Category: Amérique du Nord

  • La politique étrangère des États-Unis : le retour à l’impérialisme normal ?

    L’administration Biden va-t-elle, comme ce dernier l’a déclaré, “réparer les dégâts causés par le président Trump et tracer une voie fondamentalement différente pour la politique étrangère américaine dans le monde tel que nous le connaissons aujourd’hui” ?

    Par George Martin Fell Brown, Socialist Alternative (partisans d’Alternative Socialiste Internationale aux Etats-Unis)

    Avec Trump, la politique étrangère américaine a pris la forme d’un nationalisme erratique. Sous le slogan “America First”, Trump s’est éloigné des alliés traditionnels de l’impérialisme américain, a déclenché des conflits commerciaux et tarifaires et a promis de nous sortir des “guerres sans fin”. Parallèlement, Trump a défendu les intérêts de l’impérialisme américain de manière encore plus nue, en livrant à de dangereux coups de sabre en Chine et en Iran, tout en défendant les politiques les plus réactionnaires d’Israël et de l’Arabie Saoudite.

    On peut s’attendre à ce qu’une administration Biden prenne rapidement des mesures qui distingueront nettement la nouvelle administration, au moins au niveau de la rhétorique, par rapport à celle de Trump. Cependant, tout espoir de “remise à zéro” pose problème. La tendance au protectionnisme, les guerres commerciales, la mondialisation et la rivalité entre les États-Unis et la Chine ne sont pas le fruit de la personnalité d’un seul homme. Cela résulte de la profonde crise du capitalisme mondial et l’administration Biden sera incapable de la résoudre.

    Le statu quo que Biden veut rétablir ne mérite pas d’être célébré. Alors qu’il était au Sénat, Biden fut un ardent défenseur de l’impérialisme américain, de la “guerre contre la drogue” en Amérique latine à la “guerre contre le terrorisme” au Moyen-Orient. Il a soutenu avec enthousiasme l’invasion de l’Irak et de l’Afghanistan. Toutes ces guerres ont été menées dans l’intérêt des grandes entreprises américaines. Cela s’est poursuivi pendant son mandat de vice-président d’Obama. Voilà l’approche que Biden promet de reprendre. Toute “réinitialisation” des relations mondiales avec l’administration Biden ne représentera pas les intérêts des travailleurs, ni à aux Etats-Unis, ni à l’étranger.

    Rétablir les relations

    L’un des principaux slogans de politique étrangère de la campagne électorale de Biden était de “renforcer la coalition des démocraties qui nous soutiennent”. Pour ce faire, il faut reconstruire les relations entre les États-Unis et leurs alliés traditionnels mis à mal par l’administration Trump. Biden cherchera à réintégrer l’Accord de Paris sur le climat et l’Organisation mondiale de la santé, que les États-Unis ont quitté avec Trump. Plus largement, l’administration Biden va renouer avec les institutions capitalistes mondiales, telles que l’OTAN et l’Union européenne, dont Trump avait cherché à s’éloigner ou dont il avait activement cherché à saper l’autorité.

    Mais les capacités de Biden de “tracer une voie fondamentalement différente” ont leurs limites. L’Accord de Paris sur le climat, par exemple, est extrêmement limité. Le retour des États-Unis ne signifiera pas en soi un changement sérieux dans la course effrénée vers la catastrophe climatique. Le capitalisme européen sera heureux que Biden s’appuie davantage sur l’UE et l’OTAN, adopte une approche plus antagoniste à l’égard de la Russie et s’oppose au Brexit. Mais la crise politique et économique en Europe ne saurait être résolue par une reconstruction des alliances. Le Brexit est considéré comme une affaire réglée et d’autres crises menacent l’unité du capitalisme européen.

    La fin de la rhétorique “America First” de Trump peut ralentir la croissance du protectionnisme. Mais si tout cela représente un certain changement et sera perçu, au moins pendant un certain temps, comme faisant partie d’un retour à la “normale” dans les relations mondiales, l’énorme affaiblissement des institutions capitalistes mondiales ne sera pas fondamentalement inversé. La tendance à la déglobalisation ne sera pas non plus inversée.

    “Chine. Chine. Chine. Russie.”

    Un des conseillers de Biden a été cité dans le Financial Times, décrivant la politique étrangère de Biden comme “Chine. Chine. Chine. Russie”. L’administration Trump était dominée par une guerre tarifaire croissante avec la Chine qui allait à l’encontre de l’orthodoxie néolibérale que Biden représente. Mais il y a des limites à ce que Biden peut, ou même veut, pour changer la dynamique de ce conflit.

    Biden peut chercher à conclure un accord avec la Chine pour réduire les droits de douane, mais la politique américaine d’”engagement” avec la Chine, qui a commencé avec la visite de Nixon en 1972 et a conduit à l’adhésion de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en 2000, est maintenant définitivement terminée. L’idée que la Chine puisse être réformée pour devenir un “partenaire” des États-Unis et des puissances occidentales a été remplacée par la crainte de sa montée en puissance. Une partie de la classe dirigeante américaine souhaite maintenant un changement de régime en Chine. Cela se reflète dans la rhétorique grossière de Mike Pompeo qui a récemment déclaré que les pays étaient confrontés à un choix entre “la barbarie d’un côté et la liberté de l’autre… Nous les avons réveillés à la menace posée par ce monstre marxiste-léniniste”. La rhétorique des Démocrates sera différente, sans pour autant désamorcer le conflit.

    Même avant Trump, l’objectif d’Obama avec l’alliance commerciale du Partenariat Trans Pacifique (TPP) dont Trump s’est retiré, était d’”encercler” la Chine et de contenir son développement. Bien que l’administration Obama se soit abstenue de mener une guerre commerciale de grande envergure, il a déclaré dans une récente interview accordée à The Atlantic que “si nous n’avions pas traversé de crise financière, ma position envers la Chine aurait été plus explicitement litigieuse sur les questions commerciales”. Michèle Flournoy, le choix proposé par Biden pour le poste de ministre de la défense, a également adopté une ligne dure en faveur du renforcement de la présence militaire américaine dans la mer de Chine méridionale.

    Le refroidissement de la rivalité américano-chinoise n’est pas simplement une question de ce que le gouvernement américain est prêt à offrir. C’est aussi une question de ce que le gouvernement chinois est prêt à accepter. En outre, on peut s’attendre à ce qu’une administration Biden adopte une ligne plus dure que Trump à l’égard de la Russie.

    On peut s’attendre à ce que Biden et l’impérialisme américain insistent sur les “droits humains” dans une bien plus large mesure que Trump. Nous pouvons également nous attendre à une diminution des propos sinophobes comme les références de Trump au “virus chinois”. Par contre, il ne faut pas s’attendre à un changement sérieux dans le conflit sur la technologie, y compris l’exclusion par les États-Unis du réseau 5G de Huawei. Nous ne devons pas non plus nous attendre à un renversement de la tendance en cours vers le découplage des économies américaine et chinoise, avec des entreprises qui réduisent ou retirent leurs activités en Chine et l’éclatement de la chaîne d’approvisionnement mondiale en chaînes d’approvisionnement régionales. Mais si l’impérialisme américain peut être en mesure de constituer un front commun contre la Chine parmi un certain nombre de pays capitalistes clés, il le fera dans une position de faiblesse significative par rapport à il y a même une décennie. En réalité, le conflit a affaibli et continuera d’affaiblir les deux puissances.

    Les attaques de Biden contre la Chine mettront en lumière la répression du régime du parti “communiste” à Hong Kong et la détention de près d’un million de musulmans ouïgours dans la région du Xinjiang. Le régime du PCC est en effet une dictature brutale et chauvine. Mais les crimes de l’impérialisme américain sont encore pires. Du Vietnam à l’Irak, les Etats-Unis ont massacré des millions de personnes dans le but de défendre le système de profit. En tant que socialistes, nous nous opposons à tout impérialisme, y compris et surtout au “nôtre”.

    Le Moyen-Orient

    Au Moyen-Orient, une “réinitialisation” des relations mondiales ne serait pas une bonne chose. Biden était un fervent partisan de la “guerre contre le terrorisme” de Bush et de sa poursuite sous l’administration Obama. Pendant l’élection, Biden a consciemment courtisé des personnalités de l’administration Bush comme Colin Powell. Les membres du cabinet qu’il a proposés comme responsables des relations mondiales – Michèle Flournoy pour la défense et Anthony Blinken pour la secrétaire d’État – sont tous de fervents représentants de l’approche impérialiste pourrie vis-à-vis du Moyen-Orient, qui repose sur le soutien aux dictateurs et la conduite de guerres pour maintenir le contrôle du pétrole.

    Biden et son équipe vont certainement essayer de poursuivre une approche différente de celle de Trump vis-à-vis du régime iranien. Ils sont certainement déterminés à essayer de relancer l’accord nucléaire iranien dont Trump s’est retiré mais, en pratique, cela pourrait s’avérer impossible. L’Iran exigera la fin des sanctions imposées par Trump, ce qui serait probablement politiquement impossible à accepter pour Biden. Même dans ce cas, l’administration n’aura pas les coudées franches pour relancer l’accord nucléaire. Blinken a assuré que “nous poursuivrons les sanctions non nucléaires contre la mauvaise conduite iranienne dans d’autres domaines”. Sur les dernières semaines de l’administration Trump, Trump et son allié Netanyahu, le premier ministre israélien, ont tenté de provoquer l’Iran dans un conflit direct pour rendre la tâche de Biden encore plus difficile. La dernière action en date est l’assassinat du principal scientifique nucléaire iranien, Mohsen Fakhrizadeh, très probablement par Israël.

    Certains éléments indiquent que Biden adoptera une attitude moins amicale à l’égard du régime saoudien. La relation avec Nétanyahou sera tout aussi glaciale. Mais cela en dit plus long sur l’amitié que Trump avait avec les gouvernements saoudien et israélien que sur l’hostilité de Biden. Sous l’administration Obama, Biden, Blinken et Flournoy ont maintenu des liens étroits avec les deux pays, soutenant l’invasion saoudienne du Yémen et augmentant le financement du programme de défense israélien.

    L’engagement de Biden en faveur d’une “coalition des démocraties” sera sérieusement mis à l’épreuve au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. L’approche de Biden et d’autres a été remise en question lors du processus de révolution et de contre-révolution au Moyen Orient et en Afrique du Nord il y a dix ans, lors des soulèvements de masse dirigés contre les alliés traditionnels des États-Unis en Égypte et en Tunisie. La dictature d’Abel el-Sisi en Égypte, qui est arrivée au pouvoir par un coup d’État contre-révolutionnaire, servira de test pour déterminer l’engagement de Biden en faveur de la démocratie. Trump était un fervent admirateur de Sisi et Obama, tout en critiquant Sisi, a néanmoins rétabli les relations entre les États-Unis et l’Égypte.

    L’Amérique latine

    Sous l’administration Clinton, Biden a été l’un des principaux architectes du “Plan Colombie”, une réponse fortement militarisée au commerce de la drogue, axée sur des aides militaires massives au gouvernement de droite en Colombie. Ce plan était accompagné d’une aide économique à la Colombie liée à un engagement de privatisations, de libre-échange et d’austérité. Cela a entraîné des violations massives des droits humains et une pauvreté croissante. Néanmoins, Biden a présenté le Plan Colombie comme l’une de ses principales réalisations en matière de politique étrangère pendant les élections.

    Sous l’administration Obama, Biden a supervisé l’Alliance pour la prospérité et le Programma Frontera Sur en Amérique centrale et au Mexique. Ces programmes visaient à stopper l’immigration à la source en fournissant une aide financière pour soutenir les forces de police hautement militarisées dans la région. En pratique, cela a permis de renforcer la répression et la corruption que les gens fuyaient au départ.

    Comme pour la politique chinoise, Biden évitera le racisme flagrant mis en avant par Trump. Mais il poursuivra sa propre politique passée de soutien aux gouvernements de droite favorables aux États-Unis dans la région.

    L’Amérique latine a connu récemment une recrudescence des luttes de masse. Des manifestations de masse ont eu lieu en Équateur et au Chili en 2019. En Bolivie, le Mouvement vers le socialisme a obtenu une victoire en octobre et a renversé le coup d’État de droite qui avait déposé Evo Morales en 2019. Actuellement, nous assistons à de nouvelles luttes de masse au Pérou et au Guatemala. Toutes ces luttes sont dirigées contre les politiques et les gouvernements que Biden a encouragés par le passé. Une administration Biden ne sera qu’un obstacle à ces luttes et à celles à venir.

    La nouvelle vague de luttes en Amérique latine constitue une alternative aux approches de l’impérialisme américain, qu’il soit dirigé par Trump ou Biden. La lutte ouvrière internationale et la solidarité peuvent ouvrir la voie à une véritable “autre voie” pour la politique mondiale.

  • Chaos au Capitole : Il faut construire un mouvement pour vaincre l’extrême droite

     

    Nous avons d’abord reçu la notification : “La foule pro-Trump s’introduit dans le bâtiment du Capitole.” Ensuite, “Les membres du Congrès sont priés de se cacher sous leurs chaises”, puis “Ils ont tiré dans les salles”.

    Par Keely Mullen, Socialist Alternative

    La prise d’assaut du Capitole a choqué des centaines de millions de personnes aux États-Unis et dans le monde entier. Le chaos qui a eu lieu à l’intérieur de l’un des piliers de la puissance américaine est à bien des égards une incarnation des crises à multiples facettes qui ont englouti le pays. Pendant des heures, le Capitole a été occupé par une foule, dirigée par des éléments d’extrême droite et fascistes, déterminés à renverser les résultats des élections de novembre.

    Peu après la percée du Capitole, les membres du Congrès ont été déplacés dans un “lieu sûr” alors que l’extrême droite prenait d’assaut les salles de la Chambre et du Sénat. Ils ont erré dans les couloirs du Congrès, volant le courrier de Nancy Pelosi, démolissant des tableaux. Un homme est même sorti par la porte d’entrée en tenant un podium entier.

    L’impréparation totale de la police du Capitole face à l’attaque du Capitole contrastait fortement avec la façon dont la police a répondu aux manifestations de Black Lives Matter l’été dernier. Des milliers de gardes nationaux ont été mobilisés pour “protéger le Capitole” lors des manifestations du 1er juin, tandis que des tactiques brutales étaient utilisées dans les villes. Il a été révélé que l’extrême droite planifiait ouvertement cette opération sur les médias sociaux depuis des semaines, et même cela n’a pas déclenché une réponse des forces de l’ordre.

    Dans les semaines et les mois qui ont précédé “l’insurrection”, M. Trump n’a pas tenté de cacher ses ambitions de coup d’État. Jusqu’à hier soir, il a déclaré à plusieurs reprises qu’il ne concéderait ni ne respecterait les résultats de l’élection. Il a préparé le terrain pour les événements de ce 6 janvier tout au long de sa campagne électorale. Il a mis en garde contre la fraude électorale généralisée et l’escroquerie aux bulletins de vote par correspondance. Trump a clairement indiqué que tout ce qui aurait été moins qu’une victoire éclatante ne serait qu’une élection volée.

    Après l’élection, Trump, en plus d’avoir intenté 60 procès, a cherché à contraindre les responsables républicains des principaux États à annuler les résultats. Plus récemment, il a cherché à intimider le secrétaire d’État géorgien, Brad Raffensperger, pour “trouver” 11.000 votes lors d’un appel téléphonique qui a fait l’objet d’une fuite. Il a engagé des discussions avec des théoriciens du complot sur la déclaration de la loi martiale. Enfin, il a tenté d’obtenir du vice-président, Mike Pence, qu’il accepte d’annuler unilatéralement les résultats des élections lors de la certification par le Congrès.

    “Détruisez le GOP !”

    Avant de se rendre au Capitole hier, Trump a tenu un rassemblement “Sauvez l’Amérique” où il a dénoncé les républicains déloyaux comme Mike Pence et Mitch McConnell, qui allaient de l’avant en certifiant la victoire de Joe Biden. Trump a appelé ses partisans à se rendre au Capitole et à cibler les “républicains faibles”.

    Lors d’un rassemblement pro-Trump en décembre à Washington pour “stopper le vol”, Nick Fuentes, figure de proue d’extrême droite et avoué suprémaciste blanc, a crié : “Nous avons promis que si le GOP (Grand Old Party, le Parti républicain, NdT) ne faisait pas tout ce qui est en son pouvoir pour garder Trump au pouvoir, alors nous détruirions le GOP.” Cette déclaration a été suivie d’un chant enthousiaste de la foule : “Détruisez le GOP !” Trump lui-même a demandé l’emprisonnement du gouverneur républicain de Géorgie et a dénoncé les républicains qui s’opposaient à lui comme des “RINO” (Repubican in Name Only).

    Comme nous l’avons constamment averti, malgré la défaite électorale de Trump et la probabilité que ses tentatives de renverser l’élection échouent en raison de l’opposition de l’élite pro-entreprises et des éléments clés de l’appareil d’État, l’extrême droite progresse. Avec l’administration Biden et dans le cadre de la crise capitaliste actuelle, elle est prête à se développer encore davantage.

    Si les groupes fascistes et quasi-fascistes actuels restent relativement petits, il est fort possible que nous assistions aujourd’hui aux premiers stades d’une scission du Parti républicain et au développement d’un nouveau parti populiste de droite composé du noyau dur autour de Trump.

    Les lignes de division au sein du Parti républicain ont été illustrées de façon frappante lors des débats au Congrès avant-hier. Lorsque le Sénat s’est réuni à nouveau après que les forces d’extrême droite aient finalement été éliminées, la plupart des Républicains qui allaient soutenir les “objections” aux résultats ont fait marche arrière.

    Le débat a montré à quel point les événements d’avant-hier ont ébranlé l’establishment et la classe dirigeante – ce que le Sénat reflète plus fidèlement. L’accent a été mis en particulier sur les dommages que cela causerait à la “position des États-Unis dans le monde” (c’est-à-dire à la capacité de l’impérialisme à utiliser ses références “démocratiques” pour protéger ses intérêts). Les objections à la ratification des élections par le Sénat ont été balayées de 96 voix contre 3 et de 93 contre 6. À la Chambre, en revanche, la majorité des républicains (plus de 120) ont refusé de reculer, même face à des attaques cinglantes, y compris de la part d’une minorité de membres républicains du Congrès.

    Dans l’ensemble, les événements de ce 6 janvier ont été une défaite pour Trump. Il a formellement dû céder face à l’énorme pression de la classe dirigeante. Il n’avait pas l’intention de le faire au début de la journée. Il est bien sûr possible qu’il change à nouveau de cap dans les jours à venir, mais l’ensemble de l’establishment politique, y compris des éléments clés de la direction républicaine, se prépare à l’expulser de la Maison Blanche s’il tente de rester après le 20 janvier.

    Les divisions républicaines sont également une des raisons principales pour lesquelles les Républicains en place ont perdu leurs sièges au Sénat pour la Géorgie. Une partie de la base de Trump a refusé de voter pour Loeffler et Purdue, en partie à cause du sentiment général parmi les partisans de Trump que l’élection serait truquée. L’ancien avocat de Trump, Lin Wood, a pris la parole lors de plusieurs rassemblements pour décourager les partisans de Trump en Géorgie de voter pour Loeffler ou Perdue parce qu’ils n’ont pas été suffisamment fidèles à Trump. Il a déclaré “Ils n’ont pas mérité votre vote. Ne le leur donnez pas”.

    Après la tempête

    Alors que la poussière commence à se dissiper, des millions de personnes se demandent : que diable va-t-il se passer ensuite ?

    L’establishment politique des deux partis de Wall Street – Républicains et Démocrates – fait entendre sa voix au sujet de la nécessité de reconquérir l’âme du peuple américain. Il veut un retour à la normale. Biden a d’ailleurs derrière lui une longue histoire de collaboration avec les républicains réactionnaires. Il pourrait considérer dans le fait que des figures de premier plan du Parti républicain comme McConnell s’éloignent de Trump comme un signal pour aller encore plus loin dans cette voie.

    Face à la crainte de la croissance des forces d’extrême droite, la gauche et le mouvement ouvrier sont confrontés à une tâche urgente. L’histoire nous enseigne que la seule véritable riposte contre l’extrême droite – qui est un produit de la décadence du capitalisme – est un mouvement de masse de la classe ouvrière, au-delà de la couleur de peau. C’est encore ce que nous avons constaté il y a quelques années à Boston, quand 40.000 personnes avaient manifesté contre l’extrême droite dans le sillage des événements de Charlottesville (où une antifasciste avait été tuée). Celle-ci s’était retrouvée sur la défensive pendant toute une période.

    Mais au lieu de saisir les événements du 6 janvier comme une occasion d’appeler à une action de masse contre la tentative de coup d’État, les dirigeants de gauche comme Alexandria Ocasio-Cortez ont été dans la mauvaise direction. Plutôt que de lancer un appel à des manifestations de masse, ou même d’exhorter vaguement la gauche et le mouvement ouvrier à s’organiser, elle a tweeté : “Impeach” (en référence à une procédure de destitution). Les membres The Squad (La Brigade, un groupe d’élues progressistes) ont ensuite travaillé dans la précipitation pour rédiger de nouveaux articles de mise en accusation. Dans la même veine, Cori Bush, membre nouvellement élue de cette équipe, a présenté une résolution visant à expulser les membres du Congrès qui ont “incité à cette attaque terroriste intérieure”.

    Ces tactiques légales seraient très positives si elles accompagnaient une stratégie de mobilisation plus large des travailleurs, mais ce n’est pas ce que font ces dirigeants de gauche. Ils ne vont pas plus loin que les Démocrates établis comme Chuck Schumer qui demande d’invoquer le 25ème amendement et de démettre Trump de ses fonctions.

    AOC et The Squad devraient appeler à des manifestations de masse et à une organisation soutenue contre l’extrême droite. Elles devraient souligner que c’est précisément le programme néolibéral des deux partis de Wall Street qui a fertilisé le sol pour l’extrême droite. Les élus de gauche doivent défendre l’ensemble des réformes nécessaires pour réduire cette polarisation vers la droite, y compris des chèques de relance de 2 000 dollars pour la population, l’assurance maladie pour tous, un Green New Deal et un impôt important sur les riches.

    Le développement de la droite est très dangereux pour les travailleurs, les opprimés et toute la gauche. Nous avons besoin d’une direction de gauche décisive et audacieuse pour y faire face.

    Et maintenant ?

    Les Démocrates contrôlent maintenant les deux chambres du Congrès et la Maison Blanche. De nombreux Américains, dont le loyer est dû et les factures s’accumulent, seront heureux de voir partir Mitch McConnel qui a bloqué les chèques de relance de 2.000 dollars par ménage que même Trump soutenait.

    Ce sera un grand soulagement de voir que Trump et Mitch McConnel ont tous deux été éliminés comme obstacles immédiats à la résolution de cette crise. Les Démocrates seront probablement obligés d’envoyer des chèques de relance de 2.000 dollars et de fournir une aide substantielle aux États. Biden pourrait être prêt à prendre des mesures décisives pour renforcer les infrastructures de vaccination, par exemple en utilisant la loi sur la production de défense pour stimuler la production d’équipements de vaccination.

    Cela pourrait bien offrir à Biden et aux Démocrates une certaine lune de miel temporaire, mais leur victoire en Géorgie (qui leur offre la majorité au Sénat) est par ailleurs une mauvaise nouvelle pour l’establishment capitaliste. Cela signifie qu’ils n’ont aucune excuse et aucun croque-mitaine républicain à blâmer pour délivrer une assurance maladie pour tous, un Green New Deal, une taxe sur les riches et les grandes entreprises.

    Les deux prochaines années vont probablement permettre de clarifier pour des millions de personnes que les démocrates ne sont généralement pas dignes de confiance lorsqu’il s’agit de se battre pour les travailleurs. Cela mettra clairement sur la table la nécessité de l’indépendance politique de la classe ouvrière vis-à-vis des démocrates.

    L’establishment s’opposera résolument à des mesures progressistes largement populaires comme l’assurance maladie pour tous, qui sont un anathème pour les responsables des finances de leurs entreprises. Sans un républicain à blâmer, ils seront obligés d’expliquer leur hostilité à la politique progressiste. La façon dont l’équipe et Bernie Sanders s’y prendront dans les deux prochaines années aura des conséquences dramatiques pour la gauche.

    Battre la droite, construire la gauche

    C’est comme si un siècle entier était condensé dans le cycle des actualités d’avant hier. Il est tout à fait possible que dans les deux prochaines semaines, d’autres manifestations d’extrême droite tentent d’empêcher un transfert de pouvoir, des manifestations ayant déjà été organisées dans un certain nombre d’États. L’extrême-droite a peut-être été un peu calmée par les concessions de Trump, bien que des manifestations aient déjà été organisées dans plusieurs villes et semblent se poursuivre.

    Nous ne croyons pas que l’establishment démocrate ou l’État lui-même puisse ou veuille neutraliser cette menace, et il est crucial que la gauche et le mouvement ouvrier prennent l’initiative d’organiser des manifestations de masse pour faire taire l’extrême droite et unir la classe ouvrière au-delà de la couleur de peau autour d’un programme de changement réel. Partout où ils tentent de se tailler une place, nous devons nous y opposer en faisant preuve d’une grande unité de la classe ouvrière. Les dirigeants de la gauche et des syndicats ont un rôle énorme à jouer dans la popularisation de ce message, mais nous devons également poser rapidement les bases d’un parti indépendant qui représente les intérêts des travailleurs et des opprimés.

    Nous devons rompre avec la politique de l’establishment capitaliste et nous organiser maintenant pour vaincre la droite et gagner les réformes cruciales nécessaires pour les travailleurs, sur la voie de la fin du système capitaliste qui engendre l’inégalité, le racisme, le sexisme et le fascisme.

    Manifestation antifasciste à New York ce 7 janvier

  • Meeting en défense de Kshama Sawant : la droite tente de la destituer !

    Samedi 9 janvier à 20:00

    Parmi les intervenants se trouveront :

    • Julia Salazar, sénatrice de l’État de New York et membre des DSA (Democratic Socialists of America)
    • Mick Barry, député irlandais, membre de Solidarity et du Socialist Party
    • Jean Swanson, membre du conseil municipal de Vancouver (Canada), Coalition of Progressive Electors
    • Castill Hightower, militante contre les violences policières, soeur de Herbert Hightower Jr. qui a été tué par la police de Seattle
    • Sharon Crowley, organisatrice syndicale, UAW4121 (syndicat des employés de l’université de Washington)
    • Ubah Warsame, dirigeant d’organisations communautaires en Afrique de l’Est
    • Shukri Olow, responsable d’organisations communautaires,
    • …et plus encore !

    Ce 7 janvier, la Cour suprême de l’État de Washington se prononce sur l’autorisation de la campagne de rappel intentée contre la droite contre Kshama Sawant, membre socialiste du conseil de la ville de Seattle. Elle serait alors autorisée à commencer à recueillir des signatures d’électeurs en faveur de la destitution de Kshama.

    Les grandes entreprises et la droite sont furieuses de l’impact de la politique socialiste et des mouvements sociaux à Seattle et de l’exemple inspirant qu’elle a donné aux travailleurs du monde entier. Ils essaient maintenant d’utiliser les tribunaux et leurs poches bien remplies pour revenir sur la réélection de la membre socialiste du Conseil de Seattle Kshama Sawant en 2019 et les victoires historiques dont elle a été le fer de lance : la Taxe Amazon, le salaire minimum horaire de 15 dollars, l’interdiction – pour la première fois dans l’histoire du pays – d’utiliser des armes chimiques contre les manifestants et les lois historiques sur les droits des locataires comme l’interdiction des expulsions en hiver. Tout comme c’est le cas avec la police au sein du système capitaliste, nous savons que les travailleurs et les communautés opprimées ne peuvent pas compter sur les tribunaux pour obtenir justice.

    D’Attica Scott dans le Kentucky à Jeremy Corbyn au Royaume-Uni, en passant par l’attaque contre Kshama Sawant à Seattle, les dirigeants progressistes et socialistes sont pris pour cible en raison de leur engagement à lutter pour les travailleurs et contre le racisme, le sexisme et les inégalités. Alors que le capitalisme entre dans sa crise mondiale la plus profonde depuis un siècle et que la crise COVID continue de faire rage, les politiciens de l’establishment et le patronat se précipitent pour protéger leurs profits aux dépens de la classe ouvrière et des personnes opprimées. Ils espèrent faire taire les combattants comme Kshama Sawant qui se dressent sur leur chemin.

    Ce n’est pas par hasard si cette campagne de rappel contre celle-ci cite explicitement son soutien au mouvement Black Lives Matter et à la Taxe Amazon dans son argumentaire, tout en affirmant à plusieurs reprises qu’elle a enfreint la loi. Malheureusement, grâce aux procédures de rappel intrinsèquement antidémocratiques de l’État de Washington, Kshama n’aura jamais la possibilité de se défendre au tribunal contre ces fausses accusations, et il n’est pas nécessaire de prouver la véracité des accusations pour que la procédure de rappel soit autorisée.

    Nous ne pouvons pas nous permettre de rester les bras croisés pendant que l’une des dirigeantes les plus efficaces pour les travailleurs est chassée de sa position élue de manière antidémocratique et malhonnête par une campagne de droite financée par les entreprises.
    Rejoignez-nous et rejoignez les leaders et militants progressistes du monde entier le 9 janvier pour construire la campagne de solidarité de Kshama et pour nous défendre contre cette attaque contre tous les travailleurs !

    Rejoignez-nous sur Facebook ou YouTube Live !

  • USA. Violence d’extrême droite au Capitole : les syndicats, les mouvements sociaux et les socialistes doivent s’organiser pour faire taire l’extrême droite

    Réaction de Kshama Sawant, élue au Conseil de ville de Seattle et membre de Socialist Alternative

    L’horrible démonstration de violence d’extrême droite que nous voyons aujourd’hui à Washington nous rappelle de façon effrayante que si Trump a perdu les élections, le trumpisme et l’extrême droite se développent. Trump et sa base réactionnaire refusent d’accepter le résultat d’une élection démocratique. Socialist Alternative est solidaire de tous ceux qui se battent contre la droite et de tous ceux qui ont été piégés dans le Capitole, y compris les concierges, les travailleurs de l’entretien et autres membres du personnel.

    J’espère que tous ceux qui, à juste titre, sont anxieux et terrifiés à Washington en ce moment, resteront en sécurité. Nous devons compter les uns sur les autres en tant que travailleurs et sur notre solidarité. Nous soutenons les contre-protestations pacifiques appelées par les travailleurs et les socialistes dans le cadre d’une riposte immédiate contre l’extrême droite. Notre seule véritable défense est un mouvement de masse et une organisation de masse des travailleurs, des syndicats, des mouvements sociaux et des socialistes pour faire taire l’extrême droite !

    La police, ville après ville, a brutalisé les manifestations pacifiques de Black Lives Matter l’été dernier, au nom de “l’ordre public”. Où sont ces prétendus défenseurs de la loi et de l’ordre alors que l’extrême droite se déchaîne ?

    Cette émeute particulière prendra fin, et cette élection particulière sera certifiée, mais l’extrême droite n’en est à ses débuts, à moins que les travailleurs ne s’organisent. Nous sommes potentiellement aux premiers jours du développement d’un mouvement d’extrême droite, très probablement avec son propre parti politique.

    La violence d’extrême droite au Capitole résulte non seulement de Trump, mais aussi de l’échec complet de l’establishment démocrate à s’opposer de manière significative à ses attaques contre la classe ouvrière. Nous n’avons pas de temps à perdre. Nous avons besoin d’un parti de la classe ouvrière. Nous devons mettre en place une riposte de masse en faveur de l’assurance maladie pour tous, d’un Green New Deal et d’un contrôle démocratique réel sur la police. Les syndicats, les groupes communautaires, les socialistes, les militants et autres doivent se battre pour toutes ces revendications afin de construire une alternative puissante au populisme dangereux de Trump et vaincre l’extrême droite.

  • États-Unis : Trump vaincu, il faut maintenant s’attaquer à son monde !

    Au moment d’écrire cet article, Trump niait toujours sa défaite. Il venait même de limoger le patron de l’agence gouvernementale en charge de la sécurité des élections car ce dernier contestait les accusations du milliardaire républicain de fraudes « massives » à la présidentielle. Alors que la pandémie faisait toujours rage (elle a tué à ce jour plus de 242.000 personnes aux USA), Trump et ses partisans les plus fidèles préfèrent s’enfermer dans un étrange monde parallèle régi par les « faits alternatifs ».

    Dossier de Nicolas Croes publié dans l’édition de décembre-janvier de Lutte Socialiste

    Trump restera président jusqu’au 20 janvier, date à laquelle le président élu Biden devrait entrer en fonction. D’ici là, Trump jettera-t-il le gant ? Son incroyable égo le poussera-t-il toujours plus loin dans la provocation ? La mobilisation du 14 novembre constitue en tout cas un dangereux avertissement . Ce jour-là, des dizaine de milliers de personnes ont convergé vers Washington pour scander leur soutien à Trump. Parmi eux se trouvaient nombre de militants et de groupes d’extrême droite. La menace qu’ils représentent n’a cessé de croître ces 4 dernières années et, une fois libéré de la fonction présidentielle, un Trump déchaîné pourrait servir de figure de ralliement à ces multiples courants réactionnaires, du KKK aux Proud Boys. Pour efficacement faire face à ce danger ainsi qu’aux défis à venir, il faut correctement estimer ce que représente la photographie des États-Unis illustrée par ces élections et la placer dans le film des événements.

    « Au plus je regarde ces élections, au moins je les comprends »

    Cette citation provient du Prix Nobel de l’économie Paul Krugman, l’un des rares à avoir anticipé la crise économique de 2008-09. « La Floride fut une triomphale surprise pour Trump et a également voté pour un salaire minimum de 15 dollars de l’heure », a-t-il poursuivi. « Selon un sondage de sortie des urnes de Fox News, une majorité se dégage en faveur d’un plan sanitaire du gouvernement et d’une plus grande intervention de l’État en général alors que des sénateurs républicains qui veulent noyer l’État ont été élus ».

    Le résultat des élections fut très serré en de nombreux États, beaucoup plus que ce que les sondages laissaient présager. Pour les responsables officiels du Parti démocrate, l’explication ne fait aucun doute : on a trop entendu de voix de gauche durant la campagne électorale. On a trop entendu parler de ce maudit Bernie Sanders durant la primaire démocrate avec ses appels au socialisme ! On a trop entendu la congressiste Alexandria Ocasio Cortez et sa clique de gauchistes ! Les États-Unis ne sont pas prêts pour ces discours ! C’est évidemment ce message qui est relayé dans les médias internationaux dominants. Et tant pis si cela ne résiste pas à l’épreuve des faits.

    Différentes élections se déroulaient au même moment que la présidentielle. Pour la Chambre et le Sénat fédéraux, mais aussi pour les États fédérés. Parmi toutes les candidates et candidats, 112 soutenaient ouvertement le projet d’une assurance maladie universelle (Medicare for All). Toutes et tous ont été élus. 98 soutenaient le plan d’investissements massifs dans les infrastructures et pour une transition écologique Green New Deal : un seul n’a pas été élu. Les quatre élues démocrates qui se disent « socialistes » – The Squad (La Brigade) – Ilhan Omar, Alexandria Ocasio-Cortez, Rashida Tlaib et Ayanna Pressley ont toutes été brillamment réélues au Congrès.

    Divers projets de loi étaient également présentés aux électeurs, dont en Floride comme cela est sus-mentionné. Au Nevada – l’un de ces fameux « swing state », les États-charnières au vote indécis d’une élection à l’autre – c’était le cas du mariage homosexuel. Il y a dix-huit ans, les électeurs avaient largement voté pour réserver l’institution du mariage aux couples hétérosexuels et uniquement à eux. Cette fois-ci, les électeurs se sont très majoritairement (62%) prononcés pour la suppression de la mesure et l’inscription dans la Constitution de l’État de la reconnaissance des unions entre époux du même sexe, une première aux États-Unis. C’est une claire illustration du changement d’atmosphère qui saisit le pays. Mais, dans ce même État, Biden et Trump ont fini au coude-à-coude : 50.06% contre 47.67%. Et Paul Krugman continue à se gratter la tête.

    Les Démocrates ont mené une lutte acharnée… contre la politique progressiste

    Une chose est certaine : de plus en plus de gens en ont marre. Marre de ces milliardaires et de Wall Street qui s’enrichissent tandis que des gens dorment dans la rue et que les infrastructures s’effondrent. Marre de ces entreprises qui profitent de l’incarcération de masse dans des prisons privées. Marre que les jeunes sortent de leurs études la corde au cou. En 2019, 45 millions d’Américains cumulaient une dette de 1.600 milliards de dollars (1.482 milliards d’euros) pour payer leurs études supérieures !

    Si Bernie Sanders avait été le candidat démocrate aux élections, il aurait remporté ses élections à la suite d’un véritable tremblement de terre politique. Mais l’appareil et la direction du Parti démocrate ont déployé beaucoup plus d’efforts pour lui barrer la route au cours des primaires démocrates que pour vaincre Trump. L’establishment démocrate était horrifié par la perspective d’une victoire d’un candidat qui faisait appel à la volonté de se battre des travailleuses et des travailleurs. Il est d’ailleurs scandaleux que Sanders ait accepté la situation et soit resté dans le parti.

    L’establishment démocrate n’a renoncé à aucune manœuvre pour l’écarter et présenter un candidat gênant au point d’être le pire (à l’exception d’Hillary Clinton, peut-être) pourvu qu’il soit inoffensif aux yeux des grandes entreprises. Au vu de la manière dont ces primaires se sont déroulées, on peut comprendre que certains doutent de la validité du processus électoral.

    Au final, Biden et Trump ont tous les deux mené une campagne déconnectée de la réalité, chacun dans son style. Il faut savoir que bien que le pays ait été confronté au plus grand mouvement de masse de son histoire – contre le racisme systémique et les violences policières – Biden a recommandé à deux reprises que la police prenne plutôt l’habitude de tirer dans les jambes ! Beaucoup d’électeurs démocrates ont plutôt voté « contre Trump » que « pour Biden » (58% selon un sondage Axios). Les Démocrates ont tout fait pour aider Trump à se présenter comme un outsider anti-système alors que ce milliardaire était le président sortant !

    Trump a cherché à mobiliser les électeurs blancs conservateurs avec un cocktail de racisme, de sexisme, d’autoritarisme, d’appels à l’extrême droite, de théories du complot et de rhétorique de maintien de l’ordre. Mais ses électeurs n’étaient pas qu’un bloc monolithique d’électeurs blancs racistes. Beaucoup de gens ont été horrifiés par la gestion calamiteuse de la pandémie par Trump. Mais ses appels répétés à « ouvrir l’économie » ont trouvé un écho parmi une masse de gens inquiets pour leur avenir dans un pays où la sécurité sociale telle que nous la connaissons n’existe pas.

    Les sondages de sortie des urnes montrent que les électeurs qui ont considéré la pandémie comme l’enjeu principal ont voté pour Biden avec une marge de 82 %, tandis que ceux qui considéraient l’économie comme l’enjeu principal ont voté pour Trump avec une marge tout aussi importante. C’est ainsi que beaucoup de personnes d’origine latino-américaine ont voté pour Trump en dépit de son discours ouvertement raciste. En fait, sans la pandémie et sa gestion criminelle aux Etats-Unis, Trump aurait probablement facilement vaincu Biden.

    Sortir de la camisole de force Démocrate

    Entre 2008 et 2010, les Démocrates contrôlaient les deux chambres du Congrès. Pendant cette période, ils ont prolongé les réductions d’impôts de Bush et ont renié leurs engagements pour faciliter l’organisation des syndicats. Ils ont rejoint les Républicains dans une campagne acharnée pour privatiser et détruire l’enseignement public. Pour couronner le tout, la réponse d’Obama à l’immigration à travers la frontière sud a été d’expulser plus de personnes que tout autre président précédent.

    Les dirigeants des syndicats et d’autres organisations progressistes avaient refusé de résister à ces attaques en raison de leur totale soumission à l’establishment démocrate. L’aile populiste du Parti républicain a saisi ce vide pour exploiter le mécontentement économique, ce qui a conduit à la naissance du Tea Party en 2009, qui à son tour a ouvert la voie à Donald Trump. De même, sous une présidence Biden, la menace de l’extrême droite pourrait bien s’accroître.

    Le Parti démocrate est totalement inféodé aux intérêts capitalistes. Dans un premier temps, il est possible que l’élection de divers élus de gauche sous l’étiquette Démocrate entretienne l’illusion que c’est par ce biais que l’on peut offrir un outil politique pour les luttes sociales. Mais l’administration Biden/Harris ne résoudra aucun des problèmes cruciaux auxquels sont confrontés les travailleuses et travailleurs. L’école de la réalité donnera plus d’écho à l’idée de la création d’un nouveau parti, un parti de lutte, un parti reposant sur la force des travailleuses et des travailleurs, un parti totalement indépendant de Wall Street, un parti qui réunira dans l’action les différents mouvements sociaux (de Black Lives Matter aux syndicalistes des fast-food et d’ailleurs) pour repousser les racistes et défendre un programme qui découle des intérêts des masses. Un tel parti entrerait directement en confrontation avec les limites du capitalisme et devrait revendiquer son renversement pour construire une société socialiste démocratique. Nos camarades de Socialist Alternative feront tout leur possible pour aider chaque pas en cette direction.

  • A peine élu, Joe Biden trahit les écologistes qui l’ont soutenu

    Lors de sa campagne, le démocrate Joe Biden avait promis le retour immédiat des États-Unis dans l’Accord de Paris, assorti d’un plan climatique. Après les années Trump, grand partisan des énergies fossiles et responsable de la réduction des budgets de l’United States Environmental Protection Agency (EPA), on peut comprendre celles et ceux qui ont poussé un soupir de soulagement.

    « La victoire historique de Joe Biden est la première étape pour éviter la catastrophe climatique », a ainsi commenté sur Twitter la directrice exécutive de Greenpeace, Jennifer Morgan. Elle espère qu’il sera « le champion » de la cause environnementale. Durant sa campagne, Biden a promis un plan à hauteur de 1.700 milliards de dollars pour lutter pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2035. Il a déclaré que la cause écologiste est l’une de ses principales priorités.

    Dis-moi qui sont tes amis et je te dirai qui tu es

    Il faut toutefois rester prudent vis-à-vis de ses annonces électorales conçues pour plaire aux électeurs alors qu’au cours de l’année 2019, des millions de personnes ont été évacuées et des centaines de milliers ont perdu leur maison à cause d’incendies et d’inondations. Le thème du changement climatique s’est invité de force dans le débat électoral.

    Durant la campagne électorale déjà, de nombreuses voix ont souligné l’impossibilité d’obtenir la neutralité carbone en refusant de s’en prendre à la fracturation hydraulique (méthode d’extraction de pétrole et de gaz emprisonnés dans le sous-sol en y injectant des fluides à forte pression). Biden ne souhaite pas l’arrêt de cette technique très controversée qui représente pas moins de 35% de la production énergétique des États-Unis.

    Lors d’un des débats télévisés avec Donald Trump, Biden a déclaré qu’il était pour une « transition » de l’industrie pétrolière vers des énergies renouvelables, avant de se reprendre et de dire qu’il se limiterait à empêcher que des fonds gouvernementaux soient versés à l’industrie pétrolière. « Nous n’allons pas nous débarrasser des énergies fossiles. Nous allons nous débarrasser des subventions pour les énergies fossiles », a-t-il précisé. Dire le contraire aurait signifié se retourner contre des personnes telles qu’Andrew Goldman, co-fondateur de la société de production de gaz naturel Western LNG, qui a co-organisé diverses activités de levées de fonds à la faveur du candidat démocrate.

    Autre élément inquiétant, l’une des premières personnes désignées pour faire partie de son administration est l’actuel député Cédric Richmond, qui servira de liaison entre la Maison Blanche et le mouvement pour le climat. Au cours des dix ans qu’il a passés au Congrès, Richmond a reçu environ 341.000 dollars de donateurs de l’industrie du pétrole et du gaz. Richmond est d’ailleurs connu pour avoir a rompu à plusieurs reprises avec son propre parti dès lors qu’il s’agissait de votes sur le climat et l’environnement. Il s’est ainsi joint aux républicains pour voter en faveur de l’augmentation des exportations de combustibles fossiles et de la promotion du développement des pipelines, s’est opposé à une législation démocrate visant à (très peu) limiter la pollution due à la fracturation hydraulique,…
    La nomination a un goût de trahison pour des activistes comme Varshini Prakash, directeur exécutif du mouvement écologiste Sunrise Movement qui a fait partie du groupe de travail politique de Biden durant la campagne électorale. Cette nomination est « un affront aux jeunes qui ont rendu la victoire du president-élu possible. »

    L’écologie, mauvaise pour l’emploi ?

    Les États-Unis constituent le premier producteur mondial de pétrole et de gaz. Ce secteur emploie 10 millions de personnes. Trump n’a d’ailleurs pas hésité à jouer sur les craintes de pertes d’emplois causées par une transition verte pour s’attirer les votes de travailleurs. Et il faut dire que Biden n’avait rien à répondre… Pourtant, pour chaque emploi perdu dans les énergies fossiles, une réelle transition écologique en créerait au moins 10.

    La catastrophe climatique n’arrive pas, elle est déjà là. Si les émissions de carbone continuent d’augmenter comme elles le font actuellement, dans 30 ans, un demi-million de foyers américains seront inondés chaque année. D’ici 2070, 28 millions de personnes seront touchées par des méga-feux d’une taille équivalente à Manhattan.

    Les services d’incendie et de secours en général ainsi que de protection de la nature nécessitent de toute urgence une injection massive de personnel. Pour répondre à la crise du logement aux États-Unis et assurer que les infrastructures puissent résister aux conditions climatiques extrêmes qui deviennent hélas la norme, il faut un programme public massif de construction et de rénovation. Des millions d’emplois verts, socialement utiles et bien payés pourraient être créés ainsi. La reconversion des travailleuses et travailleurs des entreprises polluantes ne pose aucun problème.

    Mais on ne contrôle pas ce que l’on ne possède pas. Un véritable plan pour le climat devra s’appuyer sur l’expropriation des multinationales pétrolières afin de les empêcher de nuire et d’utiliser leurs fonds dans la réparation des dégâts qu’elles ont causés. La seule issue qui nous permettra d’échapper à l’enfer sur terre est la planification écologique socialiste.

  • [VIDEO] Violences faites aux femmes : c’est tout le système qui est coupable !

    Dans le cadre de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes (25 novembre) et à la veille de la Journée de commémoration du féminicide de Polytechnique (6 décembre), nos camarades québécois d’Alternative socialiste et des Étudiant·e·s socialistes UQAM ont organisé une rencontre publique virtuelle pour aborder le sujet et discuter des perspectives de luttes à venir.

    Les violences faites aux femmes ont de multiples facettes: violences conjugales, harcèlement et agression physique et sexuelle, violences psychologiques et violences économiques. Ce n’est pas une mince affaire et s’organiser pour y faire face est plus que nécessaire!

    La vidéo ci-dessous reprend ce débat, qui a notamment donné la parole à Émily Perrier Gosselin, membre d’Alternative socialiste (Québec), Allie Pev, membre de Socialist Alternative (Canada, qui a abordé la situation des femmes autochtones) et Celia Ponce Vicencio,
    membre du Parti socialiste de Lutte et de la campagne ROSA Belgique.

  • Après Trump… La menace de l’extrême droite n’a pas disparu, au contraire !

    Le 14 novembre, 10.000 partisans de Trump ont traversé Washington DC pour protester contre ce qu’ils estiment être une fraude électorale. Parmi les manifestants, tout un patchwork de groupes d’extrême droite et de partisans des théories du complot, avec notamment le groupe QAnon.

    Article de Geert Cool

    Polarisation et radicalisation

    Le changement d’atmosphère aux États-Unis se fait essentiellement vers la gauche. Le mouvement Black Lives Matter de l’été dernier l’a illustré, tout comme le soutien populaire de revendications telles qu’un système universel de soins de santé ou le flot de nouvelles affiliations syndicales. Mais à l’autre bout de cette polarisation, les idées réactionnaires s’enracinent dans une partie de la société. Une couche beaucoup plus restreinte, mais croissante, de la population est attirée par l’extrême droite. Les forces de l’extrême droite aux États-Unis sont plus importantes, plus visibles et plus sûres d’elles qu’elles ne l’ont été depuis de nombreuses décennies. Alors que le système s’enfonce dans la crise, l’extrême droite peut se développer encore plus. C’est certainement le cas si aucune alternative de gauche ne lui est opposée.

    Trump a réussi à remporter les élections de 2016 grâce à l’aversion pour la politique d’Obama et de Biden. Malgré une façade progressiste d’”espoir et de changement”, ce régime suivait servilement le programme des grandes entreprises. La “reprise” économique après 2008 n’a été ressentie que par les milliardaires et les grandes entreprises. Les banques ont été sauvées, mais les gens ont été expulsés de leur logement. La poursuite des guerres au Proche-Orient continue d’alimenter l’islamophobie. Face à Trump, les Démocrates ont placé Hillary Clinton en 2016, l’une des figures de proue de l’establishment.

    L’extrême droite s’est développée aux États-Unis ces dernières années. Le Southern Poverty Law Center a dressé la carte des groupes suprémacistes blancs : leur nombre a augmenté de 55 %, passant de 100 en 2017 à 155 en 2019. La violence de l’extrême droite a cru et provoqué des dizaines de morts. En même temps, il faut noter que l’extrême droite américaine est loin d’atteindre la force que le Ku Klux Klan avait à son apogée. Dans les années 1920, le KKK comptait entre trois et six millions de membres !

    Face à la violence de l’extrême droite, la riposte a souvent été massive. Après l’assassinat d’une antifasciste à Charlottesville en 2017, de grandes manifestations ont eu lieu. Un cortège de 40.000 personnes a empêché une manifestation d’extrême droite de se dérouler. Si l’extrême droite n’a pas pu dominer les rues après les élections de novembre 2020, c’est aussi en raison des mobilisations de masse pour exiger que tous les votes soient comptés et pour empêcher que Trump ne vole les élections. Dans toutes ces mobilisations, on a pu constater que non seulement le Parti démocrate ne prenait pas l’initiative, mais qu’il lui était souvent hostile.

    QAnon et les Proud Boys

    Trump a utilisé la désinformation et l’a amplifiée. C’est allé si loin que des médias sociaux comme Twitter et Facebook ont publié des alertes sur les messages du président. La méfiance à l’égard des médias établis (qui est justifiée) a été instrumentalisée pour renforcer la campagne de Trump, non seulement par le biais de médias “alternatifs” de droite comme Breitbart, qui était dirigé par Steve Bannon, mais aussi par toutes sortes de réseaux sociaux.

    QAnon est une mouvance populaire reposant sur les théories conspirationnistes populaires. Le nom fait référence à un compte anonyme “Q” selon lequel une guerre secrète a lieu entre Donald Trump et les élites de “l’État profond” qui commettraient des crimes pédophiles et sataniques. Cette mouvance a également des partisans en Belgique, notamment Eva Rollier, du Vlaams Belang à Zoutleeuw. Même des figures dirigeantes du VB comme le député européen Gerolf Annemans et le président du VB Van Grieken y ont fait référence dans leurs tweets. A Liège, des drapeaux QAnon ont été vus à un petit rassemblement anti-masques.

    Certains vont plus loin et s’organisent en milices d’extrême droite, comme les “Proud Boys”. Cette milice, dont seuls les hommes peuvent devenir membres, a été impliquée dans des actes de violence et d’intimidation contre des opposants de Trump, qui leur a en retour offert un soutien explicite. La violence de l’extrême droite aux États-Unis pose un problème plus large. En 2018, les violences commises par les extrémistes ont tué au moins 50 personnes ; dans la grande majorité des cas, les auteurs étaient des militants d’extrême droite. Selon le Comité antiterroriste du Conseil de sécurité des Nations unies, le terrorisme d’extrême droite a augmenté de 320 % dans le monde entier au cours des cinq années précédant 2020. En Europe, l’extrême droite est responsable du plus grand nombre d’attentats (ou de tentatives d’attentats). Dans notre pays, 3.000 personnes sont connues de la police en raison de leur extrémisme de droite.

    Comment riposter ?

    La crise du système capitaliste ouvre un espace à l’extrême droite. La meilleure manière de l’empêcher de dominer les rues, c’est la mobilisation de masse. Quand l’extrême droite a les coudées franches, ses premières victimes sont ses opposants, au premier rang desquels le mouvement ouvrier. Nous ne devons ni compter ni nous reposer sur l’establishment capitaliste ou l’État. Nous devons organiser les travailleurs et les jeunes et faire usage de notre force collective. Cela ne suffira toutefois pas à stopper l’extrême droite : dans nos actions, nous devons défendre une alternative au capitalisme, afin que la méfiance et l’aversion justifiées envers le capitalisme ne soient pas instrumentalisées par des forces de droite réactionnaires. La seule solution à long terme est de mettre un terme à ce système insensé.

  • USA : La droite tente de prendre sa revanche sur Kshama Sawant

    Les grandes entreprises et la droite sont furieuses de l’impact de la politique socialiste à Seattle, et font tout pour tenter de démettre de ses fonctions Kshama Sawant, élue de Socialist Alternative au conseil de ville. Ils ont lancé une campagne visant à sa destitution.

    Par Bia Lacombe, Socialist Alternative (partisans d’Alternative Socialiste Internationale aux Etats-Unis)

    Cette campagne contre Kshama Sawant intervient quelques mois seulement après que le bureau de Kshama et un mouvement populaire aient remporté à Seattle l’imposition de la Taxe Amazon : une taxe sur les 500 plus riches entreprises basées à Seattle (dont la multinationale Amazon) qui devrait rapporter entre 210 et 240 millions de dollars par an, lesquels seront utilisés pour créer des dizaines de milliers d’emplois verts avec protection syndicale en construisant des logements sociaux. Cette victoire capitale représente un transfert de richesse de 2 milliards de dollars des mains des grandes entreprises vers les travailleurs au cours de la prochaine décennie.

    Depuis plus de sept ans, le bureau de Kshama Sawant a démontré ce que se tenir sans ambiguïté du côté des gens ordinaires en tant qu’élue signifie. L’approche unique de Kshama en matière de construction de mouvements sociaux a conduit à des victoires historiques. Parmi elles, l’imposition du salaire minimum de 15 dollars de l’heure pour la première fois dans une grande ville des Etats-Unis, des législations inédites sur les droits des locataires (comme l’interdiction de procéder à des expulsions en hiver) et une interdiction des armes de contrôle de foules par la police, la première loi du genre dans le pays à la suite des soulèvements contre le racisme et la violence policière liées au meurtre de George Floyd cet été. [Rappelons qu’à Seattle, le conseil de ville comporte tout simplement 9 sièges aux fonctions similaires à celles d’échevins en Belgique, pour une ville de 750.000 habitants, NdT]

    En tant que conseillère, Kshama n’a pas basé son action sur des changements législatifs obtenus par des compromis avec ses collègues conseillers liés au Parti démocrate et aux intérêts des grandes entreprises. Dèsson premier jour en fonction, elle s’est orientée vers la classe ouvrière, la jeunesse et les organisations progressistes de la ville de Seattle. A leurs côtés, elle a travaillé à la construction d’un rapport de forces sur les lieux de travail, dans les écoles et les quartiers, pour exiger de la mairie ce qui est nécessaire (et non ce qui est acceptable pour le pouvoir en place). C’est de cette façon qu’elle a pu remporter des victoires historiques à Seattle tout en étant isolée au sein du conseil.

    L’actuelle campagne en faveur de sa révocation vise à revenir sur chacune de ces conquêtes et à repousser la politique de Seattle vers la droite. Il ne s’agit là que de la dernière d’une série d’attaques de la droite et des grandes entreprises. Nous devons nous attendre à ce que ce type d’attaque ne fasse que croître en importance et en fréquence à mesure que nous nous battons pour obtenir plus de victoires, et de moyens, pour les travailleuses et les travailleurs de Seattle.

    Il y a moins d’un an, Jeff Bezos, les grandes entreprises et la droite ont tenté d’acheter le conseil de ville de Seattle en dépensant des millions de dollars pour soutenir des candidats pro-entreprises dans toute la ville. Les militantes et militants de Socialist Alternative se sont organisés, ont mis sur pied une campagne de terrain et ont frappé à plus de 120.000 portes pour finir par vaincre l’homme le plus riche du monde ! Alors que la classe dirigeante pensait avoir vaincu Kshama lors de la première tentative d’imposer par la force d’un mouvement social la Taxe Amazon en 2018, elle a été réélue en 2019 et a ensuite aidé à faire passer une deuxième taxe sur les grandes entreprises qui était quatre fois plus importante que la première. Après avoir échoué à maintes reprises à battre la triple élue socialiste au Conseil par le biais d’un scrutin, l’establishment capitaliste tente maintenant d’utiliser les tribunaux pour la démettre de ses fonctions en introduisant un processus de destitution antidémocratique.

    Les victoires sociales remportées à Seattle ont changé la vie d’innombrables personnes et ont donné des exemples puissants qui se sont répandus dans tout le pays. L’exemple de Kshama a renforcé la confiance des travailleuses et des travailleurs dans le fait que nous pouvons nous battre pour une alternative à la misère et à la brutalité de la vie sous le capitalisme. C’est cet exemple qui est plus menaçant pour la classe dirigeante que toutes les victoires concrètes remportées. La classe dirigeante fera tout son possible pour écraser la confiance que Kshama inspire aux mouvements sociaux.

    Un tsunami d’argent des grandes entreprises va être injecté dans ce combat. La propagande médiatique va se déchainer. La campagne d’éviction de Kshama a déjà récolté plus de 123.000 dollars, parmi lesquels 50.000 de dollars de dons anonymes, une tentative évidente de dissimuler qui sont se trouve derrière. Martin Selig, un milliardaire qui a financièrement participé à la campagne de réélection de Trumpp, soutient la campagne de révocation. Il avait déjà dépensé 25.000 dollars pour abroger la première Taxe Amazon et a contribué aux campagnes de l’adversaire de Kshama l’an dernier. Nous avons toutes les raisons de nous attendre à ce que les entreprises versent à nouveau des sommes considérables par le moyen des Comité d’action politique (une manière particulière de levée des fonds), comme en 2019. Parmi les donateurs publics de cette campagne d’éviction se trouvent de nombreux « Investisseurs », « CEO », « investisseurs en capital-risque », « banquiers d’affaires » et autres « conseillers financiers ». Il est évident qu’il s’agira d’une répétition de la liste des donateurs de droite ultra-riches qui ont essayé en vain d’acheter le siège de Ksama Sawant lors des dernières élections locales.

    Nous savons très bien que les tribunaux – tout comme la police – ne sont pas les amis des travailleurs. Nous l’avons déjà constaté lorsqu’une Cour suprême a confirmé les charges de destitution contre Kshama pour avoir soutenu le mouvement Black Lives Matter, alors que cette même Cour suprême avait rejeté à l’unanimité les charges de destitution contre la maire démocrate Jenny Durkan qui l’accusaient d’avoir dirigé la brutale répression du mouvement. Kshama aura besoin de se défendre à de multiples occasions contre ces accusations : la loi de l’État de Washington stipule que les charges n’ont pas besoin d’être prouvées pour figurer sur le bulletin de vote comme s’il s’agissait de faits établis.

    Les médias pro-entreprise sont déjà passés à l’offensive et ont publié des articles prétendant faussement que Kshama encourageait « la violence et l’anarchie » puisqu’elle se trouve du côté des manifestants pacifiques réclamant la justice après le meurtre de George Floyd. Le Seattle Times, par exemple, a tenté d’assimiler Kshama et le mouvement Black Lives Matter au complot de droite visant à kidnapper le gouverneur du Michigan pour avoir manifesté pacifiquement dans le quartier de la maire Durkan. Voilà le type d’actions jugées suffisamment horribles pour que Kshama mérite la destitution !

    Ce que ces articles des médias dominants oublient de mentionner, c’est que les manifestations de masse de cette année ont été en grande majorité pacifiques et ont eu un impact puissant pour faire reculer le racisme à l’ère de Donald Trump. À Seattle, elles ont également contribué à deux victoires historiques : l’interdiction, pour la police, d’utiliser des armes chimiques, une première du genre dans le pays, et la Taxe Amazon pour des logements abordables. Nous savons ce qui assure réellement la sécurité de nos communautés : des emplois bien rémunérés et protégés par les syndicats, des logements abordables et une éducation et des services publics qui disposent de suffisamment de moyens en taxant les riches. C’est pour cela que Kshama et les divers mouvements sociaux de Seattle ont dû se battre contre l’opposition de l’establishment politique. Malgré les énormes ressources dont dispose la droite et les grandes entreprises, nous devons nous souvenir que nous pouvons gagner lorsque nous nous organisons.

  • USA. Trump ? Plus jamais ! Il nous faut un parti de la classe ouvrière

    Aux États-Unis, les travailleuses et travailleurs sont confrontés à une crise de grande ampleur. Des décennies d’attaques néolibérales contre les syndicats et les conquêtes sociales ont engendré le plus haut niveau d’inégalité en un siècle ainsi qu’une précarité massive. Les coupes budgétaires drastiques opérées dans les hôpitaux publics ces dernières années, auxquelles s’ajoute le fait que des millions de personnes sont privées d’assurance maladie, ont laissé le pays dans un dangereux état d’impréparation face à cette pandémie, tout particulièrement pour les pauvres.

    Par Tom Crean, Socialist Alternative (partisans d’Alternative Socialiste Internationale aux USA)

    Dans l’immédiat, il n’existe aucun plan national pour faire face à la pandémie. Le nombre de nouveaux cas de contamination atteint des records et les hôpitaux de nombreuses régions du Midwest se dirigeant vers l’effondrement total. Le fait que les Républicains et les Démocrates n’aient pas accepté de prolonger l’allocation exceptionnelle de chômage de 600 dollars signifie que des millions de personnes vivent sur leur carte de crédit et ne peuvent rester chez elles qu’en raison du moratoire fédéral sur les expulsions. Sans assistance supplémentaire, des centaines de milliers de petites entreprises vont faire faillite.

    Entre-temps, l’épidémie de brutalité policière a déclenché une rébellion antiraciste de masse qui transcende la couleur de peau. A cela s’ajoute le plus grand défi auquel nous sommes confrontés : celui du désastre climatique, illustré aux Etats-Unis par la saison des feux de forêt dévastateurs dans les États de l’Ouest.

    Toutes ces catastrophes sont des sous-produits du capitalisme en déclin de cette période. Donald Trump est également un sous-produit du capitalisme en déclin et, pendant ses quatre années de mandat, il s’est efforcé d’aggraver presque tous les problèmes auxquels les travailleuses et travailleurs sont confrontés. Mais il n’a certainement pas créé ces problèmes. Si des dizaines de millions de personnes ici et dans le monde entier se réjouissent, à juste titre, de la fin de son règne, il nous faut aller plus loin que son éviction pour résoudre ces problèmes. Pour cela, il faut analysé la manière dont le système politique pro-entreprises à deux partis – et en particulier le Parti démocratique – a travaillé sans relâche afin de maintenir la domination de l’élite milliardaire.

    Les Démocrates, le parti du capitalisme néolibéral

    Les Démocrates, l’un des deux principaux partis capitalistes aux États-Unis depuis le XIXe siècle, ont derrière eux une histoire longue et complexe. Le parti de l’après-Seconde Guerre mondiale reposait sur une alliance entre les ségrégationnistes du Sud (les “Dixiecrat” ) et une coalition de travailleurs, d’immigrés blancs et de noirs du Nord. Dans le sillage du mouvement des droits civiques, les blancs conservateurs du Sud ont commencé à se rapprocher des Républicains.

    Cela a été suivi par le changement d’orientation de la classe dirigeante vers ce que l’on appelle aujourd’hui le néolibéralisme, à la fin des années ’70. Les Démocrates ont adopté le programme néolibéral de déréglementation, de réduction du rôle des autorités, de promotion du libre-échange et de recul des syndicats (tout en acceptant des dizaines de millions de dollars de contributions des syndicats à leurs campagnes électorales). Cela représentait l’abandon de la prétention de représenter les intérêts des travailleuses et des travailleurs, une prétention qui remonte au New Deal. Au lieu de cela, le parti a prétendu se soucier des discriminations racistes et sexistes afin de se distinguer des Républicains qui, de leur côté, ont de plus en plus utilisé des sujets tels que les armes à feu, l’avortement et la discrimination positive pour mobiliser leur base.

    Au cours des huit années de mandat de Bill Clinton, de 1992 à 2000, les Démocrates se sont appuyés sur ce que les régimes réactionnaires de Ronald Reagan et George Bush « père » avaient accompli au cours des douze années précédentes. Ils ont entrepris de « mettre fin à l’assistance sociale telle que nous la connaissons », en vidant de leur substance les programmes de lutte contre la pauvreté qui avaient été adoptés sous pression de la lutte de masse dans les années ’60 et ’70. Ils ont adopté la Crime Bill de 1994, une législation qui a accéléré l’incarcération de masse visant la population noire. Ils ont adopté le plus grand accord commercial néo-libéral, l’ALENA (Accord de Libre Échange Nord Atlantique), qui a entraîné la perte de centaines de milliers d’emplois industriels. A la demande de Wall Street, ils ont même abrogé la loi Glass Steagall des années 1930 qui avait imposé une réglementation de base aux banques. Cela a contribué à alimenter le casino financier qui a déclenché la crise économique de 2008-2009.

    Après l’arrivée au pouvoir de George W. Bush en 2000 au cours d’une élection volée, les Démocrates ont capitulé, une question après l’autre. Après le 11 septembre 2001, ils ont voté pour le Patriot Act qui a massivement augmenté les pouvoirs de surveillance du gouvernement. La plupart des Démocrates ont soutenu avec enthousiasme la désastreuse invasion de l’Irak deux ans plus tard. Un grand nombre d’entre eux ont également soutenu les réductions d’impôts pour les riches et la réduction de l’impôt sur les sociétés de Bush, ce qui a contribué à accroître encore les inégalités.

    Les Démocrates sont revenus à la Maison Blanche en 2008 avec la victoire d’Obama, alors que l’économie était au milieu de sa crise la plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale. L’élection du premier président noir avait suscité un immense espoir, mais la rhétorique d’Obama ne contenait aucun engagement à changer de cap par rapport au néolibéralisme de Bill Clinton. Une fois au pouvoir, la solution de son administration à l’effondrement économique a été de renflouer les banques à hauteur de milliers de milliards de dollars tout en restant sourds aux millions de personnes qui perdaient leur maison.

    Entre 2008 et 2010, les Démocrates contrôlaient les deux chambres du Congrès. Pendant cette période, ils ont prolongé les réductions d’impôts de Bush et ont renié leurs engagements pour faciliter l’organisation des syndicats. Ils ont rejoint les Républicains dans une campagne acharnée pour privatiser et détruire l’enseignement public. Pour couronner le tout, la réponse d’Obama à l’immigration à travers la frontière sud a été d’expulser plus de personnes que tout autre président précédent.

    Les dirigeants des syndicats et d’autres organisations progressistes ont refusé de résister à ces attaques en raison de leur totale soumission à l’establishment démocrate. L’aile populiste du Parti républicain a saisi ce vide pour exploiter le mécontentement économique, ce qui a conduit à la naissance du Tea Party en 2009, qui à son tour a préparé le terrain pour Donald Trump. De même, sous une présidence Biden, la menace de l’extrême droite pourrait bien s’accroître, les Démocrates supervisant une crise massive sans indiquer aucune issue.

    Voilà le bilan désastreux du Parti démocrate au cours des quarante dernières années. Ils défendent des politiques rejetées par leur base au niveau local et national, comme le fait de donner à la police et à l’armée toujours plus de moyens. En même temps, ils refusent de soutenir des politiques comme l’assurance maladie pour tous et la taxation des riches, mesures soutenues par des majorités importantes de toute la population, tout simplement parce que cela s’oppose aux grandes entreprises qui sont les bailleurs de fonds des Démocrates.

    Au cours des dix dernières années, d’énormes luttes ont contribué à reconstruire la gauche aux États-Unis, du mouvement Occupy à la révolte des enseignants de 2018 en passant par le mouvement Black Lives Matter. En 2016 et de nouveau en 2020, les campagnes présidentielles de Bernie Sanders ont démontré le potentiel dont dispose une alternative de gauche de masse construite autour d’un programme de lutte pro-travailleurs. Sanders était le défenseur de l’assurance maladie pour tous, d’un New Deal vert, de la fin des incarcérations de masse, d’un salaire minimum fédéral de 15 dollars et d’un enseignement gratuit.

    Mais malgré la radicalisation massive de ces dernières années, en particulier parmi la jeunesse, le changement que les gens veulent réellement n’était pas au programme lors des élections de novembre. De façon incroyable, nous avons eu Joe Biden, le pire représentant du néolibéralisme démocrate à l’exception peut-être d’Hillary Clinton. Joe Biden, qui a été au Sénat ou à la Maison Blanche (comme vice-président) pendant 44 années consécutives, a été l’architecte du projet de loi sur la criminalité de 1994 et un ardent partisan de l’ALENA et de la guerre en Irak. Cette situation s’explique par le fait que le Parti démocrate est fermement détenu par les grandes entreprises américaines. Et tant que Sanders, AOC, les syndicats et les forces progressistes accepteront le cadre des Démocrates, ce genre de résultat se produira encore. Il est aujourd’hui bien tragique de voir Sanders briguer un poste dans le cabinet de Biden.

    Faut-il s’attendre à une différence ?

    A quoi ressembleront les Démocrates au pouvoir cette fois-ci ? Ils ont promis de “dépenser de l’argent”. Cela peut sembler être un mouvement vers la gauche par rapport à leur soutien passé aux coupes budgétaires dans les services sociaux. Cependant, ce n’est pas du tout radical dans le contexte de la crise économique mondiale actuelle. Toutes les principales institutions financières capitalistes du monde, y compris le FMI, la Banque mondiale et la Réserve fédérale américaine, préconisent des mesures de relance budgétaire massives en plus de ce qui a déjà été dépensé (bien plus que les années 2008-09). Elles craignent à juste titre que l’économie ne soit au bord d’un profond marasme si elles ne continuent pas à injecter de l’argent.

    Mais il y a une grande différence entre “dépenser de l’argent” pour une extension temporaire des allocations de chômage et de l’aide aux petites entreprises – ce qui est tout à fait nécessaire – et s’engager réellement dans des programmes à plus long terme. Biden et Harris ont clairement indiqué qu’ils s’opposeraient activement à l’assurance maladie pour tous malgré sa grande popularité. Au cours de la campagne, ils ont renouvelé leur opposition à l’interdiction de la fracturation hydraulique et, tout en affirmant qu’il faudrait s’éloigner des combustibles fossiles, ils se sont catégoriquement opposés à un Green New Deal, qui créerait pourtant des millions d’emplois décents. Ils ont même déclaré qu’ils seraient favorables à un financement accru de la police !

    Dans les jours qui ont suivi l’élection, la députée Abigail Spanberger s’est exclamée avec insistance que la raison pour laquelle le parti a perdu des sièges à la Chambre est qu’il s’est associé à la politique progressiste. La conclusion de Spanberger à l’intention du parti est la suivante : “Ne dites plus jamais ‘socialisme’.”

    Les Démocrates chercheront à la première occasion à mettre en œuvre des coupes d’austérité sauvages pour faire payer à la classe ouvrière le coût de la crise. Ils résisteront à toute proposition sérieuse de taxation des riches et des grandes entreprises et ils chercheront à maintenir autant que possible le programme néolibéral. Mais ils seront confrontés à d’énormes problèmes parce que la masse de la population rejettera l’austérité et la poursuite des politiques des dernières décennies.

    Construire un nouveau parti

    Si les Démocrates ne sont pas le véhicule qui nous permettra d’arracher le changement dont nous avons besoin, comment gagner l’assurance maladie pour tous, le Green New Deal, et placer la police sous un véritable contrôle démocratique ? L’histoire de ce pays montre que les gains réels pour les travailleuses et les travailleurs ne sont obtenus que par des mouvements de masse et la lutte sociale. Citons par exemple la campagne de syndicalisation de masse et la vague de grèves des années 30 ou encore le mouvement des droits civiques des années 50 et 60.

    Face à une classe de milliardaires qui a amassé près d’un trillion de dollars supplémentaires au cours de cette pandémie, il est clair que nous devons de toute urgence reconstruire un mouvement ouvrier combatif. Les enseignants, les travailleurs de l’hôtellerie et de l’automobile ont montré la voie en 2018-19.

    Mais pour prendre en charge les intérêts bien ancrés de la classe des milliardaires, nous avons également besoin d’un parti politique qui représente nos intérêts. Les deux campagnes présidentielles de Bernie Sanders ont montré non seulement le niveau de soutien potentiel pour une alternative politique de gauche, mais aussi concrètement comment des centaines de millions de dollars pourraient être récoltés auprès des gens ordinaires sans accepter un centime de l’argent des entreprises. Depuis des décennies, on nous dit qu’il est impossible de mener des campagnes sérieuses sans l’argent des entreprises. Si les campagnes de Sanders n’ont rien fait d’autre que de détruire ce mythe, elles ont fait une chose très précieuse.

    À quoi devrait ressembler un nouveau parti de gauche basé sur les intérêts des travailleuses et des travailleurs ? Avant tout, ce devrait être un parti de lutte, et non pas simplement une machine électorale. Comme Socialist Alternative l’a démontré en organisant des campagnes victorieuses à Seattle qui ont permis d’élire Kshama Sawant au conseil de ville à trois reprises, la clé est de construire des mouvements dans la rue et d’imposer ces mouvements dans les couloirs du pouvoir. C’est ainsi que nous avons gagné pour la première fois les 15 dollars de l’heure de salaire minimum dans une grande ville et que nous avons gagné la Taxe Amazon, qui permettra de récolter des centaines de millions de dollars auprès des grandes entreprises pour construire des logements abordables et répondre à d’autres besoins essentiels à Seattle.

    Un parti national de travailleuses et de travailleurs devrait représenter toutes les luttes de la classe ouvrière, de plus en plus multiraciale et multigenre, y compris la lutte pour mettre fin aux politiques d’expulsion massive et pour les droits de citoyenneté des travailleurs immigrés ; pour défendre le droit à l’avortement et les droits des personnes LGBTQI contre les attaques de la droite réactionnaire enhardie ; pour mettre fin à toutes les politiques de “gerrymandering” (découpage électorale des quartiers pour noyer le vote progressiste) et de suppression des électeurs.

    Nous avons besoin d’un parti où nos représentants élus sont responsables devant les membres et où ils sont tenus de voter pour les revendications figurant dans le programme du parti. La responsabilité signifie également que les représentants publics du parti ne gagnent pas plus que le salaire moyen des travailleurs, à l’instar de Kshama Sawant.

    Dans un tel parti, les marxistes se battraient pour une plate-forme anticapitaliste claire qui préconise de faire entrer dans le giron de l’État des secteurs clés de l’économie, notamment les banques, les soins de santé, les grandes entreprises ainsi que les secteurs de l’énergie, de la logistique et des transports. C’est la seule façon de commencer à orienter les ressources de la société vers l’élimination des inégalités massives et du racisme structurel, ainsi que vers une transition rapide des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables.

    Une question qui est souvent posée est de savoir d’où viendront les forces de ce nouveau parti. Notre réponse est qu’il existe un énorme potentiel de soutien de la part de ceux qui ont soutenu les campagnes de Sanders, de syndicalistes progressistes et de jeunes gens actifs dans la lutte contre le racisme, le sexisme et les catastrophes climatiques. Mais il est absolument vrai qu’il faudra d’importantes organisations importants pour lancer ce parti.

    La gauche américaine compte des personnalités de premier plan comme Sanders, AOC et la nouvelle élue Cori Bush, membre du Congrès du Missouri. Nous avons besoin qu’ils entendent leurs partisans qui ont tiré la conclusion que le Parti démocrate ne peut pas être réformé. Nous applaudissons des personnalités comme Cornel West, Nina Turner (présidente de Our Revolution) et Roseann De Moro (ancienne présidente de National Nurses United), qui vont déjà dans cette direction. Nous avons besoin que les démocrates-socialistes d’Amérique (DSA), qui ont atteint les 70.000 membres ces dernières années et se sont formellement engagés à soutenir la formation d’un parti ouvrier, fassent réellement de cet effort une priorité. Une mesure immédiate pourrait consister à commencer à présenter des candidats socialistes pour les postes locaux sur une base indépendante du Parti démocrate, avec une plate-forme commune et un objectif de construction du mouvement.

    Plus jamais de Trump

    Nous devons être très clairs sur le fait que, si nous ne commençons pas à prendre des mesures plus sérieuses pour construire une nouvelle force politique basée sur la classe ouvrière multiraciale et multigenre, nous serons confrontés à de sérieux dangers dans les années à venir. Donald Trump et la droite populiste ont construit une base politique massive, qui comprend une aile d’extrême droite croissante.

    Si la situation de 2008-10 se répète, avec des travailleurs et des sections de la classe moyenne qui souffrent du fait que les banques et les entreprises sont dirigées par une administration démocrate, l’extrême droite aura la possibilité de se développer davantage.

    Aux États-Unis, il aurait été possible de créer un parti des travailleurs dans les années 1930, 1970 et 1990. Pour diverses raisons, ces possibilités ont été dilapidées. Aujourd’hui, il est plus clair que jamais pour des millions de personnes, en particulier les jeunes, que le capitalisme est un système en faillite. Le temps est venu de construire un puissant mouvement, organisé sur les lieux de travail, dans les quartiers et les universités et reflété dans les urnes, qui peut remettre en cause de manière décisive le règne des milliardaires. Ce mouvement ne doit s’arrêter à rien pour mettre fin à la domination destructrice et parasitaire du capital en Amérique et s’unir aux travailleuses et travailleurs du monde entier pour construire un avenir socialiste pacifique, prospère et égalitaire.

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