Author: sander

  • Interview d’une opposante iranienne

    “La façon de faire de la gauche, c’est de créer des liens, c’est de reposer sur une solidarité combative”

    La récente arrestation en Iran de l’étudiante Ahou Daryaei a remis sur le devant de la scène la situation des femmes en Iran et de la lutte contre la dictature iranienne. Certains n’ont pas hésité à instrumentaliser l’événement pour venir au secours de la machine de mort israélienne. Nous en avons discuté avec Mina, une opposante de longue date au régime iranien aujourd’hui en exil. Enseignante, elle a milité dans diverses organisations de gauche et dans le mouvement de défense des travailleurs au sens large.

    Bonjour Mina et merci de nous accorder cet entretien. Pour commencer, peux-tu revenir justement sur l’écho qu’ont trouvé en toi les souffrances du peuple palestinien ?

    Ma solidarité avec les Palestiniennes et Palestiniens est déjà ancienne. Les activistes de gauche en Iran ont toujours eu une relation très forte avec la lutte pour la libération palestinienne, tout particulièrement envers le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP). En tant que militante, j’ai très tôt été sensibilisée au problème palestinien. Il faut dire que dans les années ‘60 et ‘70, sous l’influence du combat contre la guerre du Vietnam ou de la révolution cubaine, on cherchait naturellement à élargir la lutte hors des frontières iraniennes.

    Aujourd’hui, le FPLP a perdu beaucoup de son influence. Ce n’est pas propre à la gauche palestinienne, cela concerne également la gauche iranienne et ailleurs dans le monde. Nous devons nous attarder sur les questionnements que cela évoque, qui ne sont pas liés à des conjonctures purement nationales, mais mondiales. Il y a eu des mauvaises alliances, des mauvais calculs. Il faut le reconnaître et en tirer des leçons.

    Car c’est aussi cela qui explique la montée de forces nationalistes, réactionnaires, religieuses,… Ces forces ont pris la place laissée vacante par l’orientation des partis de gauche. Bien entendu, le soutien financier et politique de la part de divers régimes régionaux envers des forces conservatrices a aussi joué. La gauche n’a jamais bénéficié de tels soutiens. Par exemple, le Hamas a été soutenu de manière à éclipser l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), qui elle-même a tout fait pour amoindrir l’influence de la gauche et du FPLP.

    Comment définirais-tu les tâches de la gauche dans la région ?

    La façon de faire de la gauche, c’est de créer des liens, c’est de reposer sur une solidarité combative. C’est bien entendu très compliqué aujourd’hui, dans la situation actuelle qui est faite de bombes, mais c’est la seule perspective qui offre une issue.

    Il y a un peu plus d’un an, il existait en Israël des mouvements de contestation importants contre Netanyahou et son gouvernement de droite et d’extrême droite. C’était très enthousiasmant. L’attaque du 7 octobre a mis fin à ce mouvement qui avait un réel potentiel progressiste. Pourquoi le Hamas a-t-il attaqué à ce moment-là en s’en prenant aux civils ? Les conséquences de cette attaque du 7 octobre ont mené au renforcement des mouvements réactionnaires au détriment des courants qui aspiraient à des mesures plus démocratiques.

    Et maintenant, nous assistons à la guerre des chefs armés jusqu’aux dents sous le regard attentif des grandes puissances impérialistes. Dans ce jeu de menaces et de morts, le sort des peuples iranien, israélien, libanais ou palestinien n’est jamais pris en compte. Proclamer haut et fort l’arrêt de la guerre et dénoncer l’expansion militaire israélienne sont primordiaux pour protéger les populations civiles et favoriser l’émergence d’autres alternatives, démocratiques, dans la région. 

    Nous devons garder en tête que tout est lié. Partons de la situation des femmes. Lors du soulèvement “Femmes, vie, liberté” en Iran de 2022, suite à l’assassinat de Jina Amini par la police des mœurs, les femmes étaient au premier plan de la lutte, c’est évident. Mais le contexte de colère est bien plus vaste. Il y a eu des luttes des personnes pensionnées, des enseignants,… À côté des Perses, il y a différents peuples opprimés en Iran : les Arabes, les Kurdes, les Baloutches. Ces gens ont participé aux luttes dans leurs secteurs, de façon transversale, par-delà les frontières communautaires.

    Jina Amini était kurde, mais les réactions ont fusé dans toutes les villes d’Iran, car la colère contre l’oppression du régime est si grande. Et ce n’est pas impossible qu’une étincelle redonne vigueur à la lutte sociale.

  • “Nous ne pouvons nous permettre ni l’attentisme, ni la division”

    Lors de la manifestation des secteurs publics et du non-marchand du 7 novembre dernier, trois fois plus de monde étaient dans la rue qu’initialement attendu : plus de 30.000 personnes ! Colère et inquiétude se mêlaient dans la foule dynamique au vu des sombres projets des divers gouvernements, dont l’un des axes est de ne considérer le travail social que comme un outil de contrôle sur les plus précaires. Parmi les différents blocs, celui de Travail social en lutte / Sociaal werk in actie était particulièrement combatif. Nous sommes revenus sur cette mobilisation avec Simon, travailleur social depuis presque dix ans et l’un des animateurs du bloc.

    Le CPAS est le dernier filet de solidarité qui existe : les personnes qui y font appel n’ont aucune autre possibilité de revenu. Il y a beaucoup à dire sur le fonctionnement des CPAS, mais il est clair que c’est un outil essentiel pour combattre la pauvreté et qu’il est nécessaire de le financer à la hauteur des besoins. Le refinancement des CPAS est la première préoccupation des collègues, car chacun comprend que d’un financement convenable dépendent nos conditions de travail, la stabilité de nos contrats, mais aussi la qualité de l’aide que nous pourrons apporter aux allocataires sociaux.

    Avec les camarades de l’équipe syndicale du CPAS où je travaille, nous avons averti dès avant les élections communales sur le danger que représente la coalition Arizona: ce gouvernement prépare des coupes importantes dans les budgets là où il nous faudrait des moyens supplémentaires. C’est d’autant plus vrai que la super note de De Wever prévoit la limitation dans le temps des allocations de chômage. À quelle porte pensez-vous que les exclus du chômage iront frapper pour obtenir un revenu de remplacement ? Les exclusions du chômage, cela signifie un engorgement dans les services des CPAS et une charge supplémentaire au budget des communes, dont les CPAS dépendent.

    La manifestation du 7 novembre est un premier pas pour faire pression sur le futur gouvernement. Il est rare que les salarié.e.s du secteur public et du privé se retrouvent côte à côte. Dans notre secteur, c’est pourtant essentiel, car les conditions de travail des un.e.s impactent fortement celles des autres. Les directions syndicales nous promettent que cette manifestation ne restera pas sans lendemain, et c’est en effet nécessaire : il nous faut dès maintenant préparer les prochaines actions au moyen d’assemblées générales qui mêlent les travailleurs sociaux du secteur public et de l’associatif. Nous ne pouvons-nous permettre ni l’attentisme, ni la division.

  • CGSP ALR: “Situation de crise au sein des CPAS Bruxellois”

    Communiqué de la CGSP-ALR Bruxelles

    La CGSP-ALR Bruxelles représentant les travailleurs des services sociaux des 19 CPAS souhaite réagir au reportage de l’émission Pano diffusé sur la VRT Één, qui met en lumière une problématique générale existante au sein de la majorité de nos CPAS bruxellois que nous dénonçons depuis plusieurs années déjà en front commun syndical : la surcharge de travail exceptionnelle des assistants sociaux du CPAS, et les conséquences dramatiques notamment liées au désinvestissement total pour ces services d’aide de première ligne. La CGSP avait déjà publiée ces constats en 2021 suite à une enquête auprès des travailleurs sociaux bruxellois.

    Une surcharge de travail insoutenable

    Les assistants sociaux des CPAS bruxellois doivent traiter un nombre de dossiers toujours plus élevé, biensupérieur à la moyenne observée en Flandre ou en Wallonie. Cette situation touche également le personnel administratif qui les soutient, aggravant un climat de travail déjà difficile. Depuis plusieurs années, le sous-financement criant, le manque de personnel et la surcharge de travail
    qui en découle engendre des conséquences alarmantes :

    • Turnover accru : la plupart des assistants sociaux expérimentés quittent les CPAS, laissant un vide en termes de compétences et d’accompagnement pour les nouveaux arrivants. Cette tendance s’amplifie, avec un personnel qui s’épuise rapidement ou tombe malade.
    • Manque de perspectives et mal-être du personnel : l’absence de solutions pour réduire la charge de travail affecte gravement le bien-être du personnel et rend les CPAS incapables de fidéliser des agents compétents sur le long terme. En outre, les délais de traitement des demandes (parfois au-delà des délais légaux) génèrent du mécontentement voire de l’agressivité de la part des usagers, mettant en danger tous les acteurs concernés.
    • Les travailleurs sociaux, débordés, ne sont matériellement tout simplement pas en mesure de respecter en détail toutes les étapes essentielles de l’enquête sociale, ce qui entraîne des erreurs structurelles, notamment causés par une augmentation du travail administratif (ex. PIIS) et la complexification de législation.

    Incompétences et non-action

    Les autorités politiques, à tout les niveaux, ont été informés de cette situation par les organisations syndicales et elles en ont toute conscience depuis des années déjà. Les constats ci-dessus ont été confirmés il y a plus de deux ans déjà lors de plusieurs assemblées générales organisées en front commun syndical avec les travailleurs sociaux des CPAS bruxellois.

    Depuis deux ans, nous avons régulièrement évoqué cette situation extrêmement problématique à tous les niveaux politiques nécessaires, en marge des mouvements d’action et de grève : nous avons rencontré à plusieurs reprises Mme Karine Lalieux (Ministre fédérale sortante de l’Intégration sociale), M. Vervoort (Ministre-Président), M. Clerfayt (Ministre des Pouvoirs locaux sortant) et M. Zian (Président de la Fédération des CPAS bruxellois). Sans oublier les bourgmestres et les présidents de CPAS que nous rencontrons mensuellement en concertation locale. Toutes ces personnes, sans exception, ont soutenu les revendications des travailleurs. Toutefois, les uns après les autres, sans exception, se sont déclarés incompétents et ont renvoyé la balle à un niveau politique inférieur ou supérieur. En bref : tout le monde est d’accord avec nous, mais personne ne se dit être compétent ni vouloir agir.

    Depuis lors, la situation sur le terrain se détériore de jour en jour : des travailleurs démissionnent parce qu’ils ne peuvent plus faire face à la charge de travail, tombent en burnout ou en maladie suite à quoi le travail supplémentaire retombe sur leurs collègues. Le sous-financement a des donc des conséquences négatives sur la santé des travailleurs ! A cela s’ajoute le manque d’investissements financiers (tant régionaux que fédéraux) pendant plus de 15 ans dans les CPAS et les autres pouvoirs locaux bruxellois a comme conséquence que ces métiers ne sont que très peu attractifs, impliquant des difficultés dans le recrutement. Après des années de luttes et de combats, les travailleurs des communes et des CPAS ont obtenu, en 2021, des maigres valorisations barémiques, très insuffisantes pour compenser les deux dernières décennies de sous-investissement complets dans les institutions locales.

    Enfer social pour les travailleurs, paradis fiscal pour les riches !

    Entretemps, la situation ne ferait que s’aggraver : sous prétexte de devoir rembourser la dette publique belge, la limitation dans le temps des allocations de chômage est prévue par le futur gouvernement de droite. Les CPAS bruxellois estiment que près de 30.000 exclus du chômage pourront potentiellement demander une aide sociale supplémentaire les deux années à venir. Résultat : des milliers de dossiers supplémentaires, avec encore moins de travailleurs sociaux pour les gérer. Les victimes demeurent les
    bénéficiaires et les travailleurs.

    La CGSP ALR refuse d’accepter que certains utilisent cette situation de crise pour imposer leur propre agenda politique en attaquant les CPAS – patrimoine de ceux qui en n’ont pas -, les travailleurs sociaux et en présentant les personnes les plus précarisées comme des « profiteurs ». Exclure un chômeur n’a jamais enrichi aucun travailleur, au contraire, ne l’oublions pas !

    La réalité dans les CPAS bruxellois est donc connue mais provient de choix politiques dont les enjeux sont la justice sociale et fiscale : alors que la réelle fraude sociale en Belgique équivaut à près de 350 millions € par an, la fraude fiscale, elle, monte à 30 milliards € par an (sans parler de l’évasion fiscale de près de 400 milliards € par an). On comprend aisément dès lors que l’objectif réel des politiques de droite n’est pas de chercher l’argent là où il est (dans la récupération fiscale auprès des grandes entreprises par ex) mais de désinvestir les services publics, précariser ses travailleurs et ses usagers, dégrader les conditions de travail, détricoter la sécurité sociale… de manière à faire pression pour diminuer les salaires et ainsi augmenter les profits de la classe patronale. Les politiques d’austérité budgétaire passées et à venir vont contre les intérêts des travailleurs, asphyxient nos CPAS et les services publics (volontairement délaissés en vue de privatisations futures) et instituent une véritable « chasse aux pauvres ».

    Nos revendications : refinancement pérenne et amélioration des conditions de travail

    Face à cette situation intenable, nous réitérons les nombreuses demandes émises à tous les niveaux politiques par le front commun syndical depuis plusieurs années déjà. Il y a urgence !

    • La mise en place de la réduction collective du temps de travail à 30h/sem en 4 jours
    • Le refinancement pérenne des CPAS par les instances régionales et fédérales
    • Le renforcement des équipes pour réduire la charge de travail afin d’améliorer la qualité du service et le bien-être des travailleurs ainsi que l’engagement de travailleurs dans les services de support (administratifs dédiés, RH, informatique…)
    • Simplifier et harmoniser les réglementations issues de différents pouvoirs qui régissent le fonctionnement des CPAS ainsi que les législations sur le DIS (supprimer l’obligation des PIIS).
    • Le remboursement du RIS à 100% par le fédéral
    • Revalorisation des fonctions et des salaires dans les pouvoirs locaux bruxellois
    • La statutarisation des travailleurs afin de garantir aux citoyens l’équité et la neutralité du service
  • Inondations à Valence. Entre crises climatique et capitaliste

    Dans la nuit du 28 au 29 octobre, une quantité de pluie dépassant les 600 litres/M³ s’est déversée dans les rues de Valence, déclenchant l’un des drames climatiques les plus meurtriers que l’Espagne du 21e siècle ait connu. Alors que le bilan humain s’élève à plus de 200 morts, le peuple espagnol s’est réuni pour protester dans les rues, dénonçant l’inaction du gouvernement face à la catastrophe climatique.

    Par Odilon (Liège)

    Pas de coupes budgétaires sans conséquences

    Tenu pour responsable du drame, c’est sous les huées des manifestants que Carlos Mazon, Président de la région de Valence , a pris la parole ce 15 novembre dernier pour s’excuser auprès des habitants. Des excuses en demi-teinte, diluant sa responsabilité sous une couche de mauvaise foi et de sous-entendus malhonnêtes qui n’ont pas su apaiser la colère des victimes. En effet, les réactions insuffisantes des autorités face aux inondations n’ont fait qu’aggraver la situation, les messages d’alerte n’ayant été envoyés à la population que plusieurs heures après le début de la catastrophe et le gouvernement ayant refusé l’aide des pompiers des villes voisines. Mais derrière ces décisions désastreuses et meurtrières se cache un problème bien plus profond.

    Entre coupe budgétaires dans le secteur de la santé ou encore de l’enseignement et la réduction de l’impôt pour les plus riches, c’est bien les exactions d’un gouvernement néo-libéral et conservateur qui ont poussé à la catastrophe d’octobre. Il n’est pas nouveau que les gouvernements capitalistes s’enfoncent dans un négationnisme climatique crasseux, et l’Espagne n’y a pas échappé. En effet, le phénomène de la “goutte froide” qui a frappé Valence, aggravé par l’urbanisation extrême et l’imperméabilisation des sols, n’est pas une chose nouvelle, mais est devenue bien plus courante avec l’avancée du réchauffement climatique. Ce constat évident est continuellement nié par les capitalistes, plaçant à leur habitude le profit comme leur priorité absolue. On a pu ici observer la preuve d’un manque d’intérêt pour les conséquences du bouleversement climatique par le gouvernement espagnol, n’étant visiblement absolument pas préparé à faire face à ces catastrophes.

    L’impact des inondations atténué par la solidarité

    Les évènements récents en Espagne ont également démontré la solidarité impressionnante dont peut faire preuve la population face à la crise. Ne pouvant pas accorder leur confiance à leur propre gouvernement pour les aider efficacement, c’est sur leurs pairs que les victimes des inondations ont pu compter.

    Des milliers de personnes à travers le monde ont apporté leur aide aux sinistré.e.s, à distance et même sur place. Les images du roi impuissant fustigé par la foule montrent aussi que la colère a été un moteur de solidarité pour le peuple indigné.

    Et en Belgique?

    En observant le cas de l’Espagne, il ne faut pas rester dupe au sujet du parallèle à faire avec la situation de la Belgique face à la crise climatique. Si l’on se souvient bien des inondations meurtrières de juillet 2021, il est moins évident de penser au nombre de morts causé chaque année par la canicule. En 2022, il s’agissait de 1.200 décès dénombrés suite aux fortes chaleurs, et à la gestion désastreuse de ces dernières par les autorités. Malgré l’alerte que ce chiffre représente, le gouvernement belge fait la sourde oreille et ne se contente que de quelques propositions largement insuffisantes par rapport à l’étendue des dégâts climatiques.

    Il est évident que ce sont les mêmes raisons capitalistes qui poussent notre gouvernement à négliger cette question et que dans le cas d’un évènement de l’ampleur des inondations de Valence, la population risquerait de se trouver dans la même situation.

    Si des leçons doivent être retenues de ces récents évènements, c’est évidemment par commencer que notre confiance ne peut pas être placée dans des partis néo-libéraux traditionnels, mais également que la solidarité peut naître dans une ère de crise capitaliste extrême.

    La crise climatique est là, nous devons nous y adapter dès maintenant et totalement repenser le territoire, de l’urbanisme – en intégrant la nouvelle norme des événements climatiques extrêmes – à la gestion des rivières. Cela implique une extension des services publics et de la protection civile, avec des moyens à hauteur des risques et des besoins, mais aussi un plan public d’isolation des bâtiments quartier par quartier sur la totalité du territoire de manière à limiter les émissions de gaz à effet de serre liées au chauffage.

    Cela exigera également des mesures comme l’expropriation des bâtiments inoccupés pour raison spéculative pour y loger les personnes sinistrées, ou encore des grandes entreprises du secteur des assurances et de la construction pour que ces secteurs soient placés sous contrôle et gestion démocratiques de la collectivité. De cette manière, nous pourrons réduire nos émissions tout en protégeant la population et ses conditions de vie. Les organisations de gauche et les syndicats doivent impérativement axer leurs propositions et leur action sur ce qui est nécessaire pour faire face au péril climatique, pas sur ce qui est acceptable en restant dans le carcan du système capitaliste !

  • L’extrême droite au pouvoir : le danger de Ninove

    Dans la plupart des médias flamands, Guy D’haeseleer – premier bourgmestre d’extrême droite depuis la Seconde guerre mondiale – et sa liste Forza Ninove sont quasiment présentés comme d’innocents travailleurs sociaux. Le soir même des élections, certains journalistes francophones ont constaté que la réalité était tout autre : ils ont été insultés et bousculés par les militants d’extrême droite du Vlaams Belang. Lorsque l’extrême droite se sent pousser des ailes, comme c’est le cas à Ninove, cela s’accompagne inévitablement d’incidents et de violences.

    Forza Ninove combine une politique de bouc émissaire, de racisme, de sexisme et de queerphobie avec une forme de charité et de service aux frais de la collectivité. Guy D’haeseleer reçoit par exemple un généreux salaire du Parlement, mais il n’y est guère actif. Sa politique n’a rien de social. Au contraire ! L’aide sociale est décrite avec condescendance comme un “ticket gagnant à vie” et une “politique de chouchoutage”. Outre la proposition d’économies d’efficacité sur le personnel communal, Forza Ninove veut introduire un “service communautaire local” obligatoire pour les personnes qui bénéficient de l’allocation de CPAS. Il ne s’agit donc pas d’une aide, mais d’un travail forcé permettant de se débarrasser immédiatement de certain.e.s employé.e.s gênant.e.s à la commune.

    Comme de bien entendu, les personnes issues de l’immigration seront particulièrement visées, avec une chasse ouverte aux sans-papiers. Forza Ninove veut frapper le plus largement possible : “Pour les personnes qui résident déjà légalement ici, il n’y a de place dans notre société que dans la mesure où elles s’intègrent, contribuent à notre prospérité, se conforment à nos lois et à nos normes, respectent nos valeurs, notre culture et nos traditions.” Pour l’extrême droite, cela signifie des contrôles stricts sur les compétences linguistiques des personnes qui demandent un logement social, sur la composition des repas scolaires (pour vérifier si, une fois n’est pas coutume, il devrait y avoir quelque chose de halal sur la table !), sur le catalogue de la bibliothèque, sur le maquillage lors de la fête de Saint-Nicolas… Les subsides aux clubs culturels ou sportifs ne seront possibles que si l’on n’y parle que le néerlandais. Il promet également de contrer la “francisation” de Ninove. Pour faire respecter tout ça, l’extrême droite veut plus de répression avec le déploiement de services de sécurité privés et plus de Sanctions administratives communales (SAC).

    Les promesses de lutte contre la corruption et le népotisme sont généralement les premières à être rompues une fois que l’extrême droite est en mesure d’elle-même distribuer postes et contrats. Cela se constate dans presque toutes les municipalités françaises où l’extrême droite est arrivée au pouvoir. Une enquête sur l’administration du Rassemblement national à Fréjus, près de Saint-Tropez dans le Var, a fait état d’une corruption et d’un népotisme généralisés et a parlé de “mafia”. Cette conclusion ne peut évidemment pas encore être tirée à Ninove, mais le fait que D’haeseleer ait immédiatement nommé sa belle-fille échevine indique la direction que prennent les choses.

    L’extrême droite joue sur les frustrations et le désespoir individuels, en les dirigeant contre les personnes migrantes, les francophones ou même des ennemis abstraits tels que les “woke”. La tâche des antifascistes est d’établir l’espoir d’un changement social fondamental par le moyen de la lutte collective. La résistance syndicale doit s’organiser dans la région de la Dendre et ailleurs autour d’un programme de changement social.

    L’extrême droite s’oppose à ces luttes. À Anvers, Filip Dewinter a obtenu le droit d’initiative dans les discussions de coalition pendant quinze jours. Il a mis sur la table un document dans lequel le droit de grève était explicitement limité, en le liant “à une obligation de service permanent et d’accessibilité de tous les éléments liés à nos entreprises, au domaine public et au port”. En résumé : la grève est autorisée, mais personne ne doit s’en apercevoir. Ainsi, l’extrême droite veut museler la méthode par laquelle la classe ouvrière a arraché toutes ses conquêtes sociales, le travail des enfants a été aboli et la Sécurité sociale introduite.

    Avec les projets antisociaux du prochain gouvernement Arizona, le terreau de l’extrême droite va s’élargir. Une opposition de gauche forte et combative est nécessaire pour faire face aux scores de l’extrême droite. La lutte et les réponses collectives du mouvement ouvrier sont nécessaires pour traiter efficacement les problèmes sociaux et ainsi en finir avec le terreau sur lequel prospère l’extrême droite.

  • [ENTRETIEN] “Gaza symbolise notre avenir”

    Lors d’une manifestation à Anvers contre le génocide en Palestine, le 3 octobre dernier, une professeure a pris la parole. La colère de Roschanack Shaery-Yazdi, spécialiste de l’histoire politique de l’Orient arabe, s’est exprimée de façon particulièrement courageuse et tranchante. Nous nous sommes entretenus avec elle à la mi-novembre.

    Comment avez-vous vécu l’accélération du génocide en Palestine ces derniers mois ?

    C’est une véritable gifle. Je savais qu’Israël en était capable. Mais je ne m’attendais pas à la réaction des milieux universitaires. Ceux-ci témoignent non seulement d’un profond manque de connaissances, mais aussi d’une réticence à faire confiance aux experts. Le manque de connaissances n’explique pas à lui seul le soutien silencieux à ce qui se passe.

    L’idée que nous devons quitter l’Europe circule chez de nombreuses connaissances issues de l’immigration. Mais nous ne pouvons pas aller au Moyen-Orient, nous ne voulons pas aller aux États-Unis. Où les gens comme nous peuvent-ils donc aller ? Quel avenir avons-nous ? C’est une période très difficile, non seulement d’un point de vue politique abstrait, mais aussi dans notre quotidien. Ce qui se passe à Gaza et la criminalisation du soutien à la libération de la Palestine sont très menaçants pour des gens comme moi.

    Avant ce génocide, j’étais également consciente de la crise climatique, de la violence politique et de l’inégalité entre les genres. Mais aujourd’hui, je réalise à quel point ces questions sont reliées. J’en suis venue à les considérer comme des facettes d’un même problème, à savoir l’appartenance à une culture coloniale suprématiste blanche dominée par les hommes. La politique est dirigée par un petit groupe de riches et leurs entreprises, qui veulent enfermer les femmes à la maison, ne se soucient pas du climat et considèrent les pauvres comme leurs esclaves de facto.

    Les partisans du génocide tentent de se présenter comme le visage de la lumière et de la démocratie, et même comme des pro-féministes également en faveur des droits LGBTQIA+. Le mouvement pro-palestinien a toujours recherché la solidarité avec d’autres mouvements de lutte. Le sentiment instinctif est que l’on ne peut lutter contre l’oppression que si l’on combat toutes les formes d’oppression. Qu’en pensez-vous ?

    Le féminisme et les droits LGBTQIA+ sont souvent utilisés à tort pour justifier leurs crimes politiques. Nétanyahou et son régime utilisent délibérément ces termes pour construire un narratif qui cadre Israël au sein de la démocratie européenne et de la soi-disant civilisation. Le régime israélien fait tout ce qu’il peut pour alimenter l’islamophobie en Europe, et l’extrême droite constitue un de ses alliés dans cette entreprise.

    Les droits des personnes LGBTQIA+ et le féminisme sont progressistes. Mais on ne peut pas être progressiste pour certains groupes et pas pour d’autres. Comment peut-on considérer les pires violations des droits humains comme l’incarnation du féminisme ? Le féminisme ne consiste pas à former les femmes à la masculinité toxique, comme le font les FDI (Forces de défense israéliennes, ou Tsahal) à l’égard des Israéliennes présentes dans l’armée. Je doute sérieusement que les droits des personnes LGBTQIA+ englobent la possibilité pour les soldats des FDI d’exprimer leur identité sexuelle tout en massacrant sans pitié les femmes et les enfants palestinien.ne.s.

    Quant à la démocratie, est-il démocratique que la Cour suprême menace d’exiler les opposant.e.s au régime à Gaza ? C’est une politique de goulag qui rappelle les pires régimes autoritaires. Donc non, le régime israélien n’est pas démocratique.

    Dans la diaspora, des groupes juifs orthodoxes et des juif.ve.s laïques critiquent vivement le régime. C’est également le cas en Israël. Mais l’Occident se focalise sur le gouvernement israélien, censé représenter les juif.ve.s authentiques. Cette attitude est en soi antisémite. Israël et Tsahal sont le miroir du colonialisme blanc européen. Comment la France s’est-elle comportée en Syrie à l’époque coloniale ? Elle a bombardé les habitant.e.s. Elle a construit des centres de détention que le régime d’Assad utilise encore aujourd’hui. Et les Britanniques en Palestine en 1936 ? La résistance palestinienne locale à l’occupation et au colonialisme avait brutalement été écrasée. Nétanyahou et consorts appartiennent au club des puissances coloniales, au même titre que la France ou la Grande-Bretagne.

    Le régime allemand rejette toute critique du gouvernement israélien en la qualifiant d’antisémite et en s’attaquant aux personnes migrantes. Quelle hypocrisie. Le traumatisme allemand de l’antisémitisme n’a rien à voir avec nous, migrant.e.s ! Nous sommes les personnes qui ont le plus souffert des régimes autoritaires au Moyen-Orient, nous voulons une ONU forte, nous voulons le respect de l’État de droit, nous voulons un monde juste. Pour nous, les rapports sur les Droits humains sont une bouée de sauvetage. La plupart d’entre nous ont fui à cause de l’absence de telles lois.

    Les Syrien.ne.s et les autres migrant.e.s savent ce que signifie un régime autoritaire et descendent maintenant dans la rue pour demander un cessez-le-feu à Gaza. La répression d’État est dangereuse et l’histoire montre à quel point elle peut rapidement conduire à autre chose, un régime totalitaire. La plupart des migrant.e.s originaires de pays instables savent de premières mains que le quotidien peut disparaître en un instant. C’est peut-être la raison pour laquelle tant de migrant.e.s manifestent.

    L’invasion du Liban a contribué à l’escalade régionale. Nétanyahou affirme vouloir changer l’équilibre des forces dans la région. Comment voyez-vous cela ?

    Qui croit que le régime israélien n’était pas au courant de l’existence des tunnels ? Israël surveillait tous les mouvements à Gaza. Nous savons que l’Égypte avait informé Israël des projets du Hamas. Nous savons également que Nétanyahou a initialement soutenu le Hamas pour affaiblir le mouvement de résistance palestinien. Nétanyahou était prêt à laisser un groupe d’Israélien.ne.s de gauche alternative et quelques autres être massacré.e.s pour faire avancer son projet d’expansion des territoires israéliens. Ce gouvernement ne se soucie pas vraiment de son propre peuple. Cela se reflète par ailleurs dans le manque d’intérêt pour les otages ou les milliers de personnes déplacées dans les zones frontalières. Le régime israélien a réussi à assassiner le chef du Hezbollah, Nasrallah, à Beyrouth et le chef du Hamas, Haniyeh, en Iran. Cette opération était manifestement préparée depuis un certain temps, comme l’ont montré les explosions de bipers, et n’attendait qu’un prétexte.

    C’est ainsi que le Sud-Liban est pris ou rendu inhabitable. Ce faisant, le patrimoine culturel est rasé, l’histoire de la population locale est effacée. On en parle à peine, mais des bombes tombent quotidiennement sur Damas. En Iran, les États-Unis et Israël veulent créer une situation de guerre civile similaire à l’Irak pour affaiblir le pays.

    Pour le régime israélien, il ne s’agit pas de protéger la vie des Juif.ve.s, mais d’annexer des territoires à Gaza, en Cisjordanie et au Sud-Liban, tout comme le Golan a été annexé en 1967. Il existe aux États-Unis un puissant lobby pro-israélien, composé de sionistes juif.ve.s et chrétien.ne.s, qui soutient fermement cette politique. Ce lobby (l’AIPAC, American Israel Public Affairs Committee, par exemple) bloque toute tentative d’embargo américain sur les ventes d’armes à Israël, comme en témoigne la mobilisation du lobby contre Bernie Sanders aux États-Unis.

    L’objectif est donc de redessiner la région avec l’expansion d’Israël et la recherche d’une prétendue solution finale à la question palestinienne. Israël veut éliminer toute opposition possible à l’occupation et au projet colonial. C’est également ce que souhaite l’impérialisme américain afin d’avoir un accès bon marché aux matières premières et de renforcer la domination régionale de l’Arabie saoudite. Cela implique d’acheter le soutien des dirigeants égyptiens et jordaniens par l’intermédiaire du FMI et de la Banque mondiale. L’invasion de l’Irak à l’époque faisait déjà partie de ce redécoupage de la région.

    Lors d’une récente manifestation kurde, on a constaté une réticence à participer à des actions pro-palestiniennes en raison du rôle des tendances réactionnaires telles que le Hamas et le Hezbollah. Comment pouvons-nous faire face à cette situation ?

    Bien sûr, les peuples du Moyen-Orient ne sont pas unis. Beaucoup de ceux qui s’opposent au régime iranien considèrent le Hamas et le Hezbollah comme des groupes qui reçoivent de l’argent iranien. Beaucoup pensent que nous ferions mieux de nous occuper d’abord de nos propres problèmes au lieu de construire la solidarité. Le fait que j’aie toujours parlé de la Palestine n’a pas toujours été compris par la communauté iranienne, mais la Palestine concerne aussi l’Iran. Bien sûr, il est plus facile pour moi de protester, en tant que fonctionnaire, que pour, disons, une femme qui vient d’arriver ici, qui porte le voile et suit des cours de langue.

    Le Hamas et le Hezbollah sont des mouvements islamistes autoritaires. La plupart de leurs actions ne sont pas démocratiques. La gauche a besoin de faire entendre sa propre voix, une troisième voix qui s’oppose à la fois à l’impérialisme occidental et aux régimes et mouvements autoritaires. Cette voix n’est pas claire aujourd’hui. L’opposition à l’impérialisme est claire, tout comme le soutien à la résistance palestinienne et le besoin de libération. Mais elle s’arrête là. La troisième voix oscille entre la définition de sa propre identité, l’égarement et la défense de la résistance. Cela entraîne des réticences chez certain.ne.s progressistes. Nous sommes face à une nouvelle ère qui a un besoin urgent de renforcer cette troisième voix. C’est l’une des idées les plus importantes que j’ai eues depuis le génocide palestinien : je dois réfléchir attentivement à la manière de faire entendre une voix de résistance qui appelle à la paix. Il est plus facile d’écrire des livres académiques que de formuler ces idées dans la rue.

    Le nationalisme est bien sûr très présent dans la région. Les mouvements de libération ont souvent été détournés, laissant les citoyen.ne.s ordinaires peu confiant.e.s dans la capacité des mouvements sociaux à apporter des changements durables et significatifs. Mais nous devons réaliser que Gaza est le symbole de notre avenir, qu’il s’agit aussi de la libération des femmes iraniennes, du débat sur le voile en Europe, de la crise climatique, de la survie de la démocratie en Europe. Toutes ces questions sont reliées.

  • Climat. Pour échapper à la catastrophe, sortons du marché !

    Sans surprise, fin novembre, la Conférence de Bakou sur les changements climatiques, ou COP 29, fut un nouveau forum pour les contrats et la diplomatie des énergies fossiles. Le pays organisateur, l’Azerbaïdjan, est l’un des dix premiers États pétro-gaziers au monde, tandis que la présidence de la conférence avait été confiée à Moukhtar Babaïev, un cadre de la State Oil Company of Azerbaijan Republic. Il y a de quoi s’arracher les cheveux.

    Par Constantin (Liège)

    Comprendre l’échec 

    Pourquoi une telle impuissance à sortir des énergies fossiles ? Une des raisons fondamentales, c’est que “les marchés” sont loin d’être des exemples d’efficience, contrairement à ce que nous assène l’idéologie capitaliste dominante. La logique du marché crée sans cesse de nouvelles situations absurdes, où se mêlent gaspillage des ressources naturelles et destruction massive de marchandises.

    Friedrich Engels, le camarade et ami de Karl Marx, avait déjà souligné cette inefficacité à la fin du XIXe siècle. Le système capitaliste repose sur la production marchande, c’est-à-dire sur la production de biens et de services destinés à être vendus sur un marché dans l’objectif d’en dégager un profit. Ce type de production – qui fonctionne sur base de la concurrence de chacun contre tous et toutes – favorise le chaos. “Toute société reposant sur la production marchande a ceci de particulier que les producteurs y ont perdu la domination sur leurs propres relations sociales. Chacun produit pour soi, avec ses moyens de production dus au hasard et pour son besoin individuel d’échange. Nul ne sait quelle quantité de son article parviendra sur le marché ni même quelle quantité il en faudra; nul ne sait si son produit individuel trouvera à son arrivée un besoin réel, s’il retire ses frais ou même s’il pourra vendre. C’est le règne de l’anarchie de la production sociale.” (Engels, Anti-Dühring – Monsieur Eugen Dühring bouleverse la science, 1877)

    Le marché de l’électricité : un cas d’école

    Prenons le marché de l’électricité et la question du renouvelable. Pour respecter les ambitions fixées par l’accord de Paris en 2025 – limiter le réchauffement de la planète à 1,5° Celsius par rapport aux températures préindustrielles – il faudrait un rythme de pose de panneaux solaires équivalent à 450 gigawatts tous les ans (ce qui représente 70 km2) jusqu’en 2028, selon l’Agence Internationale de l’Énergie. De la même manière, il faudrait implanter assez de dispositifs éoliens afin d’atteindre un niveau de production de 135 gigawatts par an sur la même période. Pour ce faire, il faudrait investir 1.000 milliards par an dans le renouvelable jusqu’en 2030. Or, les investissements réels n’atteignent même pas les 500 milliards. 

    Pourtant, le renouvelable coûterait même moins cher que le fossile, selon l’Agence Internationale des Énergies Renouvelables (IRENA). Les coûts liés à la production d’électricité en charbon ou en gaz seraient compris entre 60 et 250 dollars par Mégawattheure, contre entre 24 $/MWh et 96 $/MWh pour le photovoltaïque en 2023. 

    Le prix de l’électricité est déterminé par ce qu’on appelle le “merit order”. Pour faire simple, il s’agit d’une manière de déterminer l’ordre de priorité attribué aux différentes sources d’énergie en fonction de leurs coûts variables. Concrètement, cela consiste à trier les centrales en fonction de celle qui coûte le moins cher à celle qui coûte le plus cher. Ce processus est très simple lorsqu’une seule entreprise possède toutes les centrales, comme lorsque c’était le cas avant les directives votées en 1996, 2003 et 2009 qui ont privatisé le secteur de l’énergie. 

    Mais si l’on substitue le monopole public par l’anarchie de la libre concurrence, alors le “merit order” se détermine par le biais d’un marché. Et pour obtenir un “merit order” avec un marché, la seule solution c’est de fixer le prix de l’électricité au niveau de la centrale la plus chère dont on a besoin pour répondre à la demande. Ce prix n’a cependant rien à voir avec le coût réel de la production d’électricité, qui correspond à la moyenne des coûts de production des différentes centrales.

    C’est pour cette raison que les prix de l’électricité ont explosé en 2022, lorsque le prix du gaz a augmenté. Malgré le fait que le coût moyen de la production d’électricité n’avait pas du tout changé, le fait que les prix du gaz aient monté en flèche a poussé tous les prix à la hausse, ce qui a permis aux multinationales de l’énergie de se goinfrer sur le dos de l’ensemble de la population. 

    Cette méthode de calcul rend le marché de l’électricité particulièrement volatile, surtout concernant le renouvelable, puisqu’il subit l’effet de l’intermittence, contrairement aux centrales à gaz ou à charbon. De fait, les éoliennes ne peuvent pas fonctionner sans vent. Alors que le renouvelable coûte moins cher que les énergies fossiles, il reste moins rentable : le taux de rentabilité du fossile atteint les 15% contre 6%. 

    L’alternative : la planification écologique et socialiste 

    Ce type d’aberration exemplifie parfaitement l’échec du marché. L’absurdité de la situation est d’autant plus dramatique qu’elle nous mène droit à notre perte. Sortir de l’irrationalité paralysante du marché est une absolue nécessité. A bien des égards, la solution semble évidente : si le problème est la propriété privée des moyens de production, la solution est la collectivisation de ceux-ci. Si le problème, c’est l’anarchie du marché, alors la solution réside dans une économie rationnellement et démocratiquement planifiée. 

    D’autant plus que, bien que le marché soit totalement irrationnel et désorganisé, la production marchande a ceci de particulier qu’elle doit être extrêmement organisée au sein de l’entreprise, et ce, pour maximiser la productivité. Par conséquent, les éléments de planification dont nous avons besoin existent déjà, dans une certaine mesure. 

    Par exemple, pour les produits qui peuvent se détériorer, les supermarchés appliquent déjà une planification “en temps réel”: les données de vente sont directement transmises le long des chaînes d’approvisionnement ; la production est retardée ou accélérée à l’instant même. Mais si l’économie doit être planifiée, il faut aussi qu’elle soit démocratique. Une économie planifiée a besoin de démocratie autant qu’un corps a besoin d’oxygène, comme le soulignait Trotsky face à la monstruosité bureaucratique stalinienne. Nous défendons donc l’expropriation, sans rachat ni indemnité, et la nationalisation du secteur de l’énergie, comme de tous les secteurs principaux de l’économie (finance, pharmacie, transport collectif…), sous contrôle et gestion démocratiques des producteur.trices, c’est-à-dire de la classe travailleuse. 

    Les moyens technologiques dont nous disposons sont largement suffisants pour assurer une production au service des besoins et non des profits. Mais pour que cela advienne, il faudra nécessairement se débarrasser du capitalisme, de l’avidité du profit ainsi que de l’irrationalité et des diktats du marché. Celles et ceux qui détruisent la planète sont les mêmes qui nous écrasent sur l’enclume du profit avec le marteau du blocage des salaires et de l’inflation. L’angoisse de la fin du monde et celle de la fin du mois ne sont pas des luttes étrangères. Au contraire, il s’agit d’un seul et même combat, contre un même système, celui qui exploite la nature et les êtres humains : le capitalisme.

  • Italie. L’extrême droite est loin de bénéficier du consensus qu’elle revendique

    “Le patriarcat n’existe plus… Les violences sexuelles ont augmenté à cause de la migration illégale”, a osé déclarer le ministre italien de l’Éducation, Giuseppe Valditara (Ligue, extrême droite), lors de la présentation de la fondation Giulia Cecchettin, créée en mémoire d’une jeune femme assassinée par son compagnon en novembre 2023. Ces propos misogynes et racistes – survenus peu de temps avant la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes – ont suscité une vague d’indignation.

    Par Giulia (Liège)

    En réaction, des activistes ont dénoncé ces fausses affirmations : sur les réseaux sociaux, mais aussi dans l’espace public, notamment avec des graffitis apparus sur les bâtiments officiels tels que “104 mortes d’État, ce n’est pas l’immigration, mais votre éducation”. Les chiffres confirment ces dénonciations: selon l’Istat, l’office italien de statistiques, 94% des féminicides en Italie sont perpétrés par des hommes italiens.

    Un climat hostile orchestré par le gouvernement Meloni

    Sous le gouvernement de Giorgia Meloni (Frères d’Italie, extrême droite), le discours misogyne et xénophobe prospère, justifié par des projets tels que la “reconstruction d’une Italie peuplée de vrais Italiens”. Cette idéologie attaque l’autodétermination des femmes, des personnes LGBTQIA+ et des personnes migrantes, elle s’inscrit dans une vision nationaliste où le corps des femmes devient un outil politique. Depuis le début de son mandat, Giorgia Meloni, qui se fait appeler “Le Président” au masculin, multiplie les attaques contre les femmes, les LGBTQIA+ et les étrangers.

    L’une de ses premières mesures a été de dégager du financement en faveur des associations “pro-vie”, c’est-à-dire anti-avortement, et de leur donner accès aux plannings familiaux. Cela s’oppose totalement à la philosophie de ces espaces, créés grâce aux luttes de nos mères et grand-mères, pour offrir un soutien essentiel aux femmes, aux personnes LGBTQIA+ et aux personnes enceintes. Ces structures constituent une base politique concrète pour nous réapproprier nos corps.

    Ces attaques prennent place dans un contexte où le service public de santé est en lambeaux après les années Berlusconi et les politiques néolibérales, comme la pandémie l’avait dramatiquement exposé dans l’actualité internationale. La santé privée est devenue la principale option pour de nombreuses personnes, au prix d’énormes sacrifices financiers afin d’y accéder. Il est évident que Meloni ne représente en rien un parti du changement. Elle perpétue des politiques d’austérité meurtrières ainsi que l’application d’une méthode de division de la population pour parvenir à les mettre en pratique.

    L’enlèvement rétroactif des droits parentaux aux familles arc-en-ciel ou encore l’inscription dans la loi de la gestation pour autrui (GPA) comme “délit universel” soulignent également très clairement que ce gouvernement cherche à renvoyer les femmes entre les murs de la maison, là où les violences restent cachées et invisibles aux bien-pensants sortant de la messe.

    « Sorella facciamoci spazio » (Sœur, faisons-nous de l’espace)

    Les féministes ripostent. Et, contrairement à ce que les médias veulent nous faire croire, l’extrême droite est loin de bénéficier du consensus qu’elle revendique fièrement.

    La résistance est bien là : nous l’avons vue l’année dernière, le 25 novembre, lorsque 2 millions de personnes sont descendues dans les rues italiennes avec la rage contre le patriarcat qui nous tue chaque jour, et avec l’amour de la sororité face à une énième d’entre nous assassinée par son compagnon.

    Le 8 mars 2024, à l’occasion de la grève transféministe, et dans cet élan de force et de solidarité, les féministes de Non Una Di Meno à Padoue ont occupé un planning familial abandonné, fermé depuis 2019.

    La création de la Consultoria (Consultorio – planning familial en italien, décliné au féminin) ne se limite pas à offrir un accès à des services – gynécologues, thérapeutes pelviennes et autres intervenantes externes – perdus par les habitants du quartier après la fermeture de l’ancien consultorio. A travers l’acte politique de l’occupation, elle constitue un processus de réappropriation de nos corps et des espaces où nous pouvons discuter, nous auto-former et être écoutées, en rupture avec une simple conception administrative de la prise en charge des femmes en difficulté.

    Non Una Di Meno montre concrètement que, dans un système qui fait tout pour nous diviser et nous mettre en compétition, reprendre nos espaces, prendre soin les un.e.s des autres, rester uni.e.s et solidaires est le véritable acte de résistance. Cette occupation féministe fait immanquablement également écho à l’occupation de l’usine GKN par les grévistes, qui sont par ailleurs systématiquement présent.e.s dans les mobilisations féministes. Cette solidarité à la base sera le moteur de la révolution qui est nécessaire.

  • Ne laissons pas notre avenir aux populistes de droite, aux criminels climatiques et aux autres membres de cette “broligarchie”

    Une nouvelle “normalité” est en train d’émerger aux États-Unis. Trump a été réélu en surfant sur l’image de “voix dissidente” alors qu’il ne défend qu’une version encore plus brutale de la même politique dominante. Son étroite relation avec le milliardaire Elon Musk a déjà donné naissance à un nouveau mot: broligarchie, en déclinaison de l’anglicisme “bromance”. Les marchés boursiers se sont félicités pour cette victoire électorale. Pas de quoi se réjouir, par contre, concernant la protection sociale ou le climat. Elon Musk veut tailler à la hache dans les dépenses publiques, ce que Trump accueille favorablement en parlant de “révolution”.

    Par Geert Cool

    Chez nous, cette nouvelle normalité brutale porte un nom : Arizona

    La propagande arrogante de la droite tourne aussi à plein régime en Belgique. La politique du bouc émissaire s’installe durablement : on place tous les problèmes sur le dos des personnes immigrées, des malades ou encore des chômeur.se.s. Cibler les plus vulnérables est visiblement considéré comme plus “réaliste” qu’aller chercher les moyens nécessaires auprès de la classe dominante richissime.

    Les victoires électorales du MR et de la N-VA ont boosté l’audace patronale. Les patrons n’attendent pas la formation d’un gouvernement fédéral Arizona pour passer à l’offensive. Par ailleurs, la répression contre les plus vulnérables s’accroît tandis que les possibilités de lutte collective contre les politiques antisociales sont déjà attaquées.

    La super-note de De Wever va bien au-delà d’une offensive brutale contre nos salaires et nos conditions de travail. C’est une déclaration de guerre à l’ensemble de notre camp social. Y répondre par un rassemblement de Noël plutôt vague, à l’image de celui prévu pour le 13 décembre, ne répond pas à la gravité de la situation. Allons-nous vraiment hésiter à résister dans l’espoir d’éviter le pire ? Toute faiblesse de notre part ne fera qu’attiser l’agression patronale.

    Nous ne comprenons absolument pas en quoi le fait de demander une contribution symbolique aux super-riches rendrait le projet de la coalition Arizona plus “équilibré”, parlons même pas de “social” et “juste”. Sur quelle planète vit donc Conner Rousseau, le président de Vooruit ? Toute l’idée selon laquelle il serait possible de limer les arêtes les plus vives de la future politique gouvernementale par la négociation est illusoire. Ramener les patrons à la raison par la consultation ? C’est tout autant irréaliste. La nouvelle normalité coupe l’herbe sous le pied du syndicalisme de concertation. Sur le terrain politique, la situation n’est pas différente. Même une petite participation du PTB à une majorité dominée par le PS à Mons a suffi pour que Belfius refuse d’accorder un crédit à la ville.

    Organiser la colère de la base dans une lutte de masse est urgent. Notre force potentielle n’a de sens que si nous l’organisons et si nous nous engageons dans la lutte pour de nouvelles conquêtes sociales.

    Le potentiel est là

    Oui, on peut organiser une lutte et même obtenir des victoires de cette façon. Le mouvement à Gand contre une coalition locale avec la N-VA l’a montré. Après une semaine d’actions assez remarquables, Vooruit a dû “se faire une raison”. Il n’y aura pas de coalition avec la N-VA, mais cela ne veut évidemment pas dire que tout est joué d’avance. Avec Groen, ce ne sera pas nécessairement une coalition progressiste, du moins si l’on entend par là l’application d’une politique qui veut répondre aux urgents besoins sociaux en termes de logement, de services publics, de transports publics, de lutte contre la pauvreté, de conditions décentes pour le personnel communal… Mais sur base du combat mené au lendemain des élections, la vigilance sociale est stimulée. De nouvelles actions pourront plus rapidement être organisées. La lutte renforce notre camp social, c’est une évidence.

    La très bonne manifestation des secteurs public et non marchand du 7 novembre l’a encore montré. Le personnel des soins, du secteur social, de l’enseignement et d’ailleurs s’est réuni dans un cortège trois fois plus grand que prévu. Après des années de manque de moyens et de respect, les nouvelles majorités nées des élections ne nous réservent qu’encore plus de misère. On serait furieux à moins ! Cette manifestation a clairement donné l’énergie et l’envie d’en faire plus. À quand une suite avec un plan de bataille en escalade ?

    La manifestation contre la fermeture d’Audi le 16 septembre était, elle aussi, plus importante que prévu. Elle a donné un aperçu du potentiel de résistance existant. Et il y a bien sûr encore eu la manifestation historique contre le génocide à Gaza en octobre avec 70.000 manifestant.e.s à Bruxelles.

    Pour une société socialiste démocratique

    Les années de sous-financement pèsent de plus en plus lourd. Dans l’industrie, la récession menace des emplois auparavant considérés comme stables et bien payés. Des licenciements collectifs commencent aussi à frapper les autres secteurs. Un gouvernement de droite dirigé par De Wever et Bouchez voudra passer à la vitesse supérieure en s’attaquant à toutes les conquêtes sociales et en faisant obstruction à l’organisation de la résistance sociale. Les génocides et les guerres continuent, la crise climatique laisse envisager le pire. Pendant ce temps, le gouvernement wallon réduit de 18,6 millions d’euros les fonds destinés à la biodiversité.

    Les défis sont d’une telle ampleur que beaucoup désespèrent en silence et ne voient pas comment un changement fondamental est encore possible. S’engager dans la lutte, cela permet de sortir de la résignation et de renforcer la solidarité. Il nous faut un plan de bataille en escalade, chaque action permet consciemment de construire l’élan vers la suivante. Il y a dix ans, c’est ainsi que le mouvement ouvrier a fait vaciller le gouvernement Michel – De Wever.

    Il nous faut un changement fondamental et ambitieux, ce qui nécessite un programme et une lutte à la hauteur. Où en est le projet mobilisateur et enthousiasmant d’une autre société, une société socialiste, dans laquelle la classe travailleuse prendrait en main son propre destin ? Pourquoi laissons-nous les populistes de droite, les criminels climatiques et les autres membres de cette “broligarchie” décider de notre avenir ?

    Musk parle de révolution alors qu’il s’agit de contre-révolution. Trump et consorts se posent en “anti-système” tout en léchant les bottes des milliardaires. Ils s’en tirent parce que la gauche et le mouvement syndical leur laissent occuper cet espace. Un étudiant en philosophie a écrit dans une colonne de De Standaard (19 novembre): “En Belgique aussi, la notion de révolution, de résistance anticapitaliste, a plutôt été reléguée à l’arrière-plan. On a l’impression que toute la gauche a répondu de manière claire à la fameuse question de Rosa Luxemburg : ‘réforme ou révolution ?’ La révolution s’est avérée trop ambitieuse”. Nous ne nous sentons pas personnellement visés, mais l’observation est juste. Le débat sur une société radicalement différente manque cruellement.

    Dans les manifestations actuelles, la compréhension que tous les problèmes sont liés autour d’un même système se développe. Le cœur du problème, c’est le capitalisme, un système où les moyens de production sont détenus par le privé et donc orientés vers les intérêts des capitalistes et leur soif de profits. Nous défendons une rupture anticapitaliste et l’instauration d’une société socialiste démocratique où les besoins de la majorité de la population, y compris celui d’une planète vivable, sont au centre d’une planification démocratique rationnelle de l’économie.

  • Violentes attaques de l’Arizona – Une résistance acharnée s’impose !

    Attention aux voleurs ! L’Arizona veut nous faire les poches !

    Les versions successives de la “supernote” ont toutes été brutales et inacceptables. Attaques contre nos salaires, nos pensions, nos conditions de travail, notre protection sociale, frappant particulièrement les femmes… Les politiques qui attaquent les personnes issues de l’immigration, les chômeur.se.s et les malades servent d’écran de fumée pour tenter de nous frapper toustes plus durement.

    Ces attaques inédites seraient soi-disant “nécessaires” en raison du budget et des dettes publiques qui ont tellement augmenté parce que les gouvernements ont invariablement fait des cadeaux aux plus riches. Ce n’est pas notre crise, nous n’allons pas la payer !

    Le patronat n’attend pas la formation du gouvernement pour passer à l’offensive. Les travailleur.se.s sont mis.e.s à l’écart en permanence, et pas seulement dans les secteurs les plus touchés. Les emplois bien protégés et bien rémunérés cèdent la place à des emplois précaires. Les restructurations et l’austérité se succèdent à un rythme effréné. Plus personne n’est à l’abri. Les secteurs dans lesquels les investissements publics sont urgents, comme les soins de santé, les transports publics et l’éducation, subissent déjà les effets des coupes budgétaires. La lutte est nécessaire, sinon l’extrême droite jouera sur les frustrations et les mécontentements pour semer les divisions et la haine. Avec pour conséquence encore plus de misère et une défense encore plus brutale des intérêts des grands patrons – il suffit de regarder les États-Unis avec Trump et son BFF Elon Musk.

    Notre dossier

    https://fr.socialisme.be/97981/larizona-un-projet-brutal-contre-notre-classe-sociale-se-revolter-sorganiser-pour-gagner
    https://fr.socialisme.be/98015/attention-aux-voleurs-larizona-veut-nous-faire-les-poches
    https://fr.socialisme.be/98201/entretien-limitation-dans-le-temps-des-allocations-de-chomage-cest-au-systeme-economique-quil-faut-sen-prendre-pas-a-ses-victimes
    https://fr.socialisme.be/98041/alors-que-les-licenciements-collectifs-se-multiplient-la-chasse-aux-chomeur-euse-s-sintensifie
    https://fr.socialisme.be/98291/ce-nest-pas-en-chassant-les-malades-quil-y-en-aura-moins
    https://fr.socialisme.be/98153/de-wever-et-bouchez-veulent-me-faire-travailler-9-a-12-ans-de-plus-je-ne-tiendrai-pas-le-coup
    https://fr.socialisme.be/98096/luttons-pour-une-societe-qui-repose-sur-les-soins-aux-autres-pas-sur-les-profits
    https://fr.socialisme.be/98288/repoussons-la-menace-avec-un-plan-daction-et-la-construction-dun-mouvement-de-masse

    Tous nos articles ‘Arizona’

    Un plan d’action s’impose ! Les attaques ne sont pas symboliques, notre réponse ne doit pas l’être non plus

    La mobilisation des travailleur.se.s et de leurs syndicats est essentielle pour arrêter l’Arizona. Des journées d’action ponctuelles, comme celles prévues les 13 janvier et 13 février, peuvent sensibiliser à un problème particulier, mais il faut aller beaucoup plus loin. Nous manquons d’une stratégie pour organiser réellement notre lutte. L’approche actuelle des directions syndicales n’est pas à la hauteur des enjeux !

    Pour construire un mouvement plus large et de plus longue durée, nous avons besoin d’un plan d’action. Cela signifie un plan avec des actions connues suffisamment à l’avance et chaque fois en progression vers l’action suivante, en augmentant également la méthode d’action jusqu’à notre arme centrale de la grève générale avec laquelle nous mettons tout à plat – et répétons cela pour une période plus longue si nécessaire. Un tel plan d’action peut rassembler toutes les formes de résistance et de lutte, y compris par exemple la protestation de masse contre le génocide à Gaza, en un puissant mouvement. De cette manière, nous parvenons à des actions qui sont soutenues par l’ensemble de la société.

    On a vu en 2014 comment un plan d’action avec une concentration militante, une grande manifestation, des journées de grève provinciales et enfin une grève générale nationale ont fait trembler le gouvernement de droite Michel – De Wever. Ce mouvement a attiré des jeunes, des artistes, des indépendant.e.s, des agriculteur.trice.s et d’autres. Il a renforcé les syndicats, notre position dans l’opinion publique et a contribué à la percée du PTB, ce qui fait qu’aujourd’hui, des camarades syndicalistes et des activistes sont élus dans tous les parlements.

    Un deuxième plan d’action, plus dur et plus large, s’imposait alors, mais les directions syndicales ont été effrayées par notre force et se sont réfugiées aux tables de négociation où, finalement, rien n’a été obtenu. Le contrôle démocratique de notre lutte est essentiel pour éviter cela, surtout à un moment où les attaques sont plus dures qu’en 2014 et où notre résistance doit l’être aussi.

    Les assemblées du personnel, les réseaux de syndicalistes militants, la construction d’une solidarité active dans d’autres mouvements de protestation sont cruciaux pour cela. À Bruxelles, le collectif Commune Colère a pris l’initiative d’une  “assemblée de lutte” avec des syndicalistes de différents syndicats et secteurs, des militant.e.s féministes, antiracistes, écologiques… afin de préparer ensemble la lutte à venir. C’est une excellente initiative qui mérite d’être reproduite dans tout le pays !

    -> Prochaine Assemblée de Lutte à Bruxelles : 7 janvier, 18h30 au DK (rue de Danemark 70, St-Gilles)

    Le potentiel de lutte est là. La manifestation des secteurs de la santé et du secteur public du 7 novembre a été trois fois plus importante que prévu. La grève de l’enseignement francophone du 26 novembre a été très bien suivie. Même la manifestation contre la fermeture d’Audi en septembre a été importante, alors qu’il n’y avait pas de stratégie. Pendant ce temps, les grandes manifestations contre le génocide à Gaza ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes. Nous pouvons renforcer notre solidarité en défilant avec nos collègues contre le génocide, ou en organisant des actions ciblées sur notre lieu de travail, comme le personnel soignant du CHU St Pierre qui a organisé une action de solidarité pour la Palestine sur une pause midi.

    Bref : mettons-nous ‘en mode lutte’ dès maintenant. Pas pour de simples actions ou marches symboliques, mais pour une lutte existentielle pour notre avenir !

    L’Arizona doit partir, un plan d’urgence sociale est nécessaire !

    Les plans de l’Arizona s’ajoutent à des années de déficits et de politiques néolibérales. Nous ne pouvons pas supporter de nouvelles coupes budgétaires ; au contraire, nous avons besoin d’investissements publics drastiques dans les services publics et les infrastructures. Les investissements dans les soins de santé, l’éducation et les transports publics doivent être à la hauteur des besoins. Pour contrer l’abandon des malades, la charge de travail doit être réduite et un meilleur équilibre entre travail et loisirs est nécessaire. Revendiquons une réduction collective du temps de travail pour un maximum de 32 heures par semaine, avec maintien du salaire et recrutement supplémentaire. L’Arizona veut faire le contraire en abolissant le RCC, en rendant le crédit-temps fin de carrière et les autres formes de diminution de travail moins attrayantes et en instaurant un système de malus pour les pensions. Nous disons : retraite à 65 ans maximum ! Préservons les RCC, le crédit-temps fin de carrière et le crédit-temps !

    Il vaut mieux ne pas laisser notre industrie aux actionnaires et aux PDG qui aujourd’hui jettent la main-d’œuvre à la poubelle et liquident le savoir-faire technique. Un défi tel qu’une sérieuse transition écologique tout en préservant les emplois (sans concessions sur les salaires et les conditions de travail) est clairement hors de portée des patrons et de leur soif de profit. Il faut un plan national public pour le maintien et le développement de la production industrielle et des emplois qui l’accompagnent. Les personnes qui travaillent dans ces secteurs et la population dans son ensemble sont les mieux placées pour déterminer les besoins, y compris un cadre de vie qui ne passe pas de l’inondation à l’ouragan et à l’incendie de forêt ; ce sont aussi les personnes qui savent le mieux comment tout produire.

    Bref, un plan d’urgence sociale est nécessaire. Nous ne l’obtiendrons pas en demandant gentiment, mais seulement en organisant sérieusement notre lutte ! Les assemblées du personnel, les assemblées générales et les réseaux d’activistes peuvent étoffer ce plan d’urgence et le lier aux revendications de notre lutte.

    Lutte révolutionnaire contre le système d’oppression et d’exploitation

    Lutter contre les attaques contre notre niveau de vie, nos conditions de travail et notre protection sociale signifie également défendre la lutte des militant.e.s pour le climat, des agriculteur.trice.s, des personnes sans papiers et de toustes celleux qui s’opposent à l’oppression (sexisme, racisme, LGBTQIA+phobie…). Une coordination est nécessaire entre les syndicats et les autres mouvements sociaux pour être plus forts ensemble.

    L’oppression est intrinsèquement liée à la logique capitaliste qui exige la division pour maintenir l’inégalité économique et sociale. Il faut un projet commun pour unir la classe travailleuse dans toute sa diversité dans la solidarité pour gagner la lutte contre chaque forme d’exploitation et d’oppression.

    Cette lutte ne s’arrête pas aux frontières, une solidarité internationale est nécessaire. La lutte des peuples palestinien et libanais contre la violence coloniale, impérialiste et capitaliste dont ils sont victimes est aussi la nôtre.

    Le capitalisme est une impasse de misère. Leur système est cassé et irréparable. Pour le bien de la majorité de la population et de la planète, il faut un autre système – une société socialiste dans laquelle nous prenons notre avenir en main. Travaillons dans ce sens, rejoignez le PSL !

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