Category: Amérique du Nord

  • USA. Roe vs Wade : Des milliers de personnes inondent les rues pour le droit à l’avortement ! Et ensuite ?


    Le 2 mai, un projet de décision divulgué à Politico est apparu, indiquant que la Cour suprême des États-Unis est sur le point de renverser Roe v. Wade, la décision historique qui a légalisé l’avortement. Socialist Alternative a lancé l’appel « Descendez dans la rue pour défendre Roe ».

    Par Greyson Van Arsdale | Socialist Alternative — Alternative Socialiste Internationale – USA

    Le soir du 3 mai, des milliers de manifestant-e-s se sont rassemblé-e-s dans des villes de tout le pays pour protester contre la fuite du projet de décision de la Cour suprême qui annulerait Roe v. Wade. La Cour doit se prononcer au début de l’été, ce qui donne au mouvement le temps de s’organiser et de lutter contre cette décision.

    Socialist Alternative a mené de grandes manifestations à Philadelphie, Boston, Minneapolis, Madison, Pittsburgh, Chicago, Houston et Seattle, entre autres, appelant à une escalade d’actions avec des débrayages et des grèves pour faire pression afin de stopper la décision. Dans d’autres villes, nous avons dirigé des contingents féministes socialistes dynamiques au sein de manifestations plus larges.

    Certaines personnes ont voyagé pendant des heures pour assister à cette manifestation de milliers de personnes au Capitole de l’État à Madison, WI

    « Les grandes victoires progressistes aux États-Unis n’ont jamais été emballées dans un paquet cadeau et remises par l’establishment », a déclaré Rachel Wilder, membre de Socialist Alternative et étudiante à l’université Temple de Philadelphie. « En fait, l’establishment a toujours été du mauvais côté de l’histoire – sur l’avortement, le mariage gay, la déségrégation – jusqu’à ce que des mouvements de masse de travailleurs forcent les deux partis du grand capital à céder. Nous avons besoin de millions de personnes dans les rues pour défendre l’avortement et arrêter la droite ! »

    Les manifestations dans tout le pays ont montré un grand mécontentement face aux échecs du parti démocrate à défendre l’avortement et à se battre pour ce dont les travailleurs de tous genres ont besoin. Les orateurs ont souligné que non seulement Joe Biden a fait une promesse de campagne pour codifier Roe v. Wade, mais Obama a fait campagne sur la légalisation de l’avortement en 2008 et n’a pas réussi à le faire même avec une supermajorité au Congrès. À la suite de la fuite de lundi, M. Biden a déclaré qu’il avait demandé à son administration de « préparer des options » en cas d’annulation de l’arrêt Roe v. Wade et qu’il n’avait pas soutenu la fin de l’obstruction parlementaire pour permettre aux démocrates de voter la légalisation de l’avortement au Congrès.

    Il est clair que les jeunes en ont assez des promesses non tenues des démocrates. À New York, après la fin du rassemblement organisé de la Marche des femmes, nos membres ont entonné un chant appelant à une marche. La réponse de la scène principale, qui était dominée par des agents du parti démocrate hostiles à l’idée d’une action directe, a été « c’est mignon ce que vous essayez de faire là-bas, mais ce n’est pas ce que nous faisons ». Plutôt que de laisser l’énergie se dissiper, nous-mêmes et d’autres groupes de gauche avons conduit près d’un millier de personnes dans les rues de Manhattan et vers un autre rassemblement à Washington Square Park où nous avons discuté ouvertement des prochaines étapes du mouvement. Lors de la marche, on pouvait entendre les manifestants scander « Voter bleu n’est pas suffisant ! Démocrates, nous dénonçons votre bluff ! »

    « C’est comme ça que nous en sommes arrivés là en premier lieu – un parti qui ne sait pas comment se battre, qui a plus peur que sa base s’organise qu’autre chose », a déclaré Kshama Sawant, membre de Socialist Alternative et conseillère municipale de Seattle, lors d’une manifestation à Seattle hier soir. « Un parti qui fera tout pour marginaliser ou chasser les véritables progressistes, car il donne silencieusement la priorité à la stabilité du système capitaliste et à la rentabilité des entreprises avant tout. Avant les droits des femmes, les droits reproductifs, les droits des travailleurs, les droits LGBTQIA+, et avant même la continuation de la civilisation humaine alors que nous sommes confrontés à une catastrophe climatique totale. Nous avons besoin d’un nouveau parti ! Un parti qui se bat bec et ongles pour défendre les droits reproductifs, les droits des travailleurs, les droits LGBTQIA+ et contre le racisme ! »

    Des milliers de personnes ont défilé hier à Philadelphie pour défendre le droit à l’avortement et se battre pour d’autres revendications telles que l’assurance maladie pour tous avec des soins complets en matière de reproduction et d’affirmation du genre

    Quelle est la prochaine étape dans la lutte pour le droit à l’avortement ?

    De nombreux manifestants ont également participé à la campagne Justice pour George Floyd de 2020, où ils ont été beaucoup plus nombreux à manifester pendant des mois. Malgré ce grand nombre, le mouvement n’a malheureusement pas réussi à obtenir des réformes majeures à grande échelle, et la plupart des villes individuelles ont continué à augmenter les budgets de la police.

    Comme il s’agissait du plus grand mouvement de protestation de l’histoire des États-Unis, on peut se demander ce qui a manqué et comment nous pouvons gagner cette fois-ci.

    Malgré l’affluence, Justice pour George Floyd est resté un mouvement de rue sans structures ni revendications claires. Le mouvement ne s’est pas intensifié pour intégrer une action directe à grande échelle. À quelques semaines du jugement de la Cour suprême, nous devons aller au-delà des manifestations de rue et intensifier notre lutte pour inclure des débrayages, des occupations et même des grèves. L’énergie des manifestations de rue doit se traduire dans nos communautés et sur nos lieux de travail afin de forcer la main de la Cour suprême et du Congrès.

    Nous avons vu un nouveau souffle dans le mouvement syndical avec les campagnes héroïques de syndicalisation chez Starbucks et Amazon. Ce mouvement ouvrier nouvellement revitalisé a un rôle essentiel à jouer dans le renforcement de la lutte de la classe ouvrière pour des soins reproductifs gratuits et facilement accessibles.

    Le SEIU (Service Employees International Union) et le NNU (National Nurses United), qui organisent tous deux des travailleurs de la santé, ont fait des déclarations sur l’impact dévastateur qu’aurait une annulation de Roe v. Wade sur les travailleuses. Nous avons besoin que ces syndicats organisent leurs membres pour qu’ils agissent en faveur du droit à l’avortement, et nous avons besoin que d’autres syndicats s’engagent dans cette lutte.

    Le nouveau syndicat Amazon Labor Union a fait preuve d’une grande solidarité lorsque son président par intérim, Chris Smalls, a appelé hier les manifestants à se joindre à la lutte à Foley Square, à New York.

    Les syndicats ont un intérêt particulier à obtenir la légalisation totale de l’avortement, et à aller de l’avant pour obtenir un système d’assurance-maladie pour tous avec des soins complets en matière de reproduction et d’affirmation du genre. Les soins de santé fournis par l’employeur sont une monnaie d’échange majeure entre les mains des patrons lors des négociations contractuelles, et les patrons retirent souvent les prestations de santé des travailleurs en cas de grève.

    Pour les membres des syndicats, les travailleurs non syndiqués, les étudiants et les jeunes qui sont prêts et motivés à se battre pour le droit à l’avortement et les soins de santé gratuits pour tous, nous avons besoin de réunions publiques d’organisation afin de mettre en place un plan d’action intensifié, comprenant des débrayages et des grèves. Socialist Alternative organise des réunions publiques dans plusieurs villes du pays.

    Pour gagner, ce mouvement a besoin de revendications fortes qui font passer le terrain de la défense à l’attaque.

    Nos revendications

    • Faites reculer la droite ! La Cour suprême doit faire marche arrière et maintenir Roe v. Wade !
    • Pour des débrayages massifs et des actions de grève pour défendre l’avortement !
    • Les Démocrates ont le contrôle total de Washington, ils doivent immédiatement mettre fin au blocage et légaliser l’avortement !
    • Le Congrès doit adopter l’assurance-maladie pour tous, avec l’avortement sur demande, des soins reproductifs complets et des soins complets d’affirmation du genre pour tous !
    • Cette attaque contre Roe ouvrira la porte à des attaques brutales et continues contre les droits des personnes LGBTQIA+. Nous avons besoin d’une lutte unie contre l’oppression de genre sous toutes ses formes ! Notre mouvement doit se battre pour des soins reproductifs complets ainsi que contre les lois réactionnaires anti-trans qui balaient les états à travers le pays !
    • Mettons fin au système bipartisan – nous devons lancer un parti indépendant de la classe ouvrière qui défendra les intérêts des femmes de la classe ouvrière, des personnes LGBTQIA+ et des personnes de couleur !
  • États-Unis. Un an plus tard, les travailleurs ne sont pas mieux lotis avec Joe Biden


    Plus d’un an après avoir voté dans l’espoir d’éloigner le pays de la droite, des millions de personnes sont confrontées à la menace imminente d’un raz-de-marée républicain lors des élections de mi-mandat, les midterms.

    Par Grace Fors, Socialist Alternative (section d’ASI aux États-Unis)

    Lors d’une conférence de presse marquant la première année de mandat du président démocrate Joe Biden, un journaliste a demandé : « L’inflation est en hausse, votre législation nationale phare est bloquée au Congrès et, dans quelques heures, un effort au Sénat pour traiter de la législation sur la réforme électorale va échouer. Le COVID-19 continue de coûter la vie à 1.500 Américains chaque jour et les divisions de la nation sont aussi vives qu’il y a un an. Avez-vous fait des promesses excessives au public américain ? » Joe Biden a simplement répondu : « Je n’ai pas fait de promesses excessives. »

    C’est très loin de l’état d’esprit de la plupart des Américains. La moitié des Américains déclarent se sentir « frustrés » et « déçus » par la présidence de Biden. Si l’élection de 2024 avait lieu aujourd’hui, 60 % des Américains ne voteraient pas pour Biden. Plus d’un an après avoir voté dans l’espoir de détourner le pays de la droite, des millions d’Américains sont confrontés à la menace imminente d’un raz-de-marée du GOP (Grand Old Party, surnom du parti républicain) lors des élections de mi-mandat.

    Joe Biden a été élu par des électeurs qui avaient davantage confiance en lui que dans Trump pour gérer la pandémie de manière adéquate. Pourtant, durant l’année 2021, il y a eu plus de cas de COVID, plus de décès et moins d’aide pour faire face à la pandémie qu’en 2020. Aujourd’hui, selon le fameux institut de sondage Gallup, l’inquiétude face à la pandémie n’a jamais été aussi forte qu’avant le déploiement des vaccins : 58 % des personnes interrogées estiment que la situation s’aggrave. Au cours de la troisième année de la pandémie, l’aide fédérale s’épuise, ce qui, ajouté à la pression d’une inflation record depuis 40 ans, crée un stress économique insoutenable pour les travailleurs. En fait, l’inflation a dépassé le COVID-19 en tant que principale préoccupation des Américains. L’augmentation des prix des denrées alimentaires et de l’essence fait un trou dans le portefeuille des gens, mais Biden refuse de prendre le problème au sérieux.

    Une femme du Nevada interrogée par CNN a résumé les sentiments de beaucoup : « Je ne veux pas dire ça, mais quand Donald Trump était là, ce n’était pas du tout comme ça. »

    L’incrédulité de Biden face à cette situation est encore plus exaspérante que ses échecs. Nouveaux variants, obstruction au Congrès et inflation : qui donc aurait pu prévoir tout ça ? Quasiment tous ceux qui font attention.

    Le plan de sauvetage américain de 1.900 milliards de dollars adopté en mars 2021 a apporté un soulagement crucial aux travailleurs et aux familles. Des millions de personnes ont pu se faire vacciner au début de 2021. Mais au moment du barbecue du 4 juillet organisé par la Maison Blanche pour célébrer l’indépendance du Covid, il manquait 7,4 millions de vaccins à l’objectif de Biden. À ce moment-là, le variant Delta était déjà en route, et il n’a pas fallu longtemps pour que la « lune de miel Biden » s’arrête net.

    Parallèlement, les États-Unis ont refusé de s’attaquer sérieusement à la distribution de vaccins de qualité à l’échelle mondiale, ce qui, si rien n’était fait, n’allait faire qu’accroître le nombre de variants. Au lieu d’utiliser le Defense Production Act comme il l’avait promis pour produire des tests en masse, Biden a déclaré la guerre aux non-vaccinés. Alors que les personnes vaccinées et non vaccinées attendaient dans les files d’attente pendant des heures et parcouraient les étagères vides pour trouver des kits de test, l’attachée de presse de la Maison Blanche, Jen Psaki, a ridiculisé l’idée d’envoyer les tests directement dans les foyers.

    Le chômage et les différentes aides sociales sont à sec tandis que Joe Biden a renoncé à sa promesse d’annuler une partie de la dette étudiante, déclarant au contraire que la reprise du remboursement de la dette était une priorité absolue de son administration (41 millions de personnes bénéficient actuellement d’un moratoire sur le remboursement de leur dette étudiante, NdT).

    Le programme « Build Back Better » de Joe Biden proposait des programmes sociaux extrêmement populaires devant être financés par l’imposition des riches. Pourtant, en octobre, seuls 10 % des personnes interrogées déclaraient connaître les détails de ce plan, qui aurait pu inclure des congés payés parentaux, des programmes d’éducation préscolaire universels, des collèges communautaires gratuits, un élargissement de l’éligibilité à Medicare et des mesures pour le climat. Suite à l’opposition des sénateurs démocrates conservateurs de Virginie-Occidentale Joe Manchin et de l’Arizona Kyrsten Sinema, en novembre, la grande majorité des programmes qui auraient aidé les travailleurs avaient été supprimés. Aujourd’hui, Biden et la direction du parti démocrate parlent de réduire encore plus le paquet de mesures et d’en supprimer jusqu’au nom. L’objectif est de créer une nouvelle législation qui réponde à toutes les exigences du baron du charbon Joe Manchin : avant tout, « pas d’assistanat ».

    L’abyssale stratégie des démocrates

    Au beau milieu d’une poussée du variant Omicron et alors que sa cote de popularité n’a jamais été aussi basse, la vice-présidente Kamala Harris a déclaré lors d’une interview : « Il est temps pour nous de faire ce que nous avons fait, et ce temps, c’est tous les jours. » Elle a raison – dans le sens où chaque jour, les démocrates se tirent une balle dans le pied. Il n’est pas difficile de voir où les choses pourraient aller à partir de là. Vingt-six démocrates se retirent de la Chambre. Alors que les démocrates se dirigent vers un désastre de mi-mandat avec pratiquement rien à montrer comme concrétisation de leurs grandes promesses, ils feront probablement campagne sur des proclamations alarmistes concernant les « menaces existentielles pour notre démocratie ». Il est absolument vrai que les droits démocratiques sont attaqués dans les États dirigés par les Républicains. Mais si c’est tout ce que les Démocrates ont à dire, ce sera assez difficile à vendre.

    L’ère Trump a montré l’ampleur des dégâts que le parti républicain peut faire avec ne serait-ce qu’un pouce de pouvoir pour faire passer en force des réductions d’impôts pour les riches, publier des décrets de droite, remplir la Cour suprême de cinglés ultraconservateurs. Et depuis que les démocrates sont au pouvoir, les plus grandes menaces pour les travailleurs proviennent des législatures d’État de droite.

    Pourquoi ne déclarent-ils pas la guerre à Sinema et Manchin ?

    Nous sommes censés croire que l’invincibilité divine des sénateurs démocrates conservateurs Sinema et Manchin est la seule raison pour laquelle nous ne pouvons espérer aucun gain législatif de cette administration. Plus récemment, l’incapacité à faire avancer la réforme cruciale du droit de vote a donné un ton lugubre à la Journée Martin Luther King. Les Démocrates ont utilisé une discipline de parti rigoureuse pour réprimer la gauche. Les menaces que les dirigeants de la Chambre des représentants ont proférées à l’encontre d’Alexandria Ocasio-Cortez pour qu’elle change son vote négatif en vote positif concernant le financement du Dôme de fer israélien pourraient être également appliquées à Sinema et Manchin. La campagne qui a poussé les élus de gauche réunis dans « The Squad » (la brigade) à faire l’éloge de l’administration Biden et à s’aligner sur la direction du parti pourrait être reproduite.

    Il serait également possible d’utiliser l’autorité des structures du parti. Tous ces textos et courriels ennuyeux du Comité national démocrate demandant de l’argent pourraient plutôt être des appels à la pression publique sur Manchin et Sinema pour qu’ils adoptent le programme des Démocrates. Plusieurs budgets de plusieurs millions (DSCC, Senate Majority PAC) pourraient faire de même. D’innombrables outils existent, mais les Démocrates ne les utilisent pas. Pourquoi ? parce qu’ils ne le veulent pas.

    Les progressistes comme Bernie Sanders ont commencé à parler des défis que représentent Sinema et Manchin. Mais même avec ces deux-là hors du chemin, qu’est-ce qui empêcherait un autre élu de devenir le nouveau « méchant » ? Il suffit que le lobby des entreprises les courtise et que les dirigeants démocrates tendent l’autre joue. Quoi qu’il en soit, ni l’un ni l’autre ne se présente aux élections avant 2024, alors que, pour autant que nous sachions, nous pourrions être sous une majorité républicaine et cela ne ferait guère de différence.

    Une alternative de gauche audacieuse est la seule issue possible

    Dire que le bilan des démocrates « ouvre la porte » au populisme de droite est un euphémisme. Les échecs de l’administration Biden sont une marque géante et clignotante pour les populistes de droite et l’extrême droite que les travailleurs ont désespérément besoin de changement. Pour la gauche, il s’agit soit de sombrer avec le navire en perdition des Démocrates, soit de se réunir et de se soulever pour offrir une alternative. Si nous ne sommes pas honnêtes sur la dure réalité de ce que le leadership démocrate a signifié pour les travailleurs, et sur la futilité du vote de « moindre mal », la frustration et la déception ne feront qu’exacerber la menace de la droite, et non alimenter le mouvement pour ce dont nous avons vraiment besoin.

    Il ne pourrait être plus clair que pour réformer le parti démocrate, il faudrait le transformer à un niveau fondamental par une révolte de la base au sommet. Les candidats qui refusent l’argent des entreprises et s’engagent à adopter une approche combative pour les revendications de la classe ouvrière devraient défier les démocrates capitalistes à tous les niveaux, parallèlement à une révision complète des structures antidémocratiques du parti. Si la “réforme du parti” nécessite une telle bataille acharnée, pourquoi le faire au sein du parti démocrate, qui dispose d’outils intégrés pour saboter les campagnes de gauche comme celle de Bernie et punir son flanc gauche ? Construire notre propre parti de gauche est la seule voie rationnelle à suivre.

    Alors que la cote de popularité de Biden a baissé dans tous les domaines, les frustrations des jeunes et des travailleurs ont été les plus prononcées. C’est à eux que la gauche peut s’adresser en proposant une alternative politique. La formation d’un large parti de gauche pour sauver les travailleurs de l’échec de la stratégie démocrate et de la droite n’a jamais été aussi urgente.

  • Colombie-Britannique : Les changements climatiques sèment la dévastation

    Le sud de la Colombie-Britannique (Canada) a été frappé par deux événements météorologiques catastrophiques en quelques mois: d’abord la canicule et le feu, puis la pluie et les inondations. Les 13 et 14 novembre, le ciel s’est ouvert lorsqu’une «rivière atmosphérique» a traversé une grande partie du sud de la Colombie-Britannique. Elle a provoqué le débordement de rivières, des glissements de terrain et la rupture de voies ferrées et d’autoroutes.

    Par Leslie Kemp, Socialist Alternative (ASI-Canada)

    Tout cela s’est produit après un été accablant, à commencer par le dôme de chaleur du mois de juin, qui a fait 815 morts, et l’incendie de la ville de Lytton. De nombreux habitants et habitantes de la Colombie-Britannique et d’ailleurs ont vécu un été d’incendies et de ciels enfumés. Plus de mille feux de forêt ont fait rage dans la province. Deux mois entiers de pluie se sont ensuite manifestés à partir de septembre.

    Routes disparues

    Au Canada, toutes les autoroutes qui partent du Lower Mainland (le Grand Vancouver et la région côtière environnante) sont coupées ou ont été emportées par les eaux. Des centaines de personnes ont été piégées sur l’autoroute 7 pendant des heures, entre deux glissements de terrain. En plus d’être sous la menace d’autres glissements provenant de la montagne voisine, elles ont fini par attendre toute la nuit et pendant de nombreuses heures le lendemain pour l’arrivée d’un hélicoptère des Forces canadiennes.

    Des conducteurs se dirigeant vers le nord de Lillooet sur l’autoroute 99 ont été confrontés à un glissement de terrain juste devant eux. Ils ont vu des voitures et leurs occupants être emportés hors de la route par la boue et les débris de la montagne, enterrant à moitié les voitures. Les témoins se sont précipités pour secourir les gens, mais au moins une des voitures restait introuvable. Au moins quatre décès ont été confirmés.

    L’autoroute transcanadienne (autoroute 1) a été détruite en plusieurs endroits. L’autoroute 3, qui longe la frontière sud (vers les États-Unis), a été fermée dans les deux sens en raison d’un glissement de terrain.

    L’autoroute de Coquihalla (autoroute 5), l’une des principales autoroutes de la Colombie-Britannique reliant le Lower Mainland et l’Intérieur, a subi des dommages catastrophiques. Les voies en direction du sud d’une section de l’autoroute ont été emportées dans la rivière. L’autoroute pourrait être fermée pendant des mois. Les secouristes sont toujours à la recherche de véhicules disparus et de personnes bloquées.

    Villes inondées

    Toute la ville de Merritt, située dans une région sèche et désertique de l’Intérieur, a fait l’objet d’une alerte d’évacuation cet été en raison des feux. Elle a dû être à nouveau évacuée le 15 novembre. La crue des eaux a rendu la station d’épuration des eaux usées de la ville inopérante pour «une période indéterminée». Deux des trois ponts de la ville qui enjambent la rivière Coldwater ont été endommagés par les eaux des crues et le troisième n’est plus praticable.

    La majeure partie de la ville de Princeton a été submergée lorsque la rivière Similkameen a fait céder la digue. 295 maisons ont été évacuées et 300 autres sont en état d’alerte. Aujourd’hui, la ville est privée de gaz (en raison des dégâts causés par les inondations). Alors que les températures ont plongé à -6°C, de plus en plus de personnes ont dû partir pour trouver un endroit chaud où dormir.

    Plus de 1 100 foyers d’Abbotsford ont été évacués. Les inondations à Abbotsford, Chilliwack et dans d’autres parties de la vallée du fleuve Fraser ont vu des résidents et des résidentes suffisamment chanceux pour naviguer dans les rues sur leurs canots et autres bateaux.

    Plus de 20 000 personnes ont été déplacées. Plusieurs ont regardé leur maison être emportée par les torrents.

    Les incendies de l’été, ainsi que l’exploitation forestière, ont rendu les pentes plus instables, car il n’y avait plus de racines d’arbres pour retenir le sol. L’absence d’arbres, qui ralentissent normalement le ruissellement, a intensifié les inondations.

    Crise du transport des marchandises

    Les camionneurs qui vont et viennent du Lower Mainland vers d’autres régions de la Colombie-Britannique et du Canada ne peuvent pas apporter les provisions nécessaires. En plus de la fermeture de toutes les routes sortant du Lower Mainland de la Colombie-Britannique, les chemins de fer du Canadien National et du Canadien Pacifique sont endommagés. Ce sont les principales voies d’entrée et de sortie des cargaisons dans le port de Vancouver. Le chaos qui règne au port, dû à la perturbation des chaînes d’approvisionnement mondiales, est maintenant bien pire. Les importations ne peuvent pas être acheminées vers le reste du Canada depuis Vancouver et les exportations, en particulier les récoltes de cette année en provenance des Prairies, sont bloquées.

    On craint déjà des pénuries dans les magasins, l’essence manque dans certaines régions. Certaines communautés de l’île de Vancouver n’avaient que trois jours de provisions alimentaires et deux jours se sont écoulés depuis les inondations. Il faudra probablement des semaines, voire des mois, pour réparer certaines routes. On ignore également combien de temps il faudra pour réparer les voies ferrées.

    Faire le point

    Le 16 novembre, le soleil a brillé sur un paysage dévasté, mais d’autres pluies sont à venir. Les autorités de la Colombie-Britannique font le point sur l’ampleur des dégâts causés aux villes, aux villages, aux routes, aux ponts, aux chemins de fer et aux autres infrastructures. Des personnes ont perdu leur maison à cause des dégâts causés par les inondations. Au cours de l’été, on a estimé qu’un milliard d’animaux du littoral de la mer de Salish pourraient être morts à cause de la vague de chaleur. Aujourd’hui, des milliers d’animaux d’élevage sont morts à cause des graves inondations dans la vallée du Fraser et beaucoup de ceux qui ont survécu ou ont été secourus ont besoin de nourriture et d’eau.

    À l’instar de la vague de chaleur qui a battu tous les records en juin, les météorologues qualifient cette tempête de «sans précédent». «Nous avons vu maintenant notre cinquième rivière atmosphérique de la saison. Souvent, nous n’en avons même pas de première avant novembre», a déclaré Armel Castellan, météorologue d’Environnement Canada chargée de la préparation aux alertes. Elle a affirmé que la dernière rivière atmosphérique a généré des «données époustouflantes» et annoncé qu’Environnement Canada devra analyser ces chiffres pendant les jours et les semaines à venir, car ils sont extraordinaires. Comme en juin, de nombreux records ont été fracassés. Cette fois, il s’agit de records de précipitations plutôt que de records de chaleur. Le district de Hope et la ville de Chilliwack ont battu des records historiques de précipitations.

    On ne peut échapper à la réalité des changements climatiques. En l’espace de moins de cinq mois, la Colombie-Britannique a connu des événements météorologiques «sans précédent», qui ont battu des records. Ces événements ont et auront un impact sur la vie quotidienne de millions de personnes et sur les moyens de subsistance de milliers de travailleuses et de travailleurs.

    Les politiciens de la COP26 éloignés de la réalité

    Les leaders politiques ont clôturé la 26e réunion des Nations unies sur les changements climatiques le dimanche 14 novembre, pendant qu’une pluie torrentielle s’abattait dans le sud de la Colombie-Britannique. De nombreux observateurs et observatrices étaient sceptiques dès le départ quant aux chances de parvenir à un accord sur des objectifs significatifs. Ne s’attendant pas à grand-chose, ces personnes ont été déçues, mais ont aussi haussé les épaules. Du bla-bla-bla et de nombreux objectifs encore repoussés à un futur plus ou moins lointain. De nombreuses personnes pleines d’espoir, qui croyaient à moitié aux discours des gouvernements avant la COP26, ont vu leurs espoirs déçus une fois de plus. Comme l’a fait remarquer quelqu’un, plusieurs traversent «un processus de deuil».

    Les politiciens et les politiciennes qui se sont réunis à la COP26 semblent éloignés de cette réalité. Une représentante des Îles Marshall a été interrogée sur son amère déception face aux objectifs édulcorés. Les changements climatiques menacent l’existence même des Îles Marshall.

    Auimatagi Joe Moeono-Kolio, conseiller politique principal pour le Pacifique auprès de l’Initiative pour un traité de non-prolifération des combustibles fossiles, a noté que «la première version d’un texte par ailleurs très peu ambitieux comportait un point positif notable : l’élimination progressive du charbon. Ce point a encore été édulcoré. Pour une planète en crise, cela représente un échec monumental dans la reconnaissance du danger clair et imminent auquel sont exposés des pays entiers, y compris le mien.»

    «Malgré le brouhaha et l’écoblanchiment d’hier, un fait fondamental demeure : nous nous dirigeons toujours vers un monde de 2°C et plus d’augmentation», a-t-il déclaré.

    Le Climate Action Tracker indique qu’avec les engagements de la COP26, le monde sera de 2,7°C plus chaud d’ici 2200. La Colombie-Britannique a été témoin des conséquences d’un réchauffement de 1,1°C (réchauffement estimé à ce jour). Que se passera-t-il avec un réchauffement de 1,5°C ou encore de 2,7°C?

    Les élites politiques ne se réveilleront pas

    En tant que marxistes, nous comprenons que l’histoire, tout comme une rivière, ne coule pas en ligne droite. Les politiciens et les politiciennes sont redevables à la classe sociale qu’ils représentent : les riches investisseurs, l’élite d’affaires, les oligarques du pétrole et des ressources naturelles. Certaines personnes, comme le premier ministre canadien, disent une chose et agissent de manière totalement incohérente avec leurs paroles. Les libéraux fédéraux continuent de construire l’oléoduc Trans Mountain et de subventionner les combustibles fossiles. Seth Klein les décrit comme les «nouveaux négationnistes du climat». Les libéraux voient ce qui se passe, mais leur refus d’agir est dû à leur allégeance à leur propre classe politique.

    On ne sait pas exactement quel sera l’élément déclencheur, mais la colère accumulée à cause de cette inaction va éclater. Le rôle des socialistes est de se préparer: sensibiliser les gens, s’éduquer politiquement et éduquer les autres autour de nous pour ensuite construire des mouvements de résistance. Malgré une mobilisation héroïque lors de la COP26, la voix des résistants et résistantes a été ignorée, noyée dans le bruit du bla-bla-bla plein de fausses promesses qui ne mènent nulle part.

    Contrairement à beaucoup de gens de la gauche progressiste, nous avons une réponse claire à la question de savoir ce qu’il faut faire. La seule réponse qui sauvera l’humanité de la catastrophe climatique et des autres calamités du capitalisme est un monde qui n’est pas redevable aux désirs des riches et à l’hypocrisie des élites politiques qui leur obéissent. L’humanité a besoin d’un système qui valorise les personnes plutôt que le profit, qui planifie collectivement et démocratiquement dans l’intérêt du plus grand nombre et non de quelques personnes. Nous devons confisquer les ressources des riches et les utiliser pour le bien public. La seule façon saine d’avancer. Ça s’appelle le socialisme.

  • [VIDEO] : Comment renforcer la gauche américaine ?

    “Bad Faith”, le podcast de Briahna Joy Gray, a réuni Kshama Sawant et le célèbre journaliste de gauche Chris Hedges pour une discussion sur la manière dont la gauche peut être renforcée aux États-Unis, y compris pendant les élections. Il s’agit d’une conversation ouverte au cours de laquelle les idées et leurs limites sont longuement abordées. Dans le contexte d’un intérêt croissant pour les idées socialistes aux États-Unis et d’un mouvement ouvrier en plein essor, cette discussion est particulièrement utile.

  • USA. La génération Z embrasse le syndicalisme et l’impose chez Starbucks


    Moins d’un mois après avoir imposé la présence syndicale chez Starbucks, les travailleuses et travailleurs de Buffalo (Etat de New York) ont débrayé pour réclamer des conditions de travail sûres dans le contexte de la vague de covid liée au variant Omicron. Ils et elles ont fait grève pendant cinq jours avec pour principale revendication la fermeture du magasin le temps que leurs collègues se remettent de la maladie et que des protocoles de sécurité appropriés soient mis en place. Bien que le débrayage de la semaine dernière ne semble pas encore avoir produit des changements concrets dans la politique du magasin, c’est un premier pas sur lequel il faut s’appuyer. L’inspiration tirée de ces travailleuses et travailleurs se répand dans tout le pays. Alors que leur grève de cinq jours se déroulait, il a été annoncé que les travailleuses et travailleurs des magasins de l’Ohio, de l’Arizona et de l’Illinois avaient officiellement déposé une demande d’élections syndicales.

    Par Jesse Shussett (ASI-Etats-Unis)

    Tout a commencé en décembre, lorsque les travailleuses et travailleurs ont obtenu le statut de syndicat dans un magasin de Buffalo par 19 voix contre 8, et dans un autre par 12 voix contre 8. Un troisième site continue de se battre pour la syndicalisation avec un score actuel de 15-9 en faveur, mais de multiples contestations de la part des syndicats Workers United et de SEIU ainsi que de Starbucks les empêchent d’obtenir une victoire officielle.

    Échecs du démantèlement syndical

    Bien que ces suffrages à Buffalo ne représentent qu’une centaine d’employés répartis dans trois magasins, les dirigeants de Starbucks, notoirement antisyndicaux, craignent que l’exemple courageux des travailleurs de Buffalo ne se répande ailleurs. C’est pourquoi ils ont inondé la ville de cadres supérieurs, dont Schultz lui-même, pour tenter de les convaincre de ne pas voter “oui”. Ils ont affirmé que “si une partie importante de nos employés devait se syndiquer, nos coûts de main-d’œuvre pourraient augmenter et notre activité pourrait être affectée négativement par d’autres revendications et attentes qui pourraient augmenter nos coûts, changer notre culture d’entreprise, diminuer notre flexibilité et perturber notre activité.”

    Il s’agit d’une tactique antisyndicale classique, remplie de fausses vérités. Bien sûr, les coûts de l’entreprise augmenteraient : les travailleurs pourraient se battre plus facilement pour de meilleurs salaires et conditions de travail ! En fin de compte, les seules personnes qui en pâtiront sont les cadres qui gagnent des millions grâce au travail des baristas qu’ils emploient. Soyons honnêtes, de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail ne peuvent que renforcer l’environnement de travail. Si les grandes entreprises comme Starbucks s’opposent aux efforts de syndicalisation, c’est parce qu’elles sont conscientes du pouvoir qu’ont ces travailleurs. Ce sont eux qui sont la source de tous les profits des actionnaires.

    Starbucks a également déclaré ceci : « Nos réponses à tout effort de syndicalisation pourraient avoir un impact négatif sur la façon dont notre marque est perçue et avoir des effets négatifs sur nos activités, y compris sur nos résultats financiers. »

    Starbucks aime se présenter comme une entreprise progressiste avec des « politiques woke », mais se battre avec véhémence pour empêcher l’organisation des travailleurs a pour effet de fissurer cette façade. Ce que l’entreprise ne réalise pas, c’est qu’elle se fait du mal à elle-même ! Nous sommes au milieu d’une formidable vague de lutte syndicale, de John Deere à la lutte permanente des enseignants pour des écoles sûres en pleine pandémie. Si l’on se fie à aux moins d’octobre et de novembre (marqués par un grand nombre de grèves aux Etats-Unis), les travailleurs découvrent indéniablement leur force collective et les manières de l’utiliser dont pour arracher des conquêtes réelles.

    La lutte se répand

    Les travailleurs de Starbucks ont obtenu le pouvoir de voter en tant que magasins individuels plutôt qu’en tant que district, ce qui les a aidés à atteindre la majorité nécessaire pour réussir leur campagne de syndicalisation. En soi, il s’agit d’une petite victoire, que le NLRB (National Labor Relations Board, agence indépendante du gouvernement fédéral américain chargée de conduire les élections syndicales et d’enquêter sur les pratiques illégales dans le monde du travail, NdT) n’avait jamais accordée auparavant.

    Cependant, cette approche segmentée a ses limites, car elle isole les sites les uns des autres, même s’ils se trouvent dans la même ville, et dans certains cas à quelques pâtés de maisons les uns des autres. Cela permet aux travailleurs d’obtenir les votes nécessaires aux efforts de syndicalisation, mais rend également la communication entre les magasins plus difficile. Le syndicat devra donc travailler activement pour relier les différents magasins. Pour s’attaquer à un mastodonte tel que Starbucks, il faut que tous les travailleurs de Buffalo et, à terme, du pays, soient organisés en un seul syndicat capable d’exercer la pression maximale nécessaire pour obtenir un contrat décent prévoyant des salaires plus élevés et des conditions de travail sûres.

    À l’heure actuelle, les travailleurs de nombreux autres sites dans le pays, notamment dans le Massachusetts, à Washington, en Arizona, en Ohio, en Illinois et au Tennessee, font campagne pour se syndiquer. Il s’agit d’une avancée considérable, car le secteur des services à bas salaires s’est longtemps révélé difficile à syndiquer. Seuls six pour cent des travailleurs américains du secteur privé sont actuellement syndiqués. L’organisation des personnes non syndiquées est donc une tâche absolument essentielle et ces travailleurs de Starbucks montrent la voie à suivre pour les travailleurs du monde entier.

    La génération Z prend les devants

    Il est particulièrement remarquable et impressionnant de constater que la majorité des personnes à la tête des campagnes de syndicalisation ont la vingtaine et s’avèrent être une force sur laquelle il faut compter. Des sondages récents ont montré que les syndicats sont plus populaires qu’ils ne l’ont été en un demi-siècle, 65 % des personnes déclarant approuver les syndicats, et ce chiffre atteint 77 % chez les 18-34 ans !

    Les jeunes se radicalisent dans tous les domaines en réaction aux bas salaires, à l’écrasante dette étudiante et aux sombres perspectives d’emploi. Récemment, nous avons également assisté à des débrayages d’étudiants contre la violence sexiste et les systèmes scolaires qui ne les protègent pas, à des dizaines de milliers de jeunes lors de manifestations autour de la COP26 à Glasgow, et à des taux de participation record des électeurs et des bénévoles âgés de 18 à 35 ans lors de la récente victoire contre la tentative raciste et de droite de destituer Kshama Sawant à Seattle.

    Nous avons également vu des travailleurs de Starbucks montrer leur solidarité avec les luttes des travailleurs d’autres industries. Rachel Cohen, employée de Starbucks à Buffalo, a déclaré à Socialist Alternative qu’ils avaient rejoint l’hôpital Mercy dans ses récentes grèves pour de meilleures conditions de travail, et qu’ils étaient en contact avec les travailleurs d’Amazon touchés par le récent effondrement meurtrier d’un entrepôt dans l’Illinois.

    “Nous voulons être en mesure d’avoir un impact et d’inspirer d’autres personnes à mener ces combats également”, a déclaré Rachel Cohen à Socialist Alternative. “Le fait que je gagne plus d’argent ne signifie pas que vous en gagnerez moins, cela nous aidera tous les deux”.

    Elle a également précisé que si les magasins votent tous séparément, les cellules syndicales ont étroitement collaboré, non seulement à Buffalo mais aussi avec les autres sites qui se battent pour la reconnaissance syndicale.

    Un autre membre du comité d’organisation a également mentionné le nombre massif de travailleurs non syndiqués dans le secteur des services aux États-Unis. Il y a plus de 12 millions de travailleurs dans le secteur de la restauration aux États-Unis et ce n’est qu’une partie du vaste secteur des services. Nous voyons de plus en plus de travailleurs du secteur des services se soulever et riposter contre des patrons pourris qui ne voient que les profits. Le fait est que la pandémie a mis à nu les vastes lacunes et le déclin évident du capitalisme, y compris la réalité de la façon dont les travailleurs sont traités, même lorsqu’ils sont étiquetés comme “essentiels”.

    La tâche à accomplir

    Souvent, les travailleurs ne restent pas plus de 6 à 8 mois dans leur emploi avant de se lasser des mauvaises conditions de travail et de l’exploitation dont ils sont victimes. Sans possibilité de se défendre et sans perspective d’avenir, les travailleurs démissionnent et passent à un autre emploi. Si cela peut leur remonter le moral à court terme, ainsi qu’à d’autres travailleurs, cela constitue en fin de compte un obstacle à une véritable organisation et à l’exploitation du pouvoir des travailleurs. Il est essentiel que les travailleurs considèrent leurs mauvaises conditions de travail comme quelque chose à combattre et à améliorer plutôt qu’à fuir.

    Il faudra une mobilisation massive pour parvenir à syndiquer ne serait-ce qu’une majorité des 15 251 établissements de Starbucks, avec des efforts très ciblés des travailleurs au sein de Starbucks et au-delà. La classe dirigeante est très consciente de l’effet d’entraînement qu’une action réussie chez Starbucks aurait sur la restauration rapide, sur l’ensemble du secteur des services et au-delà, et elle tentera de l’étouffer par tous les moyens. Nous aurons besoin de stratégies militantes et de la collaboration des magasins à travers les villes et les régions pour obtenir des concessions, ainsi que de la mobilisation des autres acteurs du secteur en solidarité. La riposte contre les efforts d’éviction syndicale de Starbucks doit être large et s’appuyer sur un ensemble de revendications solides afin de devenir une force capable d’obtenir des gains réels pour les travailleurs.

    En novembre prochain, il y aura dix ans que 100 travailleurs de McDonald’s à New York ont débrayé pour réclamer 15 dollars par heure et un syndicat. Malheureusement, malgré les dizaines de millions de dollars dépensés au cours de la dernière décennie par des syndicats tels que le SEIU, aucun syndicat n’a été créé dans les principales méga entreprises de restauration rapide. Cela est dû en grande partie à l’échec de l’approche des dirigeants actuels de ces syndicats, qui se sont concentrés sur des campagnes de pression publique et ont fait appel aux politiciens, au lieu d’adopter une approche de lutte des classes et d’organiser la base de manière militante. Les travailleurs de Starbucks à Buffalo ont montré qu’il est possible de gagner des syndicats dans le secteur de la restauration rapide si l’on s’organise autour de revendications claires et que l’on adopte des tactiques de combat sans ambages. Pour l’avenir, les principaux syndicats du secteur des services, tels que SEIU, UNITE HERE et UFCW, doivent mettre toutes leurs ressources dans cette approche.

    Socialist Alternative soutient sans équivoque les travailleurs de Starbucks qui sont à l’avant-garde de ce qui peut devenir une percée du mouvement ouvrier. La victoire exigera la solidarité entre les magasins et entre les autres sections du secteur des services – tout comme une blessure à l’un est une blessure à tous, une victoire pour l’un peut mener à une victoire pour tous !

    Les membres du syndicat de Starbucks devront continuer à se battre au-delà de l’obtention de la syndicalisation. À bien des égards, l’obtention d’un premier contrat est encore plus difficile et exigera une lutte déterminée.

    Il n’y a jamais eu de meilleur moment ni de moment plus excitant pour les travailleurs des services pour mener ces batailles. Avec la « grande démission » en cours (le nombre inédit de travailleurs qui annoncent sur les réseaux sociaux qu’ils quittent un emploi pour en chercher un meilleur ailleurs) et la pénurie de main-d’œuvre, les travailleurs sont en position de force pour utiliser leur force collective afin d’obtenir des gains non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour les autres et créer des modèles à suivre. Solidarité avec Starbucks Workers United ! Solidarité avec tous les travailleurs du secteur des services !

  • Wiki-Leaks : Non à l’extradition et à la persécution de Julian Assange

    Le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, peut désormais être extradé vers les États-Unis et va probablement l’être suite à une décision de la Haute Cour britannique. S’il perd son appel, son sort sera entre les mains de la ministre de l’Intérieur conservatrice Priti Patel, ce qui signifie dans les faits que son extradition sera assurée.

    Par Eddie McCabe, Socialist Party (ASI-Irlande)

    Ironiquement, ce jugement, qui concerne une affaire ayant de profondes implications pour la liberté de la presse à travers le monde, a été annoncé lors de la Journée internationale des droits humains. La décision de la Haute Cour a annulé la décision d’un tribunal de première instance de janvier 2020 qui avait rejeté la demande d’extradition des États-Unis en raison de préoccupations relatives au bien-être mental d’Assange et au risque de suicide.

    La possibilité d’une peine de 175 ans de prison aux États-Unis pour des accusations de conspiration et de violation de la loi sur l’espionnage – accusations tout à la fois scandaleuses et sans fondement – pourrait pousser n’importe qui au suicide. Et c’est encore plus le cas pour quelqu’un qui a passé sept ans dans les minuscules locaux de l’ambassade d’Équateur avant d’être détenu dans la prison de haute sécurité de Belmarsh à Londres sans avoir été condamné pour quoi que ce soit.

    Une condamnation à mort

    Malgré tout cela, le Lord juge en chef d’Angleterre et du Pays de Galles a déclaré : « Ce risque [de suicide] est à notre avis exclu par les assurances offertes [par les États-Unis]. » Ces assurances ont été décrites par les avocats d’Assange comme étant « vagues » et « dénuées de sens ». Selon Amnesty International, elles reviennent à dire : « Nous garantissons qu’il ne sera pas détenu dans un établissement de sécurité maximale, qu’il ne sera pas soumis à des mesures administratives spéciales et qu’il bénéficiera de soins de santé. Mais s’il fait quelque chose qui ne nous plaît pas, nous nous réservons le droit de ne pas le garantir, nous nous réservons le droit de le placer dans un centre de sécurité maximale, nous nous réservons le droit de lui proposer des mesures administratives spéciales. Ce ne sont pas du tout des garanties. »

    Plus précisément, elles proviennent d’un État américain qui poursuit une vicieuse vendetta politique contre Assange et WikiLeaks depuis la publication en 2010 de centaines de milliers de documents exposant les crimes de guerre commis par les États-Unis en Afghanistan et en Irak.

    Pas plus tard qu’en septembre 2021, une importante enquête de Yahoo News a révélé que « des discussions sur l’enlèvement ou le meurtre d’Assange ont eu lieu « au plus haut niveau », entre de hauts responsables de la CIA et de l’administration Trump » jusqu’à demander des « croquis » ou des « options » concernant la manière de l’assassiner. » Bien sûr, aucune de ces preuves documentées n’a été prise en compte par les juges de la Haute Cour, dont la décision équivaut en réalité à une condamnation à mort, d’une manière ou d’une autre.

    La vengeance de l’impérialisme

    La menace pour la santé d’Assange, voire pour sa vie, est indiscutable et, en ce sens, la décision de la Haute Cour est une parodie. Toutefois, la vérité est qu’Assange devrait être libéré indépendamment de cette menace : les crimes dont il est accusé par les États-Unis constituent une attaque dangereuse contre les droits démocratiques et la liberté journalistique.

    L’hypocrisie de l’impérialisme américain (qu’il soit dirigé par Trump ou Biden), qui se présente sans vergogne comme un défenseur de la « démocratie » et de la « liberté », est pleinement exposée dans cette affaire. Il en va de même pour ses homologues britanniques et australiens – tous alliés dans la nouvelle guerre froide avec l’impérialisme chinois – qui sont prêts à réprimer le droit à une presse libre afin d’aider les États-Unis dans leur persécution de WikiLeaks et dans leur bellicisme en général.

    Julian Assange et Chelsea Manning ont rendu un précieux service à la classe ouvrière et aux opprimés du monde entier en divulguant des documents qui ont mis à nu la sauvagerie meurtrière de la machine de guerre américaine. Cela mérite d’être soutenu, ainsi que tout travail que WikiLeaks continue de faire pour dévoiler dévoile l’activité criminelle d’États et d’institutions puissants.

    Libérez-le !

    Assange lui-même a un passé trouble. Il a fait l’objet d’accusations de viol et d’agression sexuelle par deux femmes en Suède. Les poursuites pénales liées à ces accusations ont été abandonnées en raison du temps écoulé. Ces femmes ont été privées de justice et n’ont pas pu aller jusqu’au bout des poursuites qu’elles auraient dû engager contre Assange. Sa politique est également extrêmement douteuse. Il a par exemple soutenu Poutine et Trump à différents moments et a rencontré le populiste d’extrême droite britannique Nigel Farage.

    Ce n’est toutefois pas pour ces raisons qu’il est visé par l’État américain, mais pour la menace que WikiLeaks fait peser sur le secret qui entoure ses manœuvres impérialistes. Assange n’est pas un anticapitaliste socialiste, mais nous le défendons contre ces attaques car elles visent toutes celles et ceux qui s’opposent à la corruption et aux guerres capitalistes. Les accusations portées contre Assange doivent être abandonnées et il doit être immédiatement libéré.

  • [DOSSIER] Procédure de destitution à Seattle : Comment Kshama Sawant et Socialist Alternative ont (encore !) gagné

    Pour la quatrième fois, la dirigeante de Socialist Alternative et membre du conseil de ville de Seattle Kshama Sawant a remporté une élection, cette fois en faisant face à une procédure de destitution par référendum raciste soutenue par les grandes entreprises. Cette nouvelle victoire souligne la pertinence d’une approche des positions élues reposant sur la lutte de classe. Il s’agit d’un brillant exemple concernant la façon dont la classe ouvrière peut bénéficier d’une politique indépendante du parti démocrate. Les leçons à tirer pour les travailleurs et la gauche socialiste ne manquent pas.

    Par Bryan Koulouris et Calvin Priest

    Cette élection a sans conteste été la plus difficile à laquelle nous avons été confrontés depuis l’élection de Kshama au Conseil de ville de Seattle en 2013 (ce conseil est à peine composé de 9 élus et du maire pour une ville de 750.000 habitants, NdT). Jusqu’ici, Seattle n’avait jamais connu d’élection en décembre (entre les fêtes de Thanksgiving et de Noël, NdT). Ce timing avait été sciemment réfléchi de manière à assurer la plus faible participation électorale possible parmi les travailleurs, les locataires, les jeunes et les personnes de couleur. Un CAP (Comité d’action politique, une structure privée dont le but est d’aider ou de gêner des élus, ainsi que d’encourager ou de dissuader l’adoption de certaines lois, NdT) pro-entreprises portant le nom orwellien « A Better Seattle » (Un meilleur Seattle) a dépensé des centaines de milliers de dollars pour bombarder de mensonges les électeurs au travers des publicités télévisées, d’annonces sur Internet ou de courriers. Parallèlement, la campagne de solidarité pour Kshama s’est vue refuser le droit d’avoir la moindre publicité sur Google, YouTube et Hulu.

    Les CAP pro-entreprises n’étaient du reste pas les seuls à diffuser des informations malhonnêtes sur Kshama et la procédure de destitution lancée à son encontre. En raison de notre capacité à remporter des victoires, ce qui a exaspéré la classe dirigeante et l’establishment politique, les médias dominants (en particulier le très lu Seattle Times) ont mené une campagne constante d’attaques trompeuses et sournoises contre Kshama et notre mouvement au cours de ces huit dernières années. La Cour suprême de l’État, sans prendre la peine d’organiser la moindre audience au sujet de la véracité des accusations ouvrant la voie à la procédure de destitution, a statué en faveur de celle-ci. En conséquence, des mensonges purs et simples ont figuré sur le bulletin de vote et étaient la dernière chose que les gens voyaient avant de voter.

    Les tribunaux ont inexplicablement reporté leur jugement de trois mois après le dépôt des signatures nécessaire au déclenchement de la procédure. La manœuvre visait à assurer que le moins d’électeurs possible ne prenne part au vote, avec une élection inédite pendant les vacances d’hiver. Le taux de participation pour de telles élections est déjà en temps normal beaucoup plus faible que lors d’élections générales. Moins de six mois auparavant, le même tribunal avait rejeté une tentative de révocation de la maire de Seattle, Jenny Durkan, alors qu’elle avait illégalement ordonné le gazage lacrymogène de manifestants pacifiques du mouvement Black Lives Matter ! Plus de 18.000 plaintes avaient pourtant été déposées. Cet exemple, à l’instar des graves attaques portées contre le droit à l’avortement et du racisme sur lequel repose tout le système judiciaire, démontre que les tribunaux capitalistes ne sont pas du côté des travailleurs et des opprimés.
    Au cours des huit années de mandat de Kshama, son leadership et le travail de Socialist Alternative à Seattle ont démontré comment les marxistes peuvent mener les travailleurs et les opprimés à arracher des victoires cruciales. Qu’il s’agisse de faire de Seattle la première grande ville à obtenir un salaire minimum de 15 dollars de l’heure en 2014, d’imposer la Taxe Amazon (qui a récolté 2 milliards de dollars en 2020 pour subventionner des projets de logements abordables) ou encore de remporter des victoires historiques en matière de droits des locataires, notre bureau de conseil marxiste ainsi que les mouvements de lutte de la classe ouvrière à Seattle ont eu un impact sur la vie non seulement des résidents de Seattle, mais aussi de millions de travailleurs au niveau national. Le mandat que nous avons reçu grâce à notre victoire dans cette procédure de destitution nous impose de poursuivre audacieusement notre combat contre la droite et la classe dominante.

    Polarisation profonde et prochaines étapes

    Comme c’est le cas dans de nombreuses grandes villes, les loyers montent en flèche à Seattle. Nous avons recueilli plus de 15.000 signatures en faveur du contrôle des loyers alors que nous menions campagne contre la procédure de destitution. Le bureau de Kshama et Socialist Alternative ont aidé les locataires à s’organiser pour lutter avec succès contre les augmentations de loyer dans certains immeubles spécifiques. Nous avons également obtenu cette année des droits historiques pour les locataires qui ont créé un précédent national. Nous allons intensifier ce combat pour des logements de qualité et abordables à Seattle, et nous espérons que ce mouvement dont nous avons désespérément besoin pourra s’étendre à tout le pays, tout comme notre victoire concernant le salaire minimum de 15 dollars de l’heure l’a fait en 2015. Comme toujours, nous ferons face à une opposition déterminée de la part des capitalistes, de l’establishment démocrate, des tribunaux pro-capitalistes, des populistes de droite, et peut-être même de la répression d’Etat. Mais nos victoires témoignent de la façon dont une approche reposant sur la lutte de classe peut surmonter ces obstacles.

    Les grandes entreprises n’étaient pas parvenues à déloger notre bureau socialiste du conseil de ville, bien qu’elles aient mis les bouchées doubles en 2019, Amazon ayant dépensé à elle seule plus de 3 millions de dollars dans l’élection. Cette fois-ci, elles ont fait équipe avec les forces de droite réactionnaires opposées au mouvement Black Lives Matter. Mais elles ne sont toujours pas parvenues à vaincre Kshama et notre mouvement. Elles ne s’arrêteront pas là. Socialist Alternative sera victime de mensonges de plus en plus nombreux, de poursuites judiciaires et même de la répression d’État. Nous avons assisté à une polarisation accrue lors de cette élection. Des activistes de droite déséquilibrés ont harcelé et menacé nos bénévoles avec férocité. L’ancien président du syndicat des flics, Ron Smith, a menacé de « menotter la membre du conseil » alors que les flics de Seattle faisaient campagne pour la destitution de Kshama.

    Pour la première fois depuis plus de 30 ans, un républicain ouvertement revendiqué a été élu le mois dernier au poste de procureur de la ville de Seattle. Cela ne fera qu’enhardir davantage la droite. Comme l’administration Biden ne parvient pas à obtenir des gains réels pour les travailleurs, l’espace pourrait grantir à l’avantage du populisme de droite. Notre victoire illustre comment lutter efficacement contre ce phénomène.

    Malheureusement, de nombreux candidats et militants de gauche tentent de contrer les politiciens de droite en masquant leur différences avec l’establishment démocrate. Cela ne fait que laisser un plus grand espace à la droite pour que celle-ci se présente comme l’alternative « anti-establishment » aux politiques habituelles, à la manière dont Trump et d’autres l’ont fait au niveau national. D’autres militants s’appuient sur des slogans “woke” sans proposer de revendications concrètes susceptibles d’améliorer la vie des travailleurs. Aucune de ces approches n’est efficace.

    L’année dernière, alors que notre campagne socialiste s’est battue pour des revendications populaires comme le contrôle des loyers, les droits des locataires et l’extension de la Taxe Amazon pour des logements abordables, pas un seul de ces candidats démocrate progressiste “woke” n’a fait campagne sur ces questions. Au lieu de cela, ils sont restés sur la défensive face aux attaques de la droite. En conséquence, non seulement les candidats démocrates ont perdu, mais certains d’entre eux, comme Lorena Gonzalez, ont été battus à plates coutures.

    Les socialistes peuvent contrer la droite en luttant sans réserve contre toutes les formes d’oppression et en reliant cette lutte aux revendications qui bénéficient aux travailleurs. Nous devons être prêts à dénoncer les dirigeants d’entreprise et les “progressistes” qui n’offrent aucune solution à la classe ouvrière, tout en organisant la lutte en faveur de politiques claires telles que le contrôle des loyers, l’augmentation des salaires, l’imposition des riches et un programme d’emploi socialiste et écologique.

    Une politique reposant sur le terrain

    Les médias de Seattle et une grande partie de la gauche se concentrent souvent sur l’incroyable « jeu de terrain » (groundgame) de Socialist Alternative pour expliquer les victoires de Kshama. Bien que nous soyons extrêmement fiers de notre effort sans précédent pour convaincre de participer aux élections et pour collecter un million de dollars de fonds de solidarité, tout cela découle directement de notre politique socialiste révolutionnaire dynamique.

    Vaincre les capitalistes exige un mouvement de masse actif. Le soutien passif aux idées socialistes ou à des politiques spécifiques de la classe ouvrière ne suffit pas pour remporter des victoires qui peuvent avoir un impact positif sur nos vies et porter un coup aux comptes en banque des milliardaires. Nous devons nous battre sans ambiguïté pour les besoins des travailleurs, des jeunes et des opprimés afin qu’ils s’investissent eux-mêmes dans la lutte pour la victoire. Cela s’exprime en partie dans les revendications combattives d’une campagne, à l’image de notre revendication d’un contrôle des loyers pour laquelle nous sommes passés à l’offensive malgré le fait que la campagne de solidarité contre la procédure de destitution était par essence une campagne défensive. Nous sommes également passés à l’offensive contre cette attaque de la droite pour souligner à quel point il était crucial pour les travailleurs de conserver la seule voix à l’hôtel de ville prête à se battre pour nous.

    Plus de 1.500 personnes du district 3 de Seattle se sont portées volontaires d’une manière ou d’une autre pour participer à la campagne de solidarité avec Kshama. Beaucoup d’entre elles ont rempli des « cartes d’engagement » pour discuter de l’élection et faire voter au moins trois proches ou collègues. De plus, nous ne nous sommes pas concentrés uniquement sur les électeurs probables. Le taux de participation au référendum révocatoire des 18-25 ans a été bien plus élevé que lors de l’élection générale de novembre ! Cela a été notamment rendu possible grâce à plus de 1.700 nouvelles inscriptions sur les listes électorales grâce à nos efforts ainsi qu’à une orientation vers les étudiants, qui ne votent normalement pas aux élections locales. L’inscription de nouveaux électeurs est particulièrement cruciale pour les locataires, souvent contraints de déménager en raison de la hausse vertigineuse du coût du logement, car Seattle dispose d’un système de vote par correspondance.

    Contrairement aux campagnes électorales de gauche qui promettent des victoires sur base du vote, nous avons répété à tous nos partisans que nous avions besoin qu’ils fassent plus que simplement voter. Nous avons demandé au moins trois fois à tous nos sympathisants rencontrés au porte-à-porte ou en déposant des affiches s’ils étaient prêts à faire un don à la campagne, en insistant sur les dépenses de la droite et des dirigeants d’entreprise. Nous avons battu tous les records pour une élection à Seattle en réunissant plus de 5.000 donateurs directement issus de la circonscription 3.

    Alors que de nombreuses campagnes progressistes se concentrent sur les électeurs « probables », nous avons augmenté le taux de participation dans les logements publics et les communautés marginalisées. Dans un immeuble à forte concentration est-africaine, le taux de participation a été presque dix fois supérieur à celui de l’élection générale ! Nous disposions de matériel de campagne en huit langues et avons mené des actions de sensibilisation spécialisées auprès de nombreuses communautés dont l’anglais est souvent la deuxième langue. De plus, nous avions prévu des stations d’impression de bulletins de vote pour que les travailleurs et les jeunes puissent voter sur place.

    Toutes ces réalisations organisationnelles étaient nécessaires pour gagner, et elles découlent toutes de l’orientation ouvrière du marxisme authentique. De nombreux militants ont également été impressionnés par la discipline de notre campagne qui découle également de notre politique révolutionnaire ; nous savons qu’il faudra une organisation soudée pour vaincre efficacement toutes les forces que le capitalisme nous envoie. Il s’agissait d’une campagne combattive visant à transformer un soutien passif en une lutte active contre les grands propriétaires, les promoteurs immobiliers et les dirigeants d’entreprise qui dominent l’establishment politique. Notre message politique a été un élément décisif de notre victoire.

    Nommer les ennemis de classe

    Tout comme le bureau de Kshama le fait depuis plus de huit ans, nous étions prêts à nommer et à faire honte aux partisans de la procédure de destitution. Alors que de nombreuses campagnes progressistes et même socialistes évitent souvent de polariser la discussion contre nos ennemis de classe et les mauvais dirigeants du mouvement social, nous étions fiers des adversaires que nous nous sommes faits.

    Dès le début, nous avons dit la vérité sur le fait que la procédure de destitution était une campagne de droite, même si cela a mis certaines personnes en colère. Deux des accusations de la campagne de révocation étaient une attaque contre le mouvement Black Lives Matter et les 20 millions de personnes qui ont participé aux manifestations pour demander justice pour George Floyd. L’autre concernait l’utilisation de notre bureau de conseil socialiste pour construire le mouvement Tax Amazon, qui avait connu un grand succès. Trop souvent, les progressistes sont sur la défensive lorsqu’ils sont attaqués par l’establishment politique. Nous avons fait tout le contraire et dit aux gens que Kshama et notre mouvement n’avaient rien à cacher, aucun regret, et que ces accusations étaient de droite. Nous avons souligné le soutien des grandes entreprises pour la destitution et leur motivation à renverser notre réélection en 2019. Nous avons également souligné que les tribunaux ne sont pas du côté des travailleurs et la nature antidémocratique du processus de destitution.

    Alors que les accusations de droite de la campagne de révocation étaient claires tout au long de la campagne, nous avons également utilisé le slogan « révocation de droite » (rightwing recall) sur base de notre prédiction politique de la façon dont la campagne se déroulerait. Alors qu’au départ, la campagne de révocation refusait les dons de donateurs de droite notoires, comme le milliardaire et promoteur immobilier Martin Selig, par ailleurs ardant partisan de Trump. Nous savions qu’ils devraient de plus en plus s’appuyer sur le soutien de la droite étant donné leur base peu profonde à Seattle. Après des mois passés à dire que la procédure était engagée par la droite, leur directeur de campagne, qui ne pouvait pas gérer les questions difficiles des journalistes progressistes, a commencé à apparaître sur des talk-shows de droite pour disposer d’interviews bienveillantes sur une base hebdomadaire. Les donateurs de droite (plus de 130 donateurs de Trump et plus de 500 donateurs républicains) ont commencé à affluer, et ils ont même accepté un nouveau don de Selig lui-même ! L’utilisation du slogan « révocation de droite » dès le début a positionné notre campagne pour scandaliser une couche d’électeurs du « centre mou ».

    Nous avons également prédit que la campagne de révocation aurait recours à la suppression d’électeurs comme seule voie possible vers la victoire. Nous avons recueilli plus de 3.000 signatures pour que la révocation soit inscrite sur le bulletin de vote, avec Kshama signant elle-même la pétition de façon bien visible ! Si nous avons procédé de la sorte, c’était pour dénoncer le plus fortement possible cette campagne de la droite qui a sciemment évité de mettre la question sur le bulletin de vote des élections générales du 2 novembre, lorsque le taux de participation devait être le plus élevé et alors que les habitants de Seattle devaient élire le maire et de nombreux autres postes de la ville et du comté. Cette tactique a permis de démontrer sans l’ombre d’un doute que la campagne de révocation était une tentative de suppression d’électeurs et a donné plus de crédibilité à notre slogan qualifiant la campagne de révocation de droite malgré les objections de nombreux riches libéraux.

    Tout en étant obligés de mener une lutte contre la révocation, nous avons également continué à nous concentrer sur la construction de mouvements sociaux pour les travailleurs et les locataires, même lorsque cela empiétait sur notre campagne de terrain. Le bureau de Kshama et Socialist Alternative se sont mobilisés pour une législation historique sur les droits des locataires en 2021 et ont mené une lutte contre les augmentations de loyer à Rainier Court (un ensemble d’immeubles d’habitation situés en dehors du district de Kshama). En plus de cela, nous avons recueilli plus de 15.000 signatures pour le contrôle des loyers et construit un rassemblement de centaines de personnes par une journée pluvieuse au plus fort de notre lutte contre la procédure de révocation. La lutte des classes ne s’arrête pas, et nous ne faisons pas de pause pour des considérations électorales ; nous savons aussi qu’une ambiance de confiance envers les mouvements sociaux serait de nature à aider les perspectives électorales des socialistes.

    Le rôle de Kshama et de Socialist Alternative dans la grève des charpentiers de l’État de Washington, menée par la base, est peut-être le plus important pour la lutte des classes, mais aussi le plus controversé. Cette grève, dont les dirigeants du syndicat n’ont jamais voulu, a eu lieu après que les travailleurs ont rejeté quatre accords de principe négociés par les permanents du syndicat. Les dirigeants du syndicat ont organisé des piquets de grève inefficaces qui n’ont pas permis de fermer un seul site de travail. Après quelques jours de cette situation, les travailleurs ont commencé à organiser leurs propres piquets de grève militants. Le bureau de Kshama a joué un rôle important dans cette grève, au grand dam de ces dirigeants syndicaux. Si l’issue de la grève n’a pas été une victoire décisive, elle a contribué à ouvrir la voie aux futures batailles syndicales qui s’annoncent, et Kshama est en train d’introduire une législation pour répondre à l’une des demandes des travailleurs : que les patrons paient les frais de stationnement très coûteux de Seattle. Ceux-ci absorbent une part importante du salaire quotidien des travailleurs.

    Socialistes et syndicats

    Nous sommes fiers d’avoir obtenu plus de 20 soutiens syndicaux locaux pour la campagne de solidarité avec Kshama, et cet effort a été soutenu par 600 soutiens de travailleurs de base du mouvement syndical de Seattle. Bien qu’il y ait quelques dirigeants syndicaux combattifs à Seattle, beaucoup d’autres n’ont soutenu notre campagne qu’à contrecœur en raison de la pression exercée par la base. Parfois, même après que les syndicats aient soutenu notre lutte contre la révocation, il fallait une proposition des militants de la base (souvent des membres ou sympathisants de Socialist Alternative) pour que les syndicats investissent des ressources dans la lutte.

    C’est un microcosme de la situation actuelle du mouvement syndical. Des syndicats combatifs sont désespérément nécessaires alors que les milliardaires amassent des richesses pendant que la planète brûle. Le mouvement ouvrier est également plus populaire que jamais, et des signes de lutte émergent. Pourtant, dans pratiquement tous les combats menés pendant le mois d’octobre (surnommé « striketober », une contraction entre « grève » et « octobre »), les dirigeants syndicaux ont freiné la lutte alors que les travailleurs de la base souhaitaient un combat plus déterminé. Comme par le passé, les militants socialistes peuvent jouer un rôle important dans le monde du travail si nous offrons une voie claire pour gagner. Cela signifie qu’il ne faut pas hésiter à critiquer les dirigeants syndicaux lorsqu’ils commettent des erreurs ou trahissent carrément la classe ouvrière.

    Socialist Alternative était fière de présenter une résolution à la convention nationale des Socialistes Démocrates d’Amérique (DSA) l’été dernier, arguant que les dirigeants syndicaux sont le principal obstacle qui empêche le mouvement de progresser. Bien que notre résolution n’ait finalement pas été adoptée, les événements ont prouvé que cette perspective était correcte. Bien que Kshama soit une présence constante dans les luttes des travailleurs de Seattle, une pression énorme a été exercée sur elle au fil des ans pour qu’elle modère ses critiques à l’égard des dirigeants syndicaux. Cependant, les socialistes ont le devoir d’indiquer le chemin de la victoire dans chaque mouvement, même si cela conduit à des débats acerbes.

    Les dirigeants syndicaux combattifs dont l’approche repose sur la lutte des classes, même lorsqu’ils ne sont pas d’accord avec Socialist Alternative, ne craignent pas la critique lorsqu’ils valorisent un débat ouvert et honnête dans notre mouvement. Cependant, de nombreux dirigeants syndicaux, même ceux des syndicats qui ont soutenu la campagne de solidarité de Kshama, n’étaient pas d’accord avec notre approche de la grève des charpentiers, des travailleurs d’UPS avant cela ou encore notre opposition au contrat du syndicat des flics qui était largement contesté par les dirigeants des communautés marginalisées.

    Certains des dirigeants syndicaux les plus conservateurs, en particulier dans les métiers du bâtiment, ont ouvertement soutenu la campagne de révocation. Ils ont même aidé à mettre en place un CAP pour tenter de destituer Kshama et ont fait des dons aux mêmes CAP que les patrons du bâtiment détestés, l’Associated General Contractors of America. Nous avons publiquement dénoncé ces dirigeant et avons clairement exprimé nos désaccords. De nombreux responsables syndicaux ont vivement désapprouvé notre approche. Cependant, nous avons pour principe de dire la vérité à la classe ouvrière, et nous le ferons à nouveau.

    Malheureusement, l’approche combative adoptée par Socialist Alternative pour reconstruire un mouvement ouvrier combatif contraste avec une grande partie de la gauche. Par exemple, la campagne d’India Walton pour la mairie de Buffalo a été sapée par la direction du syndicat qui a massivement soutenu son adversaire sortant. Au lieu de construire agressivement le soutien de la base pour s’opposer aux dirigeants syndicaux conservateurs, sa campagne a reculé devant ce combat et n’a pas réussi à polariser suffisamment contre l’establishment démocrate. Au lieu de cela, Mme Walton s’est concentrée sur la promotion de son soutien à Chuck Schumer, démocrate de premier plan et complice des entreprises, dans les dernières semaines de la campagne.

    Le rôle honteux des responsables démocrates

    Kshama se présente ouvertement comme membre de Socialist Alternative, et elle est connue pour son plaidoyer en faveur d’un nouveau parti de masse des travailleurs et d’une rupture claire avec les démocrates. Sur cette base, nous avons néanmoins remporté le soutien écrasant des militants démocrates locaux dans le 43e district législatif, par une majorité de 83%. Seattle est quelque peu unique en ce sens que les structures locales du parti démocrate ont réellement des militants. Nous y avons trouvé un certain soutien pour les idées socialistes au fil des ans. Ce n’est pas le cas des partis démocrates de la plupart des villes qui sont souvent des coquilles vides sans militants qui ne servent que les besoins des politiciens carriéristes.

    Kshama et Socialist Alternative sont également fiers d’avoir reçu le soutien de Bernie Sanders, Noam Chomsky et d’autres personnalités nationales, en plus des racines profondes que nous avons dans le district 3 et dans le reste de Seattle.

    Malgré le soutien important des électeurs et des militants démocrates de base, nous avons été confrontés au silence de la plupart des élus démocrates (à quelques exceptions près au niveau de l’État et du comté). Il est honteux que pas un seul membre démocrate du conseil de ville n’ait soutenu Kshama, pas même les démocrates progressistes comme Tammy Morales et Teresa Mosqueda. Et ce, malgré les tentatives répétées de notre campagne et les efforts de bonne foi pour travailler avec les progressistes là où nous sommes d’accord. En même temps, Kshama n’a jamais retenu ses critiques lorsqu’elles étaient justifiées, et nous pensons que d’autres élus devraient faire de même lorsqu’ils sont confrontés à des démocrates progressistes qui ne défendent pas systématiquement les travailleurs.

    Les démocrates progressistes ont fait piètre figure lors des élections de novembre à Seattle. Les travailleurs en ont assez des mots à la mode “woke” des politiciens qui ne sont pas liés à des demandes concrètes comme le contrôle des loyers et l’imposition des riches. Les démocrates de l’establishment ont saisi l’ouverture, soutenus par des millions de dollars de CAP d’entreprises. Alors que les représentants des entreprises, comme le maire élu Bruce Harrell, se sont appuyés sur la répression pour faire face à la crise du logement à Seattle, la progressiste Lorena Gonzalez, soutenue par les travailleurs, n’a pas réussi à fournir un semblant d’alternative, et a fini par faire une série de gestes désespérés qui se sont retournés contre elle. Gonzalez a non seulement évité de mentionner le contrôle des loyers ou d’autres demandes de la classe ouvrière, mais elle n’a pas non plus défendu le mouvement Black Lives Matter. Elle a également refusé de dénoncer le soutien des grandes entreprises et le soutien massif des CAP à son adversaire, probablement parce qu’elle ne voulait pas se mettre à dos les grandes entreprises. Harrell a remporté une victoire écrasante.

    Leçons pour les DSA

    Malheureusement, les candidates soutenues par les DSA, Nikkita Oliver et Nicole Thomas-Kennedy, ont toutes deux perdu à Seattle en novembre. Nicole Thomas-Kennedy a été battue par un républicain (le premier élu de Seattle en 30 ans) pour le poste de procureur de la ville, et cela a été alimenté en partie par la réaction de la droite contre BLM. Nikkita Oliver, dirigeante du mouvement BLM soutenue par Kshama, a également perdu sa course, cette fois face à un démocrate de l’establishment. Malheureusement, Nikkita Oliver n’a pas vraiment fait campagne sur le contrôle des loyers, sur la taxation des grandes entreprises ou sur d’autres revendications de la classe ouvrière, se contentant de slogans vagues.

    Il est clair que ce qui s’est passé à Seattle, avec le contraste entre les résultats des élections de novembre et de décembre, contredit les affirmations de certains membres du mouvement socialiste selon lesquelles la politique indépendante en dehors du parti démocrate est une “condamnation à mort”. Les deux candidats (Oliver et Thomas-Kennedy) qui bénéficiaient du soutien de l’establishment démocrate progressiste de Seattle ont perdu, et la marxiste indépendante, Kshama Sawant, a gagné. Bien que l’indépendance politique ne se traduise pas nécessairement par un succès électoral, cela démontre qu’il est faux de dire que se présenter en tant que démocrate est une voie plus facile pour obtenir un changement socialiste. Et cela ne se limite pas aux élections – le fait d’éviter de contrarier les grandes entreprises et l’establishment politique pendant les élections se poursuit pratiquement toujours par un échec dans la construction de mouvements et la lutte pendant le mandat. Notre seul bureau de conseil marxiste à Seattle a remporté plus de gains historiques significatifs pour les travailleurs, comme le salaire minimum de 15 dollars et la taxe Amazon, que n’importe quel autre élu socialiste autoproclamé, y compris ceux qui ont les ressources et les plateformes d’un bureau national.

    En dernière analyse, le parti démocrate est une barrière pour les travailleurs, les opprimés et les jeunes qui tentent de changer la société. Kshama se présente indépendamment des Démocrates pour être un exemple brillant qu’un parti de la classe ouvrière est possible et nécessaire. Au lieu de promettre des réformes si elle est élue, Socialist Alternative pointe toujours vers les mouvements qui seront indispensables pour remporter des victoires.

    L’élection du maire de Buffalo en novembre montre également que les socialistes ne peuvent pas avoir un “raccourci” vers le succès en se présentant aux primaires du parti démocrate. India Walton a gagné la primaire contre le titulaire, mais a été battue dans l’élection générale par une campagne menée par ce même titulaire !

    Les DSA s’efforcent de trouver un moyen de tenir les élus responsables, comme le montre la récente trahison de Jamal Bowman et le débat continu à ce sujet au sein des DSA. Cela devrait être une discussion continue, et de simples réponses organisationnelles ne seront pas suffisantes. Une analyse approfondie et un plan d’action sont nécessaires pour que les socialistes utilisent efficacement les fonctions électives pour construire des luttes fructueuses et ouvrir la voie à un nouveau parti de masse de la classe ouvrière. Socialist Alternative aimerait approfondir sa contribution à cet important débat au sein des DSA et de la gauche au sens large, et notre travail et notre expérience à Seattle nous donnent un aperçu unique de cette discussion.

    Vers la victoire finale

    Bien qu’il y ait actuellement une accalmie dans les manifestations de rue, la société est profondément polarisée et des luttes de masse sont à l’horizon. La gauche socialiste peut se développer si nous indiquons une voie à suivre pour le mouvement ouvrier et la lutte contre la menace populiste croissante de la droite.

    Concrètement, le droit à l’avortement est directement menacé. Les socialistes doivent être à l’avant-garde de la lutte pour défendre et étendre les droits reproductifs. Si la gauche reste à l’écart des mouvements ouvriers et féministes en 2022, elle sera conduite dans des impasses et des défaites par les démocrates et les bureaucrates. Au lieu de cela, les socialistes devront faire des propositions audacieuses et concrètes pour élargir une lutte prête à prendre les mesures déterminées pour perturber le système capitaliste.

    Ce ne sont pas seulement les élections, mais la lutte de classe et sociale, qui peuvent jeter les bases d’un nouveau parti pour les travailleurs. Les travailleurs produisent tout, distribuent tout, construisent tout, nettoient tout, soignent les malades, enseignent aux enfants et fournissent tous les services. Ce système ne peut pas bouger sans nous. Nous pouvons le mettre à plat et construire un nouveau monde basé sur les besoins de l’humanité et de la planète, et non sur la cupidité de quelques-uns. Au niveau international, nous avons besoin d’un monde basé sur la solidarité et la démocratie, dans lequel les grandes entreprises et les ressources du monde sont détenues et contrôlées démocratiquement. Nous pouvons gagner un monde socialiste si nous nous organisons, et cette élection est une contribution importante mais modeste à ce processus.

    Comme l’a dit Kshama en annonçant notre victoire, “Si une petite organisation socialiste révolutionnaire peut battre les entreprises les plus riches du monde ici à Seattle, encore et encore, vous pouvez être sûrs que le pouvoir organisé de la classe ouvrière au sens large peut changer la société.” Rejoignez-nous !

  • Seattle. “Les riches ont joué leurs meilleures cartes contre nous, et nous les avons battus. Une fois de plus.”


    Voici ci-dessous, le texte du discours de Kshama Sawant prononcé lors de la conférence de presse du 10 décembre annonçant l’initiative de revue du scrutin par la Campagne de Solidarité avec Kshama (Kshama Solidarity Campaign). Cette campagne avait été lancée suite à la procédure de destitution engagée à son encontre par la droite et les grandes entreprises de Seattle.

    Tout d’abod, félicitations aux travailleurs de Starbucks pour le succès de leur campagne de syndicalisation (qui a tout récemment imposé la présence syndicale pour la toute première fois dans l’entreprise aux Etats-Unis, NdT). C’est un signe annonciateur de la période à venir.

    Aujourd’hui, l’ancien PDG de Starbucks et résident du district 3 de Seattle (circonscription en jeu pour la procédure de révocation de Kshama Sawant, NdT), Howard Schultz, a passé une très mauvaise journée. Entre les travailleurs de Starbucks qui commencent à se débarrasser de leurs chaînes et notre victoire apparente ici à Seattle, les nouvelles ont été terribles pour la classe capitaliste.

    Le dépouillement du scrutin d’hier après-midi a montré que notre campagne socialiste à Seattle a pris une avance de 232 voix.

    Il semble bien que nous ayons vaincu les efforts combinés des grandes entreprises, de leurs médias, de la droite, des tribunaux et de l’establishment politique – qui cherchaient par tous les moyens à éliminer notre présence socialiste au conseil de la ville de Seattle (conseil où ne siègent que 9 élus et le maire pour la gestion d’une ville de 740.000 habitants, NdT).

    En d’autres termes, les riches et leurs représentants en politique et dans les médias ont joué leurs meilleures cartes contre nous, et nous les avons battus. Une fois de plus.

    Comment avons-nous fait cela ? Nous avons gagné parce que nous n’avons pas reculé.

    Nous n’avons pas reculé dans notre position socialiste au conseil de ville. Au contraire, nous sommes passés à l’offensive, et cette année, nous avons remporté certaines des victoires les plus importantes pour les droits des locataires.

    Nous n’avons pas reculé dans la lutte des travailleurs : nous avons mis nos ressources et notre engagement total à la disposition des courageux syndicalistes de base du syndicat des charpentiers du Pacifique Nord-Ouest. Nous l’avons fait alors que la direction de leur syndicat a honteusement refusé de se battre et a attaqué publiquement notre siège au conseil de ville en nous accusant d’interférence. Si soutenir les travailleurs syndiqués dans leurs efforts pour combattre les patrons est une interférence, alors je plaide coupable. Je suis une interférente.

    Il existe également de bons et courageux dirigeants syndicaux, et nous devons travailler à leurs côtés. Les travailleurs n’ont pas d’autre choix que de reconstruire un mouvement syndical combatif, et si certains dirigeants syndicaux conservateurs veulent s’y opposer, nous ne pouvons pas les laisser nous arrêter.

    Nous n’avons pas reculé d’un pouce dans notre campagne électorale socialiste pour vaincre cette tentative de révocation lancée par la droite, une campagne raciste soutenue par les grandes entreprises. Nous avons combattu les attaques sans fin des médias capitalistes, en particulier le Seattle Times.

    Encore une fois, nous avons lutté contre les quantités massives d’argent des grandes entreprises. Un million de dollars. Je ne parle pas seulement de l’argent des Comités d’Action Politique (structures privées dont le but est d’aider ou de gêner des élus, ainsi que d’encourager ou de dissuader l’adoption de certaines lois, NdT), mais aussi des énormes sommes d’argent des entreprises qui sont allées directement à la campagne pour la révocation, avec plus de 500 riches républicains, 850 millionnaires, plus de 100 PDG et cadres supérieurs, de même que tout un Who’s Who du secteur de l’immobilier.

    Nous avons surmonté les obstacles posés par la Cour suprême de l’État de Washington, qui a non seulement permis à cette campagne de révocation injuste de se poursuivre, mais a également retardé sa prise de décision de façon à permettre au vote de se tenir en décembre (entre Thanksgiving et Noël, la pire période pour la participation à une élection, NdT) afin de priver de leurs droits les travailleurs, les locataires et les personnes de couleur.

    Et nous devons être clairs : la suppression des électeurs a eu un effet réel. En 2019, nous avons également eu une forte campagne pour inciter les gens à voter – bien qu’elle n’ait pas été aussi forte que cette fois-ci – et la participation a été de 60 % dans notre district. Cette fois-ci, elle n’est que de 53 %. S’il n’y avait pas eu de suppression flagrante d’électeurs, nous aurions gagné avec une marge bien plus importante. Le résultat n’aurait même pas été serré.

    Mais même cette fois-ci, sous la pluie battante de décembre et lors d’une élection sans précédent en période de fêtes, le résultat de ce vote n’était PAS du tout serré en ce qui concerne les votes de la classe ouvrière, des personnes de couleur et des jeunes. Dans tous les bureaux de vote avec des majorités claires de travailleurs, nous avons remporté des marges massives. Y compris dans cette circonscription. Des majorités de 70%, 80%, et plus.

    Ce fut vrai à chacune de nos élections. Les travailleurs soutiennent massivement nos politiques socialistes.

    Cela s’est reflété non seulement dans le vote, mais aussi dans le fait que nous avons réuni 1.500 bénévoles ou encore dans notre collecte de fonds record.

    Cette victoire n’aurait pas été possible sans l’énorme abnégation de nos bénévoles, des socialistes et des travailleurs. Nous avons fait campagne pendant des heures sous la pluie battante, dans le froid et les vents violents, au cours du mois de novembre le plus pluvieux de l’histoire de Seattle. Et ce n’est pas seulement leur sacrifice personnel, mais la clarté politique des idées socialistes qui a guidé tous leurs efforts pour remporter cette victoire historique pour la classe ouvrière.

    En fin de compte, la suppression d’électeurs n’a pas suffi. Il n’est donc pas surprenant que le bureau éditorial du Seattle Times souhaite maintenant davantage de suppression d’électeurs à l’avenir, et n’hésite pas à adopter ouvertement cette position digne de Trump.

    Si la classe dirigeante veut changer les lois de ce pays prétendument dans l’intérêt de la démocratie, elle devrait commencer par la loi de rappel de l’État. Ce système permet aux tribunaux de protéger les politiciens de l’establishment contre la révocation tout en ouvrant la voie à la révocation des politiciens de la classe ouvrière. Ils devraient faire en sorte que TOUS les politiciens soient soumis à un rappel démocratique, au lieu de cette parodie totale de démocratie qui vient d’avoir lieu.

    Les démocrates progressistes ont perdu du terrain au conseil de ville. L’élection de Sara Nelson va enhardir les grandes entreprises. Elle sera l’excuse pour ces nombreux démocrates présents au Conseil qui veulent faire glisser la politique de Seattle vers la droite. Nous ne pouvons pas les laisser faire.

    Il y a sans aucun doute d’énormes différences entre la socialiste que je suis d’une part, et les membres progressistes du conseil Teresa Mosqueda, Tammy Morales et Lisa Herbold d’autre part. Mais je leur demande instamment, ainsi qu’à notre bureau socialiste, d’agir de manière unie en tant qu’aile progressiste du conseil de ville pour lutter contre les attaques des grandes entreprises et passer à l’offensive en faveur des travailleurs.

    Si l’objectif des démocrates progressistes était réellement de se battre sans ambiguïté pour les travailleurs, je les rejoindrais volontiers. Je les rencontrerais dès aujourd’hui pour élaborer une stratégie offensive en faveur du contrôle des loyers, de logements abordables pour toutes et tous ou encore pour combattre le racisme institutionnel dans cette ville.

    Leur choix leur appartient. Et tous les mots doux et les fleurs de notre part ne les inciteront pas à agir de la sorte.

    Si l’on se fie à l’histoire, les démocrates progressistes « wokes » vont plutôt s’allier à la nouvelle administration du maire Bruce Harrell et chercher à apaiser les grandes entreprises dans les mois à venir. C’est d’ailleurs déjà le cas. Le conseiller Mosqueda a honteusement rejoint l’équipe de transition du maire. Cela en dit long. Les autres démocrates progressistes donnent également toutes sortes d’indications qu’ils ont l’intention de suivre cette voie.

    En tant que travailleurs, nous devons tirer les véritables leçons de ce combat.

    L’une d’elles est que les démocrates du conseil de ville de Seattle ne sont pas de votre côté, ils ne sont pas du côté de la classe ouvrière. Au mieux, ce sont des libéraux progressistes wokes qui vous diront parfois ce que vous voulez entendre lorsqu’ils ressentent la pression de la rue, mais leur bouche relayera également la volonté des grandes entreprises.

    Pas un seul des progressistes du conseil de ville, en fait pas un seul des huit démocrates, n’a prononcé un seul mot contre cette procédure de destitution de la droite en dépit de l’enjeu pour la classe ouvrière dans ce combat. Cela devrait vous dire tout ce que vous avez besoin de savoir sur eux.

    Mais c’est plus que cela. Au lieu de se tenir aux côtés de nos mouvements, ils nous ont combattus à chaque étape du processus. Gonzalez et d’autres démocrates ont utilisé des moyens bureaucratiques pour tenter de mettre fin à notre mouvement en faveur de la Tax Amazon l’année dernière (une taxe sur les multinationales présentes à Seattle de manière à subventionner des logements pour sans-abris et d’autres mesures liée au logement abordable, NdT). Il y a deux mois à peine, pas un seul de ces progressistes ne m’a soutenu, ne serait-ce que pour présenter notre projet de loi visant à faire payer aux patrons le stationnement des ouvriers du bâtiment, l’une des principales revendications de leur grève. En plus de cela, Gonzalez, en tant que président du Conseil, a menacé de me mettre en sourdine lors d’une réunion du Conseil en ligne. Ce ne sont là que quelques exemples parmi tant d’autres.

    J’aimerais que ce ne soit pas vrai, mais ça l’est. Nous avons besoin de plus de socialistes au Conseil de ville pour se battre du côté des travailleurs. Et, plus important encore, nous devons construire nos mouvements de lutte. C’est ainsi que les choses changeront. Je sais que certains n’aiment pas entendre cela, mais c’est mon devoir politique de le dire.

    Nous avons besoin d’unité, mais l’unité dont nous avons besoin est celle de la classe ouvrière, de la jeunesse et des personnes opprimées. Nous avons besoin d’unité avec toutes elles et ceux qui sont prêts à se battre pour que le logement soit un droit humain, pour un New Deal vert socialiste et pour mettre fin au racisme et au sexisme. L’unité avec l’establishment politique ne signifie qu’une chose : la trahison.

    Si je devais tenir ma langue lorsque les politiciens démocrates trahissent les travailleurs, comme ils l’ont fait avec l’abrogation tout à fait honteuse de la première taxe Amazon en 2018, j’aurais moi-même trahi la classe ouvrière.

    C’est ce que cela signifie quand on ne s’exprime pas. En choisissant ce qu’il faut dire et ce qu’il faut laisser de côté, un élu choisit un camp. Si je ne dénonçais pas les démocrates quand ils vendent les travailleurs, je deviendrais moi-même une partie du problème, une partie de la trahison.

    Les démocrates présents au Conseil pourraient faire des choix différents. Je souhaite qu’ils le fassent, et j’espère qu’ils le feront, mais je ne retiens certainement pas mon souffle. Et vous ne devriez pas non plus. En fait, je vous appelle à arrêter de le faire. Il est temps d’agir. Il est temps de se battre pour le contrôle des loyers. Il est temps de reconstruire un mouvement ouvrier combatif. Il est temps d’avoir un système de santé pour tous. Nous avons du travail aujourd’hui, nous n’avons pas de temps à perdre à entretenir des illusions sur les politiciens acquis à la cause des patrons, même s’ils parlent bien. Ce que nous gagnerons ou ne gagnerons pas reposera sur l’unité que nous construirons au sein de la classe ouvrière. De cela dépendra la force de notre mouvement.

    Mais les grandes entreprises ont pratiquement balayé les élections de novembre à Seattle et ont remporté de grandes victoires au niveau national. Pourquoi donc ?

    Alors que les grandes entreprises ont soutenu de tout leur poids les candidats de la « loi et de l’ordre », les démocrates progressistes ne sont pas parvenus à mener campagne autour des problèmes rencontrés par la classe ouvrière. Pourquoi des démocrates comme Lorena Gonzalez n’ont-ils rien offert à la classe ouvrière ? Pourquoi ne se sont-ils pas battus pour le contrôle des loyers, pour l’extension de la taxe Amazon pour construire des logements abordables, ou pour toute autre revendication de la classe ouvrière ? Pourquoi ont-ils laissé l’élection être définie par l’opposition de droite au mouvement Black Lives Matter ? Pourquoi n’ont-ils pas dénoncé le soutien des grandes entreprises à leurs adversaires. Les grandes entreprises ont utilisé 2 millions de dollars pour acheter ces élections.

    Si l’élection de Gonzalez s’est soldée par un échec, c’est parce qu’elle n’a jamais présenté de revendications combatives – elle a fait campagne sur la défensive – sans vouloir souligner que son adversaire était la candidate préférée des grandes entreprises. Et c’est parce qu’elle ne veut pas se mettre à dos ces grandes entreprises précisément.

    Le parti démocrate n’est pas un parti de la classe ouvrière mais plutôt un parti des milliardaires. Même son aile progressiste veut en fin de compte faire la paix avec les grandes entreprises. Elle se limiter à apporter des changements largement symboliques dans le cadre du statu quo.

    Les démocrates sont évidemment différents du parti républicain, de plus en plus franchement réactionnaire. Mais cela ne suffit pas.

    Je suis une marxiste. C’est-à-dire que je suis une socialiste scientifique. Cela signifie que je ne m’engage pas dans les vœux pieux ou l’impressionnisme politique qui sont le fonds de commerce des progressistes libéraux. Je me base – comme tous mes camarades de Socialist Alternative – sur la réalité matérielle, sur le matérialisme historique – qui est l’étude de l’histoire à travers une lentille scientifique. Nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas tirer les leçons des erreurs et des victoires passées de la classe ouvrière. Nous n’avons tout simplement pas le temps de le faire.

    L’une des conclusions tirées par Karl Marx dans son étude de la lutte des classes est que la classe ouvrière a besoin de son indépendance politique, de ses propres candidats et de son propre parti politique. Elle ne peut partager son parti politique avec les capitalistes.

    Et il est grand temps que nous dressions le bilan du parti démocrate, qui est un parti raté, pourri de part en part. Il n’a jamais été le parti des travailleurs. Le New Deal de Roosevelt est né de l’action d’un mouvement ouvrier combattif, guidé par des socialistes et des idées socialistes, qui ne lui a laissé aucun autre choix que d’agir. Roosevelt a dit aux capitalistes de son époque : “Je suis le meilleur ami du capitalisme américain”.

    Nous avons juré de mettre sur pied la plus grande campagne de mobilisation électorale que Seattle ait jamais connue, et c’est exactement ce que nous avons fait. Mais nous n’avons pas fini. Il y a maintenant environ 600 votes qui ont été contestés, en raison de signatures manquantes ou qui ont été laissés incomplets par inadvertance. Notre campagne va mener l’effort nécessaire pour s’assurer que le vote de chaque travailleur compte dans cette élection, tout comme nous nous sommes battus pour le faire ces dernières semaines. Nous allons commencer cette campagne de protection des électeurs aujourd’hui, juste après cette conférence de presse.

    Nous avons maintenant devant nous une réelle opportunité de gagner le contrôle des loyers. Cette victoire témoigne de l’énorme soutien dont bénéficie le contrôle des loyers dans ce district, à Seattle et au-delà. Nous avons recueilli plus de 15.000 signatures cet été pour le contrôle des loyers, alors que nous étions déjà engagés dans cette procédure de révocation de la droite. Nous devons passer à l’offensive l’année prochaine pour que cela se produise. Comme notre victoire à la réélection de 2019 a créé l’élan dont nous avions besoin pour gagner la taxe historique sur Amazon, la défaite de la droite dans cette procédure de destitution représente un vent dans nos ailes pour faire passer cette législation à Seattle et l’imposer aux démocrates.

    Enfin, j’ai un message pour les travailleurs. Cette victoire vous a été apportée par les idées politiques et la clarté de Socialist Alternative, comme l’ont été toutes nos victoires électorales passées, comme l’ont été le salaire minimum à 15 dollars de l’heure, la taxe Amazon et les droits obtenus pour les locataires. Point final. Si vous voulez sérieusement vous battre pour obtenir des gains pour les travailleurs, vous devriez sérieusement envisager de rejoindre Socialist Alternative. Vous le devez à vous-même, vous le devez à la classe ouvrière.

    Si une petite organisation socialiste révolutionnaire peut battre les entreprises les plus riches du monde ici à Seattle, encore et encore, vous pouvez être sûrs que la force organisée de la classe ouvrière au sens large peut changer la société.

  • La « Bataille de Seattle ». Choc des titans entre le capital et les marxistes à la pointe de la lutte sociale


    Seattle est une ville en crise. Au cours des dix dernières années, les prix des logements ont augmenté de 93 %. Rien que l’an dernier, les loyers se sont envolés de 25 % ! La ville est pourtant très riche ; Amazon, Starbucks et Microsoft y ont leur siège social. Mais à l’ombre de leurs gratte-ciel, on trouve des milliers de campements de fortune tandis qu’une épidémie de drogue fait rage. Les inégalités sautent aux yeux et font mal au cœur.

    Par Koerian

    Des victoires concrètes arrachées de haute lutte

    La force qui a le plus fait obstacle à cette tendance au cours de ces huit dernières années est Socialist Alternative, notamment grâce à son élue au conseil de la ville (qui ne comporte que 9 membres), Kshama Sawant.

    Kshama Sawant s’est battue avec constance et détermination contre les inégalités. Elle a dirigé le mouvement qui a arraché l’instauration du salaire minimum de 15 dollars de l’heure à Seattle en 2013 (et de 17 dollars à partir de 2022). Récemment, sous son impulsion, une taxe sur les grandes entreprises a été introduite de manière à récolter 2 milliards de dollars sur 10 ans pour des subventions liées au COVID et le logement social. Cette année, Socialist Alternative a également remporté des victoires importantes pour les locataires. Un préavis de six mois doit désormais être donné aux locataires avant éviction et lorsqu’un propriétaire augmente le loyer de plus de 10 %, il doit verser trois mois de loyer à titre de soutien au locataire sortant. Maintenant, Kshama et Socialist Alternative se battent pour un gel des loyers à Seattle. En novembre, Sawant et Socialist Alternative sont parvenus à stopper l’augmentation des loyers dans un immeuble d’habitation où vivent principalement des personnes âgées pauvres. On les a également trouvé auprès de charpentiers de la construction en grève.

    La classe capitaliste se défend

    La colère des patrons de l’immobilier, des chefs d’entreprise et de la droite est compréhensible… Leur rage est d’autant plus forte qu’ils ont échoué à la battre Sawant lors d’élections régulières. En 2019, Amazon a même jeté 1,5 million de dollars dans la course électorale pour éjecter Kshama de sa position, sans succès.

    Leur nouvelle manœuvre est une procédure de destitution non démocratique qui repose sur la participation de Kshama aux manifestations de Black Lives Matter. Les habitants du district 3 de Seattle voteront pour décider si elle peut rester à son poste ou doit être remplacée par une personne choisie par le reste du conseil de ville. La campagne de destitution a le soutien de cadres d’Amazon, de partisans de Trump et de grands propriétaires immobiliers.

    Une impressionnante campagne menée par des travailleurs

    Mais au lieu de poser la question sur le bulletin de vote des élections générales de novembre, la campagne de destitution a décidé d’organiser une élection spéciale qui se termine le 7 décembre. La classe capitaliste compte sur la période de vacances entre Thanksgiving et Noël pour affaiblir le soutien populaire de Kshama. Le grand défi de nos camarades était de polariser le débat suffisamment pour que l’élection ne passe pas inaperçue.

    C’est jusqu’ici réussi. Une campagne de terrain menée par plus de 700 bénévoles a touché 16.000 personnes à leur porte ou en rue. Nos camarades soulignent que le véritable enjeu de ce vote est un combat entre l’élite capitaliste et la classe ouvrière. Plus de 1.300 personnes ont directement enregistré leur vote suite à cela et plus de 900.000 dollars de petites donations ont été récoltés.
    Grâce au temps et aux efforts des travailleurs ordinaires, il s’agit à bien des égards de la plus grande campagne politique de l’histoire de Seattle. 16% des électeurs éligibles se sont déjà rendus aux urnes, soit quatre fois plus qu’au même moment la fois précédente. Beaucoup dépendra de la façon dont la campagne aura repris son élan après Thanksgiving.

    Une dimension nationale

    L’importance de cette élection ne peut être sous-estimée. Son importance est nationale. L’obtention du salaire minimum de 15 dollars en 2013 avait servi de source d’inspiration dans tout le pays. Le gel des loyers aurait le même effet. Le programme et les méthodes de lutte de Sawant et de Socialist Alternative à Seattle sont un exemple pour de nombreux mouvements aux États-Unis. Si la droite parvient à destituer notre camarade, elle gagnera en confiance en utilisant des procédures de destitution non démocratiques similaires comme arme contre la gauche dans tout le pays.

  • Solidarité avec Kshama Sawant : Bernie Sanders apporte son soutien

    Nouvelle de taille pour la campagne de solidarité de Councilmember Kshama Sawant à Seattle ! Bernie Sanders a apporté son soutien officiel !

    “Une fois de plus”, a déclaré Bernie dans sa déclaration de soutien, “les riches et les intérêts privés mènent une attaque contre le siège de Kshama Sawant parce qu’elle a le courage de défendre les travailleurs. Nous devons nous unir pour mettre fin à cette procédure de rappel sans fondement. Votez ‘NON’ d’ici le 7 décembre”.

    Les campagnes présidentielles de Bernie en 2016 et 2020 ont été des exemples importants de la façon dont les travailleurs peuvent s’organiser et se battre. Mais elles ont également démontré à quel point la classe capitaliste et son personnel politique ne ménagent aucun effort pour vaincre les élus qui dirigent des mouvements de lutte favorables à la classe ouvrière.

    Les médias de masse et l’establishment politique des deux partis de Wall Street (Démocrates et Républicains) s’en sont pris à Bernie parce qu’ils considéraient que le large élan en faveur de ses revendications (salaire minimum à 15 dollars de l’heure, un système universel de soins de santé,…) représentait une menace pour leur pouvoir économique et politique.

    Aujourd’hui, à Seattle, plus de 500 donateurs républicains, 130 donateurs de Trump, plus de 850 millionnaires et plus de 100 PDG et dirigeants d’entreprise s’en prennent à Kshama pour la même raison. Après avoir vu Kshama diriger des mouvements pour obtenir le salaire minimum historique de 15 dollars de l’heure à Seattle (instauré pour la première fois dans une grande ville américaine à la faveur de sa campagne 15NOW) et pour instaurer la Taxe Amazon pour des logements abordables et un Green New Deal, et avoir constaté qu’elle était l’élue la plus cohérente de Seattle à se tenir aux côtés de Black Lives Matter l’été dernier, les grandes entreprises et la droite sont déterminées à éliminer la seule élue socialiste de Seattle. L’approche de Kshama, qui consiste à utiliser sa position pour construire des mouvements de lutte, et non pour conclure des accords et des compromis avec l’establishment, a été une expression puissante du message “Pas moi, nous” (Not me, us) au cœur de la campagne de Bernie en 2020.

    Il ne reste que quelques jours avant le jour de l’élection, le 7 décembre. La campagne de Kshama est engagée à parler à des milliers d’électeurs pour vaincre cette attaque de la droite. Cette campagne de destitution a été organisée de telle manière que beaucoup d’électeurs ne sont même pas au courant qu’elle a lieu ! Ce message de soutien de Bernie Sanders tombe à point pour renforcer la campagne de terrain menée avec acharnement par des centaines de militantes et de militants.

     

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop