, on a pu voir un bon nombre de jeunes syndicalistes qui ont dépoussiéré les meilleures traditions militantes du mouvement des travailleurs.

    La menace terroriste détourne désormais l’attention de l’agenda social, ce que le gouvernement utilise pour lancer de nouvelles attaques. Résister à l’austérité sera condamné comme étant un acte ‘‘irresponsable’’, tandis que la crainte justifiée qui vit parmi de larges couches de la population sera instrumentalisée. La politique d’austérité n’est pas synonyme de sécurité, au contraire. La lutte sociale est nécessaire pour que l’anxiété, la frustration et l’insécurité laissent place à la confiance et à la solidarité. Des mobilisations de masse qui soulignent nos intérêts communs peuvent balayer les divisions entretenues parmi la population.

    Lutter ne sera cependant pas assez. Il nous faut aussi une alternative à l’austérité pour briser les ‘‘chaînes de l’angoisse’’ du capitalisme, ce qui ne peut se faire que grâce à la lutte et à la solidarité pour une alternative de société contre la folie capitaliste.

    Une gauche trop laxiste, correcte pour le social mais qui fait fausse route pour la sécurité?

    La gauche est souvent critiquée car, dans les années ’90, elle n’aurait pas été suffisamment ‘‘répressive’’. La gauche aurait été naïve, n’aurait pas assez contrôlé les migrants et serait restée aveugle aux problèmes sociaux des quartiers les plus pauvres. Il est vrai que la social-démocratie a été laxiste en termes de résistance contre la dégradation des quartiers populaires à coup de politiques néolibérales ! Cela a créé un cocktail explosif où les idées réactionnaires trouvent leur entrée (voir notre article sur Molenbeek).

    Mais le radicalisme islamiste n’est ni un phénomène culturel ni un phénomène religieux. La première version du programme raciste en 70 points du Vlaams Blok n’abordait d’ailleurs qu’à peine la thématique de l’Islam. Par ailleurs, diverses études démontrent que 80% des jeunes gens qui se radicalisent via le salafisme n’ont pas été élevés dans des familles pratiquantes. La racine du problème ne se trouve ni chez les individus, ni chez les familles, ni dans la culture. Tout cela provient d’une société qui aliène les individus au point d’en faire des proies pour les idées réactionnaires. Les diverses couches de la population répondent différemment à des phénomènes similaires qui s’affectent mutuellement.
    Traditionnellement, le terrorisme est essentiellement issu de couches légèrement mieux loties, particulièrement quand elles sentent qu’elles subissent une discrimination ethnique, religieuse ou nationale et que leurs espoirs de promotion sociale sont bloqués par la crise. Ce cocktail explosif n’est pas créé par une politique de gauche. Cela n’a rien à voir avec la culture ou la religion, c’est le résultat d’une politique néolibérale antisociale dans laquelle ont trempé les sociaux-démocrates et les Verts et que le gouvernement de droite actuel renforce encore.

    Des partis de gauche comme le PTB ou le président du parti travailliste britannique Jeremy Corbyn soulignent à juste titre cette dégradation sociale de même que l’hypocrisie des gouvernements occidentaux qui entretiennent des liens étroits avec l’Arabie Saoudite. Mais il leur manque un appel à la résistance unitaire ainsi que la défense offensive d’une perspective socialiste dans la lutte quotidienne.

    Cela ne suffit pas de dire que nous ‘‘ne devons pas accepter d’avoir peur’’. Nous devons garder à l’esprit que la plupart des travailleurs sont en état de choc. Heureusement, à la différence de la Turquie ou de l’Irlande du Nord, nous ne sommes pas habitués à ce type de violence. Pour nous, dans ces circonstances, la gauche doit, dans un premier temps, développer ses réponses sur les lieux de travail, par le biais d’assemblées générales du personnel. Une fois que le pic du danger est passé, nous avons besoin de décompresser avec des manifestations de masse pour défendre notre programme contre l’austérité et pour un avenir décent pour chacun.

    De cette façon, l’espoir d’un meilleur avenir peut dominer le débat et couper l’herbe sous le pied au désespoir, à la violence, au terrorisme et au fondamentalisme religieux. Avec des mobilisations qui défendent les intérêts communs des travailleurs indépendamment de la religion, de l’origine, du syndicat ou de la couleur de peau, il est possible d’isoler les prédicateurs de la haine tout en démasquant les instigateurs de la surenchère réactionnaire.

    Le terrorisme renforce les divisions

    Les fondamentalistes prétendent recourir à la violence pour défendre les intérêts de la population musulmane. Ils prétendent parler au nom de millions de pauvres et de réfugiés du Moyen-Orient et être en guerre contre les envahisseurs étrangers. Mais les objectifs des terroristes n’ont rien à voir avec les intérêts de la population ordinaire, cette dernière étant la première victime de leurs violences, que ce soit en Europe, en Asie, en Afrique, aux Etats-Unis ou au Moyen-Orient. C’est la menace permanente d’attentats similaires et d’autres actes de violence aveugle au Moyen-Orient qui se trouve à la base du flux de réfugiés vers l’Europe.

    La classe des travailleurs en payera le prix à travers le monde : une première fois en étant victime des attaques. Une deuxième fois avec l’augmentation des interventions impérialistes au Moyen Orient (comme l’a encore illustré le président français François Hollande), des attentats au Moyen-Orient ou de la répression dans les pays occidentaux. Et une troisième fois parce que le terrorisme rompt les liens de solidarité, et laisse la classe ouvrière orpheline et impuissante en sapant le potentiel d’une riposte collective de classe. Cette situation sera instrumentalisée par les compétiteurs réactionnaires de l’Etat Islamique en Europe, l’extrême droite, pour favoriser les préjugés racistes et mener des actes de représailles à l’instar des incendies de centres d’asile en Allemagne.

    Le terrorisme est une réponse réactionnaire à l’impérialisme, le revers d’une même médaille réactionnaire. Les marxistes doivent pouvoir y répondre. Si nous n’offrons aucune issue hors de ce système malade qui engendre ce cercle vicieux grâce à un programme anti-impérialiste et anti-terroriste, alors la voie est ouverte pour que l’extrême-droite, le fondamentalisme religieux et toutes les forces antisociales puissent se développer grâce à la peur et à la confusion. C’est pourquoi nous plaidons pour la construction d’un parti des travailleurs de masse indépendant qui dépasse les frontières religieuses et qui repose sur un programme de nationalisation sous contrôle ouvrier démocratique du secteur du pétrole et des autres secteurs clés de l’économie du Moyen-Orient, sur l’expansion des services publics, sur la création d’emplois décents et sur le droit à l’autodétermination des peuples.

    Une spirale de guerre et de terreur depuis l’Irak

    Les marxistes tentent de regarder les fondements de l’extrémisme religieux, les causes profondes qui déterminent si une religion est utilisée ou non pour prêcher la terreur. Les médias ne nient pas que le phénomène du radicalisme de droite, en particulier islamiste, a augmenté ces dernières décennies, mais ils refusent d’en tirer les conclusions nécessaires. C’est à peine si l’on parle de la ruine sociale causée par les guerres impérialistes pour le pétrole, les matières premières et le contrôle de la région.
    L’invasion de l’Irak en 2003 a néanmoins été un moment clé dans l’histoire récente du Moyen-Orient. Cette guerre a pu compter sur la résistance de millions de personnes à travers le monde. Le PSL n’a pas accordé de soutien à la politique de Saddam Hussein, mais a systématiquement défendu que les véritables enjeux de cette invasion étaient le contrôle du pétrole, la restauration d’une économie chancelante et les intérêts de l’industrie militaro-industrielle. Apporter la démocratie et la liberté, ce n’était que de la rhétorique, la ‘‘guerre contre le terrorisme’’ n’allait provoquer que plus de terreur. Ces avertissements se sont avérés tragiquement corrects.

    L’Irak n’a pas été reconstruit. La priorité n’était pas là. La dictature de Saddam a disparu, mais le désordre social a empiré. L’Irak était l’un des pays les plus armés de la région et dans les mois qui ont suivi l’invasion du pays, ce dernier fut traversé par de nombreux conflits. Différents groupes se sont battus sur les cendres du régime de Saddam Hussein et son héritage de pénuries sociales et de répression ethnique. Un conflit entre sunnites et chiites a éclaté. Voilà les racines de l’émergence de l’Etat Islamique sunnite.

    Depuis la guerre en Irak, la région est dans un état d’instabilité permanent. Les derniers régimes de pailles de l’impérialisme occidental, des dictatures amicales tels que les régimes du Golfe (Arabie Saoudite,…), la Tunisie, l’Egypte,… où la démocratie est sans importance, se sont retrouvés être des points cruciaux pour la stabilité et les intérêts des gouvernements européens et américains. Ces dictatures ont toutefois été sans cesse plus haïes par leur population.

    La vague révolutionnaire au Moyen-Orient et en Afrique du Nord qui a ébranlée ces dictatures ou les a fait chuter a également touché la Syrie. Les masses avaient la confiance de pouvoir prendre leur avenir en mains. Dans plusieurs de ces mouvements révolutionnaires, les divisions sectaires ou ethniques avaient disparu et le fondamentalisme religieux s’était retrouvé provisoirement relégué à l’arrière-plan parce que les masses avaient réalisé qu’elles avaient des intérêts identiques et qu’elles étaient plus fortes ensemble. Pendant l’occupation de la place Tahrir en Egypte, la protection des manifestants musulmans en prière contre les attaques de la police était organisée par les manifestants chrétiens. Cela illustre que la religion joue un rôle secondaire lorsque les masses deviennent conscientes de leurs liens de classe et de la position qu’occupe cette dernière dans la société.

    L’Impérialisme et notamment l’Arabie saoudite – qui craignait la contagion révolutionnaire – se sont rapidement impliqués dans le soulèvement populaire syrien pour en dévier le processus vers un bourbier sans issue de guerre civile et de conflits confessionnaux. Le soutien de l’Arabie Saoudite aux djihadistes et à l’opposition sunnite contre Bachar el-Assad en Syrie a assisté l’émergence de l’Etat Islamique. Mais cela n’a pas empêché la France de conclure avec l’Arabie Saoudite un contrat d’armement de 10 milliards $. Les États-Unis ont notamment soutenu le front Al-Nusra (Al-Qaïda) dans sa lutte contre Assad alors que la Russie a soutenu ce dernier. La Syrie est devenue le champ de bataille des puissances mondiales, le rôle de la population s’est limité à celui de victime.

    L’absence d’une alternative de classe

    En plus du rôle décisif de l’impérialisme au cours de ces trois dernières décennies, il faut parler de l’absence de réponse de la part de la gauche dans la région concernée. Les dictatures fantoches dans la région ont brisé beaucoup d’organisations ouvrières existantes – c’est d’ailleurs l’une des raisons qui a poussé les puissances occidentales à les soutenir. Peu de temps après les soulèvements de 2011, des centaines de syndicats ont été formés, mais aucun parti de masse indépendant avec une perspective de classe claire. Pourtant, plusieurs manifestations de masse contre les gouvernements en Irak et au Liban ont eu lieues, de même que des mouvements de lutte contre le chômage, l’effondrement des services publics et les privatisations. Il manquait un programme, une méthode et une organisation pour que la lutte puisse attendre un niveau supérieur.

    Le rôle d’une position d’indépendance de classe est le plus clairement illustré par la comparaison entre la Tunisie et d’autres pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. La fédération syndicale UGTT y est forte et influente, elle a limité l’impact des conflits sectaires après la chute du dictateur Ben Ali. En dépit des conditions sociales inchangées de pauvreté et de désespoir, la situation n’a pas dégénéré en une guerre civile religieuse. C’est en raison de la force du syndicat dans la région. Si cette force entre de manière décidée en lutte avec les nouvelles autorités pour améliorer les conditions de vie de la population, cela limiterait l’espace de groupes réactionnaires pour recruter des jeunes.

    Les enseignements positifs et négatifs de la vague révolutionnaire au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, le rôle d’une perspective de classe, la résistance sociale en Belgique et la nécessité d’un programme de nationalisation sous le contrôle et la gestion démocratique des travailleurs qui va à l’encontre de l’impérialisme et des fondamentalistes réactionnaires donnent des indications sur la façon dont la plus grande unité possible peut être créée dans la lutte pour une société socialiste.

  • Élections générales en Espagne: Voter, ce n’est pas assez!

    podemos_decNous devons nous battre depuis la base pour un mouvement de masse capable de renverser le système!

    Les élections générales du 20 décembre s’annoncent comme le point culminant du cycle électoral qui a marqué l’Espagne cette année. Les marxistes comprennent que la politique se base sur la défense des intérêts de différentes classes sociales. Les résultats électoraux seront une expression plus ou moins proche de l’état d’esprit du mouvement des travailleurs, de la jeunesse, des sans-emplois et de tous les opprimés. Par conséquent, nous devons activement lutter pour renforcer celle-ci au maximum.
    Nous devons cependant nous rendre compte qu’un résultat électoral n’est qu’une mesure statique de la conscience des larges couches de la population, une sorte d’instantané d’un phénomène vivant et changeant. Ce sont les luttes massives de ces cinq dernières années et le soutien massif pour celles-ci qui donnent la meilleure image de la force de la classe de travailleurs.

    Article basé sur l’éditorial de décembre de La Brecha, journal de la section-soeur du PSL dans l’Etat espagnol.

    Pendant toute cette période électorale, la section soeur du PSL dans l’Etat espagnol, Socialismo Revolucionario, a défendu la présentation d’une candidature unique pour l’ensemble des forces de la résistance sociale. Une telle candidature, construite à partir de la base, aurait permis d’unir toutes les forces politiques anti-austérité et de reprendre le fil du succès qu’avaient rencontrés les listes de confluence de gauche aux élections locales de mai dernier.

    Une telle candidature n’a malheureusement pas été possible, non pour cause de différences politiques insurmontables, mais en raison de sectarisme organisationnel et de fonctionnement bureaucratique. Voilà ce qui a empêché une véritable confluence de la base. Politiquement, rien ne justifie objectivement la division de ces candidatures étant donné que, dans les conditions actuelles, l’objectif primordial consiste à écraser le système bipartite capitaliste (le Parti Populaire, de droite dure, et le PSOE, la social-démocratie) ainsi que le nouveau parti, tout aussi réactionnaire, Ciudadanos.

    Unité Populaire, le nom sous lequel s’est présenté la Gauche Unie (Izquierda Unida), représente la candidature la plus proche d’une politique anti-austérité et de rupture. Son programme comporte nombre d’éléments que la direction de Podemos a progressivement abandonnés au nom de la ‘‘centralité’’ et de la modération. Mais le poids historique des erreurs commises par Gauche Unie dans le passé (pactes avec des partis bourgeois et application de l’austérité) entrave plus son potentiel que celui de Podemos, qui bénéficie en ce moment d’une plus fraîche image de parti.

    Toutefois, aucune de ces deux formations ne vise à toutefois dépasser le capitalisme dans leurs approches concrètes. L’expérience grecque nous a montré que, dans le contexte de crise actuel, même la plus petite réforme pour la défense des conditions de vie des masses conduit à une confrontation profonde avec le système capitaliste et ses institutions. Cet exemple illustre à quel point une défense durable des revendications ouvrières et populaires n’est pas possible dans le cadre de la dictature de la Troïka et des marchés. C’est la leçon principale que nous devons tirer du processus grec. La rupture avec avec ce système – ainsi qu’avec l’UE et l’Euro capitaliste – est un prérequis indispensable pour récupérer des conditions matérielles dignes pour tous les peuples travailleurs, en Espagne et dans le reste de l’Europe.

    Conscients de la manière dont leur ordre établi est mis en cause, les voix les plus pragmatiques du capitalisme espagnol appellent déjà ouvertement à une réforme constitutionnelle. Face à la perte de légitimité des institutions et des partis, et au défi du peuple catalan qui exige pouvoir décider démocratiquement de son avenir, ils cherchent à modifier le régime de la Transition (le régime instauré en 1978, après la chute de la dictature) pour essayer de mettre fin au danger que suppose la remise en question du système.

    La gauche ainsi que les mouvements ouvriers et sociaux doivent avoir à l’esprit que les problèmes actuels ne seront pas résolus avec une retouche constitutionnelle, qu’elle soit grande ou petite. La source des problèmes ne se trouve pas dans la superstructure, mais dans la base fondamentale de la société capitaliste : la richesse de tous qui est la propriété de quelques-uns à peine. La solution consiste à briser cette base, par la propriété publique et démocratique de la richesse et la récupération des piliers de l’économie par la majorité sociale. C’est la base d’une solution socialiste qui doit être conçue au niveau de l’État, ainsi qu’à l’échelle européenne et mondiale.
    Pour cela, Socialismo Revolucionario soutient que voter pour la gauche alternative est important, mais pas suffisant ! Il faut aller plus loin. Il faut lutter politiquement pour un programme clair de rupture, pour la gauche et les mouvements sociaux. Parallèlement à cela, nous avons besoin que la mobilisation dans la rue soit réactivée par les méthodes traditionnelles de la classe de travailleurs (manifestations, occupations et grèves) dans un plan de lutte soutenu.

  • Suisse: L'austérité budgétaire met le feu au lac

    suisse

    La droite populiste de l’UDC remporte des victoires électorales, mais la résistance s’organise face aux attaques lancées à tous les échelons contre les travailleurs

    Les populistes de droite de l’UDC ont remporté deux succès électoraux d’envergure : aux élections législatives et au gouvernement. Ceci dans un contexte de réformes sur la fiscalité des entreprises ainsi que d’assainissements budgétaires sur le dos des travailleurs alors que le niveau d’alerte antiterroriste a été élevé à Genève.

    Par Alexandre et Stéphane (Bruxelles)

    Le jeudi 10 décembre dernier, Genève a élevé son niveau d’alerte anti-terroriste, les autorités soupçonnant la présence, dans les environs de la ville, de suspects en relation avec l’Etat Islamique et avec les attentats du 13 novembre dernier à Paris. Des mesures de sécurité exceptionnelles ont été prises, avec le déploiement de nombreuses forces de police et de la garde des Nations-Unies (au Palais des Nations, le siège de l’ONU) équipées de fusils d’assaut, tandis que les contrôles aux frontières suisses ont été renforcés. Cette situation se déroule juste après une période électorale qui a vu les élections législatives le 18 octobre et une élection au sein du Conseil fédéral (gouvernement) ce mercredi 9 décembre.

    Le parti populiste de droite Union démocratique du Centre (UDC) a marqué la campagne de son emprunte, à coups de propagande anti-immigration de masse et dans le cadre de la discussion autour d’une «clause de sauvegarde» pour limiter l’immigration européenne vers la Suisse. L’UDC a remporté 29,4% des voix et 11 sièges de plus au Conseil national (chambre des représentants), ce qui porte à 65 leur nombre de députés (sur un total de 200). L’autre vainqueur, le Parti libéral-radical (PLR) a obtenu 16,4% et 3 sièges de plus. Les deux partis considérés comme étant les plus à droite sortent ainsi renforcés de ces élections.

    Ces résultats ont permis à l’UDC de revendiquer un siège de plus au Conseil fédéral, pour remplacer la ministre démissionnaire Eveline Widmer-Schlumpf, du Parti bourgeois démocratique (PBD), l’un des perdant des élections législatives. Avec Guy Parmelin, élu par le Conseil national le 9 décembre, l’UDC porte ainsi à 2 (sur 7) ses membres du gouvernement suisse.

    La gauche officielle paie sa participation aux politiques d’austérité budgétaire

    Aux élections d’octobre, le Parti socialiste suisse (PSS, 18,8%) et le Parti écologiste suisse (PES, 7,1%) ont perdu respectivement 3 et 4 sièges au Conseil national. Ils paient ainsi leur participation aux politiques néolibérales antisociales menées aux différents échelons de gestion politique auxquels ils sont associés au pouvoir. Ils paient aussi leur incapacité à répondre aux questionnements des travailleurs et de la jeunesse dans un contexte de crise économique qui touche aussi la Suisse.

    Les économistes de Credit Suisse viennent par ailleurs de revoir à la baisse leurs estimations de croissance pour 2016, de 1,2 à 1%, après une croissance de 0,8% cette année. La force du franc suisse plombe les exportations, et le chômage grimpe, avec un taux officiel prévu de 3,3% en 2015 et 3,7% l’an prochain. Cette situation touche particulièrement l’industrie, mais aussi le commerce et le secteur financier.

    Même si la Suisse peut compter sur un niveau de vie en moyenne plus élevé que la plupart des autres Etats européens, les pénuries dans un système en crise se font tout de même sentir, et sont croissantes. La crainte d’un avenir plus sombre s’y développe aussi, tant pour les plus faibles revenus que pour les couches ayant accès à davantage de moyens. La question de l’immigration, plus forte aujourd’hui qu’auparavant, joue un grand rôle dans ce contexte. Le manque de moyens pour des logements, des emplois et des services publics de qualité se fait et se fera encore plus sentir avec l’arrivée de nouvelles familles.

    L’UDC a été capable de surfer sur ces craintes, en misant sur la division des travailleurs, pendant que la gauche officielle en Suisse ne parvient pas à offrir une réelle alternative. Les travailleurs et les jeunes ont besoin de réponses sûres et concrètes concernant les pénuries, la sécurité et les attaques toujours plus grandes contre leurs conditions de vie et de travail. Seul un mouvement unitaire de tous les travailleurs, quel que soient leurs origines, sera capable d’offrir une réponse de classe pour satisfaire pour dépasser ces pénuries et balayer la droite.

    Pendant que les travailleurs subissent, les gros actionnaires sont récompensés

    Le régime fiscal spécial suisse est depuis quelques temps pointé du doigt au niveau international, notamment par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le Groupe des vingt principaux pays industrialisés et émergents (G20) et l’Union européenne (UE). Pour se conformer aux règlements internationaux, sous pression de l’Europe, le parlement a dû mettre sur pieds la troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE III), qui prévoit la suppression des régimes fiscaux cantonaux accordés aux holdings et aux sociétés d’administration. Avec la RIE III, les autorités espèrent renforcer la position de la Suisse face à la concurrence fiscale internationale, ainsi que la sécurité juridique et la sécurité en matière de planification pour les entreprises.

    Les Etats voisins veulent éviter que les entreprises s’installent en Suisse pour bénéficier des avantages fiscaux. Mais pour faire passer cette pilule auprès des gros actionnaires, la majorité des élus a refusé la proposition d’augmentation de la taxation sur les dividendes des actions. Il s’agirait d’une perte de 2 milliards de francs suisses (1,85 milliards d’euros). Cette question pourrait cependant très vite se retrouver à l’agenda d’un référendum dont l’issue ne serait pas gagnée d’avance pour la poignée de profiteurs.

    Les femmes, cibles d’attaques antisociales

    La réforme ‘Prévoyance vieillesse 2020’ veut notamment relever l’âge de la retraite à 65 ans pour les femmes, afin de réaliser une économie supplémentaire de 1,3 milliards de francs suisses (1,2 milliards d’euros). Comme l’avance le syndicat Unia, cette attaque n’est qu’un premier pas pour aller vers une retraite à 67 ans pour tous.

    Les femmes ne sont d’ailleurs pas au bout de leur peine, puisqu’une flexibilisation des horaires d’ouverture des magasins est aussi à l’œuvre. Dans ce secteur à bas salaires qu’est la vente, 50.000 personnes, dont 40.000 femmes, gagnent moins de 4.000 francs suisses (3.700 euros) par an. A juste titre, Unia critique notamment le fait que des horaires encore plus flexibles détruiraient les vies sociales et de famille de tous les travailleurs du secteur. Encore une fois, ce sont les couches les plus fragilisées qui paient le prix, avec la claire intention d’ensuite attaquer l’ensemble du mouvement des travailleurs.

    A Genève, les fonctionnaires organisent la résistance

    Les différents gouvernements cantonaux (Conseils d’Etat en Suisse romande) sont en train de préparer leur projet de budget 2016, prévoyant ici et là des plans d’assainissement budgétaires. A Neuchâtel, le Conseil d’Etat veut notamment aboutir à 155 millions de franc d’économies (143 millions d’euros). A Genève, un plan de réduction des dépenses publiques d’envergure est lancé : réduction de 5% de la masse salariale de l’Etat en trois ans, augmentation du temps de travail de 40 à 42 heures, gel des annuités, procédures facilitées de licenciements et non remplacement des départs. Pas moins de 1.800 postes pourraient ainsi disparaître.

    Face à cette attaque, les fonctionnaires ont clairement montré la voie à suivre. Un premier jour de grève a été lancé le 10 novembre, où 10.000 fonctionnaires et étudiants étaient descendus dans les rues. Entretemps, cinq autres journées de grève ont eu lieues. Les autorités de Genève ont un temps essayé d’utiliser l’élévation du niveau d’alerte terroriste pour freiner la contestation. Mais ce lundi 14 décembre, 400 à 500 personnes réunies en assemblée générale du Comité de lutte des services publics ont décidé de relancer la grève reconductible pour la journée de ce mardi 15 décembre. La colère est grande, mais le mouvement risque de s’épuiser. Le lendemain, le Cartel intersyndical de la fonction publique a d’ailleurs décidé de signer un accord avec le Conseil d’Etat, instaurant une trêve de la grève jusqu’au 21 mars. Une trêve qui n’empêche pas les manifestations, et un rassemblement a directement été organisée dans la foulée. Mis sous pression, le gouvernement a tout reporté. Le mouvement exceptionnel de ces dernières semaines a maintenant face à lui la nécessité de reprendre son souffle et d’accentuer la pression, notamment en essayant de rallier à eux des travailleurs d’autres secteurs.

    Le mouvement des travailleurs et la gauche doivent organiser la résistance et proposer une alternative sociétale

    Avec les résultats des élections d’octobre, le parti de gauche POP (Parti ouvrier et populaire – Parti suisse du travail) revient au Conseil national après 4 années d’absence, grâce à l’élection du maire du Locle, Denis de la Reussille, dans le canton de Neuchâtel. Il semble cependant que ses autres résultats soient en général plutôt décevant, puisque le POP et ses alliés pensaient pouvoir compter sur l’un ou l’autre élu de plus, surtout dans les cantons de Vaud et de Genève.

    Mais pouvoir compter sur une voix représentant la classe des travailleurs au parlement fédéral de Berne est un élément très important. Le challenge est grand pour un tel représentant. Il sera crucial de relayer les luttes des travailleurs et de la jeunesse sur le plan national et de créer des liens entre les mouvements de résistance qui se développent un peu partout, en s’appuyant sur les très bons exemples comme celui des fonctionnaires genevois, et promouvoir ainsi la nécessité d’un mouvement généralisé contre les politiques d’austérité budgétaire.

    Mais la tâche est aussi de populariser les réponses de gauche à apporter concernant toutes les craintes vécues parmi les travailleurs et la jeunesse et de proposer une alternative de société. De petites mesures progressistes peuvent bien sûr jouer un rôle, certainement pour soulager le quotidien des travailleurs. Mais elles peuvent surtout servir de levier pour mettre en avant un autre type de société : une société socialiste démocratique, réellement solidaire, dont le but est la satisfaction des besoins de l’ensemble des travailleurs, et non ceux de quelques actionnaires capitalistes.

  • Aix-La-Chapelle. Mobilisation anti-PEGIDA

    AntiPegida_02Ce dimanche 13 décembre, quelques membres des Etudiants de Gauche Actifs et du PSL se sont rendus à Aix-La-Chapelle pour y soutenir une mobilisation antifasciste contre le mouvement xénophobe et réactionnaire PEGIDA, qui voulait tenir sa première mobilisation dans cette ville allemande frontalière de la Belgique.

    PEGIDA visait à rassembler 300 personnes, mais moins de la moitié fut au rendez-vous malgré l’aide apportée par PEGIDA-Vlaanderen/Flandre. A leurs slogans racistes se sont opposés les voix de plus de 500 activistes antifascistes essentiellement venus sur base de deux rassemblements, l’un à la gare centrale, l’autre à la gare de l’ouest.

    Plusieurs appels à la tenue de rassemblements anti-PEGIDA en divers endroits du centre-ville avaient été lancés afin d’empêcher le mouvement raciste de s’y réunir. Ce n’est que l’avant-veille de la mobilisation qu’il a été connu que PEGIDA se réunirait en bordure de la ville, au stade Tivoli.

    L’une des initiatives à la base du rassemblement antifasciste est l’Antirassistische Offensive Aachen (Offensive Antiraciste Aix-La-Chapelle) qui regroupe une vingtaine d’organisations parmi lesquelles des jeunesses syndicales ou encore SOLID (branche jeune du parti de gauche Die Linke) et le SAV (Sozialistische Alternative, organisation soeur allemande du PSL). Leur cortège, qui démarrait de la gare de l’ouest a pu compter sur 250 personnes, essentiellement des jeunes. Les prises de parole ont accentué la nécessité d’opposer une alternative sociale au discours de division de PEGIDA.

    Marie, une camarade du SAV, nous explique : “Cela fait des années qu’une crise majeure du logement est en germe. Des logements à faible loyer ont été détruits pour faire place à des logements de luxe, les autorités ont cessé d’investir dans les logements sociaux et on a même vu des étudiants dormir dans des containers! Aujourd’hui, la droite et l’extrême droite affirment que c’est l’afflux de réfugiés qui est à la base de la crise du logement, mais c’est totalement faux! Ils pointent du doigt des boucs émissaires et veulent protéger les promoteurs immobiliers! Pour arracher les racines du développement de PEGIDA, il faut riposter contre le manque de logements et d’emplois, protéger notre sécurité sociale, défendre un enseignement public de qualité et gratuit,… en bref : lutter contre le capitalisme.”

    Le rassemblement s’est terminé par une action de solidarité devant le commissariat de police où avait été emmenés plusieurs manifestants. L’attitude de la police durant l’évènement fut faite de complaisance à l’égard des manifestants de PEGIDA et de répression à l’égard des activistes antifascistes. Marie nous explique encore : “c’est tout à fait typique. Il y a eu en 2015 plus de 800 actes de violence raciste juridiquement considérés comme tels (ce qui signifie que la réalité est bien plus élevée que ce nombre) en Allemagne. Dans ces cas-là, la police met toujours un temps dingue à réagir. Ici, ils accompagnent des racistes à travers la foule des manifestants antiracistes, c’est une provocation et une aide claire au rassemblement PEGIDA.”

    Au discours de division et de haine de PEGIDA, nous opposons la solidarité et la lutte commune contre l’austérité et pour un meilleur avenir pour tous. Le prochain rendez-vous anti-PEGIDA sera ce samedi 9 janvier à Anvers, à 14h, à De Coninckplein.

    Aix-La-Chapelle. Mobilisation anti-PEGIDA

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