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  • Pourquoi le MAS-LSP se présente aux élections du 13 juin

    Pourquoi le MAS-LSP se présente aux élections du 13 juin

    LES LICENCIEMENTS chez Ford Genk, Sobelair, Cockerill,… et dans une série d’entreprises de moindre importance: tous ces chiffres signifient autant de drames sociaux. Les familles qui ne peuvent plus rembourser leurs crédits hypothécaires, les factures qui s’accumulent, les projets de vacances qui tombent à l’eau,…

    Peter Delsing

    L’incertitude d’un système en crise pèse de plus en plus lourd sur une frange croissante de la population laborieuse. Les jeunes réalisent qu’on les jette dans une épouvantable société de compétition qui n’aura rien de commun avec «l’âge d’or» des années 50 et 60 qu’ont connues leurs aînés.

    Comment les travailleurs et les jeunes peuvent-ils résister à un capitalisme caractérisé par un chômage de masse, aux attaques contre les acquis sociaux et aux guerres comme celle de Bush en Irak? Les partis ne sont-ils pas corrompus par définition? Quel sens cela a-t-il de voter si les grands partis mènent tous la même politique de démolition sociale?

    Un vrai parti, pas une machine électorale

    Le MAS-LSP n’est pas un parti comme les autres. Nos membres n’ont rien de commun avec ces carriéristes qui monnayent leur loyauté contre un poste grassement rémunéré. Nos membres luttent sur leur lieu de travail, dans leur école, leur université ou leur quartier aux côtés des autres travailleurs et des autres jeunes. Nous ne voulons pas d’avantages pour nous-mêmes, mais lutter pour les intérêts de toute la classe des travailleurs. Les chômeurs exclus par la crise capitaliste en font pleinement partie.

    A Gand, nous avons organisé la campagne «Stop à la démolition» contre l’expropriation de dizaines d’habitants du quartier Brugse Poort au nom d’un projet environnemental de prestige. A Bruxelles, les Etudiants de Gauche Actifs se sont fort impliqués dans les actions de solidarité avec les réfugiés iraniens à l’ULB. Ils y ont mis en avant un programme qui faisait le lien avec les attaques contre les emplois et la sécurité sociale des travailleurs belges. Le capitalisme mène à des catastrophes sociales au niveau mondial, nous devons également le combattre au niveau mondial. C’est pourquoi le MAS-LSP fait partie du Comité pour une Internationale ouvrière (CIO), une organisation socialiste internationale avec des sections dans plus de 30 pays.

    Lors des actions contre les licenciements à Ford Genk, nous avons fait des propositions concrètes pour gagner la lutte: des grèves de solidarité dans le secteur, une manifestation nationale pour l’emploi, la réduction du temps de travail avec embauche compensatoire sans perte de salaire, la nationalisation des entreprises qui menacent de licencier. Ce sont nos besoins qui comptent, pas les profits des grandes entreprises. Lors de la manifestation des travailleurs de Cockerill il y a quelques mois, notre revendication d’une nationalisation de l’entreprise sous le contrôle des travailleurs était bien accueillie.

    Les jeunes nous connaissent par les campagnes Blokbuster et Résistance Internationale. Blokbuster ne se contente pas de s’en prendre au Vlaams Blok. Nous avons argumenté que tout ce qui divisait les travailleurs et les jeunes les affaiblissait face aux patrons et au gouvernement.

    Une opposition active dans les syndicats et dans les quartiers est nécessaire, et non pas les paroles hypocrites de l’extrème-droite?

    Les dernières années ont vu le MAS-LSP participer à des tentatives de construire une gauche combative dans les syndicats, avec le Mouvement pour le Renouveau syndical (MRS) autour de Roberto D’Orazio et le Mouvement pour la Démocratie syndicale (MPDS). Le 19 octobre 2001, nous avons, avec notre campagne Résistance Internationale, fait descendre dans la rue 2500 lycéens et étudiants contre le sommet européen de Gand.

    Les élus de notre courant, comme Joe Higgins (député du CIO au parlement irlandais), ne reçoivent que le salaire moyen d’un travailleur et donnent le reste au parti, à des campagnes dans les quartiers, etc. Joe Higgins est connu en Irlande comme «le politicien qui n’est pas à vendre». Nous voulons que les élus soient révocables à tout moment au cas où ils ne respecteraient pas leurs promesses. Cela vaut pour notre parti également. Le MAS-LSP n’est pas une machine électorale, mais un groupe de travailleurs et de jeunes qui, tous ensemble, discutent un programme, le testent dans la pratique et l’affinent si nécessaire. Nous voulons construire un mouvement de masse pour mener la lutte pour une société socialiste où la production sera planifiée et gérée collectivement par des conseils démocratiquement élus dans les entreprises et les quartiers.

    Le MAS-LSP et les élections

    Les mois de février et de mars verront nos membres battre le pavé pour s’efforcer de récolter le nombre de signatures requis pour pouvoir participer aux élections du 13 juin. Nous voulons présenter des listes pour les élections européennes dans les collèges flamand et francophone. Nous ne sommes pas sûrs d’y arriver du côté francophone. En Flandre orientale, nous présenterons une liste pour les élections régionales. Le but premier de cette campagne n’est pas de récolter beaucoup de voix; notre parti n’est pas encore assez connu pour cela. La lutte de classes en Belgique – la lutte des travailleurs et des jeunes – n’est pas encore assez développée pour que les marxistes puissent faire une percée aux élections.

    Tout comme lors des élections du 18 mai 2003, cette campagne est pour nous une campagne de renforcement: nous voulons convaincre de nouvelles personnes d’adhérer, mettre sur pied de nouvelles sections, récolter de l’argent pour la construction de notre parti, nous faire connaître plus largement,…

    Un nouveau parti des travailleurs

    Vu la transformation progressive, bien qu’à des rythmes différents, du SP.A et du PS en partis bourgeois, le MAS-LSP appelle depuis 1995 à la formation d’un «nouveau parti large des travailleurs», un instrument capable de rassembler des dizaines de milliers de jeunes et de travailleurs pour faire reculer les privatisations, les attaques contre les conditions de travail, la sécurité sociale, l’enseignement,… Nous ne nous considérons pas nous-mêmes comme ce nouveau parti des travailleurs. Il surgira de luttes politiques et sociales importantes. Cette lutte mènera à la conclusion que nous avons besoin de notre propre instrument politique. Le MAS-LSP y interviendrait comme une tendance socialiste révolutionnaire avec son propre programme. Avec le CIO, nous voulons construire à terme un parti révolutionnaire de masse au niveau mondial.

    A la fin des années 90, le MAS-LSP a mené campagne pour des alliances de gauche. Une telle initiative aurait pu, en attendant la création d’un nouveau parti des travailleurs, combler partiellement le vide à gauche (à la gauche du PS et d’Ecolo). Notre initiative n’a cependant reçu que peu de répondant: une liste unitaire Leef à Gand et des listes ouvertes du PC à Bruxelles, à Liège et dans le Hainaut.

    En tant que seule organisation non stalinienne de la gauche radicale à se présenter aux élections du 18 mai, nous avions présenté un programme clairement socialiste. Nous voulons relever le même défi d’ici le 13 juin 2004. Dans le cadre des violentes secousses que la crise capitaliste va provoquer – à commencer par une vague de mesures d’austérité après le 13 juin – nous voulons nous faire connaître le plus largement possible avec un programme clairement socialiste pour gagner à notre alternative de gauche les travailleurs et les jeunes les plus combatifs. Rejoignez-nous!

  • La libéralisation ne fera pas d’étincelles pour tout le monde!

    Le marché de l’électricité en Flandre a été libéralisé le 1er juillet 2003, ce qui signifie que tout le monde peut choisir «librement» son fournisseur d’électricité. La Wallonie et Bruxelles suivront plus tard. La libéralisation du marché ne signifie pas plus de concurrence et une baisse des prix comme le prédisaient certains, mais bien l’exclusion et une facture plus élevée pour la plupart des gens.

    Koen Van Brabandt

    Celui qui ne peut plus payer à temps sa facture d’électricité recevra bientôt une lettre d’Electrabel, Luminus ou Nuon – quelques unes des firmes qui fournissent de l’électricité. La libéralisation leur permet en effet de refuser désormais des clients. Bien-sûr, les politiciens s’empresseront de dire qu’il n’en est pas du tout question, que tout le monde aura droit à une quantité minimale d’électricité. Les mauvais payeurs se verront imposer un limitateur de puissance (6 ampères). Largement insuffisant pour faire fonctionner des appareils élémentaires comme une machine à laver ou un frigo. On se doute déjà de ce qui attend ceux qui se seront retrouvés une fois sur une liste noire. Ils auront toutes les peines du monde à retrouver accès à un fournisseur d’électricité.

    Mais même pour celui qui n’a pas de problèmes de payement, la libéralisation ne sera pas une bonne chose. Pour commencer, il va être sollicité de tous côtés par les différents opérateurs qui l’assureront tous, sans aucun moyen de le vérifier, qu’ils sont le moins cher. En outre, il n’y aura le plus souvent pas de baisse de prix. Fientje Moermans, la ministre compétente, a beau dire que le consommateur doit être assez dynamique pour changer son comportement et choisir le moins cher. Vous pouvez toujours essayer de vous y retrou-ver dans tous ces différents contrats.

    En fin de compte, la libéralisation coûtera plus cher sauf pour les grandes entreprises! Le gouvernement va leur faire un énième cadeau: les 350 plus gros consommateurs seront en effet dispensés d’une redevance que tous les autres devront payer. Le gouvernement impose cette redevance pour dédommager les communes qui perdront une partie de leurs recettes suite à la libéralisation. En effet, c’était jadis les communes qui fournissaient l’électricité à travers les inter-communales. D’après Luminus, cette taxe supplémentaire ferait grimper la facture d’électricité de 4,5% par an.

    Celui qui a encore l’illusion que la libéralisation imposée par l’Europe est une bonne chose devra déchanter une fois de plus. Le gouvernement accorde aux multinationales un «maximum à facturer» pour leur électricité – tiens tiens, n’est-ce pas une aide d’état? – les travailleurs et leurs familles payent le prix plein. Et n’oublions pas qu’Electrabel tire depuis des années d’énormes bénéfices de nos besoins en électricité.

  • Le scandale Parmalat menace Berlusconi

    En janvier toute la direction de la multinationale italienne Parmalat a été arrêtée pour fraude. La direction semblait surtout s’être spécialisée en montages financiers obscurs qui ont permis d’escamoter 10 milliards de $. Une telle escroquerie n’a été rendue possible que par la mise en place de lois – par le gouvernement Berlusconi – rendant plus opaque le contrôle des comptes des sociétés,… et mettant par la même occasion Berlusconi à l’abri de poursuites éventuelles pour les malversations opérées par ses propres sociétés!

    Clare Doyle

    Dans le plus pur style des parrains de la maffia pris la main dans le sac, l’ex-directeur financier de Parmalat a déclaré aux journalistes qui l’attendaient devant le bureau de police de Parme: «Je vous souhaite, ainsi qu’à votre famille, une mort lente et pénible!»

    Entre-temps l’emploi de plus de 36.000 travailleurs et de 139 entreprises sont menacés dans le monde. Parmalat était devenu un des navires amiral du capitalisme italien. L’entreprise est active dans 30 pays où on emballe et vend du lait, de l’eau, des jus de fruits, des biscuits et d’autres produits alimentaires.

    Des consommateurs et les petits investisseurs ont organisé le 21 janvier une manifestation devant les bureaux du Premier ministre et de la Banque nationale. Mais il faudra faire plus. Les travailleurs et leurs organisations doivent mener campagne pour la nationalisation immédiate (et sans indemnités) de Parmalat et mettre en avant un programme de lutte syndicale tant à l’échelle internationale que locale.

    En Italie certaines actions de grève sont toujours en cours et il est nécessaire de lancer une offensive générale contre le gouvernement. La situation économique est problématique, même sans la crise de Parmalat. Le gouvernement Berlusconi risque de tomber car ses partenaires de la coalition soutiennent mollement le gouvernement. La crise actuelle peut être la dernière goutte qui fait déborder le vase. Une partie de la bourgeoisie qui a émis des réserves sur la façon dont l’aventurier Berlusconi a pris le contrôle de la machine gouvernementale, vont peut-être mettre à profit la crise de Parmalat pour tenter de le débarquer.

    La Commission de la Sécurité et des Echanges (SEC), à New York, a déclaré que cette affaire est «un des plus grands exemples de fraude d’entreprise de toute l’histoire». Elle a d’ailleurs entamé sa propre enquête sur la façon dont l’entreprise avait fabriqué un faux (une lettre à entête de la Bank of America) pour faire croire qu’un prêt de 4 milliards $ avait été accordé à Parmalat. Une enquête est aussi en cours à propos de la vente fictive de poudre de lait à Cuba pour une somme de 620 milliards de $, vente fictive dans laquelle un nombre de banques «respectables» sont impliquées.

    Il y a déjà eu d’autres scandales en Europe (Vivendi en France, Scania en Suède, Ahold aux Pays-Bas). La plus grande entreprise italienne, Fiat, lutte pour sa survie après qu’une partie de son patrimoine ait été soustrait par la famille Agnelli. Chez Parmalat la fraude porte sur des montants plus limités que dans le scandale américain d’Enron il y a quelques mois, mais l’affaire Parmalat risque de frapper le coeur de la finance internationale.

  • Construisons une opposition de gauche pour une autre société

    ALORS QUE la productivité ne cesse d’augmenter, que notre société n’a jamais produit autant de richesses, le bien-être des gens ne cesse de diminuer.

    Vincent Devaux

    Il n’est pas besoin d’être un grand sociologue ni d’aligner des chiffres pour s’apercevoir que notre société est malade: les passants au regard éteint et au dos vouté par le «poids de la vie», la dégradation de notre milieu de vie, quand ce n’est pas la misère et la déchéance, tout cela est le signe d’une société qui avilit l’être humain et qui ne lui permet pas de s’épanouir. La soif de profits des capitalistes et les lois inhumaines de la concurrence engendre la pression au travail, le chômage, la destruction de l’enseignement et de notre sécurité sociale. Les conditions de vie et la détérioration des conditions de logement précarisent ainsi une couche plus grande de la population. L’Europe asociale que l’on nous propose, avec ses plans d’austérités et la privatisation de nos services publics, ne va qu’approfondir les maux qui nous accablent déjà. Nous pensons que nous avons droit à une vie meilleure. Nous voulons une société où le travail disponible serait réparti entre tous, permettant à chacun d’avoir une bonne qualité de vie. Une société véritablement démocratique dans laquelle chacun pourra participer à la gestion. Nous voulons des transports publics et des logements de qualité pour tous, des soins de santé et un enseignement accessible à chacun. Nous voulons des installations culturelles, sportives gratuites et en suffisance. Nous voulons du pain et des roses… Mais nous ne sommes pas des utopistes et nous ne vendons pas du rêve comme le fait si bien la bourgeoisie à travers ses médias. Nous voulons forger les outils pour parvenir à nos fins.

    Nous ne réussirons à lutter contre l’écrasante machinerie capitaliste qu’en construisant un outil qui est propre à notre classe. Et cet instrument ne peut s’ériger sans la participation active des travailleurs et de leur famille. Notre but n’est autre que celui-là lors de notre participation aux élections du 13 juin. Contrairement aux partis traditionnels financés en grande partie par l’argent public, nous ne recevons aucun subsides. Nous ne pouvons compter que sur nos militants et nos sympathisants. En outre la loi nous impose de collecter la signature de 5.000 électeurs pour déposer une liste, alors que pour les partis traditionnels la signature de… trois parlementaires suffit!

    Mais nous mettrons à profit la récolte de signatures pour nous faire connaître plus largement dans la population, discuter et élargir notre organisation, ce qui est essentiel si l’on veut transformer la société.

    Vous qui lisez notre journal, si vous partagez nos idées, contactez-nous car il est grand temps de nous rejoindre dans cette campagne pour nous aider à construire une organisation qui défende les intérêts des jeunes et des travailleurs, avec un programme s’appuyant sur un changement de société, une société socialiste, seule réponse à nos aspirations.

  • Le régime des mollahs ébranlé

    Tremblement de terre en Iran.

    LE TERRIBLE tremblement de terre qui a ravagé la ville de Bam et fait près de 40.000 morts a aussi ébranlé en profondeur le régime des mollahs et rallumé la guerre entre les diverses factions au pouvoir. L’énorme élan de solidarité qui a mobilisé toute la population pour fournir du sang et de l’aide aux habitants de la région sinistrée n’a pas empêché la montée d’une vague de critiques qui a fini par percer dans la presse officielle elle-même.

    Jean Peltier

    En effet, des centaines de milliards de rials ont été dépensés au cours des dernières années pour l’aménagement de lieux de loisirs et d’installations touristiques autour de la citadelle de Bam. Mais rien n’a été fait pour permettre aux nombreux sans-abris de la région de trouver un logement ni pour construire des habitations solides et développer une sécurité sociale. Par contre, le clan de l’ancien président Rafsandjani s’est considérablement enrichi au travers de ces opérations immobilières.

    Après la catastrophe, la coordination de l’aide a été freinée par la désorganisation et la lourdeur de la bureaucratie du régime. Des milliers de volontaires sont restés bloqués dans les villes, les femmes médecins se sont vu interdire de participer aux équipes d’urgence tandis que des milliers de gens restaient privés de soin et d’aide. L’actuel président Khatami a dû écourter son voyage dans la région sinistrée parce que les autorités locales ne pouvaient assurer sa sécurité devant la colère de la population.

    Réformes bloquées

    C’est pourtant le même Khatami qui avait été élu triomphalement en mai 1997 parce qu’il portait l’espoir d’une grande partie de la population d’en finir avec la répression et l’obscurantisme imposés par le clergé chiite conservateur au pouvoir depuis le début des années 80. Mais si Khatami et ses partisans ont la majorité au parlement, leur influence a été systématiquement contrée par les conservateurs qui gardent le contrôle d’une série d’autres organismes et ont bloqué tous les projets de réformes. Devant cette résistance, les réformateurs ont régulièrement fait marche arrière.

    Cette évaporation des espoirs de réformes a augmenté la haine d’une partie de la population envers les conservateurs, surtout dans les villes et parmi la jeunesse, mais elle a aussi érodé le soutien populaire à Khatami.

    La victoire des États-Unis en Irak a aiguisé les tensions internes en Iran. Les réformateurs, proches des milieux d’affaires, sont plus sensibles aux pressions économiques et militaires américaines et souhaitent normaliser petit à petit les relations avec les USA. Les conservateurs, par contre, maintiennent un discours anti-américain vibrant et pourraient encourager les chiites irakiens à s’opposer aux troupes d’occupation US. Mais ils n’ont aucune alternative économique sérieuse à opposer aux partisans d’un rapprochement avec les USA face à une population qui en a de plus en plus assez des privations et des restrictions.

    Conservateurs à l’offensive

    Les conservateurs ont voulu utiliser le mécontentement de la population après le tremblement de terre pour reprendre l’initiative politique. Le Conseil des Gardiens de la Constitution, un organisme tenu par les conservateurs, a annoncé le 10 janvier l’annulation de près de 3.600 candidatures aux élections législatives prévues le 20 février (sur un total de 8.100 candidats enregistrés) pour «non respect de l’islam» ou «non fidélité au principe de la primauté du religieux sur le politique». Ces annulations visent en écrasante majorité des candidats réformateurs, dont 84 députés sortants et le propre frère du président.

    Cette décision a ouvert une crise politique énorme. En réponse, des dizaines de députés occupent le parlement, la majorité des ministres ont menacé de démissionner et les partis réformateurs parlent d’organiser un boycott national des élections. Mais jusqu’ici les réactions sont restées limitées au monde politique et ne se sont pas encore manifestées dans la rue. Les étudiants, en particulier, n’ont pas encore bougé. Plusieurs fois à la pointe de la contestation contre le régime, ils gardent le souvenir de la répression féroce menée par les conservateurs en 2000 et de la passivité des députés réformateurs à cette occasion et ils sont découragés devant la lenteur des réformes démocratiques.

    Il est probable que, pour éviter une explosion politique qui pourrait devenir incontrôlable, les conservateurs devront faire – au moins partiellement – des concessions. Mais ils sont déterminés à reprendre la totalité du pouvoir et il semble peu probable que Khatami et les dirigeants réformateurs osent prendre le risque d’organiser une confrontation dans la rue. Il ne semble pas non plus y avoir actuellement de direction alternative aux dirigeants réformateurs. Pour en finir vraiment avec le régime islamiste, il faudra pourtant une mobilisation populaire massive qui ne s’arrête pas aux petites manoeuvres des «réformateurs».

    Il faudra un mouvement qui lie les problèmes de pauvreté, de chômage, de manque de perspectives, à la nécessité d’un changement socialiste de la société.

  • L’hypocrisie républicaine

    EN FRANCE, les partisans comme les adversaires de la loi contre le foulard à l’école rédigée par le ministre de l’Enseignement Luc Ferry se réclament des valeurs républicaines dont le principe de laïcité, consacré par la loi de 1905, constitue la pierre angulaire.

    Thierry Pierret

    Les premiers veulent en réaffirmer le principe de séparation de l’Eglise et de l’Etat, les seconds celui de liberté de conscience. C’était une loi d’apaisement après plusieurs années de politique violemment anticatholique. A l’époque, le Parti socialiste français avait soutenu cette politique, ce qui a détourné de lui les ouvriers catholiques qui ont rallié la droite monarchiste. Le ralliement du PS, du PCF et d’une partie de l’extrême-gauche au projet de loi détournera de la gauche bon nombre de travailleurs musulmans.

    Quelle unité?

    Il est loin le temps où la bourgeoisie était une classe révolutionnaire. Tout le verbiage sur «les valeurs républicaines» n’a d’autre but que de jeter un voile sur sa domination de classe. On récupère sans vergogne les symboles de 1789 pour mieux en dénaturer les acquis. Le Décret Crémieux de 1870 accordait les droits civiques aux Juifs d’Algérie mais pas aux Musulmans. D’après le «Décret Ferry», les élèves sikhs pourront porter un petit turban, mais les élèves musulmanes ne pourront même pas porter un bandana. Diviser pour régner, maintenant comme jadis. Mais Ferry argumente: «Il faut empêcher l’apparition du communautarisme à l’école». Diviser au nom de l’unité, quel raffinement! Notre démarche est tout autre: nous défendons le droit de tous à la libre expression de leurs convictions à l’école comme dans l’entreprise. C’est le seul moyen d’atteindre une unité réelle entre les travailleurs – et entre leurs enfants – autour de leur intérêt de classe commun. Cette unité est fondamentale dans la lutte pour le socialisme. Seul le socialisme permettra de préserver les acquis démocratiques de 1789 – l’égalité formelle entre les citoyens – tout en créant les conditions de l’égalité réelle par la suppression de l’exploitation capitaliste et des classes sociales.

  • Interdiction du foulard: Diviser pour régner

    DEPUIS QUE le gouvernement français a déposé un projet de loi pour interdire les «symboles religieux ostensibles» à l’école, la discussion a éclaté aussi en Belgique. D’abord en Wallonie où deux parlementaires, Destexhe (MR) et Lizin (PS), ont fait des propositions allant dans le même sens, puis en Flandre où Dewael veut faire oublier la défaite que le VLD a subie dans le débat sur le droit de vote et montrer que le VLD «ose». Pas besoin de beaucoup de courage pourtant pour désigner un groupe déjà discriminé comme bouc émissaire pour les prétendus problèmes de vie en commun. Le but de cette manoeuvre, c’est de diviser les travailleurs dans la perspective des assainissements draconiens qui sont prévus pour les prochains mois.

    Anja Deschoemacker

    Le débat est faussé par un certain nombre d’arguments tirés par les cheveux. Ainsi, la séparation de l’Etat et l’Eglise. Une institution doit être neutre du point de vue religieux, ne peut donc pas imposer l’une ou l’autre religion, mais ni le personnel de l’institution, ni les gens qui utilisent ses services ne doivent être obligés de cacher leurs opinions religieuses. Leur droit à porter le voile, s’ils le souhaitent, relève totalement de la liberté de religion individuelle. Sans oublier en plus que la Belgique ne connaît pas une séparation stricte entre l’Etat et l’Eglise et que la majorité des écoles appartiennent au réseau catholique!

    Comment le racisme se déguise en féminisme

    Les défenseurs de l’interdiction abusent de manière hypocrite de l’idée de l’émancipation des femmes afin de stigmatiser un autre groupe opprimé. Dans les pays occidentaux il existe une égalité légale entre hommes et femmes. Dewael et les autres essaient de nous faire croire qu’il s’agit aussi d’une égalité réelle. Mais une femme peut bien être considérée par la loi comme égale à l’homme, si elle ne gagne pas assez elle-même pour assurer sa vie et celle de ses éventuels enfants, elle reste dépendante de celui qui gagne le revenu, qui est le plus souvent un homme. L’égalité légale n’a pas mené à un salaire égal, à des conditions de travail et à des chances de trouver un emploi égale, à la disparition de la violence intrafamiliale,…

    Les immigrés, et parmi eux les femmes, subissent des discriminations sur le plan de l’enseignement, du logement et du marché du travail. Une fille musulmane, à qui les parents imposent le foulard, ne fera pas un pas en avant avec l’interdiction de celui-ci. Le foulard est unilatéralement présenté comme un élément de soumission de la femme. Pourtant aujourd’hui de nombreuses femmes le présentent comme un élément de défense de leur identité personnelle ou comme un élément de protestation contre une société raciste. Et qu’est-ce que Dewael a à offrir aux filles musulmanes qui se révoltent contre leur père, leurs frères ou leur mari? Une protection? Un emploi ou une allocation qui leur permettent de vivre? Une habitation sociale si elles ne peuvent plus rester à la maison? Non, même pas un accueil de première ligne, comme par exemple un refuge où elles pourraient rester quelque temps si nécessaire. Il y a plus de places d’accueil pour les chiens errants que pour les femmes qui sont victimes de violence. L’émancipation des femmes doit être tangible, sinon ce n’est que des paroles vides de sens.

    L’oppression fait le jeu des courants réactionnaires

    On parle aussi beaucoup du danger qui proviendrait d’une radicalisation de l’Islam. L’Islam est présenté comme dangereux pour «nos valeurs démocratiques». S’il y a une radicalisation, ce n’est pas parce qu’il y a des forces réactionnaires qui font de la propagande – elles le font déjà depuis longtemps – mais parce qu’il y a un bouillon de culture favorable pour cette radicalisation. Etant donné le rôle impérialiste de l’Occident dans le monde musulman, il n’y a rien de surprenant à ce qu’il y ait des sentiments anti-occidentaux. Ces sentiments pouvaient dans le temps trouver un cadre progressiste dans les idées du socialisme. Mais, depuis la chute du stalinisme, c’est vers un islam politique plus radical qu’ils se tournent à la recherche d’une réponse à des situations économiques catastrophiques.

    En Belgique, les immigrés sont de plus en plus attaqués, sous la pression du Vlaams Blok apparemment suivi de toute la caste politique. La discrimination est claire quel que soit le terrain: un chômage plus grand, un accès moindre à l’enseignement, une concentration dans des secteurs mal payés et/ou lourds,… Demander à des femmes immigrées de ne voir leur discrimination qu’en tant que femmes et non qu’en tant que travailleurs d’origine étrangère est absurde. Ce sont justement des mesures comme l’interdiction du foulard qui vont pousser les immigrées à se replier toujours plus sur leur propre communauté, dans lesquelles des courants de l’islam politique sont souvent les seuls leaders d’opinion.

    Un point de vue socialiste

    Les marxistes partent du point de vue que la religion est l’opium du peuple. Les classes dirigeantes utilisent toujours les religions pour développer le fatalisme dans les classes opprimées, afin de leur faire accepter l’inégalité sociale. Mais, de même qu’on ne peut pas contraindre des toxicomanes à se désintoxiquer, on ne peut pas lutter efficacement contre la religion par la répression, comme le montre clairement l’histoire des systèmes staliniens.

    Nous voyons la religion comme un choix personnel. Pour nous, l’Etat a le devoir d’assurer à la population un enseignement qui lui permette d’accéder aux connaissances et à la compréhension scientifiques les plus avancées. Mais l’Etat ne peut néanmoins pas obliger les gens à abandonner leurs croyances religieuses; le résultat d’une telle contrainte serait totalement contre-productif.

    Le plus important pour nous est la création des liens de solidarité entre les travailleurs de toute nationalité, de toute religion, de toute ethnie,… Nous ne voulons pas que les travailleurs d’origine étrangère se conforment aux idées de Dewael et des autres, mais nous voulons que les immigrés soient intégrés dans la classe ouvrière. Pour cela, la lutte pour l’égalité des droits et contre la discrimination est indispensable. La libération de la femme musulmane – comme celle de la femme belge – se fera dans la lutte pour des revendications comme un emploi et une habitation accessible à tous, des droits individuels à la sécurité sociale, un enseignement gratuit de qualité pour tout le monde.

    Tant que la classe ouvrière organisée se laissera diviser par le racisme, le sexisme, le nationalisme,… elle ne pourra avancer dans sa lutte pour construire des organisations qui puissent l’amener à la victoire.

  • NON à la chasse aux chômeurs!

    Le gouvernement prépare un bain de sang social

    EN TITRANT «Chasse aux chômeurs», le quotidien économique De Tijd a salué l’objectif du gouvernement d’exclure du bénéfice des allocations 30.000 chômeurs d’ici 2007. Le quotidien se base sur une série de notes internes aux cabinets ministériels PS et SP.a qui tracent les grandes lignes pour exclure les chômeurs.

    Peter Delsing

    Depuis le début de la crise, dans les années 70, le chômage est en progression ininterrompue. Le trucage des chiffres (les chômeurs âgés et les exclus des allocations ne sont plus repris dans les statistiques) ne peut masquer le fait que le capitalisme condamne une partie croissante de la population au chômage structurel. Cet été, le VDAB (l’équivalent en Flandre du FOREm wallon ou de l’ORBEm bruxellois) a annoncé que pour chaque poste vacant il y a six chômeurs.

    Le ministre de l’Emploi Frank Vandenbroucke (SP.a) crie sur tous les toits que les chômeurs doivent s’adapter pour décrocher un emploi. Mais ce n’est pas la faute des chômeurs, mais du marché de l’emploi. Même des diplômés hautement qualifiés ont du mal à trouver du travail malgré les dizaines de lettres qu’ils envoient pour répondre aux offres d’emploi parues dans la presse.

    Heureusement que l’on peut encore compter sur le PS et le SP.a pour faire les petits boulots ingrats du patronat! L’exclusion de 30.000 chômeurs signifie une diminution de 8% du nombre d’allocations de chômage. L’ONEm, vivement encouragé par le gouvernement, entend réduire ses dépenses de 209 millions d’euros d’ici 2007. (De Tijd, 10/1/2004).

    Frank Vandenbroucke veut contrôler si, après 18 mois de chômage, les allocataires ont réellement cherché du travail. Après leur avoir donné une seconde «chance», ils risquent déjà de perdre une partie de leur allocation. Ceux qui ne parviennent pas à prouver qu’ils ont cherché un emploi risquent l’exclusion pure et simple, y compris les chefs de ménage!

    Les contrôles seront effectués par l’ONEM même, ce qui est une rupture avec la situation actuelle. L’ONEm n’est pas un service d’accompagnement des chô-meurs. Il aura la tâche d’exclure du droit au chômage un quota de chômeurs fixé à l’avance.

    D’autre part, le gouvernement se montre prévenant envers ceux qui ont planqué leur magot dans des banques étrangères et n’ont donc pas payé le moindre centime d’impôt sur les intérêts encaissés: ils pourront bénéficier d’une amnistie fiscale en rapatriant leurs capitaux moyennant un léger impôt de 9%, voire de 6% (comparez avec le taux d’impôt sur les salaires!). Les entreprises reçoi-vent en cadeau une nouvelle baisse des charge sociales.

    Le gouvernement Verhofstadt/Onkelinx est un instrument au service des intérêts de la bourgeoisie. Les centaines d’emplois perdus chez Sobelair montrent encore une fois la nécessité d’une riposte organisée. Le syndicalisme de concertation prôné par la bureaucratie syndicale est une impasse. Il faut une offensive qui regroupe les travailleurs du privé, du public et tous ceux qui ont perdu leur emploi afin de contrer la politique asociale de ce gouvernement.

    C’est le message que le MAS/LSP entend mettre en avant au cours des prochains mois. Rejoignez-nous dans ce combat!

  • Service public privatisé. “Je prèfère encore courir derrière le camion!”

    Service public privatisé

    Dans pas mal de communes, le ramassage des ordures ménagères est confié depuis quelques années à des firmes privées dont l’objectif est de faire du profit et non de rendre un service à la population. Bon nombre d’habitants l’ont ressenti dans leur portefeuille: sacs payants, hausse de la taxe annuelle,…Bien entendu, un sac à 1 euro, cela pèse plus sur le budget d’un pensionné ou d’un chômeur que sur celui d’un notaire. Et les travailleurs qui collectent les déchets? Nous avons interrogé Jean, qui travaille dans une firme privée de ramassage des poubelles.

    Tu travailles chez Biffa. C’est une société privée ou une intercommunale?

    C’est privé à 100%. Biffa a des contrats avec les autorités locales pour ramasser les déchets. Là où j’ai travaillé, on était chargé de ramasser les sacs PMC (sacs bleus) dont le contenu est recyclable (canettes en métal, bouteilles en plastic, tetrapak,…). Normalement les sacs ne sont pas trop lourds, sauf quand les gens trichent en remplissant les boîtes avec plein de truc. Comme les sacs sont relativement légers on est seul derrière le camion. Tous les ménages ne trient pas. Il y a donc moins de sacs bleus. Ils sont moins lourds mais il faut cependant une bonne condition physique car on ne marche pas derrière le camion, mais on court toute la journée. Je dis bien «courir», car si on marche on ne rentre pas chez soi avant 10 heures du soir! D’après les mesurages qui ont été faits, un ramasseur de sacs PMC fait en moyenne une quarantaine de km à pied sur sa journée de travail. Quand la distance est trop longue entre les habitations je monte dans la cabine du camion. Celui-ci parcourt en moyenne une centaine de km sur la journée, y compris la distance pour aller au dépôt de Châtelet..

    Y a-t-il des travailleurs intérimaires?

    Oui. En principe pour boucher les trous (remplacer les malades, ceux qui sont en congé) mais certains intérimaires sont là tous les jours.

    Et le salaire?

    La firme chipote avec les barèmes. Nous sommes clas-sés dans la catégorie «transport routier», où les salaires sont plus bas qu’en «ramassage des déchets». Sur le plan salarial je suis considéré comme convoyeur et non comme ramasseur. Nous sommes donc payés moins que les ouvriers qui ramassent les ordures ménagères. En francs belges, j’avais environ 330F de l’heure plus une prime d’environ 35F de l’heure car nous n’avons pas de toilette ni de cantine. Le supplément pour les heures supplémentaires n’est payé qu’au delà de 10 heures de travail quotidien et non pas au delà de 8 heures, parce que dans le transport routier on considère qu’il y a des «heures d’attente».

    S’il n’y a pas de réfectoire ni de sanitaires prévus, comment faites-vous pour manger? Pour vous laver les mains?

    On mange dans le camion. On a un jerrycan d’eau pour se laver les mains. On travaille bien sûr avec des gants pour des raisons d’hygiène et pour éviter les coupures. Normalement on doit passer un examen médical. J’ai été convoqué plusieurs fois à l’examen mais je devais pour cela courir à Charleroi en dehors de mes heures de travail. Comme j’arrête ce travail dans quelques semaines, je n’aurai pas subi d’examen médical. J’ai seulement envoyé mon attestation de vaccination antitétanique.

    Y a-t-il une présence syndicale?

    J’en ai entendu parler, mais je n’ai jamais vu de délégué. Il faut dire que la firme est très étendue et a des activités diverses dans la collecte et le traitement des déchets. Ainsi au dépôt de Châtelet se trouve un centre de tri: des aimants sélectionnent les objets métalliques. Tout le reste est trié à la main par des travailleurs mal payés et qui sont toute la journée le nez dans les odeurs. Je préfère encore courir derrière le camion car là au moins on est à l’air.

    Par tous les temps?

    Oui. Le pire n’est pas le froid mais la pluie. Il n’y a pas de chômage intempéries prévu, comme dans le bâtiment. S’il pleut, les sacs doivent quand même être ramassés. On s’arrête parfois quelques minutes s’il drache trop fort. Mais si la pluie continue de tomber il faut bien recom-mencer à courir derrière le camion. On est trempé toute la journée. On a bien des protections mais qui prennent l’eau rapidement. Courir avec un ciré est intenable car on transpire tellement qu’on est alors mouillé à l’intérieur. On reçoit des vêtements de travail fluos, comme tous ceux qui travaillent le long des routes, mais seuls les travailleurs engagés directement par Biffa reçoivent des chaussures de sécurité. Pas les intérimaires!

    Propos recueillis par Guy Van Sinoy

  • Enseignement supérieur: Vers des universités d’élite en Europe

    Enseignement supérieur:

    EN ALLEMAGNE, le chancelier Gerhard Schröder prône la mise en place d’universités d’élite sur le modèle américain de Harvard, Standford et compagnies. Le secrétaire général du SPD (social-démocrate) confirme cette idée en avançant la nécessité d’avoir plus de prix Nobel. Le ministère de l’Enseignement supérieur allemand prépare pour cet été un système de notations internationales des universités afin de pouvoir comparer la compétitivité des unifs allemandes avec les universités européennes concurrentes.

    Boris Mallarme

    Les patrons applaudissent. Ils veulent d’un enseignement adapté au besoin du marché capable de concurrencer les établissements américains. La Table ronde des Industriels européens avance depuis 1989 que l’enseignement en Europe fournit une main-d’oeuvre trop critique, pas assez flexible, que trop de moyens sont consacrés aux études inutiles et que trop peu de jeunes font des études supérieures en rapport avec les besoins du patronat.

    Aux États-Unis, les universités décident quels étudiants elles admettent. Les droits d’inscription s’élèvent à des sommes atteignant plusieurs dizaines de milliers d’euros! Bref la sélection est extrême. Seul les génies et les gosses de riches ont accès aux unifs d’élite. Depuis des années les moyens consacrés à l’enseignement diminuent en Allemagne. On financera quelques unifs réservées à une élite au détriment de la masse des étudiants qui accéderont au reste des unifs qui dégénéreront de plus en plus en établissements poubelles.

    L’idée d’écoles supérieures pour l’élite ne touche pas que l’Allemagne. La déclaration de Bologne, signée par 29 ministres européens de l’Enseignement en 1999, vise à préparer les universités européennes à la compétition avec celles des États-Unis. L’harmonisation européenne des structures d’enseignement vise à mettre en concurrence les établissements et non à offrir une plus grande mobilité à la masse des étudiants. La mise en concurrence signifie que les formations jugées non rentables par les entreprises passeront progressivement à la trappe. Le stade final du processus est la création de «pôles d’excellence», où l’accès sera filtré par des minervals exorbitants. En Angleterre, un projet de loi permettant aux unifs d’augmenter les droits d’inscriptions à partir de 2006 sera voté dans les prochains jours. Les montants des frais scolaires pourront alors grimper jusqu’à 4.500 euros par an (Le plafond étant pour le moment de 1.656 euros). De nombreux étudiants à la suite de leurs études seront endettés de plusieurs dizaines de milliers d’euros. La dette serait effacée si elle n’a pas été payée entièrement après 25 ans. Cela rappelle les suggestions des économistes de l’UCL d’élever le minerval à 4.000 ou 6.000 euros à rembourser après les études.

    Seuls les étudiants les plus aisés capables de payer leurs frais de voyages, leurs logements, leurs droits d’inscription,… pourront étudier à l’étranger.

    Bologne conçoit une mobilité accrue pour ceux qui seront admis dans les futurs unifs d’élite étrangère et non pour tous. A côté de ces pôles d’excellence, il y aura des établissements de seconde zone, plus accessibles, mais dont la qualité laissera de plus en plus à désirer et dont les diplômes auront peu de valeur. C’est là qu’échoueront la masse des étudiants les moins fortunés.

    L’enseignement en Belgique suit cette tendance néo-libérale européenne.

    Le 3 janvier 2004, le gouvernement de la Communauté française a approuvé l’avant projet de décret dit de «Bologne» de la ministre de l’Enseignement supérieur Françoise Dupuis visant à mettre en place l’harmonisation européenne des structures (du coté flamand l’avant-projet de décret correspondant a été voté depuis le 5 juillet 2002). Ce décret remplace le système candis/licences (2+2) par 3 ans de baccalauréat et puis un an de maîtrise (3+1) ou deux ans pour une maîtrise spécialisée (3+2). Les écoles supérieures sont intégrées à ce système. Il faudra dès lors être capable de payer la cinquième années d’études pour avoir le diplôme de maître spécialisé qui vaudra évidemment plus sur le marché de l’emploi que celui de maître. L’autre grosse partie du décret concerne la constitution «d’académies», possible autour de l’ULB, de l’ULG et de l’UCL, associant plusieurs universités francophones du pays. Les universités pourront léguer à souhait à leur «académie», des parties de l’enseignement, de la recherche et des services qu’elles organisent. Ceci permet aux universités de rationaliser, de faire baisser les coûts de fonctionnement (moins d’administration, suppressions de filières, pertes d’emploi,…). Les universités sont en train de se constituer en pôle avec des écoles supérieures. Tout ceci a pour objet de tenter de développer un pôle d’excellence réservé à l’élite du côté francophone.

    La vague d’attaques au niveau européen contre les acquis en matière d’éducation visant à augmenter la sélection montre une fois de plus le caractère antisocial de l’Europe capitaliste. L’enseignement est l’un des thèmes de la campagne électorale du MAS pour les élections de juin. Le MAS combat l’idée d’un enseignement élitiste et défend un enseignement gratuit et de qualité à tous les niveaux. Etudiants de Gauche Actifs est solidaire de la campagne électorale du MAS qui est la seule opposition de gauche crédible qui défende nos droits d’étudiants.

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