Category: Moyen-Orient et Afrique du Nord

  • Comment éviter que la rhétorique martiale et la surenchère militaire ne conduisent à une confrontation directe entre grandes puissances ?

    Avril 2018 – Donald Trump: “Tiens-toi prête, Russie, car ils [les missiles] arrivent, beaux, nouveaux et intelligents!”
    Avril 1954 – Dwight Eisenhower: “Dites-moi comment tout cela va finir”

    Cela fait un an à peine que Donald Trump a été élu président des Etats-Unis mais cela ne l’a pas empêché, par deux fois déjà, d’effrayer le monde entier. En août 2017 en menaçant ‘‘l’homme aux missiles’’ nord-coréen Kim Jong-un avec ‘‘son plus grand et plus puissant bouton nucléaire’’ et une nouvelle fois en avril 2018 en avertissant la Russie que ses missiles ‘‘beaux, nouveaux et intelligents’’ arrivaient. Les grandes puissances ne sont pas tentées par une confrontation directe, l’enjeu est bien trop grand et il manque un soutien social pour pareille aventure. Il n’empêche que la tension monte, que les conflits locaux augmentent et les ripostes aussi. La seule manière de s’opposer à cela est de construire un mouvement anti-guerre international puissant.

    Par Eric Byl

    Les leaders occidentaux sont conscients du potentiel d’un tel mouvement. Ils se souviennent encore des mobilisations de masse à l’échelle mondiale contre la guerre en Irak en 2003. Cela n’a pas stoppé la guerre. Mais, nous sommes 15 ans plus tard. La démocratisation promise du pays n’est pas venue et le pays nage toujours en plein chaos, tout comme la Somalie (attaquée en 1993), l’Afghanistan (2001) et la Libye (2011). Avec cela à l’esprit, ils ont essayé de diaboliser leurs opposants dans l’opinion publique. Il faut dire que cela aide que Kim Jong-un soit un dictateur et Assad un meurtrier brutal.

    Trump, Macron et May ont vendu le tir de 105 missiles sur trois objectifs à proximité de Homs et Damas le 14 avril dernier comme des représailles suite à une attaque aux gaz toxiques la semaine précédente à Douma. Ils accusent les troupes d’Assad et voulaient, avec ces représailles, faire passer le message que l’utilisation d’armes chimiques est la ligne rouge à ne pas franchir. Ils se sont gardés de faire des victimes et surtout pas des russes. Ils prétendent avoir détruit un laboratoire où d’éventuelles armes chimiques sont développées, un bunker et un dépôt d’armes chimiques.

    Assad a déjà prouvé qu’il n’était pas très regardant quant à une attaque aux gaz toxiques. Mais il est clair aussi que les Etats-Unis, la France et le Royaume pratiquent le ‘‘deux poids, deux mesures’’. Les Etats-Unis ont eux-mêmes utilisé du phosphore blanc à Mossoul et Raqqa lors des combats contre l’Etat islamique. L’Arabie Saoudite, leur alliée, s’est livrée à un bain de sang au Yémen et a affamé la population. Au conseil de sécurité des Nations Unies, les Etats-Unis ont bloqué une condamnation pour l’implication de tireurs d’élite israéliens contre des Palestiniens désarmés à Gaza.

    Assad et ses alliés russes prétendent que les rebelles ont lancé l’attaque aux gaz toxiques. Ce ne serait pas leur premier mensonge. Mais les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni ne sont pas trop émus face aux fake news eux non plus. Nous nous souvenons de l’indignation face aux troupes de Saddam Hussein qui, en 1990, lors de leur occupation du Qatar, avaient pillé une maternité. Bush Sr. s’était servi de ce prétexte, en 1991, pour lancer l’opération Tempête du Désert en Irak. Par la suite, il s’est avéré qu’il s’agissait d’une mise en scène. Est-ce à nouveau le cas ? Nous n’en savons rien. Etant donné que Douma était presque reprise, il aurait été vraiment stupide de la part d’Assad d’utiliser des armes chimiques.

    La guerre n’est qu’un prolongement de la politique par d’autres moyens

    La tentation peut être grande de déclarer la guerre en se servant de politiciens fous et sanguinaires. En réalité, la guerre est la continuité de la politique par d’autres moyens, un reflet des intérêts nationaux et des contradictions de classes tant au niveau national qu’international. Cela peut donner l’impression que les politiciens saisis de démence ou incapables de faire leur job sont remplacés par d’autres ‘‘plus appropriés’’.

    La grande récession de 2007-2009 a mené, au niveau mondial, à une énorme offensive des capitalistes contre les conditions de vie et de travail des travailleurs et des jeunes. Après un moment de paralysie, de grands mouvements sociaux ont ensuite émergé dans différents pays. Le mécontentement face à la catastrophe sociale a mené en Tunisie à la révolution du jasmin en 2011. Cela a provoqué une onde de révolutions en Afrique du Nord et au Moyen Orient. Ben Ali en Tunisie et Moubarak en Egypte ont été forcés d’abdiquer. Le mouvement ouvrier ne disposait malheureusement pas d’un parti révolutionnaire prêt à pousser ces révolutions vers le socialisme, ce qui a permis aux anciens régimes de se restaurer après un certain temps.

    Contrairement à Moubarak et Ben Ali, Khadafi et Assad disposaient du soutien d’une petite minorité armée jusqu’aux dents, suffisante pour faire s’enliser ces révolutions dans une guerre civile. La Libye a été bombardée par l’OTAN et livrée à des chefs militaires rivaux. Il se serait passé la même chose en Syrie si la Russie, l’Iran et le Hesbollah n’avaient pas maintenu Assad en selle. La Russie veut ainsi maintenir son dernier allié au Moyen Orient et prouver qu’elle reste une puissance militaire malgré sa faiblesse économique. L’Iran veut un corridor de Téhéran à Damas. Le Hesbollah espère se renforcer avec la proximité de son allié iranien.

    Pour les régimes sunnites autour de l’Arabie Saoudite, le renforcement de l’Iran est inacceptable, ce qui explique aussi la guerre contre les houthis au Yémen, eux aussi chiites. Un Iran plus fort ne fait pas les affaires de Netanyahu en Israël non plus. Cela lui permet, en outre, de détourner l’attention du scandale de corruption dans lequel il est impliqué. L’affaiblissement d’Assad a servi à Erdogan qui a joué un rôle ambigu dans le conflit contre l’Etat islamique. Tant que l’Etat islamique représentait un danger, les rivalités impérialistes restaient à l’arrière-plan. Même les Kurdes ont été impliqués, dans leur cas comme chair à canon.

    La fin de Daesh ne conduit pas à la paix

    Maintenant que l’ennemi commun est chassé, toutes les parties impliquées ont essayé de garantir leurs intérêts. Assad en reprenant autant de territoire possible pour devenir incontournable, avec le soutien de la Russie et de l’Iran. La Turquie en négociant le champ libre avec la Russie et Assad pour régler leur compte aux Kurdes du Rojava. Mais la France et le Royaume-Uni, anciennes puissances coloniales de la région, et l’impérialisme américain, qui a perdu en influence au Moyen Orient après la guerre en Irak, ne veulent pas non plus être en reste. Ceci aussi explique la pluie de missiles du 14 avril. De plus, tant Trump que May et Macron peuvent utiliser cet événement de politique extérieure comme diversion face aux problèmes internes dans leur pays respectif.

    Ceux qui estiment qu’une période de paix allait débuter après l’Etat islamique se trompent. Sur base capitaliste, il n’existe aucune issue à l’impasse dans la région. La population syrienne est paralysée par la contre-révolution et la guerre. Mais des pays tels que l’Iran, la Turquie et l’Egypte comptent une puissante classe ouvrière. Avec les pauvres et les opprimés de la région et le soutien indispensable du mouvement anti-guerre dans les pays occidentaux, cette force pourrait offrir une issue au cauchemar en Syrie et dans tout le Moyen Orient grâce à un programme socialiste démocratique.

  • Contre le bombardement de la Syrie, construire un mouvement anti-guerre de masse

    L’administration de Donald Trump se prépare à une autre série de frappes de missiles contre des cibles du régime syrien. Cela pourrait déclencher une chaîne explosive d’événements et conduire à une conflagration militaire plus grave entre grandes puissances internationales et régionales au Moyen-Orient. Moscou a répondu aux menaces ouvertes de Trump en disant que la Russie ciblerait les unités américaines impliquées dans toute attaque sur le sol syrien.

    Par Serge Jordan, Comité pour une Internationale Ouvrière

    Trump et la première ministre britannique, Theresa May, traversent une période de turbulences politiques et ont besoin de détourner l’attention des malheurs de leurs administrations. En Grande-Bretagne, il a été très commode pour May que l’attaque chimique présumée, sans preuve concrète, ait eu lieu pendant la période précédant cette crise. Aux côtés de la France, où le président Emmanuel Macron est aux prises avec une nouvelle vague d’action de la classe ouvrière, et de l’Arabie saoudite, qui a offert des facilités pour soutenir les trois autres, tous sont en train de renforcer leur rhétorique et de bander leurs muscles contre le régime d’Assad et ses partisans au Kremlin. A cette fin, ils utilisent cyniquement le prétexte d’une prétendue attaque chimique à Douma, la principale ville de la Ghouta orientale dans la banlieue de Damas.

    Cette attaque odieuse, qui aurait tué des dizaines de personnes, est imputée – sans aucune preuve à ce jour – au régime de Bachar el-Assad et à ses bailleurs de fonds étrangers. Certes, le régime d’Assad a défendu son pouvoir corrompu au fil des ans à travers des fleuves de sang versés par des innocents. Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO, dont le PSL est la section belge, NDT) ne donne pas le moindre soutien à ce régime réactionnaire brutal, ni à ses mécènes russes et iraniens. Mais pourquoi l’armée syrienne lancerait-elle une attaque chimique maintenant, ce qui provoquerait la colère des puissances impérialistes occidentales ? Bien que ce ne soit pas à exclure, la logique tactique qui sous-tend une telle décision n’est pas évidente. La victoire militaire à la Ghouta orientale était en effet à la portée du régime, ancrant l’emprise d’Assad sur la plupart des centres urbains syriens. Certains commentateurs ont émis l’hypothèse que cette attaque récente aurait pu être initiée par les forces djihadistes “rebelles” afin d’entraîner l’impérialisme américain plus profondément dans le conflit.

    Indépendamment de la responsabilité de cette attaque, son instrumentalisation comme excuse pour une autre intervention impérialiste au Moyen-Orient doit être rejetée et il faut s’y opposer. Quinze ans après l’invasion et l’occupation de l’Irak, des millions de personnes se souviennent encore des mensonges des politiciens au pouvoir et de leurs amis des médias pro-establishment et pro-capitalistes de l’époque pour justifier cette guerre calamiteuse. De façon compréhensible, nombreux sont donc ceux qui ne sont pas prêts à avaler sans critique la version officielle des événements présentée aujourd’hui par les gouvernements occidentaux et les médias dominants. Les autres interventions occidentales en Afghanistan et en Libye ont également représenté une catastrophe pour les populations de la région. Elles n’ont fait qu’aggraver la crise.

    La guerre en Irak a précipité le déclin de l’impérialisme américain au Moyen-Orient ; la guerre en cours en Syrie l’a davantage exposé, offrant à la Russie et à l’Iran un espace ouvert pour étendre leur influence régionale. Ceci, combiné à l’évolution de l’administration de Trump vers un soutien plus direct et plus ouvert des ennemis jurés de l’Iran, Israël et l’Arabie Saoudite, a amené les tensions régionales à un niveau très élevé.

    Les tensions dans la région entre les principales puissances, maintenues précairement sous contrôle pendant la lutte contre Daesh, sont maintenant revenues au premier plan avec une intensité renouvelée, car le proto-Etat de Daesh s’est pratiquement effondré. Les développements récents ont vu une escalade dans les escarmouches militaires “interétatiques” sur le territoire syrien, avec un engagement militaire plus profond de la part d’Israël, de la Turquie, de l’Iran et d’autres pays.

    Les frappes aériennes de Trump sont susceptibles d’être une démonstration de force de durée limitée, à l’instar de ce qui s’est produit en avril 2017 lorsque la marine américaine a tiré 59 missiles de croisière Tomahawk sur une base aérienne syrienne. D’autres options, comme une guerre totale pour un “changement de régime”, risqueraient non seulement d’entraîner toute la région dans les flammes d’une guerre majeure, mais aussi de hâter des convulsions politiques et sociales majeures dans les capitales occidentales et à travers le monde. Mais la guerre a sa propre logique, et de nouvelles frappes aériennes américaines dans une telle situation combustible pourraient avoir des conséquences involontaires.

    Hypocrisie

    Alors que les tensions inter-impérialistes augmentent au Moyen-Orient et dans le monde entier, l’hypocrisie et les doubles standards des classes dirigeantes atteignent également des proportions stupéfiantes. Accusant Assad de “mépris pour les vies humaines”, Trump, May et Macron ont récemment déroulé le tapis rouge pour le prince héritier Mohammed Bin Salman, l’architecte en chef du carnage et de la famine délibérée du Yémen, qui tue un enfant toutes les dix minutes en moyenne ! Tous sont allés jusqu’à féliciter le boucher contre-révolutionnaire al-Sissi pour sa récente ” réélection ” farfelue en Égypte ; tous ont donné un laissez-passer de facto à l’opération de nettoyage ethnique du président turc Erdogan à Afrin, ainsi qu’aux tireurs d’élite israéliens qui ont abattu librement des Palestiniens non armés à Gaza – l’impérialisme américain opposant son veto à une condamnation du Conseil de sécurité de l’ONU.

    Aucun des commentateurs scandalisés par l’utilisation d’armes chimiques qui justifient une nouvelle agression militaire en Syrie n’a levé de sourcils lorsque, l’année dernière, l’armée américaine a utilisé du phosphore blanc dans des zones fortement peuplées de Mossoul et de Raqqa dans la lutte contre Daesh. Des centaines de civils pouvaient alors apparemment périr et leurs villes être détruites au nom de la “guerre contre le terrorisme”. La même logique a été utilisée par les partisans d’Assad et de Poutine pour tenter de rationaliser les sièges meurtriers et les bombardements brutaux des populations civiles vivant dans les zones de la Syrie détenues par des groupes rebelles armés, dont la plupart sont à tendance islamiste-fondamentaliste, comme les salafistes de “Jaysh al-Islam” qui avaient jusqu’à récemment le contrôle de la Ghouta orientale.

    En réalité, le déchaînement meurtrier d’Assad et de ses alliés – à l’instar des meurtres de civils qui accompagne la “libération” impérialiste occidentale des zones contrôlées par Daesh – combiné à la pauvreté de masse et à l’aliénation de millions de personnes sont susceptibles d’agir comme agents de recrutement pour de futurs groupes armés sunnites extrémistes – à moins qu’ils ne soient contestés par une véritable alternative. Parallèlement, les actions d’impitoyables gangs armés de type salafiste et djihadiste ont aidé Assad à maintenir – par la peur – le contrôle sur des portions importantes de la population. Une nouvelle série de frappes aériennes impérialistes aurait le même effet, renforçant le discours d’Assad qui compare son régime à une forteresse assiégée par des ennemis terroristes et impérialistes intérieurs et extérieurs.

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière s’oppose vigoureusement à toute attaque militaire contre la Syrie, ainsi qu’à toute intervention étrangère et à toute ingérence dans le pays. L’effusion de sang et la destruction qui se sont poursuivies presque sans relâche au cours des sept dernières années doivent être stoppées, et non pas aggravées. C’est une tâche que toutes les puissances capitalistes et impérialistes existantes impliquées dans la région – qui luttent entre elles pour le pouvoir, le prestige et le profit – se sont montrées totalement incapables de réaliser. Il ne peut tout simplement pas y avoir de solution aux horreurs auxquelles le peuple syrien est confronté sur base de ce système pourri.

    Alors que le peuple syrien supporte les coups de la contre-révolution et de la guerre, une classe ouvrière importante et puissante existe dans des pays comme l’Iran, la Turquie et l’Egypte. Une telle force – alliée aux pauvres et aux opprimés de la région ainsi qu’à un très nécessaire mouvement anti-guerre en Occident de même qu’armée de politiques socialistes démocratiques – peut montrer la voie à suivre pour sortir du cauchemar auquel sont confrontées la Syrie et le Moyen-Orient plus largement.

    • Non aux attaques de Trump sur la Syrie – retrait de toutes les forces étrangères de Syrie – non à l’ingérence de toutes les puissances extérieures dans la région.
    • Pour la construction d’un mouvement de masse international contre la guerre.
    • Pour la construction de comités de défense unitaires, multiethniques et non sectaires dans toutes les parties de la Syrie afin de défendre les travailleurs et les pauvres contre les attaques sectaires et militaires de toutes les parties.
    • Pour la construction de syndicats indépendants et de partis des travailleurs de masse, avec un programme visant à donner les terres aux masses et les entreprises aux travailleurs.
    • A bas la dictature, le capitalisme et l’impérialisme – pour l’unité des travailleurs et le socialisme.
    • Pour une confédération socialiste démocratique du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, respectant les droits de toutes les minorités.
  • Gaza: Protester n’est pas du terrorisme

    • Pour une enquête indépendante sur les tueries
    • Stop au blocus, stop à l’occupation israélienne!
    • Pour une solution socialiste à la question nationale

    Marcher sur la terre de votre propre pays n’est généralement pas considéré comme un crime. Mais pour deux millions de Palestiniens emprisonnés à Gaza, une telle action est considérée comme une menace pour l’Etat d’Israël.

    Lorsque les habitants de Gaza, la plus grande prison du monde, ont lancé une protestation de masse contre le siège brutal d’Israël et d’Égypte et la terrible détresse dans laquelle ils se trouvent, le gouvernement Netanyahu a envoyé l’armée contre eux.

    Le résultat fut la mort de 18 Gazaouis et plus de 1.500 blessés lors de la Marche palestinienne vers la frontière entre Gaza et Israël pour marquer le Jour de la Terre (commémoration des Palestiniens tués le 30 mars 1976 pour protester contre l’expropriation de leurs terres par Israël), et exiger la levée du siège de Gaza par Israël.

    Il est typique de la machine “hasbara” (propagande) de l’occupation de retourner la réalité et de qualifier de “violente” toute manifestation palestinienne. L’agression militaire quotidienne et le siège qui étrangle environ deux millions de personnes ne sont pas considérés comme violents, mais bien par contre la protestation de masse contre cette situation.

    La répression des manifestations par le gouvernement Netanyahou n’a pas pour but de protéger le public israélien. Non. La provocation, la diabolisation et la guerre militaire contre des civils non armés ont pour but de dissuader le peuple palestinien de se battre pour ses droits et de noyer sa protestation dans le sang. Il est destiné à maintenir le siège, l’oppression nationale des Palestiniens, la pauvreté et la détresse. Et il est destiné à jeter du sable aux yeux des travailleurs juifs et des jeunes et à les mobiliser contre la lutte des travailleurs et des jeunes palestiniens pour une vie digne. Pour Netanyahu en particulier, la guerre contre les manifestations offre une autre occasion d’exploiter les craintes concernant la sécurité parmi le public israélien afin de détourner l’attention du public des soupçons de corruption à son encontre et des échecs énormes de son gouvernement.

    Il est important de souligner qu’un régime qui attaque les manifestants est un danger potentiel aussi pour les luttes futures des travailleurs israéliens et des jeunes qui feront face à une opposition et à une dénonciation féroce de la classe dirigeante. De plus, le massacre de manifestants palestiniens et la poursuite même du siège et de l’occupation, non seulement suppriment tout horizon de paix, mais constituent un avertissement du danger d’une nouvelle détérioration de la vie des travailleurs dans un avenir immédiat. Il est important que les travailleurs et les jeunes israéliens expriment leur opposition et participent aux manifestations contre la politique sanglante du gouvernement Netanyahu.

    Avec la provocation que constitue le transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem, qui ignore de fait le droit des Palestiniens à leur propre État avec Jérusalem comme capitale, ainsi qu’avec le 70e anniversaire d’Israël, qui est officiellement célébré en ignorant la situation et les droits des Palestiniens, la récente protestation fait partie d’une série de manifestations prévues pendant un mois et demi. Celles-ci marqueront le 70e anniversaire de la Nakba palestinienne – la destruction systématique de centaines de villages et de communautés palestiniennes occupées et le déracinement de plus de 750.000 résidents pendant la guerre de 1948.

    Au cours des prochaines semaines, des rassemblements et des manifestations sont prévus dans la bande de Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem, ainsi qu’en Jordanie, en Syrie et au Liban. Ces protestations, soutenues par les principales factions du mouvement national palestinien, est la plus étendue pour les droits des réfugiés palestiniens depuis les manifestations houleuses de milliers de réfugiés aux frontières avec Israël lors de la Journée de la Nakba en 2011, dans le contexte des mouvements révolutionnaires appelés le «printemps arabe». A l’époque, quinze manifestants avaient été tués et des centaines blessés.

    Le premier jour de protestation a eu lieu le 30 mars, jour de la terre, commémorant la grève arabo-palestinienne en Israël en 1976, au cours de laquelle six manifestants avaient été abattus. “Qu’est-ce qu’il y a de dangereux avec des enfants se tenant à des centaines de mètres des chars et des soldats armés? Tout ce que nous avons demandé d’exprimer dans la marche est simplement nos vies intolérables”, a déclaré Hasan al-Kurd, l’un des organisateurs de la manifestation, sur le site israélien Local Call. “Nous avons eu beaucoup de morts et de blessés. Mais pensent-ils vraiment que c’est ce qui nous arrêtera? Après tout, nous n’avons pas d’autre choix que de continuer à manifester. Je veux faire appel au public israélien et lui demander de faire pression sur son gouvernement. Les gens ici vont continuer à mourir et à la fin cela va exploser à leur visage .

    “Nous ne sommes pas venus ici pour nous battre, nous sommes venus pour retourner dans notre pays”, pouvait être lu en hébreu pendant la manifestation palestinienne. Environ 70% des habitants de la bande de Gaza sont des réfugiés, c’est-à-dire une population déracinée par la force en 1948 et poussée dans la bande qui est devenue l’une des zones les plus densément peuplées du monde et un ghetto assiégé de pauvreté et de crises terribles.

    “Le monde doit comprendre que nous vivons dans une grande prison, chaque citoyen de Gaza le ressent dans sa propre vie et veut transmettre ce message”, a déclaré un membre du comité d’organisation cité dans Haaretz. “La marche est pour notre retour, elle est censée transmettre au monde un message : Assez avec le siège, assez avec l’occupation’’, a-t-il expliqué.

    Tandis que le gouvernement du capital et des colonies de Netanyahu organise des célébrations pour marquer le 70e anniversaire d’Israël – et pour mobiliser la sympathie du public avec le nationalisme – les droits des réfugiés palestiniens et les droits des Palestiniens en général continuent d’être grossièrement attaqués quotidiennement.

    Le 15 mai, date de la Nakba, les manifestations devraient atteindre leur sommet avec la “One Million March”. La lourde répression militaire vise à contrecarrer l’expansion du mouvement de protestation, car un scénario dans lequel les masses se battent pour leurs droits menace le régime d’occupation, comme chaque dictature. La mobilisation de dizaines de milliers, voire de centaines de milliers de personnes, pourrait permettre, entre autres, une manifestation de masse contre les barrières du siège de la bande de Gaza – un scénario que non seulement le gouvernement israélien craint mais aussi le Hamas. Le Hamas ne s’intéresse pas vraiment à une lutte de masse indépendante qui échapperait à son contrôle et prouverait que les masses palestiniennes peuvent faire ce dont la puissance militaire du Hamas n’est pas capable : menacer le pouvoir, le siège et l’occupation.

    Dans le contexte d’une lourde répression militaire, on ne sait pas encore dans quelle mesure ce mouvement pourra se développer dans les semaines à venir. L’expansion du groupe qui organise les activités de protestation peut aider à renforcer la protestation, en organisant des comités démocratiques de résidents et en tenant des réunions pour discuter et décider des prochaines étapes de la lutte et des moyens d’organiser l’autodéfense des manifestants.

    La tendance constante de la classe dirigeante israélienne à exploiter les craintes de la population israélienne doit être remise en question, ce qui ne peut être fait qu’en offrant une réelle alternative.

    Les socialistes soutiennent une lutte palestinienne massive et indépendante, telle qu’elle a été organisée pendant la première Intifada. Nous soulignons qu’il est dans l’intérêt de la population des travailleurs israélienne et des jeunes de ne pas se laisser tromper par les incitations du gouvernement Netanyahu, mais de tendre une main courageuse de solidarité et de paix aux manifestations palestiniennes et de protester contre le gouvernement capitaliste israélien, contre l’occupation et le siège.

    Tout en luttant maintenant pour mettre fin à la répression et gagner des revendications démocratiques et sociales, une alternative plus large doit être proposée. Des luttes significatives pourraient certainement gagner des acquis importants, mais c’est seulement sur une base socialiste qu’il sera possible d’unifier les conditions de vie des Palestiniens avec celles des Israéliens – et d’élever, en fait, le niveau de vie général bien au-delà des meilleures conditions réalisé sous le capitalisme – et de garantir une complète égalité des droits dans tous les domaines. Ce n’est qu’ainsi qu’il sera possible de s’assurer que toutes les ressources servent rationnellement et démocratiquement le bien-être des masses, et de permettre également l’investissement nécessaire pour les réfugiés palestiniens. Une solution juste à leur situation exige une lutte pour garantir des conditions de bien-être et d’égalité dans la région, et la promotion du dialogue direct et du consentement, qui inclurait la reconnaissance de l’injustice historique et du droit au retour.

    Il faut en finir avec le déni du droit à l’autodétermination : Pour un État palestinien indépendant, démocratique, socialiste et égal, avec Jérusalem-Est comme capitale, à côté d’un Israël démocratique et socialiste qui garantissent une véritable égalité des droits pour tous.

  • Manifestation contre l’OTAN et contre l’invasion et l’occupation d’Afrin

    Ce mardi 27 mars, quelque 2.000 personnes ont manifesté à Bruxelles contre l’invasion turque d’Afrin, au nord-ouest de la Syrie, et contre la complicité tacite des alliés de l’OTAN qui ne sont pas prêts à arrêter cette invasion. Le régime turc du président-dictator Erdogan veut conquérir Afrin et, en fait, l’ensemble du Rojava, la région à majorité kurde qui est autogérée. Son objectif est de renforcer sa position en Turquie sur une base nationaliste et, en même temps, d’accroître sa présence régionale. Parallèlement, Erdogan veut en finir avec l’exemple d’autonomie kurde afin que la population kurde turque ne s’en inspire pas.

    La manifestation s’est concentrée sur la catastrophe humanitaire causée par l’invasion turque. La conquête d’Afrin s’est accompagnée de nombreux morts et de milliers de réfugiés. Le risque de nettoyage ethnique et de pillage est grand. Beaucoup des personnes présentes avaient des membres de leur famille à Afrin ou étaient eux-mêmes originaires de cette région.

    Nous ne pouvons pas permettre aux victimes de cette guerre de lutter seules contre l’invasion et l’occupation d’Afrin ! Lors de la manifestation de Bruxelles, des Kurdes vivant en Belgique et dans les pays voisins ont démontré leur solidarité. On trouvait en outre parmi les manifestants des militants du Comité de solidarité Rojava, de l’ASBL pacifiste Vrede, du PSL et d’autres organisations. A la fin de la manifestation, Eric Byl a pris la parole au nom du PSL en exprimant notre solidarité avec la résistance à l’invasion d’Afrin. Il a défendu que les travailleurs et les jeunes prennent l’initiative, y compris ici et au-delà de la communauté kurde. Il a ainsi fait référence à la guerre du Vietnam, qui a conduit à un mouvement de masse aux Etats-Unis il y a 50 ans : les Etats-Unis ont perdu cette guerre non pas tant militairement, mais à cause de la pression de ce mouvement de masse dans leur propre pays. En nous organisant et en nouant des liens avec le mouvement des travailleurs ici en Belgique et ailleurs en Europe, nous pouvons poser des pas dans cette direction. Au nom de la campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité), Emily Burns a souligné l’importance de la lutte pour les droits des femmes, un élément qui est également fortement souligné dans le Rojava.

    Reportage-photos de Mario :

    Betoging tegen NAVO en tegen Turkse inval in Afrin // Mario

    Reportage-photos de Liesbeth :

    Betoging tegen NAVO en tegen invasie in Afrin // Liesbeth

    Vidéo :

  • Maroc : Soutien au «Hirak de Jerada»!

    La population de la ville minière de Jerada, dans le nord-est du Maroc, est mobilisée depuis plus de trois mois contre la misère, la marginalisation économique et la répression d’Etat. Le 22 décembre dernier, c’est le décès de 2 frères, Houcine et Jedouane, dans un puits de charbon désaffecté, qui a transformé une colère latente en révolte ouverte. Dans les semaines qui ont suivi, deux autres jeunes sont morts dans des circonstances similaires.

    Par Alternative Socialsite (CIO-Tunisie)

    La région de Jerada, une des plus pauvres du pays, est sinistrée depuis la fin des années ’90 suite à la fermeture des mines de charbon. Cette situation désespérée a forcé des centaines d’anciens mineurs et jeunes chômeurs à risquer leur vie dans les « puits de la mort », en extrayant du charbon dans des conditions dangereuses, et en le revendant clandestinement pour une poignée de dirhams à des négociants profiteurs, communément appelés les « barons » – qui sont bien souvent aussi des politiciens locaux corrompus, ou des affairistes ayant des liens avec des multinationales énergétiques opérant dans la région.

    Fournissant autrefois plus de la moitié des besoins en énergie du pays, les habitants de Jerada se plaignent aujourd’hui de factures d’électricité et d’eau totalement inabordables, du chômage de masse et du mépris des autorités monarchiques.

    Après une première vague de mobilisation impliquant des manifestations quotidiennes et des actions de grève, l’élite dirigeante, craignant que la mobilisation s’étale au-delà de son épicentre et fasse des émules dans le reste du Maroc, a proclamé un « plan d’urgence » pour la ville en février.

    Mais la population locale a vite compris que les promesses faites par le gouvernement n’étaient que de la poudre aux yeux visant à étouffer leurs revendications plutôt qu’à les satisfaire. Depuis la reprise des mobilisations fin février, la réponse du régime s’est résumée à la répression policière brutale, y compris l’arrestation massive de militants, ciblant en particulier les dirigeants du mouvement. Plus de 300 personnes ont été détenues depuis le début des mobilisations à Jerada, dont au moins 17 mineurs.

    Suite à une grève générale bien suivie dans la ville le 12 mars, le ministère de l’Intérieur a ordonné l’interdiction de toute manifestation locale à partir du lendemain. Des vidéos postées sur les réseaux sociaux ont montré depuis des camions de police fonçant sur la foule de manifestants qui bravaient cette interdiction arbitraire. La majorité des blessés par cette violence policière ont dû se soigner chez eux, évitant l’hôpital par peur d’être arrêtés.

    A présent, la ville se trouve de fait en état de siège, avec une présence policière à tous les coins de rue. Malgré cela, radicalisée davantage par la répression, la population locale, comme celle des villages alentour, continue à chercher à se mobiliser ; des appels à une nouvelle grève générale et à une marche vers Rabat, la capitale du Maroc, sont évoqués.

    Pendant ce temps, des centaines de protestataires croupissent encore dans les prisons du royaume pour leur participation au mouvement social de l’an dernier à El-Hoceima, dans la région voisine du Rif. Ce qui se passe à Jerada n’est que le dernier épisode en date de mouvements récurrents exprimant des revendications similaires à travers le pays: le droit au travail des jeunes, à des infrastructures publiques décentes, à une vie digne. En octobre dernier, des « manifestations de la soif » contre les coupures d’eau avaient aussi éclaté à Zagora, dans le Sud, en raison de la surexploitation des nappes phréatiques au profit des gros agriculteurs. Le régime avait également répondu à ce mouvement par la force, et quadrillé la ville.

    La lutte en cours à Jerada a pris le nom de « Hirak de Jerada » (« mouvement de Jerada ») : une référence directe aux manifestations d’El-Hoceima, illustrant le sentiment largement partagé d’une convergence d’intérêts entre ces luttes.

    L’enjeu est de matérialiser ce sentiment par la construction d’une lutte d’ensemble. C’est en faisant cause commune que ces mouvements ont une chance d’avancer et de rompre la politique d’encerclement et d’isolement pratiquée par le régime. Certaines organisations associatives et syndicales ont à juste titre fait un appel pour une mobilisation nationale en solidarité avec le « Hirak de Jerada » le 2 avril. Cet appel pourrait servir d’opportunité pour chercher à étendre la lutte, et à mobiliser le mouvement ouvrier et la jeunesse partout dans le pays sur la base d’un cahier de revendications plus large, touchant au cœur des politiques antisociales du régime. Une grève de 24h, en solidarité avec Jerada et pour la libération des prisonniers politiques, mais intégrant aussi des revendications claires pour l’emploi, le rehaussement des salaires, la fin des privatisations et des attaques sur les subventions,…serait un pas important en vue de construire une telle dynamique.

    Les revendications des habitants de Jerada ont en effet une portée nationale. Car c’est uniquement en s’attaquant au cœur du pouvoir économique et politique dans le pays que les revendications des localités marginalisées peuvent trouver une satisfaction durable, et que la demande d’une « alternative économique » brandis par les manifestants de Jerada peut trouver tout son sens. Pourquoi les chômeurs, les pauvres et les travailleurs devraient-ils accepter de s’enfoncer dans la misère et de risquer leur vie pour nourrir leurs familles, alors que le ‘Makhzen’, ainsi qu’une poignée d’entreprises et d’affairistes mafieux qui lui sont proches, s’enrichissent grassement à leurs dépens ?

    Une lutte de masse impliquant les travailleurs et la jeunesse de tout le pays est nécessaire pour exproprier la monarchie et les grosses entreprises, marocaines et étrangères, qui contrôlent et pillent l’économie du pays, et pour réorganiser la vie économique sur la base des besoins sociaux de la majorité de la population. Cette alternative, c’est celle du socialisme, que les partisans du CIO défendent face à la misère, aux injustices et à la barbarie du système capitaliste mondial.

    Le CIO affirme sa solidarité complète avec la lutte en cours à Jerada. Nous demandons :

    • L’arrêt de la répression étatique et de la criminalisation des mouvements sociaux, à Jerada comme dans le reste du Maroc ; la libération immédiate de tous les prisonniers politiques et la fin des procédures pénales à leur égard
    • Le développement de comités d’action locaux afin de coordonner démocratiquement la lutte par la base, et d’organiser la défense du mouvement face à la répression policière
    • La préparation d’une grève générale de 24h dans tout le Maroc : en solidarité avec Jerada en lutte, pour l’emploi, contre la répression des mouvements sociaux, et contre les politiques néo-libérales du gouvernement
    • Des emplois publics, décents et bien rémunérés pour tous. Un vaste programme de construction et rénovation des infrastructures dans les régions marginalisées, financé par l’Etat, et coordonné démocratiquement par les populations concernées
    • Pour des services publics de qualité, accessibles à tous et toutes – arrêt immédiat des privatisations et maintien de toutes les subventions sur les produits de base
    • Nationalisation, sous contrôle démocratique des travailleurs et de la population, des secteurs-clés de l’économie, en vue d’une planification des ressources répondant aux besoins sociaux
    • Soutien aux travailleurs et jeunes en lutte au Maroc, en Tunisie, en Algérie…pour une fédération socialiste, démocratique et volontaire des peuples du Maghreb.
  • Solidarité avec Afrin ! Résistance populaire contre l’occupation turque !

    Action de solidarité à Bruxelles ce 3 mars. Photo : Mario

    La fin de l’Etat islamique ne signifie pas celle de l’instabilité – la seule issue est l’action indépendante des masses

    Des centaines de milliers de personnes (combattants ou civils) ont perdu la vie au cours de la guerre contre le ‘‘califat’’ de l’Etat islamique (Daesh) en Irak et en Syrie. Sans compter toutes les victimes d’attentats au Yémen et ailleurs dans le Moyen-Orient et dans le monde. Sans compter les milliers de femmes yazidies enlevées et forcées à devenir des esclaves sexuelles. Sans compter les centaines de milliers de personnes dont la vie a été plongée dans l’horreur et le chaos. Ce chaos, hélas, ne disparaitra pas avec le prétendu ‘‘califat’’.

    Par Nicolas Croes

    S’il y a bien un terme adéquat pour correspondre à l’état actuel du monde capitaliste, c’est celui ‘‘d’explosif’’. Depuis l’éclatement de la crise économique, l’instabilité politique et sociale a gagné en intensité, de même que la concurrence – voire les conflits – entre les diverses grandes puissances et leurs alliés. A l’aube du 21e siècle, les Etats-Unis régnaient en véritables ‘‘gendarmes du monde’’ à l’autorité incontestée. Il n’a pas fallu 20 ans pour que cette situation vole en éclats.

    Casse-tête et migraines dans les Etats-majors

    Ce 20 mars, cela fera 15 ans que l’Irak a été envahie par la coalition dirigée par les Etats Unis. A l’époque nous avions activement participé au mouvement anti-guerre – sans pour autant accorder le moindre soutien à la dicta ture de Saddam Hussein – en expliquant notamment que l’occupation ouvrait la voie à ‘‘plusieurs Saddam’’. Les évènements qui suivirent nous ont tragiquement donné raison.

    Aujourd’hui se profilent les premières élections législatives post-Daesh, le 12 mai, dans un pays dévasté. Au Nord du pays, dans le Kurdistan irakien, les aéroports sont fermés et les fonctionnaires kurdes ne reçoivent plus de salaire de la part des autorités irakiennes en punition du référendum d’indépendance de septembre 2017 (92,7% des Kurdes irakiens ont voté en faveur de l’indépendance avec une participation de plus de 72%).

    Ailleurs dans le pays, ‘‘Si le processus de stabilisation ne commence pas vite, les germes sont là pour que ressurgissent d’autres formes de terrorisme’’, a déclaré le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères français, venu à Bagdad soutenir le Premier ministre irakien Haïder Al-Abadi. La reconduction de ce dernier pour un second mandat est loin d’être acquise après le 12 mai. Pour lui, la reconstruction du pays nécessite 88 milliards de dollars (71 milliards d’euros). Les alliés de l’Irak ont, le 14 février, promis de mobiliser 30 milliards de dollars seulement. Que restera-t-il de ces maigres promesses ? Mystère. Ce qui est certain, c’est que les nouveaux marchés qui s’ouvrent aux entreprises font l’objet d’une attention bien plus soutenue de la part de la France, des Etats-Unis, de la Turquie, de l’Arabie saoudite, du Qatar, du Koweït…

    Après des décennies de chaos activement provoqué et entretenu par les puissances occidentales, toutes les forces en présence recherchent une certaine stabilité. Mais leurs intérêts divergent profondément. En mai 2017 a pris place le sommet de Riyad durant lequel Trump, le souverain saoudien Salmane, le président égyptien al-Sissi et d’autres dirigeants arabes se sont engagés à ‘‘combattre le terrorisme’’ de concert. Le 23 novembre, un sommet tripartite a réuni les présidents russe, iranien et turc. L’Iran et la Turquie se sont rapprochés, notamment du fait de leur opposition commune au référendum sur l’indépendance du Kurdistan irakien.

    La France, tout d’abord, puis les Etats-Unis ont fait une volte-face concernant le régime de Bachar al-Assad, considéré comme faisant partie de la solution post-Daesh tandis que ce dernier et ses alliés, la Russie, le Hezbollah, les milices chiites irakiennes pro-iraniennes et l’Iran ont tenté d’occuper le plus de terrain possible pour l’après-Daesh, y compris à la frontière irakienne, pour pouvoir exiger une certaine légitimité sur tout le pays. Les Etats-Unis ont tenté d’amener le Premier ministre irakien à se rapprocher des Saoudiens mais, lors de la réunion de la Ligue arabe de la mi-novembre, le gouvernement irakien a refusé de condamner le Hezbollah et l’Iran. Une des clés de compréhension de cette attitude réside dans l’incorporation de milices chiites soutenues par l’Iran dans les forces de sécurité irakienne.

    La lutte indirecte entre l’Iran et l’Arabie saoudite qui prend actuellement place au Yémen pourrait s’étendre en Irak. Les régimes sunnites sont de plus divisés quant à l’impatience inconsidérée de Trump. Les Etats du golfe, surtout l’Arabie saoudite et l’Egypte, reprochent au Qatar son soutien aux Frères Musulmans, à Al Jazeera et à l’Iran.

    L’épine kurde dans le pied des différentes puissances

    L’équilibre des forces est précaire dans toute la région. Pacifier les parties en lutte et instaurer un partage du pouvoir stable en Syrie, en Irak et, par extension, dans tout le Moyen Orient, est aujourd’hui plus éloigné que jamais.

    Jadis, l’Occident espérait que le régime d’Erdogan pourrait servir d’exemple d’une démocratie musulmane moderne et modérée qui réussirait également à repousser l’influence du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et deviendrait un modèle pour toute la région. Ces illusions ont été balayées par les victoires militaires des Kurdes syriens, la victoire électorale du parti HDP (Parti démocratique des peuples, pro-kurde) en 2015, l’arrêt de la croissance économique, puis le coup d’Etat manqué de juillet 2016 suivi d’une énorme répression et de l’installation d’un état d’urgence permanent et enfin d’un référendum sur une dictature présidentielle dans l’Etat turc.

    Depuis le 20 janvier, l’Etat turc a lancé une offensive sanglante contre les Kurdes à Afrin, dans le nord de la Syrie, dans le prolongement de l’offensive dévastatrice menée en 2016 contre les régions kurdes de Turquie. Ce n’est qu’en 2016 que des avions turcs ont bombardé pour la première fois les bases de Daesh en Syrie. Mais le prétexte de la prétendue ‘‘guerre contre le terrorisme’’ des forces occidentales a été saisi par le régime d’Erdogan pour couvrir le bombardement des forces kurdes qui combattaient Daesh sur le terrain ! Plutôt qu’une victoire kurde, l’Etat turc préférait très clairement que Daesh l’emporte.

    Les Kurdes composent une nation sans Etat, divisée entre l’Irak, l’Iran, la Syrie et la Turquie depuis l’accord conclu après la Première guerre mondiale entre puissances impérialistes pour découper la région. Dans l’instabilité créée par la guerre en Irak de 2003, ils ont développé des zones autonomes en Irak et en Syrie. Le régime turc craint ce que cela pourrait signifier pour la Turquie elle-même.

    Les combattants kurdes ont fait preuve d’héroïsme dans leur lutte contre Daesh. Mais bon nombre de leurs gains ont été réalisés aux côtés d’attaques aériennes des forces russes et américaines. Le Parti Socialiste de Lutte (PSL) et le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) ont à plusieurs reprises averti que les États-Unis et la Russie n’étaient pas des amis du peuple kurde. Ils utilisent les combattants kurdes quand cela leur convient pour les abandonner ensuite tout aussi facilement. C’est ce que nous avons brutalement vu se produire en 1991, lorsque George H. W. Bush a encouragé un soulèvement contre Saddam Hussein pour ensuite laisser les Kurdes être massacrés. La même chose menace maintenant de se produire à Afrin: une fois Daesh vaincu, les Etats-Unis et la Russie ont permis à la Turquie de faire déferler sa machine de guerre.

    Pour une résistance de masse !

    Les Kurdes ont bien entendu le droit de se défendre. Le plus efficace serait au moyen de comités de défense démocratiques, non sectaires et multiethniques, capables de donner un rôle actif à la population. Les territoires actuellement sous contrôle kurde sont peuplés d’Arabes, de Turkmènes et de Kurdes. Il est vital de faire appel à ces masses pour qu’elles s’organisent ensemble. En défendant le droit à l’autodétermination des peuples, il serait possible de construire un mouvement qui résisterait aux attaques turques et s’adresserait aux travailleurs et aux pauvres de toute la région.

    Il est également important de lancer un appel à la classe ouvrière en Turquie. Dans une situation aussi terrible, cela peut sembler éloigné. Un tel appel doit reposer sur un programme de défense des droits démocratiques, pour de bons emplois et des logements décents mais aussi pour que les vastes ressources de la région soient détenues et contrôlées démocratiquement par la collectivité, au bénéfice de tous. Les travailleurs et les pauvres en Turquie n’ont rien à gagner de l’oppression des Kurdes, qui ne fait que renforcer le gouvernement et les patrons qui les exploitent et les oppriment également.

    La plus grande crainte des riches, des grands patrons et des propriétaires terriens ainsi que de leurs représentants politiques serait le rassemblement des travailleurs kurdes, irakiens, turcs, syriens et iraniens dans un mouvement qui pourrait défier les gouvernements locaux, les impérialistes et le capitalisme lui-même.

    Nous soutenons le droit démocratique du peuple kurde à l’autodétermination, y compris, s’il le souhaite, jusqu’à la pleine autonomie et à l’établissement d’États indépendants ou d’un État commun à tous les Kurdes. Une confédération socialiste sur base volontaire au Moyen-Orient permettrait à tous les peuples de décider librement et démocratiquement de leur destin.

    Sur Twitter, un jeune syrien réagissait ainsi aux bombardements du régime syrien sur la Ghouta (à l’est de Damas) : ‘‘Qu’est-ce que cette humanité qui envoie des navettes sur Mars et qui ne peut rien faire pour sauver des vies qu’on assassine ?’’ C’est sur ce type de contradictions que repose le système capitaliste. Il sera plus facile de renverser ce système que d’obtenir la paix et le respect des peuples en restant dans ses étroites limites.

  • Bruxelles. Action de solidarité contre l’intervention turque à Afrin

    Un rassemblement a eu lieu ce samedi à Bruxelles pour dénoncer l’invasion turque à Afrin, en Syrie. Ce n’est pas la première action qu’il y a eu sur ce sujet, mais la guerre se poursuit et a passé le cap des 40 jours. L’intervention de l’Etat turc vise à le positionner pour la situation post-Daesh et à empêcher que les régions autonomes kurdes de Syrie ne puissent servir d’exemple au peuple kurde de Turqui. Avec cette guerre, le président-dictateur turc Erdogan essaye également de favoriser les sentiments nationalistes pour renforcer son assise sur la société.

    Photos de Mario (Bruxelles)

    Protest tegen Turkse inval in Afrin // Foto's door Mario

  • Iran & Tunisie: la flamme de la révolte n’est pas éteinte

    ‘‘Ils pourront toujours couper toutes les fleurs, ils n’arrêteront jamais le printemps.’’ Pablo Neruda

    Ces dernières semaines et ces derniers mois, des mouvements sociaux ont éclaté au Maroc, en Algérie, dans le Kurdistan irakien,… Mais les masses de deux pays de la région du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord, l’Iran et la Tunisie, ont particulièrement impressionné par l’ampleur de leur révolte dans des conditions pourtant extrêmement difficiles.

    Par Nicolas Croes, article tiré de l’édition de février de Lutte Socialiste

    Là-bas aussi, l’austérité, ça suffit !

    Le 28 décembre dernier, la colère s’est emparée de la rue iranienne. Cette vague de manifestations et d’actions est partie des provinces pour atteindre tout le pays et la capitale. La présentation du budget 2018 a agi comme détonateur de l’agitation sociale. Sous prétexte de ‘‘relancer l’économie et d’attirer les investisseurs étrangers’’ – un refrain bien connu par chez nous également – le président ‘‘modéré’’ Hassan Rohani a annoncé une batterie de nouvelles mesures d’austérité. Parmi elles, la réduction des budgets sociaux (notamment la suppression d’une aide sociale pour 34 millions de personnes) et l’augmentation des prix du carburant (d’environ 40% sur le pétrole et le gazole) et des denrées alimentaires.

    Une dizaine de jours plus tard, le 8 janvier, c’est en Tunisie qu’une vague de mobilisations a déferlé sur les quatre coins du pays à la suite du mouvement spontané ‘‘Fech Nestannew – Qu’est-ce qu’on attend ?’’ Là aussi contre la cherté de la vie. Là encore contre un sévère durcissement de la politique d’austérité suite au vote de la ‘‘loi de finances 2018’’. Au programme : hausse de certains droits de douane, de divers impôts, et de la TVA (de 1%) ou encore menace de prélèvement supplémentaire de 1 % sur les salaires.

    Dans les deux cas, le régime a fait appel à tout son arsenal répressif. La ‘‘démocratie tunisienne’’ tant vantée par les dirigeants occidentaux a eu recourt à l’état d’urgence systématiquement renouvelé depuis 2015. Entre le 8 et le 11 janvier uniquement, 773 personnes ont été arrêtées. L’an dernier déjà, certains sites de production avaient été militarisés par le gouvernement tunisien en réaction aux mouvements sociaux du Sud du pays. Mais alors que divers dirigeants de puissances occidentales s’étaient très vite prononcés, avec hypocrisie, en faveur de la révolte en cours en Iran et contre la répression des autorités, ils n’ont offert que leur silence à la rue tunisienne. Un malaise qui s’explique par le fait qu’en Tunisie, les événements prennent place au sein de leur propre sphère d’influence.

    Une rage sociale qui ne tombe pas du ciel

    Il est bien difficile de comprendre le caractère massif de ces révoltes sociales sans les placer dans un contexte plus large. En Tunisie, 7 ans après le renversement révolutionnaire de Ben Ali le 14 janvier 2011, la crise sociale reste entière. La situation a même empiré, notamment sous les coups de fouets du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale sous prétexte de s’en prendre à la dette publique, dont le remboursement est le premier poste de dépense du budget. Les gens sont fatigués des promesses non tenues, de la négligence politique, de l’arrogance et de la corruption de l’élite riche, laquelle contraste avec leur propre niveau de vie en chute libre (le coût de la vie a augmenté de 35 % depuis 2011).

    Ce constat s’impose également en Iran. ‘‘Les travailleurs iraniens rêvent d’une vie meilleure depuis quatre décennies mais aujourd’hui, les gens ordinaires doivent souvent occuper deux ou trois emplois tout simplement pour survivre’’, affirme Mehdi Kouhestaninejad, un syndicaliste iranien de longue date qui vit actuellement au Canada et qui est actif dans le mouvement international de solidarité pour les droits des travailleurs en Iran. ‘‘Beaucoup de gens en Iran et à l’étranger peuvent être choqués par ce qui se passe, mais les syndicalistes avertissent depuis 10 ans qu’il y aura un soulèvement contre la classe dirigeante et leur kleptocratie’’, dit-il encore.(1) ‘‘La révolte est beaucoup plus celle des “va-nu-pieds” que des classes moyennes : elle témoigne de la misère, de la baisse du niveau de vie dans une société où la rente pétrolière enrichit indûment, et par la corruption, les élites du régime’’, rajoute le sociologue franco-iranien Farhar Khosrokhavar.(2)

    Les manifestants entendaient également dénoncer les excuses du régime qui reposent sur le manque de moyens alors qu’il finance les projets du Hezbollah au Liban ou intervient en Syrie auprès de Bachar el-Assad ou encore en Irak et au Yémen. Ce n’est toutefois pas le président qui a la main sur la politique régionale de l’Iran, mais les gardiens de la révolution, piliers conservateurs du régime. Les slogans des manifestants ont d’ailleurs visé sans distinction Hassan Rohani (le président réputé modéré), l’ayatollah Ali Khamenei (le guide suprême), et les Gardiens. Une différence de taille avec les manifestations de masse de 2009.

    Et pour la suite ?

    Les similitudes sautent aux yeux, y compris avec des situations bien plus proches de notre quotidien, mais il est évident que la manière dont les protestations peuvent se développer varie fortement entre la dictature iranienne et le régime autoritaire tunisien.

    Il existe un syndicat en Tunisie, l’UGTT, qui a pignon sur rue et qui organise plus d’un million de travailleurs. Malheureusement, les dirigeants de cette force sociale considérable rechignent assez systématiquement à mobiliser tout leur poids derrière les protestations sociales. La direction syndicale a passé toute l’année 2017 à soutenir ouvertement le gouvernement de Youssef Chahed ! Il y a sept ans, c’est une série de grèves générales régionales qui a renversé le tyran Ben Ali. Pourquoi ne pas faire de même avec Chahed, son budget et son gouvernement ?

    Il est tout à fait possible de construire un vaste front uni de résistance rassemblant les militants de Fech Nestannew, les travailleurs et les syndicats, les organisations de chômeurs et les communautés locales en lutte, etc. Mais comme le disent nos camarades tunisiens d’Al-Badil al-Ishtiraki (‘‘Alternative Socialiste’’) : ‘‘à moins que le mouvement ne construise sa propre expression politique indépendante basée sur les exigences de la révolution, les classes dirigeantes capitalistes constitueront continuellement des équipes gouvernementales qui correspondent à leurs seuls intérêts et écrasent les aspirations du peuple’’.

    Pour éviter que cela ne se reproduise, des comités d’action doivent être mis en place sur les lieux de travail et dans les quartiers afin de construire le mouvement par la base, de fédérer une lutte politique de masse visant à renverser le gouvernement actuel, et de préparer la formation d’un gouvernement révolutionnaire, basé sur des représentants démocratiquement élus des travailleurs, des paysans pauvres et des jeunes. A l’aide d’un programme socialiste, basée sur la propriété publique des banques, des usines, des grandes propriétés foncières et des services, un avenir radicalement différent pourrait être construit pour la majorité.

    Tirer les leçons du passé révolutionnaire

    La Tunisie dispose d’une large expérience révolutionnaire, qui ne se limite d’ailleurs pas à l’année 2011, mais l’Iran n’est pas en reste avec la révolution de 1978-1979 et les manifestations de 2009. En dépit des efforts du régime pour briser toute communication, les médias sociaux et d’autres moyens peuvent aider à diffuser les informations, les propositions pour la lutte et les expériences pratiques d’organisation en dépit de la dictature afin de préparer les prochaines étapes à franchir. En 2009, le mouvement avait été en grande partie récupéré sur sa fin par des dirigeants ‘‘modérés’’ comme Hassan Rohani qui ont aujourd’hui perdu tout crédit.

    Le rythme des manifestations et des grèves peut ralentir, ce qui était le cas au moment d’écrire ces lignes, mais la situation en Iran a fondamentalement changé. Cette expérience peut jeter les bases de la construction d’un mouvement ouvrier capable de défier aussi bien le régime, que les manœuvres de l’impérialisme occidental et le capitalisme. Les premières étapes doivent être le rassemblement des activistes dans des groupes et des comités pour coordonner les activités et élaborer les revendications et le programme. La gauche doit entamer un dialogue pour former un front uni, comme un pas en avant vers la création d’un parti ouvrier de masse démocratiquement dirigé qui puisse rassembler les travailleurs, les pauvres et les jeunes dans la lutte pour une alternative.

    Le mouvement ne doit entretenir aucune illusion ni envers des dirigeants occidentaux hypocrites tels que Trump, qui prétend soutenir le peuple iranien tout en se liant à la dictature saoudienne, ni envers de prétendues alternatives issues de l’élite iranienne pro-occidentale. Le peuple ne pourra disposer d’une vie meilleure que s’il prend lui-même son destin en main, en renversant le système d’exploitation capitaliste et en construisant une nouvelle société reposant sur la propriété collective et démocratique des ressources naturelles et des moyens de production.

    Seule une société dirigée par des représentants des travailleurs et des pauvres peut résoudre les crises chroniques que connait l’ensemble de la région, en accordant des droits démocratiques et en mettant un terme à la pauvreté et à l’oppression fondées sur le genre, la religion et l’ethnicité. Une révolution des travailleurs en Iran ou en Tunisie stimulerait les forces progressistes, démocratiques et socialistes dans tout le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord pour surmonter les idées et les forces islamistes réactionnaires.

    (1) https://theintercept.com/2018/01/06/iran-protests-working-class-rouhani/
    (2) http://www.lemonde.fr/idees/article/2018/01/05/en-iran-le-blocage-est-total_5237812_3232.html

  • Soudan. Protestations grandissantes contre la dictature

    Beaucoup de choses ont été dites et écrites sur le Soudan mais, on ne mentionne qu’à peine la résistance croissante qui s’y développe contre le régime. Ces dernières semaines, plusieurs actions et manifestations ont eu lieu contre le nouveau cadre budgétaire, ce qui a poussé le gouvernement d’Al-Beshir à durement réprimer la population.

    Par Thomas (Anvers), article tiré de l’édition de février de Lutte Socialiste

    Le budget de 2018 n’a pas été présenté avant la toute fin de l’an dernier. Sans surprise, son contenu était désastreux pour la majorité de la population. Les subventions qui permettent de baisser les prix des denrées de base et de l’énergie devraient être progressivement supprimées. Malgré la fin de la guerre, 20 milliards de livres soudanaises sont réservés à l’armée et à la sécurité, contre 8 milliards seulement pour l’enseignement et les soins de santé. Dans un pays où le peuple aspire à enfin connaitre des améliorations de ses conditions de vie, ce budget est une insulte.

    Nombreux sont ceux à avoir estimé que leur sort sortirait amélioré de la suppression des sanctions économiques des États-Unis et de la fin de la guerre. Les subventions des autorités pour le carburant avaient déjà été diminuées en 2012. Sous injonction du Fonds monétaire international (FMI), ce processus doit être renforcé et élargi à d’autres produits. D’autre part, le régime n’hésite pas à recourir à l’imposition d’amende de façon totalement arbitraire pour remplir ses caisses en fin d’année, particulièrement dès lors qu’il s’agit des tenues des femmes, sanctionnées pour ‘‘trouble de l’ordre public’’. Le problème est considérable: dans la seule région de la capitale, Khartoum, il y a eu 40.000 amendes pour ‘‘trouble de l’ordre public’’ en 2017.

    Le gouvernement essaie d’améliorer sa position sur la scène internationale en louvoyant entre les grandes puissances. Al-Beshir s’est ainsi rendu à Moscou et a reçu le président turc, à qui l’on avait promis la gestion d’une ville portuaire sur la mer Rouge. D’autre part, les tensions entre le pays et l’Égypte ainsi que l’Arabie saoudite sont grandissantes. Le rôle brutal de l’Arabie saoudite dans la guerre au Yémen a déjà provoqué des troubles au Soudan.

    Le président Al-Beshir entend rester à la tête du pays avec un troisième mandat en 2020, même si cela nécessite de changer la Constitution. L’énorme appareil répressif du régime tente d’écraser toute opposition ou acte de résistance. Les manifestations qui ont eu lieu au début de cette année, malgré les circonstances difficiles, ont déjà fait plusieurs morts. Les dissidents et militants syndicaux sont détenus sans procès. Les journaux critiques ont été fermés.

    C’est avec ce régime que Theo Francken veut travailler pour identifier les réfugiés soudanais et les renvoyer là-bas. Nous défendons le fait d’assister les travailleurs et les pauvres en lutte contre la dictature d’Al-Beshir. La petite organisation-sœur que nous avons au Soudan défend la lutte indépendante des travailleurs et des pauvres pour un changement socialiste de société. Une bonne organisation de la résistance et un programme de changement réel sont nécessaires. Notre solidarité à l’égard de la lutte au Soudan peut contribuer à la renforcer.

     

  • Soudan. Mohamed Satti est libéré, la campagne internationale de solidarité a porté ses fruits!

    Notre camarade soudanais du Comité pour une Internationale Ouvrière Mohammed Satti (Hamudi) a été libéré hier soir, le jeudi 2 février. Il a été détenu par les autorités soudanaises plus de deux semaines pour avoir participé à une manifestation anti-régime dans la capitale, Khartoum. Hamudi a été ramené chez lui par une voiture de police vers 21h30, heure locale.

    Il ne fait aucun doute que la libération de Hamudi est le fruit des pressions incessantes exercées sur les autorités soudanaises par la campagne internationale de solidarité organisée par le Comité pour une Internationale Ouvrière et ses sections à travers le monde. Le bruit grandissant autour de l’affaire Hamudi a fait en sorte que son maintien en détention devenu gênant pour le gouvernement soudanais.

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière salue cette victoire sur l’Etat soudanais et tient à remercier tous ceux qui ont mené campagne pour que notre camarade puisse sortir de prison. Cependant, des dizaines de militants de l’opposition sont toujours détenus dans de terribles conditions par le régime et doivent également être libérés.

    Des manifestations contre les hausses des prix ont encore éclaté ce mercredi à Khartoum, Wad Medani, Zalingei et dans d’autres villes. D’autres manifestants ont été arrêtés. Cela met en lumière la nécessité de construire un mouvement sur le long terme qui puisse non seulement résister à la répression de l’Etat mais aussi renverser la dictature capitaliste d’Omar el Béchir.

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière exige la libération de tous les prisonniers politiques qui luttent contre le régime soudanais et continuera de faire campagne pour aider à pousser de l’avant la lutte du peuple soudanais pour un Soudan libre, démocratique et socialiste.

    Voici ci-dessous quelques photos de solidarité qui ont accompagné cette campagne d’actions, de lettres de protestations,…

    Campagne de solidarité pour la libération de Mohamed Satti

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