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  • Brochure. Détruire le capitalisme… avant qu’il ne détruise la planète !

    Nicolas Croes


    I) Avant de commencer…

    Pour certains, les idées exprimées ici seront irréalistes. Pourtant, nous pensons qu’elles tiennent la route et qu’on ne peut pas en dire autant de l’écrasante majorité des propositions concernant l’environnement. L’utopie ne réside pas dans les solutions que nous proposons, elle réside dans la croyance que le capitalisme est un système viable.

    Pour d’autres, les critiques que nous apportons à différentes solutions en voguesont déplacées. Nous estimons que ceux qui prennent la problématique environnementale assez au sérieux se rendront compte que la discussion sur les méthodes d’action face aux problèmes environnementaux est d’une importance cruciale. De la même manière que l’on n’applique pas une lotion différente sur chaque bouton d’un malade et que l’on s’en prend au virus, laisser se développer diverses pratiques et analyses sans les examiner de manière critique en se disant simplement que « faire quelque chose, c’est déjà bien », ce n’est – même involontairement – que laisser l’énergie dont la lutte a besoin se dilapider.

    Beaucoup de gens ont refusé de s’engager dans la lutte contre les dangers que court notre milieu car les méthodes et les discours face à la problématique environnementale leur paraissaient souvent peu (ou pas) assez efficaces et fort abstraits. Il faut reconnaître que cela a souvent été le cas. Mais prendre position, ce n’est pas donner des leçons et nous voulons utiliser ce texte comme contribution au débat sur l’écologie, en renfort de nos activités de terrain par lesquelles nous voulons concrètement illustrer et démontrer ce que nous avançons.

    D’autre part, afin de ne pas trop alourdir le texte (et un peu aussi par facilité), les références ne sont pas systématiquement citées pour chaque information. Cette brochure a principalement utilisé comme source d’information de nombreux numéros de La Libre, du Soir ou de Courier International, le Manière de voir n°81 édité par le Monde diplomatique ( « Ecologie : le grand défi » – Juin-Juillet 2005), L’Atlas environnement édité par le Monde Diplomatique, le Hors série de Science et Vie consacré au climat en septembre 2007… et de nombreux textes et débats du Mouvement pour une Alternative Socialiste et de son organisation internationale, le Comité pour une Internationale Ouvrière.


    II) Changement climatique: un problème déjà bien réel

    La question environnementale – et plus particulièrement tout ce qui a trait aux changements climatiques – fait désormais partie intégrante de l’actualité et des préoccupations de la population. Même le récent film des « Simpson » prend pour toile de fond la pollution causée par l’homme ! Un sondage réalisé durant l’été 2006 pour le compte de la Commission européenne révèle d’ailleurs qu’il s’agit de la première préoccupation des Européens qui ont été sondés , et parmi eux plus particulièrement les Belges. Depuis lors, aucun évènement n’a permis de diminuer cette inquiétude.

    Durant l’été 2007, la fonte des glaces arctiques a été plus importante de 2,61 millions de Km² par rapport à la moyenne à cette époque : 10 fois la superficie du Royaume-Uni ! Au même moment, les inondations en Afrique ont touché au moins un million de personnes dans 17 pays et les premières estimations font état de plusieurs centaines de morts. En Ouganda, par exemple, 150.000 personnes ont perdu leur logement entre le début du mois d’août et la mi-septembre tandis que 400.000 autres, pour cause d’inondation des routes et des champs, ont perdu leur moyen de subsistance. L’inondation des champs et des sources a entraîné, en Ouganda comme au Nigeria, au Soudan ou encore au Ghana, un grand besoin d’eau potable et de nourriture alors que la région ne s’était pas encore remise des inondations de l’année précédente, qui avaient été les plus fortes depuis 50 ans. Beaucoup de décès et de dégâts auraient été évités sans la déforestation effrénée qui sévit en Afrique comme ailleurs.

    Mais l’Afrique ne souffre pas que de ces inondations catastrophiques. Elle subit en même temps – même si cela semble paradoxal – un affaiblissement de la saison des pluies. Ainsi, le Lac Tchad, bordé par le Nigeria, le Niger, le Tchad et le Cameroun, est lui aussi victime du dérèglement climatique. Autrefois l’un des plus grands d’Afrique avec une superficie de 26.000 Km², il ne s’étend plus actuellement que sur 1.500 Km², soit à peine 5% de sa surface initiale.

    En Asie, par contre, s’il y a également un dérèglement de la saison des pluies, il s’effectue en sens inverse et ce continent a connu cette année la mousson la plus violente de son histoire. L’exemple du Bangladesh est particulièrement révélateur de l’impact du changement climatique puisqu’il s’agit de l’un des pays au monde à être le plus rapidement et le plus fortement touché par ses conséquences. Ce pays, qui est en fait un gigantesque delta, est « habitué » à devoir subir des inondations catastrophiques. Mais si par le passé celles-ci survenaient en moyenne un fois tous les vingt ans, la population du pays doit maintenant faire face aux ravages des eaux tous les cinq ans ! Et avec l’élévation des températures, la fréquence et l’intensité des cyclones ne va qu’augmenter…

    Le Bangladesh sera de plus particulièrement touché par la hausse du niveau de la mer, car si celui-ci augmente de 88 ou 89 centimètres, comme le projettent différents modèles de calculs, 20% du pays sera sous les eaux, ce qui entraînera le déplacement de 20 millions d’habitants. D’autre part, le ruissellement issu de la fonte des glaces de l’Himalaya amplifiera les problèmes, surtout au vu du fait qu’une grande partie de l’eau pouvait précédemment être retenue par les arbres, ce que la déforestation rend dans une large mesure impossible.

    Dans les pays du monde néo-colonial, ou « pays en voie de développement », 3 millions de personnes (principalement des enfants) meurent chaque année à cause de la pollution des eaux due aux déchets industriels et ménagers à l’échelle mondiale. Près de 3 milliards de personnes au monde n’ont pas d’accès à une eau de qualité !

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    GIEC : Késako ?

    Constitué en 1988, le Groupe Intergouvernemental d’experts sur le climat émet un rapport tous les six ans. Ce groupe depuis peu très médiatisé est constitué de 2.500 scientifiques désignés par les 130 Etats représentés au sein du GIEC.

    L’essentiel de son travail est constitué de synthèses et d’évaluations des travaux déjà existants. Tous les scientifiques qui participent à ces travaux sont bénévoles et bossent « la nuit et le week-end » comme l’indique l’un d’entre eux. En fait, le GIEC ne dispose que d’une dizaine de salariés et de quelques bureaux à Genève. De là à voir dans la faiblesse de moyens accordés une illustration de la véritable volonté des Etats membres de s’en prendre au problème, il n’y a qu’un pas…

    A la tête du GIEC se trouve une Assemblée Générale dans laquelle chaque Etat membre dispose d’une voix pour prendre des décisions sur base de résumés produits par les chercheurs. C’est, explique la directrice du centre en recherche d’histoire des sciences Alexandre Koyré « un processus intensément politique où s’exprime toute une gamme d’intérêts nationaux divergents ». Les Etats-Unis ont par exemple décidé en 2002 d’écarter le président du GIEC de l’époque, jugé trop militant par le groupe pétrolier Exxon Mobil…

    Maintenant que le GIEC doit se concentrer sur la recherche de solutions face à un constat qui n’est remis en question par personne (Bush lui-même a avoué avoir été influencé par le rapport du GIEC, même si cela ne se voit pas vraiment), l’influence d’Etats aux intérêts divergents se fera encore plus sentir.

    Une situation qui nous concerne aussi directement

    Les pays issus du monde néo-colonial ne sont évidemment pas les seuls qui ont à craindre les effets du changement climatique et de la pollution de façon plus globale. L’augmentation de l’ozone dans l’hémisphère nord diminue ainsi fortement le rendement des récoltes, perte chiffrée entre 6 et 12 milliards de dollars par an. On peut encore mentionner l’arrivée de nouvelles maladies jusqu’alors inconnues dans les pays européens, comme le chikungunya (une maladie infectieuse tropicale qui donne de très fortes douleurs articulaires), dont plus d’une centaine de cas ont été constatés dans le nord de l’Italie et qui sévit aussi en France.

    En 2005, aux Etats-Unis, l’ouragan Katrina a fait 1.500 victimes, rendu un million de personnes sans abri et causé 120 milliards de dollars de dégâts (soit un peu moins de la richesse produite annuellement par un pays comme le Venezuela). Le réchauffement continuel de l’Atlantique tropical augmente l’intensité des cyclones. Un ouragan comme celui de Katrina est estimé devoir se produire tous les 300 ans, mais il y a déjà eu deux événements de cette ampleur ces 80 dernières années. Cette année, après un début d’année exceptionnellement doux dans l’hémisphère Nord, l’été a été marqué par des pluies torrentielles en Angleterre (les plus graves depuis 60 années selon l’agence de l’Environnement britannique) ou encore par la canicule meurtrière qui a touché la Roumanie, la Grèce, l’Italie, l’Albanie et la Turquie). En fait, depuis 1970, le coût annuel des catastrophes au niveau mondial est en augmentation de 2% chaque année tandis la pollution atmosphérique tue chaque année 2,5 millions de personnes.

    Certains scientifiques ont tenté d’évaluer le coût des services rendus gratuitement par les écosystèmes (analyse qui est à prendre avec du recul et qui sert à illustrer et rendre plus concret ce que signifie la disparition de ces espèces plutôt qu’à aboutir à une véritable donnée précisément chiffrée). Le résultat de la perte de l’épuration naturelle des eaux, de la pollinisation des plantes cultivées par les insectes,… est au bas mot de 33.000 milliards de dollars, à peine moins du double de la richesse mondiale ! Sans parler des vertus médicinales des plantes, connues ou inconnues.

    Et ici n’a-t-on pas encore abordé qu’une partie des problèmes liés à la question environnementale. Comme l’affirme le GIEC : « Dans les situations de stress écologique, la guerre pourrait devenir le moyen ultime de redistribuer des ressources en diminution ». Le Secrétaire britannique à la défense, John Reid, est allé dans le même sens en avertissant que « La vérité crue, c’est que le manque d’eau et de terres cultivables est une cause significative du conflit tragique que nous voyons se développer au Darfour, note-t-il. (…) Nous devons considérer cela comme un signe d’avertissement ». De son côté, un rapport commandé par le département américain de la Défense a affirmé en 2003 que « La violence et les turbulences découlant des tensions créées par des changements abrupts du climat impliquent une menace pour la sécurité nationale différente de ce que nous avons l’habitude de voir aujourd’hui. (…) Des confrontations militaires peuvent être déclenchées par un besoin désespéré de ressources naturelles, comme l’énergie, la nourriture et l’eau. plutôt que par des conflits autour de l’idéologie, de la religion ou de l’honneur national. »

    Il y avait en 2006 plus de 100 millions d’hommes et femmes en migration vers un autre pays. Mais selon Norman Meyers, de l’université d’Oxford, il y aurait en plus, au bas mot, 50 millions de réfugiés climatiques en 2010 et 200 millions d’ici 2050. L’environnement pollué est tenu pour responsable de 25% des décès dans les pays du monde néo-colonial et de 17 % dans les pays développés. En France, il y a ainsi entre 6.000 et 9.000 morts par an et au niveau mondial, 4 millions d’enfants meurent chaque année. L’Organisation Mondiale de la Santé a d’ailleurs lancé un appel en 2004 pour « protéger les moins de 5 ans (soit 10% de la population mondiale) qui supportent 40% des maladies liées à l’environnement notamment parce qu’ils absorbent d’avantage de substances nocives par rapport à leur poids corporel ».

    D’autre part, un réchauffement moyen supérieur à 2 ou 3° (ce qui signifie des pics extrêmes bien plus importants) aurait pour conséquence une baisse du rendement agricole, alors que le pire scénario du GIEC prévoit un réchauffement de 6,4° d’ici 2100. Mais il est particulièrement difficile d’élaborer des perspectives précises tant les inconnues sont nombreuses. De plus la désinformation et les conflits d’intérêts n’améliorent pas nos capacités à cerner au mieux cette problématique. La meilleure façon de voir ce que l’avenir nous réserve est certainement d’observer le présent et l’évolution passée. A ce titre, on ne peut que craindre le pire : la température moyenne du globe a augmenté de 0,74°C au cours du siècle dernier et les 11 dernières années font partie des 12 les plus chaudes jamais enregistrées !


    III) Qui sont les responsables ?

    Au fur et à mesure de l’histoire de notre planète, les changements climatiques et les extinctions d’espèces ont été nombreux. Ainsi, il y a 250 millions d’années, un important rejet de gaz carbonique dans l’atmosphère dû à l’activité volcanique sibérienne qui a duré 700.000 ans a décimé entre 90 et 95% des espèces marines.

    Aujourd’hui, au terme de 15 années de recherches, le doute n’est plus permis : si c’est bien encore une fois bien l’émission de gaz carbonique qui est en cause, la responsabilité humaine ressort de manière limpide des différentes études (le dernier rapport du GIEC l’estime certaine à 90%). De fait, les hydrocarbures fournissent les deux tiers de l’électricité mondiale et en premier lieu le charbon, le plus émetteur de tous. Pour produire la même quantité d’énergie, les écarts d’émissions de CO² sont pratiquement de l’ordre de 1 à 100 entre le charbon et l’énergie issue des centrales hydrauliques. Mais plutôt que de condamner l’activité humaine en bloc, il faut s’attarder sur la manière dont cette activité est organisée.

    Les Etats-Unis sont responsables à eux seuls de 22% des émissions totales de gaz carbonique. Et lorsque l’on rapporte l’émission de CO² au nombre d’habitants, les USA restent en première ligne, suivis par l’Australie… tandis que la Belgique arrive en troisième place ! Des pays émergents comme le Mexique, la Chine et l’Inde se retrouvent respectivement en 10e, 11e et 12e position. Dans le même ordre d’idées, si le monde entier avait le niveau de consommation de la Suisse, la Terre ne pourrait subvenir qu’aux besoins de 600 millions de personnes alors que nous sommes 6,5 milliards sur la planète !

    Il serait facile de voir là la clé de la responsabilité de la pollution et des changements climatiques. Et de fait, ce clivage « Nord-Sud » se retrouve dans bon nombre de débats, y compris au sein du GIEC où les pays développés insistent sur les répercussions des émissions à venir (les économies des pays du monde néo-colonial sont plus polluantes, mais moins développées) tandis que l’Inde ou la Chine insistent sur l’impact des émissions passées. L’actuel président du GIEC, l’économiste indien Rajendra Pachauri, déclare lui aussi que « c’est aux pays développés d’en faire plus ». Mais les émissions des pays émergents explosent et au rythme actuel l’Inde et la Chine seront les plus grands producteurs de gaz à effet de serre d’ici 10 ans. Ainsi, entre 1994 et 2004, la Chine a augmenté chaque année ses émissions de GES de 4% et le charbon lui fournit encore deux tiers de son énergie. A cela, Rajendra Pachauri rétorque que « Si réduire les émissions signifie réduire notre niveau de développement, les gens ne l’accepteront pas ».

    Mais leurs niveaux de vie est-il actuellement véritablement en train de monter parallèlement aux dégâts que cause l’économie de leurs pays sur l’environnement ?

    Six entreprises chinoises sont maintenant rentrées dans le « top 100 » du Financial Times, le même nombre que pour le Japon, et à peine moins que la France. Mais la grande majorité de la population est laissée sur le côté de la croissance, de l’industrialisation rapide et de la transition vers l’économie de marché. Plus de 400 millions de Chinois n’ont même pas les moyens de faire appel à un véritable médecin et plus de la moitié des malades n’ont accès à aucun traitement. Des 248 millions de foyers ruraux, 200 millions dépendent de parcelles de terre d’une taille moyenne de 0.65 hectares. Il en faudrait 10 à 12 uniquement pour les nourrir correctement ! Chaque année, les suicides touchent un quart de million de fermiers pauvres, tandis qu’il y a annuellement au moins 10.000 décès uniquement dans l’industrie minière. Il est cependant difficile de se reposer sur les statistiques officielles en provenance du régime (elles peuvent être révisées avec une différence de 20% !).

    Avec un produit intérieur brut de 692 milliards de dollars en 2004, L’inde est devenue la dixième économie mondiale. Mais, malgré la création d’une petite classe moyenne de 300 millions de personnes sur une population de 1,1 milliard d’individus, le bénéfice du développement économique n’a là non plus pas atteint le peuple à cause de la distribution inégale des richesses. Selon les estimations, entre un peu moins d’un quart (c’est-à-dire l’estimation officielle : 338 millions de personnes) et la moitié de la population du pays vit sous le seuil de pauvreté.

    Même la position de leader économique des USA n’empêche ni la pauvreté dans ce pays, ni le fait qu’elle augmente. En 2005, selon le Wall Street Journal (qui tire ses sources de l’IRS, les Services de revenus intérieurs des USA), les 1% d’Américains les plus riches avaient gagné 21,2% de l’ensemble des revenus du pays (pour 19% « seulement » en 2004). Sur le même temps, la richesse des 50% d’Américains les plus modestes a diminué : ils avaient 12,8% de l’ensemble des revenus américains en 2005, contre 13,4% en 2004. Bien que les statistiques de l’IRS ne remontent qu’à 1986, des recherches universitaires laissent penser que la dernière époque où les Américains les plus riches ont cumulé un tel pourcentage du revenu national remonte aux années ‘20. La Belgique est, elle aussi, un pays dit « développé ». Toujours est-il que le taux de pauvreté y est de 15 % !

    En fait, quand on parle de « niveau de développement », on ne parle pas du développement du bien-être de la population, mais du développement de la position économique des Etats, qui sont deux choses totalement distinctes.

    En Grèce, l’ampleur des incendies de cette année s’explique en partie par les coupes que le gouvernement a fait subir aux services des sapeurs-pompiers et de protection des forêts alors que beaucoup d’incendies étaient volontaires et avaient un but économique (les terrains boisés sont protégés mais, une fois brûlés, ils ne le sont plus et peuvent servir à la construction et les promoteurs immobiliers qui se transforment occasionnellement en pyromanes sont nombreux). La responsabilité de l’Etat est évidente, et ses priorités aussi : récemment encore, le gouvernement a voulu facilité la procédure d’acquisition de terrains brûlés !

    En Louisiane, tous les rapports qui s’accumulaient depuis déjà 50 ans mentionnaient les probabilités que les digues se rompent face à un ouragan. Ce qui n’a pas empêché Bush de pourtant oser déclarer « Je ne pense pas que quiconque avait anticipé que les digues se briseraient ». Quand « Katrina » est arrivée en 2005, 70 millions de dollars avaient été enlevés du budget de prévention des catastrophes de La Nouvelle-Orléans. L’année précédente, 40 millions de dollars avaient même été retirés des 105 millions que l’entretien des digues requiert. Le budget national pour faire face aux catastrophes naturelles avait lui aussi été diminué. Par contre, le budget militaire américain a gonflé de 48% depuis 2001 ! Ce budget, pour l’année fiscale 2007, est de 439,3 milliards de dollars. Durant l’évacuation de la ville, rien n’était prévu pour les 200.000 personnes qui n’avaient pas de voiture, ni pour leur ravitaillement. Cela n’a pas empêché le gouvernement de fermement condamner tout « pillage » alors que l’écrasante majorité des « pilleurs » cherchaient simplement de quoi survivre au milieu de la désolation.

    Ces deux exemples suffisent amplement à donner une idée des priorités des différents gouvernements et illustrent les drames vers lesquels nous courons dans ce système.

    KYOTO : Késako ?

    Le protocole de Kyoto a été ouvert à la ratification en 1998 et est entré en vigueur en 2005.

    Il comporte des engagements absolus de réduction des émissions pour 38 pays industrialisés (à l’exception des Etats-Unis et de l’Australie, qui ne sont pas signataires), avec l’objectif d’une réduction globale de 5,2 % des émissions de dioxyde de carbone (responsable à 65% du changement climatique) d’ici 2012 par rapport aux émissions de 1990. Mais, pour limiter à un niveau « raisonnable » le changement climatique (inférieur à 2°C), il faudrait diviser par deux les émissions mondiales ! En réduisant les émissions de 70%, il faudrait même encore 100 ans pour que les effets du réchauffement aient disparu.

    De plus, chaque pays s’est vu octroyer un certain nombre de droits d’émissions contournables, puisqu’il est possible à un pays moins émetteur de revendre sa norme excédentaire à des pays plus pollueurs…

    Greenpeace avait dénoncé le bien maigre résultat de la conférence de Marrakech (2001) qui avait véritablement traduit juridiquement le protocole de Kyoto en termes juridiques. Quant à Olivier Deleuze (ECOLO), qui menait la délégation européenne, il a alors déclaré qu’il préférait « un accord imparfait mais vivant à un accord parfait qui n’existe pas ». Quand il aura une jambe cassée, on lui donnera une aspirine, c’est toujours mieux que quelque chose qui n’existe pas…

    Au-delà de l’analyse « Pays riches contre pays pauvres »

    Comme on peut le voir, le « clivage Nord-Sud » ne répond pas à tout. Mais plutôt que de voir la pollution en terme d’émissions de gaz à effet de serre par pays, il est plus intéressant de l’analyser par secteur. Au niveau mondial, la production d’énergie est responsable à elle seule de 24% des émissions, suivie de près par l’industrie à 23% (soit 47% pour ces deux secteurs). L’agriculture cause, elle, 17% des émissions, tandis que les transports sont responsables à hauteur de 14%, à ex aequo avec la déforestation. En dernier lieu, arrivent les bâtiments avec 8%. Evidemment, ces données varient d’un pays à l’autre. En Belgique, 76% des émissions totales de gaz carbonique produites en 2002 étaient dus aux entreprises et pouvoirs publics. 47% Qui décide de la façon dont la production des entreprises, y compris dans le secteur de l’énergie, est orientée ? Et en fonction de quoi ? La réponse est simple : ce sont les capitalistes – les propriétaires d’entreprises et les actionnaires – qui réfléchissent en fonction des bénéfices qu’ils peuvent retirer d’une activité. Nous n’avons aucun mot à dire sur ce qui est produit, ni sur la manière dont la production est organisée.

    17% Qui décide de la manière dont s’organise l’agriculture ? La réponse est la même. Ce marché est monopolisé par quelques grandes firmes agroalimentaires (régulièrement soutenues par des interventions publiques des Etats américains, brésiliens,…). Leurs pratiques démontrent un mépris qui n’a rien à envier à celui des entreprises pétrolières : au Paraguay, des villages ont été arrosés de produits chimiques… avec leurs populations, afin de les forcer à laisser la place pour les cultures des multinationales !

    La production agricole est de plus en plus industrialisée, ce qui conduit les petits paysans, tout particulièrement dans les pays pauvres, à la perte de leurs terres. Ils se retrouvent alors piégés dans un processus d’endettement accéléré par l’obligation d’acheter des semences à base d’OGM. Il y avait en moyenne 15 famines par an dans les années 80. Vingt ans plus tard, ce chiffre avait doublé. Depuis 1995, la sous-nutrition mondiale est en augmentation, processus actuellement renforcé par la culture destinée aux biocarburants, au détriment de la culture alimentaire. De plus, à cause de l’altération de la composition chimique du sol ou encore de l’érosion des sols, notamment causée par la culture intensive, environ 1,964 milliard d’hectares de terres se sont dégradées. Plus de la moitié des surfaces cultivables dans le monde sont donc touchées…

    14% Quant à la déforestation, qu’est-ce qui la motive ? Encore une fois le profit que peuvent en retirer certains. En Asie, 45% des émissions de gaz carboniques sont provoquées par la récolte de bois précieux organisée industriellement et destinée au marché occidental. De plus, de larges parts des forêts anciennes sont abattues pour implanter des monocultures très consommatrices en eau et produits chimiques.

    Au moins 15 millions d’hectares de la forêt tropicale disparaissent chaque année, ce qui produit annuellement 8 milliards de tonnes de CO², bien plus que les émissions du transport routier mondial ! Les reboisements dans les régions tempérées ne réduisent ce chiffre que de 30 % au grand maximum. Et les responsables ne sont pas de petits paysans qui veulent agrandir leur petit lopin de terre, mais bien les multinationales et leurs sous-traitants. Ainsi, Greenpeace a par exemple dénoncé en 2006 comment Mc Donald participait à la déforestation : le soya qui nourrit ses poulets est cultivé par son partenaire commercial dans d’anciennes parties de la forêts amazonienne.

    14% Dans les transports, la route représente à elle seule 81% de ses émissions de gaz à effet de serre (GES) au niveau mondial (51% pour le transport routier de passagers plus 30% pour le transport routier de marchandises). Durant ces deux dernières décennies, le transport de marchandises a augmenté de 170 %. Le nombre de voitures a doublé sur terre depuis 1987 tandis que le transport aérien (responsable de 13% des émissions) a augmenté de 76% depuis 1990. Les entreprises privilégient aujourd’hui le « just-in-time » ou « zero stock ». Cette pratique est née de la volonté patronale de réduire les stocks de marchandises produites à l’avance et qui ne rapportent donc pas avant leur vente. Désormais, les marchandises ne sont produites qu’après commande, ce qui exige, pour que la commande puisse être réalisée très vite, que les « ingrédients » nécessaires à la production soient en constante circulation d’une entreprise à l’autre, le plus souvent par camion. En France, le transport de marchandises par route représente 94% des émissions de CO² liés aux transports et ce modèle va être renforcé par l’arrivée des bio-carburants. En moyenne, en Europe, 600 Km de voie ferrées sont démantelées par an.

    8% En ce qui concerne les bâtiments, on en vient vite à parler du secteur de la construction, connu pour son éthique toute particulière. Ce dernier est en Belgique le secteur qui « emploie » le plus de sans-papiers (on estime qu’en Belgique, 50.000 des 150.000 sans papiers présents sont exploités dans le secteur) parce que ceux-ci sont forcés d’accepter de bas salaires et parce qu’ils ne peuvent pas se plaindre en cas d’accident (dont ce secteur est d’ailleurs un des principaux responsables selon les chiffres officiels). La Belgique a aussi été un des plus gros consommateurs d’amiante alors que les dangers de cette matière étaient connus. Mais c’est un bon isolant à faible coût… En Chine, des entreprises de briqueterie ont récemment fait parler d’elles pour avoir utilisé de véritables esclaves, certains enlevés en bas âge dans leurs villages. Encore une fois : ce qui prime, c’est que le travail avance vite pour aller sur un autre contrat, et tant pis si la santé des travailleurs où l’environnement doivent en pâtir.

    Et au-delà des émissions de GES, qui sont les responsables des marées noires provoquées par les navires Exxon Valdez (Exxon Mobil, 40.000 tonnes de fioul déversées dans la mer en 1989), Erika (Total-Fina-Elf, 37.000 tonnes en 1999) ou Prestige (Alfa-Eco Group, 77.000 tonnes en 2002) ? La filiale d’Alfa-Eco Group, Crown Resources AG, a très vite été revendue à plusieurs cadres de la multinationale russe qui l’ont rebaptisée. De cette façon, Crown Resources AG n’avait plus d’existence légale lors de l’enquête. A l’image de tant d’autres entreprises – et pas seulement des multinationales – cette compagnie pétrolière a préféré hypothéquer la sécurité pour raisons financières et a trouvé des moyens légaux pour se décharger de ses responsabilités.

    Le responsable, ce n’est pas l’Homme, mais le capitalisme. Ce système ne cause pas toutes les catastrophes, mais même quand il n’en est pas à l’origine, il en amplifie les effets. L’homme subit le capitalisme bien plus qu’il n’en profite – à l’exception d’une très petite minorité de parasites : les milliardaires en dollars ne sont même pas un millier pour une population mondiale de plus de 6 milliards d’êtres humains !


    IV) Si le capitalisme est responsable, ne peut-il trouver des solutions ?

    Le retournement de l’opinion publique, effrayée par l’augmentation des catastrophes naturelles, pousse les gouvernements à « s’occuper » de ce problème. Mais il est pour eux impossible de s’attaquer à ceux qui sont responsables des problèmes écologiques… puisqu’ils sont les premiers défenseurs des patrons et actionnaires ! Peut-on imaginer Sarkozy cracher de lui-même dans la soupe que lui offrent ses amis les patrons (notamment dans le milieu des médias) ? Peut-on imaginer Bush s’attaquer à ses amis pétroliers qui ont si gracieusement contribué à ses campagnes électorales ? Bush pourrait déjà commencer par reconnaître le danger de l’amiante, toujours légal aux USA (alors que les premières études médicales en démontrant le danger datent d’un siècle). Toutes les personnes qui sont venues au secours des victimes du 11 septembre ont ainsi respiré de la poussière d’amiante pendant des jours et, si rien ne change, ils ne pourront même pas être couverts par leur assurance-maladie (si tant est qu’ils aient eu les moyens de se l’offrir)…

    Par ailleurs, il serait difficile d’utiliser dans les pays capitalistes développés une répression similaire à celle qu’ont subi et que subissent encore les populations du monde néo-colonial lorsqu’elles se mobilisent face, notamment, à l’un ou l’autre désastre environnemental. En conséquence, les réponses qui viennent des politiciens sont autant de poudre aux yeux, de solutions qui ne s’en prennent qu’à une partie infime de l’étendue de la problématique (et encore, bien mal comme l’illustre l’exemple du protocole de Kyoto). Mais leur intérêt n’est pas d’être efficace, il est de pouvoir postposer le problème en masquant les responsables. Idem pour la majorité des mesures prises par les entreprises elles-mêmes : ce n’est pas l’efficacité qui prime, mais la publicité et l’image.

    Un prétexte bien pratique

    La crise environnementale peut d’ailleurs devenir un prétexte bien utile. Les relations instables qu’entretiennent des pays comme la Russie, l’Irak, le Venezuela ou l’Iran avec l’impérialisme occidental poussent les Etats à chercher à devenir plus énergétiquement indépendants. Ainsi, quand le quotidien français « Le Monde » demande à Jean-Louis Borloo (ministre français de l’écologie, du développement et de l’aménagement durable) ce que signifie pour lui le développement durable, il répond « Le défi central, c’est de réorganiser la société avant que la raréfaction des ressources ne nous amène à une société de restriction ». En d’autres termes : il faut assurer autrement l’approvisionnement de nos entreprises. Quant au reste…

    Alors que le néo-libéralisme est de plus en plus sous le feu de critiques sans cesse plus vives, l’environnement arrive à point nommé pour les serviteurs du patronat. Derrière l’argument « nous sommes tous responsables avec nos choix de consommation », il y a la menace de nouvelles attaques sociales sous le masque de la sauvegarde de l’environnement. Le « nous sommes tous responsables » sert avant tout à cacher que les entreprises n’ont pas trop de soucis à se faire au regard de leur écrasante responsabilité. Et puis à force d’avoir vidé les caisses des Etats en cadeaux sous forme de diminution de charges patronales et autres diminutions de taxes, à force d’avoir bradé les services publics, les « taxes écologiques » arrivent à point nommé pour renflouer les finances, à nouveau sur le dos des travailleurs.

    La réunion consacrée au dernier contrôle budgétaire du gouvernement Verhofstadt a ainsi instauré une taxe « écologique » sur les emballages et les voitures polluantes. Réponses crédibles face à l’enjeu de la sauvegarde de notre planète ? Ce fut surtout pour le gouvernement une manière de prélever, selon leurs estimations, 67 millions d’euros avec les impôts pour les emballages et 65 millions d’euros avec la taxe sur les voitures polluantes (et pas pour le budget de la lutte pour la protection de l’environnement). La logique derrière cela est celle du « pollueur-payeur », mais ces taxes ne touchent pas tout le monde de la même manière et le patronat vide toujours plus les caisses de l’Etat en recevant cadeaux fiscaux sur cadeaux fiscaux.

    La Confédération Européenne des Syndicats et la Commission Européenne ont ensemble réalisé une étude qui évalue les conséquences d’une réduction de 40% des GES d’ici 2030. Cette étude met en avant le fait que les secteurs s’occupant des équipements spécialisés dans l’efficience énergétique des bâtiments (174.000 emplois et 37 milliards d’euros de chiffre d’affaire en 2006 dans l’Union Européenne) ont face à eux de gigantesques opportunités. Rappelons tout de même que les bâtiments ne représentent que 8% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

    Cette étude aborde aussi la possibilité de prendre des mesures contraignantes pour les entreprises. Mais c’est pour signaler immédiatement que cela serait synonyme de délocalisation, avec ce que cela signifie en terme de pertes d’emplois et d’augmentation des émissions de gaz carbonique à cause du transport des marchandises des pays plus « tolérants » vers le marché européen. Ainsi, instaurer un système de quota d’émissions de GES pour les 12.000 sites les plus polluants en Europe menacerait 50.000 emplois dans la sidérurgie sur les 350.000 que compte ce secteur, et 8.000 dans les cimenteries (sur 53.000). Tant que les entreprises dirigeront le monde, ce genre d’argument prévaudra toujours et pourra même obtenir un soutien auprès de certains travailleurs si le mouvement ouvrier et syndical n’est pas capable d’apporter une autre réponse.

    D’ailleurs, le niveau des investissements et des dépenses courantes annuelles de l’industrie européenne pour la protection de l’environnement montre que cette question est très, mais alors très loin d’être une priorité. Selon l’Office européen des Statistiques, Eurostat, ce niveau a baissé entre 1999 et 2002, passant de 35 milliards d’euros (soit seulement 0,41% du PIB européen) à 25 milliards d’euros. Même raboté par le gouvernement américain, le budget annuel de l’entretien des digues de la Nouvelle-Orléans avant qu’elles ne s’écroulent était supérieur à ce chiffre !

    Dans un contexte où une crise internationale de l’économie est devenue probable dans un proche avenir – à partir de la crise des crédits hypothécaires américains et de ses conséquences – le prétexte de l’écologie pour faire passer des attaques sociales va prendre plus de poids. De plus, il est certain que des mesures visant à protéger les différentes économies (ou plutôt bourgeoisies) nationales vont elles aussi se teindre de vert, comme par exemple l’imposition de quotas de GES à ne pas dépasser dans la production de certains produits pour que l’Union Européenne puisse les bloquer à ses frontières.

    D’autres mesures sont également prises, parfois d’un ridicule à faire pleurer de rire. A titre d’exemple, dans le courant du mois de septembre a été annoncée la création d’une unité de répression des pollutions en Wallonie. Jusque là, rien à redire. Mais il faut savoir que cette unité n’est composée que de… 10 agents seulement ! Il va toutefois y en avoir bientôt 16, dont l’objectif sera de lutter contre la « criminalité environnementale organisée », c’est-à-dire contre des infractions graves qui seront bientôt définies par décret. Donc, avant même de fixer l’étendue du travail à mener, on annonce la création d’une équipe (histoire de montrer que le gouvernement wallon se préoccupe de l’environnement)…mais on ne la dote que de moyens dérisoires (histoire de ne pas se créer d’ennuis avec les grandes entreprises). Car on peut déjà être certain que dans cette « criminalité environnementale organisée » ne figureront pas les licenciements opérés par la société LUMINUS en Wallonie, principalement dans l’entretien des centrales électriques hydrauliques. Au-delà du drame humain que représente cette décision (dans une entreprise qui pourtant n’a pas à se plaindre de ses bénéfices) plus de 250.000 tonnes de gaz carboniques supplémentaires vont être rejetés dans l’atmosphère. Les travailleurs de la société, licenciés ou non, ainsi que la population pourront respirer ces émanations et à partir du 1er décembre 2007, avoir une pensée émue pour la société qui aura augmenté les prix du gaz pour les ménages et les PME de 6%. Et tant pis pour ceux qui ne pourront pas payer et passeront l’hiver au froid. Les pauvres pollueront moins et seront donc davantage pollués cet hiver.

    De plus, dans un système dominé par les seuls profits des entreprises, les catastrophes naturelles sont aussi l’opportunité de profiter d’une population sous le choc pour lui imposer d’autres drames. Quand, en décembre 2004, le tsunami a balayé le Sri Lanka, cela a par exemple donné aux autorités la possibilité de chasser les pêcheurs du front de mer pour vendre les terrains à des groupes hôteliers.

    Reporter la crise

    Dans le meilleur des cas, la réponse de la bourgeoisie n’est pas de solutionner le problème, mais seulement de le déplacer. Le nucléaire est un exemple particulièrement révélateur de ce processus. L’énergie nucléaire fournit actuellement 17% de l’électricité mondiale. Doubler le nombre de centrales permettrait de diminuer nos émissions de GES de 15% (ce chiffre est toutefois contesté par certains scientifiques). Toujours est-il qu’actuellement, 29 nouvelles centrales sont en construction de par le monde. Mais les problèmes qu’entraîne cette « solution » sont nombreux. Le plus fréquemment évoqué par les médias est le risque de prolifération nucléaire à une époque où les conflits régionaux (particulièrement au Moyen-Orient) et inter-impérialistes gagnent en ampleur et où le simple approvisionnement en eau risque de devenir une cause majeure de conflits. Mais ce n’est pas le seul. On peut aussi parler des risques d’accidents similaires à celui de Tchernobyl (qui a contaminé directement 150.000 km², cinq fois la superficie de la Belgique), particulièrement dans des pays du monde néo-colonial où les catastrophes chimiques et toxiques sont nombreuses, bien souvent à cause du mépris de multinationales pour l’environnement et la sécurité des populations locales. On se rappelle de l’accident de Bhopal, en Inde, où entre 16.000 et 30.000 personnes ont été tuées et 500.000 touchées par les émanations toxiques d’une usine chimique du premier groupe chimique américain « Union Carbide Corporation ». La multinationale avait réduit les frais de fonctionnement, et donc la sécurité, pour augmenter une rentabilité jugée insuffisante. Mais même les pays « développés » ne sont pas protégés des risques du nucléaire. Le Japon a ainsi failli connaître un sinistre nucléaire en juin 2007 suite à un tremblement de terre (le Japon est une gigantesque zone sismique). Ne parlons même pas de la gestion des déchets : actuellement déjà, 7.000 tonnes de déchets nucléaires sont produits chaque année, sans que l’on ne sache comment s’en débarrasser…

    Le biocarburant est un autre exemple frappant. L’Union Européenne a décidé d’incorporer 6% de bio-carburants dans sa consommation de carburants d’ici 2010 tandis que les USA veulent arriver à une production de bioéthanol de 36 milliards de gallons pour 2022 (ce qui correspond à une augmentation de 700%). Pourtant, de plus en plus de voix s’élèvent pour critiquer l’efficacité réelle de la solution des bio-carburants. Des études scientifiques récentes montrent, par exemple, que pour produire 1,2 unité d’énergie sous forme d’éthanol de blé, il faut 1 unité d’énergie fossile. D’autre part, l’extension rapide des surfaces consacrées à la culture des plantes utilisées pour la fabrications de bio-carburants pose de graves problèmes. Michel Hartmunt, le prix Nobel de chimie, a critiqué la dévastation des forêts tropicales et la déforestation tandis que Greenpeace estime que 87% des forêts tropicales détruites entre 1995 et 2000 l’ont été pour produire du Biodiesel ! Ajoutons encore que, comme les terres cultivables ne sont pas illimitées, la demande croissante de « bio »-carburants a des effets néfastes sur la production et les prix des denrées alimentaires.

    L’ancien économiste en chef de la Banque mondiale, Nicolas Stern a expliqué que si rien n’est fait, le coût du réchauffement climatique atteindra 5.500 milliards d’euros : plus que les deux guerres mondiales et la crise de 1929 réunies ! Il faudrait dès maintenant consacrer 1% de la richesse mondiale à la lutte contre le réchauffement pour pouvoir éviter que ces frais ne soient de l’ordre de 5 à 20% plus tard.

    Ces coûts économiques vont certainement forcer les entreprises à changer leurs méthodes. Mais dans une certaine mesure seulement. Car le capitalisme est un système basé sur la concurrence et la « lutte à mort » et le chacun-pour-soi reprendra le dessus dès le premier problème. Dans son rapport de 2005, Transparency International indique que le volume des pots-de-vin dans le seul cadre de contrats publics internationaux passés par les entreprises avait atteint 300 milliards de dollars, soit 10% du marché mondial du bâtiment et des travaux publics. Dans un système pareil, alors que des sommes de profits astronomiques sont en jeu, comment imaginer que les règles environnementales puissent être vraiment respectées ?


    V) Quel programme défendre ?

    Comment mobiliser toutes les forces productives de la société pour sauver la planète ?

    1. Pour une politique de stimulation des solutions collectives et pas de sanctions individuelles !

    La cause environnementale ne doit pas servir de prétexte aux gouvernements pour remplir leurs caisses ! Les « écotaxes » – ne jamais se fier au nom seul ! – font endosser au consommateur la responsabilité des méthodes de production et de distribution capitalistes, alors qu’il n’a rien à dire. Par contre, ceux qui ont les poches pleines peuvent continuer à polluer, en s’acquittant d’une amende très légère proportionnellement à leurs revenus.

    Nous sommes contre les taxes sur le gaz carbonique car ce seront les couches les plus pauvres qui seront les plus affectées : tout le monde n’a pas les moyens de changer ce que la bourgeoisie qualifie d’habitudes et qui sont en fait des nécessités pour beaucoup. Par exemple, au-delà des critiques à faire sur l’efficacité environnementale de cette mesure, qui aurait les moyens de changer directement sa voiture pour une neuve qui pollue (un peu) moins ? Certainement pas les plus pauvres, qui utilisent la plupart du temps des voitures d’occasion. Pour d’autres, par exemple les travailleurs qui habitent en périphérie de Bruxelles (à cause des loyers trop élevés à Bruxelles ou parce qu’ils souhaitent voir leurs enfants grandir dans un environnement plus sain), une grosse voiture confortable est nécessaire pour effectuer quotidiennement des heures de trajets, parfois avec les enfants à l’arrière qui doivent s’occuper avant d’arriver à destination. Dans ces deux cas, comme dans bien d’autres, la solution réside dans le développement de transports en commun gratuits, de qualité et dans toutes les parties du pays (vivre sans voiture dans la province du Luxembourg est aujourd’hui quasiment impossible). Nous ne voulons pas supprimer ou interdire les voitures mais, si suffisamment de moyens sont affectés pour cette mesure, l’automobile occupera une place beaucoup plus réduite dans les déplacements quotidiens au fur et à mesure du développement des lignes de bus et de chemin de fer. D’autre part, le nombre d’accidents de la route diminuera aussi fatalement. En 2006, il y a eu 1.069 décès sur les routes en Belgique, en plus des 7.027 blessés graves et des 58.270 blessés légers.

    Ceci étant dit, nous ne sommes pas contre toutes les taxes mais nous proposons de les réserver pour les produits de luxe polluants comme, par exemple, le jet privé de Sarkozy.

    Il faut inciter à voir autrement. Suivant cette même logique qui pousse à consommer collectivement, et pas individuellement, nous pensons que les systèmes de subventions, notamment pour isoler énergétiquement les immeubles, sont insuffisants. Sur base du même exemple, nous sommes favorables à un plan national appliqué commune par commune pour isoler les bâtiments rue par rue selon un standard démocratiquement élaboré. A côté de cela, un plan de construction de logements sociaux abordables, de qualité et bien isolés et de rénovation de bâtiments anciens afin d’augmenter le nombre de logements. Avec assez de logements sociaux, une pression suffisante serait mise sur les propriétaires privés qui abusent de la pénurie de logements pour réclamer des loyers exorbitants. Cela serait d’ailleurs aussi une solution pour ceux qui déménagent loin de leur ville de travail simplement à cause du prix des maisons et du loyer et qui sont donc forcés d’opérer un déplacement coûteux en temps et en énergie chaque jour. De même, les populations pauvres n’auraient plus à habiter à côté de sites polluants à cause des loyers moins élevés.

    2. Plus de moyens pour une recherche scientifique indépendante !

    EXXON MOBIL : « Dont Worry, Be Happy »

    Que font les multinationales pétrolières de leur profits ? Elles protègent leurs intérêts pardi ! Comme nous l’avons déjà dit, Exxon Mobil avait déjà en 2002 exercé des pressions sur le GIEC par le biais complaisant des USA pour écarter le président de celui-ci, jugé trop militant.

    Il est vrai que chez EXXON, l’objectivité est de rigueur. Ainsi, entre 1994 et 2004, cette chaleureuse entreprise a dépensé 13 millions de dollars pour sponsoriser des études contestant le réchauffement climatique. Rien qu’entre 2000 et 2003, la somme a été de quelques 8.793.450 dollars.

    Le podium pour cette dernière période est composé de 712.000 dollars pour l’Américan Legislative Exchange Council (qui a déclaré que « le réchauffement climatique pourrait même sauver des vies »), de 960.000 dollars pour l’American Entreprise Institute (qui a publié un article sur le réchauffement intitulé « Don’t Worry, Be Happy ») et enfin de 1.380.000 dollars à la Competitive Entreprise Institute qui a comparé les risques de réchauffement climatique à ceux d’une invasion extraterrestre…

    Actuellement, la population n’a pas les capacités de savoir quelles sont les meilleures mesures à mettre en oeuvre pour sauvegarder l’environnement. Les bio-carburants (ou agro-carburants, comme on devrait plus honnêtement les appeler) sont autant décriés qu’encensés. Plutôt qu’un débat d’idées, on assiste ici surtout à une lutte entre les industries exploitant les matériaux fossiles et les industries agro-alimentaires.

    Toutefois, il existe déjà des recherches scientifiques intéressantes, comme celles financées par Greenpeace. On ne part pas de zéro, quantité d’informations et d’analyses sérieuses existent déjà et il serait ridicule de ne pas les utiliser. Des analyses intéressantes peuvent aussi venir de la part des universités d’Etat et de leurs laboratoires (le contrôle sur ces recherches est une des nombreuses raisons qui font que le patronat tente de prendre le contrôle des universités en privatisant l’enseignement supérieur).

    Mais même ces recherches s’effectuent souvent sans véritable coordination et aboutissent parfois à des découvertes qui sont achetées par les entreprises dans le seul but d’assurer que ces découvertes ne soient pas appliquées. Le secteur pétrolier s’est taillé une réputation impressionnante dans ce domaine.

    Toute ingérence de l’industrie ou du privé doit être retirée de la recherche scientifique, qui doit être réellement indépendante et non subordonnée aux intérêts des actionnaires et patrons. Les brevets doivent être abolis et la recherche d’alternatives énergétiques doit être prioritaire, ce qui prend des significations très concrètes en ce qui concerne les moyens financiers. Il est très révélateur de constater que les études du GIEC ont été faites à titre individuel, après le travail « officiel » effectué normalement par ces quelques 2.500 chercheurs. A côté de cela, les dépenses du secteur automobile aux USA pour la publicité ont augmenté de 16% durant le premier semestre de 2007 pour atteindre la somme de 17,8 millions de dollars.

    Devant une problématique telle que celle-ci, d’une telle ampleur, il faut se donner les moyens de trouver des solutions, il faut mobiliser toutes les forces productives et scientifiques de la société.

    Maintenant, il est très difficile d’aller plus loin en terme de revendication. L’énergie solaire est une solution : chaque seconde, la Terre reçoit de l’énergie solaire en quantité telle qu’elle représente 4.000 fois la consommation de l’humanité. Mais le coût de l’énergie solaire est encore élevé, de même que ses performances restent encore limitées. Il y a encore l’énergie des marées, ou celle rayonnée par le noyau terrestre. Il est aussi possible de développer les recherches sur le stockage d’énergie,…

    Ce n’est qu’au cours de recherches approfondies qu’il n’est possible de mener qu’en affectant le maximum de moyens possibles en terme de finances et de chercheurs dans le cadre d’un plan sous contrôle public, que nous pourrons savoir ce qui doit être fait et que nous pourrons par la suite améliorer ces solutions. Ce n’est qu’à ce moment que nous pourrons être certains qu’aucun moyen n’existe pour traiter les déchets nucléaires ou que nous saurons si des méthodes possibles sont actuellement mises de côté pour raisons financières ou si de nouvelles méthodes pourraient être envisagées. Sous le capitalisme, il n’y a pas de solutions pour sortir du nucléaire. Fermer les centrales belges, par exemple, entraînerait l’importation d’énergie nucléaire française. Le problème ne serait finalement que reporté, ce qui renforce d’autant l’urgente nécessité de sortir de ce système.

    De même, il nous faut aussi réfléchir de toute urgence aux moyens à mettre en œuvre pour en quelque sorte « réparer » les dégâts que le capitalisme a causés. La géo-ingénierie part de ce postulat : ce que des produits chimiques ont pu faire, notamment dans le cadre du climat, la science peut le défaire. Nous devons toutefois être très prudents par rapport à ce genre de propositions à la « Jurassik Park ». Mais la seule certitude que nous pouvons avoir à ce sujet, c’est que tant que la société sera aux mains d’une minorité qui ne défend que ses intérêts, notamment en s’entre-déchirant, ce genre de solutions repousseront certains problèmes pour mieux en amener d’autres.

    3. Stop au gaspillage, pour une planification de la production !

    Actuellement, on ne peut collectivement savoir ce qui est produit dans la société qu’à partir du moment où la production a déjà eu lieu. Chaque entreprise dans son coin tente de dominer et d’inonder le marché. On se retrouve ainsi avec une profusion de marques de lessives là ou ce n’est pas nécessaire. Ce n’est qu’un exemple, on pourrait aussi parler des médicaments, avec le fait supplémentaire que même s’il y a trop de médicaments produits pour ce que le « marché » est capable d’absorber, les exclus du marché peuvent quand même mourir comme de vulgaires chiens galeux.

    Chaque entreprise produit non en fonction de ce dont le « marché » a besoin, mais en fonction de ce qu’elle pourra vendre (quitte à imposer la nécessité du produit à grand renfort de pollution publicitaire) et de préférence pouvoir continuer à vendre par la suite. Alors que les nombreuses matières qui composent un GSM (plus de 500, loin d’être toutes recyclables) viennent de partout dans le monde et polluent donc à travers leur production et leur transport, chacun sait que la durée de vie d’un GSM est très courte. « C’est normal, les commerçants doivent vivre » entend-on dire. Ce sont plutôt les patrons des entreprises de production de GSM qui doivent vivre tandis que les magasins des gros opérateurs de téléphonie étouffent les commerçants « normaux ». Nokia, le célèbre leader mondial de la communication mobile, a obtenu pour le troisième trimestre de 2007 un bénéfice de 1,56 milliards d’euros, soit 85% de plus que pour le troisième trimestre de 2006 ! De son côté, Mobistar a réalisé 299,5 millions d’euros de profit en 2006, soit une croissance de bénéfice de 10,8% par rapport à l’année précédente.

    Dans le secteur de l’énergie (qui produit 24% des émissions mondiales de GES), les problèmes sont encore plus visibles. Nous avons déjà parlé de la société LUMINUS dont les licenciements ont pour effet d’augmenter de 250.000 tonnes les émissions de gaz carbonique en Belgique. Ce sont les profits à court terme qui priment et l’environnement ne sort pas gagnant quand les entreprises réalisent de meilleurs profits.

    Electrabel a réalisé un bénéfice net de 2 milliards d’euros en 2005, mais des mesures environnementales peuvent restreindre ses bénéfices. La réponse donnée par la gauche officielle du SP.a, le parti « socialiste » flamand, est que l’Etat doit nationaliser (en indemnisant les actionnaires) le secteur de l’énergie, destiné à être moins rentables à cause des mesures environnementales. Comme les capitalistes ne veulent pas investir dans un secteur en décroissance, ce serait donc à la collectivité de payer pour réparer les dégâts commis par les patrons et leurs actionnaires !

    Nous revendiquons l’arrêt total des privatisations et la nationalisation des secteurs-clés de l’économie, et en particulier du secteur de l’énergie, sous le contrôle des travailleurs, sans rachat ni indemnités, sauf sur base de besoins prouvés (les petites épargnants, comme des personnes âgées ou des travailleurs, qui ont placé leurs maigres économies en Bourse, par exemple). De plus, les services publics doivent être largement étendus et gratuits: les soins de santé (notamment pour faire face aux maladies des pays chauds qui commencent à arriver en Europe, pour faire face à l’augmentation du nombre de personnes touchées par l’asthme ou d’autres maladies respiratoires dues à la pollution de l’air, etc.), les services d’urgence comme les services d’incendie (qui manquent déjà cruellement de moyens alors que les sinistres naturels augmentent), les transports publics (comme déjà expliqué) y compris celui des marchandises (pour enrayer l’explosion du trafic routier et la prolifération des camions sur les routes), l’enseignement (entre autres pour avoir suffisamment de moyens pour mieux responsabiliser la jeunesse face aux enjeux environnementaux, mais aussi pour rénover les bâtiments scolaires, pour développer la recherche scientifique, etc.), …

    La production doit être orientée en fonction des besoins de la population selon un plan démocratiquement élaboré, c’est-à-dire avec la participation de chacun. N’importe qui peut se rendre compte que le meilleur moyen de gérer ses finances, c’est d’y faire attention et de prévoir ce dont on aura besoin, en quelle quantité,… Il en va de même pour la société dans son ensemble. Toutefois, face à l’idée répandue que le marché et la concurrence sont nécessaires pour assurer le développement, il faut préciser qu’une planification n’est en rien une stagnation. La raison pour laquelle la société soviétique a stagné ne se trouve pas dans la planification, mais dans la dictature bureaucratique qui pesait sur cette société. Les masses n’avaient aucun moyen de participer aux décisions mais elle devait les subir de façon brutale. Une telle situation ne peut, dans le meilleur des cas, que rendre passif et indifférent vis-à-vis de la construction de la société. En étant impliqué dans la planification, c’est-à-dire en soumettant ses propres idées à la collectivité, en discutant de celles des autres, en concrétisant un projet, chacun peut s’épanouir et faire preuve de beaucoup plus d’initiative et de créativité que dans cette société où l’argent règne en seul maître. Le terme de « marché libre » est bien trompeur : ce n’est pas un marché où des villageois achètent librement ce qu’ils veulent.

    Il s’agit en fait de la liberté qu’a chaque patron d’utiliser des moyens matériels et financiers pour faire fonctionner son entreprise – qui assure pourtant une partie de la production de la société – dans son seul intérêt. Cette production anarchique et à courte vue est source d’un gaspillage énorme. Des mesures sérieuses de protection de l’environnement affaibliraient sans doute la position concurrentielle des entreprises. Une bonne partie de celles-ci veulent bien être propres, mais à condition que toutes les autres le soient aussi. Mais – en admettant que les masses imposent cela à l’échelle de la planète et n’utilisent pas leur force pour aller plus loin – tous ces efforts seraient rapidement gâchés. Le capitalisme étant basé sur la concurrence, dès qu’un patron en difficulté déciderait de passer outre aux mesures environnementales, il entraînerait à sa suite les autres qui utiliseraient le précédent ainsi créé pour justifier le fait qu’ils tentent par tous les moyens de « rester concurrentiel ».

    Pour éviter qu’un tel processus se mette en branle, les masses doivent avoir le contrôle des entreprises.

    4. Les décisions sur l’orientation de la société nous concernent tous, pour une véritable démocratie : le pouvoir aux travailleurs !

    La « démocratie » telle qu’elle est appliquée aujourd’hui reste largement un leurre. Lénine avait affirmé en 1917 (dans son livre « L’Etat et la Révolution », écrit quelques semaines avant la Révolution d’Octobre) que « décider périodiquement, pour un certain nombre d’années, quel membre de la classe dirigeante foulera aux pieds, écrasera le peuple au Parlement, telle est l’essence véritable du parlementarisme bourgeois, non seulement dans les monarchies constitutionnelles parlementaires, mais encore dans les républiques les plus démocratiques ».

    Quelques 90 années après que ces lignes aient été écrites, force est de constater que rien n’a fondamentalement changé. Les élus sont irrévocables entre les élections et font ce qu’ils veulent une fois passées les élections. L’argent domine toujours les campagnes électorales. En Belgique, le seuil pour être élu (et donc pour recevoir des subsides de l’Etat) a été fixé à 5% : en 2005, les partis traditionnels ont reçu 56 millions d’euros de l’Etat. Tant légalement que financièrement, cela élimine les partis qui n’ont pas le soutien financier de riches individus ou d’entreprises. Tous les partis établis sont favorables à des diminutions de charges pour les entreprises sur le dos des travailleurs et des ménages « afin de sauvegarder l’emploi ». En guise de sauvegarde d’emploi, le bilan est pourtant sans contestation possible éminemment négatif, les diminutions du taux de chômage sont surtout dues à des manipulations de statistiques.

    Lénine a encore déclaré « l’Etat est l’organisation spéciale d’un pouvoir ; c’est l’organisation de la violence destinée à mâter une certaine classe ». Et effectivement, c’est toujours aux masses de trinquer, de manière plus ou moins violente en fonction du contexte. Les exemples où la gendarmerie et l’armée ont tiré sur la foule lors de protestations d’ampleur ne manquent pas dans l’histoire de la Belgique (et aujourd’hui encore, la police n’hésite pas à recourir à la violence pour disperser une manifestation). Contrairement à ce qui est communément admis, l’Etat n’est pas l’émanation des intérêts collectifs d’une société, mais bien l’émanation des intérêts des des patrons d’entreprises et des banquiers.

    Une société planifiée, nous l’avons vu dans le point précédent, a besoin de démocratie comme un corps a besoin d’oxygène. L’Etat tel qu’il existe actuellement ne peut remplir un rôle de démocratisation des prises de décisions. C’est pourquoi un nouvel organe de gestion de la société doit être créé, sur base d’assemblées régulières et d’élections démocratiques de délégués et de comités au sein des entreprises, des quartiers, des écoles,… Toutes les personnes concernées par les activités de ces comités doivent être intégrées aux discussions et décisions (dans le cas d’une école, cela pourrait signifier que ce comité rassemblerait des représentants des étudiants, des parents et des professeurs.

    Du temps doit être dégagé pour que chacun puisse avoir l’opportunité de s’investir dans la prise des décisions pour gérer la société. Il est parfaitement ridicule de voir que, dans la société capitaliste actuelle, chaque progrès technologique a pour effet de faire grossir les rangs des chômeurs et des travailleurs intérimaires tandis que d’autres travailleurs subissent des pressions pour travailler plus longtemps. Dans ces conditions, chacun a devant lui ses problèmes personnels (stress lié au travail, stress pour boucler ses fins de mois ou trouver un travail,…), ce qui rend plus difficile l’investissement politique. Pour cette raison, et aussi comme solution face au chômage, le temps de travail disponible doit être réparti en fonction des travailleurs disponibles de manière à créer des emplois correctement payés et non précaires. Parallèlement à cela, le développement des services publics – et de l’emploi dans ce secteur – permettra aussi d’économiser du temps. Le temps ainsi dégagé pourra servir à s’occuper de soi, de ses hobbies,… mais aussi à s’investir dans la gestion de la société.

    Nous revendiquons la semaine de travail de 32 heures, avec embauches compensatoires et sans pertes de salaire.

    5. Le bien-être des travailleurs et le bien-être de la planète vont de pair !

    La question de l’emploi face à l’environnement est un sujet particulièrement sensible. Pour beaucoup de monde, et particulièrement au sein des syndicats, l’imposition de mesures destinées à protéger l’environnement est synonyme de perte d’emploi (à juste titre d’ailleurs tant que l’on pose cette question à l’intérieur du cadre du capitalisme). En Angleterre, par exemple, tous les syndicats sont contre la sortie du nucléaire par crainte de pousser dans la pauvreté les milliers de travailleurs qui vivent de cette industrie. Les jeunes radicalisés ou les militants écologistes peuvent ainsi se décrédibiliser aux yeux du mouvement ouvrier s’ils ne tiennent pas compte de cette réalité.

    Or, face à la crise environnementale, nous devons mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour mobiliser le plus de forces possible dans la lutte. Se couper de couches de travailleurs ne peut qu’affaiblir le rapport de forces à construire face au patronat. Les travailleurs au sein des entreprises polluantes ne sont pas là par plaisir mais par nécessité économique : tout le monde n’a pas les moyens de refuser un emploi ! De plus, ce sont souvent les premières victimes de la pollution de l’entreprise en question. Les riverains et les travailleurs des entreprises doivent être liés dans la lutte. Pollution, conditions de travail déplorables, exploitation du terrain et des travailleurs : les responsables sont les mêmes !

    Le meilleur moyen pour que la majorité de la population soit active dans la lutte pour la préservation de notre milieu n’est pas de s’attaquer à ceux qui sont déjà victimes et non responsables de la situation. Ce sont ceux qui dirigent l’économie et la production de ce que nous sommes en définitive forcés de consommer qui sont à pointer du doigt et à attaquer de la façon la plus ferme possible.

    La revendication de fermeture des entreprises polluantes doit être liée à celle de la reconversion des entreprises et des travailleurs par le développement des services publics et de la recherche d’énergies alternatives, domaine dans lequel une masse d’emplois peuvent être créés. Là aussi, la revendication des 32 heures est importante.

    6. La lutte pour la sauvegarde de l’environnement n’est pas distincte des autres luttes dans la société !

    Avant même de s’occuper de résoudre les dégâts causés à l’environnement, il faudra procéder à un partage des moyens (c’est-à-dire des richesses) indispensables pour se prémunir des effets des dégâts déjà causés à notre milieu. Nous revendiquons, entre autres, le développement d’un service national de soins de santé afin d’étendre et de permettre la gratuité des soins. La lutte contre les effets de la pollution sur notre corps doit pouvoir se faire indépendamment des moyens financiers de chacun.

    Les moyens existent pour financer cette mesure comme les autres que nous proposons. Si les poches des travailleurs et de leurs familles sont de plus en plus vides, ce n’est pas le cas de celles des patrons, des actionnaires et de leurs amis politiciens. La richesse cumulée des 946 milliardaires à travers le monde qui vivent de l’exploitation est de … 3.500 milliards de dollars (!). En Belgique, Didier Bellens, le patron de Belgacom, touche 2,2 millions d’euros par an, le patron de Dexia touche 1,450 million d’euros, comme le patron de Delhaize (1,4 million). Johnny Thijs, le patron de la Poste, touche lui 800.000 euros… Tout ça sans parler des divers avantages de leurs fonctions, des actions en Bourse,… Chaque année, la fraude fiscale des grandes sociétés en Belgique est estimée à plus de 15 milliards d’euros. La CGSP-Finance l’a même estimée à hauteur de 30 milliards en 2006 ! Ce sont les responsables qui doivent payer, c’est aux riches de débourser !

    Ce constat n’est pas uniquement valable face à la problématique de l’environnement. Il est le même quelque soit le secteur que l’on considère. Dans tous les domaines de notre vie, dès que les capitalistes se sentent assez forts pour reprendre d’une main ce qu’ils ont dû, sous la pression, céder de l’autre, ils le font.

    Le mal est le même, le remède doit l’être aussi. Nous devons en fait lutter contre ceux-là même qui sont responsables de l’exploitation des travailleurs, des attaques contre les acquis durement gagnés par les générations précédentes d’exploités,… L’unité des travailleurs doit être réalisée pour qu’ils puissent s’en prendre là au capitalisme là où il est le plus vulnérable : dans la production elle-même. Ce sont les travailleurs qui créent les richesses, c’est à eux d’en profiter. Nous voulons en finir avec la mainmise du privé sur les secteurs fondamentaux de la production.

    7. Opposer l’internationalisme à l’impérialisme !

    Un rapport récent estime que 1% du PIB mondial durant 50 années suffirait à résoudre le problème du réchauffement climatique. Ce sont des cacahuètes pour la bourgeoisie, mais c’est pourtant déjà de trop. Les capitalistes ne sont pas disposés à laisser de côté leurs bénéfices, même pour une somme aussi infime face aux enjeux en présence. Si la bourgeoisie n’arrive à trouver aucune solution viable, c’est qu’aucun accord n’existe entre des puissances impérialistes qui tentent chacune de protéger leurs multinationales. Les règles du capitalisme étant fondées sur la concurrence internationale et la recherche du profit maximal, les gouvernements sont incapables de contrôler l’économie mondiale et ne peuvent donc agir que de façon restreinte.

    L’impérialisme laisse aussi des traces sur l’environnement, au-delà du fait que les budgets consacrés à l’armement font cruellement défaut ailleurs. Le Vietnam subit ainsi encore aujourd’hui les effets des produits chimiques déversés par l’armée américaine il y a déjà plus de trente années !

    La mondialisation du commerce a engendré la mondialisation du trafic de déchets. L’exportation de produits dangereux est passée de 2 millions de tonnes en 1993 à 8,5 tonnes en 2001, en majorité vers des pays d’Afrique ou d’ex-Union Soviétique où les règles de protection sont inversement proportionnelles à la corruption.

    D’autre part, une véritable politique environnementale ne peut être menée qu’internationalement. Il est évident que la pollution de l’air dans un pays n’a pas des effets que dans ce pays. Un plan énergétique mondial intégré dans un plan général de nationalisation et de planification des secteurs-clés de l’économie doit être élaboré. Tant que les multinationales dirigeront la société, aucune solution à long terme ne pourra être appliquée. Pire, cela pourrait être un prétexte pour stopper le développement d’un pays du monde néo-colonial sous prétexte de préservation de l’environnement. Les travailleurs du monde néo-colonial et ceux des pays capitalistes développés ont les mêmes intérêts et doivent être solidaires, leur lutte est la même et doit se diriger contre tous les capitalistes, quel que soit leur pays.

    8. Pour une société socialiste démocratique basée sur l’épanouissement de chacun

    Aucun des points de ce programme ne peut être réalisé indépendamment des autres, de la même manière que ce programme ne saurait être réalisé dans un seul pays. Mais mettre en oeuvre ce programme signifie impérativement aller vers une société socialiste démocratique qui rompe avec les chaînes du capitalisme.

    Quelques revendications concernant le pétrole :

    Notre programme est plus une méthode qu’une longue succession de points en fonction de cas particuliers. De plus, beaucoup d’entre elle répondent à des problèmes très différents.

    Les revendications qui découlent d’un tel programme sont nombreuses et il s’agit pour nous de les choisir avec soin. En fonction de leur utilité immédiate, bien entendu, mais également en fonction de leur capacité à attirer – explicitement ou implicitement – l’attention sur le fait que toute solution à l’intérieur du capitalisme est à la fois partielle et éphémère. Et, en dernier point, et ce n’est pas le moindre, en fonction de leur capacité à unir dans la lutte l’ensemble des travailleurs face à leurs problèmes.

    L’exemple ci-dessous permet de rendre cela un peu plus concret.

    Le MAS/LSP exige:

    • la ré-affectation des recettes pétrolières par l’Etat dans les secteurs prioritaires tel que l’enseignement, les soins de santé, le logement.
    • l’abolition de la TVA sur le mazout et sur les autres sources de chauffage
    • le gel immédiat des prix
    • le retour du carburant dans l’index
    • la nationalisation des multinationales pétrolières sous contrôle des travailleurs, ce qui permettrait aussi de mettre la main sur tous les brevets d’énergies alternatives accaparés par les multinationales.

    Si toute activité humaine produit des déchets, toutes les façons d’organiser cette activité ne sont pas égales en termes de pollution. Le capitalisme, à cause de la recherche immédiate de profit maximum pour une minorité au détriment des besoins de tous, est un système dont la production est véritablement chaotique avec un rendement très faible. Une économie planifiée de façon démocratique aurait pour but de satisfaire les besoins de la population et intégrerait donc une politique de préservation de l’environnement, puisqu’il s’agit d’une question vitale pour l’humanité.

    Pour la première fois dans l’histoire, un développement des forces productives peut aujourd’hui être planifié en tenant compte des capacités de la planète et des ressources en matières premières. Ce développement harmonieux entre l’homme et la nature est indispensable pour éradiquer la pauvreté et maintenir la paix mondiale.

    Puisque le socialisme ne peut émerger qu’à partir du capitalisme, comme le résultat d’une lutte victorieuse des travailleurs contre celui-ci, les mesures spécifiques qui seront prises par le gouvernement socialiste dépendront des conditions économiques, sociales et politiques de ce moment-là. De la même manière que nous ne pouvons prévoir la date de la révolution, nous ne pouvons pas prévoir de manière précise et détaillée quelles en seront les conditions. Le socialisme n’est pas un modèle de société « clé sur porte » à appliquer dès que le capitalisme sera détruit mais un processus historique qui ne fait que commencer avec la destruction de l’ancien système.

    La libération des forces créatrices du monde du travail, aujourd’hui complètement aliénées, opprimées ou soumises à la logique de profit conduira à un développement sans précédent de la société humaine. Chaque période révolutionnaire de l’histoire qui a vu une classe se libérer du joug d’une autre classe s’est aussi manifestée par une révolution sur le plan de la créativité et de l’inventivité dans les mœurs, les arts, la culture et la science. L’exemple de la Russie soviétique, avant la prise du pouvoir par la bureaucratie à la fin des années ’20, est très révélateur de ce processus, alors même que le pays sortait épuisé de la première guerre mondiale et d’une guerre civile. Le nouveau pouvoir des Soviets a ouvert le droit à l’avortement et à la contraception, facilité le divorce, créé des centaines de crèches. L’enseignement gratuit a été instauré. Une effervescence artistique sans précédent s’est développée (pensons au futurisme russe et en particulier à Vladimir Maïakovsky, tandis qu’en France les surréalistes embrasseront les idéaux socialistes avant de se détourner, avec raison, du stalinisme).

    L’histoire de la Révolution russe, entre autres, permet d’ailleurs de donner des éléments de réponse à la question : une fois au pouvoir, le mouvement ouvrier ne va-t-il pas lui aussi développer une couche de fonctionnaires et de bureaucrates désireuse avant tout se remplir les poches ?

    Dans la Russie de 1917, ouvriers, soldats et paysans ont constitué des milliers et des milliers de comités élus démocratiquement dans les entreprises, les quartiers, les casernes ou encore les villages. Ces élus étaient à tout moment révocables et ne pouvaient pas gagner un traitement plus élevé que le salaire moyen d’un travailleur (il s’agit d’un principe que notre organisation internationale, le Comité pour une Internationale Ouvrière, met en pratique pour chacun de ses membres élu à quelque niveau que ce soit). Les premiers à avoir été privilégiés ont été les spécialistes (scientifiques, ingénieurs, …) pour éviter la « fuite des cerveaux » face à la pénurie imposée par la guerre civile et les interventions des puissances impérialistes au cours des années qui ont suivi la Révolution. Mais ces spécialistes étaient placés sous le contrôle politique des travailleurs et les délégués élus par la population exerçaient eux-mêmes les fonctions législatives et exécutives dans les conseils (les soviets). Hélas, l’isolement de la Révolution dans le pays arriéré qu’était la Russie suite aux échecs des révolutions en Allemagne et en Hongrie, la guerre civile, les pénuries que celle-ci imposa aux masses, l’épuisement des ouvriers et des paysans après 4 années de guerre mondiale et 3 années de guerre civile, la disparition de milliers de militants ouvriers politiquement conscients partis défendre les armes à la main les acquis de la Révolution d’Octobre,… tout cela a ouvert la voie à une caste de fonctionnaires qui a dans les faits définitivement pris le pouvoir des mains des travailleurs à la fin des années ‘20. Les privilèges de cette caste ont été préservés par la répression, l’envoi en exil, la déportation ou l’exécution pure et simple des vieux militants bolcheviks ainsi que par la falsification historique (les photos retravaillées par les hommes de main de Staline pour effacer les « traîtres » sont célèbres).

    Aujourd’hui, les risques d’une évolution similaire sont plus réduits. Tout d’abord, l’exemple de ce qui s’est passé en URSS reste vivace. Le meilleur hommage que nous puissions rendre à tous ceux qui ont eu à vivre sous la botte de Staline et de ses successeurs – qui, s’ils ont renié Staline, n’ont en rien renié le système bureaucratique qu’il a incarné – c’est de tirer des leçons correctes et de ne pas jeter l’enfant (le socialisme) avec l’eau du bain (le stalinisme).

    Ensuite, aujourd’hui, les économies nationales sont tellement liées entre elles au sein d’une véritable économie mondiale et les moyens de communication si développés qu’un pays qui briserait les chaînes qui le lient au capitalisme aurait un impact très rapidement jusqu’à l’autre bout de la terre. Rompre l’isolement d’un pays en révolution – ce qui est crucial pour la survie et le développement d’une expérience socialiste – sera certainement beaucoup plus aisé au 21e siècle qu’en 1917. Aujourd’hui, tous les pays comprennent une proportion bien plus grande de personnes sachant lire, écrire, calculer… qu’en Russie en 1917. La population urbaine est majoritaire à l’échelle mondiale, le nombre de salariés est sans commune mesure avec la faible minorité que représentaient les ouvriers en Russie. Tout cela augmente d’autant les capacités des masses à réellement participer et à contrôler la construction de la nouvelle société.

    Toutefois, le risque d’une bureaucratisation est toujours bien présent. La meilleure manière d’éviter que l’histoire ne se répète, c’est de préparer dès aujourd’hui les remèdes. Cela passe par le développement d’une culture de démocratie, de débat et de libre critique dans les luttes et au sein des mouvements sociaux et des organisations politiques où chacun peut être intégré et participer activement aux prises de décisions. D’autre part, cela signifie également de construire, tant sur les plans national qu’international, un parti révolutionnaire assez fort pour que la construction de la société à venir puisse s’effectuer dans les meilleurs conditions. Cependant, l’efficacité du parti révolutionnaire est indissolublement liée à l’auto-organisation des masses et à une culture généralisée de libre débat.


    VI) Pour être vert, sois rouge !

    Beaucoup de jeunes, et d’ailleurs pas uniquement eux, pensent qu’un tel parti révolutionnaire n’est pas nécessaire. Ils estiment que le caractère oppresseur du pouvoir est inhérent à tout parti. Nous pensons au contraire que cet aspect oppresseur est lié au caractère d’un parti bourgeois dans un environnement capitaliste. Le type de parti que nous proposons et construisons avec le MAS/LSP et le Comité pour une Internationale Ouvrière n’a rien à voir avec les appareils antidémocratiques bourgeois ou staliniens.

    La méfiance éprouvée face aux partis est tout à fait compréhensible mais la question de la création d’un parti révolutionnaire est cruciale, tant du point de vue des luttes quotidiennes que du point de vue de la révolution à venir.

    L’ennemi que nous avons à affronter, la bourgeoisie, est extrêmement organisé et centralisé. Pour le battre, nos forces doivent elles aussi être organisées le plus efficacement possible : l’organisation et l’unité dans la lutte sont nos armes les plus puissantes. Individuellement, chacun de notre côté, nous ne pouvons qu’être broyés par la force de la machine d’Etat capitaliste ou par celle du patronat (dans les entreprises,…).

    Ensuite, la conscience politique des masses se développe de façon inégale : alors que leur expérience concrète démontre à de nombreux travailleurs ou jeunes qu’il existe une loi pour les riches et une autre pour les faibles, ils sont aussi sous l’influence des médias bourgeois, de l’enseignement prodigué par l’Etat capitaliste ou de la religion. En temps normaux, une petite minorité seulement lutte de façon systématique et cohérente contre le capitalisme et son idéologie. Mais, durant des périodes de lutte plus intenses, la conscience des masses évolue par bonds et peut très vite tirer des conclusions révolutionnaires.

    Il est essentiel qu’existe une organisation politique se basant sur la minorité consciente politiquement pour conduire la lutte pour les idées révolutionnaires au sein du mouvement dans son ensemble : dans les syndicats ou les différents mouvements de contestation qui peuvent se développer, y compris sur base de la question environnementale.

    En s’investissant dans les luttes quotidiennes des travailleurs, en adoptant des positions révolutionnaires capables de repousser les carriéristes, en refusant tout privilège dans ses rangs, en combinant la démocratie et les débats sur sa politique et sa direction, en étant uni dans l’action avec la participation active de sa direction dans le travail militant, une organisation révolutionnaire peut se protéger des pressions qu’elle subira au sein du capitalisme et qui risqueraient de la transformer en un organe anti-démocratique et inutile pour l’émancipation de l’humanité.

    Les possibilités pour la construction d’une alternative socialiste peuvent croître dans la prochaine période avec une ouverture plus grande pour des critiques anticapitalistes, notamment à cause de la crise environnementale. Par un patient travail d’intervention et de construction de nos organisations partout à travers le monde, nous voulons renforcer et saisir ce potentiel afin de libérer l’homme et la nature de l’emprise du capitalisme.

    Mais pourquoi s’attacher à cette idée de révolution ?


    VII) Quelles méthodes de lutte utiliser ?

    Nombreux sont ceux qui préfèrent, au nom du réalisme, chercher à adapter le système actuel plutôt que de vouloir le renverser. Cet objectif – qui est celui d’organisations comme Greenpeace, OXFAM, ATTAC et autres ONG ne nous semble justement pas réaliste parce que le capitalisme, comme nous l’avons vu, est un système prédateur et indomesticable. Une partie des militants écologistes ont choisi la voie politique et parlementaire, comme le parti ECOLO. Mais à force de vouloir être « présentable » pour les autres partis, les concessions ont suivi les unes après les autres. Dans une interview accordée au quotidien Le Soir à la mi-octobre, Isabelle Durant et Jean-Michel Javaux (qui sont tous les deux au pouvoir dans leur commune ave le MR…) ont déclaré qu’ils refusent désormais de se positionner sur un axe gauche-droite déclarant qu’« ECOLO est ancré dans les valeurs progressistes mais est autonome et se rend aux élections les mains libres en terme de coalitions ». Pour certain, il s’agit de pragmatisme, pour nous, d’une adaptation logique à un système réfractaire à tout changement significatif. Il est vrai que des acquis ont pu être obtenus dans le passé au sein du capitalisme, mais pas à n’importe quelles conditions.

    Pour forcer les capitalistes à lâcher du lest, il a fallu des luttes, des mobilisations massives et souvent du sang suite à la répression. Et encore cela s’est surtout produit dans des périodes de forte croissance économique. La majorité de nos acquis sociaux provient des vingt années qui ont précédé la première guerre mondiale (époque marquée par le pillage des colonies) et des « trente glorieuses » qui ont suivi le gigantesque massacre de la seconde guerre mondiale. Que sont devenus nos acquis aujourd’hui ? Ils se réduisent inlassablement et il en sera ainsi tant que les travailleurs ne partiront pas résolument à l’offensive.

    Mais la marge pour que la bourgeoisie concède des concessions similaires est actuellement réduite. De l’aveu même du Fonds Monétaire International, nous sommes au début d’une crise mondiale qui sera lourde de conséquences. Ce qui vaut pour nos acquis sociaux vaut également pour la protection de l’environnement.

    Une période de crise pousse à de nouvelles aventures guerrières, c’est-à-dire la continuation de la guerre par d’autres moyens. Tant que ce système pourri ne sera pas renversé par les travailleurs, cette menace subsistera.

    Le simple fait de travailler dans une usine ou un bureau ne rend personne plus noble. Mais le processus capitaliste de production, de distribution et de communication dépend de A à Z des travailleurs. Sans eux, rien ne fonctionnerait. La position économique et sociale centrale qu’occupent les travailleurs dans la production, leur organisation collective imposée par le capitalisme dans la production mais aussi librement construite dans les luttes syndicales et politiques leur donne le potentiel d’en finir avec le capitalisme et de construire une nouvelle société. De là vient la stratégie d’essayer de gagner la majorité des travailleurs à un programme socialiste. Seule une majorité consciente de la classe des travailleurs est capable de mener une transformation socialiste de la société. Les actions isolées et de type « terroriste » destinées à « éveiller » les travailleurs ne sont que des aveux d’impuissance et de manque de confiance envers les capacités des masses à tirer des conclusions révolutionnaires.

    Les travailleurs ont déjà démontré à plusieurs reprises la force qui était la leur : en Russie en 1917 bien sûr, mais aussi en Chine (particulièrement à la fin des années ’20), en Espagne durant la révolution de 1936, à la Libération dans de nombreux pays, en Allemagne de l’Est en 1953, en Hongrie et en Pologne en 1956, en France, en mai ‘68, au Chili, en 1970-1973, au Portugal, en 1974-1975, en Iran en 1979, en Pologne en 1980,… et en Amérique Latine aujourd’hui (au Venezuela, en Bolivie, …).

    La jeunesse a elle aussi un rôle particulier dans la société. Parce qu’elle est depuis moins de temps sous l’influence de l’idéologie dominante (qui, dit-on, « assagit ») et parce qu’elle subit moins fortement le poids des défaites passées, la jeunesse est très souvent la première à se lever contre le système quand arrive une crise. Mais il lui faut absolument être rejointe par les travailleurs sous peine de voir son énergie et sa volonté de changement s’épuiser sans résultat durable. La moyenne d’âge au sein du parti bolchevik avant 1917 était de 16 ans, mais la révolution ne se serait pas déroulée si les bolcheviks n’avaient pas su se lier à la masse des travailleurs et des paysans.

    L’une des principales critiques à porter au mouvement contre la mondialisation est justement d’être passé à côté de ce lien, ce qui explique dans une large mesure pourquoi ce mouvement s’est fortement affaibli. Le dernier G8, cet été en Allemagne, a illustré cette importante lacune. Durant ce G8 s’est déroulée une importante grève dans le secteur des Telecom mais, hélas, aucune liaison n’a été tentée entre les militants anti-G8 et les grévistes alors qu’il s’agissait là d’un important moyen pour perturber la réunion du G8.

    De même, en août de cette année, des écologistes ont organisé pendant une semaine un « climate action camp » à l’aéroport londonien de Heathrow pour protester contre l’élargissement annoncé de cet aéroport. Un grand point positif a été la coopération réussie entre les militants écologistes et la population locale concernée. Cela a donné aux activistes la possibilité de discuter de leurs idées avec les habitants et a aussi donné un caractère plus large et plus représentatif à la manifestation, ce qui a laissé moins de latitude aux médias – et aux policiers – pour isoler les actions. En revanche, il a régné parmi les militants une grande confusion vis-à-vis des méthodes politiques à employer et les revendications mises en avant étaient à la fois limitées et vagues. Aucun lien clair n’a été établi avec la responsabilité du capitalisme dans ce problème et tout dialogue avec le syndicat des pilotes a été rejeté.

    De par le fait qu’elle n’est pas dans son entièreté liée au monde du travail (en étant toujours aux études, à la charge de leurs parents, au chômage,…), certaines couches de la jeunesse – de par la confusion idéologique qui règne – peuvent développer des positions qui passent à côté du fond du problème qu’est la structure capitaliste. Ainsi, dénoncer les OGM ou les produits chimiques n’est pas le point fondamental. De même qu’un couteau n’est pas mauvais en soi, mais dépend de l’utilisation que l’on en fait, ce qu’il faut à notre sens dénoncer, c’est la manière dont le capitalisme pervertit toute innovation technologique. En France, les conséquences de la rigueur exceptionnelle de l’hiver 1788/89 ont été l’un des éléments qui a poussé la population à se révolter contre le régime féodal. Aujourd’hui, il en va de même. La crise environnementale va pousser de plus de gens à se poser des questions sur le système responsable de ce gâchis qui menace l’avenir de l’humanité. Mais le manque de clarté sur les possibilités d’une alternative au système peut freiner le développement d’une résistance active et des mouvements de lutte.

    Regardons le présent tel qu’il est, il n’est pas fait que de désastres, de catastrophes ou encore d’extinctions d’espèces. Il porte en germe un futur débarrassé de l’exploitation : un avenir réellement socialiste, une société harmonieuse où le bien-être des producteurs, des consommateurs et de leur environnement sera la priorité. Luttons dès aujourd’hui pour ne pas avoir à regretter demain d’avoir trop tardé.

    Depuis quand les marxistes ont-ils quelque chose à dire à ce sujet ?

    Notre analyse de la crise écologique, notre programme pour y faire face et les méthodes pour réaliser celui-ci trouvent leur origine dans les théories de Marx et d’Engels (développées par la suite par Lénine, Rosa Luxembourg, Trotsky et bien d’autres encore). Toutefois, beaucoup de gens pensent qu’il n’y a que peu de temps que les marxistes s’occupent de l’environnement et qu’à l’instar des gouvernements bourgeois, ils ne s’y intéressent que parce qu’ils y sont poussés par l’intérêt de la population pour ce questions. Pourtant, Marx et Engels avaient déjà développé des positions écologistes bien avant que la pollution et ses dégâts ne deviennent un débat de société.

    Marx et Engels, les auteurs du Manifeste du Parti Communiste (1848), ont refusé de se laisser enfermer dans de fausses idées comme celle d’opposer l’écologie à la technique ou de dire que le combat environnemental dépasse les clivages politiques. Friedrich Engels disait par exemple : « qu’il s’agisse de la nature ou de la société, le mode de production actuel tient uniquement compte du résultat immédiat manifeste ». Pour eux, c’est l’industrie capitaliste, et non l’industrie en général, qui est le véritable virus à la base de la dégradation de l’environnement. Les intérêts à court terme de la minorité qui possède les moyens de production et contrôle la société vont à l’encontre de ceux de l’humanité, avec des conséquences évidentes pour le respect du milieu de vie.

    En prenant l’exemple de l’agriculture, Marx déclarait par exemple, bien avant l’utilisation massive des pesticides : « Tout l’esprit de la production capitaliste, axée sur le gain d’argent immédiat, est en contradiction avec l’agriculture, qui doit desservir l’ensemble des besoins permanents des générations humaines qui se chevauchent». Et il précisait : « Chaque progrès de l’agriculture capitaliste représente un progrès non seulement dans l’art de dépouiller le travailleur, mais dans celui d’appauvrir la terre ; toute amélioration temporaire de la fertilité des sols rapproche des conditions d’une ruine des sources durables de cette fertilité ».

    Engels, dans son ouvrage La dialectique de la nature, allait dans le même sens : « Nous ne dominons nullement la nature à l’instar du conquérant d’un peuple étranger, comme si nous étions placés en-dehors de la nature (…) toute la souveraineté que nous exerçons sur elle se résume à la connaissance de ses lois et à leur juste application, qui sont notre seule supériorité sur toutes les autres créatures. En effet, chaque jour, nous apprenons à mieux pénétrer ses lois et à reconnaître les effets plus ou moins lointains de nos interventions (…). » Il avertit cependant qu’arriver à une solution « exige de nous autre chose qu’une simple connaissance », et « nécessite le bouleversement total de notre production, y compris l’ordre social actuel dans son ensemble (…) Le profit obtenu par la vente est le seul et unique mobile du capitaliste (…) ce qui advient ultérieurement de la marchandise et de son acquéreur est le dernier de ses soucis. Il en va de même quand il s’agit des effets naturels de ces agissements».

    Tous deux ont finalement démontré que la société industrielle et la nature ne sont pas incompatibles. Mais la production industrielle doit être organisée de manière consciente, planifiée dans les intérêts de tous et avec la participation de tous, afin d’éliminer les gaspillages et la logique de profit à court terme qui définit notre société actuelle. C’est cette dernière qu’il faut changer de fond en comble, radicalement. Toute position intermédiaire ne saurait être que l’équivalent d’une aspirine donnée à un cancéreux.

    URSS et Chine « populaire »

    Bien évidemment, quant on met en avant comme solution de détruire le capitalisme pour résoudre, entre autres, les problèmes environnementaux, un simple regard porté sur la pollution qui sévit en ex-Union Soviétique ou en Chine ne pousse pas à aller plus avant sur cette voie. Actuellement, un cinquième de la population russe vit dans une région tellement sinistrée écologiquement qu’elle est un danger pour la santé. Cas unique au monde, la centrale nucléaire de Krasnoïarsk refroidissait ses réacteurs directement avec l’eau du fleuve qui coule à proximité et elle y était ensuite reversée sans aucun traitement. De même, les pluies acides couvrent un tiers du territoire chinois et un rapport officiel a évalué les pertes économiques liées à la pollution à 3% du PIB de la Chine en 2004. Des analystes indépendants estiment que la réalité est plus proche des 10%. Dans le même pays, on dénombre au minimum 750.000 morts prématurées liées à la dégradation de l’environnement. L’exemple de l’usine pétrochimique de Jilin a, en 2005, illustré le respect qu’éprouvent les dirigeants d’entreprises envers l’environnement et la population : elle a déversé dans le fleuve Songhua des centaines de tonnes de produits hautement cancérigènes.

    Pour nous, le « socialisme » qui y a été appliqué n’a finalement été qu’une caricature sanglante caractérisée notamment par un productivisme à outrance. Pour fonctionner, une économie planifiée a besoin de démocratie comme un corps a besoin d’oxygène. En ce sens, le règne dictatorial de la bureaucratie dans ces pays n’a pas eu uniquement comme conséquence les déportations et la répression : les dégâts causés à l’environnement devront encore être supportés par de nombreuses générations.

    Quand les Etats staliniens se sont effondrés, le désastre écologique (Tchernobyl,…) des pays de l’Est a été pointé du doigt. Mais tant le passage de l’ex-URSS à l’économie capitaliste que la transition sur la même voie qui se déroule actuellement en Chine n’ont en rien atténué cette situation. Bien au contraire.
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  • Mobilisation contre le changement climatique en Australie

    Le dimanche 11 novembre, pas moins de 150.000 personnes ont participé à des actions dans une cinquantaine de villes aus-traliennes autour de la revendication d’une diminution des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 30% d’ici 2020.

    L’Australie, qui est le deuxième plus grand émetteur de GES par habitant au monde, avait refusé de signer le Protocole de Kyoto, pourtant largement insuffisant. Dans ce domaine comme dans ceux de la guerre, des attaques sociales ou encore des diminutions de charges pour les entreprises, le gouvernement libéral australien a suivi servilement les positions de l’administration américaine.

    Cette large mobilisation contre les changements climatiques s’est déroulée dans le cadre de la campagne électorale qui a abouti, ce 24 novembre, à la victoire des travaillistes après plus de 10 années où les libéraux ont été au pouvoir.

    Ainsi, les revendications environnementales ont pu se joindre au mécontentement général contre la politique de l’ancien premier ministre John Howard et profiter de la contestation croissante contre les mesures d’austérité.

    Cette jonction favorisée par l’arrivée des élections doit se poursuivre et être un exemple. Néanmoins, il ne faut pas se faire d’illusion, tant au sujet de l’environnement que des conditions de travail et de vie des Australiens, les travaillistes ne remettent pas en cause la recherche effrénée de profit des entreprises.

  • La Poste : vagues de grèves

    Le patron veut fixer le rythme des départs entre 1.000 et 1.500 emplois par an

    La direction de La Poste a annoncé fin octobre comment l’entreprise allait se préparer à la « libéralisation » totale du marché des produits postaux en 2011. Ces projets de changement, qui sont déjà en cours depuis 2003, n’ont pas amélioré la prestation de service, le rôle social et les conditions de travail du personnel postal. Bien au contraire !

    Par un correspondant

    Depuis l’installation de Johnny Thijs à la tête de La Poste en janvier 2002, secondé par Bernard Delvaux depuis janvier 2004 (Delvaux était auparavant responsable du plan de reconversion BEST à Belgacom qui a coûté 5.000 emplois), les « réformes » ont atteint leur vitesse de croisière.

    Pour la période 2008-2012, la direction prévoit pour Retail (ventes) :

    • 650 bureaux de poste et 650 points-postes. Cela signifie qu’il faudra encore fermer 650 bureaux ! Et dire que Thijs trouve que seuls 300 bureaux sont rentables…
    • La mise en commun de Kilopost et Taxipost pour les paquets et les express
    • Une nouvelle hausse de tarif dès le 4 février : les timbres prior coûteront désormais 0,54 euro

    Le réseau logistique de Mail (distribution) sera « optimalisé ». Les bureaux distributeurs actuels seront transformés en :

    • 150 plate-formes opérationnelles où on prépare les opérations de distribution et d’où partent les tournées qui comprennent des opérations complexes. On entend par opérations complexes les pensions, les envois recommandés, les envois contre remboursement, …
    • 1.500 dépôts de distribution d’où on organisera les opérations de distribution simples (les ENA : envois non-adressés)

    Les 5 nouveaux centres de tri trieront de plus en plus le courrier selon le principe du tri par tournée. Le travail de préparation des facteurs s’en trouvera diminué. Le temps libéré ne servira pas à diminuer la pression du travail, mais à lancer une nouvelle attaque contre les facteurs. Ils devraient être remplacés par des distributeurs de courrier qui travailleraient avec un salaire (encore) plus bas et avec moins d’avantages sociaux. Johnny Thijs a d’abord reproché à la concurrence de ne s’intéresser qu’aux segments rentables du marché postal en faisant du bradage social avec l’utilisation de travailleurs très bon marché. La Poste fait exactement la même chose. Quelle hypocrisie !

    Le tri par tournée ne fait pas que diminuer le travail préparatoire, il aura aussi des conséquences pour les services de nuit. Ils devraient commencer à fonctionner à une heure antisociale (0h05, 3h, 4h) avec perte partielle de la prime de nuit. En outre, ce sont des heures auxquelles on ne peut pas compter sur les transports en commun pour rejoindre son lieu de travail. Ces propositions ont déjà provoqué des grèves dans les services de nuit à Bruxelles : surtout à Bruxelles 1 (centre-ville), mais aussi à Bruxelles 2 (Laeken), Bruxelles 3 (Schaerbeek), Bruxelles 4 (Etterbeek), Bruxelles 7 (Anderlecht), Bruxelles 8 (Ganshoren, Berchem-Sainte-Agathe, Koekelberg) et Bruxelles 21 (Saint-Josse-Ten-Noode). Il y a eu aussi des mouvements de grève à Anvers, Schilde, Nijlen, Liège X, …

    La dernière campagne publicitaire de La Poste interpelle ainsi le public : « Qui d’autre ? ». Nous nous posons la question : qui d’autre que le personnel est victime de l’énième restructuration ? On impose des économies sous prétexte d’une baisse du volume de courrier. Si le courrier entre particuliers diminue bel et bien, le volume global de courrier n’en augmente pas moins à cause du marketing direct et des envois internationaux. Le premier semestre de 2007, le chiffre d’affaire était de 1.137 euros (+ 4%).

    L’administrateur-délégué Thijs connaît d’autant bien ces chiffres qu’ils lui ont valu une prime de 100.000 euros. Tandis qu’il empochait cette prime, il annonçait déjà qu’il voulait voir le personnel de La Poste baisser de 1.000 à 1.500 unités par an dans les années à venir. De plus, ils vont économiser sur les salaires en engageant des distributeurs de courrier. Et nous pouvons gager que la prime de fin d’année des simples postiers n’arrivera pas à la cheville de celle de Thijs.

  • Venezuela. Chavez a perdu le référendum sur les réformes constitutionnelles.

    Au Venezuela, le référendum constitutionnel auquel avait appelé Hugo Chavez ce 2 décembre s’est malheureusement et tragiquement soldé par une défaite. Pour la première fois en neuf années, Chavez a perdu une élection. L’opposition de droite tentera de s’approprier cette victoire, qui va l’encourager et la renforcer. Cette défaite pour Chavez est un avertissement concernant la menace de la contre-révolution.

    Karl Debbaut, Comité pour une Internationale Ouvrière, Londres

    Le résultat est que 50.7% des participants ont voté « Non » aux changements proposés, tandis que 49.2% y étaient favorables. Le taux d’abstention a été de 44%. Par rapport aux dernières élections, les présidentielles de décembre 2006, Chavez a perdu 3 millions de voix en convainquant 4 millions de personnes du « Oui ». Il s’agit là d’un nombre de voix inférieur aux 5 millions d’adhérents revendiqué par le PSUV (Parti Socialiste Unifié du Venezela) créé cette année pour rassembler l’ensemble des partis politiques membres de la majorité présidentielle ! La droite, par contre, a gagné 300.000 voix en comparaison de l’élection de décembre 2007.

    Contradictions

    Ce résultat est un recul pour le gouvernement vénézuélien et son projet de « socialisme du 21ème siècle ». Chavez a proposé 69 changements à la Constitution adoptée lors du référendum de 1999. Les changements les plus importants proposés étaient la suppression de la limite concernant la réélection du président, l’instauration de la journée de 6 heures et la reconnaissance des conseils ouvriers et des conseils communaux. La nouvelle Constitution aurait également renommé le Venezuela comme « République Socialiste Bolivarienne ». La raison fondamentale de cette défaite réside dans les contradictions et les faiblesses du programme et des méthodes du gouvernement et de la direction du mouvement. En dépit des importantes réformes progressistes dont ont bénéficié les sections les plus pauvres de la société, le capitalisme subsiste avec des problèmes sociaux désespérés et une bureaucratie grandissante.

    La situation sociale au Venezuela fourmille de contradictions. L’économie vénézuélienne est en plein boom, mais ce sont principalement l’élite dirigeante et la classe moyenne qui en profitent. En même temps, le gouvernement, tout en introduisant des réformes sociales qui ont bénéficié aux couches les plus pauvres, n’a pas pu réduire significativement la pauvreté ou le crime. Le fossé entre riches et pauvres persiste et la situation dans les régions les plus pauvres de Caracas s’est même détériorée. En 2006, Caracas était victime de 5 meurtres par jour. En novembre passé, ce taux était passé en moyenne à 11 meurtres par jour, majoritairement dans les quartiers pauvres. Tandis que les riche et la classe moyenne peut s’offrir le dernier cri de la technologie et manger dans les restaurants les plus fins, la plupart des gens souffre de la pénurie de nourriture causée par les grands producteurs et distributeurs de nourriture.

    Les récents sondages d’opinion ont indiqué que 75% de la population a eu à souffrir de cette pénurie. Il arrive fréquemment que le lait, le riz, les haricots et d’autres produits alimentaires de base soient indisponibles dans les supermarchés soutenus par l’Etat. Le gouvernement a été incapable de résoudre ce problème. Il n’a pas pris des mesures pour exproprier ceux qui sabotent l’économie et le plan de production de nourriture. Au lieu de cela, il a augmenté la dépendance du Venezuelas des importations, ce qui a affecté l’opinion publique. Le mois dernier, un sondage a révélé que 75% des Vénézuéliens pense que la pénurie de denrées alimentaires est due aux employeurs, qui essayent de cette façon de saboter le gouvernement. La semaine dernière, avant le référendum, le même sondage a établi que la plupart des Vénézuéliens critique le manque d’efficacité et la corruption du gouvernement. La frustration et la colère contre les conditions sociales et la bureaucratie gouvernementale croissante s’est notamment exprimée par une faible participation au référendum de la part des couches les plus pauvres de la population. La mobilisation et la participation des riches et de la classe moyenne des districts de l’est de Caracas a par contre été conséquente.

    L’économie vénézuélienne est dominée par cinq grandes familles oligarchiques (Cisnero, Mendoza, Caprile, Boulton, et Phelps) qui contrôlent notamment la production de nourriture. Il ne peut y avoir aucune solution durable à la crise créée par capitalisme aussi longtemps que ces familles resteront aux commandes de l’économie. Un gouvernement socialiste nationaliserait leurs industries sous le contrôle des travailleurs. Mais jusqu’ici, le gouvernement ne s’est pas préparé à le faire. L’opposition pro-impérialiste cherchera à utiliser le résultat du référendum pour déstabiliser plus encore le Venezuela et pour revenir sur les réformes en faveur des pauvres du gouvernement Chavez et sur l’idée de socialisme. Cela n’aura pas seulement un effet au Venezuela, mais également très probablement sur les gouvernements réformistes de Bolivie et d’Equateur. Cuba a averti la semaine dernière qu’une défaite de Chavez dans le référendum pourrait avoir des répercussions sur l’île. Selon le journal espagnol El Pais, Cuba reçoit 7 milliards de dollars d’aide de la part du Venezuela.

    Opposition renforcée et crise politique pour les partis pro-Chavez

    Après les élections présidentielles de décembre 2006, le gouvernement Chavez a opéré un tournant vers la gauche, en renforçant le message du socialisme et en nationalisant la compagnie de télécommunication CANTV et la compagnie d’électricité « Electricidad De Caracas ». Chavez a également parlé de Trotsky et de sa théorie de la « révolution permanente ». Nous avons applaudi à ces étapes, mais avons précisé que pour que ces nationalisations aient réellement un effet, il était nécessaire de placer les secteurs principaux de l’économie sous le contrôle des travailleurs et de commencer à établir démocratiquement un plan de production. Cela ne s’est pas produit.

    Au contraire, le processus de décision « du haut vers le bas » et l’approche administrative et bureaucratique continue de caractériser l’administration Chavez. Les nationalisations et l’introduction de la cogestion dans quelques usines sont un exemple de cette approche. Alors que les travailleurs ont pu pour la première fois donner leur avis sur la manière dont leur entreprise est dirigée, le gouvernement a tenter de garder le contrôle de ce processus en nommant la majorité des directeurs. A chaque fois qu’un conflit s’est développé entre des syndicalistes indépendants de l’UNT et des ministres du gouvernement ou la bureaucratie, le gouvernement a imposé sa volonté. Chavez a menacé ces syndicalistes en disant qu’il n’était pas en faveur de l’indépendance des syndicats et qu’ils devraient tous rejoindre le nouveau parti, le PSUV.

    Chavez a déclaré à plusieurs reprises que le PSUV doit être construit comme une organisation démocratique, c’est-à-dire construit et contrôlé par la base. Cependant, il a continué à insister sur le fait que les partis de la coalition pro-Chavez devraient se dissoudre et rejoindre le PSUV. Les partis qui ont refusé de se plier à ce mot d’ordre ont été isolés et parfois qualifiés de pro-opposition, même quand ce n’était clairement pas le cas, comme avec le Parti Communiste du Venezuela. Maintenant que des sections locales ont été installées et que les délégués ont été élus pour la conférence de fondation, il est clair que cette conférence sera contrôlée du dessus par les politiciens venus des autres partis pro-Chavez.

    Cette approche de haut en bas est un avantage pour l’opposition, qui affirme que Chavez veut installer un régime de parti unique suivant le modèle cubain. Ces accusations ont commencé à recevoir un écho plus large en raison de la bureaucratisation et de la corruption de l’entourage de Chavez et des craintes de l’imposition d’une « dictature rampante ».

    D’autres actions, comme le retrait de la licence de RCTV (une station de télévision pro-opposition qui avait notamment joué un rôle lors du coup d’Etat contre Chavez en 2002), ont également été des éléments sur lesquels l’opposition a pu jouer en lui permettant d’augmenter les craintes de la classe moyenne et d’autres personnes envers la menace d’atteintes à la démocratie et aux droits démocratiques. « L’affaire RCTV » a été une opportunité utilisée par l’opposition pour se regrouper et se réorganiser. Le Comité pour une Internationale Ouvrière (parti révolutionnaire international auquel le MAS/LSP est affilié, NDLR) avait averti de ce danger dans un article « RCTV et la question des médias » en juillet 2007.

    Et maintenant?

    Le résultat du référendum est un coup pour le gouvernement Chavez. Ce n’est toutefois pas une défaite décisive et cela ne signifie pas que l’opposition pro-USA va pouvoir prendre les commandes du pays ou renverser immédiatement le gouvernement. Mais les conséquences peuvent être que Chavez va se déplacer vers la droite en renforçant la contre-révolution. Mais si la droite tente d’aller à l’offensive, cela pourrait provoquer une confrontation durant laquelle les masses pourraient conduire le mouvement encore plus loin vers la gauche.

    La défaite lors de ce référendum va renforcer et encourager la droite contre-révolutionnaire, c’est un avertissement sérieux à la classe ouvrière et aux masses. Des mesures d’urgence doivent être prises. Une campagne décisive contre la bureaucratie doit être lancée. Le syndicat doit prendre la direction en établissant des comités démocratiquement élus dans les lieux de travail et les quartiers pour mettre en avant les revendications des travailleurs et appuyer la campagne contre la bureaucratie. Ces comités pourraient commencer à organiser une force contre les institutions d’Etat corrompues en établissant un véritable système de contrôle des travailleurs dans les entreprises. La classe ouvrière doit pousser ses propres exigences de manière indépendante et établir ses propres organisations capables de défendre les travailleurs et les réformes du gouvernement.

    Il ne peut y avoir aucun socialisme sans nationalisation des secteurs-clés de l’économie et sans que l’économie ne soit sous le contrôle direct des travailleurs. Il ne peut y avoir aucun socialisme sans démocratie des travailleurs. Ce récent recul subi par Chavez illustre que c’est à la classe ouvrière et à ses organisations de jouer le rôle central dans la lutte pour défaire la réaction et instaurer le socialisme.

  • Gouvernement. Faites vos jeux, rien ne va plus !

    174 jours après les élections, Yves Leterme a dû pour la deuxième fois donner sa démission comme formateur. Son parti avait mené une campagne électorale basée sur le communautaire et reposant sur un cartel avec le petit parti de droite nationaliste N-VA. Il en paie maintenant le prix.

    Anja Deschoemacker

    Chrétiens et libéraux flamands rejetent la responsabilité de l’échec sur le CDH qui refuse toute avancée vers une nouvelle réforme d’Etat tandis que, du côté francophone, on pointe du doigt les revendications jugées inacceptables de la N-VA. Si Leterme semble hors service pour un bout de temps, d’autres se sentent pousser des ailes, en premier lieu Reynders. Mais, pour lui, le temps presse. Plus la formation d’un gouvernement s’éternise, plus Di Rupo se sent à l’aise pour expliquer que les partis de l’Orange Bleue ne peuvent pas réussir sans le PS.

    Tailler dans le vif

    Après les rebondissements en série des dernières semaines, plus personne n’ose tenter de prédire l’avenir. Deux choses sont pourtant claires. Il y a maintenant autant de chances d’avoir un gouvernement avant la fin de l’année que de rencontrer le Père Noël sortant de la chaudière du chauffage central. Et le prochain gouvernement, quel qu’il soit, va se traîner d’une crise communautaire à l’autre tandis que les noms d’oiseau vont voler tout au long des travaux de la future Convention, puisque tous les partis vont vouloir se positionner au mieux pour les élections régionales (et très vraisemblablement fédérales) de juin 2009.

    La fixation sur le projet de l’Orange Bleue – qui reste la formule souhaitée par le CD&V, l’Open VLD et le MR – paraît bizarre de la part des deux partis flamands qui réclament une importante réforme d’Etat. Car cette coalition ne dispose pas de la majorité des deux-tiers au parlement qui est nécessaire pour mener à bien une telle réforme. Certes, des gouvernements ont pu, par le passé, trouver un soutien dans une partie de l’opposition pour faire passer des réformes d’Etat mais un tel coup de main semble peu probable aujourd’hui puisque, pour l’opposition aussi, il y aura des élections en 2009 !

    Cette fixation sur l’Orange Bleue marque en fait la volonté de ces trois partis de gouverner sans le PS pour aller frapper rapidement au coeur des dossiers socio-économiques. Les partenaires de l’Orange Bleue (y compris le CDH) veulent à nouveau imposer une « modération » salariale alors que, selon la Banque Nationale, le « handicap salarial » de la Belgique a disparu (s’il a jamais vraiment existé, ce qui n’est pas le cas à condition d’avoir l’honnêteté d’inclure dans la comparaison avec les pays voisins la productivité du travail – très haute en Belgique – et pas seulement les salaires horaires). Ils veulent aussi imposer une limitation dans le temps ou une dégressivité pour les allocations de chômage, réduire le nombre de fonctionnnaires,…

    Patate chaude

    “L’atterrissage” de l’Orange Bleue s’est donc terminée (momentanément ?) par un crash magistral. Il ne reste pas beaucoup d’autres options : un gouvernement « d’urgence » ou d’ « intérêt national » qui tente de remettre à plus tard le traitement de la patate chaude communautaire ou une tripartite classique qui tente de mettre sur pied une réforme d’Etat. Mais un gouvernement d’urgence va devoir, dans les faits, être une tripartite pour avoir un semblant de représentabilité. Et les questions qui se posent depuis six mois – comment la N-VA et le FDF pourraient-ils coexister dans un gouvernement, jusqu’où le CD&V et le MR sont-ils prêts à aller pour conserver leurs encombrants partenaires ? – resteront aussi dures à résoudre, quelle que soit la formule gouvernementale.

    Même si le PS traîne parfois un peu la jambe, tous les partis traditionnels veulent continuer à mener une politique d’austérité néolibérale. Ils vont utiliser le ras-le-bol devant cette crise politique qui s’éternise – et bientôt aussi le ralentissement de la croissance économique annoncé par la majorité des économistes – pour tenter de convaincre la majorité de la population d’un nouverau « serrage de ceinture » est indispensable.

    Le 15 décembre, les syndicats vont descendre massivement dans la rue pour dénoncer la diminution du pouvoir d’achat. Et selon tous les chiffres et toutes les études, ils ont toutes les raisons d’être mécontents : pendant que les profits explosent, le pouvoir d’achat des travailleurs et de ceux qui vivent des allocations continue à baisser.

    Dans le climat actuel de surenchère communautaire – qui ne risque pas de s’améliorer à l’avenir – on ne peut qu’espérer que les syndicats seront tout à fait sérieux dans la mobilisation pour le 15 décembre. Une manifestation massive peut montrer aux négociateurs gouvernementaux que le mouvement ouvrier ne va pas se laisser diviser et manipuler. Mais le 15 décembre devra être le début d’une mobilisation et d’une lutte plus larges si nous ne voulons pas devoir payer les 10 milliards d’euros d’économies que Leterme estimait nécessaire de trouver pour fabriquer son budget.

  • Iran : Ni intervention militaire, ni soutien au régime réactionnaire !

    Action aux ambassades iranienne et américaine ce 22 décembre

    Un collectif d’Iraniens de gauche réfugiés dans notre pays organise ce 22 décembre une action devant les ambassades iranienne et américaine avec le MAS/LSP. L’action vise à protester contre la probabilité d’une intervention militaire des USA en Iran, mais également contre le régime réactionnaire en Iran. Nous publions ici le tract de ce collectif et invitons chacun à mobiliser et à être présent pour cette action.

    [box type=”shadow” align=”alignright” width=”100″]

    MANIFESTATION – SAMEDI 22/12

    > devant l’ambassade américaine à 10h30

    (27, Boulevard du Régent – métro Madou)

    > devant l’ambassade iranienne à 13h (15, Av. Franklin Roosevelt – tram 23 arrêt Etoile)
    [/box]

    Non à une intervention militaire de l’impérialisme américain en Iran !

    Non au régime réactionnaire iranien !

    Nous sommes une autre voix !

    Nous voulons donner une voix aux luttes des peuples du monde contre la politique d’intervention et de violation militaire de l’impérialisme américain en Iran !

    La voix des luttes du peuple iranien contre la République Islamique !

    La voix des luttes des travailleurs, des femmes, des enseignants, des peuples opprimés et des étudiants contre l’intervention étrangère et contre le despotisme de l’intérieur !

    Nous sommes la voix des étudiants de gauche d’Iran !

    Des étudiants qui veulent :

    « Accomplir le devoir d’organiser un mouvement général contre la guerre et les interventions étrangères, en même temps que lcontre a dictature et le despotisme de l’intérieur »

    Des étudiants qui veulent informer et mettre en garde les Iraniens des dangers d’une guerre destructrice alors qu’ils sont engagés dans une lutte contre les réactionnaires de la République Islamique. Des étudiants qui défendent les droits fondamentaux des travailleurs et du peuple laborieux, des peuples opprimés, la liberté pour les femmes et la séparation de la religion de l’Etat. »

    Dans des conditions où le gouvernement de Bush et ses collaborateurs européens d’un côté et la République Islamique de l’autre veulent faire croire aux peuples du monde qu’à part l’esclavage néo-libéral et le fondamentalisme islamique, il n’existe pas d’autre choix, toute personne éprise de la liberté a le devoir d’appuyer l’idée de l’existence d’une autre voie ! Les impérialistes et les fondamentalistes islamiques sont les deux faces d’un même système, et tout soutien apporté à l’un se traduit obligatoirement par le renforcement de l’autre.

    Dans des conditions où les Etats impérialistes lancent d’un côté les forces réactionnaires du fondamentalisme islamique contre les peuples du Moyen-Orient, et de l’autre côté provoquent les forces racistes et xénophobes des pays occidentaux contre les réfugiés, immigrés et musulmans, il est impératif et urgent qu’ils possèdent leur propre voix et s’unissent contre les forces de la réaction religieuse au Moyen-Orient et contre le racisme, la guerre et l’occupation impérialiste !

    Le 22 décembre 2007, dans une manifestation devant l’ambassade américain et l’ambassade de la République Islamique à Bruxelles, nous crierons cette voix indépendante des peuples du monde.

    Rejoignez-nous ; contre la guerre, la mondialisation néo-libérale, l’impérialisme !

    Rejoignez-nous ; pour défendre la lutte du peuple iranien contre la République Islamique !

    Rejoignez-nous ; pour défendre le mouvement étudiant et la commémoration du 16 azar (7 décembre), le jour où pour cause de la résistance contre le coup d’Etat du C.I.A. en 1953, trois étudiants ont été sacrifiés aux pieds de Nixon, par l’armé du Chah.

    Rejoignez-nous ; pour construire l’unité internationale en faveur d’un autre monde libéré de la guerre, de l’injustice, de l’oppression et de l’exploitation !

    Le Collectif de la jeunesse et des étudiants de gauche iraniens résidant en Europe

    Le Mouvement pour une Alternative Socialiste – Résistance Internationale – Etudiants de Gauche Actifs.

    Nous appelons toutes les personnes et organisations intéressées à souscrire à cette plateforme.

    committee.2007@hotmail.com – 0486/484365

  • La Révolution Russe d’Octobre 1917 : quelques leçons, 90 ans après

    Toutes les classes dominantes dans l’histoire ont voulu donner à leur mode de production un caractère éternel. Dans la même idée, les prophètes du capitalisme ont toujours tenté d’empêcher les travailleurs de tirer la conclusion que le capitalisme pouvait être changé.

    Cédric Gérôme

    Rappelons-nous seulement la fameuse phrase du pseudo-philosophe américain Fukuyama annonçant à grands cris « la fin de l’histoire » après la chute de l’URSS, voulant ainsi dépeindre le système capitaliste comme l’horizon ultime de la société humaine. Rien qu’à ce titre, la Révolution Russe d’Octobre 1917 fut un événement d’une portée gigantesque : pour la première fois dans l’histoire après la brève expérience de la Commune de Paris en 1871, les travailleurs russes ont pris le pouvoir entre leurs mains et montré que le capitalisme pouvait être renversé.

    La révolution russe revue et corrigée par la bourgeoisie

    C’est pourquoi étudier la révolution russe est extrêmement important, surtout lorsque l’on voit à quel point, de nos jours, cet événement historique est ‘revisité’ par certains historiens. Marx affirmait que “Les pensées de la classe dominante sont aussi, à chaque époque, les pensées dominantes”. Cette phrase n’a pas vraiment vieillie lorsqu’on voit comment l’anniversaire des 90 ans de la Révolution d’Octobre 1917 est ‘commémorée’ dans la presse et les médias officiels.

    Le magazine ‘L’Histoire’ a édité un numéro spécialement pour l’occasion, intitulé “Les crimes cachés du communisme – de Lénine à Pol Pot”.Tout un chapitre porte le titre “Lénine est aussi coupable que Staline”, dossier dont le fil conducteur sert à accréditer la thèse selon laquelle le stalinisme trouverait ses germes dans le léninisme ; Lénine aurait ainsi enfanté les Staline, Mao, Pol-Pot, Kim-Il-Sung et compagnie…Le quotidien gratuit ‘Métro’ avait quant à lui trouvé une manière un peu plus subtile de fêter l’événement : il y a deux semaines, une petite brève relatait la tuerie dans un lycée en Finlande. L’article finissait par une petite phrase tout à fait innocente : “Il a mis ses menaces à exécution le jour anniversaire de la révolution d’Octobre.” Au début du mois, la chaîne de télévision ARTE a passé un reportage-documentaire sur la vie de Léon Trotsky. Ce reportage se concluait par l’épisode de l’assassinat de Trotsky, commentée par un historien affirmant : “En analysant la mort de Trotsky, je pense qu’il est devenu victime d’une machine qu’il avait lui-même construite.” Sur cette conclusion apparaissait le générique auquel venait se greffer la citation d’un poète allemand : “La révolution est le masque de la mort. La mort est le masque de la révolution.” L’idée qui sous-entend cette conclusion ressort sans ambiguïté : si tu joues avec le feu en essayant de faire comme Trotsky, à essayer de renverser le capitalisme, tu vas faire naître un monstre encore plus grand… Mais point n’est besoin de se choquer de ce genre d’analyses. A l’époque même de la révolution de 1917, les journalistes de la bourgeoisie ne s’encombraient pas de toutes ces subtilités mais allaient directement droit au but, comme le montre un magnifique éditorial du ‘Times’ (le quotidien britannique) paru quelques jours avant l’insurrection qui affirmait, tout simplement : “Le seul remède contre le bolchévisme, ce sont les balles.”

    Les livres d’histoire évoquent souvent l’année 1917 comme « l’année terrible », illustrant le cauchemard qu’elle a représentée pour les classes dominantes. Et c’est bien par crainte du spectre de nouvelles années terribles que la bourgeoisie continue de faire tout, 90 ans après, pour enterrer les véritables leçons de la Révolution d’Octobre, du rôle que Lénine, Trotsky et le Parti Bolchévik ont réellement joué dans ces événements, et pour réduire cette expérience gigantesque à l’horreur du stalinisme et des goulags.

    Une tempête révolutionnaire

    La victoire de la Révolution d’Octobre ainsi que les mots d’ordre des Bolchéviks avaient rencontré un enthousiasme libérateur et stimulé le tempérament révolutionnaire des travailleurs et des opprimés du monde entier. Dans les années qui suivirent la révolution russe, des foyers révolutionnaires s’allumèrent aux quatre coins de l’Europe (en Allemagne, en Hongrie, dans le Nord de l’Italie, en Finlande,…) et rencontrèrent un écho considérable jusque dans le monde colonial : en Corée, en Inde, en Egypte, etc. Tous les écrits et les mémoires des politiciens bourgeois de l’époque témoignent de la panique généralisée qui dominait dans la classe dominante, celle-ci craignant de perdre pour de bon le contrôle de la situation face à cette tempête révolutionnaire. En 1919, le premier ministre britannique Lloyd Georges écrivait : “L’Europe entière est d’une humeur révolutionnaire. Tout l’odre social, politique et économique existant est remis en question par les masses populaires d’un bout à l’autre de l’Europe. Si nous envoyons plus de troupes pour combattre la Russie, la Grande-Bretagne elle-même deviendra bolchévique et nous aurons des soviets à Londres.” Même les Etats-Unis étaient traversés par une vague de grèves sans précédent, au point que le président Wilson disait : “Nous devons absolument agir pour plus de démocratie économique si nous voulons contrer la menace socialiste dans notre pays.” Ce n’est pas pour rien non plus si, en Belgique, les acquis de la journée des 8 heures et du suffrage universel (…pour les hommes) ont été obtenus respectivement en 1918 et 1919 : ce sont des concessions qui ont été lâchées par la bourgeoisie belge à une époque où elle craignait les soubresauts révolutionnaires qui contagiaient l’Europe entière.

    Il existe un courant de pensée que l’on appelle le courant évolutionniste, suivant lequel la société humaine ne ferait pas de bonds, mais évoluerait de manière linéaire de la barbarie vers le progrès et la civilisation. Cette théorie a souvent été utilisée pour fournir une base soi-disant scientifique contre les idées révolutionnaires. En tant que marxistes, nous pensons au contraire que la société ne se développe pas d’une manière lente et évolutive. Les contradictions dans la société conduisent au contraire à des crises sociales et politiques, à des guerres et à des révolutions, autrement dit à des changements soudains et des tournants brusques. Les retombées qu’a eu la victoire de la révolution russe dans toute une série de pays illustrent à quel point les acquis du mouvement ouvrier ne sont pas tombés du ciel, ou par une constante évolution du capitalisme vers plus de progrès, mais ont été obtenus par des batailles acharnées que le mouvement ouvrier a menée pour les obtenir.

    Octobre : un putsch ou une révolution ?

    Il est devenu courant aujourd’hui de présenter la révolution d’Octobre comme un putsch réalisé par une minorité de Bolchéviks conspirateurs. C’est probablement une des contre-vérités les plus répandues sur la révolution russe. Le schéma classique consiste à présenter la Révolution de Février 1917 comme la “vraie” révolution populaire, suivi quelques mois après par le “coup d’état”, le “complot” d’Octobre. Le tout vise à dépeindre le Parti Bolchévik comme un petit groupe de gens mal intentionnés qui ont pris le pouvoir de manière despotique, sans l’assentiment populaire.

    Pourtant, ce qui donna à l’insurrection dans la capitale Petrograd le caractère d’une petite échauffourée nocturne rapide, réalisée au prix de seulement 6 victimes, et non l’aspect d’un grand soulèvement populaire avec des batailles de rue ouvertes, ne s’explique pas par le fait que les Bolchéviks étaient une petite minorité, mais au contraire parce qu’ils disposaient d’une écrasante majorité dans les quartiers ouvriers et les casernes. Si Lénine dira par la suite que “prendre le pouvoir en Russie fut aussi facile que de ramasser une plume”, c’est précisément parce que la prise du pouvoir en elle-même n’était que le dernier acte visant à la destitution d’un régime totalement brisé, isolé et discrédité politiquement en huit mois d’existence, un régime dont la base sociale s’était littéralement évaporée sous ses pieds. Lorsque les Bolchéviks ont destitué le gouvernement provisoire et transmis le pouvoir aux Soviets, beaucoup pensaient que ce pouvoir ne tiendrait pas trois jours. De la même manière, beaucoup pariaient sur l’inévitable défaite de l’Armée Rouge dans la guerre civile. Si tel ne fut pas le cas, c’est bien parce que les Bolchéviks disposaient d’un programme capable de rallier des millions de travailleurs et de paysans pauvres, en Russie et par-delà les frontières, dans une lutte à mort contre leurs exploiteurs.

    La plupart des historiens bourgeois ne comprennent pas -ou plutôt ne veulent pas comprendre- que la révolution n’est pas un processus artificiel créé de toutes pièces, qui peut se fabriquer dans les laboratoire des état-majors des partis politiques, mais est un processus objectif qui a des racines historiques profondes dans la société : les contradictions entre les classes sociales. Pour les marxistes, les révolutions ne sont pas des surprises, mais sont préparées par toute l’évolution antérieure. La révolution arrive inévitablement quand la contradiction entre la structure de la société et les nécessités de son développement arrive à maturité : lorsque l’accumulation quantitative de frustration encaissée pendant des décennies par les classes exploitées atteint un stade qualitatif, lorsque toute cette quantité d’énergie accumulée dans la société augmente jusqu’à faire ‘sauter le couvercle’.

    Dans ce sens, la Révolution d’Octobre 1917 n’a été que l’aboutissement d’un processus révolutionnaire ouvert par l’écroulement du régime tsariste en février, et qui, durant cette période qui sépare la révolution de février de celle d’octobre, va voir se déployer une énergie, une vitalité, un bouillonnement incroyable parmi les masses, et une vie politique intense. 1917 fut une année d’action de masses étonnante par la variété et la puissance des initiatives populaires, témoin du déferlement d’un torrent de politisation générale de la société : partout, les ouvriers dans les usines, les soldats dans les casernes et les tranchées, les paysans dans les villages, avaient soif de politique, soif de s’instruire, soif de lire des journaux, de discuter des idées, de participer aux grands débats,…Chaque ville, chaque village, chaque district, chaque province, développait ses soviets de députés ouvriers, soldats et paysans, prêts à assurer l’administration locale. John Reed, le journaliste socialiste américain auteur du célèbre livre ‘Dix jours qui ébranlèrent le monde’ expliquait qu’ « à Pétrograd comme dans toute la Russie, chaque coin de rue était transformée en une tribune publique. » L’intervention active des masses dans les événements constitue l’élément le plus essentiel d’une révolution. Toute cette dynamique de masse illustre l’absurdité des arguments sur le soi-disant ‘putsch’ des Bolchéviks.

    Les Bolchéviks et la question de la violence

    Bien sûr, il est aujourd’hui de bon ton de présenter le parti Bolchévik comme des bouchers sanguinaires assoiffés de sang. On se souvient notamment de l’image de Trotsky entourée d’une montagne de crânes et de squelettes, dépeint comme un assassin et un bourreau. Des tonnes d’encres ont été déversées pour dénoncer en long et en large la Terreur Rouge et les exactions de la guerre civile. On parle étrangement beaucoup moins du fait que la guerre civile fut suscitée par la volonté des anciennes classes possédantes de Russie et de l’impérialisme mondial de mettre le pays à feu et à sang pour écraser la révolution par tous les moyens, et que le jeune Etat ouvrier fut réduit à une situation de ‘forteresse assiégée’ par un total de 22 armées.

    Le général blanc Kornilov illustrait à merveille l’état d’esprit peu soucieux d’amabilité des capitalistes face au pouvoir soviétique lorsqu’il disait : “Si nous devons brûler la moitié de la Russie et décimer les trois quarts de sa population pour la sauver, nous le ferons. Le pouvoir est aux mains d’une plèbe criminelle que l’on ne mettra à la raison que par des exécutions et des pendaisons publiques”. On ne peut donc pas faire une analyse un tant soit peu sérieuse si l’on ne tient pas compte qu’il s’agit là du genre de bonhommes que les Bolchéviks avaient en face d’eux. L’ironie de l’histoire est qu’au début, les Bolchéviks étaient même plus qu’indulgents avec leurs ennemis de classe, au point de libérer les généraux contre-révolutionnaires sur base d’un engagement sur parole qu’ils ne prendraient plus les armes contre le pouvoir soviétique! Bien sûr, les marxistes ne sont pas des apologistes de la violence, surtout lorsqu’il s’agit d’une violence aveugle, réalisée par une minorité isolée et coupée de l’action de masses. Les marxistes russes avaient notamment mené un combat idéologique pendant des années contre les terroristes russes, à commencer par la ‘Narodnaia Volia’ (= ‘La Volonté du Peuple’), organisation terroriste qui voulait combattre l’autocratie par la seule force de la bombe et du revolver. Leur chef disait explicitement : “L’histoire est trop lente, il faut la bousculer”. Cette organisation va perpétrer en 1881 un attentat contre le Tsar Alexandre II, persuadée que cela allait stimuler un soulèvement général des paysans. L’assassinat n’aura aucun écho, les auteurs seront pendus, la répression va s’abattre sur le pays et décapiter la Narodnaia Volia ; Alexandre II, quant à lui, sera simplement remplacé par Alexandre III. Les marxistes ont toujours opposé à ce type de méthodes de terrorisme individuel l’organisation des masses.

    Mais les marxistes ont aussi les pieds sur terre; ils ne raisonnent pas sous forme de catégories abstraites –pour ou contre la violence ‘en général’-, mais prennent comme point de départ de leur analyse la situation concrète. Et une réalité concrète est que lorsque la classe opprimée ose se rebeller pour ses droits, les classes dominantes n’hésitent jamais à recourir à une répression impitoyable, à un déferlement d’une violence inouïe, dépassant parfois toute imagination. Il suffirait par exemple de rappeler la répression des Communards de Paris par les bandes de Thiers, qui culmina dans un carnage effroyable, exécutant à bout portant hommes, femmes, enfants et vieillards. Le fusil ne tuant plus assez vite, c’est par centaines que les ouvriers vaincus furent abattus à la mitrailleuse. On s’apitoie souvent sur le triste sort réservée à la famille tsariste exécutée par les ‘Rouges’. On s’apitoie beaucoup moins sur les 5 millions de soldats envoyés par le régime tsariste se faire charcuter dans la boucherie des tranchées, parfois à pieds nus et sans armes. Il faut s’imaginer que les soldats russes devaient parfois partir à l’assaut avec un fusil pour quatre. Il est d’ailleurs clair que l’horreur de cette guerre impérialiste, dont l’unique but était le partage du monde et des sphères de marché entre les grandes puissances, jouera un rôle décisif d’accélérateur des événements révolutionnaires de l’après-guerre. La combativité des masses, étouffée dans un premier temps par la propagande patriotique, va dans un deuxième temps ressurgir à la surface avec une vigueur et une vitalité exceptionnelle.

    Le développement d’une conscience révolutionnaire : un processus dialectique

    Il n’y a pas de meilleure école que celle de la pratique : l’éducation politique des masses s’effectue à travers leur propre expérience pratique. Ce que l’on constate dans toute période révolutionnaire ou dans toute lutte d’une certaine importance, c’est que dans le feu de l’action, la conscience politique des travailleurs peut faire des bonds gigantesques en avant. Engels disait qu’”il peut y avoir des périodes dans la société humaine où 20 ans apparaissent comme un seul jour, tout comme des moments où une seule journée apparaît comme 20 ans.” L’année 1917 en Russie illustre cette idée : la classe ouvrière russe a plus appris en quelques mois qu’elle n’avait pu le faire pendant des dizaines d’années auparavant. C’est ce qui explique comment un type comme Alexandre Kérensky, très populaire en mars ’17, était unanimement détesté au mois d’octobre. C’est ce qui explique la progression numérique fulgurante du Parti Bolchévik, qui ne comptait que quelques milliers de membres au début du mois de février, déjà 100.000 en avril, près de 200.000 au mois d’août et plus d’un quart de millions au début d’octobre. On voit ainsi que, dans le cours d’une révolution, quand les événements se succèdent à un rythme accéléré, un parti faible peut rapidement devenir un parti puissant : le POUM (Parti Ouvrier d’Unification Marxiste), dans les six premières semaines qui suivirent l’offensive révolutionnaire de juillet 1936 en Espagne, était ainsi passé d’un parti de 1000-1500 membres à plus de 30.000 membres.

    Cela montre que la compréhension de la nécessité d’un parti révolutionnaire au sein de larges couches de travailleurs n’est pas quelque chose d’automatique. Le processus qui part de l’élaboration d’un programme révolutionnaire et de l’accumulation primitive des premiers cadres révolutionnaires jusqu’à la construction de partis révolutionnaires de masse est un processus qui s’accomplit à travers divers stades inégaux de développement. Mais en dernière instance, ce n’est que lorsque les contradictions du système éclatent au grand jour que les conditions objectives se créent pour une large pénétration des idées révolutionnaires au sein de la classe des travailleurs.

    Le stalinisme et le fascisme étaient-ils inévitables ?

    Une chose est sûre : s’il n’y avait pas eu de Parti Bolchévik en Russie, toute l’énergie révolutionnaire colossale des travailleurs aurait été lamentablement gâchée et aurait repoussé le mouvement ouvrier en arrière pour longtemps au prix d’une défaite catastrophique et sanglante, comme cela s’est d’ailleurs passé en Hongrie avec l’avènement de la dictature militaire du général Horthy, ou en Allemagne et en Italie avec la montée au pouvoir du fascisme. Ces régimes vont liquider avec zèle les syndicats et les organisations ouvrières, torturer et massacrer les communistes et les socialistes par milliers. La communiste allemande Clara Zetkin l’avait compris, elle qui déclarait en 1923 que “le fascisme sera à l’ordre du jour si la Révolution Russe ne connaît pas de prolongement dans le reste de l’Europe.” Le fascisme a été le prix à payer de la trahison des partis de la social-démocratie, et de l’inexistence ou de la faiblesse d’un parti politique de type Bolchévique comme il en existait un en Russie.

    Mais ce prix, les travailleurs russes le payeront également. Car ces défaites vont contribuer à l’isolement de la révolution russe dans un pays extrêmement arriéré, et, en conséquence, à sa dégénérescence vers une dictature bureaucratique et totalitaire. En 1924, Staline mit en avant la théorie du ‘socialisme dans un seul pays’, afin de se débarrasser de la tâche de la construction de la révolution mondiale, et pour protéger les intérêts et privilèges de la bureaucratie montante, notamment en empêchant le développement et l’aboutissement d’autres révolutions ouvrières qui auraient pu mettre ces privilèges en péril. Cette dégénérescence sera elle-même facteur de nouvelles défaites (comme lors de la révolution chinoise de 1926-27).

    Lorsque Lénine arriva à Pétrograd au mois d’avril 1917, le président du soviet (encore un Menchévik à l’époque) va prononcer un discours rituel d’accueil; Lénine va lui tourner le dos, grimper sur un char, se tourner vers la foule des travailleurs et proclamer : “L’aube de la révolution mondiale est arrivée…Vive la révolution socialiste mondiale!” Ce slogan sera gravé plus tard sur le socle d’une statue de Lénine érigée à cet endroit…mais en y retirant le mot ‘mondiale’! La fameuse théorie de Staline du ‘socialisme dans un seul pays’ était une théorie réactionnaire qui allait à l’encontre de tout l’enseignement marxiste et de toute la tradition internationaliste du Bolchévisme; ce ne fut en fait rien d’autre que le couronnement idéologique de la position de l’appareil bureaucratique stalinien qui va s’ériger et se conforter sur les ruines de toutes ces défaites du mouvement ouvrier.

    Le Parti Révolutionnaire : un ingrédient indispensable

    Trotsky expliquait que « Sans organisation dirigeante, l’énergie des masses se volatilise comme de la vapeur non enfermée dans un cylindre à piston. » La révolution d’Octobre n’aurait jamais pu aboutir sans l’existence d’un tel parti, capable de donner à la force spontanée des travailleurs une expression politique consciente, organisée et disciplinée ou, pour reprendre l’expression de Lénine, pour “concentrer toutes les gouttes et les ruisseaux du mécontentement populaire en un seul torrent gigantesque.” Toute révolution exige une organisation sérieusement structurée pour définir et mettre en application un programme, une stratégie, des tactiques correspondant aux diverses phases de la lutte et à l’évolution des rapports de force. Comment les Bolchéviks ont-ils été capables de conquérir un territoire géographique aussi vaste que la Russie ? Cela s’explique par le vaste réseau de cadres révolutionnaires que Lénine et le Parti Bolchévik avait construit et formé pendant des années. Pendant la révolution, des détachements d’ouvriers et des régiments de soldats envoyaient des délégués au front, allaient conquérir les régiments arriérés, se cotisaient pour envoyer des délégués dans les provinces et les campagnes dont ils étaient originaires, parfois dans les régions les plus reculées du pays. Certains cadres passaient des journées entières à haranguer les usines, le front, les casernes,…sans relâche. C’est comme ça qu’en quelques mois, en s’appuyant sur le développement de la révolution, le parti a été capable de convaincre la majorité des travailleurs de la justesse de ses mots d’ordre. Cela illustre l’importance de la construction préalable d’un parti de cadres formés et préparés aux événements, éprouvés et trempés dans la lutte, prêts au sacrifice, et capables par l’expérience qu’ils ont accumulée, de jouer un rôle décisif au moment fatidique. Là était toute la force du parti Bolchévik.

    Ce dernier n’était pourtant suivi en février 1917 que par une insignifiante minorité de la classe ouvrière. Lors du premier congrès des Soviets en juin, sur 822 délégués, seulement 105 étaient Bolchéviks, montrant qu’une majorité encore imposante des ouvriers soutenait les partis Mencheviks et ‘Socialiste-Révolutionnaire’. Ces partis jouaient littéralement le rôle de commis de la bourgeoisie dans le mouvement ouvrier : soucieux de respecter les engagements pris avec l’impérialisme étranger, ils appuyaient la poursuite jusqu’à la victoire d’une guerre massivement rejetée par la population, s’évertuaient à freiner les revendications sociales, refusaient d’accorder la terre aux paysans. En d’autres termes, ils faisaient tout pour empêcher la réalisation de revendications qui puissent empiéter sur les intérêts des classes possédantes. Ils prônaient la collaboration entre deux formes de pouvoir irrémédiablement incompatibles et s’appuyant sur deux classes antagonistes : d’un côté, les soviets, épine dorsale de la révolution représentant les masses laborieuses en action, et de l’autre, le gouvernement provisoire représentant la bourgeoisie et les propriétaires terriens. Alexandre Kérensky était la forme achevée de ce rôle conciliateur, étant pendant toute une période à la fois vice-président du Soviet de Pétrograd et membre du gouvernement provisoire. Son action, comme celle de tous les politiciens Menchéviks et S-R, était guidée par l’idée de contenir les masses et de maintenir les Soviets dans le giron de la bourgeoisie. Mais au fur et à mesure que les masses populaires devenaient plus radicales, poussaient pour mettre en avant leurs revendications propres et une politique indépendante, autrement dit au plus les masses évoluaient vers la gauche, au plus ces politiciens étaient repoussés vers la droite. Kérensky finira d’ailleurs par dire : “Le gouvernement provisoire non seulement ne s’appuie pas sur les soviets, mais il considère comme très regrettable le seul fait de leur existence.”

    Ce processus illustre qu’il n’y a pas de troisième voie, de solution ‘à mi-chemin’ entre le pouvoir des capitalistes et celui des travailleurs. Et ça, c’est une leçon que les anarchistes espagnols –ainsi que le POUM à leur suite- n’ont pas compris lors de la révolution espagnole de 1936 : dans une situation de dualité de pouvoir, caractéristique de toute situation révolutionnaire, c’est-à-dire au moment crucial où il faut choisir entre deux formes de pouvoir différents, les dirigeants anarchistes de la CNT, refusant a priori toute forme de pouvoir quelle qu’elle soit, vont non seulement accepter de laisser les rênes de ce pouvoir dans les mains de l’ennemi de classe, mais même participer à la reconstitution de l’Etat bourgeois en acceptant des portefeuilles ministériels dans le gouvernement de Front Populaire.

    Marx disait que “Dans toute révolution, il se glisse, à côté de ses représentants véritables, des hommes d’un tout autre caractère; ne comprenant pas le mouvement présent, ou ne le comprenant que trop bien, ils possèdent encore une grande influence sur le peuple, souvent par la simple force de la tradition.” Lors de la révolution russe, ce rôle fut incontestablement joué par les Menchéviks et les S-R. Mais ce n’est que peu à peu, et seulement sur la base de leur propre expérience à travers les différentes étapes de la bataille, que les couches les plus larges des masses ont fini par se défaire de ces partis, et par se convaincre que la direction Bolchévique était plus déterminée, plus sûre, plus loyale, plus fiable, que tous les autres partis. Les 8 mois qui séparent Février d’Octobre ont été nécessaires pour que les travailleurs et les paysans pauvres de Russie puissent faire l’expérience du gouvernement provisoire, et pour que, combiné avec le travail mené par le Parti Bolchévik, les larges masses puissent arriver à la conclusion que ce régime devait être renversé car il n’était pas le leur, mais celui de la bourgeoisie et des grands propriétaires ; à l’inverse, le parti Bolchévik était quant à lui le seul parti prêt à les défendre jusqu’au bout, jusqu’à l’ultime conclusion…c’est-à-dire jusqu’au pouvoir.

    Mais la condition pour cela était évidemment l’existence même d’une organisation véritablement révolutionnaire capable, de par sa lucidité politique et sa détermination, de contrecarrer l’influence des appareils et des politiciens traîtres et réformistes. L’absence d’un tel facteur sera à l’origine de toutes les défaites révolutionnaires ultérieures. En mai’68, dix millions de travailleurs étaient en grève en France, occupant leurs usines, dressant des comités ouvriers dans tout le pays. La classe ouvrière française était à deux doigts du pouvoir .Mais la bureaucratie stalinienne du Parti Communiste Français refusera de prendre ses responsabilités : elle va dénigrer les étudiants en lutte qualifiés pour l’occasion de “renégats gauchistes” ou de “faux révolutionnaires”, nier le caractère révolutionnaire du mouvement, et détourner la lutte vers la voie électorale avec des slogans tels que “rétablissons l’ordre dans le chaos”. La plus grosse grève générale de toute l’histoire va ainsi refluer faute de perspectives politiques, et c’est ainsi que la plus belle occasion pour les travailleurs de prendre le pouvoir dans un pays capitaliste avancé sera perdue.

    La crise historique de l’humanité se réduit à la crise de la direction révolutionnaire

    Marx affirmait que “les révolutions sont les locomotives de l’histoire”. Mais chacun sait qu’une locomotive a besoin d’un bon conducteur pour arriver à destination, sinon elle risque de dérailler rapidement. De la même manière, si la révolution ne dispose pas d’un bon conducteur pour l’orienter, sous la forme d’une direction révolutionnaire, elle déraille aussi. Et une chose dont nous pouvons être sûrs, c’est que la locomotive de la révolution n’attendra pas les révolutionnaires ; elle ne laisse en général que peu de temps à la confusion et à l’hésitation. Le sort des partis qui ne sont qu’à moitié ou au quart révolutionnaires est de passer en-dessous des roues de la locomotive : c’est ce qui est par exemple arrivé au POUM en Espagne, dont beaucoup des militants vont payer de leur vie les erreurs et les hésitations de sa direction. C’est aussi ce qui est arrivé au MIR au Chili en 1973, dont de nombreux militants vont finir leur vie torturés dans les geôles de Pinochet. L’approche et les méthodes gauchistes du MIR vont le rendre incapables de développer une assise significative au sein du mouvement ouvrier. Ce qui met en avant un autre élément fondamental : se dire révolutionnaire est une chose ; mais encore faut-il arriver à transcrire le programme révolutionnaire de manière correcte dans la réalité vivante, avec une approche et des revendications qui soient adaptées à chaque situation spécifique, à chaque étape de la lutte, tenant compte du niveau de conscience, des traditions du mouvement ouvrier dans chaque pays, etc. Lénine disait que “le marxisme, c’est avant tout, l’analyse concrète de la situation concrète.” Il est clair par exemple que le slogan “Tout le pouvoir aux soviets” était un slogan directement adapté aux conditions spécifiques de la Russie de 1917. Lors de la révolution chilienne de 1973, un tel slogan aurait dû être traduit par quelque chose comme “Tout le pouvoir aux cordons industriels” les cordons industriels étant les organismes de classe rassemblant les travailleurs et les habitants des quartiers ouvriers qui étaient apparus pendant le processus révolutionnaire au Chili. Mais lorsque les staliniens du Parti Communiste Espagnol vont lancer au début des années ‘30 le mot d’ordre: «A bas la République bourgeoise ! Tout le pouvoir aux soviets ! » à une période où la république venait d’être proclamée et où il n’existait pas l’ombre d’un soviet ou d’un organisme semblable dans toute l’Espagne, le seul résultat qu’ils pouvaient obtenir était de s’isoler complètement des masses…

    Cette discussion met en évidence une des principales contributions de Trotsky au marxisme, à savoir le ‘Programme de Transition’. Trotsky expliquait qu’il faut aider les masses, dans le processus de leurs luttes quotidiennes, à trouver le pont entre leurs revendications actuelles, immédiates, et le programme de la révolution socialiste. Ce pont doit consister en un système de revendications transitoires, qui partent des conditions actuelles et de la conscience actuelle de larges couches de travailleurs pour conduire à une seule et même conclusion : la révolution socialiste et la conquête du pouvoir. C’est-à-dire élaborer un panel de revendications qui, en partant des besoins concrets et du niveau de conscience des travailleurs et de leurs familles, sont par essence incompatibles avec le maintien du système capitaliste. Le slogan des Bolchéviks “Pain, Terre et Paix”, dans une situation où la famine rôdait, où la paysannerie avait soif de terre, et où le ras-le-bol de la guerre était général, faisait ainsi directement appel aux aspirations les plus profondes de la majorité de la population laborieuse, et, tout en même temps, renvoyait implicitement à la nécessité de renverser le pouvoir de la bourgeoisie; cette dernière, pieds et poings liés et avec l’impérialisme étranger et avec les grands propriétaires fonciers, était absolument incapable de satisfaire ne fût-ce qu’une seule de ces revendications.

    Trotsky commençait son programme de transition en disant que “La crise historique de l’humanité se réduit à la crise de la direction révolutionnaire.” Le rôle et la responsabilité de la direction politique dans une époque révolutionnaire sont effectivement d’une importance colossale. Dans une telle époque, en l’absence d’un parti révolutionnaire, les espoirs des masses font place à la désillusion, l’ennemi tire profit de cette désillusion et se remet de sa panique, les masses découragées se lancent dans des explosions désordonnées et sans perspective, et c’est la défaite assurée.

    Bien sûr, la construction d’un Parti Révolutionnaire n’est pas seulement importante dans une époque révolutionnaire. En effet, la construction d’un cadre marxiste révolutionnaire solide et préparé ne peut pas s’effectuer du jour au lendemain, mais exige au contraire des délais considérables que la rapidité des processus révolutionnaires ne laisse pas le temps d’entreprendre en quelques jours, semaines ou mois. La société connaît, à côté des périodes d’ouverture révolutionnaire, des périodes d’un tout autre caractère : des périodes de réaction, de recul, durant lesquelles la lutte du mouvement ouvrier ainsi que les idées socialistes sont poussées sur la défensive. Nous avons connu une telle période après la chute des régimes staliniens dans les années ’90, période durant laquelle les révolutionnaires devaient complètement nager à contre-courant dans la société pour pouvoir exister. Dans un tout autre contexte, les Bolchéviks avaient connu une période similaire après la défaite de la révolution russe de 1905. Sous les coups de la répression et de la démoralisation, le parti subit une véritable hémorragie en termes de membres, et mêmes certains cadres dirigeants du parti succombèrent à la pression et au défaitisme ambiants ; pour exemple, Lounatcharsky développa un groupe appelé ‘Les Constructeurs de Dieu’, qui se fixait pour idée-maîtresse de présenter le socialisme sous la forme d’une religion, jugée selon eux « plus attractive » que la lutte des classes pour les masses déçues et démoralisées ! Néanmoins, la volonté infatigable de Lénine de s’acharner, même dans ces conditions difficiles, à construire et à former un cadre révolutionnaire pendant cette période va considérablement aider le Parti Bolchévik à pouvoir affronter les défis et les tâches grandioses qui allaient l’attendre quelques années plus tard.

    Lénine avait certes éduqué un cadre sur base de perspectives qui révéleront leur faiblesse dans la pratique en 1917. En effet, jusque-là Lénine croyait encore à l’idée d’une révolution par étapes nettement séparées dans le temps : une première étape à caractère démocratique-bourgeoise, portée par une « alliance démocratique entre le prolétariat et la paysannerie » (c’est-à-dire une révolution prolétarienne dans sa forme, mais bourgeoise dans son contenu), suivie d’une étape socialiste plus lointaine ; ces deux étapes étant entrecoupées d’une période significative de développement capitaliste du pays. Cependant, refusant de s’accrocher aux vieilles formules, et proclamant que « le vieux bolchévisme doit être abandonné », Lénine corrigera ses perspectives à la lumière des événements, lors de l’éclatement de la révolution. Là est toute l’essence de ses ‘Thèses d’Avril’, dans lesquelles il rallie la perspective d’une ‘révolution permanente’ avancée depuis plusieurs années déjà par Trotsky. A partir de ce moment, tout son travail consistera à tenter d’infléchir la ligne du Parti Bolchévik en vue d’une telle perspective : armer politiquement le parti pour le préparer à une rapide prise du pouvoir par les soviets, à l’instauration d’un gouvernement ouvrier et des premières mesures socialistes.

    Avec le recul, on peut aisément affirmer que Trotsky disposait de perspectives plus élaborées que Lénine. Mais le développement théorique plus consistant de Trotsky ne peut se comprendre sans tenir compte du fait que durant toutes les années qui précèdent la révolution de 1917, toute l’énergie de Lénine était concentrée sur la construction du Parti Bolchévik, à une époque où, de ses propres aveux, Trotsky n’avait pas encore saisi toute l’importance d’un parti soudé et centralisé comme condition indispensable pour atteindre le but révolutionnaire, et, jusqu’à un certain point, entretenait encore l’illusion d’une ‘réconciliation’ entre la fraction réformiste (les Menchéviks) et la fraction révolutionnaire (les Bolchéviks) de l’ancien POSDR (Parti Ouvrier Social-Démocrate de Russie). C’est finalement la révolution elle-même qui permettra de rassembler les deux hommes autour d’une même perspective et d’une même conception du type de parti nécessaire.

    Ne laissons pas ces leçons sur le papier !

    A d’innombrables reprises dans l’histoire, les travailleurs ont tenté de suivre la voie des travailleurs russes, de se frayer un chemin vers le pouvoir et vers l’instauration d’une société socialiste. Lors de la révolution portugaise de 1974, les travailleurs en étaient tellement proches que la presse annonçait déjà “la fin du capitalisme” au Portugal ! On pourrait multiplier ces exemples. L’histoire du capitalisme est jalonnée de nombreux combats révolutionnaires héroïques menés par le mouvement ouvrier pour son émancipation. Mais à l’exception de la révolution russe, la défaite a été l’issue de tous ces combats pour la seule raison qu’ils n’avaient pas à leur tête une direction politique expérimentée, préparée à encadrer ces mouvements, à leur donner une perspective, et à les faire aboutir jusqu’à leur conclusion logique et naturelle. Malgré sa dégénérescence ultérieure, malgré les décennies de pourriture du stalinisme, la révolution russe continuera de se distinguer de toutes les autres révolutions ouvrières sur un point essentiel : c’est la seule qui a abouti. Dès lors, s’atteler à la construction d’une organisation révolutionnaire internationale est la leçon la plus générale, mais aussi la plus importante, que l’on puisse dégager d’une telle discussion aujourd’hui, afin d’éviter de nouvelles défaites au mouvement ouvrier et d’assurer un meilleur avenir pour les générations futures.

  • L’unité des travailleurs et des jeunes contre la surenchère communautaire et la casse néo-libérale !

    Aujourd’hui celui qui ouvre un journal ou regarde la télé ne peut pas le rater: Partout des voix parlent de donner plus de compétences aux régions, scissionner la sécurité sociale etc. Même la Belgique comme état fédéral est remise en question. En même temps, on voit apparaitre face à cela toutes sortes d’initiatives pro-belgicaine. Nous ne pensons pas que pour les jeunes et les travailleurs le belgicanisme soit une réponse au flamingantisme.

    Jan Van Olmen

    Les divisions communautaires entre les politiciens flamands et francophones servent à cacher leurs accords sur l’agenda néolibéral : de nouvelles attaques sur les salaires, sur les pensions, les chômeurs, sur le droit de grève, sur les services publiques,… Les politiciens flamands veulent plus de compétences pour les communautés afin d’avoir un instrument mieux adapté pour accélérer cette politique. Les politiciens qui défendent plus de fédéralisme veulent le faire sur le plan national. Il est nécessaire d’avancer une réponse politique face aux nationalismes (tant flamingant que belgicain) et d’organiser la résistance syndicale contre les attaques néolibérales. Cela nécessite l’unité des travailleurs flamands, wallons et bruxellois. La scission des syndicats dans une série de secteurs affaiblit aujourd’hui notre capacité de riposte. La force des syndicats et la sécurité sociale ont depuis toujours été basées sur la solidarité entre les travailleurs des différentes communautés.

    C’est pourquoi nous soutenons la pétition « Sauvons la solidarité » lancée par les syndicats suite aux initiatives des délégations de Total et Dégussa contre la scission de la sécurité sociale. Elle met en avant que les acquis sociaux dans notre pays ont été obtenus par une lutte commune des travailleurs flamands, wallons et bruxellois. Des dizaines de milliers de personnes ont déjà signé cette pétition. Malheureusement, l’implication de chanteurs et d’autres personnalités détourne le contenu de cette initiative par leurs propos pro-Belge dans la presse.

    Certains dans la gauche tombent également dans ce piège. Comac a récemment écrit comme conclusion politique de son journal à l’ULB : « La solidarité entre les jeunes, les vieux, les Flamands, Wallons et Bruxellois, les riches et les pauvres, est la base sur laquelle repose la Belgique, elle doit le rester ! ». L’Etat-Nation Belge au service de sa classe dominante avec son marché, ses politiciens et ses parlements, son armée, sa police et sa justice n’est certainement pas basé sur la solidarité mais bien sur l’exploitation de la grande majorité par les capitalistes. S’ils existent des nationalistes flamands de gauche c’est dû à l’oppression linguistique comme l’interdiction d’utiliser le flamand dans les tribunaux, dans l’administration,… sur laquelle la Belgique a été fondée. S’il existe un nationalisme wallon c’est du au fait qu’on a utilisé les faiblesses du mouvement ouvrier en Flandre pour briser la résistance des travailleurs wallons. C’est cela aussi la Belgique ! L’idée que la Belgique se baserait sur une solidarité entre riches et pauvres est un mensonge. Que 15% de la population vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté en est une illustration flagrante que même ceux qui ne se prétendent pas marxistes ont du mal à dissimuler. Les intérêts de la classe des travailleurs sont inconciliables avec ceux de la classe des capitalistes. Les acquis des travailleurs en Belgique, comme la sécurité sociale, ont été arrachés par des luttes sur le plan national. Et ils doivent être défendus ainsi.

  • Gand : soirée sous pression au conseil communal

    Lundi soir, au conseil communal de Gand, une majorité alternative comprenant le Vlaams Belang, l’Open VLD et le CD&V-NVA (le cordon sanitaire est une mesure toute relative…) a voté une motion pour interdire de porter le voile à cinq membres du personnel de la ville. Le partenaire « rouge » au sein de la coalition, le SP.a (les « socialistes » flamands) a voté contre, après avoir pourtant avancé une mesure similaire à Anvers ! Le MAS/LSP était présent contre cette mesure discriminatoire, avec également des militants du CAP. Au même moment était organisée une protestation contre la fermeture d’un bureau de poste (le CAP avait réussi à récolter assez de signatures pour prendre la parole au conseil communal).

  • Pas de reconnaissance des néo-fascistes à l’université d’Anvers !

    Depuis cette année académique, il existe à l’Université d’Anvers le PFK (Politiek Filosofisch Konvent), un groupe qui réunit toutes les organisations étudiantes politiques d’Anvers et leur procure une reconnaissance officielle. Le NSV (Nationalistische StudentenVereniging), l’organisation étudiante étroitement liée au Vlaams Belang (VB), est aussi membre du PFK et est donc officiellement reconnue par l’Université d’Anvers.

    Jarmo Van Regemorter

    Dans les autres villes étudiantes, le NSV n’est pas reconnu comme cercle étudiant par les universités. Et on comprend pourquoi en regardant de plus près ce qu’est réellement le NSV. C’est une organisation ouvertement néofasciste qui défend des positions racistes et propage ouvertement le Solidarisme (c-à-d nier le fossé qui existe entre travail et capital, la base idéologique du parti nazi pour interdire les syndicats par exemple). Le président du NSV de Hasselt a, par exemple, déclaré sur un forum internet qu’il espérait que « si la démocratie faisait faillite, une main de fer fasciste serait prête à prendre les choses en main ». De même, les méthodes du fascisme – violences et intimidations – ne sont également pas étrangères au NSV. L’année passée, quatre membres d’EGA ont été attaqués en rue à Anvers parce qu’ils se sont risqués à exprimer leurs opinions et à organiser la lutte anti-fasciste. C’est l’incident le plus récent d’une longue série d’actes de violence contre les étudiants de gauche et les immigrés. Et c’est cette organisation qui obtient maintenant des salles pour se réunir et un droit de parole à l’université. Il est clair que l’adhésion du NSV au PFK n’est pas acceptable et que nous devons lutter contre cela.

    Au début de l’année, nous avons milité avec une pétition parmi les étudiants contre la reconnaissance officielle du NSV. Nous n’avons pas dû faire beaucoup d’efforts pour obtenir un succès : la grande majorité des étudiants savent ce que valent l’idéologie et les méthodes de cette organisation et sont absolument opposés à leur reconnaissance officielle.

    Nous avons déjà récolté 500 signatures et nous voulons diffuser cette pétition dans l’université par les délégués de cours, les syndicats et le personnel. De cette manière, nous espérons construire une relation de force suffisante. Les autres organisations du PFK doivent aussi prendre leurs responsabilités. Nous montrons ainsi que l’important est l’implication de la communauté étudiante dans le combat pour un PFK démocratique et sans néofasciste.

    Est-ce que le recteur de l’Université d’Anvers veut être tenu responsable de la rupture en pratique du cordon sanitaire sur son université? Que se passerait-il s’il y avait, dans les membres du NSV, un nouveau Hans Van Themsche, et qu’il décide de tuer quelques immigrés sur son campus? Devons-nous vraiment attendre pour lancer la lutte contre l’extrême droite? A Anvers, où le Vlaams Belang réussit à créer un climat de haine et de racisme, la lutte contre l’extrême droite reste une affaire sensible. Tout comme le VB, le NSV essaie de se faire passer pour une organisation comme les autres et acceptable. En tant qu’organisation étudiante reconnue, cela leur sera certainement beaucoup plus facile et ils y réussissent déjà en partie.

    Mais il faut être clair : le NSV est une organisation néofasciste (et violente) et EGA continuera à tout faire pour qu’ils soient traités comme tel. Nous allons continuer notre travail avec la pétition. Et là où le NSV distribuera des tracts, nous serons présents avec des sacs poubelles en dénonçant leur vrai programme et demanderons aux étudiants de jeter ces tracts immédiatement. Quelque soit le résultat de cette lutte, EGA prendra ses responsabilités.

    Si comme nous tu as horreur du fascisme et de l’extrême droite et tu crois en la nécessité d’une opposition de gauche pour stopper leur croissance, prends contact avec EGA.

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