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  • Rapport sur la situation à Sidi Ifni, Maroc

    Sidi Ifni, ville côtière de 20.000 habitants au Sud du Maroc, a connu les 7 et 8 juin 2008, puis à nouveau les 18 et 19 août 2008 deux vagues de répression extrêmement violentes en guise de réponse à un mouvement social qui revendique, depuis le début des années 2000, une réelle politique de développement de la région ainsi qu’une extension et amélioration des services publics.

    Par Mourad

    Le mouvement se renforce à partir de 2005: en août, une manifestation de plus de 10.000 personnes obtient l’affectation d’un chirurgien à l’hôpital, deux ambulances et la promesse de travaux d’infrastructures portuaires et urbaines. Il se structure en Secrétariat local Sidi Ifni – Aït Baamrane élabore un cahier revendicatif porté par la population. C’est du sein même de ce mouvement qu’ont émergé des groupes comme Attac Ifni et l’Association Nationale des Diplômés Chômeurs au Maroc qui, depuis leur création, font le lien entre les problèmes vécus localement par les habitants d’Ifni et les politiques globales néo-libérales capitalistes, telles qu’elles se déclinent au Maroc aussi.

    Le contexte

    Il faut savoir que la ville de Sidi Ifni est restée plus longtemps que les autres villes marocaines sous le joug colonial espagnol et n’a été rétrocédée au Maroc qu’en 1969. Ville alors florissante, elle connaît depuis un processus de marginalisation et de paupérisation. Administrativement déclassée et rattachée à la province d’Agadir en 1970, Sidi Ifni ne bénéficie pas des mêmes subventions que les villes voisine et elle vivote aujourd’hui de tourisme, de la pêche encore concédée et de l’argent envoyé par ses émigrés. Le taux de chômage actuel y dépasse les 30%. L’absence de perspectives incite nombre de jeunes à s’embarquer clandestinement vers les Canaries voisines (28 heures de traversée) ou l’Espagne.

    En revanche, les ressources halieutiques de la région attisent les convoitises de lobbies économiques extérieurs à la ville, ayant de très fortes connexions avec l’appareil sécuritaire du Royaume. Ifni voit passer le poisson mais n’en récupère pratiquement plus aucun bénéfice et même les postes de travail du port bénéficient essentiellement à une main d’œuvre extérieure à la région.

    Cela explique pourquoi, exaspérée par les promesses non-tenues et l’absence de réponses à ses demandes, la population a décidé, à la fin mai 2008, de bloquer l’accès au port, ce qui a déclenché en retour, à partir du samedi 7 juin, une répression d’une rare violence menée par les plus hautes autorités sécuritaires, ceux-là mêmes qui exerçaient tout au long des «années de plomb» et qui se trouvent avoir des intérêts directs dans le secteur de la pêche dans la région.

    Le fil des évènements

    Deux évènements ont provoqué le durcissement du mouvement :

    • Des attributions de postes au sein de la municipalité, entachées de népotisme
    • Un regain d’activité au port d’Ifni qui a fait se demander «comment tant de poisson peut arriver tous les jours au port et nous crevons de faim et restons chômeurs ?»

    Le 30 mai, à la suite d’un rassemblement de protestation, des dizaines de jeunes, soutenus par la population, partent bloquer les accès du port et empêchent la sortie des camions frigorifiques chargés de poissons destinés à être traités et conditionnés à Agadir.

    Le 2 juin, les autorités demandent l’ouverture de négociations avec les manifestants, mais elles n’aboutissent pas et dès le lendemain le groupe de bloqueurs grossit tandis que les femmes de Sidi Ifni organisent des marches de solidarité et ce plusieurs jours durant.

    Dans la nuit du 6 au 7 juin, des forces de l’ordre venues de plusieurs régions du Maroc investissent la ville, par air, par terre et par mer. Plus de 4.OOO hommes de différents corps de répression bloquent les issues de la ville, dispersent violemment le piquet de blocage du port cependant qu’ils investissent les maisons des quartiers populaires, cassant les portes et le mobilier, faisant main basse sur tout ce qui a de la valeur, terrorisant les familles au saut du lit, arrêtant à tour de bras, violentant et terrorisant les femmes, transformant les écoles en casernes.

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    Chapeaux bas devant les femmes d’Ifni

    Les femmes d’Ifni sont, comme dans bien d’autres régions du Maroc, souvent reléguées dans l’espace et les tâches domestiques et ne sortent dans la rue que couvertes d’un tissu ou d’un foulard symboles de leur décence et de leur réserve.

    Mais elles ont largement adhéré au mouvement de contestation et ont fait preuve d’un sens politique et d’un courage impressionnant. Premières victimes de la dégradation des services publics, notamment de santé, de la hausse des prix et de la disparition du poisson varié et bon marché des étals, les premières elles ont organisé des marches pour bien montrer que le bocage du port n’était pas une action minoritaire et isolée. Suffoquant de colère et de honte, elles n’ont pas hésité à témoigner, malgré les tabous, devant la presse, les télévisions, les enquêteurs, des viols et de toutes les violences physiques et verbales qu’elles ont subies.

    Alors que les forces de l’ordre quadrillaient la ville et occupaient les rues, elles sont sorties, toutes en noir, les chairs encore meurtries des coups de matraque et de godillots, pour reprendre possession de la rue et libérer l’espace public. Cette irruption des femmes sur la scène publique et politique aura de toute évidence des répercussions profondes et prolongées et constitue déjà la première victoire de la révolte de Sidi Ifni.

    Dans les rues, la police matraque et tire des bombes lacrymogènes et des balles en caoutchouc. Plusieurs témoins font état de morts, sans qu’il soit possible encore à ce jour de confirmer ou d’infirmer cette information. L’arrestation de Brahim Sebaalil et sa condamnation à 6 mois de prison, pour «diffusion de fausses informations» alors qu’il avait annoncé l’existence de morts lors d’une conférence de presse, visant bien évidemment à étouffer ce point. Des groupes de jeunes gagnent les montagnes environnantes, cependant que dans les commissariats, les personnes arrêtées par centaines sont soumises à des tortures et à des violences inouïes. La plupart seront relâchées, mais une dizaine sont inculpées et 4 sont transférées à la prison d’Inezgane. Les photos des tortures feront vite le tour du monde via Internet, des cas de viols sont dénoncés. A la télévision, le premier ministre, Abbas el Fassi, déclare qu’il ne s’est rien passé à Sidi Ifni.

    Jouant son rôle d’aide aux citoyens de façon continue, tout de suite après la répression qui s’est abattue le samedi 7 juin, Attac Maroc s’est immédiatement associée à d’autres forces pour lancer une campagne d’information et de solidarité sur le mouvement d’Ifni. L’Etat et la presse aux ordres ont immédiatement désigné Attac et l’Association Nationale des Diplômés Chômeurs au Maroc (ANDCM) comme les associations fauteuses de troubles.

    Trois commissions d’enquête ont été constituées. La première, diligentée par l’Organisation Marocaine des Droits de l’Homme, s’est rendue à Ifni quelques jours après les évènements, en compagnie d’un représentant du gouverneur de la région Souss-Massa et a été de toute évidence beaucoup plus à l’écoute des représentants des autorités que des habitants de la ville. Tout en reconnaissant l’évidence d’une forte répression policière, son rapport s’est centré sur les pertes occasionnées par le blocage du port et a minimisé les violences subies par les habitant(e)s.

    La deuxième commission, désignée par le Parlement, s’est rendue à Ifni à la fin du mois de juin mais n’a toujours pas rendu ses conclusions.

    La troisième commission constituée de 14 organisations de droits humains et du mouvement social a fait le constat des violences, viols et exactions subis par les habitant(e)s, pointé les zones d’ombre et rédigé un certain nombre de recommandations.

    Cahier revendicatif des habitants d’Ifni

    • Soins gratuits et de qualité
    • 0ctroi de cartes de la solidarité nationale aux familles pauvres
    • Versement des indemnités sociales aux ayant-droits des familles des victimes de la colonisation
    • Création de plusieurs unités industrielles dans la région afin de fournir de l’emploi aux jeunes
    • Construction d’un centre de formation aux métiers de la mer au bénéfice des jeunes
    • Octroi des permis maritimes aux jeunes chômeurs pour qu’ils puissent travailler sur les bateaux de pêche
    • Généralisation effective de la pesée électronique à la criée
    • Ouverture d’une enquête sur les dysfonctionnements existant au port
    • Octroi de permis de pêche traditionnelle aux chômeurs (un permis par personne et non pour 3 personnes comme cela se pratique)
    • Réserver un quota de pêche aux habitants de la région
    • Exécution des projets inaugurés sur le papier lors de la visite royale (assainissement, électricité, routes) malgré leur inadéquation
    • L’appel au boycott des élections législatives de 2007 avait été massivement suivi.

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    La résistance continue

    La répression qui s’est abattue sur Sidi Ifni n’est pas inédite au Maroc. Depuis 1965 et la violente répression des lycéens de Casablanca, d’autres dates aussi sombres jalonnent l’histoire du Maroc: 1981, 1984, 1994 … et aujourd’hui encore de nouveaux charniers apparaissent.

    Ce qui est nouveau, c’est que cette fois une telle violence n’a pas raison de la colère des habitants. Cinq jours après le «samedi noir» du 7 juin, une manifestation de plusieurs centaines de femmes en noir reprenait possession de la rue. Le 15, c’est une marche monstre de 12.000 personnes qui sillonne pendant plusieurs heures les rues de Sidi Ifni, avec la participation d’une caravane de solidarité venue de tout le Maroc. L’opération est rééditée le 22. Depuis, inlassablement la population se mobilise, quartier par quartier et continue à présenter ses revendications et à réclamer l’ouverture de réelles négociations, avec comme préalable la libération des prisonniers et l’arrêt des poursuites pénales.

    Le 18 août, de nouveau, des manifestants décident de bloquer l’accès au port. La répression est immédiate et de nouvelles arrestations ont lieu, mais le mouvement reste très offensif, réclamant la libération des prisonniers, la satisfaction de ses revendications économiques et sociales, la poursuite des responsables des violences policières, le respect de la dignité des habitants. Cependant, les autorités manient la carotte et le bâton, le ministre de l’Intérieur multipliant les menaces et les arrestations tout en annonçant que différents projets seront mis à l’étude et en tentant de fissurer l’unité des habitants en organisant des réunions consultatives sans réel mandat avec des notables et des représentants de la société civile choisis par les autorités.

    Leçons d’Ifni

    Le mouvement qui se déroule à Ifni est riche d’enseignements et constitue un test tant pour le mouvement ouvrier et social que pour le gouvernement. Il pose des questions qui débordent largement le cadre de ce petit port naguère un peu assoupi et s’insèrent non seulement dans un mouvement social qui s’étend dans tout le sud marocain, mais aussi dans le débat qui parcourt le mouvement ouvrier international.

    En effet, il pose les questions fondamentales des politiques de l’emploi et du développement local, de l’accès à des services publics de qualité et de leur fonctionnement, mais il pose également les questions du rapport entre l’Etat et les citoyens et plus largement de la démocratie ainsi que de la nature de l’Etat et du camp qu’il représente. Les Ifniouis réclament de l’Etat qu’il assume ses fonctions: assurer aux citoyens des services publics accessibles pour tous et de qualité, promouvoir une politique de l’emploi reposant sur des perspectives réelles de développement local, rendre des comptes à la population sur son action.

    Se heurtant à une fin de non recevoir, il n’est pas étonnant qu’ils aient boycotté massivement les dernières élections législatives, marquant par là leur colère d’être ignorés par l’Etat central mais aussi leur défiance vis-à-vis des partis tout aussi éloignés des préoccupations des citoyens. Répondre à de telles préoccupations de fond par la seule politique de la matraque ne peut qu’approfondir les rancoeurs et creuser encore le fossé profond qui sépare le pouvoir de la population.

    Mais dans le même temps, les Ifniouis ne se complaisent pas en lamentations et pratiquent une forme de démocratie directe totalement inédite dans ce pays – et dans bien d’autres – s’imposant dans le débat municipal et régional en tant qu’acteurs à part entière. Ils redonnent ainsi son plein sens au mot «citoyenneté» tellement galvaudé dans les discours de gauche et de droite, dans la presse et par les ONG.

    Il y a donc fort à parier qu’ils ne se contenteront pas du replâtrage des politiques dites de lutte contre la pauvreté comme ils ne se laisseront pas embobiner par des projets de développement qui satisferaient encore une fois les intérêts non pas de la population ni des travailleurs mais des gros bonnets de la pêche ou les multinationales du tourisme qui ont déjà manifesté leurs convoitises sur la région. Car ce qui est nettement posé derrière leur mobilisation, c’est la question de qui contrôle réellement et du contrôle ouvrier et populaire sur les politiques publiques et de la démocratie.

    Ces enjeux sont d’autant plus importants que d’autres villes, dans le sud du Maroc, connaissent des mouvements d’ampleur similaire et sur des revendications de même nature, où la question de la dignité apparaît comme centrale (citons les luttes des populations de Tata, pour des services de santé gratuits et de qualité, les luttes des habitants de Bouarfa contre la surfacturation de l’eau, les luttes des mineurs contre des conditions de travail et de salaire à peine imaginables, et plus récemment les habitants de Bouizakarn…).

    Leur lutte est exemplaire et a une portée qui dépasse largement les limites de la ville, de la province et du Maroc.

    C’est pourquoi, sur le plan national et international la solidarité s’organise afin de faire de Sidi Ifni une victoire contre l’arrogance et l’égoïsme du capitalisme. Mais la victoire définitive contre cette arrogance ne pourra être amenée qu’avec l’alternative socialiste car il n’y a qu’avec une telle alternative qu’un pays comme le Maroc pourra être réellement démocratique, vu que dans les pays dominés les bourgeoisies locales sont trop inféodées à l’impérialisme et donc de par leur système incapable d’apporter l’indépendance de fait et le développement économique et social, et aussi vu que le socialisme implique le contrôle démocratique des travailleurs et des usagers, soit de la population, sur les richesses et moyens de productions à tous les échelons quant à comment produire, en quelle qualité et quantité, comment redistribuer ces richesses et biens.

    Puis, grâce au contrôle sur les moyens de production tels que les usines, les ports et autres biens de productions de richesses, biens et services par ceux qui y travaillent et qui les utilisent, il sera possible de répartir le travail entre toutes les mains disponibles et qui en font la demande, les moyens d’existence étant en possession de ceux qui les travaillent et les utilisent. Ainsi, par exemple, ce ne sera que grâce à la possession des hôpitaux et cliniques par les personnels et les usagers et la population qu’il sera possible d’obtenir des soins gratuits et de qualité, et une telle possession collective ne peut être issue que de l’alternative socialiste. C’est pourquoi, en définitive, les droits de la population de Sidi Ifni comme du reste de tout le Maroc ne pourront être obtenus que par l’authentique socialisme démocratique, qui n’a rien à voir ni avec le social libéralisme de l’USFP ni avec le stalinisme des organisations stalino-maoïstes marocaines ou des régimes de l’ancienne URSS et des pays de l’Est.


    Liste des personnes maintenues en détention et déférées devant la cour d’appel d’Agadir

    Mohamed El Ouahadani , Ahmed Boufim, Zinelabidin Radi, Abdelkader Atbib, Brahim Bara (Attac), Hassan Agharbi (Attac), Abdelmalek Idrissi, Zakarya Rifi (ANDCM), Khadija Zyane (CMDH), arrêté à Layoune le 26 août, en plus d’une autre personne à l’identité inconnue.

    D’autres sont poursuivis mais en liberté provisoire : Fayçal Moukhilif, Khalil Ezzin, Mounir Zakarya, Abderrahmane Ben Ahmed, Abdellatif Makiza, Bouchaib El Ghati, Khalid Bouchra, Brahim Boumrah, Hassan Moumni (Attac).

    Par ailleurs, Brahim Sebaalil (CMDH) a été jugé à 6 mois de prison et est actuellement à la prison de Salé.

  • Le nouveau FN – Le même vieux racisme

    Suite au renvoi de l’ancien président à vie du Front National, le Dr. Féret, le parti néofasciste avait fièrement prétendu être intégralement rénové. Le nouveau président était alors Michel Delacroix, une figure également controversée chez laquelle on avait trouvé des armes il y a quelques années à peines. Aujourd’hui, Delacroix réapparait à nouveau dans les médias pour avoir chanté une chanson antisémite nauséabonde.

    Le film dans lequel nos deux néonazis en herbe se sont amusés en souvenir des camps de la mort a été divulgué dans le cadre du divorce de Delacroix. Cette chansonnette, Delacroix l’a poussée en compagnie de Luc Vankeerbergen, moins connu du côté francophone, un membre du conseil du CPAS de Malines pour le compte du Vlaams Belang. Cela confirme bien que les liens entre le Front National belgicain et le Vlaams Belang nationaliste ne sont pas aussi distendus que ce que l’on pourrait croire…

    Pour les élections, les deux partis d’extrême-droite se seraient même arrangés pour se répartir les communes bruxelloises selon le taux de francophones et de néerlandophones, histoire de ne pas se déranger mutuellement. Patrick Sessler, un des leaders du FN, a d’ailleurs été très actif au Vlaams Belang. Sessler a aussi été prit en train de faire le salut nazi sur la tombe du dictateur fasciste espagnol, Franco.

    Ce qui les rassemble, au-delà des petites amitiés, c’est leur nationalisme et leur haine des étrangers. C’est ainsi que Vankeerbergen et Delacroix se sont retrouvé à chanter une petite chanson sur la Shoah sur l’air de «L’eau vive» de Guy Béart: "Ma petite juive est à Dachau, elle est dans la chaux vive. Elle a quitté sont ghetto pour être brûlée vive." Le parlementaire du FN Cocriamont avait déjà avoué auparavant qu’il était négationniste (visiblement, l’existence et la taille des camps d’extermination et de concentration sont des sujets de dispute entre les deux zozos).

    Le Front a mit Delacroix à la porte, mais il reste toujours parlementaire. Au Vlaams Belang, Vankeerbergen a tout de suite suivi le même chemin.

    Le "renouveau" du FN est juste une utopie, à balancer à la poubelle au plus vite de même que ce parti. Il s’agit bien évidement toujours de la même clique de racistes et de négationnistes qui, il y a peu, considéraient encore Féret comme un Fuhrer. L’exclusion de Daniel Féret était une condition pour tenter de débuter la formation d’un noyau actif, d’un parti de cadre comme il en existe déjà un en Flandre.

    Cela ne prend cependant pas. Le FN rénové n’arrive pas plus à s’imposer que le vieux FN. Mais le Front ne frappe pas que par son racisme et ses "accidents". Il frappe surtout et avant tout par sa totale incapacité à offrir une réponse sérieuse aux problèmes sociaux auxquels est confrontée une large couche de la population.


    Liens:

    Fascisme hier et aujourd’hui: De la moisissure sur un système pourri

    Manifestation de Résistance Internationale contre le FN à Molenbeek

  • Des huissiers employés pour casser les piquets de grève

    Le porte-parole de Carrefour était on ne peut plus clair le weekend passé: avec une requête unilatérale et des astreintes juridiques, l’entreprise peut briser un piquet de grève. Ce n’étaient là que des mots mais samedi, à la filiale de Carrefour de Sint-Pieters-Leeuw, les ordonnances du juge ont effectivement été notifiées de façon arbitraire à des personnes présentes. Parler à un client devant le magasin suffisait pour se voir notifier une contrainte.

    Par Geert Cool

    Des dizaines de militants syndicaux et de sympathisants ont reçu de telles ordonnances des huissiers qui avaient reçu du juge la compétence de recourir à la force publique pour interdire chaque empêchement ou chaque obstacle à l’entrée des locaux, du parking,… Tomber en panne sur le parking tombait donc également sous la compétence des huissiers qui peuvent dès lors imposer une astreinte.

    Tiré par les cheveux? Et bien non, car cela faisait partie de la décision juridique remise aux militants syndicaux. La direction de Carrefour a fait appel à quelques avocats du cabinet Claeys & Engels pour casser la grève. Une requête a été dressée dans laquelle trois arguments sont utilisés:

    • violation de la liberté de commerce, d’industrie et du droit de propriété,
    • violation du droit de travail et de salaire des travailleurs non-grévistes et
    • violation du droit au travail des tiers entreprises et clients.

    Base juridique: un décret de… 1791

    Le principal argument est celui du droit d’industrie et de commerce. Les avocats se basent pour cela sur le décret D’Allarde de 1791 (introduit chez nous après l’annexion à la France en 1795). La raison pour laquelle les ordonnances de ce décret ont aujourd’hui force de loi chez nous nous échappe. A partir du décret D’Allarde, il n’y a qu’un petit pas vers une autre loi datant de 1791, la loi Le Chapelier qui déterminait que chaque attroupement de travailleurs était interdit parce que cela allait à l’encontre du «libre exercice de l’industrie et du commerce». C’est exactement le raisonnement que Carrefour suit et qui, curieusement, a été soutenu par les juges bruxellois.

    Nous ne sommes donc pas les seuls pour qui ces attaques contre le droit de grève datent du 18e siècle… Le premier et principal argument des avocats de Claeys & Engels commence par une référence au décret D’Allarde. Mais alors que, en 1791, cette loi était liée à une interdiction des travailleurs de s’organiser, elle est aujourd’hui liée aux «faits établis» qui vont de pair avec cette organisation. «Des actes qui empêchent l’employeur de se servir de l’entrée de l’entreprise sont des faits établis qui portent atteinte au droit de la liberté d’entreprise», selon un juriste auquel se réfère la requête.

    La base juridique reste donc à ce jour limitée à un principe général datant de 1791 ainsi qu’à l’interprétation de ce principe par un juriste et au fait que cette interprétation a été suivie par un juge liégeois. C’est un peu faible comme réponse sur le droit de grève et comme base juridique, mais cela a laissé le juge en question de marbre. Ce dernier a ainsi approuvé sans rechigner la requête de Carrefour.

    Comme autre argument, on peut lire le droit de propriété garanti par la Constitution. Est-ce que ce droit a été remis en cause par les piquets de grève? Pour autant qu’on le sache, les militants syndicaux présents n’ont procédé à aucune collectivisation (sans parler de nationalisation). L’argument que la pleine jouissance de la propriété est entravée par des travailleurs qui bloquent une entreprise est en fait utilisé pour faire rentrer des non-grévistes. Apparemment, le patronat voit la force de travail des non-grévistes comme faisant également partie de sa propriété…

    On en vient au deuxième argument: la violation du droit de travail et de salaire des non-grévistes. Pour cela, Carrefour se base sur l’article 23 de la Constitution, dans lequel on trouve par ailleurs également le droit de chacun à «mener une vie digne de l’être humain». Tout le monde «a droit au travail et au libre choix de travail professionnel dans le cadre d’une politique générale d’emploi qui vise, entre autres, à garantir un niveau d’emploi aussi haut et stable possible, le droit à des conditions de travail et de salaire raisonnables, aussi bien que le droit d’information, de concertation et de négociations collectives».

    Pourquoi Carrefour ne reconnait-elle pas le droit à un salaire raisonnable aux travailleurs de la filiale de la Tour Bleue à Bruges? Pourquoi Carrefour ne reconnaît-elle pas le droit de concertation et de négociations collectives en présentant l’action comme un droit individuel et non pas collectif? C’est évidemment un peu faible d’attaquer sur base d’une disposition qu’on ne suit pas soi-même…

    Enfin arrive le dernier argument: «les faits établis violent le droit de travail des tiers entreprises et clients». Pour cet argument, aucune disposition légale n’est citée. Pour résumer, la base juridique est donc un principe général datant de 1791 et une interprétation très unilatérale de l’article 23 de la Constitution. Le droit de grève et le droit de mener des actions collectives doivent s’effacer devant cela.

    Ampleur de la disposition

    Les avocats de Carrefour demandent au juge de préciser la mission de la police pour que celle-ci ne se limite pas à la protection de l’huissier. «Il est donc utile de préciser sa mission (celle du pouvoir public) et de lui ordonner de donner suite aux ordres que l’huissier de Justice lui donne, si nécessaire en utilisant la contrainte physique pour assurer l’entrée pacifique des bâtiments.» Qui décide donc des missions de la police? Le patronat!

    L’ampleur et la durée de la disposition constitue un autre point particulièrement grossier: la durée de validité est d’un mois, dès le 17 octobre, et peut être rallongée si la crainte existe que d’autres «faits établis» puissent être «commis». Jusqu’au 16 novembre, il est interdit aux militants de mener une action à une filiale de Carrefour sur le territoire de l’arrondissement juridique de Bruxelles. A Sint-Pieters-Leeuw, l’huissier a déclaré à un militant arrêté que «mener une action» peut être interprété largement : faire ses courses suffit. C’est littéralement qu’a déclaré ce huissier! Que cette menace puisse de cette façon violer «le droit du client» et «d’accès à l’entreprise» n’est sans doute qu’une coïncidence toute ironique.

    Le fait qu’une intervention juridique est préventivement demandée est tout aussi contestable. Le professeur Gilbert Demez de l’UCL (université de Louvain-la-Neuve) déclarait encore début 2006 dans une interview au quotidien Le Soir que de telles interventions préventives de la justice constituent un dépassement du pouvoir juridique. Il ajoutait encore qu’une intervention juridique n’est utilisée que comme moyen de pression patronal, où ce n’est pas tant la protection des droits qui est en jeu que la limitation du droit de grève. Le professeur Demez était d’opinion que limiter les moyens d’action du «contrepouvoir social» mène à une forme de «dictature»

    La base du droit de grève

    Ce n’est qu’après la Première Guerre Mondiale que le droit de faire grève et de se syndiquer ont été reconnus en Belgique, bien évidemment dans le contexte des mouvements qui ont suivi la guerre, dont la Révolution russe était un des points culminants. Partout en Europe se développaient des mouvements et les travailleurs se sont révoltés dans différents pays. La bourgeoisie avait peur de la force du mouvement ouvrier organisé et elle a donc dû faire des concessions.

    Ainsi a entre autres été instauré le suffrage universel (masculin uniquement), mais la liberté syndicale a aussi été reconnue. En 1921 une loi a garanti «la liberté d’organisation». En même temps, une loi antigrève a été abolie (le fameux article 310 de la loi pénale qui interdisait tout attroupement à une entreprise) et la journée des 8 heures (ainsi que la semaine de travail de 48 heures) a été introduite.

    Le droit de grève est le fruit de la lutte des travailleurs et a plusieurs fois été reconnu juridiquement (entre autres dans la Charte Sociale de l’Europe). Les piquets de grève et les barrages routiers font partie du droit de grève et du droit de s’organiser. Cela a été confirmé par plusieurs Cours de justices en Belgique (notamment la Cour de Cassation en 1997 ou la Cour d’Appel à Anvers en 2004).

    Le droit de mener des actions collectives ne peut tout simplement pas être limité. Le Comité Européen des Droits Sociaux a jugé il y a quelques années dans un rapport sur la Belgique que les piquets de grève pacifiques font partie du droit garanti de mener des actions collectives, des astreintes contre un tel piquet de grève ne sont donc pas acceptables.

    Mettre sur pied des piquets de grève et même des barrages routiers fait partie de la liberté d’expression. D’ailleurs, dans le cas des barrages routiers, nous ne sommes pas les seuls à les considérer comme partie intégrante de la liberté d’expression. La Cour Européenne de Justice, qui n’est pas connue pour ses sympathies avec les idées du socialisme, a déclaré que la liberté de manifester (y compris les barrages routiers) ne peut être limitée que de façon exceptionnelle (arrêt de Schmidberger du 02/08/2003). La liberté d’expression lors d’un barrage routier a priorité sur le libre trafic de marchandises et de personnes, a déclaré la Cour.

    Juridiquement, il y a donc une base pour défendre le droit de grève, alors que celle sur laquelle se reposent les casseurs de grève est très, très, limitée. Néanmoins, ces derniers semblent toujours obtenir gain de cause chez les juges. Seuls quelques juges échappent à l’attrait de l’illusion que c’est eux qui décident dans des conflits collectifs. Qu’il s’agit bien d’une illusion est évident : ce sont les patrons qui décident, qui utilisent la justice pour pouvoir recourir à des huissiers ou qui encore peuvent considérer la police comme leur propre milice privée.

    Il faut une campagne

    L’utilisation des astreintes pendant les grèves a déjà plusieurs fois mené à des protestations. En 2002, une pétition syndicale a rassemblé 80.000 signatures et syndicats et patronat ont négocié pour conclure un «gentlemen’s agreement», un accord qui n’est pas imposable. Dans cet accord, le patronat a promis d’éviter de recourir à des interventions juridiques. Il ne reste rien de cet accord.

    Pour la défense du droit de grève, nous ne pouvons pas compter sur la justice, le patronat ou les politiciens traditionnels. Nous soutenons évidemment chaque pas pour la défense du droit de grève, mais il va falloir construire un rapport de force avec lequel on peut en pratique imposer que les patrons n’osent plus utiliser de requêtes unilatérales. Voilà comment le droit de grève a été obtenu et voilà comment il va devoir être défendu.

    Evidemment, il est important de convaincre tous les travailleurs de participer à la grève: s’il n’y a plus de non-grévistes, les huissiers peuvent se mettre eux-mêmes aux caisses de Carrefour. A coté de cela, la force du nombre est importante : notifier une contrainte à 50 ou 100 personnes est encore faisable pour un huissier. Mais que faire s’il y a 1.000 militants ou plus au piquet? Ce n’est pas une option théorique, un appel des syndicats avec une mobilisation générale à une filiale de Carrefour dans la région bruxelloise aurait très certainement un grand effet.


    Comment réagir face à un huissier?

    A côté du droit de mener des actions collectives, il y a aussi des possibilités de résister à un huissier qui veut imposer une astreinte. Un huissier présent à un piquet ne peut pas simplement demander la carte d’identité d’un participant pour effectivement notifier la contrainte. La police n’a droit à faire un contrôle d’identité que pour une infraction ou un crime (par exemple perturber l’ordre public). L’huissier doit pouvoir s’identifier et prouver qu’il est compétent pour l’arrondissement juridique en question. S’il ne peut pas le prouver, il ne peut rien notifier.

  • Le néolibéralisme est à bout de souffle, les idées socialistes s’envolent

    Succès de nos meetings dans les universités

    Avec la crise économique, de plus en plus de personnes se posent des questions sur le fonctionnement du système capitaliste. Ainsi Paul Krugman, le tout récent prix Nobel d’économie 2008, a récemment déclaré : « Nous n’allons pas revenir à Karl Marx, mais nous allons redécouvrir des choses qu’avait découvertes le président Franklin Roosevelt il y a 75 ans. Laisser les marchés se débrouiller avait été désastreux dans les années 1930 et nous a de nouveau amené au bord du désastre. »

    Par Boris (Bruxelles)

    Mais certains ont bien l’intention d’aller plus loin dans la réflexion que Roosevelt et Krugman. Au mois d’octobre, Karl Marx a fait plusieurs fois la une des rubriques économiques (et même du Magazine Littéraire !) avec des titres tels que “Marx, l’invité surprise” ou encore “La crise financière remet Marx à la mode”. Les ventes de ses ouvrages sont en pleine expansion et Le Capital redevient un best-seller 141 ans après sa publication. Les librairies allemandes ont par exemple enregistré ces derniers mois une hausse de 300% des ventes du Capital tandis qu’à Paris, le nombre d’exemplaires vendus aux presses universitaires a doublé en septembre et triplé en octobre.

    Alors que les bases idéologiques du capitalisme vacillent, Etudiants de Gauche Actifs (notre organisation étudiante) s’est engagé à plein dans le débat avec une série de meetings de rentrée dans les universités. Ceux-ci ont rencontré un vif succès, comme en témoigne la participation et la qualité des débats. EGA a tenu des meetings sur le thème « Pourquoi le capitalisme est-il en crise ? Une réponse marxiste » à Bruxelles (ULB et VUB), Gand, Louvain, Anvers et Liège. A Gand, 60 étudiants étaient présents, 25 à Liège, 30 à Bruxelles. D’autres meetings sur la situation en Amérique Latine, sous-titrés « Capitalisme ou socialisme : pas de compromis possible ! », ont attiré 50 étudiants à Gand et 35 à l’ULB. Notre meeting sur la Chine et Cuba à la VUB a aussi été une réussite.

    Une nouvelle génération de jeunes comprend l’impossibilité d’aménager ce système et cherche une alternative. L’intérêt pour nos meetings de rentrée est une première indication de l’ouverture croissante pour les idées socialistes et marxistes parmi une couche grandissante de jeunes et de travailleurs. Ne reste pas sur le bord de la route. EGA combine la théorie et la pratique. Participe aux réunions ou aux cycles de formation marxiste mais aussi aux campagnes que nous menons (cf pages 10-11-12). Toi aussi, rejoins-nous.

  • UCB: 450 licenciements malgré des profits énormes

    Cet après-midi, les ouvriers d’UCB en grève ont organisé un petit concert pour les familles du personnel et les sympathisants devant les portes de l’usine. Une septantaine de personnes ont profité des rythmes africains et d’une initiation à la danse. Cet évènement était une distraction bienvenue dans un conflit social qui prend base sur le licenciement de 370 employés et de 80 ouvriers pour cause de restructuration. Après le concert, nous avons discuté avec quelques membres du front commun syndical (FGTB-CSC) à propos de la grève.

    Sur quoi porte exactement le conflit?

    «UCB veut faire un licenciement collectif sur le site de Braine l’Alleud de l’ordre de 450 travailleurs: 370 employés et 80 ouvriers. Ce licenciement cadre dans une restructuration de l’entreprise: UCB veut changer sa stratégie sur le marché pharmaceutique. La direction dit que “tout d’un coup” elle a été confrontée à une baisse de la demande de médicaments à cause d’une modification de la politique de remboursement des médicaments. Pourtant, c’est là une évolution qui prend place depuis déjà de nombreuses années et qui était prévisible. La direction a quand même continué comme si rien ne se passait pour engranger le plus de profit possible des anciens produits avant de modifier la production. Le sort des travailleurs qui produisent ces médicaments n’était pas important : l’idée était à terme de les licencier avec un plan social minimal.»

    «La direction prétend avoir voulu orienter sa production vers le marché de la biopharmaceutique. Comme si un tel changement se déroule du jour au lendemain ! Le développement d’une gamme de produits dans ce secteur prend au moins dix ans de recherche! Pour cela, UCB a racheté l’an dernier les entreprises Schwartz Pharma et CellTech en espérant pouvoir utiliser les produits de ces entreprises. Cela n’a pas marché et 450 travailleurs doivent maintenant en payer le prix» (le rachat de Schwartz Pharma et CellTech à coûté à UCB respectivement 4,4 et 2,3 milliards d’euro – ndlr).

    «Malgré tout cela, UCB a toujours fait des profits : sur un chiffre d’affaires de 3,6 milliards d’euros, ils ont obtenu en 2007 100 millions de profit net. Pour 2008, le profit est même estimé à 700 millions d’euros! Les travailleurs attendaient dès lors un plan social convenable, mais ce que propose la direction est scandaleux : un ouvrier qui a travaillé pendant 25 ans pour UCB recevra 62.000 euros brut : soit pas plus de 1.000 euros net par année travaillée!»

    Comment la grève a-t-elle été déclenchée et comment a-t-elle été suivie par les employés et les ouvriers?

    «L’action a commencé comme une grève spontanée parmi les ouvriers, qui ne voulaient pas accepter ce plan social. Nous revendiquons dans cette situation un plan social convenable, avec de bonnes primes de départ. Dans la situation économique actuelle, ce n’est pas du tout un luxe : comment veux-tu trouver aujourd’hui un autre travail convenable en étant un travailleur de 45 ans? Les ouvriers n’ont pas accepté la situation et sont partis en grève. Leurs délégués les ont suivis et ont organisé la grève.»

    «Parmi les ouvriers, la grève est générale, les différentes équipes se sont mises ensemble et ont collectivement décidé d’arrêter le travail. Il n’y a pas d’équipes pour faire tourner la production».

    «Chez les employés, la situation est différente. Ils ont décidé de ne pas suivre les ouvriers dans leur action, surtout sur base de la pression qu’ils ressentent de la part de la direction. Certains militants individuels participent quand même au piquet.»

    Comment se déroule la grève? Quels sont les problèmes ?

    «Les problèmes sont surtout dus à l’attitude extrêmement agressive de la part de la direction. Les cadres appellent les travailleurs chez eux pour les menacer. On dit aux travailleurs qui participent à la grève qu’ils n’étaient pas initialement sur la liste de licenciements, mais qu’au vu de leur attitude « négative », ils le seront. C’est une véritable terreur intellectuelle!»

    «La direction veut absolument remettre l’usine en route et utilise tous les moyens possibles : un huissier est passé, escorté de la police, pour déclarer qu’il y a des astreints de 1.000 euros par travailleur ou fournisseur qui ne peut pas rentrer. Le piquet n’a jamais été un piquet de blocage : tout le monde peut passer. Le problème c’est que seulement les employés, et les 100 travailleurs avec un CDD viennent travailler : tous les ouvriers refusent, et donc il n’y a pas de production… Mais quelle limitation scandaleuse du droit de grève!»

    «La direction a alors décidé de laisser travailler les ouvriers avec un CDD dans toute la production : même s’ils n’ont aucune expérience! Une usine chimique, c’est pourtant pas un jouet! Les conséquences sont là : aujourd’hui, un ouvrier temporaire a été gravement blessé quand sa main a été bloquée dans une machine pour laquelle il n’avait aucune expérience. Il est maintenant à l’hôpital pour une opération et risque même de perdre sa main! Ceci démontre l’attitude de la direction par rapport aux travailleurs : ce ne sont pour elle que des outils qu’on peut utiliser n’importe comment et, quand on n’en a plus besoin, on les jette à la poubelle!»

    «Les astreintes de la direction sont une scandale : pendant des années, comme ouvriers, nous avons tout accepté pour garantir les profits de la direction : travailler en équipe, avec toutes les conséquences pour nos vies familiales, accepter de travailler les weekends, la « polyvalence » – qui signifie qu’on peut être mis sur n’importe quel poste – une flexibilité extrême : nous avons tout accepté pour garantir la rentabilité de l’entreprise.»

    «Et maintenant, la direction nous traite comme des criminels : il n’y a jamais eu de blocage, mais ils nous ont quand même envoyé un juge, un huissier et la police. Nous ne sommes quand même pas des bêtes ou des sauvages? Nous ne sommes que des êtres humains qui veulent un salaire correct et un plan social acceptable pour le travail que nous faisons. La solidarité dans le quartier est énorme : une friterie locale nous a offert ses tables et ses chaises pour qu’on puisse avoir des meubles au piquet La commune, sur demande du bourgmestre, est venue installer une tente pour que les travailleurs qui gardent le piquet pendant la nuit puissent avoir un abri contre la pluie et le froid. Nous recevrons de l’électricité d’une entreprise voisine, des habitants et magasins dans le quartier nous offrent des boissons et de la nourriture… Voilà la solidarité humaine dans la pratique.»

    «Mais il y a tout de même encore une grande demande de solidarité de l’extérieur: de la part d’autres délégations syndicales, de gens, de la presse. Ce conflit est trop peu connu. Nous invitons tout le monde à notre piquet!»

    UCB Braine l’Alleud se trouve sur le zoning industriel de Braine, près de la sortie Whautier-Braine sur la E19. Après la sortie, prendre en direction de Braine, continuer jusqu’aux premiers feux, tourner aux feux à droite pour rentrer dans le zoning industriel. Après le rond point à gauche, tout au bout de cette rue, se trouve UCB et le piquet de grève. (Chemin du Forest, 1420 Braine l’Alleud). Les travailleurs sont présents au piquet 24h/24, les visites de solidarité sont plus que bienvenues!

  • Ikéa – Hognoul : Rapport du piquet de grève

    Ikea Hognoul. Il est 9 heures du matin. Il pleut. Le grand parking est quasiment désert. Devant les portes du magasin, un piquet vert et rouge bloque l’entrée. A quelques dizaines de mètres de là, une vingtaine de travailleurs, des représentants de la direction, un huissier. Cela vous rappelle quelque chose ?

    Rapport par Jean Peltier

    Et bien oui, il y avait déjà eu grève chez Ikea vendredi 31 octobre. Et ce lundi, les travailleurs ont remis cela. Il faut dire qu’ils ont le chic pour bien choisir leur jour (la pluie mise à part). Vendredi 31, la veille d’un weekend férié, la perte de chiffre d’affaire pour le seul magasin d’Hognoul était estimée à 1 million d’EUR. Et comme ce lundi est la veille d’un jour férié et que pas mal de gens ont pris congé, on peut penser que le bas de laine d’Ikea va encore en prendre un coup.

    Au piquet, l’accueil est toujours aussi sympathique (café, cake et même une goutte d’alcool de framboise !). La discussion s’engage rapidement. Une nouvelle grève, une semaine et demie après la première, cela veut dire que rien n’a bougé ?

    «Non, les choses ont quand même avancé» nous répond avec un sourire Annick Sangiorgi, déléguée principale SETCa. «La direction a donné certaines réponses satisfaisantes. Ainsi, plus question à l’avenir d’imposer du travail de nuit sans avoir eu d’abord une concertation avec le syndicat. Par contre, sur la prime bonus, il n’y a pas d’accord. La direction nous a présenté un schéma pour le calcul de cette prime : celui-ci repose d’une part, sur le chiffre d’affaire réalisé et d’autre part, sur le montant du « transtype » (un poste chiffrant la casse de matériel, l’utilisation de matériel en stock pour les décorations,…). Suivant les résultats – plus ou moins bons – de ces deux postes, trois « scénarios » seraient possibles : bas (la prime serait de 350 EUR maximum), moyen (500 EUR maximum) ou haut (720 EUR). Il s’agit évidemment de montants brut et pour des temps plein. Nous pouvions discuter sur base de ce principe de calcul, mais nous voulions que le minimum soit fixé à 500 EUR». Un autre militant approuve avec humour «Quand tu vois d’un côté les bénéfices faits par Ikea depuis des années et que tu regardes de l’autre côté ce qui reste en net pour un gars qui travaille à temps partiel hors d’une prime annuelle brute de 500 EUR pour un temps plein, tu te dis qu’on n’exagère quand même pas. Mais, à les écouter, c’est comme si on allait les empêcher de fêter Noël s’ils devaient nous payer cette prime!»

    La direction et les syndicats ont tenu – chacun de leur côté – des assemblées du personnel pendant deux jours. «Lors de nos AG, nous avons présenté l’état des négociations et les propositions de la direction» poursuit Annick. «Nous avons organisé un vote en expliquant que voter Non signifiait automatiquement refaire une journée de grève. A Hognoul, nous avons eu 73% de Non sur 228 votants. Il fallait aussi que 3 des 6 magasins votent pour la grève : il y en a eu 4! »

    Pourtant la direction a multiplié les pressions sur les travailleurs, en particulier sur ceux qu’elle supposait les plus vulnérables : les temps partiels et les contrats à durée déterminée. Malgré cela, le soutien à la grève est incontestable. «C’est un vote qui est bien réfléchi. Pour beaucoup de gens, ce n’est pas évident de faire grève. D’autant plus qu’il y a plus de 2/3 de travailleurs à temps partiel et qu’une journée de grève, ça peut faire mal au portefeuille. Mais il y a des moments où il faut savoir se positionner clairement et les travailleurs l’ont fait».

    Anne-Marie Dierckx, déléguée CNE, est du même avis. «A Arlon, beaucoup de travailleurs sont des frontaliers français et luxembourgeois qui ne sont pas syndiqués. Et pourtant les travailleurs ont voté la grève à 80%. A Zaventem, le blocus est complet. A Anderlecht, le résultat était un peu plus mitigé mais ils ont décidé de suivre le mouvement. Il n’y a que les magasins de Wilrijk et de Ternat qui devraient ouvrir aujourd’hui.» Pour Anne-Marie, la direction cherche à gagner du temps en appelant les travailleurs à la patience. «Elle dit qu’elle ne peut rien mettre de plus sur la table parce qu’elle veut conserver une marge pour faire face à ce qu’elle devrait concéder dans le nouvel Accord Interprofessionnel.» Une patience que n’ont pas les travailleurs qui voient tous les jours leur pouvoir d’achat rogné par la hausse des prix….

    A Hognoul, la direction n’a pas fait appel à la justice contre le piquet. Elle a quand même essayé de négocier avec les syndicats l’entrée de travailleurs non-grévistes dans le magasin en échange d’une promesse de ne pas essayer d’ouvrir les portes de celui-ci au public. Une proposition fermement rejetée par les délégations syndicales. Comme le dit Philippe Dekeukelier, permament CNE, «Si on laisse entrer des non-grévistes aujourd’hui, demain il n’y aura plus moyen de faire grève. Un piquet de grève est indispensable pour empêcher la direction de faire pression sur les plus vulnérables.»

    Un message ferme approuvé et applaudi par le piquet. La journée sera longue mais la détermination reste entière.


    Liens:

  • LES ETUDIANTS NON PLUS N’ONT PAS DE PARACHUTES DORES…

    Des milliards ont été débloqués en quelques jours pour les banques alors que, pendant des années, les gouvernements successifs ont clamé qu’ils n’avaient pas un rond pour l’enseignement, la santé, les transports en commun,… Le pire c’est qu’ils osent encore et toujours ne rien faire en ce qui concerne le pouvoir d’achat. D’ailleurs, ce problème de la hausse des prix n’affecte pas uniquement les travailleurs qui ont organisé la journée d’action du 6 octobre. Elle touche de plein fouet l’ensemble de la population, ainsi que les étudiants.

    Pablo N (Bruxelles)

    En effet, selon une enquête menée en septembre 2007 par la Fédération des Etudiants Francophone, un étudiant paie entre 7.200 et 12.000 € par an pour ses études (la large fourchette s’expliquant entre autres par la loca-tion ou non d’un kot). Cette somme comprend le minerval, les syllabus, les livres, le loyer, l’alimentation, l’accès à la culture, les soins de santé,… La situation est d’ailleurs fort semblable pour les étudiants néerlandophones.

    Tout cela pèse lourdement sur le budget des étudiants et de leur famille et empêche très clairement toute une partie des fils et des filles de travailleurs d’accéder à l’enseignement universitaire. Avec l’inflation actuelle, cette situation ne peut que s’aggraver. C’est pour cela que l’organisation étudiante du MAS, les Etudiants de Gauche Actifs, est signataire et participe à la plateforme ResPACT qui réclame la réduction du coût des études. Cette campagne arrive à point durant une période où le pouvoir d’achat des étudiants et des travailleurs doit être défendu.

    Les problèmes dans l’enseignement ne se limitent cependant pas au coût des études. Ainsi Vandenbroucke, le ministre « socialiste » de l’enseignement flamand, après avoir scrupuleusement mis en œuvre la commercialisation de l’enseignement suite aux accords de Bologne, ne respecte même plus les règles de son propre plan. Celui-ci stipule en effet que les subsides aux universités et aux hautes écoles flamandes doivent être indexés.

    Donc, en toute logique, la VUB verrait son budget augmenter d’environ 3,34%, mais le ministre ne veut l’augmenter que de 1,9 %… Soit un manque de 2 millions d’euros pour l’université, ce qui signifierait très certainement une cinquantaine de licenciements dans le personnel, un chiffre énorme pour un établissement tel que la VUB. Le pire, c’est que ce scénario risque de se reproduire dans toutes les universités et hautes écoles flamandes.

    Comme les gouvernements refusent de refinancer l’enseignement, ce sont les autorités des différentes institutions qui sont obligés d’appliquer des coupes budgétaires dans leurs propres établissements. Si nous voulons rendre les études accessibles et de qualité pour tous, nous devrons rompre avec la logique qui veut transformer les universités et les hautes écoles en centres de recherches et en sous-traitants des grandes multinationales. Pour cela, davantage de moyens publics pour l’enseignement sont nécessaires : il faut un refinancement public de l’enseignement à hauteur de 7% du PIB. Et, pour offrir une indépendance aux jeunes et offrir une réponse à la baisse du pouvoir d’achat, il nous faut un salaire étudiant. Mais où trouver l’argent ? Là où il se trouve, dans les poches des grands actionnaires qui nous ont volés et qui continuent à nous voler avec la complicité des politiciens.

  • Piquet de grève au Carrefour de Sint-Pieters-Leeuw: Reportage-photo

    Ce week-end, au Carrefour de Sint-Pieters-Leeuw, nous avons pu voir à quel point l’arrogance et l’agressivité du patronat n’a pas de limites. Tandis que les militants sont interdits à Carrefour et arrêtés, les photographes sont aussi interdits de fixer ces évènements sur image! Tous cela sent assez fortement le 19e siècle! Voici ce qui est arrivé ce samedi au Carrefour de Sint-Pieters-Leeuw.

    Frederik


    Pour en savoir plus:

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