Cette citation, vous la connaissez probablement déjà. Elle nous vient du 19e siècle, de la plume de Victor Hugo. Elle refait régulièrement surface dans les médias à l’occasion de chaque rebondissement dans les affaires de scandales fiscaux.
Par Nicolas Croes
Les Paradise Papers, révélés en novembre 2017 par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), concernent des montages d’optimisation fiscale pratiqués par des multinationales et célébrités planétaires. L’économiste français Gabriel Zucman estime que cette optimisation fiscale des entreprises et des grandes fortunes représente 350 milliards d’euros (le FMI parle de 800 milliards), de pertes fiscales par an aux États du monde entier. La colère et l’indignation face à ce chiffre est d’autant plus grande qu’il prend place dans un contexte de crise et de politiques d’austérité.
Cette fuite constitue la deuxième plus grande révélation de documents exploités par les médias après les Panama Papers en avril 2016. Depuis lors, il y a encore eu les Malta Files (mai 2017) et les Bahamas-Leaks (septembre 2016). Avant cela, il y a eu les SwissLeaks (février 2015), les Luxembourg Leaks (novembre 2014), les China Leaks (janvier 2014) et les Offshore Leaks (avril 2013).
Ces scandales – qui ont levé un coin du voile sur le monde des paradis fiscaux, de l’évasion fiscale et du blanchiment d’argent – ont tous été l’oeuvre du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), à l’exception des Malta Files.
Il ressort des premières analyses des Paradise Papers que s’il y a eu quelques fraudes, la plupart des cas dévoilés sont ‘‘a priori légaux’’, selon le journal français Le Monde (qui participe au ICIJ) mais ‘‘l’ampleur des sommes échappant à l’impôt est telle que la question se pose aussi en termes d’éthique’’.
Pour Gabriel Zucman (qui a étroitement collaboré avec l’ICIJ pour analyser ces documents), les personnes ou entreprises qui recourent à de telles pratiques de fraude ou d’évasion fiscales, c’est le 0,01% des plus riches. Pour lui, il y a une réelle concentration de la fraude chez les plus nantis, qui peuvent recourir à une armée de juristes et d’avocats pour masquer leurs pratiques. Les banques privées ont bien compris que les ultras riches deviennent de plus en plus riches. Elles se spécialisent donc dans la gestion de leurs fortunes (des ménages dont les avoirs atteignent les 50 millions d’euros). Leur fortune augmente beaucoup plus rapidement que l’économie, ce qui explique que l’argent augmente dans les paradis fiscaux.
De la dénonciation à l’action
A l’époque, les Panama Papers avaient conduit à la démission du premier ministre islandais, touché de plein fouet par le scandale. Sans l’entrée en action des masses, sans que la colère et l’indignation ne s’expriment dans la rue, nous pourront encore assister à d’autres révélations de ce genre sans que rien ne bouge. Nous vivons des temps où la jeunesse et tous ceux qui souffrent de ce système tolèrent de moins en moins des pratiques en cours depuis longtemps pourtant. C’est ce qu’ont illustré la colère et les sondages dévastateurs autour de Publifin ou du Samusocial. C’est le même processus qui avait mis hors course Fillon lors des élections présidentielles françaises. Le succès des hashtags #mettoo et #balancetonporc a aussi montré que la coupe était pleine contre les discriminations ancrées dans cette société.
Les Paradise papers & Co sont autant d’arguments à utiliser pour renforcer la lutte contre les politiques d’austérité et contre leur monde, celui de l’arrogance des riches. Ce sont également autant d’arguments en faveur de mesures drastiques telles que la nationalisation sous contrôle démocratique de la totalité du secteur financier et d’autres mesures de type socialiste. Une fois de plus, le capitalisme nous démontre qu’il n’est un paradis que pour les riches tandis qu’il organise la misère de la large majorité sociale. Un tel système n’a de place que dans les poubelles de l’histoire.
Une “Tax Pride” a eu lieu hier à Anvers à l’appel de la FGTB et de la CSC. Cette action syndicale entendait dénoncer la très faible imposition des ultras-riches en Belgique, ce qui est source d’inégalités croissantes. La manifestation fut une belle réussite avec plus de 5.000 participants. A l’image des récentes manifestations de Charleroi et de Liège, les manifestants étaient plus nombreux qu’initialement prévu. Sur les banderoles, on pouvait lire des slogans contre la politique de casse sociale, contre les mesures d’austérité et contre les capitalistes arrogants du type de Fernand Huts (dont la famille est la 9e plus fortunée du pays), richissime entrepreneur anversois. prochaine étape : le 19 décembre à Bruxelles en défense de nos pensions (10h30, boulevard roi Albert II) !
La campagne pour les élections communales a démarré. Le PTB espère obtenir une nouvelle percée électorale et nous espérons que nous pourrons nous joindre à eux. Tout comme lors des dernières élections, le PTB organise une grande enquête pour estimer quels sont les thèmes locaux les plus importants pour ses électeurs potentiels. C’est sur cette base que sera établi le programme électoral de 2018. Il est positif que le PTB veuille de cette manière impliquer des couches plus larges de la population et créer une certaine participation démocratique. Les enjeux sont grands. Nous souhaitons exprimer ici quelques remarques critiques.
Par Jarmo (Anvers)
Construire un programme au travers de la mobilisation
Une enquête peut être utile mais, pour donner une ouverture plus large à des revendications offensives, nous soulignons l’importance des actions et des mouvements sociaux. C’est grâce à cela que la conscience et la clarté autour de revendications spécifiques peuvent être développées et qu’un soutien actif plus large peut être construit. Les marxistes sont présents là où le changement peut réellement être imposé : dans la rue, dans les mouvements sociaux. S’ils sont élus, ils deviennent les porte-parole de ceux-ci et ils défendent leurs revendications au conseil communal. Un programme socialiste de gauche devrait, dès lors, être construit au travers de la lutte.
Il ressort directement du ‘‘grand questionnaire’’ du PTB que tout est élaboré pour respecter le cadre des compétences du conseil communal et le carcan financier dans lequel les administrations locales se trouvent. Mais pour réellement répondre aux besoins sociaux de la ville, il faudra aller plus loin. Un programme socialiste pour les élections communales doit, selon nous, partir de tous les besoins sociaux sur le plan de l’emploi, de la pauvreté, de la précarisation et du logement et des propositions nécessaires pour s’attaquer au manque de moyens.
Car des moyens, il y en a. Même dans une ville comme Anvers : les diamantaires fraudeurs et les patrons du port sont assis sur des montagnes d’argent qui doivent être mobilisées d’urgence pour la collectivité. Sans lutte et sans mobilisation, par exemple, en collaboration avec d’autres ‘‘villes rebelles’’, cela ne marchera pas. Des initiatives et campagnes audacieuses peuvent constituer un point de départ.
Des propositions intéressantes
Le ‘‘Grand questionnaire’’ que le PTB mène à Anvers (les questions diffèrent de ville en ville) ne manque pas de propositions intéressantes. Nous accueillons positivement l’idée de transports en commun décents et gratuits : cette revendication est nécessaire en complément des propositions autour de la couverture du ring.
Il y a aussi l’idée de démarrer un projet pilote d’une semaine de travail de 30 heures dans les services communaux. Nous ne pouvons évidemment pas être opposés à cette revendication, mais nous nous demandons tout de même pourquoi parler d’un ‘‘projet pilote’’ au moment où même plusieurs commentateurs de l’establishment se prononcent en faveur d’une répartition plus équitable du travail. Une semaine de 30 heures généralisée sans perte de salaire et avec embauche compensatoire dans les services publics pourrait exercer une pression sur d’autres secteurs pour rendre la charge de travail plus humaine chez eux aussi.
Mais également des limites…
Malheureusement, le projet pilote d’une semaine de 30 heures est le seul point sur le travail dans le questionnaire. Dans le contexte actuel où le chômage des jeunes est de 25% dans plusieurs quartiers d’Anvers, c’est particulièrement limité. Il faut tout faire pour offrir une perspective d’avenir à ces jeunes. Cela implique de défendre un programme massif de création d’emplois. Les possibilités ne manquent pas à cet égard.
Ailleurs dans l’enquête, le PTB parle, par exemple, d’éducateurs de rue sur toutes les places. Il y a aussi une proposition pour développer l’aide aux devoirs à l’école et dans le quartier. Le parti néglige de dire de quel type d’emplois il s’agirait : un véritable emploi ou du volontariat ? Il faut impérativement stipuler qu’il s’agirait de véritables emplois avec de bonnes conditions de travail.
Pourquoi, par exemple, ne pas revendiquer que, dans le cadre d’un plan d’investissements massifs dans l’enseignement communal, il y aurait engagement de plus de personnel d’accompagnement pour non seulement garantir l’accompagnement mais aussi pour alléger la charge de travail du personnel existant.
L’enquête prône une ‘‘ville sans profiteurs’’ : pour y parvenir, le PTB veut, entre autres, une ‘‘diminution des salaires les plus élevés des CEO dans les entreprises communales’’. A nouveau : personne ne peut être contre ce type de revendication. Mais elle est tout de même limitée. Nous trouvons bizarre de décrire des services publics comme ‘‘entreprises communales’’ et des cadres comme “CEO” : ne serait-ce pas aller loin dans la logique qui considère les services publics avant tout comme des entreprises lucratives ? Un plan massif d’investissements dans les services publics avec un projet de mobilisation y afférent dans les rues et dans les quartiers pour s’opposer à cela répondrait à beaucoup de besoins et pourrait être une rampe de lancement vers un gouvernement de gauche qui casse avec la politique d’austérité.
Au final, les mesures proposées dans cette enquête sont légères. Mais une nouvelle percée électorale du PTB serait positive pour toute la gauche et pour les travailleurs. C’est pourquoi le PSL veut participer comme force constructive de soutien à la réalisation de cette percée et, en même temps, se battre pour une rupture anticapitaliste socialiste.
Du côté néerlandophone, Groen est en hausse dans les intentions de vote. Des sondages locaux de la ‘‘Gazet van Antwerpen’’ à Anvers, Malines et Turnhout prévoient même des résultats spectaculaires pour les élections communales. Avec 24%, Groen remet en question le leadership de la N-VA à Anvers. Un cartel Groen-SP.a donnerait 30,6%. À Turnhout, Groen devient même le plus grand parti et le cartel Groen-Open VLD à Malines dépasserait la barre des 40%.
Par Geert Cool
Le ‘‘courant sous-jacent’’ ne va pas qu’à droite
Le recul de la N-VA dans les trois villes ressort particulièrement des sondages. À Anvers, le bourgmestre De Wever reçoit même une sérieuse claque : -11%. La nouvelle est importante : la N-VA se présente volontiers comme l’expression du ‘‘courant sous-jacent’’ en Flandre. Il s’avère que le soutien à son projet politique néolibéral brutal s’émousse.
Même dans sa propre ville, De Wever fait face à un parti d’opposition qui a de bonnes chances de le surpasser. Cela ouvre d’une part le débat sur la politique à mener et, d’autre part, le choix des électeurs ne sera pas limité à une droite dure d’un côté et une droite très dure de l’autre.
D’où vient le flot vert à Anvers ?
Si la N-VA a pu croître si vite, c’est en bonne partie dû au rejet des partis traditionnels. Mais, désormais, la N-VA est elle-même de plus en plus un parti traditionnel. Pour se débarrasser de cette image, Twitter ne suffira pas. Et si, du côté francophone, Ecolo aussi est aussi considéré comme un parti établi, c’est beaucoup moins le cas de Groen en Flandre.
Les catastrophiques résultats électoraux catastrophiques de 2003 à la suite du gouvernement ‘‘arc-en-ciel’’ de Verhofstadt (une coalition des sociaux-démocrates, des libéraux et d’Ecolo-Agalev) ont forcé Groen a pratiquement repartir de zéro. Un changement de nom et l’arrivée progressive de nouvelles têtes ont sauvé le parti du déclin. Plus de dix ans plus tard, le parti est considéré comme un ‘outsider’ et non comme un parti traditionnel. Là où Groen a participé au pouvoir – comme à Gand (en cartel avec le SP.a) et Malines (en cartel avec l’Open-Vld) – c’était en tant que petit partenaire dans un cartel face à une opposition essentiellement composée de la droite.
Lors des élections locales de 2018, à Anvers, on observera une polarisation entre les partisans et les opposants de De Wever. Avec le SP.a qui est toujours dans les cordes après des décennies de participation au pouvoir, Groen peut se profiler comme la force d’opposition la plus importante. Cela exerce une force d’attraction pour tous ceux qui veulent voir partir De Wever tout en mettant pression sur les résultats du SP.a, mais aussi du PTB. Dans les sondages, ce dernier ne connaît qu’une maigre progression. Le mécontentement face à la politique asociale et répressive est en grande partie resté latent ces dernières années et a été peu organisé via de grandes campagnes. Dans les actions qui ont pris place au sujet de la mobilité (autour du Ring) ou du travail social (contre la commercialisation), par exemple, Groen était systématiquement présent et le PTB ne s’en est jamais fortement distingué sur le contenu.
Groen, une véritable alternative ?
Bonnes nouvelles : la N-VA n’est pas intouchable et c’est vers la gauche que vont les voix. Mais Groen veillera-t-il réellement à mener une autre politique ?
La participation des verts au gouvernement entre 1999 et 2003 n’a pas vraiment représenté une rupture avec la politique néolibérale, pas plus que les majorités locales avec Groen. La déclaration de la présidente Meyrem Almaci selon laquelle Groen est plus proche de l’Open-VLD que du PTB ou encore les commentaires négatifs répétés au sujet des grèves ne nous laissent rien présager de bon.
Ces dernières années, le programme des verts est devenu plus néolibéral sous prétexte de ‘‘modernisation’’. La collaboration avec les libéraux au conseil communal de Malines (dont est membre le président de la fraction Groen à la Chambre Kristof Calvo) découle logiquement de cette approche. Groen joue sur le mécontentement tout à fait justifié de la population, mais sans offrir de solutions collectives en allant chercher les moyens là où ils sont. Avec une banque d’État entourée des autres requins de la finance ou avec un fonds d’investissement financé par des particuliers, on n’ira pas loin. De la sorte, toute tentative de rendre la politique plus verte risque de s’acheminer vers toutes sortes d’éco-taxes peu populaires qui chercheront à trouver les moyens nécessaires auprès de la population.
Dries Van Langenhove (du cercle conservateur catholique KVHV) organise un groupe néo-fasciste “identitaire”.
Ce club a organisé des séances d’entraînement au combat durant son camp d’été et était le service d’ordre d’un meeting de Francken à Gand.
Ce groupe est alimenté par les provocations ‘‘trumpiennes’’ de Francken.
On a récemment pu voir apparaître dans les rues des villes étudiantes flamandes des autocollants portant pour slogan : ‘‘Mieux vaut être mort que rouge’’ (Liever dood dan rood), “C’est déjà la faute des socialistes”, “Bouclier et ami” (Schild en vriend’’ (1) ) et “Finissons-en avec COMAC” (Maak komaf met COMAC). Cette campagne d’autocollants est l’œuvre de Schild et Vrienden, un club d’extrême droite composé de membres du NSV (cercle étudiant officieux du Vlaams Belang), du KVHV (cercle étudiant catholique conservateur) et des jeunesses de la N-VA.
Par Koerian (Gand)
Les débuts d’une milice privée
Le groupuscule est né au printemps dernier d’une action conjointe des membres des associations étudiantes susmentionnées lors d’une manifestation contre l’arrivée de Theo Francken à l’université de Gand (Ugent). Ils se tenaient le long du sentier avec des pancartes proclamant ‘‘Des frontières sûres = un avenir sûr’’. Dries Van Langenhove, membre du KVHV et représentant étudiant au conseil d’administration de l’Ugent, avait pris les devants dans ces actions. Le Vif écrivait en mars dernier que Dries Van Langenhove participe aux activités du réseau identitaire européen. Il aurait commencé à poser les bases d’une “Fédération flamande des identitaires” en septembre 2016. Shield en Vrienden pourrait bien en être le résultat.
Ces personnages ne sont pas unis par un véritable programme politique, mais par une haine commune des migrants et de la gauche et par un certain romantisme flamand (comme en témoigne le ‘‘1302’’ sur leurs t-shirts, année de la bataille des Éperons d’or). À en croire l’Instagram de Schild en Vrienden, la formation au combat était particulièrement centrale lors de leur camp d’été.
Ce groupe comprend Stijn Everaert, secrétaire de la N-VA pour Alost et ses environs, Brieuc Suys, cofondateur du réseau réactionnaire flamand SCEPTR et Michiel Vantongerloo, ex-responsable du KVHV à Gand qui c’était fait remarqué par les médias en criant ‘‘du cyanure pour le FDF’’ lors d’une soirée électorale de la N-VA en mai 2014. La fine fleur de la jeunesse d’extrême droite flamande était aussi invitée. Cette année, ils étaient impliqués dans une affaire d’intimidation sexuelle et de menaces de mort contre des membres de Comac. Il semble vouloir aller plus loin que le simple activisme sur Internet et passer à l’intimidation physique. Lors des manifestations en faveur des droits de l’Homme et contre la politique migratoire de Francken, ils viennent systématiquement provoquer les manifestants avec des slogans xénophobes.
Encouragés par les provocations de Trump
Le fait que de tels groupes extrémistes émergent aujourd’hui n’est pas étonnant. Le gouvernement essaie de vendre sa politique d’austérité en cherchant des boucs émissaires pour la pauvreté et la misère qu’il crée. Theo Francken balance une nouvelle attaque ou mesure raciste chaque fois que les déclarations socio-économiques optimistes du gouvernement sont mises à mal. Il suffit de penser à la collaboration avec la dictature soudanaise. Des individus comme Dris Van Langenhove se sentent renforcés par cette situation. Ils pensent qu’ils ont l’opinion publique dans la poche et partent à l’offensive contre les syndicats, la société civile et la gauche.
Cette confiance est toutefois erronée. La majorité de la population n’a toujours rien à voir avec la haine de Shield et Vrienden. Aux États-Unis, plusieurs mouvements d’Alt-Right et de néonazis estimaient que le vent allait souffler dans leurs voiles après la victoire de Trump. Cependant, une mobilisation de 40.000 antifascistes à Boston après le drame de Charlottesville les a renvoyés dans leurs égouts : l’extrême droite n’a pas sa place dans nos rues. Le lendemain, des dizaines de réunions de l’Alt-Right ont été annulées partout aux États-Unis et les néonazis se sont retranchés derrière leurs claviers et sur Internet. La jeune militante tuée à Charlottesville doit cependant nous rappeler le danger que représente l’extrême droite. En Belgique aussi, nous devons répondre à toute manifestation ou action de Shield en Vrienden avec une mobilisation de masse, pour repousser tous les Van Langenhoves de ce monde hors de notre espace public.
(1) Référence aux ‘‘matines de Bruges’’, le massacre d’un millier de partisans du roi de France survenu en 1302 à Bruges.
Suite à la décision du 29 juin du Collège communal de Namur de voter un règlement interdisant la mendicité (pourtant dépénalisée en 1993), dans le centre de Namur et dans certaines rues de Saint-Servais, Bouge et Salzinnes, de nombreuses manifestations citoyennes se sont appropriées la place publique pour scander leur mécontentement. Les collectifs citoyens ont mis sous pression la majorité communale par divers moyens d’action tout au long du mois de juillet et d’août, jusqu’à interpeller le Collège communal lors du Conseil communal de rentrée du 7 septembre 2017. Cet article revient sur deux mois de luttes intensives contre l’hypocrisie d’une majorité en mal de légitimité politique.
Par Alexis(Namur)
La création du rapport de force et les véritables moyens de lutte se trouvent dans la rue en militant et en conscientisant les citoyens !
Rappelons-le, de nombreuses actions ont eu lieu à Namur depuis le vote surprise du Conseil communal le 29 juin dernier. Une action sit-in sur la place d’Armes avait attiré les regards et poussé le bourgmestre empêché de l’époque, Maxime Prévot, à organiser une rencontre avec les troublions (voir notre rapport d’action « Namur : la majorité communale sous pression populaire après l’interdiction de la mendicité LIEN DANS ARTICLE https://fr.socialisme.be/31933/namur-interdiction-mendicite »). De nombreuses autres actions ont maintenu la pression sur la majorité : le 11 juillet, près de 100 personnes s’étaient rassemblées devant le parlement wallon afin de scander leur désaccord avec le règlement. Le 12 juillet, une action mendicité pour récolter des fonds afin d’imprimer des tracts et produire des tee-shirts permit une nouvelle initiative le 15 juillet au marché de Namur, couplée d’une pétition. Au festival Esperanzah, celle-ci recueilli pas moins de mille signatures. Parallèlement, un squat fut ouvert le dimanche 13 août en réponse à la fermeture annuelle de l’abris de nuit (voir plus bas).
Entre-temps, nos camarades aidèrent à la rédaction d’une lettre appelant à la convocation d’un Conseil communal d’urgence, retournant l’arsenal législatif de l’état bourgeois contre lui-même. Cette lettre se diffusa largement dans les médias (l’Avenir édition du 05/08/2017 et La Libre édition du 08/08/2017) et accentua un peu plus la pression sur le Collège de la ville de Namur. Aussi, ils tinrent informer le service indépendant de lutte contre la discrimination, UNIA, afin qu’un avis juridique favorable soit rendu sur la question. Résultat : le règlement ne fut pour ainsi dire pas appliqué durant toute sa période de mise en vigueur (du 30 juin au 30 septembre) mais n’a pas pour autant été abrogé.
Les partis traditionnels tentent de récupérer les arguments de la rue à leur profit durant la rentrée politique du Conseil communal du 7 septembre
Le règlement n’ayant pas été abrogé, une membre du collectif des Mendiants d’Humanité fit une interpellation citoyenne en son nom propre, demandant l’abrogation pure et simple, en reprenant les arguments issus de la lettre diffusée dans la presse, et remit une pétition de 3000 signatures dans les mains de Maxime Prévot.
En réponse, le bourgmestre s’est présenté comme un défenseur de « ceux qui n’osent pas parler » au risque de se faire lyncher par les « biens pensants ». A nouveau, Maxime Prévot s’érige en chantre et protecteur des commerçants, assurant que seulement 22 plaintes avaient été déposées pour juillet. Il affirma que le règlement avait pour utilité d’envoyer un signal aux mendiants afin de limiter leur afflux. Ainsi, l’interdiction pure et simple de la mendicité, sans négociations, provient d’une volonté de garder les indigents au-dehors de la ville et de permettre la bonne marche des commerces.
Maxime Prévot s’est ensuite présenté comme bouclier des plus pauvres en rappelant que la Ville de Namur était munie d’un important dispositif de lutte contre la pauvreté : abris de nuit, CPAS, relais santé et kyrielle d’organisations subsidiées par les pouvoirs publiques. Or, monsieur Prévot occulte totalement la participation de son parti à l’appauvrissement et l’exclusion de la majeure partie de la population par une politique d’austérité soutenue annoncée par le nouveau gouvernement régional MR-CDH (chasse aux chômeurs, « rationalisation des institutions publiques » ,…). Pire, en s’enorgueillissant du « dispositif de lutte contre la pauvreté », le CDH confond gestion de la crise capitaliste par la charité et la véritable résolution de la crise. Sortie qui n’est possible que par une sortie du capitalisme. Cette résolution n’est possible que par la réappropriation de l’instrument de travail par les travailleurs, au profit des besoins réels de la majorité, par une politique massive de construction de logements publics et non par une distribution de soupes chaudes entre midi et minuit.
L’échevine de la cohésion sociale, Mm. Scquailquin (CDH), osa même de se vanter d’avoir proposé la mise en place des groupes de travail mendiants/autorités communales, alors que cette ouverture provint des collectifs présents lors de la réunion du 10 juillet à Namur. De plus, ces rencontres n’autorisent même pas la présence d’organisations non étatiques et n’offrent aucune transparence sur leur fonctionnement ou sur les travaux menés. Elle enfonce le clou en assurant que ces groupes permettront de travailler sur un nouveau règlement prenant en compte « les besoins de chacun ». Admettant dès lors la volonté de la majorité de réglementer la mendicité en utilisant la « légitimité » des groupes de travail.
Quelques communications honteuses ont aussi été faites depuis les bancs de l’opposition. Le conseiller communal, Fabian Martin (PS) a tendu la main à ses amis du CDH, en demandant la mise en place de comités élargis pour aborder les questions de la précarité et de la mendicité, l’ouverture durant toute l’année de l’abris de nuit et l’abrogation du règlement anti-mendicité. Il est nécessaire de signaler que la plupart des règlements contre la mendicité ont été mis en place sous des mayorats socialistes (les signatures de M. Magnette à Charleroi et de M. Demeyer à Liège en attestent). De plus, pourquoi ces groupes de travail et l’ouverture ininterrompue de l’abris de nuit n’ont pas été concoctées durant les précédentes législatures socialistes ? Mystère.
Et pourtant, le collège communal recule. L’abris de nuit sera définitivement ouvert toute l’année et le règlement est momentanément suspendu jusqu’à ce qu’ « un équilibre soit trouvé ».
L’ouverture d’un squat en autogestion, une expérience éclairante
Le 13 août, une partie du collectif de lutte contre le règlement anti-mendicité décida d’une action coup de poing durant les vacances du bourgmestre Maxime Prévot, en confisquant un bâtiment privé pour palier la fermeture annuelle de l’abris de nuit. Vu la saturation de l’abris durant sa période d’ouverture et la quantité de bâtiments vides dans les villes malgré une crise du logement, ce type d’action eu pas mal de succès.
Les risques inhérents à une action coup de poing sont, d’une part, le risque de retourner l’opinion publique contre le travail de conscientisation politique mené par les acteurs favorables à un changement. Et d’autre part, le risque d’induire une logique de sortie des politiques sociales, permettant à l’état bourgeois de se déresponsabiliser en abandonnant les soins et l’aide publique aux plus démunis au profit d’acteurs privés.
Le PSL est ouvert quant aux méthodes à utiliser. Une initiative choque, coordonnée avec d’autres actions partout dans le pays, englobant l’ensemble de la question du logement pourrait jouer un rôle important. Ce type d’action serait même révolutionnaire si à côté de cela, des conseils s’organisaient autour d’un mode de gestion démocratique et participatif, assurant la gestion des bâtiments avec un gouvernement soutenant une politique socialiste.
La commune de Namur aurait sa part à jouer si elle utilisait le rare arsenal législatif à finalité sociale existant. La loi Onkelinx de 1993 permet au Bourgmestre d’établir un inventaire des bâtiments vides sur le territoire de la commune et, par lui suite, de mettre en demeure un bâtiment inoccupé depuis au moins 6 mois afin de le réaffecter, par le biais d’une décision du président du CPAS. Bien entendu, malgré que l’abri de nuit soit comble tous les soirs, il n’y a eu aucun débat sur une possible réaffectation des bâtiments inoccupés. Et pourtant, rien qu’à Namur près de 300 kots sont vides chaque année. Une belle escroquerie pour faire monter les loyers grâce à la loi de l’offre et la demande.
Ensemble, avec les syndicats et toutes les forces de gauche, lors de nos actions de rue ou grâce au droit d’interpellation citoyen, nous pouvons argumenter en faveur de la réquisition, tout en dénonçant les monopoles immobilier qui se constituent sous nos yeux. Il est temps de constituer un rapport de force contre les magnats de l’immobilier qui privatisent les villes (A Namur Thibaut Bouvier possède à lui seul : 450 kots, 150 appartements ) et l’inaction des autorités communales.
Bien que l’expérience de l’ouverture d’un squat à Namur n’ait pas prit cette direction, elle permit de maintenir un débat social dans l’actualité namuroise, ainsi que d’accentuer la pression sur les partis traditionnels. Le « Squat Léopold » a depuis été honteusement évacué par la Ville à la demande du propriétaire privé du bâtiment Besix. En réaction, un autre squat c’est donc réouvert, avec le même objectif, dans le quartier de Bommel. La réouverture de l’abris de nuit et la suspension du règlement ont démontré que la mobilisation avait eu un impact indiscutable.
A l’heure de la mondialisation, la lutte contre la pauvreté est un phénomène global et nécessite une réponse internationale. Les actions doivent être concertées à une grande et petite échelle. C’est pour cette raison que le Parti Socialiste de Lutte est membre à part entière du Comité pour l’Internationale Ouvrière. Nous pensons qu’une coordination de toutes les luttes au travers de tous les pays permettra de renverser le capitalisme et d’organiser une économie planifiée répondant aux besoins de tous.
Le 1er juillet dernier, un sondage commandé par le MR à l’institut Dedicated Research accordait près de 25% des intentions de vote au PTB en Wallonie. Un coup de tonnerre politique. Et à situation inédite, développements inédits. Peu après, le secrétaire général de l’interrégionale wallonne de la FGTB, Thierry Bodson, déclarait sur les ondes de la Première : ‘‘Si en 2019, il y a possibilité d’une alliance à gauche (Ecolo, PTB, PS), il faut essayer de mettre en place une telle coalition. En politique, il y a des moments qui peuvent ne pas se représenter.’’
Par Nicolas Croes, rédacteur en chef de Lutte Socialiste
En septembre, la FGTB a également entamé une série de rencontres en prévision des congrès qui auront lieu en mai 2018 afin de mettre à jour diverses revendications. Et, surprise, le PS n’est plus la seule formation à être consultée. Des discussions sont aussi prévues avec Ecolo et le PTB. En janvier, un nouveau cycle de rencontres devrait avoir lieu avec cette fois-ci pour thème spécifique ce projet d’une alliance gauche-verte en 2019.
De la crainte à l’audace
Beaucoup de gens auront certainement réagi en se disant que ces 3 partis ne peuvent pas laisser passer une telle opportunité de mettre un terme aux politiques d’austérité. Mais l’enthousiasme ne règne guère dans les états-majors des partis concernés. Au PS, le silence est assourdissant. Chez Ecolo, la coprésidente Zakia Khattabi s’est réfugiée derrière le ‘‘choix des électeurs’’ de 2019, non sans une certaine condescendance. Et au PTB ? Le président du parti, Peter Mertens, a expliqué dans les pages de La Libre : ‘‘Nous ne participerons pas au pouvoir régional et fédéral en 2019’’? tout d’abord parce qu’il n’existe pas de ‘‘volonté de mettre en place un gouvernement qui voudrait la confrontation totale avec les institutions européennes’’, mais aussi pour éviter de ‘‘casser notre parti en plaçant tous les cadres dans des cabinets ministériels’’(1).
De telles réactions risquent d’être incompréhensibles aux yeux de toutes les victimes de la barbarie néolibérale. Les risques pointés par Peter Mertens existent cependant bel et bien. Le PTB a beau avoir un appareil de parti impressionnant et un noyau dur de militants loyaux préparés à faire de grands sacrifices, tout cela est-il suffisamment solide pour prendre à bras le corps les défis à venir ?
Jean-Luc Mélenchon a probablement dû se poser des questions similaires avant de lancer la dynamique de La France Insoumise. Très rapidement, il a toutefois pu construire un large mouvement politique en offrant un espace à toutes les personnes désireuses de lutter contre l’austérité : syndicalistes, écologistes, féministes, membres d’ONG,… Cette approche – ouverte et sans exclusives à gauche – a donné naissance à une dynamique toujours en construction (pensons aux 150.000 personnes réunies à Paris le 23 septembre) qui a indéniablement permis de rapidement créer une spectaculaire force politique. Elle a su attirer à elle un réservoir de talents jusque-là dispersés dans la société. Le paysage politique français en a radicalement été chamboulé.
Avec une telle approche, l’appel de la FGTB pourrait être saisi comme moyen de construire dès aujourd’hui un front de résistance sociale qui serait également en mesure d’entraîner des syndicalistes de la CSC. La mobilisation de la rue aiderait à clarifier largement qui veut sérieusement mettre fin à la dictature des marchés et qui ne s’intéresse qu’aux belles phrases de campagne électorale. Mais, surtout, l’expérience ainsi acquise permettrait de développer un large cadre de militants expérimentés pour prendre sur leurs épaules le poids du développement d’une alternative politique anti-austérité démocratique et combative. Un mélange entre lâcher-prise et tenir bon.
C’est grâce à cette force politique qu’il sera possible d’imposer des conditions favorables aux intérêts des travailleurs. Face à la perspective de nouveaux gouvernements de droites dures, nous comprenons bien l’enthousiasme que des ‘‘coalitions progressistes’’ pourra susciter. Mais n’entretenons aucune illusion : tout dépendra du contenu concret de leur politique. Et donc du rapport de force du mouvement social.
1er octobre, rassemblement à Madrid. Nos camarades d’IR étaient présents “contre la répression franquiste et pour la grève générale”
Pour la N-VA, le maintien de la politique d’austérité est plus important que le droit à l’auto-détermination
Le référendum sur l’indépendance de la Catalogne a été déclaré illégal par l’Etat espagnol. La période est houleuse et le répression très forte de la part de l’état national. L’opposition de la part de la population catalane s’exprime de façon massive. Nous nous sommes déjà exprimés sur le sujet (voir la déclaration de notre organisation-soeur dans l’Etat espagnol) mais, dans cet article, nous revenons plus spécifiquement sur l’attitude de la N-VA, la force dominante du nationalisme flamand actuel.
Dossier par Anja Deschoemacker
Pas de triomphalisme
Aujourd’hui, à l’occasion du référendum catalan, on ne voit plus rien à la N-VA des visages réjouis et de l’ambiance triomphaliste de la période précédant le référendum écossais sur l’indépendance. Même la combativité de Jan Jambon vis-à-vis de l’indépendance catalane est fortement retombée. Alors qu’en 2015, il faisait encore comprendre que la question catalane valait bien une crise gouvernementale, leurs collègues nationalistes en Catalogne doivent aujourd’hui se contenter d’une déclaration de Bart De Wever selon laquelle l’attitude répressive de l’état espagnol est “stupide et inacceptable”. Le gouvernement fédéral, dans lequel la N-VA est pourtant la force dominante, ne condamne même pas la vaste répression de l’Etat espagnol.
La détermination de la N-VA sur le plan communautaire en Belgique même est déjà mise en question depuis quelque temps par des figures au sein du mouvement flamand dont, notamment, le Vlaams Belang mais aussi deux ex-N-VA, Hendrik Vuye et Veerle Wouters (V&W) et encore des personnes telles que le politologue Bart Maddens. De fortes critiques s’étaient faites entendre après les récentes déclarations de Bart De Wever selon lesquelles le parti ne défendrait pas d’agenda communautaire lors de la prochaine campagne électorale de 2019.
Sur le plan européen, ces mêmes milieux critiquaient le passage en 2014, de la N-VA de la fraction EFA (un rassemblement de partis nationalistes/régionalistes et de verts) au parlement européen à la fraction groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE) où siègent, entre autres, les Tories britanniques. Pour sauver les meubles, la N-VA est restée membre du parti EFA (mais pas de la fraction) et elle a obtenu au sein du CRE, la liberté de voter comme elle l’entend autour des sujet relatifs à la question nationale.
Dans les deux cas, il s’agissait pour la N-VA de faire passer l’agenda socio-économique avant les objectifs nationalistes. Aujourd’hui, face au référendum catalan, nous remarquons beaucoup moins d’enthousiasme chez les dirigeants de N-VA en comparaison de l’époque du référendum écossais. Selon le mensuel Meervoud, Jan Jambon déclarait encore fin 2015, au sein de la coupole européenne des partis séparatistes, que : “Si la question catalane arrive sur la table du gouvernement belge, cela signifiera la fin de ce gouvernement”. La réalité actuelle est toute autre.
Le 21 septembre, ce n’est pas Jan Jambon qui a fait face à la Chambre pour répondre au nom du gouvernement aux questions du Vlaams Belang et de V&W quant à la la réaction du gouvernement belge suite aux récents développements autour du référendum catalan. A la demande de Siegfried Bracke, membre de la N-VA et président de la Chambre, c’est le ministre des pensions, Daniel Bacquelaine (MR) qui s’y est collé.
Cette réponse a parfaitement cadré avec les réactions officielles des institutions de l’UE jusqu’à ce moment. La constitution espagnole n’autorise pas à déclarer l’indépendance, les bourgmestres ne peuvent pas participer à son organisation,… Les arrestations de collaborateurs du gouvernement catalan ne lui posent pas de problème. Il conclut : “Nous souhaitons que cette situation interne soit résolue dans les règles de l’état de droit. Nous continuons à suivre ces évolutions avec l’attention nécessaire.”
La réponse du Président de la Commission européenne Jean-Claude Junckers a fait comprendre, en outre, que la Catalogne, en cas de scission avec l’Espagne, devrait se soumettre aux procédures normales pour devenir membre de l’UE. Etant donné que l’Espagne peut complètement bloquer cette procédure, il n’y a pas grand-chose à en attendre.
A la suite de leur propre expérience, les Écossais avaient déjà pu prédire qu’aucun soutien ne viendrait de l’UE pour les tendances indépendantistes des régions européennes. La fraction à laquelle la N-VA appartient au parlement européen, le CRE, sera d’ailleurs dans le camp le plus fortement opposé à la reconnaissance d’une Catalogne indépendante.
Pourquoi soutenir le référendum en Catalogne
Cela peut sembler ironique à première vue. Les nationalistes flamands qui se tiennent calmement à l’arrière-plan alors que l’Etat espagnol rappelle les fantômes du régime franquiste dans la répréssion d’Etat contre le référendum catalan alors que l’organisation-soeur du PSL en Catalogne et en Espagne mobilise activement contre cette répression et en faveur du référendum. Il y a pourtant une logique derrière cela : contrairement à la N-VA, le PSL n’essaie pas de défendre les intérêts de la bourgeoisie mais bien ceux d’intérêts des masses laborieuses.
Notre défense du droit à l’auto-détermination des peuples qui tendent à plus d’autonomie et/ou d’indépendance est honnête et ne sert pas à stimuler un agenda visant à diviser la classe des travailleurs afin d’économiser encore plus durement sur le dos de la majorité de la population. Nous soutenons la lutte pour l’indépendance de la Catalogne précisément parce que cette lutte est indissociable de celle à mener contre la politique d’austérité. Elle se résume à la question suivante : qui doit décider de la politique économique à mener ? L’élite de super-riches ou la grande majorité de la population ?
Pourquoi la N-VA est moins enthousiaste
Ce qui se passe aujourd’hui avec le parti gouvernemental N-VA n’est pas différent de ce qui s’est passé avec des partis comparables en Europe : SNP, CIU, les nationalistes basques modérés,… Ou à l’époque avec la Volksunie, le Rassemblement Wallon et le FDF en Belgique. Nés comme partis de la petite bourgeoisie qui tendent à l’autonomie ou l’indépendance, ils ont vite été placés face au choix suivant : soit jouer le jeu des partis d’Etat pour finalement faire de petits pas en avant en échange de leur soutien à un agenda antisocial – et risquer ainsi de se brûler les ailes au pouvoir et de perdre leur base électorale – soit rester en dehors du pouvoir avec un agenda radical et en construisant un mouvement capable d’atteindre l’objectif défini.
Le SNP en Ecosse et la CIU en Catalogne n’ont pas pu bénéficier longtemps de la majorité absolue qu’ils avaient acquise à une certaine période. Ils ont tous les deux fidèlement appliqué la politique d’austérité qui leur était imposée de la part de l’autorité nationale et ont donc, au mieux, essayé de cacher leur propre responsabilité en créant des procédures dont ils savaient pertinemment qu’elles ne représentaient pas une solution. Dans les faits, ils ont mobilisé les sentiments nationalistes sans tendre réellement vers l’indépendance. Au final, ils ont été obligés d’aller plus loin que ce qu’ils désiraient initialement, poussés par les masses qui en avaient marre de la politique d’austérité.
En Catalogne, cette pression est massivement présente depuis des années déjà. La majorité des dirigeants nationalistes catalans a été brisée par des forces nationalistes plus radicales qui ont défendu un agenda plus à gauche et progressiste que celui de la CIU et du PDeCat dont est issu l’actuel président de la généralité, Puigdemont. C’est cette pression qui a finalement poussé le PDeCat sur la voie du référendum, bien conscient que l’Etat espagnol ferait tout pour l’empêcher.
Le nationalisme n’est en effet pas neutre. Il peut être de droite avec pour base l’égoïsme économique et le revanchisme, comme c’est le cas en Flandre mais aussi en Catalogne quand on parle des partis nationalistes bourgeois au pouvoir. Mais il peut aussi être de gauche et tendre à se libérer de l’emprise de la classe dirigeante et de son agenda politique et économique. C’est le cas du large mouvement que nous voyons actuellement en Catalogne. C’était aussi le cas au sujet du mouvement autour du référendum écossais. Dans les deux cas d’ailleurs, sans que la direction des partis nationalistes dominants n’aillent si loin.
Alors que SNP se trouve dans le camp socio-démocrate d’austérité socialement accompagnée et le PDeCat plutôt au centre, la N-VA est bien plus à droite du point de vue socio-économique. Là où le SNP et le PDeCat ont encore au moins de beaux discours contre une série d’économies (ou pour des réformes progressives), la N-VA se positionne comme la puissance dirigeante qui essaie de toutes ses forces de mener les économies les plus dures et les attaques les plus structurelles contre la classe des travailleurs et les couches les plus pauvres La chance que ces derniers groupes rejoignent un mouvement derrière la N-VA pour l’indépendance de la Flandre est quasiment nulle.
Alors que la base historique de la N-VA était la classe moyenne flamande – qui prônait aveuglément le nationalisme flamand en ayant en tête que les choses iraient mieux si la “Flandre” n”avait plus à payer pour ces misérables Wallons – cette classe moyenne traverse maintenant l’expérience d’un gouvernement N-VA qui, à l’instar des gouvernements précédents et même plus ardemment, défend surtout les intérêts des grandes entreprises et des ultra-riches. Les moyens qui n’iraient plus en Wallonie (ou vers les chômeurs, les malades, …) n’iront pas non plus vers un renforcement du niveau de vie de la classe moyenne mais disparaîtront tout simplement dans les poches des ultra-riches et des grandes entreprises.
Lors d’un futur recul électoral de la N-VA, à défaut d’une alternative issue du mouvement des travailleurs dans la lutte pour plus de moyens contre l’élite dominante, une partie de ces voix reviendra à l’ancienne bergerie du CD&V. Une autre partie cherchera des voies plus radicales pour l’agenda nationaliste flamand, ce que le Vlaams Belang et V&W attendent. Ils seront probablement ensemble dans l’un ou l’autre front flamand.
Bien que le recul de la N-VA ne soit pas pour demain, surtout faute d’alternatives aux partis traditionnels qui soient progressistes, de gauche et suffisamment fortes, il est à terme impossible pour la N-VA de maintenir ce grand écart. Le mouvement perdra inévitablement de sa force à un moment donné, comme cela fut le cas pour le SNP et le PDeCa. En tout cas, la tendance dominante à la N-VA aujourd’hui est de s’accrocher au pouvoir et de considérer l’austérité prioritaire plutôt que de pousser de l’avant un agenda favorable à l’indépendance de la Flandre.
A défaut de viabilité pour l’indépendance flamande dans la société flamande, la stratégie avancée est de s’en prendre aux Wallons. Sous pression d’un gouvernement thatchérien de droite dominé par la Flandre – et donc par la N-VA -, des sentiments régionalistes pourraient vite remonter à la surface et assurer que des Wallons soient demandeurs d’une confédération. A la N-VA, on a donc dû être ravis que le PS organise un congrès wallon après son congrès idéologique et que les forces régionalistes se fassent entendre au sein de la FGTB wallonne.
Si un mouvement substantiel émergeait en Wallonie autour d’un programme anti-austérité, lié à la revendication de plus d’autonomie régionale – ce qui n’est pas exclus, surtout si une lutte syndicale nationale contre la politique d’austérité se fait attendre, que le mouvement social rencontre d’autres défaites et que la démoralisation commence à s’étendre – ce mouvement montrera cependant plus de similitudes avec les mouvements d’indépendance écossais et catalan qu’avec le flamand : la classe des travailleurs le marquera de son sceau.
Le possibilité de voir ce mouvement entrer gentiment dans le schéma de la N-VA et négocier avec elle une confédération dans laquelle la sécurité sociale serait scindée (ce qui, sans mesures compensatoires, mènerait à une sérieuse chute du niveau de vie en Wallonie et à Bruxelles) et la dette publique répartie de part et d’autre – ce qui permettrait à la Flandre de garder un contrôle au moins partiel sur Bruxelles – est cependant plus mince que de celle de voir le mouvement contre la politique d’austérité entraîner les travailleurs flamands derrière lui.
Ce qu’il adviendrait de Bruxelles et de la communauté germanophone dans un tel développement est une autre question importante. La chance que la N-VA puisse élaborer une proposition qui emporterait l’approbation de la population bruxelloise est nulle. Et que Bruxelles veuille avoir son mot à dire ne fait aucun doute.
Des études indiquent depuis l’existence de la Région bruxelloise, Bruxelles construit toujours plus sa propre identité, indépendamment de la Flandre et de la Wallonie. Il y a des tensions constantes avec la communauté flamande et la Fédération Wallonie-Bruxelles, toutes deux compétentes pour l’enseignement à Bruxelles. Ces tensions avec la Wallonie peuvent continuer à s’accentuer si les gouvernements de la région bruxelloise, de la région wallonne et de la Fédération Wallonie-Bruxelles conservent à plus long terme des majorités différentes.
La régionalisation des compétences communautaires à Bruxelles peut vite être à l’ordre du jour. Lors de telles négociations, il y aura peu voire pas de place pour la communauté flamande. Ainsi, “l’enfumage des Wallons” peut avoir pour conséquence que la Flandre perde toute participation à Bruxelles. Et quand la possibilité pour Bruxelles d’exister comme région et communauté en un seul bloc se posera, même dans la petite communauté allemande, le rêve d’une propre région refera surface.
Si elle a le couteau sur la gorge, la bourgeoisie pourra admettre une indépendance sur le papier – mais une réelle libération est impossible sous le capitalisme. Il est difficile de rénover des châteaux de cartes, chaque carte que l’on bouge met en péril l’équilibre de tout l’édifice et chaque mouvement peut faire s’écrouler tout le château. La bourgeoisie a beau utiliser la question nationale pour semer la division et détourner l’attention de la lutte des classes qu’elle est en train de mener, elle reste un défenseur absolu des Etats-nation existants. Elle n’acceptera que les Etats-nation soient brisés que si l’alternative est une révolution qui menace de renverser le capitalisme.
Et même dans ce cas-là, elle essaiera d’imposer au nouvel Etat-nation de rentrer dans le rang sur le plan économique – c’est-à-dire de poursuivre la politique d’austérité sur le dos de la majorité de la population – que ce soit via l’Union européenne, le Fonds monétaire international ou la Banque mondiale.
C’est pour cela que non seulement nous sommes en faveur de l’indépendance de la Catalogne mais également pour une Catalogne socialiste indépendante. L’arrivée au pouvoir d’un gouvernement de gauche sur base du mouvement indépendantiste, un gouvernement qui enfreint les diktats de l’Etat espagnol et de l’UE parce qu’ils rendent impossible une politique sociale serait un énorme stimulant pour la classe des travailleurs ailleurs en l’Espagne et en dehors. Dans un tel scénario, un mouvement de la base pourrait naître rapidement visant à une confédération des Etats socialistes ibériques, ce qui inspirerait la lutte des travailleurs dans toute l’Europe contre la politique d’austérité et le processus de décision anti-démocratique. Ainsi, une Europe de la base pourra être construite où équité et respect de la volonté seront centraux, tous comme les droits des minorités. Un mouvement qui puisse veiller à l’unité des travailleurs.
Nous ne soutenons les mouvements d’indépendance que si ces éléments sont réunis et alimentés par les masses et, surtout, la classe des travailleurs. Nous ne donnerons jamais notre soutien à un mouvement indépendantiste qui veut obtenir une amélioration pour ses “propres” travailleurs en imposant un appauvrissement à d’autres, comme la N-VA et le PDeCat le défendent. Nous pensons que l’histoire belge montre suffisamment que la question nationale ne sera jamais résolue sur base capitaliste. Commencée sous domination francophone, le français étant la langue de la bourgeoisie, pour arriver à une domination flamande au profit de cette même bourgeoisie, l’Etat capitaliste belge n’a jamais réalisé la libération de qui que ce soit, il n’a signifié qu’exploitation, oppression et discrimination.
Les ‘‘Estivales’’ du MR au parc d’attraction Walibi ont été de véritables réjouissances. Les dignitaires du parti ont pu s’y féliciter d’être arrivés au pouvoir dans un gouvernement régional, vanter la ‘‘gestion exceptionnelle du gouvernement fédéral’’ et promouvoir un accord d’été ‘‘équilibré’’ tout en se faisant prendre en photo avec une mascotte à laquelle ils n’auront pas manqué d’expliquer les vertus des flexijobs à 10 euros de l’heure… Cette atmosphère optimiste n’aura toutefois pas empêché Charles Michel de proférer une mise en garde : ‘‘Dans plusieurs pays, et en Belgique aussi, nous assistons au retour du communisme, qui écrase les libertés individuelles et a toujours entraîné plus de pauvreté et de régression sociale.’’ Cela n’a rien d’anodin.
Par Clément (Liège)
Un ‘‘printemps économique’’ très relatif
L’optimisme dont font preuve Charles Michel et Cie se fonde principalement sur le fait que les indicateurs économiques s’améliorent : preuve selon eux que trois ans d’attaques frontales portent leurs fruits. Cela doit cependant être fortement nuancé. La croissance de 1,7% annoncée pour 2017 et 2018 par le bureau du plan reste en-deçà de la moyenne pour la zone euro et l’union européenne (2% et 1,8%) (L’Echo, 07/09/2017) alors que jusqu’il y a peu, la Belgique avait plutôt tendance à se trouver au-dessus de cette moyenne.
A l’image de la politique du gouvernement, cette croissance conjoncturelle ne profite qu’au patronat et aux actionnaires, et n’inclut certainement pas les travailleurs. En 2016, les entreprises du Bel20 ont distribué 16,8 milliards de dividendes contre 14,2 milliards en 2015 : une augmentation de 18,3%(1). Dans le même temps, la part des salaires dans le PIB perdait 0,9%(2). Avec la baisse de l’impôt des sociétés d’une part ; l’extension de l’intérim et des flexijobs, et la casse du statut des travailleurs du service public d’autre part, l’accord d’été ne vise qu’à renforcer cette tendance.
Le libéralisme thatchérien de Michel garanti très certainement la liberté de quelques-uns de vampiriser la valeur créée par le travail, il en va autrement de celle de travailler pour vivre décemment. A partir des chiffres de l’INAMI, la FGTB souligne que le nombre d’emplois crées, loin des 135.000 annoncés par Charles Michel, serait plus proche de 90.000 parmi lesquels seulement 19.200 temps plein. Le taux de chômage devrait d’ailleurs connaitre une augmentation en 2018(3). Dans le cas d’une nouvelle crise ou d’une récession, ces emplois instables seront rapidement balayés, et la destruction des mécanismes de solidarité sociale ouvrira la porte pour une régression sociale sans commune mesure avec celle – pourtant brutale – que nous connaissons déjà.
Le gouvernement n’est pas si fort qu’il en a l’air
Le MR a beau s’affirmer comme une ‘‘force tranquille’’, cette force est relative et proportionnelle à la faiblesse de l’opposition. Une occasion de taille a été manquée lors du plan d’action de 2014 contre ce qu’on désignait alors la ‘‘coalition kamikaze’’. La dangereuse illusion selon laquelle après un gouvernement de droite dure suivrait mécaniquement un gouvernement de centre gauche s’est transformée en désillusion avec la manœuvre du CDH pour se rapprocher du MR et tenter de former de nouveaux gouvernements régionaux et communautaires.
Si le MR s’est trouvé un nouvel allié, ce dernier continue de baisser rapidement dans le sondage. Il n’est lui-même pas en si bonne forme puisqu’il s’y trouve en moyenne 4% en dessous de son résultat de 2014. La polarisation du paysage politique francophone doit d’ailleurs préoccuper Olivier Chastel lorsqu’il lance ses piques à ‘‘une gauche aux abois qui court vers les extrêmes en oubliant sa longue histoire sociale-démocrate’’.
La soif d’alternative qui s’exprime à travers les bons sondages en faveur du PTB doit constituer un véritable sujet d’inquiétude pour ce gouvernement. Il est conscient que les raisons objectives pour que le mécontentement passif qui s’exprime à travers les sondages se transforme en mobilisation active ne manquent pas. Un mouvement de lutte inclusif serait d’ailleurs la meilleure manière d’assurer que les revendications progressistes et la manière de les gagner soient largement discutées, tout en diminuant l’impact de la propagande de droite. La grève du 10 octobre constitue un premier pas pour rompre avec le fatalisme, et il est crucial d’en faire un succès.
Le PTB, première force de gauche en Wallonie, à un rôle important à jouer. La dynamique des nouvelles formations et figures de gauche à travers l’Europe a démontré l’importance des meetings de masse comme outil de discussion, d’échange et d’engagement. Une sorte ‘‘d’opération vérité’’ (qui riposterait aux mensonges du gouvernement en popularisant une alternative offensive) basée sur cette méthode aurait un impact énorme, non seulement pour dynamiser la lutte sociale, mais aussi pour clarifier le modèle de société dont nous avons besoin face au capitalisme et à ses crises. De la sorte, ‘‘le communisme’’ cesserait d’être un épouvantail agité par la droite, mais pourrait redevenir une idée mobilisatrice pour transformer la société.
Ce samedi 23 septembre, environ 150 personnes ont manifesté à Gand en faveur de transports en commun plus nombreux et moins chers dans la ville à la suite d’une campagne initiée par le PSL. Tout au long de la campagne de sensibilisation et de mobilisation, nos camarades ont pu constater que la colère était grande parmi la population vis-à-vis de l’état dans lequel se trouvent les transports en commun à Gand. Les bus et métro sont par exemple trop peu nombreux vers la périphérie de la ville et la zone portuaire. Pendant les heures de pointe, ils sont bondés. Il n’y a de plus quasiment pas de service durant la nuit… Les échos reçus pour cette campagne étaient très positifs. Les transports en communs doivent être considérés comme la première alternative à la voiture.
Cetta manifestation, qui comprenait également une délégation du PTB, a permis d’envoyer un signal clair aux autorités communales gantoises. Nos transports en commun exigent des investissements publics ! La ville de Hasselt a assuré la gratuité des transports en commun durant pas moins de 16 ans. Adopter une telle mesure à Gand serait purement et simplement une véritable révolution dans la manière dont les gantois envisagent leurs déplacements. Oui, des autorités locales peuvent prendre des décisions en matière de services publics, pour augmenter l’étendue du service et en rendre l’accès moins cher, et pour mettre pression sur la politique d’austérité du gouvernement flamand.
Le prochain rendez-vous en défense des transports en commun sera bien évidemment le 10 octobre prochain, lors de la grève des services publics appelée par la FGTB.