Category: Europe

  • Action de solidarité pour la reconnaissance syndicale des ambulanciers en Irlande

    Ce 21 octobre, des actions ont lieu aux ambassades irlandaises de plusieurs villes européennes afin de soutenir le combat des ambulanciers irlandais pour la reconnaissance de leur syndicat. « Our union, our choice » (Notre syndicat, notre choix), tel est leur slogan, en référence claire au slogan féministe « My body, my choice » (mon corps, mon choix). En Belgique, une action a également eu lieu à Bruxelles, face aux locaux de la représentation permanente de l’Irlande auprès de l’Union européenne. L’équipe de sécurité y a été jusqu’à refuser de prendre notre lettre de solidarité et a appelé la police !

    Cette action a été menée par des membres du PSL/LSP, la section belge du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), avec la présence de deux camarades d’Alternative Socialiste, section québécoise du CIO.

    D’autre part, la section de la CGSP pour les Administrations locales et régionales (ALR) de Bruxelles, dont des ambulanciers sont également membres, a également fait preuve de solidarité en votant une motion de solidarité que vous trouverez en cliquant sur le lien suivant.

  • Au Grand Duché aussi, on proteste contre l’invasion du Rojava !

    Des manifestations contre l’invasion du Rojava prennent place dans plusieurs pays et réunissent non seulement des Kurdes, mais aussi des militants anti-guerre, des syndicalistes, des féministes,… Ce fut également le cas ce lundi 14 octobre au Grand Duché du Luxembourg. Plusieurs centaines de personnes se sont réunies Place Clairefontaine. Des militants du PSL étaient également présents et y ont diffusé la déclaration de notre organisation-soeur en Turquie, Sosyalist Alternatif que vous pouvez consulter ici. (PDF de notre tract)

    Non à la guerre contre les Kurdes !

    • Arrêt immédiat de l’opération « Source de Paix » !
    • Les syndicats, les ONG et la gauche, en Turquie et au niveau international, doivent organiser des manifestations contre la guerre !
    • Suppression du soutien à tous les groupes djihadistes, qu’il s’agisse de l’Armée Syrienne Libre ou de l’Armée Nationale Syrienne !
    • Toutes les forces impérialistes hors du Moyen-Orient !
    • Défense du droit à l’autodétermination des Kurdes et de tous les groupes opprimés !
    • Pour l’unité de tous les travailleurs, paysans, jeunes et femmes du Moyen-Orient – contre toute discrimination fondée sur la religion, la langue, ou le genre, toutes et tous sous la bannière du socialisme !
    • Vive la solidarité internationale des travailleurs !
    • Pour une confédération socialiste démocratique et volontaire du Moyen-Orient.

  • Catalogne: Il faut intensifier la lutte! Grève générale maintenant!

    Construisons le mouvement démocratiquement à partir de la base!

    L’État espagnol a condamné à de longues peines de prison pour “sédition” les prisonniers politiques catalans, les anciens responsables du gouvernement et des institutions catalanes ainsi que les dirigeants des organisations indépendantistes. Il s’agit d’un événement extrêmement grave, presque sans précédent dans l’histoire récente de l’Europe occidentale, qui intervient également pendant la campagne pré-électorale pour les élections générales de novembre dans l’État Espagnol.

    Par Socialismo Revolucionario (CIO dans l’État espagnol)

    Les dirigeants du bloc de droite (PP, Ciudadanos et Vox) appellent à une interdiction des partis indépendantistes catalans et à d’autres mesures anti-démocratiques. Pour sa part, le président du gouvernement par intérim, Pedro Sánchez, du PSOE (social-démocratie), joue également la carte électoraliste de la répression contre la Catalogne. Il a parlé de “respect de la peine” et de “l’exécution de l’intégralité” de ces peines (sans libération conditionnelles) allant de 9 à 13 ans de prison pour neuf des douze condamnés.

    La seule réponse possible de la jeunesse et de la classe ouvrière catalane est d’organiser une grève générale pour la défense des droits démocratiques et du droit du peuple catalan de décider de son avenir. L’attaque contre les droits démocratiques de la Catalogne est une attaque contre l’ensemble de la classe des travailleurs de l’État espagnol et une réponse claire doit y être donnée.

    Tout le monde suit les événements en Catalogne, comme ils ont suivi le mouvements de masse à Hong Kong. Et sans aucun doute, les dizaines de milliers de personnes qui ont marché jusqu’à l’aéroport de Barcelone El Prat ont été inspirées par les manifestations de masse à Hong Kong.

    La police espagnole a été aussi brutale que celle de Hong Kong. Les “démocraties” occidentales et la dictature chinoise utilisent des méthodes violentes similaires lorsque les intérêts du capitalisme sont menacés. L’UE défend la répression exercée par l’État espagnol sur la Catalogne et n’apporte aucun soutien à la lutte pour les droits démocratiques à Hong Kong.

    La lutte contre l’oppression est internationale et ces leçons sont apprises en particulier par les jeunes. Il est inspirant que les mouvements de masse en Europe et en Asie apprennent les uns des autres. La seule solidarité internationale que nous souhaitons vient d’en bas, pas des présidents ni des gouvernements capitalistes!

    Grève générale maintenant en Catalogne et actions de solidarité de toutes les organisations de la classe des travailleurs de l’État espagnol !

    De nombreuses manifestations de milliers de personnes ont eu lieu lundi en Catalogne. Ces manifestations de masse ont déjà bloqué les autoroutes, les voies ferrées et l’occupation de l’aéroport de Barcelone a bloqué ses accès et entraîné l’annulation de plus de 100 vols.

    Nous devons maintenant bloquer toute la Catalogne avec une grève générale comme point de départ d’une lutte continue. Les étudiants ont déjà quitté leurs cours pour aller manifester dès l’annonce des peines et une grève étudiantes de trois jours est convoqué à partir de mercredi. Nous devons tous nous arrêter de travailler vendredi pour la grève générale!

    Ce mouvement semi-spontané et d’en bas doit être organisé et avoir une direction claire. Notre force est dans les rues et notre arme est la grève générale. Les Comité de défense de la République (CDR) doivent être reconstruit où et quand c’est nécessaire et des réunions de masse doivent être organisées dans les écoles, les universités, les lieux de travail et les quartiers. Des comités démocratiques locaux doivent être créés pour diriger le mouvement. C’est trop important pour laisser cela aux mains de politiciens professionnels qui ont malheureusement montré par le passé qu’ils préféraient que les gens ne descendent pas dans la rue. Nous avons besoin que ces comités locaux organisés démocratiquement s’étendent à travers toute la Catalogne pour développer sérieusement la lutte et devenir la direction du mouvement.

    Le mouvement doit également parler du type d’indépendance pour lequel nous nous battons. Les travailleurs et les jeunes de Catalogne se révoltent contre la répression de l’État espagnol et pour le droit de décider de leur avenir. Mais pour quelle sorte de Catalogne se battent-ils? Nous défendons une Catalogne libre non seulement de la répression de l’État, mais aussi de toute oppression économique et sociale, de la fin du régime de 78 et de système capitaliste qui la soutient. Gagner tous les travailleurs catalans à ces revendications et inspirer les travailleurs dans tout l’État espagnol est essentiel pour obtenir une victoire.

    Une nouvelle phase du mouvement pour l’indépendance a été franchie et il ne peut y avoir de retour en arrière. C’est une période où toute la gauche, le mouvement ouvrier et les mouvements sociaux doivent s’unir et s’opposer au régime antidémocratique. Ce n’est pas le moment de parler de “respect de la loi” mais de rébellion ouvrière et populaire contre le système capitaliste et franquiste.

    Malheureusement, la position de Pablo Iglesias est abstraite et utopique et constitue une grave erreur historique: “Tout le monde devra respecter la loi et assumer la peine”, mais désormais “il est temps de se ressaisir et d’œuvrer à la reconstruction des ponts entre une société catalane divisée, une partie de la société catalane et une société espagnole.” Il faut, selon ses mots, chercher “le chemin de la réconciliation”.

    Comment peut-il y avoir une “réconciliation” avec les partis politiques de droite qui emprisonnent les gens pour leurs idées? L’État espagnol tente de criminaliser le peuple catalan et quiconque exprime son droit à l’autodétermination et à l’indépendance. On ne peut permettre que cela continue et la gauche et le mouvement syndical doivent s’opposer à cette injustice. Il ne peut y avoir aucun respect pour un système judiciaire qui opprime le peuple.

    La gauche doit avoir une vision très claire de ce qui est en jeu en Catalogne. Des mesures antidémocratiques et franquistes sont déjà prises contre la jeunesse d’Altsasu, les grévistes qui participent à des piquets de grève, des tweeters et des rappeurs, et continueront d’être utilisées contre la classe ouvrière dans ses futurs luttes, à moins d’une réponse claire maintenant.

    • Soutenons la grève étudiante de 72 heures!
    • Pour une grève générale en Catalogne!
    • Pour l’organisation d’actions de solidarité dans tout l’État espagnol et internationalement!
    • Liberté pour les prisonniers politiques catalans!
    • Stop à la répression de l’État espagnol et pour le retour des exilés politiques!
    • Pour la défense des droits démocratiques!
    • Pour le droit à l’autodétermination!
    • Pour une république socialiste catalane!
    • Pour une confédération sur base libre et volontaire des peuples de l’État espagnol et de la péninsule ibérique, dans le cadre d’une confédération socialiste d’Europe!
  • Actions de solidarité avec le mouvement de masse en Catalogne

    Des actions de solidarité avec le mouvement de masse en Catalogne ont pris place ce lundi et mardi à Bruxelles rassemblant respectivement 150 et 250 participants. Nous avons pris part à la manifestation de ce mardi qui a marché de la Commission européenne à l’ambassade d’Espagne. La colère et la combativité sont grandes suite à l’annonce des scandaleuses sentences contre les prisonniers politiques catalans.

    Notre présence à été bien accueillie et plusieurs personnes nous on remercié pour notre solidarité tout en se déclarant défavorables à la présence de la N-VA dans ces actions, ce qu’elles perçoivent comme un élément étranger à leur mouvement. Contrairement à la N-VA, le PSL n’essaie pas de défendre les intérêts des capitalistes mais bien ceux des masses laborieuses. La sympathie d’une partie de la direction formelle du mouvement indépendantiste catalan pour la N-VA renforce le manque de compréhension auprès des travailleurs belges du caractère progressiste de la lutte des masses en Catalogne pour les droits démocratiques et le droit de décider de leur avenir. Le mouvement des travailleurs et des jeunes doit exprimer sa solidarité avec la grève étudiante de 72h qui débutera ce mercredi et avec l’appel à une grève générale ce vendredi en Catalogne. Le mouvement des catalans en Belgique doit s’orienter vers le mouvement ouvrier pour y chercher un appui et non pas se bercer dans de faux espoirs entretenus envers l’establishment de l’Union Européenne qui soutient la répression contre le peuple catalan.

  • L’Autriche après les élections

    En mai 2019, le gouvernement autrichien s’est effondré. Cette coalition qui réunissait l’extrême droite (le FPÖ) et le parti conservateur (ÖVP) n’a pas survécu à un scandale de corruption autour du vice-chancelier de l’époque et dirigeant du FPÖ, Heinz-Christian Strache. Sebastian Kurz, arrivé à la tête de l’ÖVP avant les élections de 2017, a orienté son parti vers le populisme de droite du FPÖ tout en essayant préserver un profil sérieux et favorable aux grandes entreprises.

    Par Sebastian Kugler, Sozialistische LinksPartei (SLP, CIO-Autriche)

    Ces dernières ont forcé Kurz à mettre fin à la coalition ÖVP-FPÖ et à appeler à la tenue d’élections anticipées à l’automne. Il a ensuite perdu un vote de défiance – une première depuis la fondation de la république – ce qui signifiait la mise en place d’un gouvernement technocratique d’”experts”.

    Mais cela n’a pas affaibli Kurz à l’approche des élections anticipées. Les couches les plus bourgeoises des partisans du FPÖ se sont tournées vers l’ÖVP, désormais quasiment aussi raciste que le FPÖ mais plus “sérieux”, tandis qu’il n’y a pas eu d’opposition sérieuse de la part du mouvement syndical et de la gauche. L’ÖVP a donc remporté une victoire décisive. Kurz a remporté 37 % des voix en bénéficiant d’une confortable et historique marge de 15 % sur le deuxième parti.

    Mais cela rend la formation d’un nouveau gouvernement encore plus compliquée. L’aile ouvertement pro-big business du FPÖ, regroupée autour de Norbert Hofer, souhaite poursuivre la coalition et son programme politique pour les super riches même si les pertes électorales du FPÖ s’élèvent à 10%. Mais Hofer a dû céder à la pression d’autres forces au sein de son parti, autour d’Herbert Kickl, qui souhaitent que le parti d’extrême droite se refasse une santé dans l’opposition.

    Kurz a ouvertement défendu la poursuite de la politique du dernier gouvernement. Il regrette toutefois que “le FPÖ ne soit pas à la hauteur”. En ce sens, Kurz fait écho à l’atmosphère qui domine au sein des principales grandes entreprises autrichiennes. Ces dernières se sont félicitées des coupes budgétaires et des attaques brutales contre les droits des travailleurs du dernier gouvernement ainsi que de son offensive idéologique nationaliste.

    Théoriquement, Kurz pourrait entrer en coalition avec le SPÖ “social-démocrate” arrivé en deuxième position. Mais les 22% obtenus par le SPÖ marquent un nouveau plancher historique pour ce parti. Son déclin semble irréversible et une nouvelle crise est à l’œuvre en son sein. Certains de ses membres appellent à une “refondation” et à un “retour aux sources” de la social-démocratie. Mais ces appels manquent d’une base sérieuse prête à agir avec un programme qui défie l’appareil du parti. Il y a de grandes chances que cela ne soit qu’une tempête dans un verre d’eau, comme cela fut le cas lors des dernières crises de cette sorte.

    Le SPÖ serait prêt à entrer au gouvernement, même au prix d’une nouvelle descente aux enfers électorale. Cette force politique est celle qui incarne le plus la “stabilité politique” de l’Etat bourgeois. N’ayant pas de racines historiques au sein d’une faction précise des capitalistes, il se considère comme la représentation politique idéale du capital national dans son ensemble, comme le parti de l’État. Pour le bien de la “stabilité”, il est prêt à se sacrifier, à l’instar de l’Allemagne où le SPD est entré dans une coalition en sachant pertinemment que cela aurait un coût. Mais puisque Kurz a conçu l’ensemble de son projet politique en se différenciant du SPÖ, s’allier à lui pour former un gouvernement ressemblerait à un désaveu.

    La coalition FPÖ-ÖVP est arrivée au pouvoir pour mettre fin à la lenteur des gouvernements traditionnels de l’ÖVP et du SPÖ. La base du pouvoir du SPÖ repose sur un “partenariat social” institutionnalisé entre syndicats et capital. Ce parti s’est avéré être un allié fiable pour la politique d’austérité, pour autant que cette dernière ne sape pas la base matérielle du pouvoir de la direction du SPÖ ni la stabilité politique de l’Etat.

    Cela a mis certaines limites à la rapidité et à l’intensité de l’austérité et a nourri les souhaits d’un gouvernement reposant sur la ” doctrine du choc” pour que l’offensive antisociale passe à un autre niveau. Le dernier gouvernement s’y est employé, en instaurant la journée des 12 heures (il est désormais légal de travailler plus d’heures supplémentaires, jusqu’à 12 heures par jour soit 60 heures par semaine) et en restructurant l’assurance maladie publique dans le but d’”économiser de l’argent” (c’est-à-dire de réduire la prestation de service). Mais il a également démontré son incapacité à garantir la stabilité. Il semble maintenant que le capital préfère affronter la prochaine crise économique avec un gouvernement moins audacieux, mais plus fiable.

    La vague verte

    Le parti vert, après avoir été expulsé du Parlement lors des élections de 2017, a célébré son retour triomphal avec un des meilleurs résultats pour un parti vert en Europe à ce jour. Cependant, ce succès n’est pas tant le fait des Verts que d’un facteur externe : le mouvement mondial pour le climat, qui a suscité une large prise de conscience sur les questions environnementales. Même si la politique concrète du parti – qui était encore représenté dans de nombreuses collectivités locales et régionales – n’est en aucun cas vraiment “verte”, elle a été considérée comme le choix logique de beaucoup de ceux qui ont été influencés ou actifs dans le mouvement. Un facteur était que l’aspiration à une opposition de gauche a été projetée sur le parti “manquant” au Parlement puisque le SPÖ ne prétendait même pas en être une.

    Un gouvernement ÖVP-vert serait favorablement accueilli par différentes couches de la société. Certains pourraient même penser que les Verts pourraient quelque peu “dompter” les conservateurs. Ces illusions pourraient être nourries par la flexibilité de Kurz sur certains terrains. Kurz est un caméléon néolibéral : il a déjà essayé de se faire passer comme un progressiste sur les questions de migration et de genre, puis a complètement changé de position. Un tel gouvernement ne copierait pas la politique hardcore d’austérité ouvertement raciste de son prédécesseur, mais il ne reviendrait pas non plus sur aucune des coupes budgétaires de la dernière période. Bien au contraire.

    Ce gouvernement entrera en fonction dans le cadre d’un capitalisme entré en période de turbulences de plus en plus aiguës. Et il devra servir les intérêts du capital. Compte tenu de la forte dépendance de l’économie autrichienne à l’égard des exportations, tout particulièrement vers l’Allemagne, cela se traduira par une baisse des coûts de production pour rester compétitif sur les marchés internationaux. Parallèlement, la crise à venir va accroître la nécessité d’un certain type d’intervention de l’État. Non pas dans le sens de mesures keynésiennes anticycliques visant à stimuler la consommation, il s’agira plutôt de plans de sauvetage pour les entreprises et de plans de relance pour certaines pans de l’industrie autrichienne hautement spécialisées dans certains domaines afin de leur donner un avantage commercial. Il pourrait même s’agir d’investissements dans les énergies “vertes”, mais pas d’une nature suffisante pour assurer une véritable transition vers les énergies renouvelables.

    Les résultats électoraux ne sont qu’un instantané des développements en cours. Ils n’ont pas reflété la prise de conscience croissante selon laquelle l’establishment politique ne résoudra pas ni la crise climatique, ni la crise sociale. Ces dernières années, nous avons assisté à la renaissance de grèves dans le secteur de la métallurgie et chez les cheminots. Dans le secteur social, des grèves éclatent depuis deux années consécutives, ce qui rend les choses très difficiles à contrôler pour la bureaucratie syndicale. Les infirmières ont commencé à s’organiser de façon indépendante pour arracher de meilleures conditions de travail et mettre leurs dirigeants syndicaux au pied du mur. Des milliers de personnes ont participé aux manifestations hebdomadaires contre le gouvernement précédent au cours de l’année écoulée. 120.000 personnes ont manifesté le même jour contre les 12 heures de travail. C’était à l’époque la plus grande mobilisation que l’Autriche ait connue depuis des décennies, mais ce nombre a été dépassé par les 150.000 manifestants de la 3e journée de grève internationale pour le climat de septembre dernier.

    Nous avons besoin d’une alternative de gauche combative

    Le désir d’un nouveau parti de gauche devient de plus en plus concret, tout particulièrement parmi les activistes. C’est un pas dans la bonne direction et nous nous en félicitons. Mais il ne suffit pas de proclamer la nécessité d’un nouveau parti des travailleurs : nous devons montrer comment une telle force peut être construite. A l’approche de plusieurs élections régionales, les luttes et mouvements mentionnés ci-dessus doivent constituer le point de départ de la gauche pour développer une alternative viable sur le terrain électoral. Cela implique de rompre avec la tradition de vagues alliances électorales de gauche conclues bureaucratiquement dans les coulisses autour du vieux parti communiste KPÖ.

    Si les activistes des divers mouvements de lutte et les groupes politiques qui y ont joué un rôle constructif formaient des alliances pour les prochaines élections, cela pourrait représenter un pas dans la direction d’un nouveau parti des travailleurs, même sans bénéficier d’un grand succès électoral au début. L’intensification des luttes syndicales ainsi que les syndicalistes et délégués syndicaux combattifs qui s’organisent aux côtés de la bureaucratie syndicale, et parfois contre elle, pourraient affaiblir celle-ci et faire place à une nouvelle couche de syndicalistes militants prêts à mettre fin à la mainmise suffocante du SPÖ sur les syndicats.

    Le Sozialistische LinksPartei (section autrichienne du CIO) s’est présenté aux dernières élections dans l’État de Haute-Autriche, non pas en ayant l’illusion de pouvoir entrer au Parlement, mais dans l’objectif d’utiliser le caractère politisé de la période électorale afin de défendre un programme socialiste et de nous renforcer. Avec plusieurs nouveaux membres et un profil plus fort, l’effort sera payant. Dans la rue, sur les lieux de travail et sur les bulletins de vote, le Sozialistische LinksPartei s’impliquera dans les mois à venir pour construire une alternative ouvrière au prochain gouvernement des riches, quel qu’il soit.

  • 20.000 personnes à Paris pour la marche pour le climat

    Ce samedi 21 septembre, 20.000 personnes ont participé à la marche pour le climat à Paris, dans le cadre d’une “grève de la terre ” internationale qui a mobilisé plus de 4 millions de personnes dans le monde. Le même jour, les Gilets Jaunes avaient également organisé leur 45ème journée d’action.

    Par Tim (Gand)

    Les “Gilets Jaunes” ont été empêchés de se rassembler le matin en raison d’une importante présence policière qui a occupé les principaux points de rencontre de leurs manifestations. Environ 7.500 policiers étaient mobilisés dans la capitale française. Tous ceux qui étaient ne fut-ce que légèrement soupçonnés de faire partie des mobilisations des Gilets Jaunes ont été arrêtés ou dispersés par l’utilisation de grandes quantités de gaz lacrymogènes.

    Dans l’après-midi, les manifestants pour le climat se sont réunis dans le centre-ville, où ils ont été rejoints par certaines des couches les plus conscientes du mouvement des Gilet Jaunes. Plusieurs milliers de personnes étaient présentes pour souligner le lier entre leurs protestations contre les prix élevés et les bas salaires, d’une part, et la nécessité d’une action urgente pour sauver la planète, d’autre part. Les slogans appelaient à faire payer les riches et les multinationales pour la crise climatique et à changer le système. Ces slogans étaient corrects et constituent un bon point de départ pour débattre du type de société dont nous avons besoin pour sauver la planète et garantir des conditions de vie décentes à chacun.

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) était présent avec du matériel soulignant que l’écrasante majorité de la pollution est causée par un petit groupe de multinationales. Nous avons souligné que les ressources et la technologie existent pour assurer une reconversion économique efficace et immédiate afin de sauver la planète. Le système capitaliste assure que cette richesse et ces technologies soient contrôlées par une infime élite de capitalistes fortunés, ce qui rend impossible leur mobilisation pour l’effort climatique.

    Sous le pression du mouvement pour le climat, divers gouvernements à travers le monde ont déclaré l’urgence climatique, sans toutefois prendre de mesures efficaces pour sauver le climat. Les seules mesures qui sont prises visent à faire payer la crise à la classe ouvrière, par exemple par de nouvelles taxes.

    La classe ouvrière a le pouvoir de changer la société. Le mouvement ouvrier organisé a le pouvoir de paralyser l’ensemble de la société s’il se mobilise efficacement. Ce pouvoir s’est avéré capable de forcer les classes dirigeantes à faire de profondes concessions à la classe ouvrière, et c’est le seul moyen efficace de forcer les capitalistes et leurs politiciens à prendre des mesures climatiques efficaces dans l’intérêt de la majorité de la population. La manière la plus efficace d’y parvenir est de remplacer le système capitaliste actuel, qui repose sur la cupidité et les profits de quelques-uns, par une société socialiste basée sur les besoins réels de la population et de l’environnement.

    Par conséquent, il est crucial que le mouvement pour le climat se lie à la classe ouvrière organisée et au mouvement syndical. Il était problématique que les dirigeants des syndicats français aient refusé de mobiliser pour cette manifestation. Des militants syndicaux étaient présents à titre individuel, sans aucune mobilisation organisée. C’était également vrai concernant les principaux partis de gauche en France : ni la France Insoumise ni le NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste) n’avaient de délégations dans la manifestation, et nous étions l’une des rares organisations révolutionnaires de gauche à intervenir avec du matériel politique.

    Cette absence de partis politiques et de syndicats a également eu un effet sur la conscience dans la manifestation. Nous avons pu constater une grande ouverture à nos idées, mais il existait une très forte atmosphère antiparti et antisyndicale parmi de nombreux participants.

    Malgré cela, notre intervention a été couronnée de succès : nous sommes intervenus avec une équipe internationale enthousiaste composée de camarades belges, allemands, suédois, anglais, irlandais et français, et nous avons vendu les 100 exemplaires de notre journal français spécialement produit pour cette occasion de même que 12 exemplaires de la version française de notre journal belge, Lutte Socialiste. Avec cette intervention, nous avons réanimé la tradition du CIO d’organiser des mobilisations internationales afin d’intervenir dans des événements importants ou d’aider à construire des sections plus petites de notre Internationale.

    Le CIO est ouvert à tous ceux qui veulent lutter avec nous pour une société socialiste ainsi que contre la dictature barbare du capital et ses guerres et catastrophes écologiques. Rejoignez-nous !

    Voici ci-dessous le texte d’un des tracts qui accompagnait nos journaux et qui abordait plus spécifiquement la thématique des Gilets Jaunes.

    STOP À LA POLITIQUE POUR LES RICHES Organisons la colère et orientons?là vers tout le système !

    10 mois après le début du mouvement, à quelques mesurettes près, rien n’a changé concernant nos conditions de vie. Elargissons la lutte à tous ceux qui souffrent de la politique pro?riches menée par les élites économiques et politiques !

    CONSTRUISONS L’UNITÉ FACE AU CAMP D’EN FACE

    Le mouvement ouvrier doit s’engager dans la lutte

    Si le mouvement ouvrier utilise son outil de travail comme outil de combat, il est capable de jouer un rôle primordial pour un changement réel de système. Il pourrait aider à l’organisation d’une véritable grève générale qui bloquerait toute l’économie et ferait extrêmement mal aux grands capitalistes et à leurs relais politiques. Il permettrait aussi de davantage structurer le mouvement et de s’organiser contre la répression.

    Malheureusement, plusieurs directions syndicales ont refusé de soutenir le mouvement. Mais ce n’est pas le cas partout. En France, le mouvement est le plus fort justement là où il y a une convergence. Comme à Toulouse où le blocage a été massif à plusieurs reprises, aussi grâce au renfort des syndicats de routiers.

    Les organisations du mouvement ouvrier doivent entrer en action, avec et aux côtés des Gilets Jaunes. Elles doivent rejoindre la lutte avec respect, sans donner de leçons, en tenant compte du fait que la direction syndicale a miné son autorité auprès d’une grande partie de la classe ouvrière.

    Structurer la lutte et l’orienter contre le système permettraient de s’opposer plus efficacement aux tentatives de division de la protestation. Cela permettrait de contrer les provocations policières qui ont pour but de criminaliser notre mouvement, et aussi les frustrations de gens bloqués, voire même de certains d’entre nous qui, sans perspective pour aller vers une victoire, peuvent se laisser entrainer par les provocateurs policiers. Depuis le début du mouvement, de nombreuses références ont été faites à Mai 68. Au plus fort de ce mois de révolution, c’était la combinaison de la jeunesse en lutte et de la grève générale de 10 millions de travailleurs qui avaient failli faire tomber le système. Un tel type de lutte pourrait arracher nos revendications.

    Faisons le lien avec le milieu syndical, pour organiser une grève générale qui puisse bloquer l’économie de l’intérieur La lutte pourrait s’organiser, sur base d’assemblées locales qu’il faudrait développer localement et nationalement. Elargissons nos grandes journées de lutte, d’action, et de blocages avec une grève générale unissant travailleurs du public et du privé avec les jeunes et les retraités contre la politique de Macron.

    Exigeons :

    • La baisse immédiate et le blocage des prix de l’essence et de l’énergie ;
    • L’augmentation des salaires et des allocations sociales et leur indexation sur les prix, y compris du carburant ;
    • Mettre les besoins au centre de la politique : transports publics gratuits et non polluants, services publics (notamment de proximité : crèches, écoles, maternités, bureaux de poste, logements publics sociaux, …),
    • La remise en place de l’impôt sur la fortune, la lutte contre l’évasion fiscale par les ultra?riches et les multinationales, y compris par la réquisition sous contrôle démocratique, la fin des taxes indirectes (TVA, etc.) remplacées par une imposition forte des riches et des grandes entreprises ;
    • Un grand service public environnemental pour créer des centaines de milliers d’emplois nécessaires à la transition énergétique et écologique (agriculture écologique, alimentation en circuits courts, énergies renouvelables, …)
    • Un tel programme nécessite des mesures réellement socialistes telles que la nationalisation et l’unification de tous le secteur financier dans un service national d’investissement et de financement sous contrôle démocratique de la collectivité ; la nationalisation des secteurs?clés de l’économie afin que les grandes entreprises ne puissent continuer à saboter la transition écologique et que la planification démocratique et écologique, basée sur les besoins y compris écologiques, devienne possible.

     

  • Grande-Bretagne. Suspension du Parlement: Luttons pour des élections générales immédiates !

    • Non au putsch de Boris Johnson ! Pour des manifestations de masse réunissant les syndicats, le mouvement des grèves climatiques et tous ceux qui s’opposent à cette atteinte aux droits démocratiques !
    • Nous ne pouvons pas faire confiance aux députés capitalistes pour protéger les travailleurs et les jeunes d’un Brexit conservateur sans accord ! Luttons pour des élections générales et un gouvernement travailliste dirigé par Corbyn autour de politiques socialistes !
    • Pour une sérieuse riposte syndicale contre toute menace de licenciement, de fermeture ou de coupe budgétaire !
    • Non à un Brexit conservateur – qu’il y ait un accord ou non ! Opposons-nous à l’UE capitaliste ! Développons une véritable solidarité et une résistance coordonnée aux politiques capitalistes à travers l’Europe !
    • Pour une Angleterre, un Pays de Galles et une Ecosse socialistes faisant partie d’une fédération socialiste d’Europe et d’un monde socialiste, où les ressources seraient détenues et planifiées démocratiquement !

    La crise politique britannique a atteint un nouveau sommet lorsque Boris Johnson a annoncé que le Parlement sera suspendu pour cinq semaines, mesure désormais “approuvée” par la Reine. Lors de son premier acte en tant que premier ministre, Boris Johnson a accéléré l’attaque parlementaire en cours depuis longtemps au sujet de Brexit.

    Par Becci Heagney (Socialist Alternative, CIO – Angleterre et Pays de Galles)

    Johnson prétend que cette suspension s’explique en raison du ‘‘retard’’ d’un discours de la Reine, par le fait que cette session parlementaire est la plus longue depuis 400 ans ainsi qu’au vu de son intention de présenter une législation “audacieuse et ambitieuse”, comprenant notamment un meilleur financement du NHS (National Health Service, le système de soins de santé publics du Royaume-Uni). Cependant, il est évident que le véritable objectif de Johnson est de sauver sa peau en tentant d’éviter un vote de défiance et en empêchant les députés de voter contre un Brexit sans accord.

    Le Parlement sera suspendu jusqu’au 14 octobre, quelques jours avant le sommet européen où Johnson espère obtenir un nouvel accord, les 17 et 18 octobre. Il ne resterait alors plus que deux semaines avant que la Grande-Bretagne ne quitte l’UE, le 31 octobre. Cela signifie en réalité que le Parlement ne pourra pas discuter du Brexit avant le sommet de l’UE, ce qui laisse peu de temps pour qu’un nouvel accord soit discuté et voté.

    Johnson représente une petite partie du parti conservateur et de la population dans son ensemble. La majorité de la classe capitaliste est désespérée et opposée à l’approche de Johnson pour qui “pas d’accord vaut mieux qu’un mauvais accord”. Quand Theresa May a été nommée chef de file et première ministre, c’était dans le but d’obtenir un accord pour un « Brexit mou ». Elle a été forcée de faire un pas de côté lorsqu’il s’est avéré impossible d’obtenir cela au Parlement.

    La direction du Parti travailliste a hésité à appeler un vote de défiance à l’égard de Boris Johnson. Pas plus tard que ce 28 août, des pourparlers entre les partis de l’opposition ont rejeté l’idée d’un vote de défiance et ont plutôt opté pour des mesures “législatives” afin d’essayer d’empêcher l’arrivée d’un Brexit sans accord. Quand la suspension du Parlement a été annoncée, la chose a choqué de nombreux députés travaillistes qui ont réagi en demandant que le parlement soit occupé et que les gens descendent dans la rue pour “arrêter le putsch” et “défendre la démocratie”.

    D’énormes protestations contre Johnson doivent prendre place et Jeremy Corbyn et le parti travailliste doivent y appeler, avec le soutien et la mobilisation des syndicats. Mais non pas autour du mot d’ordre de “pas de suspension du Parlement” : il faut exiger la chute de Johnson et des Conservateurs et l’organisation immédiate d’élections générales !

    En vérité, de nombreux députés de tous les partis essaient de marcher sur une corde raide. Ils veulent d’un côté éviter un Brexit sans accord ou même revenir sur la décision obtenue par référendum et ainsi rester au sein de l’UE. De l’autre côté, ils ne veulent pas que de nouvelles élections générales soient organisée puisqu’il est fort probable qu’elles seraient remportée par Jeremy Corbyn et qu’il devienne Premier ministre. La perspective de la formation d’un gouvernement d’”unité nationale” pour mettre un terme au “no deal” est inhérente à cette situation. Ou alors, en dépit de sa rhétorique, Johnson pourrait conclure un accord qui pourrait être imposé au Parlement.

    Tous les partis se préparent pour de probables élections générales en novembre. Boris Johnson soit un vote de défiance, soit à l’effondrement du gouvernement britannique suite à la sortie de l’UE sans un accord. Auparavant, plus de vingt députés conservateurs avaient averti qu’ils voteraient contre Johnson lors d’un vote de confiance. Sur cette base, il se présenterait au pays en présentant les choses comme étant un combat du “peuple contre le parlement”, en argumentant que les députés de Westminster essaient de stopper le Brexit. En concluant une sorte d’alliance électorale avec Nigel Farage (ancien fondateur de l’UKIP et fondateur du Parti Brexit) et le Parti Brexit, cela pourrait certainement trouver un écho. La situation pourrait s’aggraver si Jeremy Corbyn et le Parti travailliste ne disposent pas d’une position claire au sujet du Brexit.

    Les socialistes doivent se battre pour une élection où la classe ouvrière affronte l’establishment capitaliste. Nous devons nous battre pour défendre tous les emplois et services menacés par un Brexit désordonné, y compris par la nationalisation de toute entreprise qui menace de quitter le pays, sous contrôle et gestion démocratiques des travailleurs. Étant donné que cette polarisation politique risque d’engendrer des tensions, nous devons également lutter contre le racisme et défendre les droits des migrants tout en faisant campagne contre les règlements et les directives anti-travailleurs de l’Union européenne.

    Sur cette base, et avec un programme politique similaire à celui de 2017 (gratuité de l’enseignement, renationalisation d’entreprises privatisées,…), Jeremy Corbyn pourrait rentrer dans ces élections générales avec l’engagement de rouvrir les négociations avec l’UE pour négocier un Brexit dans l’intérêt des travailleurs.

    Quoi qu’il ressorte des semaines à venir, il est clair que nous ne pouvons pas compter sur le Parlement. Le fait que le Parlement puisse être suspendu par la Reine, cheffe d’État non élue, expose la réalité antidémocratique de notre système politique. Quel que soit l’accord négocié ou non par Johnson sur le Brexit, les travailleurs devront s’organiser pour défendre les emplois et repousser l’austérité à la suite d’une crise économique provoquée par un Brexit désordonné. La suspension du Parlement représente un signe de faiblesse de ce gouvernement. Il ne tient qu’à un fil. Nous pouvons faire chuter ce gouvernement en commençant par des manifestations dans tout le pays et avec une mobilisation de masse à Manchester lors de la conférence du Parti conservateur du 29 septembre.

  • Retour sur l’échec du gouvernement de gauche PS-PCF sous la présidence de François Mitterrand

    France, 1981-1984 : de l’espoir au ‘‘tournant de la rigueur’’

    10 mai 1981. A Paris, 200.000 personnes se rassemblent à la Bastille et crient leur joie. Des scènes de liesse éclatent dans toutes les villes du pays. François Mitterrand vient de remporter le 2e tour du scrutin présidentiel avec 52% des voix. Pour la première fois de l’histoire de la Ve République (instaurée en 1958), c’est un président de gauche qui est élu. Exprimant l’effroi patronal, le quotidien de droite Le Figaro écrivait au lendemain des élections : “Le collectivisme d’inspiration marxiste est désormais à nos portes”. Et pourtant…

    Par Boris (Bruxelles)

    La conquête du pouvoir

    François Mitterrand avait été ministre à 11 reprises sous la IVe république (1946-58), il n’avait rien d’un révolutionnaire, mais avait bien remarqué à quel point les événements de Mai 68 avaient profondément radicalisé les travailleurs. Lorsqu’il prend la tête du tout nouveau Parti Socialiste (PS) en 1971, il l’engage sur la voie d’une alliance électorale avec le Parti Communiste Français (PCF) qui, en freinant les grèves de ’68, avait démontré qu’il savait rester dans les limites du système.

    En 1972, l’Union de la Gauche est constituée autour d’un programme commun réunissant le PS, le PCF et le Mouvement des radicaux de gauche (MRG) et reposant sur des réformes sociales et la nationalisation de neufs grands groupes industriels ainsi que du crédit. Chez les patrons et les riches, on craint le pire, d’autant plus qu’éclate peu après la crise économique de 1973-74. Les fermetures d’usine et les licenciements massifs s’enchaînent, un nouveau phénomène fait son apparition : le chômage de masse. Entre 1974 et 1981, le nombre de chômeurs triple et atteint le million et demi.

    Le programme commun n’est hélas pas utilisé pour aider à construire une relation de force pour la lutte. Le PS, le PCF et les directions syndicales détournent au contraire celle-ci pour tout miser sur une victoire électorale de la gauche. Ainsi, en 1978-79, lorsqu’éclate une révolte ouvrière de quatre mois en Lorraine et au Nord-Pas-de-Calais contre le licenciement de 21.000 sidérurgistes, Mitterrand promet simplement, une fois élu, de rouvrir les bassins sidérurgiques fermés. Les sidérurgistes payeront chèrement la désorganisation de la lutte.

    Aux élections de 1976 et 1977, le PCF est devancé par le PS. Désireux de regagner sa position de première force de gauche, le parti quitte l’Union de la Gauche et justifie son départ en raison du nombre insuffisant de nationalisations prévues. Dans les rangs du mouvement ouvrier, où l’on aspire à un changement de politique, la politique de zigzags du PCF est mal perçue alors que le PS est considéré comme le parti unitaire à gauche.

    1981-1982. Une politique de relance keynésienne et le sabotage des capitalistes

    Le programme électoral de Mitterrand en 1981 ressemble au programme électoral du PTB en 2019. On y trouve un programme de relance économique grâce aux investissements publics (création de 150.000 emplois dans les services publics, politique de grands travaux publics, construction de logement sociaux,…), à l’augmentation du pouvoir d’achat, à l’instauration de la semaine des 35 heures pour combattre le chômage et à la redistribution des richesses via l’introduction d’un impôt sur les fortunes des plus riches. Le PS de l’époque va même plus loin en défendant la nationalisation de neuf grands groupes industriels, du crédit et des assurances. Il n’est cependant pas question d’une transformation socialiste de la société.

    Finalement, c’est la victoire au second tour de l’élection présidentielle et un gouvernement comprenant 4 ministres du PCF initie une batterie de réformes : embauche de 55.000 fonctionnaires ; augmentation du salaire minimum de 10%, des allocations familiales et logement de 25%, de l’allocation pour les personnes handicapées de 20% ; abolition de la peine de mort; abrogation de la loi ‘‘anti-casseurs’’ ; régularisation de 130.000 sans-papiers par le travail ; création de l’impôt sur les grandes fortunes ; augmentation de 40% à 500% des budgets pour le logement, la culture, l’emploi et la recherche ; blocage des prix ; nationalisation des 36 premières banques de dépôt ainsi que de Paribas, de Suez et de 5 grands groupes industriels (CGE, PUK, Rhône-Poulenc, Saint-Gobain, Thomson) ; introduction de la semaine des 39 heures, de la 5e semaine de congés payés, de la pension à 60 ans et d’une nouvelle législation du travail ; encadrement et plafonnement des loyers ; abrogation du délit d’homosexualité.

    Le gouvernement lance une politique de relance keynésienne – par la consommation et les investissements – mais l’exceptionnelle période de croissance économique prolongée d’après-guerre était terminée. Depuis la moitié des années ’70, le capitalisme était en crise. Les États-Unis étaient entrés en récession et le ralentissement économique de l’Allemagne, avait un profond impact sur l’économie française. Le pays était en pleine stagflation : une récession économique combinée à une inflation galopante.

    Le gouvernement va alors tout faire pour convaincre le patronat du bienfondé de sa politique de relance afin de restructurer le capitalisme français et de renforcer sa position concurrentielle. Mais les capitalistes veulent écraser les espoirs des travailleurs et organisent donc le sabotage de la politique du gouvernement.

    Puisqu’avec la crise, les capitalistes perdent confiance en leur propre système économique, ils préfèrent placer leur argent dans les investissements spéculatifs qui explosent à l’époque. L’État doit donc les remplacer dans les entreprises nationalisées. Le gouvernement ayant voulu respecter le cadre légal plutôt que s’appuyer sur l’action du mouvement ouvrier, la droite et les patrons saisissent le conseil constitutionnel, font valoir le droit de propriété privée et arrachent 39 milliards de francs de l’État en compensation pour l’ensemble des nationalisations. Certains patrons se frottent les mains : avec la crise, ce sont aussi des pertes qui ont été nationalisées à grands frais.

    Les banques nationalisées sont vite confrontées aux limites d’un fonctionnement qui respecte les lois du marché privé. La politique de crédit bon marché échoue à relancer les investissements privés tandis que le Franc est attaqué par les marchés. La Banque de France tente de maintenir ce dernier à flot en utilisant les réserves de devises, qui s’effondrent. Entre 1981 et 1983, le franc est dévalué 3 fois. L’inflation mine l’efficacité des mesures en faveur du pouvoir d’achat. Le déficit sur la balance commerciale (les importations dépassent les exportations) se creuse fortement. La Banque de France bloque la mise à disposition de plus de liquidités et force le gouvernement à emprunter sur le marché privé. Tout cela s’accompagne d’une fuite de capitaux d’ampleur inédite : les grandes fortunes fuient l’impôt.

    De nombreux riches franchissent la frontière suisse avec des valises ou des sacs poubelles remplis d’argent et de l’or planqué dans les roues de secours. Les capitaux étrangers quittent également le navire. Le contrôle de taux de change sera instauré ainsi qu’un renforcement des contrôles à la frontière, mais les transferts de fonds vers le Suisse se poursuivront.

    Le ‘‘tournant de la rigueur’’

    Très vite, le gouvernement PS-PCF recule. Un blocage salarial de 4 mois prend place en juin 1982, suivi de la suppression de l’indexation automatique des salaires. Le PCF dénonce, mais ses ministres ne remettent pas en cause leur soutien au gouvernement. Le patronat applaudit : la gauche vient de réussir sans la moindre résistance ce que la droite n’avait jamais pu qu’espérer.

    Le 21 mars 1983, c’est le ‘‘tournant de la rigueur’’, c’est-à-dire l’abandon des politiques économiques keynésiennes pour embrasser le monétarisme néolibéral. PS et PCF décident que la France reste dans le Système monétaire européen (SME). Pour résorber les déficits, le ‘‘plan Delors’’ d’austérité est mis en place.

    En mars 1984, les ministres du PCF participent à une dernière attaque d’envergure : la suppression de 21.000 emplois dans la sidérurgie d’Etat, soit le même nombre que la droite en 1978-1979. 150.000 travailleurs manifestent en Lorraine, mais la marche vers Paris organisée par les directions syndicales prend des allures d’enterrement. L’échec du gouvernement PS-PCF qui devait combattre le chômage et sauver la sidérurgie est total. Aux élections de juin 1984, le Front National obtient 11% et réalise sa première percée au niveau national. Le PS chute à 21% et le PCF à 11%. Le PCF quitte le gouvernement, mais jamais plus il ne regagnera ses bastions ouvriers perdus.

    L’échec du réformisme, pas du socialisme

    Cet échec se déroule au moment où Thatcher au Royaume-Uni et Reagan aux États-Unis affrontent la classe ouvrière pour durablement modifier les relations de force en faveur du capital. La voie est ouverte pour quatre décennies de politiques néolibérales dramatiques. A partir du ‘‘tournant de la rigueur’’ de mars 1983, la participation du PS au pouvoir en France, mais aussi en Belgique et ailleurs en Europe, se limitera à l’application de la politique néolibérale. Mais cet échec, ce n’est pas celui du socialisme, il s’agit de celui du réformisme.

    En 1986, Henri Emmanuelli (secrétaire d’État du gouvernement de 1981 à 1984) a résumé son avis sur le virage de mars 1983 en ces termes : ‘‘Les socialistes ont longtemps rêvé d’une troisième voie entre le socialisme et le capitalisme. À l’évidence, elle n’est plus possible. La solution, c’est de choisir clairement l’un des deux systèmes et d’en corriger les excès. Nous avons choisi l’économie de marché.’’ Il aura manqué en France un parti révolutionnaire implanté dans le mouvement des travailleurs qui ne se limite pas à un programme de réformes mais qui lie celui-ci à la perspective du renversement du capitalisme et du remplacement de l’économie de marché par une économie démocratiquement planifiée.

  • Pologne. Suspension de la décision d’arrêter le haut fourneau d’ArcelorMittal à Cracovie

    Pologne. Suspension de la décision d’arrêter le haut fourneau d’ArcelorMittal à Cracovie

    Par Kacper Pluta, membre d’Alternatywa Socjalistyczna (CIO – Pologne), ouvrier d’ArcelorMittal Poland (AMP) et membre du syndicat NSZZ Pracowników AMP (capacité personnelle)

    Depuis quelques mois, les métallurgistes de la partie matières premières de l’usine cracovienne vivaient dans l’incertitude de l’avenir de leur lieu de travail (voir notre précédent article relatif à ce sujet). Depuis qu’en mai, la direction avait annoncé la fermeture du haut fourneau et de l’aciérie, il y avait un mur de silence – la direction ne donnait aucune information concrète sur l’avenir de l’activité. Alors que la date de fermeture se rapprochait inexorablement, les travailleurs ne savaient pas où ils seraient envoyés travailler (s’ils n’étaient pas mis au chômage), s’il existait des conditions susceptibles d’annuler cette décision et, si oui, lesquelles. Etc. Enfin, à peine un mois avant la fermeture prévue, le lendemain de la manifestation d’ouvriers organisée devant le siège de la direction d’ArcelorMittal Poland (AMP), les médias ont été informés que la société retardait indéfiniment la décision de fermeture.

    Manifestation le 24 juillet

    Pendant plusieurs semaines, les employés d’AMP attendaient que les organisations syndicales agissent contre la fermeture des matières premières. Les lents rouages de la machine syndicale se sont finalement mis en mouvement sous la forme d’une manifestation organisée devant le siège de l’AMP à D?browa Górnicza. Les ouvriers de l’aciérie cracovienne ont pris au sérieux l’appel à se mobiliser, remplissant 17 autobus au départ de l’usine de Cracovie. Environ 1000 personnes ont pris part au piquet, soit près du tiers des travailleurs de Cracovie, alors que c’était un jour de travail et une manifestation hors de la ville. Les usines de métallurgie de Sosnowiec, Ostrowiec wi?tokrzyski ou Cz?stochowa ont apporté leur soutien. Pendant les discours des dirigeants syndicaux (représentant les trois syndicats principaux: NSZZ Pracowników (OPZZ), Solidarno?? et Solidarno?? 80, plus des syndicats locaux plus petits), le refus de la fermeture du haut fourneau et de l’aciérie a été souligné. Dans la manifestation, l’ambiance était à la colère et à la frustration ; les dirigeants syndicaux ont eu du mal à contrôler certains manifestants.

    Nous sommes les otages de l’entreprise

    Le lendemain, la direction d’AMP a annoncé une suspension temporaire de la décision de fermeture du haut fourneau.

    Parmi les ouvriers cependant, l’ambiance n’est pas à la célébration. Malgré le ton de propagande victorieux des déclarations des organisations syndicales, les employés se rendent compte que ce n’est ni leur mobilisation ni la “lutte” des syndicats qui ont été décisifs dans le revirement de l’AMP. Le sentiment dominant est un léger soulagement parce que nous savons où et dans quelles conditions nous travaillerons au cours des prochains mois, mais aussi la frustration que la société utilise le secteur des matières premières de Cracovie en otage dans sa compétition avec le gouvernement polonais.

    Les « conditions du marché », dont la direction parlait en mai, ont-elles soudainement changé ? La politique de l’État a-t-elle changé en termes de prix de l’électricité et d’industries à forte intensité énergétique? La CE a-t-elle donné des garanties à Mittal en ce qui concerne les modifications des taxes d’émission de CO2? Les coûts de fonctionnement du secteur matières premières de Cracovie ont-ils changé (prétendument les plus élevés d’Europe, selon les comptes douteux de l’entreprise)? Ce sont des questions rhétoriques, auxquelles ni les ouvriers ni le public ne reçoivent de réponses. Les métallurgistes de Cracovie sont constamment bombardés de signaux contradictoires et de décisions apparemment illogiques des capitalistes : d’une part, maximisation de la production et investissements importants (rénovation du haut fourneau, investissements écologiques, nouveau laminoir…), de l’autre, gel de l’émbauche, fin de la collaboration avec les sous-traitants, annonce d’une énorme coupe de la production…

    L’avenir du secteur matières premières, mais aussi de la métallurgie en général, reste incertain. Les difficultés économiques invoquées par Mittal pour justifier la fermeture du four n’ont pas disparu: la guerre commerciale et la crise énergétique et climatique se poursuivent. Le propriétaire peut jouer cette carte à tout moment, que ce soit pour liquider l’usine de Cracovie (et pour, par exemple, délocaliser les machines de nouvelles installations) ou – ce qui semble particulièrement probable – pour geler les augmentations de salaire et autres revendications des travailleurs. Les syndicats doivent se concentrer sur ces problèmes. Attiser l’auto-satisfaction ne nous aidera pas à défendre l’usine ni à nous battre pour des salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail. Nous avons besoin d’un syndicat militant et démocratique pour ces tâches!

    Finissons-en avec le chantage capitaliste

    ArcelorMittal est le plus grand producteur d’acier au monde. Cela lui confère un pouvoir énorme et la capacité de mettre en échec les gouvernements d’un Etat, voire du continent entier. En Europe, des dizaines de milliers d’emploi dépendent du bon vouloir de cette entreprise. Dans la situation économique mondiale actuelle, la société utilisera bien sûr sa position pour contraindre les gouvernements à mener une politique qui leur est favorable : l’octroi d’un soutien de plusieurs milliards de dollars provenant de fonds publics ou la poursuite d’une politique économique plus protectionniste par les gouvernements européens. Ces mesures serviraient principalement à remplir davantage les caisses des milliardaires. Malheureusement, les représentants des syndicats sont aussi partiellement capables de reprendre ces arguments et de les répéter sans discernement. Au cours du rassemblement, un militant de Solidarno?? a même vanté la politique de la guerre des douanes menée par Trump… Financer des milliardaires avec de nouveaux fiscaux et protéger leurs marchés à l’aide de l’appareil douanier et fiscal de l’Etat ne font que renforcer notre dépendance à l’égard du monde des grandes entreprises. Cela ne signifie pas que nous sommes contre le protectionnisme quelle que soit la situation, mais il faut se demander à quoi il va servir ? Réduire les importations d’acier et accroître le rôle de la production nationale dans la consommation intérieure seraient souhaitables à bien des égards si c’était dans l’intérêt de la société et non des capitalistes : la production sur site réduit les coûts environnementaux liés au transport et permet potentiellement un meilleur contrôle des conditions de production, de son impact environnemental, etc…

    Dans le même temps, nous devrions essayer de lier notre lutte aux ouvriers métallurgistes d’autres pays, en particulier aux travailleurs d’ArcelorMittal en Europe – seule la solidarité internationale peut nous donner la possibilité de résister au dumping salarial et à la mise en concurrence des ouvriers.

    Sauvons la métallurgie

    Comme l’a dit à juste titre un syndicaliste lors de la manifestation: “Ce n’est pas nous qui avons causé cette crise, mais seulement ceux qui dirigent le monde. Ils gagnent de la crise, et nous l’avons dans le… » Transformons cette constatation en un programme concret de sauvetage de la métallurgie dans l’intérêt de ceux qui y travaillent et de la majorité de la société. Alternatywa Socjalistyczna propose de discuter autour des revendications suivantes :

    • Abolition du secret commercial; contrôle des finances par les représentants des travailleurs
    • Renationalisation de la métallurgie sous le contrôle des ouvriers
    • Au lieu de la bourse du carbone, investissements publics massifs dans les énergies propres et la recherche sur la réduction des émissions de CO2
    • Planification économique démocratique au lieu des crises et du chaos du capitalisme

  • Les élections générales en Grèce n’ont livré aucune surprise

    SYRIZA est responsable du retour de la droite

    Par Xekinima, section Grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière et parti-frère du PSL/LSP

    Il n’y a pas eu de surprises dans les résultats des élections du 7 juillet en Grèce, ils ont confirmé les tendances qui étaient déjà évidentes lors des élections européennes de mai : le parti traditionnel de droite grec Nouvelle Démocratie (ND) a remporté la victoire, le soutien de SYRIZA a chuté car les électeurs l’ont puni pour ses politiques d’austérité, la gauche est restée faible, n’ayant pas réussi à convaincre les travailleurs de ses positions et le parti néo-nazi Aube Dorée (AD) a perdu ses positions parlementaires sans pouvoir obtenir le seuil des 3% requis pour être élu au parlement. Le taux d’abstention a atteint un niveau historiquement élevé d’environ 45% (similaire à toutes les élections à partir de septembre 2015) – c’est-à-dire que presque une personne sur deux n’a pas pris la peine de voter.

    Nous entrons maintenant dans une nouvelle étape du bipartisme (polarisation entre deux partis principaux, se remplaçant l’un l’autre au gouvernement) qui diffère cependant de celle qui existait entre le ND et le PASOK (social-démocratie) dans le passé, en ce sens qu’il n’a ni la profondeur ni la stabilité du vieux système bipartite.

    SYRIZA responsable du retour de ‘Nouvelle Démocratie’ au gouvernement

    ND a remporté les élections avec 39,8% et 2,2 millions de voix. L’augmentation de son vote peut sembler importante par rapport à celle qu’il a reçue lors des élections européennes de septembre 2015 et des récentes élections européennes, où il a obtenu environ 1,5 million de voix. Cependant, ce résultat doit être jugé dans le contexte du nouveau paysage de “normalité” établi par SYRIZA.

    Les trois “mémorandums” imposés à la Grèce par la Troïka (la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international) à partir de 2010 ont conduit à l’effondrement du “vieux” système bipartite en Grèce, les électeurs ayant tourné le dos aux forces politiques détestées (ND et PASOK) qui avaient ruiné le pays et l’avaient quitté dans une crise économique profonde et une austérité extrême. SYRIZA est passée de 4% à plus de 36% pour être élu au gouvernement, en raison de son opposition à ces politiques. Mais depuis l’été 2015, lorsque SYRIZA a capitulé devant les exigences de la Troïka et a mis en œuvre les mêmes politiques d’austérité qu’elle avait rejetées, le paysage bipartite est réapparu, avec ND d’un côté et SYRIZA de l’autre prenant le rôle du PASOK.

    Cependant, lors de cette élection, ND n’a pas obtenu le nombre de voix qu’elle avait obtenu avant la crise. Bien qu’elle ait réussi à atteindre le niveau des élections anticipées de 2009 (2,2 millions de voix) alors que la crise était aux portes de la Grèce et que le gouvernement (déjà ND à ce moment-là) s’est effondré avant la fin de son mandat, ce chiffre est loin de celui obtenu en 2007 – 3 millions de voix.

    En même temps, il est important de souligner que ND n’a pas développé d’enthousiasme dans la société et qu’elle n’a pas obtenu un nombre significatif de voix de ceux qui ont voté SYRIZA en 2012 et 2015. L’augmentation du soutien électoral est essentiellement due à l’effondrement des votes des petits partis nationalistes de droite et de centre-droite tels que les “Grecs indépendants” (ANEL), “To Potami” (“Le fleuve”) et l’”Union du Centre” qui ont obtenu 500.000 voix en 2015. Et, bien sûr, ND a pris part aux 200.000 votes perdus par “Aube Dorée”.

    SYRIZA – le nouveau PASOK

    SYRIZA a perdu l’élection parce qu’elle n’a pas réussi à convaincre les travailleurs que ses politiques différaient fondamentalement de celles de ND et n’a donc pu développer aucune dynamique sociale. Cependant, parce qu’une grande partie de la société grecque – en particulier dans la classe ouvrière et les pauvres – craint toujours le programme néolibéral difficile du leader de ND, Kyriakos Mitsotakis, SYRIZA a réussi à conserver un vote significatif, avec 31,5% et presque 1,8 million de voix.

    Mais il ressort déjà clairement des déclarations de Tsipras depuis l’élection que les dirigeants de SYRIZA ne reconnaissent aucune erreur grave dans leur politique. Au lieu de cela, ils s’intègrent dans le système en occupant “l’espace centre-gauche” avec la “transformation de SYRIZA en un grand parti démocratique” (pour reprendre l’expression de Tsipras), c’est-à-dire en occupant la position du parti social-démocrate traditionnel, le PASOK.

    Les nazis hors du parlement

    Le développement le plus positif de ces élections est l’échec de Golden Dawn, le gang néonazi, à rester au Parlement. L’argument de la direction d’AD selon lequel il s’agit d’un “grand parti” soutenu par “près de 10% du peuple grec” est remis en cause et les affaiblit politiquement. Leur non-entrée au parlement les prive de la protection du statut parlementaire et du financement de l’Etat et de l’emploi par l’Etat de dizaines de leurs cadres dirigeants pour assurer le ” soutien parlementaire “. Les néo-nazis ont perdu environ 100 000 voix par rapport aux élections européennes qui ont eu lieu il y a un peu plus d’un mois !

    Cette évolution est évidemment due à un certain nombre de facteurs, mais ce qu’il faut souligner ici, c’est le rôle joué par la mobilisation constante du mouvement antifasciste qui a révélé la nature réelle de ce gang meurtrier, ainsi que le procès en cours des principaux dirigeants d’AD accusés de meurtre et d’autres crimes.

    Bien que nous devions saluer cette évolution importante, nous devons être conscients que la lutte contre le fascisme ne se termine pas avec ce coup porté à AD. Nous devons maintenant intensifier nos efforts et nos campagnes non seulement pour obtenir des condamnations à perpétuité contre les dirigeants, mais aussi pour briser leur soutien dans chaque quartier où ils sont présents.

    Le ‘dénuement’ de la Gauche

    La gauche – principalement le Parti communiste grec (KKE), la gauche anticapitaliste ANTARSYA et l’Unité populaire (LAE) se sont une fois de plus montrées incapables d’exprimer les besoins de la classe ouvrière et des pauvres.

    Le KKE a enregistré une nouvelle légère baisse de ses suffrages par rapport aux élections européennes de mai, stagnant essentiellement à 5,3%, malgré leurs efforts à travers une campagne électorale très dynamique et malgré la baisse du soutien à SYRIZA. L’Unité Populaire a continué sur la voie de sa propre auto-annihilation, ne recueillant que 16.000 voix, à peine 10% des voix qu’elle a obtenues en septembre 2015 et la moitié seulement de celles qu’elle a obtenues aux élections européennes il y a un peu plus d’un mois. ANTARSYA a obtenu 0,4% des voix et 23.000 voix, soit une fois de plus la moitié de son vote depuis 2015 et moins que les 36.000 voix obtenues en mai. Les autres listes de gauche ont obtenu moins de 0,1%.

    Plutôt que de réfléchir aux causes de cette défaite électorale, les dirigeants de gauche tentent à nouveau de rejeter la faute sur le peuple. Dimitris Koutsoubas, secrétaire général du KKE, a déclaré, de manière caractéristique dans sa déclaration post-électorale, qu’il existe “une tendance générale conservatrice”. Il a été rejoint par l’Unité Populaire qui a annoncé qu’”un changement politique conservateur est en train de s’enregistrer”. Dans des articles précédents, nous avons expliqué pourquoi nous ne sommes pas d’accord avec l’analyse selon laquelle il y a eu un “changement conservateur de la société”, une analyse adoptée par presque tous les partis de gauche après les élections européennes.

    La gauche doit également réfléchir sur le fait que le parti “MeRA25”, créé par l’ancien ministre des finances SYRIZA Yanis Varoufakis a augmenté son vote et obtenu des sièges au Parlement (3,5% et 9 députés). “MeRA25” est un parti situé entre la gauche et la social-démocratie et n’appelle pas spécifiquement au changement social et plus encore au socialisme, mais il a réussi à convaincre une partie de la société de ses positions sur des questions spécifiques où d’autres forces de gauche ne pouvaient pas. Le succès de “MeRA25” semble offrir un peu d’espoir et un moyen de sortir de l’impasse et de la frustration ressenties par beaucoup à gauche, car Varoufakis est considéré comme le seul de ceux autour de Tsipras qui n’ont pas trahi après le referendum de 2015. Dans le spectre des forces anti-mémorandum, les résultats de “MeRA25” sont la seule évolution positive.

    Le dénuement des dirigeants de la gauche ne peut plus être caché. Ce qu’il faut, c’est une discussion ouverte et approfondie au sein de la gauche révolutionnaire et avec le mouvement au sens large pour discuter des erreurs et des déficiences, pour surmonter la “culture” dominante dans laquelle les organisations de gauche refusent de coopérer entre elles, pour proposer un programme de transition avec des demandes radicales de renversement du système, non comme appels révolutionnaires abstraits mais directement liés à la phase actuelle du mouvement, ses besoins et sa conscience. Nous devons créer un large front de gauche, qui puisse donner la parole aux masses laborieuses et montrer la voie à suivre.

    Au cours de la période à venir, les attaques contre les droits des travailleurs et des peuples vont s’intensifier, surtout à l’approche d’une nouvelle récession économique mondiale. Les forces de gauche, les syndicats combatifs, les militants de la classe ouvrière et les mouvements de protestation locaux et autres doivent être entraînés dans la bataille pour reconstruire le mouvement et la gauche, afin de pouvoir faire face aux tâches devant nous.

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