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Italie. L’extrême droite est loin de bénéficier du consensus qu’elle revendique
“Le patriarcat n’existe plus… Les violences sexuelles ont augmenté à cause de la migration illégale”, a osé déclarer le ministre italien de l’Éducation, Giuseppe Valditara (Ligue, extrême droite), lors de la présentation de la fondation Giulia Cecchettin, créée en mémoire d’une jeune femme assassinée par son compagnon en novembre 2023. Ces propos misogynes et racistes – survenus peu de temps avant la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes – ont suscité une vague d’indignation.
Par Giulia (Liège)
En réaction, des activistes ont dénoncé ces fausses affirmations : sur les réseaux sociaux, mais aussi dans l’espace public, notamment avec des graffitis apparus sur les bâtiments officiels tels que “104 mortes d’État, ce n’est pas l’immigration, mais votre éducation”. Les chiffres confirment ces dénonciations: selon l’Istat, l’office italien de statistiques, 94% des féminicides en Italie sont perpétrés par des hommes italiens.
Un climat hostile orchestré par le gouvernement Meloni
Sous le gouvernement de Giorgia Meloni (Frères d’Italie, extrême droite), le discours misogyne et xénophobe prospère, justifié par des projets tels que la “reconstruction d’une Italie peuplée de vrais Italiens”. Cette idéologie attaque l’autodétermination des femmes, des personnes LGBTQIA+ et des personnes migrantes, elle s’inscrit dans une vision nationaliste où le corps des femmes devient un outil politique. Depuis le début de son mandat, Giorgia Meloni, qui se fait appeler “Le Président” au masculin, multiplie les attaques contre les femmes, les LGBTQIA+ et les étrangers.
L’une de ses premières mesures a été de dégager du financement en faveur des associations “pro-vie”, c’est-à-dire anti-avortement, et de leur donner accès aux plannings familiaux. Cela s’oppose totalement à la philosophie de ces espaces, créés grâce aux luttes de nos mères et grand-mères, pour offrir un soutien essentiel aux femmes, aux personnes LGBTQIA+ et aux personnes enceintes. Ces structures constituent une base politique concrète pour nous réapproprier nos corps.
Ces attaques prennent place dans un contexte où le service public de santé est en lambeaux après les années Berlusconi et les politiques néolibérales, comme la pandémie l’avait dramatiquement exposé dans l’actualité internationale. La santé privée est devenue la principale option pour de nombreuses personnes, au prix d’énormes sacrifices financiers afin d’y accéder. Il est évident que Meloni ne représente en rien un parti du changement. Elle perpétue des politiques d’austérité meurtrières ainsi que l’application d’une méthode de division de la population pour parvenir à les mettre en pratique.
L’enlèvement rétroactif des droits parentaux aux familles arc-en-ciel ou encore l’inscription dans la loi de la gestation pour autrui (GPA) comme “délit universel” soulignent également très clairement que ce gouvernement cherche à renvoyer les femmes entre les murs de la maison, là où les violences restent cachées et invisibles aux bien-pensants sortant de la messe.
« Sorella facciamoci spazio » (Sœur, faisons-nous de l’espace)
Les féministes ripostent. Et, contrairement à ce que les médias veulent nous faire croire, l’extrême droite est loin de bénéficier du consensus qu’elle revendique fièrement.
La résistance est bien là : nous l’avons vue l’année dernière, le 25 novembre, lorsque 2 millions de personnes sont descendues dans les rues italiennes avec la rage contre le patriarcat qui nous tue chaque jour, et avec l’amour de la sororité face à une énième d’entre nous assassinée par son compagnon.
Le 8 mars 2024, à l’occasion de la grève transféministe, et dans cet élan de force et de solidarité, les féministes de Non Una Di Meno à Padoue ont occupé un planning familial abandonné, fermé depuis 2019.
La création de la Consultoria (Consultorio – planning familial en italien, décliné au féminin) ne se limite pas à offrir un accès à des services – gynécologues, thérapeutes pelviennes et autres intervenantes externes – perdus par les habitants du quartier après la fermeture de l’ancien consultorio. A travers l’acte politique de l’occupation, elle constitue un processus de réappropriation de nos corps et des espaces où nous pouvons discuter, nous auto-former et être écoutées, en rupture avec une simple conception administrative de la prise en charge des femmes en difficulté.
Non Una Di Meno montre concrètement que, dans un système qui fait tout pour nous diviser et nous mettre en compétition, reprendre nos espaces, prendre soin les un.e.s des autres, rester uni.e.s et solidaires est le véritable acte de résistance. Cette occupation féministe fait immanquablement également écho à l’occupation de l’usine GKN par les grévistes, qui sont par ailleurs systématiquement présent.e.s dans les mobilisations féministes. Cette solidarité à la base sera le moteur de la révolution qui est nécessaire.