Category: Moyen-Orient et Afrique du Nord

  • Non aux exécutions politiques en Iran ! Appel urgent à la solidarité internationale.

    Action de solidarité menée par la section liégeoise du PSL.

    Le mercredi 24 juin, nous avons appris la condamnation à mort de trois jeunes manifestants Iraniens, Amir-Hossein Moradi, Saeed Tamjidi et Mohammad Rajabi sur base de charges mensongères. Ces condamnations à mort visent à effrayer et à paralyser les manifestants et les militants pour les droits des travailleurs et la démocratie. Il y a un besoin urgent de solidarité internationale pour empêcher ces exécutions.

    En novembre 2019, des protestations de masse ont secoué l’Iran avec des millions de manifestants à travers tout le pays. Le point de départ des manifestations était une protestation contre la hausse du prix de la vie et plus spécifiquement une hausse de 300% du prix de l’essence, mais elles ont rapidement pris la forme d’une contestation généralisée du régime. Ce soulèvement était marqué par de nombreuses grèves dans les usines, parmi les enseignants ou encore parmi les chauffeurs routiers et a impliqué des jeunes ainsi que des travailleurs de différentes communautés (perses, arabes, kurdes,…).

    La réponse du régime fut une répression brutale avec environ 1500 morts et des milliers d’arrestations arbitraires. Aujourd’hui, des mois après la fin des manifestations, les arrestations se poursuivent. C’est ainsi qu’Amir-Hossein Moradi a été arrêté sur base d’images de vidéosurveillance, puis battu, torturé, et forcé à de fausses confessions. Ses deux amis Saeed Tamjidi et Mohamad Rajabi ont cherché refuge en Turquie, mais l’État turc a choisi de littéralement les livrer au régime Iranien. Tous les trois ont été accusés d’être membre d’une organisation terroriste et ont été condamnés à être fouettés puis exécutés.

    Les libertés politiques sont quasiment inexistantes en Iran. Les syndicats sont interdits, la peine de mort pour crimes politiques est largement appliquée et les arrestations arbitraires sont monnaie courante. Cette répression est utilisée pour intimider le mouvement et garantir un semblant de stabilité au régime face à la grande colère qui est présente dans la classe travailleuse iranienne.

    La solidarité internationale avec la jeunesse et les travailleurs d’Iran est vitale pour arrêter ces exécutions. Nous vous appelons à signer la lettre de protestation en bas de cet article et à l’envoyer à l’ambassade d’Iran dans votre pays. Si un consulat ou une ambassade Iranienne existe dans votre ville, considérez la possibilité d’organiser une action de protestation.

    Non à l’exécution de Amir-Hossein Moradi, Saeed Tamjidi et Mohammad Rajabi !
    Liberté pour tous les prisonniers politiques !
    A bas la dictature Islamique en Iran ! Pour un Iran libre et socialiste, basé sur la démocratie des travailleurs !

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    Exemple de lettre de protestation à envoyer à l’ambassade d’Iran
    Avenue F.D. Roosevelt 15
    1050 BRUXELLES
    Ambassadeur Gholamhossein DEHGHANI
    +32 2 627 03 51
    +32 2 627 03 50
    +32 2 762 55 49
    secretariat@iranembassy.be

    Non aux exécutions de manifestants en Iran !

    Le mercredi 24 juin, l’Iran Human Right News Agency (HRANA – Agence de presse iranienne pour les droits humains) a rapporté que la Cour suprême d’Iran a entériné la condamnation à mort de trois jeunes manifestants arrêtés par les forces de sécurité durant les manifestations de Novembre 2019.

    La confirmation de ces condamnations à mort n’a pas été annoncée officiellement, bien qu’elle ait été communiquée et confirmée par l’avocat d’un des étudiants emprisonnés.

    Amir-Hossein Moradi, Saeed Tamjidi et Mohammad Rajabi ont tous été condamnés à la prison, au fouet et à la peine de mort par le tribunal révolutionnaire islamique (un tribunal politique compétent pour la sécurité nationale, les délits politiques et les « crimes contre la décence publique ») en février. Après un appel, la cour suprême a validé la décision du tribunal révolutionnaire islamique.

    Le 15 novembre, le gouvernement iranien avait annoncé une augmentation de 300% du prix de l’essence, ce qui fut l’élément déclencheur de manifestations de masse dans 29 des 31 provinces d’Iran. La protestation a fait face à de violentes attaques de la police et du bras paramilitaire des gardiens de la révolution (basiji) ce qui a amené à des centaines de morts et de blessés, et à des milliers d’arrestations, qui se poursuivent encore des mois après la fin de manifestations.

    Les forces de sécurité ont identifié et arrêté Amir—Hossein Moradi à partir de vidéos de surveillance pendant les manifestations de Novembre 2019. Il a été battu durant son arrestation et ses interrogatoires, et a été maintenu à l’isolement pendant un mois entier. Il a également été torturé et contraint d’apparaître à la télévision d’État pour « confesser » qu’il avait mis le feu à des banques et à des stations essence, et qu’il avait endommagé des biens publics. Cela même avant d’avoir été jugé et condamné par un tribunal ! Moradi et les autres accusés dans cette affaire se sont vu retirer le droit à avoir accès à un avocat durant la phase d’investigation.

    Les deux autres, Mohammad Rajabi et Saeed Tamjidi, ont fui en Turquie après l’arrestation de leur ami Moradi mais ont été arrêtés en Turquie et, malgré qu’ils aient produits d’amples preuves du fait qu’ils étaient en danger pour avoir participé aux manifestations, les forces de sécurité Turques les ont extradé en Iran où ils ont immédiatement arrêtés.
    Les trois accusés, tous dans la vingtaine, ont été accusés d’être de membre de l’organisation Mujahedin-e Khalq (« les moudjahidines du peuple »), qui est considérée comme une organisation terroriste par le régime iranien. Ils ont tous nié ces accusations.

    Nous exigeons l’annulation des exécutions des trois manifestants !
    Nous exigeons la libération de tous les manifestants, syndicalistes et prisonniers politiques !
    À bas la dictature islamique en Iran !

  • Liban. La crise économique, le Covid-19 et la révolte de la faim

    A travers une grande partie de la planète, les mesures de confinement ont mis fin à la vague de soulèvements de masse qui a touché des pays tels que l’Irak, l’Algérie, le Chili, la France et Hong Kong en 2019. Aujourd’hui, le Liban est le premier pays à voir les masses occuper les rues à nouveau.

    Par Christian Pistor

    Au Liban, le confinement a commencé à la mi-mars et a mis fin à une vague de protestations de masse qui avait débuté le 17 octobre 2019. Initialement dirigée contre une série de nouvelles taxes prévues dans un programme d’austérité sans précédent, la contestation a connu une croissance exponentielle. À un moment donné, près de deux millions de personnes étaient dans les rues, soit environ un tiers de la population du pays, pour manifester leur colère contre des années de politiques néolibérales. De manière significative, cette mobilisation a transcendé les divisions religieuses et communautaires sectaires.

    Au fur et à mesure, les revendications des manifestants sont devenues plus radicales pour exiger la démission du gouvernement et la fin du système politique sectaire du pays. Le Premier ministre a été contraint de démissionner. Les revendications sociales comprenaient un système fiscal progressif, la sécurité sociale et des investissements massifs dans les réseaux d’eau et d’électricité. Les jeunes, dont de nombreuses jeunes femmes, ont joué un rôle essentiel pour maintenir l’élan des manifestations. Cependant, le mouvement a été affaibli en raison du manque de structures démocratiques pour débattre et décider de la suite des événements ainsi que de l’absence d’organisations ouvrières indépendantes.

    Le contexte économique

    Le Liban est très dépendant des importations. Quatre-vingt pour cent de l’approvisionnement alimentaire et près de quatre-vingt-dix pour cent des biens de consommation sont achetés à l’étranger. Le modèle économique du pays repose sur la consommation plutôt que sur la production. En 2017, le secteur des services représentait les quatre cinquièmes de son PIB. Les fonds envoyés au pays par les Libanais travaillant à l’étranger sont essentiels à l’économie : ils représentant pas moins de 12,7 % du PIB, soit le dix-huitième taux le plus élevé au monde. La plupart des transferts de fonds des migrants provenant des États du Golfe sont fortement dépendants des pétrodollars, et comme les prix du pétrole ont baissé depuis la crise de 2008, les transferts de fonds stagnent. L’effondrement récent des prix du pétrole signifie que les transferts de fonds vont encore se tarir.

    Outre le système politique profondément corrompu et sectaire du Liban, des facteurs géopolitiques ont aggravé le déclin de l’économie du pays, dont la guerre civile de huit ans en Syrie voisine, un différend avec l’Arabie saoudite en 2017 et les sanctions américaines contre l’Iran. L’économie a connu un taux de croissance moyen de 0,3 % au cours de la dernière décennie. Bien entendu, ce dernier chiffre doit être considéré dans le contexte d’une croissance mondiale atone depuis la crise de 2008-2009.

    La crise économique s’approfondit

    Déjà en novembre 2019, la Banque mondiale prévoyait que le nombre de personnes vivant dans la pauvreté passerait de 30 à 50 % en 2020. Au début de l’année, le taux de chômage s’élevait à 46%, selon le président libanais. Dans l’ensemble, deux tiers des personnes qui avaient un emploi gagnaient un faible salaire. C’était avant que le confinement n’aggrave encore la situation.

    Le Liban comprend la plus forte proportion de réfugiés par habitant au monde. Les réfugiés syriens représentent à eux seuls un quart des 5,9 millions d’habitants du pays. 97% des réfugiés travaillent dans le secteur informel, qui représente 55% de l’économie libanaise. Leur vie est donc plus fortement mise en péril par la faim et le virus.

    Malgré les restrictions sur les retraits, les dépôts bancaires ont chuté de 5,7 milliards de dollars rien qu’au cours des deux premiers mois de cette année, selon le Premier ministre. Une grande partie de cet argent a probablement quitté le pays, une proportion beaucoup plus faible étant cachée dans les maisons de la population. Bien qu’en mars, le gouvernement ait bloqué tout nouveau retrait de dollars et que les transferts à l’étranger aient été interdits, le Premier ministre se plaint toujours que la fuite des capitaux se poursuit. Les petits épargnants ont pratiquement perdu l’accès à tout l’argent qu’ils avaient en dollars, tandis que les sommes en lires libanaises s’évaporent en raison de l’inflation. Mais les riches, eux, peuvent toujours transférer leur fortune à l’étranger. Ce sont ces contrôles des capitaux et le sentiment d’injustice inhérent à la situation qui ont alimenté la colère envers les banques.

    Avec une dette nationale qui explose, et qui s’élève actuellement à 170 % du PIB (l’une des plus élevées au monde), le gouvernement libanais a fait défaut sur une euro-obligation de 1,2 milliard de dollars. C’était la toute première “défaillance souveraine” du Liban. Actuellement, le FMI prévoit que l’économie se contractera de 12 % en 2020, après une contraction de 6,5 % en 2019. La pandémie et le confinement qui l’accompagne n’ont fait qu’aggraver une situation déjà très difficile.

    Ces derniers mois, la lire libanaise a effectivement perdu les deux tiers de sa valeur. Officiellement, elle est rattachée au dollar américain à un taux de 1,507 pour un. Pourtant, sur le marché parallèle des changes, la monnaie est maintenant négociée, au moment où nous écrivons ces lignes, à 4.300 pour un. Cela a conduit à une explosion des prix à un moment où de larges pans de la population, notamment ceux qui travaillent dans le secteur informel et saisonnier, ont été privés de revenus en raison du confinement.

    Le confinement

    Le 15 mars, le gouvernement a décrété un embargo national. Les forces de sécurité ont été envoyées pour patrouiller dans les rues et un couvre-feu nocturne a été imposé.

    Il est interdit de se réunir en groupe et les établissements commerciaux non essentiels sont fermés. La promesse du gouvernement d’aider les familles les plus pauvres n’a pas été tenue. Aucune mesure n’a été prise non plus pour protéger les locataires contre les expulsions. La seule mesure que le gouvernement a réussi à prendre a été de prolonger la date d’échéance des impôts et des factures. L’aide a été laissée aux mains des organisations de la société civile, qui comptaient sur les dons.

    Bien que le bilan officiel du Covid-19 reste relativement faible, avec 845 personnes infectées et 26 morts au 10 mai, la véritable propagation du virus est certainement considérablement plus élevée en raison de la rareté des tests, notamment parmi les réfugiés.

    Les signes de désespoir sont devenus évidents dès le début du confinement. Fin mars, l’image d’un ouvrier du bâtiment au chômage proposant de vendre son rein pour éviter que sa famille ne finisse à la rue s’est répandue sur les médias sociaux. Plusieurs tentatives d’auto-immolation ont également été signalées. Dès la dernière semaine d’avril, le gouvernement a estimé que 75 % de la population avait besoin d’aide, y compris alimentaire. Parmi les réfugiés, ce chiffre atteindrait 90 %. Bien que le confinement ait été assoupli et que certains magasins aient été autorisés à rouvrir le 23 avril, l’ordre de rester chez soi a été prolongé jusqu’au 10 mai.

    La rébellion fait son retour

    Les premiers grondements de la réémergence de la contestation se sont fait sentir le 21 avril avec des manifestants à travers tout le pays qui circulaient en grands convois de voitures drapées du drapeau libanais. L’une de ces manifestations, à Beyrouth, visait une réunion de députés. Ces manifestations ont eu tendance à être assez importantes et ont parfois vu la participation de familles entières, y compris d’enfants. Parfois de nature festive, ces manifestations ont été marquées par des pancartes faites par les participants eux-mêmes et par le drapeau national.

    Ces protestations, qui respectaient les règles de la distanciation sociale, étaient assez modérées par rapport à celles qui ont éclaté à Tripoli, la deuxième ville du Liban, dans la nuit du dimanche 26 avril, les premières à véritablement contester le couvre-feu imposé par le blocus. Pour l’instant, elles regroupent relativement peu de monde, se comptant par centaines plutôt que par milliers. Cela est compréhensible dans un contexte de pandémie et de confinement. Les personnes dans la rue sont suffisamment désespérées et/ou radicalisées pour courir le risque d’infection et de répression de l’État. Les participants étaient principalement de jeunes hommes et femmes qui luttaient avec les forces de sécurité en utilisant des pierres et des cocktails Molotov. Ces derniers ont utilisé des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc, et dans certains cas également des munitions réelles. Un homme de 26 ans a été tué. Dans certains cas, le soutien de couches plus larges de la population aux émeutes s’est exprimé depuis leur domicile par le bruit des casseroles.

    La faim est un thème récurrent parmi les manifestants. Pourtant, ils continuent également à exiger la démission du gouvernement. Outre le système politique corrompu et sectaire, les banques sont considérées comme responsables de la crise. “L’Orient le Jour”, le quotidien libanais francophone très populaire, a cité un manifestant : “Notre protestation n’est pas sectaire, c’est une lutte de classe opposant le peuple libanais écrasé par le poids de la pauvreté au système bancaire qui est responsable de la détérioration de la situation économique”. Ce n’est pas un hasard si, alors que les manifestations s’étendaient à d’autres villes, lors de la deuxième nuit consécutive de protestation, quinze banques libanaises ont été la cible d’incendies criminels et de vandalisme.

    Au milieu de tout cela, le Premier ministre Hassan Diab et le directeur de la Banque centrale, qui occupe ce poste depuis 1993, échangent des accusations sur les responsables de la crise économique. Aux yeux de larges couches de la population, le gouvernement et les banques ont perdu toute crédibilité. Le commandement de l’armée a accusé des “infiltrés” d’attiser la violence.

    Après quatre jours de violents affrontements entre les manifestants et les forces de sécurité, le gouvernement a été contraint d’adopter un plan de sauvetage économique. Le gouvernement espère obtenir un prêt de 10 milliards de dollars du FMI, en plus de la libération de 11 milliards de dollars promis en 2018. Mais cela ne se fera pas avant que des réformes politiques et économiques majeures, ainsi que des mesures de lutte contre la corruption, soient mises en œuvre. On estime que le Liban a besoin d’au moins 80 milliards de dollars pour sortir de sa situation difficile. De tels fonds ne seront pas faciles à trouver, surtout en période de profonde crise économique mondiale.

    Les réformes exigées par le FMI ne favoriseront bien entendu pas la classe ouvrière et les opprimés. Les plans de sauvetage prévoient par exemple la dévaluation de la lire libanaise à un taux de 3.500 par rapport au dollar, ce qui reflétera plus fidèlement sa valeur réelle mais fixera aussi dans le marbre les récentes hausses de prix. Ce sont précisément ces hausses de prix qui, pour une grande partie de la population, sont devenues une question de vie ou de mort. Cette incapacité du système politique et économique à assurer les besoins les plus fondamentaux des masses à court terme est une recette pour la poursuite et la croissance des protestations.

    Un signe des temps à venir ?

    Bien que le cas du Liban puisse être particulier, du fait que son économie a déjà connu une crise sévère l’année dernière, les événements qui s’y déroulent sont susceptibles d’être un signe avant-coureur de ce qui se passera ailleurs. En effet, on s’attendait à ce qu’une grave crise économique mondiale se développe avant la pandémie. En tant que telle, l’évolution de la situation au Liban pourrait n’être que légèrement en avance sur la tendance générale. Des centaines de manifestants sont d’ailleurs déjà descendus dans les rues de l’Irak voisin.

    Au Liban, comme ailleurs, la pandémie et les mesures prises pour l’endiguer mettent à nu toutes les contradictions existantes. Le monde est sorti de la crise de 2008-09 au prix d’une augmentation massive de l’endettement. Avec la crise actuelle, l’endettement va encore s’aggraver. De même, la question de la fuite des capitaux, ingrédient majeur du drame libanais, se pose avec acuité dans le monde néocolonial. Jusqu’à présent, la fuite des capitaux des “économies émergentes” est déjà quatre fois plus importante que lors de la crise de 2008-2009. En outre, l’État libanais est loin d’être le seul à être confronté à une éventuelle faillite dans la période à venir.

    Alors que la tendance mondiale générale pour la prochaine période est à la déflation, en raison de la baisse de la demande, en particulier dans des secteurs tels que le tourisme et les services, dans des pays comme le Liban, à la suite de la dévaluation de la monnaie, l’inflation et même l’hyperinflation peuvent, pendant certaines périodes, alimenter considérablement le mécontentement.

    Outre le Liban, les économies de pays tels que la Jordanie et l’Égypte risquent également de souffrir d’une baisse des fonds en provenance des États du Golfe en raison de la chute des prix du pétrole. Le problème va bien au-delà de la disponibilité des pétrodollars. Les travailleurs migrants étant généralement plus vulnérables à la perte d’emploi ou de salaire, la baisse des transferts de fonds sera un problème mondial. La Banque mondiale prévoit une baisse de 19,7 % des envois de fonds vers les pays à faible et moyen revenu en 2020, soit la plus forte baisse de l’histoire récente.

    Le Liban est également loin d’être exceptionnel en ce qui concerne la vulnérabilité économique de sa population aux mesures de confinement. En 2018, l’Organisation internationale du travail a indiqué que deux milliards de personnes, soit 61 % de la population active mondiale, travaillent dans l’économie informelle. Même dans l’économie formelle, les emplois sont souvent précaires et les allocations de chômage sont loin d’être garanties. Les Nations unies ayant prédit des famines aux “proportions bibliques”, des centaines de millions de personnes pourraient bientôt être poussées par le spectre de la faim à se révolter.

    Les tâches politiques

    Il est urgent de créer des organisations ouvrières indépendantes, y compris des syndicats indépendants et combatifs, afin que la classe ouvrière puisse jouer le rôle principal dans le mouvement. Ceci est crucial si l’on veut éviter la réapparition de divisions sectaires parmi les masses.

    La classe ouvrière a également besoin de sa propre organisation politique, avec une perspective socialiste révolutionnaire. La situation désastreuse que connaît le Liban montre clairement que la réforme du système actuel n’est pas une option. Il n’y a plus de place pour des avancées sociales, même limitées.

    Les travailleurs et les masses opprimées doivent s’organiser sur leur lieu de travail et dans leur quartier. Des comités démocratiquement élus, formés sur cette base, sont nécessaires pour assurer la satisfaction des besoins fondamentaux des populations, tels que l’alimentation et la santé, ainsi que pour contrôler les prix.

    Des comités démocratiquement élus, constitués sur cette base, sont nécessaires pour assurer la satisfaction des besoins fondamentaux des populations, tels que l’alimentation et la santé, ainsi que pour contrôler les prix.

    Ces comités liés les uns aux autres pourraient constituer la base d’une assemblée constituante révolutionnaire qui remplacerait le système politique actuel, basé sur le sectarisme et la corruption, et s’emparerait des banques, des ressources naturelles et des moyens de production dans le cadre d’une économie planifiée gérée démocratiquement, une économie socialiste, afin de répondre aux besoins de la population.

    La crise économique et la pandémie sont toutes deux mondiales, elles nécessitent une réponse internationale. Le mouvement de la classe ouvrière et des opprimés au Liban recevrait une incroyable solidarité si un appel était lancé à leurs frères et sœurs du Moyen-Orient et de la communauté internationale. Plus que cela, cependant, la résolution des problèmes économiques ne sera pas possible si une économie démocratiquement planifiée n’existait qu’au Liban. Il est donc crucial que des liens soient tissés avec les mouvements ouvriers dans d’autres régions afin qu’un Liban socialiste puisse faire partie d’une fédération socialiste démocratique plus large du Moyen-Orient.

  • Tunisie. Levée du confinement : les vampires capitalistes poussent les travailleurs à la mort

    Des avis divergents sont récemment apparus concernant la levée du confinement général ou l’approbation de sa prolongation pour deux semaines supplémentaires en Tunisie. Ces réponses s’inscrivent dans le cadre d’une politique soutenue par les propriétaires des grandes institutions capitalistes qui demandent la levée de l’immobilisation et le retour des travailleurs au travail, tout en maintenant les formes minimales de distanciation sociale pendant les heures de travail.

    Par Aymen Baccouche, Tayaar al’Amael al’Qaaedi, section tunisienne d’Alternative Socialiste Internationale

    Chacun est pleinement conscient de l’échec sur le terrain de mesures telles que le port de masques de protection et l’utilisation d’outils de stérilisation pour protéger les travailleurs et leurs familles contre le risque de transmission de l’infection. Étant donné le manque d’installations sanitaires et logistiques, ainsi que la détérioration de longue date du système de santé publique et du réseau de transport public qui assure la circulation des travailleurs sur leur lieu de travail, c’est une recette pour une catastrophe.

    La situation dans ces deux secteurs résulte de politiques économiques et de choix de développement appliqués par les gouvernements successifs pendant des décennies. Ces politiques ont complètement sapé la majorité des droits de la population à la dignité et à une vie saine.

    Les appels à la reprise du travail s’accompagnent d’une campagne systématique menée par certaines sections des médias privés, qui a clairement frôlé l’utilisation de menaces directes, comme le fait de ne pas assurer les salaires des travailleurs s’ils refusent de reprendre le travail. Tout cela se fait sous le prétexte de “sauver l’économie de l’effondrement” et du “retour de la production”.

    C’est une erreur majeure qui trompe l’opinion publique, mais c’est aussi un chantage utilisé pour échapper au coût de la crise et le décharger sur la classe ouvrière. Cette manœuvre révèle comment l’avidité et les tentatives de maximisation des profits de la classe dirigeante priment sur la mise en danger des gens ordinaires, qui se retrouvent directement exposés à un virus qui menace leur sécurité et celle de leurs familles.

    D’autre part, les conditions de vie sont devenues étouffantes et même menaçantes pour de larges catégories de la population tunisienne, qui ne peuvent plus tolérer un enfermement prolongé, étant donné que les mesures d’aide sociale et financière approuvées par le gouvernement ne sont pas suffisantes pour maintenir les conditions minimales de vie quotidienne.

    Les décrets et les mesures approuvés par le gouvernement ne diffèrent pas, en substance, de l’approche néo-libérale. Ils reviennent à poursuivre des politiques économiques fondamentalement hostiles aux intérêts des travailleurs et des masses populaires. L’”union sacrée” établie entre les patrons et la direction de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) pour approuver ces mesures est déjà en train de se fissurer, alors que la classe ouvrière et les familles pauvres souffrent du confinement et de ce qui s’avère déjà être la pire récession économique depuis l’indépendance du pays en 1956.

    L’une de ces mesures est l’allocation de 2.500 millions de dinars pour lutter contre le coronavirus au niveau économique et social. 62% de cet argent, soit environ 1.550 millions de dinars, vont au secteur privé, et seulement 150 millions de dinars vont à l’aide aux familles démunies. En réalité, ce dernier montant est le même que celui alloué précédemment dans le budget 2020 pour environ 205.000 familles.

    En outre, environ 180 millions de dinars ont été déduits des salaires des travailleurs des secteurs public et privé. On dit que cette déduction est nécessaire pour couvrir le déficit de l’État ; or la baisse du prix du pétrole d’un dollar est censée libérer environ 10 millions de dinars de revenus supplémentaires pour le budget de l’État. La baisse du prix du pétrole a maintenant atteint environ 26 dollars. Au lieu que l’État garantisse les besoins des familles pauvres, ce sont les travailleurs qui sont privés de leurs revenus déjà maigres, tandis que les propriétaires de capitaux sont protégés et récompensés par un important renflouement.

    Pendant ce temps, ces mêmes capitalistes, par la voix de leur organisation, la Confédération tunisienne de l’industrie (UTICA), font pression pour un démantèlement du code du travail, sous prétexte que les heures de travail perdues pendant la période de confinement devront être “compensées” en introduisant plus de flexibilité dans la législation du travail en matière de congés payés, d’heures supplémentaires, etc.

    Le gouvernement tunisien a également obtenu un prêt d’urgence de 743 millions de dollars du Fonds monétaire international (FMI). En échange, il s’est engagé à poursuivre les “réformes” – telles que la réduction des salaires dans le secteur public et des subventions publiques à l’énergie. C’est ce que le ministre des finances a à l’esprit lorsqu’il déclare qu’en tant que gouvernement, ils vont prendre des “mesures douloureuses” ; bien sûr, cela ne signifie que douloureux pour les travailleurs et le peuple.

    La décision de lever ou non le confinement ne doit pas être laissée entre les mains du gouvernement actuel ni des groupes d’entreprises qui guident ses choix. Il doit s’agir d’un choix démocratique fait par les travailleurs eux-mêmes, informés par des avis médicaux et scientifiques indépendants, sans aucune pression politique ni aucun diktat extérieur.

    La levée progressive du confinement ne peut être entamée qu’après avoir évalué avec certitude que l’épidémie de l’infection à Covid-19 a été maîtrisée et que des mesures proactives ont été prises pour assurer une protection totale à tous, sans exception.

    Les salaires des ouvriers et des employés de tous les secteurs devraient être garantis, et aucune des mesures actuelles prises dans le cadre du confinement ne devrait être utilisée pour réduire les salaires des travailleurs ou pour exclure définitivement des travailleurs de leur emploi. Les aides financières allouées aux travailleurs nécessiteux et occasionnels devraient être octroyées dans l’industrie et l’agriculture. Des allocations spéciales devraient être accordées à tous les chômeurs.

    Des comités de coordination locaux devraient être constitués sous contrôle démocratique pour distribuer les subventions financières et l’aide sociale dans les communautés. Les contrôles sanitaires et commerciaux devraient être renforcés pour les réseaux de distribution, les magasins et les marchés. Les prix des produits de base doivent être plafonnés et les activités spéculatives des monopoles doivent cesser. Ceci est particulièrement important à l’approche du mois de Ramadan.

    En cette période exceptionnelle de croissance de la propagation de l’épidémie, nous renouvelons notre appel pour que les hôpitaux, sanatoriums et autres établissements médicaux privés deviennent propriété publique et soient placés sous le contrôle de représentants des travailleurs de la santé publique.

    Le nombre total de tests effectués a été bien inférieur à ce qui est requis. À peine plus de 3 000 tests ont été effectués entre la première détection, le 2 mars, et la fin du mois. Le peuple tunisien ne peut attendre, il est donc urgent d’intensifier les tests quotidiens de masse, afin de compter, de tracer et de contenir le nombre de personnes potentiellement infectées.

    L’intensification des campagnes de sensibilisation sur l’importance du respect du confinement est un facteur important pour surmonter cette crise épidémique – mais elle doit s’accompagner de garanties réelles et de procédures claires pour assurer les moyens de subsistance quotidiens de tous les citoyens.

    Le recours aux campagnes de dons n’est pas une solution pour faire face à une crise qui s’aggrave à tous les niveaux, mais juste un autre moyen de faire payer aux travailleurs et aux pauvres le manque d’investissement dans nos infrastructures de santé qui dure depuis des décennies. Nous renouvelons donc notre appel en faveur d’une augmentation des impôts pour les grandes entreprises et les particuliers riches, afin d’investir dans la construction d’un système de santé publique intégré qui réponde aux besoins de toutes les personnes en matière de soins et de traitement, dans de bonnes conditions. Les grandes entreprises qui refusent d’accepter de tels prélèvements ou qui recourent au chantage à l’emploi ou à l’investissement devraient être nationalisées sous le contrôle des travailleurs.

    Toute la dette extérieure devrait être annulée et il faudrait mettre fin à toutes les mesures d’austérité imposées par le FMI. Nous demandons l’imposition d’un contrôle étatique sur les flux de capitaux pour stopper la fuite des capitaux, et la nationalisation de toutes les banques privées.

    Les appels lancés par les économistes traditionnels et les propriétaires de capitaux pour lever le confinement et reprendre le travail ne sont pas seulement une caractéristique de cupidité isolée ici et là ; ils représentent plutôt une caractéristique inhérente au système du capitalisme, qui expose la vie de peuples entiers à des dangers permanents sans aucun égard pour la vie humaine.

    L’objectif du système est d’accumuler des profits pour une minorité de vampires humains aux dépens de milliards de travailleurs, de pauvres et de marginaux. Dans la poursuite de cet objectif, il a transformé la vie humaine en une marchandise, répandant dans son sillage la faim, la misère, les guerres et les crises. Les aspirations des peuples à un monde fondé sur la liberté, la justice sociale et la véritable dignité humaine ne peuvent se réaliser dans ce système capitaliste. La voie alternative pour l’émancipation de l’humanité est la lutte internationale pour une société socialiste

  • Le régime iranien perd le contrôle du COVID-19

    L’Iran est l’un des pays les plus touchés par COVID-19, le taux de mortalité y est extrêmement élevé, y compris chez les jeunes. Les tests étant restreints, les chiffres réels pourraient être cinq fois plus élevés. Deux raisons principales expliquent cette explosion catastrophique : la mauvaise volonté et l’incapacité du régime à faire face à la pandémie, et les effets des sanctions imposées par les États-Unis.

    Par Nina Mo, SLP (section autrichienne d’Alternative Socialiste Internationale)

    De nombreux correspondants occidentaux expliquent la propagation du Coronavirus en Iran par le manque de confiance dans le régime, et donc par le fait que les gens ne suivent pas les mesures qu’il propose. Certains rapports décrivent la profonde religiosité de la société et la réticence à mettre fin aux rituels et aux rassemblements religieux. Les deux sont en partie vrais, mais la réalité est plus complexe. Bien sûr, la classe ouvrière iranienne sait que COVID-19 existe et qu’il tue des gens ordinaires tous les jours, mais en raison du manque d’approvisionnement, en particulier dans les zones rurales, ils sont désespérés de savoir quoi faire.

    Pendant plusieurs semaines, le régime a menti sur l’apparition du Coronavirus. Les scientifiques supposent maintenant que le virus s’est propagé tout au long du mois de janvier. Mais à l’époque, le régime s’inquiétait davantage de la tenue de grands événements tels que les élections parlementaires et festivités de la célébration de la révolution islamique, sachant qu’au cours des mois précédents, la colère contre le régime s’était intensifiée et que des manifestations avaient secoué le pays. En outre, les relations politiques et économiques du régime avec la Chine sont de plus en plus importantes. Mahan Air par exemple, associé au Gardiens de la Révolution Islamique (GRI), a continué à transporter des étudiants religieux entre la Chine et Qom. Une fois qu’ils ne pouvaient plus cacher l’existence du virus, le régime a répandu des théories de conspiration prétendant que le virus était une arme biologique contrôlée par les États-Unis.

    Ce n’est qu’après que des ministres du gouvernement aient été testés positifs que le régime a décidé de fermer les écoles et les universités, une mesure qui est arrivée bien trop tard. Le régime a publié des déclarations enjoignant aux gens de rester chez eux et d’éviter de voyager. Mais pour la majorité de la classe ouvrière qui doit continuer à travailler pour payer son loyer et acheter de la nourriture, cela était pratiquement impossible.

    Aujourd’hui, les autorités perdent de plus en plus de contrôle. Elles ont même libéré des dizaines de milliers de prisonniers, car elles savent que les conditions d’hygiène dans les prisons sont si désastreuses qu’une épidémie de COVID-19 en tuerait des milliers. L’incapacité du régime à faire face à la situation et le fait que les gens ordinaires ont été laissés à eux-mêmes ont conduit à de dangereuses spéculations sur les façons supposément efficaces de se protéger. Par exemple, une rumeur s’est répandue à la mi-mars selon laquelle l’alcool pourrait empêcher la COVID-19. Depuis lors, plus de trois douzaines de personnes sont mortes en consommant du méthanol manipulé, qui était vendu sur le marché noir.

    Sanctions et crise économique

    Dans le contexte de COVID-19, la crise économique en Iran s’intensifie. Les revenus pétroliers continuent de baisser et l’isolement international s’accentue. La pauvreté et le chômage vont augmenter de façon spectaculaire dans les semaines et les mois à venir.

    L’administration Trump a déclaré le 19 mars que les États-Unis poursuivront leur politique de pression maximale sur l’Iran. Depuis des années, les sanctions ont rendu l’importation de produits médicaux de plus en plus difficile. Les importations humanitaires – y compris les médicaments – ont diminué ces dernières années. Bien que les entreprises iraniennes représentent environ 70 % des besoins pharmaceutiques du pays, les difficultés causées par les restrictions sur les transactions financières internationales ont entraîné une pénurie dramatique de certains médicaments spécialisés, et maintenant, d’équipements pour lutter contre le COVID-19. À l’heure actuelle, non seulement les kits de test sont rares, mais les produits médicaux en général sont difficiles à obtenir et les prix ont explosé. Il y a un besoin dramatique de millions de masques et de gants de protection. Selon certains rapports, le COVID-19 a tué une vingtaine de professionnels de la santé en moins de 20 jours après la révélation des premiers cas.

    Ce sont les pauvres qui doivent le plus souffrir de l’épidémie de COVID-19. Beaucoup de familles doivent partager de petits appartements avec leurs parents et grands-parents, les communautés pauvres sont densément peuplées. La fermeture des petits marchés locaux entraînera la pauvreté et le sans-abrisme car les gens ne peuvent pas se permettre de fermer leurs petites entreprises. Outre les pénuries, les gens ordinaires ne peuvent pas se permettre de se procurer de vrais médicaments. La crise économique, combinée aux sanctions, a affecté le coût des produits fabriqués localement, ainsi que celui des biens importés. En général, le coût des soins de santé pour les familles a augmenté de plus de 20 % au cours de l’année dernière.

    Répression et pouvoir militaire

    Le régime utilise cette situation pour accroître la répression et le pouvoir militaire. Les journalistes qui ont fait des reportages sur la situation dans les hôpitaux et sur le nombre croissant d’infections ont été arrêtés et punis. Le système de santé est principalement contrôlé par l’armée. Le 13 mars, un comité de lutte contre le COVID-19 a été formé par le régime, composé de l’armée, des GRI, de la police et des services secrets. Ils ont désormais le pouvoir d’”enregistrer” tout le monde via Internet, le téléphone ou même par des visites à domicile. L’accès à toutes les données personnelles signifie que l’armée et les GRI ont vu leur pouvoir augmenter dangereusement. En outre, il est probable que les milices iraniennes ont déjà diffusé COVID-19 en Syrie et en Irak.

    Dans la lutte contre le Coronavirus, la classe ouvrière iranienne ne peut pas compter sur le régime et son armée. Il est clair que la mauvaise gestion de cette crise par le régime a déjà coûté des milliers de vies.

    La solidarité de la classe ouvrière

    La crise du Coronavirus a intensifié la méfiance et la colère des travailleurs. Ils ne voient plus d’autre possibilité que de s’organiser. Partout dans le pays, des groupes d’aide volontaire ont vu le jour : les gens désinfectent les rues de leur propre initiative, distribuent de la nourriture aux familles pauvres ou malades et offrent leurs services aux nettoyeurs des hôpitaux et au personnel des morgues. Les travailleurs collectent de l’argent entre eux afin d’acheter du désinfectant pour les mains, des gants et des masques pour les employés municipaux, qui nettoient les rues, et pour ceux qui n’ont pas les moyens d’en acheter. Ce type de solidarité de la classe ouvrière doit être combiné avec une résistance féroce contre le régime, comme celle que nous avons vue ces derniers mois de 2019.

    Les sanctions doivent prendre fin immédiatement, et ce régime corrompu et criminel doit être renversé par la classe ouvrière afin de fournir des soins de santé adéquats et une lutte organisée contre le Coronavirus et ses effets.

  • [VIDEO] Manifestation à Tel Aviv contre le plan de Trump pour Israël et la Palestine

    Non à l’occupation ! Non au plan de Trump ! Luttons pour une paix réelle, pour l’égalité et pour le socialisme !

    Dans la vidéo ci-dessous, Yasmin explique pourquoi le Mouvement de Lutte Socialiste était présent hier à Tel Aviv dans une manifestation contre la plan de Trump.

    « Je suis Yasmin, du Mouvement de Lutte Socialiste. Nous manifestons contre le plan de Trump. Ce n’est pas un plan de paix, c’est un plan de guerre. Une guerre contre le droit du peuple palestinien à un Etat indépendant, contre le droit d’une capitale à Jérusalem et contre les droits des réfugiés.

    « Ce plan est dangereux pour nous tous, arabes et juifs, Palestiniens et Israéliens. Les armes de Netanyahou et la politique de Trump entraineront plus de guerres et de sang.

    « Pour obtenir une paix véritable et la sécurité, il faut nous battre. Nous battre contre l’occupation, contre le siège de Gaza, contre l’oppression et les discriminations. Nos partenaires dans ce combat sont les travailleurs et les pauvres de Naplouse, de Jénine et de Gaza, pas les généraux ou les capitalistes israéliens.

    « Nous ne voulons pas d’un nouvel assaut, nous voulons une paix réelle et une paix réelle signifie l’égalité totale, économique, politique et nationale. C’est pourquoi notre lutte est liée à la lutte pour une transformation socialiste de la société, pour une Palestine indépendante et socialiste au côté d’un Israël socialiste, dans le cadre d’une confédération socialiste du Moyen Orient. »

  • L’Iran entre guerre et soulèvement

    Ce mois de janvier, les États-Unis et l’Iran apparaissaient résolument engagés sur la voie d’une guerre totale faisant suite à des années de tensions croissantes. Cette possibilité semble repoussée pour l’instant. En Iran, les tensions internes au pays constituent un élément clé derrière ce revirement. Une lettre ouverte des étudiants de l’université Amirkabir (polytechnique) de Téhéran, qui manifestent d’ailleurs depuis des mois contre la politique du gouvernement iranien, illustre que le régime ne peut pas considérer le soutien de la population comme acquis et qu’une sérieuse politisation a pris place au cours de ces dernières années. Ils expliquent : ‘‘Les évènements des deux derniers mois démontrent l’incompétence du régime en Iran, un régime dont la seule réponse à la crise est d’utiliser la force. Il est de notre devoir de diriger tous nos efforts tant contre un gouvernement oppresseur qu’envers un pouvoir impérialiste.’’

    Par Julien (Bruxelles)

    L’Iran face à la colère sociale

    La république islamique d’Iran a été frappée d’une série d’embargos quasiment dès sa fondation en 1979. Les premières sanctions imposées par les USA datent de 1984 et de nombreuses autres ont suivi, y compris de la part de l’Union européenne, tout particulièrement quand l’Iran a annoncé la reprise de ses recherches sur le nucléaire en 2005. En 2016, à la suite de l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien, une bonne partie des sanctions ont été levées. Les exportations de pétrole avaient directement doublé et les investisseurs étrangers (Renault, Peugeot, Total,…) ont profité de l’aubaine.

    Le régime espérait redorer son image vis-à-vis d’une population où couvait le mécontentement. En 2009, un soulèvement de masse avait dénoncé la fraude électorale de l’élection présidentielle et, depuis lors, les conditions de vie n’avaient fait que se dégrader. Entre la levée des sanctions et 2017, la croissance économique du pays fut de 11,5 % mais, en retirant les ventes de pétroles, cette croissance n’était que de 3,3 % et la rente pétrolière est accaparée par l’élite iranienne. Selon les données officielles, 30% des jeunes sont sans emploi. Tout comme une couche grandissante de leurs aînés, ils rejettent le régime autoritaire et corrompu des mollahs.

    Quand le président Hassan Rohnani a présenté un budget d’austérité en décembre 2017, la colère latente des masses a explosé : un large mouvement de manifestations et de grèves contre la vie chère a balayé le pays. Chose inédite jusque-là, les slogans n’attaquaient plus seulement le gouvernement, mais aussi le ‘‘Guide suprême’’ l’ayatollah Ali Khamenei (dont le poste est plus élevé que celui de président de la république islamique). La réaction du régime fut une sanglante répression.

    En 2018, Trump a annoncé avec fracas le retrait des États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien et la restauration des sanctions états-uniennes. En Iran, la situation économique s’est soudainement détériorée. En 2019, l’économie a chuté de 8,5 à 9,5 % selon les estimations. Lorsque le régime a annoncé une augmentation du prix du carburant en novembre 2019, une nouvelle explosion eut lieu, alors que de vastes mobilisations sociales avaient lieu dans les pays voisins que sont l’Irak et le Liban.

    Ce soulèvement était marqué par de nombreuses grèves dans les usines, parmi les enseignants ou encore parmi les chauffeurs routiers et a impliqué des jeunes ainsi que des travailleurs de différentes communautés (perses, arabes, kurdes,…). A nouveau, les slogans ne ciblaient plus seulement la présidence et le gouvernement, mais aussi le ‘‘Guide suprême’’. Les manifestants dénonçaient également d’autre part le coût du soutien de l’Iran à diverses milices et forces politiques chiites en Irak, en Syrie et ailleurs dans la région.

    Le déclin de l’impérialisme US

    Il est vrai que l’Iran a pris plus de poids dans la région, en profitant notamment de l’affaiblissement de l’impérialisme américain. Aujourd’hui, l’Iran exerce une influence majeure, sinon dominante, dans un grand nombre de pays voisins, tels que l’Irak, le Liban, la Syrie, le Yémen et la bande de Gaza palestinienne. C’est l’influence croissante de l’Iran qui a poussé l’administration Trump à une offensive mal calculée en se retirant en mai 2018 de l’accord nucléaire iranien ainsi qu’en imposant des sanctions, en dépit de l’opposition de ses alliés européens.

    Quand, en septembre dernier, les raffineries Aramco ont été bombardées en Arabie Saoudite (ce qui a mis hors service plus de 5% de la production mondiale de pétrole), les USA et l’Arabie Saoudite ont montré du doigt le mouvement Houthi au Yemen et, derrière lui, l’Iran qui le finance. Cette dynamique a finalement conduit à l’assassinat du général iranien Qassem Soleimani à Bagdad par une attaque américaine le 3 janvier dernier. Peu après, Trump a menacé de détruire ‘‘rapidement et durement’’ 52 sites en Iran, dont des sites culturels et de frapper les Iraniens ‘‘plus fort qu’ils ne l’ont jamais été’’.

    Ces dernières années, dans la région, les conflits se caractérisaient par un aspect de ‘‘guerre par procuration’’ dans lesquels les puissances impérialistes ne rentraient pas directement en conflit les unes avec les autres. Trump n’a peut-être pas initié de guerre officielle avec l’Iran mais en ordonnant l’assassinat de Soleilmani, il ouvre la voie à des conflits plus conséquents à l’avenir.

    Les autorités iraniennes espéraient mettre à profit le risque d’une guerre avec les États-Unis pour ressouder la population autour d’elle. Cette dynamique a rapidement été enrayée par les mensonges du régime au sujet du crash du vol 752 Ukraine International Airlines, abattu par erreur par les Gardiens de la révolution ; ce qui a entraîné la mort de 176 passagers et membres d’équipage, majoritairement iraniens ou d’origine iranienne. Une nouvelle vague de manifestations a alors eu lieu, à partir de 4 universités de la capitale. Le lendemain, une veillée en mémoire des victimes du crash s’est transformée en manifestation anti-gouvernementale. Le régime iranien est bien conscient qu’avec une guerre, son règne ne sera pas seulement menacé de l’extérieur du pays.

    Quelle issue ?

    Aujourd’hui, 73% de la population iranienne habite en ville et la classe ouvrière iranienne bénéficie d’un impressionnant héritage de luttes. En 1979, elle fut l’artisan du renversement de la monarchie iranienne. Pendant un temps, il était possible que les travailleurs prennent le pouvoir. Ils contrôlaient les usines et les entreprises au moyen de comités de base démocratiques et désarmaient les forces contre-révolutionnaires. Hélas, ce mouvement ne disposait pas d’une stratégie audacieuse pour prendre le pouvoir. Face aux hésitations et en l’absence d’initiatives décisives de la part des travailleurs, l’ayatollah Khomeini, revenu d’exil, a tiré profit de son profil d’exilé politique pour mobiliser les masses et endiguer le processus révolutionnaire en cours. Dans les faits, il a volé la révolution aux travailleurs. Même s’il a dû accorder d’importantes concessions sociales (gratuité des médicaments et des transports, annulation des factures d’eau et électricité,…), l’Islam politique de droite imposé par Khomeini a par la suite fait assassiner ou emprisonner des milliers de syndicalistes et de dirigeants de gauche pour consolider sa position.

    La classe ouvrière iranienne reste objectivement la clé de toute révolution réussie en Iran aujourd’hui. La tâche immédiate du mouvement est de s’élargir et de s’organiser au niveau local, régional et national autour d’un programme pour renverser le régime capitaliste religieux des Mollahs et prendre le contrôle de l’économie. Au cours des luttes de ces dernières années, des structures syndicales et des comités étudiants se sont développés. La dictature est consciente du danger et n’a pas hésité à couper internet lors des mobilisations de novembre pour empêcher l’organisation du mouvement. A terme, la seule issue pour les masses en Iran sera de convoquer une assemblée constituante révolutionnaire pour un Iran démocratique et socialiste qui garantirait les libertés individuelles et l’égalité des droits de toutes les minorités opprimées.

    Un appel à la solidarité internationale lancé par les jeunes et les travailleurs en Iran est une tâche fondamentale pour en finir avec la misère capitaliste et les menaces de guerre. A destination des peuples en lutte dans la région qui connaissent une même haine de l’impérialisme et de la corruption des élites bien entendu, mais aussi envers les jeunes et les travailleurs aux États-Unis. Ce que craignent le plus les gouvernements au Moyen-Orient et ailleurs, c’est que la résistance se renforce et se développe par-delà les frontières.

    Partout dans le monde, nous devons nous atteler aux premiers pas de la construction d’un large mouvement anti-guerre international, tout particulièrement aux USA. Là-bas, la campagne de Bernie Sanders bénéfice d’un écho et d’un soutien grandissant. Son opposition aux aventures militaires américaines a notamment suscité un grand enthousiasme parmi ses partisans et au-delà.

    • Non à l’intervention impérialiste au Moyen-Orient, pour le retrait des troupes américaines, françaises, britanniques, russes et de tous les autres pays étrangers de la région et pour la non-intervention des gouvernements nationaux dans les affaires des voisins ;
    • Soutien total aux mouvements de protestation en Irak, en Iran, au Liban et ailleurs dans leurs luttes contre la pauvreté, la corruption et la division communautaire ;
    • Pour la construction d’un mouvement anti-guerre de masse aux USA et internationalement ;
    • Pour l’unité des travailleurs et des jeunes de toute la région afin de faire tomber les gouvernements pro-capitalistes, qui reposent sur la division et le conflit ethniques et les encouragent, et leur rempla-cement par des gouvernements des travailleurs véritablement démocratiques avec un programme socialiste pour mettre fin à la pauvreté, à la corruption et au régime autoritaire – pour une Fédération socialiste démocratique du Moyen-Orient.

  • Iran. Première action anti-guerre à Bruxelles

    La menace d’une nouvelle escalade et d’une nouvelle guerre au Moyen-Orient suscite craintes, mais aussi indignation et protestation. A Bruxelles, une première action a eu lieu devant l’ambassade américaine ce dimanche après-midi en presence de militants pacifistes, mais aussi d’organisations politiques comme le PSL ou le PTB. Parmi les participantes et participants se trouvaient également des personnes d’origine iranienne.

    Ces dernières années, les interventions impérialistes au Moyen-Orient ont fait des ravages, entrainant des situations désespérées pour de larges pans de la population. Les impressionnantes mobilisations sociales contre la pauvreté, le chômage, la corruption et la division communautaire au cours de ces derniers mois au Liban, en Irak, en Iran et ailleurs en sont l’expression. Une escalade du conflit entre les Etats-Unis et l’Iran, que ce soit ou non par le biais de marionnettes, représentera un obstacle à cette protestation sociale en augmentant le désespoir et en compliquant tous les éléments d’espoir reposant sur l’action collective.

    Lors de l’action, plusieurs intervenants ont principalement insisté sur la condamnation des interventions de l’impérialisme américain et sur l’appel à la paix. Le PSL était également présent avec un tract dénonçant les interventions impérialistes, soutenant les mouvements sociaux, appelant à un mouvement anti-guerre massif et plaidant pour l’unité des travailleurs et des jeunes dans la lutte contre le système capitaliste qui entraine pauvreté, division et guerre.

    Cette action était un premier pas important. Malheureusement, nous craignons que d’autres actions anti-guerre soient nécessaires. Commençons à les préparer dès maintenant !

  • Assassinat de Soleimani – Trump rapproche la région de la guerre

    Soleimani, Photo: Wikipedia

    Le journal libanais pro-Hezbollah “Al-Akhbar” titrait ce vendredi : “Le martyre de Soleimani : c’est la guerre !” Ce n’est qu’une des premières réactions de colère suite à l’attaque de nuit par des drones américains sur le convoi quittant l’aéroport international de Bagdad qui a tué le général iranien Qassem Soleimani et au moins six autres personnes, dont plusieurs commandants de milice qui avaient participé à la bataille contre Daesh. L’onde de choc s’est rapidement propagée dans le monde entier – le prix du pétrole a bondi de 4 % et le marché boursier américain a subi des pressions, les spéculateurs cherchant des “refuges” pour leur argent. Les termes “troisième guerre mondiale” et “Franz Ferdinand” ont fait leur apparition sur Twitter.

    Par Rob Jones

    Nous ne sommes pas, bien sûr, au bord d’une troisième guerre mondiale à la suite de cette action brutale et sans doute illégale de Donald Trump. Mais sa décision d’autoriser cet assassinat a sans aucun doute rendu la situation dans la région beaucoup plus dangereuse. Elle pourrait rapidement dégénérer en un conflit beaucoup plus grave. C’est ce qu’indique l’avertissement envoyé par le gouvernement américain aux citoyens américains en Irak de quitter le pays immédiatement, sans tenter de s’approcher de l’ambassade américaine. L’Iran et ses alliés, comme le Hezbollah au Liban, chercheront à attaquer des cibles américaines et alliées des Etats-Unis, y compris peut-être Israël ou l’Arabie saoudite. L’Iran a également démontré plus tôt cette année qu’il est capable de bloquer le trafic pétrolier dans le détroit d’Ormuz et de paralyser la production de pétrole saoudien. Le déclenchement d’un conflit plus grave dans la région pourrait avoir des conséquences majeures pour l’économie mondiale déjà confrontée à un ralentissement important. Pour les Américains ordinaires et d’autres innocents dans le monde entier, la conséquence à long terme est, bien entendu, la menace de nouvelles attaques terroristes.

    L’assassinat de Soleimani est la dernière étape d’une offensive des Etats-Unis contre l’Iran qui a commencé par le retrait de Trump de l’accord nucléaire négocié sous Obama et qui a été suivi de sanctions dévastatrices. Les sanctions en elles-mêmes constituent un acte de guerre et le régime iranien a cherché à riposter, notamment en abattant un drone militaire américain et en utilisant les forces qu’il contrôle en Irak pour attaquer des bases avec les forces américaines. Cela reflète également la nécessité pour l’impérialisme américain de faire preuve de “fermeté” à la suite de son retrait bâclé du nord-est de la Syrie et des diverses attaques du régime iranien et de ses alliés.

    La manière dont Trump a pris la décision de lancer l’attaque illustre le caractère “voyou” de son règne. Non seulement il a ignoré le Congrès, qui est censé sanctionner de telles actions, mais les rapports laissent entendre qu’il a à peine consulté ses propres conseillers. En effet, plutôt que de faire l’annonce lui-même, il a laissé cet honneur au Pentagone et s’est contenté de tweeter une image du drapeau américain. Si les Démocrates américains soulignent à juste titre que M. Trump tente peut-être de passer outre le processus de destitution, ils feraient bien de se rappeler qu’en 1998, le président Clinton a lancé une frappe aérienne d’urgence contre l’Irak au moment même où sa propre procédure de destitution était en cours.

    Nous nous opposons au “droit” autoproclamé de l’impérialisme américain d’assassiner ses opposants. Aucun socialiste ne versera de larmes pour Qassem Soleimani. Il dirigeait la fameuse et brutale “force Quds” – les unités militaires du régime iranien utilisées pour les interventions à l’étranger – “atouts indéniables” qui auraient joué un grand rôle dans les conflits en Irak, en Syrie, au Yémen, à Gaza, au Liban et en Afghanistan. On lui attribue le mérite d’avoir joué un rôle clé dans la galvanisation des forces contre Daesh. Il n’a pas fait figure d’ami de la population ordinaire, il a plutôt joué un grand rôle en soutenant des régimes réactionnaires de la région. Lorsque des étudiants ont participé à des manifestations de masse à Téhéran en 1999, Soleimani a envoyé une lettre au président Khatami pour l’avertir que s’il ne sévissait pas contre les étudiants, Soleimani le ferait lui-même et organiserait en même temps un coup d’État militaire pour renverser Khatami. Les participants aux récentes manifestations en Irak pensent généralement que Soleimani n’a pas seulement poussé le gouvernement de Bagdad à adopter une ligne dure, mais qu’il a également poussé des milices à attaquer les manifestants. Des centaines de personnes ont été tuées et beaucoup d’autres blessées.

    Mais cela ne justifie absolument pas l’assassinat du général et de son entourage. Nous ne devons pas non plus tomber dans le piège de répéter ce que certains porte-parole de Trump ont dit, à savoir que Soleimani est responsable de tous les problèmes de la région. Toute la région est victime d’une lutte brutale entre les différentes puissances impérialistes, y compris les puissances impérialistes régionales, pour le pouvoir et le contrôle des ressources naturelles. Il n’y a aucun principe en jeu, si ce n’est la tentative d’exploiter les richesses de la région aux dépens de la population ordinaire. Les alliances opportunes à un moment ou dans un pays, par exemple dans la lutte contre Daesh, ne valent pas dans les pays voisins. La première ville irakienne à résister à Daesh en 2014, Amerli, a été défendue par ce que le Los Angeles Times a décrit comme “un partenariat inhabituel de soldats irakiens et kurdes, de milices chiites soutenues par l’Iran et d’avions de guerre américains”. Les Etats-Unis étaient alors très heureux de travailler avec Soleimani.

    La justification de Trump pour l’attaque est maintenant que Soleimani “représentait une menace imminente pour la vie des Américains” et qu’il “complotait pour tuer des citoyens américains”. Ceci fait suite à la déclaration qu’il a faite au début de la semaine après que des membres de la milice chiite, largement considérés comme défendus par Soleimani, aient envahi et occupé le complexe de l’ambassade américaine à Bagdad, sans perte de vie. Trump a averti que “l’Iran sera tenu pleinement responsable des vies perdues ou des dommages subis dans l’une de nos installations. Ils paieront un très GRAND PRIX ! Ce n’est pas un avertissement, c’est une menace. Bonne année !”

    L’occupation de l’ambassade constitue un avertissement clair des dangers et des conséquences de l’intervention des différentes forces impérialistes dans la région. Depuis début octobre, l’Irak est sous l’emprise de protestations héroïques contre le manque d’emplois et de services publics, contre la corruption et contre le sectarisme religieux inscrit dans le système gouvernemental resté en place depuis la fin officielle de l’occupation américaine.

    Les manifestants ont tourné le dos aux forces américaines et ont montré au grand jour leur haine des milices soutenues par l’Iran, qui ont été impliquées dans l’attaque des manifestants pour soutenir le gouvernement actuel dirigé par l’Iran. Ni les États-Unis ni l’Iran ne veulent la chute du gouvernement irakien, car cela ouvrira la voie à une réelle influence des gens ordinaires sur la façon dont ils sont gouvernés. Ces derniers événements vont mettre en colère les milices chiites réactionnaires, qui vont sans aucun doute intensifier leurs campagnes violentes dans toute la région.

    L’Iran a lui aussi connu récemment la croissance d’une opposition de masse, déclenchée par l’augmentation des prix du carburant dans le contexte d’une économie souffrant d’une corruption massive et de sanctions imposées par les États-Unis. Comme en Irak, le régime a agi avec brutalité, en accusant l’opposition d’être “contre-révolutionnaire et dirigée par des forces ennemie étrangère à l’Iran ” et en attisant les sentiments anti-américains.

    L’assassinat de Soleimani, s’il constitue un coup dur pour le régime iranien, agira également en faveur de son renforcement alors qu’il est confronté à une opposition de masse qui représente son plus grand défi interne depuis la Révolution de 1979. Il a été rapidement remplacé par le général de brigade des gardiens de la révolution islamique Esamil Ghaani, qui non seulement poursuivra mais intensifiera sans aucun doute le travail sanglant de Soleimani dans tout le Moyen-Orient. L’assassinat est utilisé par le régime de Téhéran pour intensifier sa propagande anti-américaine. Cela rend plus difficile la poursuite du mouvement de protestation dans cette région. L’Iran a déjà vu une vague de protestations scandant “Mort à l’Amérique” et portant des portraits de Soleimani – selon l’agence de presse iranienne – qui touche déjà Téhéran, Arak, Bojnourd, Hamedan, Hormozgan, Sanandaj, Semnan, Shiraz et Yazd.

    La réaction des autres puissances impérialistes fut une réaction d’inquiétude et de prudence. La Chine a appelé les États-Unis à respecter la souveraineté irakienne. Le président français Macron a immédiatement téléphoné au président russe Poutine, les deux pays exprimant la nécessité de faire preuve de prudence et d’éviter une escalade du conflit en Iran. Israël, bien sûr, soutient l’action américaine, mais a dû renforcer ses mesures de sécurité en réponse. L’inquiétude des autres puissances est alimentée non pas par les droits humains ou politiques de ceux qui vivent dans la région, mais par la crainte que cette action ne fasse basculer la région dans une escalade dramatique de conflit ainsi qu’en raison des implications potentielles que cela aurait sur l’économie mondiale. Les puissances européennes craignent qu’en conséquence, le gouvernement irakien, qui a condamné l’attaque, applique sa décision d’expulser les 5.000 soldats américains encore présents dans le pays. Elles craignent que cela n’affaiblisse la lutte contre Daesh. Comprenant clairement les dangers, le Pentagone a envoyé 3500 soldats supplémentaires, déjà en route vers le Koweït, pour être déployés en Irak, en Syrie ou ailleurs.

    Un commentateur a décrit cette attaque comme une dérogation à la nature habituelle de “guerre par procuration” des conflits dans cette partie du monde, en ce sens qu’il s’agissait d’un coup direct d’une grande puissance impérialiste sur une autre, bien que régionale. Malgré les tentatives du Congrès et même de certaines sections de l’armée américaine de tenir Trump en échec, ainsi que la réticence d’autres puissances à soutenir ses actions agressives, il est certain qu’il y aura une intensification des conflits entre les différentes parties engagées, bien qu’à ce stade, une guerre ouverte entre puissances ne soit pas probable. Néanmoins, ces conflits se transformeront en une confrontation ouverte entre troupes des différentes puissances – et pas seulement entre les États-Unis et l’Iran. La Russie a maintenant ouvert une base militaire en Syrie, à proximité d’une zone censée être sous protection américaine, tandis que la Turquie envoie des forces en Libye pour contrecarrer les actions des mercenaires russes.

    Il y a deux façons de procéder. Soit les différentes puissances et les seigneurs de guerre gardent le contrôle et la situation dégénère encore plus, laissant la région dans une pauvreté croissante et un conflit inter-communautaire et inter-impérialiste continu tandis que le monde entier sera soumis à des actions terroristes encore plus nombreuses.

    Ou bien l’autre force qui a fait fléchir ses muscles dans la région ces derniers mois – la classe ouvrière – peut intervenir pour empêcher que cela ne se produise. Les récents événements en Irak, en Iran, au Liban et ailleurs ont démontré le potentiel que la classe ouvrière a si elle est unie et agit de manière décisive, en refusant de s’appuyer sur l’une des puissances impérialistes – que ce soit les Etats-Unis ou l’Iran – pour mettre en avant sa propre position, indépendante et internationaliste.

    • Non à l’intervention impérialiste au Moyen-Orient, pour le retrait des troupes américaines, françaises, britanniques, russes et de tous les autres pays étrangers de la région et pour la non-intervention des gouvernements nationaux dans les affaires des voisins ;
    • Soutien total aux mouvements de protestation en Irak, en Iran, au Liban et ailleurs dans leurs luttes contre la pauvreté, la corruption et la division communautaire ;
    • Pour la construction d’un mouvement anti-guerre de masse aux USA et internationalement ;
    • Pour l’unité des travailleurs et des jeunes de toute la région afin de faire tomber les gouvernements pro-capitalistes, qui reposent sur la division et le conflit ethniques et les encouragent, et leur remplacement par des gouvernements des travailleurs véritablement démocratiques avec un programme socialiste pour mettre fin à la pauvreté, à la corruption et au régime autoritaire – pour une Fédération socialiste démocratique du Moyen-Orient.
  • L’inaction environnementale menace la Méditerranée orientale

    Le changement climatique a de graves conséquences pour les pays de la Méditerranée orientale. Selon les scientifiques, la température de la région augmente à un rythme beaucoup plus rapide que la moyenne mondiale et les précipitations devraient diminuer dans toute la région. Ces facteurs, combinés à l’appât du gain des élites dirigeantes, auront des effets disproportionnés sur la destruction de l’environnement dans cette région par rapport à d’autres. [1]

    Par Athina Kariati – Nouvelle Gauche Internationaliste, CIO-Chypre

    Anastasiades, le Président de la République de Chypre a proposé au dernier sommet de l’ONU de créer une initiative dans laquelle 13 pays de la région collaboreraient pour trouver un moyen de lutter contre le changement climatique [2] La grande majorité de ces pays produisent des combustibles fossiles ! Les gouvernements capitalistes et les élites dirigeantes pleurent des larmes de crocodile et continuent leurs politiques.

    L’extraction de gaz naturel et de pétrole

    La découverte de gaz naturel dans la zone économique exclusive (ZEE) de Chypre en 2011 a freiné l’appétit pour de nouveaux forages et extractions dans le sud de Chypre, mais aussi autour de la Crète, dans la mer Ionienne de Grèce et dans la région de l’Epire. Les forages se déroulent dans des zones hautement sismiques, avec un risque élevé d’accidents similaires à celui survenu au Golfe du Mexique en 2010. Les forages exploratoires ont déjà un effet dévastateur sur la vie marine et, dans le cas de l’Epire, une forêt entière est en danger. Tout accident pourrait nuire à l’agriculture, à la pêche et au tourisme, les trois secteurs économiques essentiels au maintien des moyens d’existence de ceux qui vivent autour des zones de forage prospectives.

    Cependant, les gouvernements de la région sont prêts à tout risquer pour assurer les profits des magnats de l’énergie. Ils sont même prêts à protéger ces intérêts au risque de nouveaux conflits militaires. Tout au long de la dernière décennie, l’extraction du gaz naturel a exacerbé les tensions entre les gouvernements capitalistes de la région, aggravées par l’ingérence impérialiste mondiale. Un conflit vient particulièrement de dangereusement dégénérer, celui entre d’une part l’alliance dite du “triangle énergétique” entre la Grèce, Chypre et Israël en collaboration avec les géants impérialistes occidentaux de l’énergie et, d’autre part, les aspirations capitalistes turques.

    Début octobre, Erdogan y a envoyé deux navires de forage turcs, Yavuz et Fatih, sous escorte permanente de frégates, de sous-marins, de bateaux d’assaut, de navires de guerre, de drones sans pilote et de patrouilles navales, alors que les sociétés française et italienne Total et Eni avaient déjà obtenu des licences d’exploration dans la ZEE chypriote [3]. Il ne s’agit là que d’une violation de plus dans une série de cas survenus dans la zone couverte par la ZEE chypriote alors que la présence militaire des États-Unis, de la France et de la Russie autour de Chypre est croissante. Les navires turcs ont ainsi notamment été survolés par des drones israéliens.

    Le conflit national se poursuit dans la région

    Le siège continu de Gaza par le régime israélien a détruit toutes ses infrastructures. Les scientifiques estiment que d’ici 2020, 0% des eaux souterraines de Gaza seront propres à l’usage humain, tandis que 70 % des eaux usées non traitées de Gaza iront directement à la mer. Dans le même temps, l’irrigation excessive des eaux de Cisjordanie par le régime israélien dans les territoires occupés a conduit à l’épuisement des nappes phréatiques, ce qui augmente le risque de désertification de zones entières. [4]

    Au Liban, après la crise des déchets de 2015 qui a déclenché un mouvement de protestation, le gouvernement libanais, qui a consacré la division sectaire, a simplement proposé comme “solution” le transfert de la gestion des déchets aux entreprises privées. Des montagnes de déchets s’élèvent le long de la côte de Beyrouth, là où se trouvait la plage. Des tonnes de ces déchets finissent dans la mer. On estime que la mer Méditerranée a la sixième plus forte concentration de déchets plastiques parmi les mers du monde. Elle contient environ 5 à 10 % du volume mondial de déchets plastiques que l’on trouve actuellement dans les océans[5]. [6]

    L’exploitation minière

    On sait que l’exploitation minière contribue à l’élévation de la température de l’atmosphère, mais elle est aussi une cause majeure de la désertification de zones entières. Cependant, les gouvernements capitalistes de la région vendent les ressources naturelles dans des conditions du “tiers monde” et sans aucun contrôle. Ainsi, El Dorado Gold à Skouries, en Grèce, détruira une forêt ancienne, et le gouvernement turc a donné son feu vert à l’exploitation minière de la société Alamos Gold dans les montagnes Kaz. Le gouvernement chypriote a délivré des permis pour l’extraction de l’or des déchets de l’ancienne mine de Skouriotissa au pied des montagnes Troodos, ce qui laissera un énorme monticule de déchets contaminés au cyanure. Des permis d’exploration ont également été octroyés pour le cuivre et l’or à l’Ouest de Chypre, ce qui détruira la forêt de Paphos. Ces nouveaux projets miniers dangereux ont suscité d’importantes protestations ces dernières années.

    N’entretenons aucune illusion ! Agissons maintenant pour stopper le changement climatique et la catastrophe environnementale en Méditerranée orientale !

    La Méditerranée orientale est baignée par le soleil pendant environ 350 jours par an, a des vents forts et beaucoup d’eau à utiliser pour la production d’énergie. C’est une région idéale pour la production d’énergie renouvelable pour remplacer l’extraction et la combustion de combustibles fossiles. Cela pourrait créer des milliers d’emplois durables et correctement rémunérés. La protection des quelques forêts qui restent est plus importante que l’or, le cuivre ou l’argent que les compagnies minières peuvent empocher. Mais les élites capitalistes de la région et leur système aveugle basé sur le profit s’opposent à une telle solution.

    Nous devons nous battre, non pas pour que les politiciens nous écoutent, mais pour construire un mouvement suffisamment large et fort dans la région et dans le monde, qui puisse arracher à ces magnats le contrôle même des ressources naturelles, de l’énergie et de l’économie, dans le cadre de la lutte pour une économie socialiste reposant sur la logique de la planification démocratique et environnementale. Il n’y a pas d’autre moyen de mettre en œuvre toutes les réformes nécessaires, non seulement dans les secteurs de l’énergie et de l’industrie, mais aussi pour mettre un terme aux inégalités et aux conflits extrêmes dans notre région.

    1. http://emme-care.cyi.ac.cy/wp-content/uploads/CIMME-REPORT.pdf
    2. https://in-cyprus.com/cyprus-initiative-on-climate-change-aims-to-develop-a-forum-of-dialogue-minister-kadis-says/
    3. https://knews.kathimerini.com.cy/en/news/turkish-ships-disturb-cypriot-waters
    4. https://www.haaretz.com/israel-news/.premium-environmental-state-of-gaza-poses-threat-to-israel-s-national-security-report-warns-1.7328966
    https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-1-4615-1327-8_35
    5. https://www.reuters.com/article/us-lebanon-garbage/no-end-to-crisis-in-sight-as-lebanons-garbage-mountains-grow-idUSKBN1FO0F1
    6. https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/10/12/124006/meta

  • Soulèvement au Liban : les masses unies dans les manifestations

    Depuis près d’un mois, la Révolte du 17 octobre secoue le Liban. Ce mouvement est né de manière spontanée dans toutes les couches de la population suite à une série de taxes de plus, dont une taxe sur l’application de communication gratuite WhatsApp.

    Par Ammar (Bruxelles)

    Un régime politique confessionnel sectaire

    Le Liban est depuis la fin de la guerre civile (1990) un pays dirigé par des partis qui ont pris fortement part à la guerre civile. Les chefs de la plupart de ces partis (ou leurs fils) sont des anciens chefs de guerre. La seule différence fondamentale entre ces différents partis provient des groupes confessionnels auxquels ils sont chacun rattachés. Ce point est appuyé par la constitution libanaise qui base la séparation des pouvoirs et le régime politique libanais sur un communautarisme religieux. Ainsi, le nombre de places aux parlements alloués à chaque communauté confessionnelle est déterminé, de même que les positions-clés des autorités sont divisées entre communautés (le président de la république est chrétien maronite, le chef de l’assemblée est musulman chiite et le premier ministre est musulman sunnite). Cette division se prétend équitable afin d’apaiser les tensions communautaires mais, en réalité, elle sert à appliquer la fameuse maxime de « diviser pour mieux régner » au bénéfice de l’élite.

    La Révolte du 17 octobre est le premier mouvement de l’histoire contemporaine du Liban qui met à mal cette division communautaire de la politique. Ainsi, même s’il y a déjà eu dans le passé différent mouvements contre le gouvernement, ces derniers étaient toujours très partiels et communautaires. Pour la première fois, chrétiens maronites, orthodoxes, musulmans sunnites, chiites et druzes marchent main dans la main dans les rues contre un adversaire commun tout désigné : le gouvernement et tous ses alliés corrompus.

    Un peuple sous pression, une élite déconnectée

    Cette prise de conscience est due à des décennies de politiques néolibérale et d’austérité entrainant des sous-investissements dans les services publics alors qu’une forte pression fiscale est maintenue sur les franges les plus paupérisées de la population. Depuis quelques années, suite à l’incapacité de former une coalition gouvernementale, les différents partis politiques sont représentés dans une sorte de gouvernement « d’union nationale », dirigé par Saad Hariri. Depuis, la crise économique de 2008 qui a également frappé le Liban ainsi que la crise politique avec l’Arabie saoudite en 2017, les rentrées d’argent dans le pays sont en chute libre. Cela a donc poussé les membres du gouvernement corrompus à augmenter les taxes et à diminuer les dépenses afin de toujours garder une grande manne financière à détourner pour leurs intérêts personnels. C’est ainsi qu’en quelques mois, en 2019, le gouvernement avait annoncé le plus fort programme d’austérité du pays pour limiter le déficit public, une augmentation des taxes sur le tabac et la fameuse taxe WhatsApp qui a fait déborder le vase.

    Dès le jeudi 17 octobre, des milliers de personne ont commencé à descendre dans les rues pour protester contre cette nouvelle taxe. Ce nombre a très vite grandi, atteignant aujourd’hui près de 2 millions de personnes dans un pays qui compte moins de 6 millions de personnes (dont une grande partie constituée de réfugiés syriens et palestiniens).

    Le gouvernement a très vite réagi en retirant les taxes qu’il avait annoncées, néanmoins la mèche était allumée. Et le mouvement s’était déjà doté de revendications plus radicales, à savoir la démission complète du gouvernement ainsi que la cessation du système politique communautaire existant au Liban.

    Depuis lors, le Premier ministre a démissionné et les chefs religieux des différentes communautés appellent à la formation d’un nouveau gouvernement immédiatement. Cela montre à quel point les élites essayent de calmer le mouvement en répondant à une partie des revendications, mais en vain. Car la Révolte du 17 octobre à également de nombreuses revendications sociales : un système de taxation progressif, une sécurité sociale, des investissements massifs dans les réseaux d’eau et d’électricité. La totalité du pays subit toujours aujourd’hui fréquemment des coupures d’électricité dues au manque d’investissements dans les infrastructures. Ainsi, les plus chanceux achètent bien souvent un générateur à pétrole afin d’avoir de l’électricité lors des coupures alors que les plus démunis doivent se contenter de plusieurs heures par jour sans courant.

    Les jeunes et les femmes en tête du mouvement

    Après plusieurs semaines de protestations, de nombreux analystes s’attendaient à un essoufflement du mouvement. C’était sans compter sur l’intervention de la jeunesse qui a su donner un nouveau souffle au mouvement.

    Depuis une semaine, de nombreux écoliers (lycéens et plus jeunes) ont refusé de se rendre en cours alors que les écoles étaient rouvertes pour descendre dans les rues et rejoindre le mouvement. Dans toutes les grandes villes du pays, de nombreuses manifestations de la jeunesse ont eu lieu.

    Dans un pays où 41% de la population a moins de 25 ans et où plus de 35% des 18-25 ans sont au chômage (selon les chiffres officiels, mais la réalité est bien pire), la jeunesse représente une des forces fondamentales, au même titre que les femmes qui, pour la première fois de l’Histoire du pays, sont à l’avant dans un mouvement.

    C’est pour cela que partout dans le pays, des revendications phares réclamant une amélioration notable des droits des femmes apparaissent et cela même dans les régions les plus religieuses. Il est à noter qu’au Liban, selon la Banque Mondiale, une femme ne possède que 60% des droits d’un homme. Par exemple, il lui est interdit de toucher des allocations familiales sauf si son époux est décédé ou en incapacité de travail. Il est également aujourd’hui encore légal au Liban de procéder au mariage d’une enfant de moins de 16 ans tant que les parents sont d’accord. De telles lois sont aujourd’hui complétement remises en question et les femmes réclament, à juste titre, un nouveau code civil où elles seraient réellement l’égales des hommes.

    Perspectives pour le mouvement

    Ce mouvement massif est réellement une première dans l’Histoire du pays, il nous faut nous en réjouir mais également se rendre compte de ses faiblesses. Pour engranger davantage de victoires et aller vers de réels changements, le mouvement a besoin de se structurer et de s’organiser les lieux de travail, véritables détenteurs du pouvoir économique. Mais le Liban est encore un pays naissant en termes de mouvement social est de lutte ouvrière. Ainsi moins de 8% des employés libanais sont syndiqués, et les quelques syndicats présents au Liban sont pour la plupart inefficaces en terme de lutte et travaillent main dans la main avec les partis politiques au pouvoir. Aucune organisation ouvrière n’existe à ce jour au Liban.

    Le Parti communiste libanais (PCL) héritier du stalinisme, a depuis la chute de l’URSS considéré le Hezbollah comme un allié à cause de sa politique anti-américaine et antisioniste. Néanmoins, son alliance avec un tel parti au pouvoir qui profite autant que les autres du système n’est pas bien perçue par la population malgré le changement très récent et radical de sa position.

    Cette absence de direction est un grave problème pour cette révolte. Et cela transparaît dans une des revendications phare du mouvement qui est la constitution d’un gouvernement transitoire constitué d’experts indépendants. Même si cette revendication est compréhensible venant de la part d’une population à la recherche d’alternative, un tel gouvernement a de grandes limites.

    Si un tel gouvernement pourrait dans un premier temps permettre quelques avancés sociales timides pour calmer le jeu, il ne ferait au final que travailler avec l’élite économique du pays. La population serait toujours en manque de services publics nécessaires pour répondre aux besoins.

    De la même manière une ingérence étrangère ne ferait que servir les intérêts impérialistes de cette puissance que ce soit au niveau régional, avec l’Arabie saoudite ou l’Iran, ou avec des puissances impérialistes globales comme les USA ou la Russie.

    Le peuple libanais doit comprendre que lui seul est en mesure de prendre en main son avenir. Remettre ce pouvoir dans les mains d’une minorité, aussi laïque et apolitique soit-elle, ne ferait que postposer les problèmes déjà présents. Une des revendications du mouvement pourrait être la création d’une assemblée constituante révolutionnaire visant à élaborer une constitution qui répondrait réellement aux besoins des travailleurs et des masses opprimées et revendiquant la mise sous propriété collective immédiate des riches compagnies privées essentielles au fonctionnement économique et qui ne profitent aujourd’hui qu’à une poignée de gens.

    Un premier pas dans cette direction pourrait être l’organisation d’assemblées et de comités de coordinations sur les lieux de travail et dans les quartiers pour élaborer un cahier de revendications et organiser les actions. Cette organisation démocratique pourrait consolider l’unité des opprimés et des travailleurs et poser les bases de nouvelles organisations de masse de défense de leurs intérêts. Cela serait un moyen idéal pour contrarier toutes les tentatives qui viseront à diviser le mouvement ou à l’endormir avec des promesses creuses et pour construire la lutte vers un réel gouvernement populaire, c’est-à-dire un gouvernement anticapitaliste et socialiste qui assurerait que les moyens de productions de la société soient remises aux mains des travailleurs et des masses opprimées pour diriger l’économie dans l’intérêt de la majorité et non plus dans celui de l’élite économique et politique.

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