Category: Syndical

  • La Poste. Lutter contre l’absentéisme ou contre les acquis sociaux?

    Les négociations pour la nouvelle convention collective de travail vont bon train à La Poste. comme c’est trop souvent le cas de nos jours, c’est la direction qui tente d’imposer son propre cahier de revendications à des syndicats sur la défensive. Elle veut relever le taux d’emplois à La Poste par tous les moyens possibles.

    Un correspondant

    Erratum

    Erratum Alternative socialiste septembre 2005 Un postier attentif a attiré notre attention sur 2 erreurs qui se sont glissées malencontreusement dans l’article sur La Poste. L’avant-dernier paragraphe se termine ainsi: "Elle oublie que La Poste a également profité du système: les agents décédés ou licenciés ont laissé à l’entreprise tous les jours de congé qu’ils avaient accumulés". Ce n’est pas vrai. Ces jours ont été payés aux membres du personnel concernés, y compris en cas de licenciement. Si un membre du personnel vient à décéder, ces jours sont payés aux héritiers.

    On peut lire dans le paragraphe qui suit: "Non seulement l’âge minimal pour partir en prépension serait relevé de 56 à 57 ans, mais l’agent ne pourrait le faire qu’après 35 ans de carrière au lieu de 30 aujourd’hui". Ce n’est pas totalement correct non plus. La possibilité pour les postiers de partir en prépension à 56 ans moyennant 30 années de carrière était une mesure d’exception prévue dans l’accord-cadre 2001-2004, qui allait de pair avec l’introduction de georoute. Il n’y a rien de prévu pour 2005 en matière de prépension. Dans sa proposition d’accord pour la CCT 2005-2006, la direction veut accorder la prépension à 57 ans pour ceux qui ont 40 ans de service (dont 35 ans de distribution), ou à 58 ans pour ceux qui ont 35 ans de service (quel que soit le nombre d’années de distribution). La mesure d’exception, en vertu de laquelle certaines catégories du personnel pouvaient partir en prépension à 56 ans en 2004, n’est plus reprise.

    Sous prétexte de lutter contre l’absentéisme, la direction propose d’instaurer une sorte de “prime de présence” pouvant aller jusqu’à 3000 euros bruts pour les agents qui n’ont jamais été malades.

    Et de citer des chiffres alarmistes: le taux d’absentéisme est de plus de 9% à La Poste contre 5% dans le privé et moins de 4% dans une entreprise publique comparable telle que la SNCB. La direction veut réduire ce taux à 7%. Pour y arriver, elle alterne les mesures “douces” (campagnes de sensibilisation du personnel) et les mesures coercitives telles que des contrôles à domicile par une société privée.

    Il y a pourtant des raisons objectives au taux d’absentéisme relativement élevé à La Poste. D’abord, il faut relever que les chiffres d’absentéisme de La Poste incluent toutes les absences, y compris les jours de grève. Si le privé appliquait la même méthode de comptabilisation, le taux d’absentéisme officiel y serait plus élevé.

    Surtout, les conditions de travail se sont nettement dégradées à La Poste ces dernières années avec la libéralisation du secteur. La Poste doit désormais être rentable, ce qui implique de comprimer les coûts du personnel. Les agents qui partent à la retraite ne sont plus remplacés, les nouveaux engagés le sont sur base de contrats à durée déterminée, voire de contrats d’intérim.

    La réforme du système de tournées des facteurs (géoroute) a considérablement augmenté la pression du travail. On supprime de plus en plus de services, de telle sorte qu’il n’est pas rare qu’un agent doive cumuler deux ou trois services. Le manque de personnel conduit l’entreprise à reporter sans cesse l’octroi des jours de congé auxquels le personnel a pourtant droit. La Poste totalise un arriéré de pas moins de 11 millions d’heures de congé. Plutôt que d’engager du personnel supplémentaire pour résorber cet arriéré, La Poste propose de… modifier le système des jours de congé. Aujourd’hui, le personnel statutaire a droit à 21 jours de salaire complet au titre de congés de maladie qu’il peut cumuler d’année en année. La direction de La Poste propose de le supprimer en échange de la prime ci-dessus. Un vrai marché de dupe qui verrait La Poste apurer à bon compte son arriéré de jours de congé en échange d’une misérable prime.

    La direction a beau jeu de dénoncer le caractère pervers du système qui conduit des agents à économiser des jours de congé pour partir plus tôt à la retraite. Elle oublie que La Poste a également profité du système: les agents décédés ou licenciés ont laissé à l’entreprise tous les jours de congé qu’ils avaient accumulés.

    De plus, la direction veut restreindre l’accès à la prépension. Non seulement l’âge minimal pour partir en prépension serait relevé de 56 à 57 ans, mais l’agent ne pourrait le faire qu’après 35 ans de carrière, au lieu de 30 au-jourd’hui. Autant dire que les agents qui n’ont pas travaillé toute leur vie à La Poste peuvent faire une croix sur tout départ anticipé.

    Face à cette offensive de la direction contre les acquis du personnel, les syndicats doivent faire preuve de la même détermination à les défendre. Il faut refuser toute restriction au droit à la prépension; il faut refuser le marché de dupe sur les congés de maladie. Les syndicats devraient organiser des assemblées du personnel en septembre pour expliquer la véritable nature des propositions de la direction et proposer un plan d’action pour imposer l’engagement de personnel supplémentaire et la fin des contrats précaires.


    Erratum

    Un postier attentif a attiré notre attention sur 2 erreurs qui se sont glissées malencontreusement dans l’article sur La Poste. L’avant-dernier paragraphe se termine ainsi: "Elle oublie que La Poste a également profité du système: les agents décédés ou licenciés ont laissé à l’entreprise tous les jours de congé qu’ils avaient accumulés". Ce n’est pas vrai. Ces jours ont été payés aux membres du personnel concernés, y compris en cas de licenciement. Si un membre du personnel vient à décéder, ces jours sont payés aux héritiers.

    On peut lire dans le paragraphe qui suit: "Non seulement l’âge minimal pour partir en prépension serait relevé de 56 à 57 ans, mais l’agent ne pourrait le faire qu’après 35 ans de carrière au lieu de 30 aujourd’hui". Ce n’est pas totalement correct non plus. La possibilité pour les postiers de partir en prépension à 56 ans moyennant 30 années de carrière était une mesure d’exception prévue dans l’accord-cadre 2001-2004, qui allait de pair avec l’introduction de georoute. Il n’y a rien de prévu pour 2005 en matière de prépension. Dans sa proposition d’accord pour la CCT 2005-2006, la direction veut accorder la prépension à 57 ans pour ceux qui ont 40 ans de service (dont 35 ans de distribution), ou à 58 ans pour ceux qui ont 35 ans de service (quel que soit le nombre d’années de distribution). La mesure d’exception, en vertu de laquelle certaines catégories du personnel pouvaient partir en prépension à 56 ans en 2004, n’est plus reprise.

  • La déléguée CSC Maria Vindevoghel licenciée

    Maria Vindevoghel est devenue célèbre en tant que militante syndicale lors de la faillite de la Sabéna. Après une période de chômage, elle a pu rentrer chez Flightcare, avec un moindre salaire et des conditions de travail plus mauvaises, évidemment. Flightcare est présente à Zaventem depuis 2001, mais ne dispose toujours pas d’un réglement de travail.

    Une militante syndicale

    Vindevoghel a été réélue dans le « Comité pour la prévention et la protection au travail » (CPPT), mais comme la direction ne reconnaît pas la délégation syndicale, les représentants syndicaux ne peuvent pas faire du travail syndical durant leurs heures de prestation. Les délégués étaient donc contraints de le faire après leurs heures de travail. Flightcare a licencié Maria Vindevoghel parce qu’elle se servait de son badge après les heures de travail pour défendre ses collègues ainsi que pour contrôler le respect des règles d’hygiène et de sécurité.

    Ce licenciement a dévoilé tous les abus dans l’entreprise. L’inspection sociale a déjà visité l’endroit. Il est clair pour tous que Flightcare se moque de toute réglementation du travail et ne craint pas de mettre des ‘délégués trop curieux’ à la porte. Les syndicats ont alors décidé de lier la revendication pour la réintégration de Vindevoghel avec la revendication pour de meilleures conditions de travail.

    Maria Vindevoghel est une de ces délégués licenciés pour cause de ‘prétextes urgents’. Même si par la suite le délégué gagne devant le tribunal – licenciement injuste et/ou procédure non respectée – le patron devra seulement payer une indemnité. Il n’existe pas de législation qui oblige la réintégration. Les patrons ne manquent souvent pas d’imposer des astreintes aux travailleurs en grève, mais faire respecter la législation du travail par les patrons, semble en dehors de leurs pouvoirs ou de leur volonté.

    Ensemble nous devons lutter: Pour une protection efficace des délégués! Pour une réintégration obligée des délégués qui sont licenciés injustement! Contre les réquêtes unilatérales et les astreintes qui menaçent le droit de grève !

  • Plan de relance à la FNAC : ici comme ailleurs, le patronat à l’attaque

    Confrontée à des difficultés financières en 2004, la direction de la FNAC a imposé cette année un « plan de relance » particulièrement dur pour les employés de la multinationale. Ce plan s’est vu fortement critiqué par une partie des travailleurs de l’entreprise et plus particulièrement par le dépôt central d’Evere qui a marqué son opposition par près de huit jours de grève. Le magasin de Liège étant en ligne de mire pour une fermeture, c’est sur ce site que la déléguée CNE (Centrale Nationale des Employés, CSC) Sevgi Akyol a eu le plus à faire pour lutter contre ce plan. L’Alternative Socialiste l’a rencontrée.

    Propos recueillis par Simon Hupkens

    Peux-tu présenter l’implantation de Liège en quelques mots?

    Sevgi Akyol : C’est une implantation qui employait 77 personnes, 74 depuis le plan de relance. La plupart des travailleurs sont syndiqués, majoritairement à la CNE. Il s’agit d’une « vieille » implantation donc avec pas mal d’employés qui sont en contrat à durée déterminée (CDD) et qui ont une assez longue carrière. Ce qui représente pour la direction un coût important et qui explique probablement la volonté pour l’employeur de s’en prendre au magasin de Liège pour faire des économies.

    Rappelle-nous en quoi consistait le plan de relance

    Sevgi Akyol : Initialement il comprenait la suppression de 25 équivalents temps pleins, l’introduction d’une nouvelle grille salariale nettement moins intéressante qui implique des salaires inférieurs de 10 à 15 %. En plus, l’introduction de la flexibilité et du salaire au mérite ce qui, en plus d’être une arnaque puisque ça concerne à peine 0,5% du salaire, met les collègues en concurrence. Cela va se ressentir dans l’ambiance de travail.

    Comment les travailleurs ont-ils accueilli ce plan?

    Sevgi Akyol : Il a été annoncé en mars. Nous savions que l’entreprise rencontrait des problèmes pour l’exercice 2004, mais pas à ce point là. Ca a été une surprise pour tout le monde. Il y a eu pas mal de colère surtout par rapport aux licenciements que nous avons tout de suite refusé en bloc. Nous voulons bien faire un effort si l’entreprise est en perte mais il ne faut pas nous demander n’importe quoi. La direction voulait tout : des licenciements, la flexibilité, 10% de rabotage des salaires, le blocage des traitements pendant 3 ans, l’augmentation du laps de temps pour changer de catégorie salariale…

    Certains employés en ont vraiment eu marre des méthodes de la direction. Ils sont préférés partir volontairement plutôt que de travailler dans pareilles conditions. C’est une perte pour l’entreprise en terme d’expertise et de professionnalisme parce que c’était des gens qui aimaient leur métier et qui avaient à cœur de bien le faire.

    Quelles a été la stratégie patronale?

    Sevgi Akyol : Durant tout le conflit, la direction s’est montrée vraiment intransigeante et arrogante. De bout en bout, elle a fait des difficultés pour négocier en usant de divers prétextes. Entre autre parce qu’il y avait une menace de grève, parce que les travailleurs ont fait grève ou parce que nous accordions un entretien à la presse. Le chantage à la fermeture était très dur et ils n’ont pas hésité non plus à utiliser les délégués comme boucs émissaires en nous rendant responsable de l’échec des négociations. Ils m’ont notamment imputé la responsabilité de l’éventuel fermeture du magasin de Liège. Cela a été jusqu’à instrumentaliser une collègue contre moi. Mais heureusement nous avons pu déjouer leur stratégie. Ce plan est la conséquence de facteurs conjoncturels, d’une concurrence agressive, mais aussi un manque d’anticipation et d’organisation de la direction. La mise en place d’un nouveau système informatique censé améliorer la situation n’a fait que l’empirer. Maintenant, c’est nous qui payons ces erreurs par des licenciements ou des départs « volontaires ».

    La direction a pourtant consulté le personnel sur ce plan de relance…

    Sevgi Akyol : C’est vrai mais la direction a joué la carte de la désinformation. La conciliation sociale a été demandée par la direction et paradoxalement le referendum a été suggère par le banc syndical! C’était, de l’avis des délégués syndicaux locaux, une mauvaise idée car la direction a pu influencé le scrutin par les menaces de fermetures! Les délégués ont seulement eu droit à un pavé de 157 pages de fouillis et à 3 réunions du conseil d’entreprise pour expliquer la situation aux travailleurs. Et surtout, il y avait un pression énorme sur les employés : le choix qui était devant nous à Liège, c’était « soit vous acceptez le plan, soit on ferme le magasin ». Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que la plupart des employés aient dit oui au plan (75% des votants). La direction a tout fait pour désavouer les représentants légitimement élus par les travailleurs en refusant de négocier avec eux . Le referendum est un mode de consultation démocratique, mais ici ça a été dévoyé par l’attitude autoritaire de la direction et l’atmosphère d’intimidation qu’elle a induit. D’autant que la direction comme le personnel encadrant s’est exprimé alors qu’ils n’était pas concernés par les mesures salariales du plan.

    Le personnel s’est-il montré combatif?

    Sevgi Akyol : A la fois combatif et résigné. Il y a eu peu de collègues du côté de la direction mais il y en a eu. Ceux-là feraient bien de se demander quel avenir ils laissent à leurs enfants en agissant de la sorte. Les restructurations comme celles qui ont eu lieu à la FNAC se multiplient un peu partout. Et les directions recourent de plus en plus à des méthodes de « terrorisme » au sein du personnel pour faire passer leurs plans. Que se passera-t-il si nous ne réagissons pas ?

    Et les directions syndicales?

    Sevgi Akyol : Elles ont été peu présentes dans les journaux ce qui a étonnés plus d’un travailleur au vu de l’acharnement médiatique de la direction. Sur le terrain, on a maintenu notre tradition de front commun. On n’a jamais fait de clientélisme syndical à la FNAC de Liège. Quelle que soit l’appartenance d’un travailleur, on l’a toujours défendu. Ca « irrite » parfois nos syndicats respectifs, mais ça nous donne une force face à la direction. Ils ne sont jamais parvenus à nous diviser entre organisations syndicales.

    Vous avez reçu le soutien de la clientèle?

    Sevgi Akyol : Oui, ils ont été formidables. Comme nous ne pouvions pas faire de piquet de grève à cause des menaces d’astreinte, les délégués des différents sites ont établis une stratégie en front commun pour contourner cette atteinte au droit de grève. Nous avons distribué un tract et fait signer une pétition aux clients pour leur faire connaître nos revendications. Beaucoup voulaient faire quelque chose pour nous. Ils comprenaient la situation.

    Tu peux expliquer en quoi consistaient ces astreintes?

    Sevgi Akyol : Nous avons décidé une action de grève pour contrer le plan et soutenir nos collègues d’Evere, même si nous savions que la direction ferait appel au tribunal des référés comme elle l’avait déjà fait en obtenant une astreinte de 5000€ par heure pour chaque gréviste présent au piquet du dépôt central. C’est pour cela que nous avons décidé cette action d’information à la clientèle. Cette décision du juge montre vraiment que la loi n’est pas faite pour les travailleurs, qu’elle est du côté des patrons et qu’il faut se poser la question du droit au travail et du droit de grève.

    Quelle est l’ambiance depuis que le plan de relance a été accepté?

    Sevgi Akyol : Dès la signature de la nouvelle convention, la direction a commencé à houspiller les employés, plus précisément au dépôt d’Evere. Et dans tous les sites, nous constatons une volonté de prendre les employés en faute pour pouvoir procéder à des licenciements secs et sans indemnités. Il y a eu encore des licenciements et notamment pour faute grave. Dans certains cas, nous avons constatés de la part de la direction des manquements dans le respect des conventions et du droit des travailleurs. Tous les prétextes sont bons. Récemment, un collègue a été menacé de licenciement parce qu’il ne pouvait pas changer son horaire. C’est pourtant contraire à une des clauses du contrat de travail qui stipule que c’est de commun accord que l’employé et le patron fixent les horaires. Nous sommes devant une période très dure où il va falloir se battre pour tout. Même pour qu’ils respectent la convention, ça ne va pas être facile.

    Cet exemple illustre bien la tendance actuelle du patronat, quel que soit le secteur d’activité, à réduire les acquis voire à les supprimer. Le seul rempart que nous avons par rapport à ces atteintes reste encore la solidarité entre collègue et, comme l’a montré l’exemple des délégations de la FNAC Belgique, le front commun syndical.

  • Quel avenir pour nos enfants? Pour un enseignement gratuit et de qualité!

    Quel avenir pour nos enfants?

    Le ministre de l’Enseignement pour la Flandre, Frank Vandenbroucke, a annoncé de nouvelles mesures d’austérité dans l’enseignement. Cela suscite l’indignation des enseignants noyés dans des classes surpeuplées et l’inquiétude des parents.

    Marijke Decamps

    L’organisation de l’enseignement n’est pas tombée du ciel. Dès que le mouvement ouvrier a commencé à s’organiser, il a formulé des revendications pour un enseignement gratuit et de bonne qualité. Quand les ouvrières ont commencé à s’organiser, elles ont systématiquement essayé d’envoyer leurs enfants sur les bancs de l’école plutôt qu’à l’usine. A l’époque les classes étaient nombreuses et la pédagogie s’appuyait fort sur l’apprentissage par cœur et sur la sélection.

    Les mouvements de révolte de la classe ouvrière ont provoqué beaucoup de changements au 20e siècle. Après Mai 68, un processus de démocratisation de l’enseignement s’est mis en route et de nouvelles méthodes pédagogiques ont été mises en place.

    Gratuit

    “Chaque année scolaire c’est la même chanson: il y a de nombreux frais supplémentaires et on ne sait jamais d’avance à combien cela va se chiffrer. Dans notre ménage, on peut payer. Mais dans beaucoup de familles cela devient de plus en plus difficile. Le comité des parents s’occupe de récolter de l’argent pour essayer d’aider financièrement l’école. Ceux qui n’ont pas l’argent pour acheter des lots de tombola ou pour participer à la fancy-fair sont regardés de travers et les enfants sentent aussi cette pression.” (Ann)

    De 1989 à 1999, les coûts pour l’école secondaire ont augmenté de 82%. Ceux de l’école primaire de 93%. Selon un appel de SOS Dettes à l’Ecole, il y a des écoles où 10% des parents ont un plan d’apurement pour payer les frais scolaires. De plus, les bourses scolaires sont devenues inaccessibles : on dépasse très vite le plafond pour y avoir droit.

    De qualité

    Souvent l’école est perçue par les jeunes comme un lieu où l’on est condamné à user ses fonds de culotte jusqu’à 18 ans en écoutant sagement et en apprenant par cœur. Il y a toujours une forte pression lors des tests pour obtenir le plus de points possible et ne pas être relégué derrière les autres. Notre enseignement est peut-être un des plus développés en Europe, mais il est aussi celui où beaucoup de jeunes quittent l’école sans diplôme.

    Depuis 20 ans, l’enseignement connaît des coupes budgétaires et chaque tour de vis budgétaire laisse des traces. Beaucoup de bâtiments scolaires sont délabrés. Il y a des restrictions sur l’encadrement et l’accompagnement des élèves: ceux qui ne peuvent pas suivre sont largués. L’enseignement est un lieu où les inégalités sociales se renforcent, au lieu de s’atténuer.

    L’enseignement socialiste

    Dans une société socialiste l’enseignement ne sera plus conçu comme aujourd’hui. Il donnera l’espace aux jeunes pour se développer complètement, apprendre ce qui les intéresse, et cela d’une façon que tout ce qui est appris découle de la pratique des travailleurs.

    Un exemple intéressant est celui de l’enseignement immédiatement après la Révolution russe. La gratuité de l’enseignement a tout de suite été instaurée. En 1918 les écoles ont été transformées en "écoles de travail unifié", où le travail productif était à la base du développement des jeunes. Les écoles étaient ouvertes sept jours sur sept pour que les jeunes puissent y apprendre les choses qui les intéressaient, et pas seulement pour suivre des cours.

    Les Bolcheviks ont essayé de proposer un programme complet, basé sur la vie et sur la production. En 1918, par exemple, Lénine recommandait que les cours d’électricité soient combinés à des visites de centrales électriques. La compagne de Lénine, Kroupskaya, encourageait les enseignants à prendre la vie quotidienne des travailleurs et des paysans locaux comme points de départ pour des projets pédagogiques. Ainsi tous les adultes deviennent des "enseignants".

    Lounatcharsky, Commissaire du Peuple à l’Enseignement, insistait pour que les écoles mettent au centre de leurs pré-occupation l’acquisition d’outils sociaux plutôt que l’apprentissage de recettes techniques. Lénine a défendu la nécessité d’un enseignement critique orienté sur le développement des individus indépendants et sur le développement de leurs capacités, aux antipodes du bourrage de crânes superflu et sans vie.

    En 1918 le libre accès à l’université, sans examen d’entrée ni de minerval, a été instauré. Les écoles étaient organisées par des conseils démocratiques où les jeunes avaient leur mot à dire sur les matières enseignées et sur la pédagogie. Les membres de ces conseils, élus par les élèves, les parents et le personnel étaient révocables de façon permanente.

    L’enseignement gratuit et de qualité n’existe pas dans notre pays. C’est le moins que l’on puisse dire. La lutte permettra d’améliorer la situation, mais ce n’est que dans le cadre d’une société socialiste, où les lois du marché seront abolies, que l’enseignement sera un véritable outil d’émancipation.

  • Un syndicat combatif et démocratique: c’est possible

    Au mois de juin, en Grande-Bretagne, le syndicat des services publics PCS (Public and Commercial Services Union) a tenu son congrès annuel à Brighton. Les congressistes, parmi lesquels de nombreux jeunes, ont beaucoup participé aux discussions. Cela ne reflète d’ailleurs pas la situation qui existe dans beaucoup d’autres syndicats.

    Sous l’impulsion de la direction de gauche, une campagne de recrutement a été menée. Des travailleurs du rang ont été sollicités pour s’impliquer dans l’activité syndicale. Des réunions ont été organisées sur les plan local, régional et national où les participants ont été impliqués dans l’élaboration du programme de revendications et d’actions. Résultat: en deux ans, plus de 30.000 nouveaux affiliés ! En 2004, la grève générale de 24 heures a été un succès sur toute la ligne. Ces résultats doivent être mis en évidence quand on sait que ce syndicat était connu auparavant pour son caractère conservateur. Pendant la même période, quasiment tous les autres syndicats britanniques ont perdu des affiliés.

    Aux élections pour la direction nationale, cette année, l’aile gauche est sortie renforcée des urnes. Pour la troisième fois une direction de gauche a été élue. Sur les 35 membres de la direction nationale, 7 sont membres de notre organisation, et notamment la présidente Janice Goodrich.

    Au congrès, l’aile gauche a proposé que les secrétaires et les permanents syndicaux ne perçoivent pas un salaire supérieur à celui des travailleurs qu’ils représentent. Cela n’a cependant pas été compris pas tous. Par conséquent, les élus de gauche appliquent cette règle provisoirement sur une base volontaire.

  • De quels syndicats avons-nous besoin? Pour des syndicats combatifs et démocratiques

    De quels syndicats avons-nous besoin?

    Les syndicats sont régulièrement pris sous le feu des employeurs : ils les trouvent trop radicaux. Beaucoup de militants se demandent si on parle bien des mêmes syndicats! Beaucoup de travailleurs se demandent en effet si les syndicats les défendent encore et si, à l’époque de la mondialisation, les syndicats peuvent agir efficacement. Nous tentons ici d’apporter une réponse.

    Un délégué FGTB

    Au cours des récentes années, un grand nombre d’emplois ont disparu suite aux fermetures et aux rationalisations: la faillite de la Sabena et le démarrage de SN Brussels Airlines avec beaucoup moins de personnel et avec de plus mauvaises conditions de travail, la fermeture de la phase à chaud chez Arcelor à Liège, les nombreuses pertes d’emplois à La Poste et à la SNCB, etc. Dans la plupart des cas les syndicats ont à peine réagi. Les actions menées par les travailleurs ont timidement été soutenues par les syndicats qui se sont surtout contentés de canaliser les actions et de se concerter avec les employeurs. Un telle politique syndicale ne peut mener les travailleurs qu’à la démoralisation et même à l’antisyndicalisme.

    Il y a pourtant une aspiration des travailleurs à passer à l’action pour se défendre. Il suffit de citer les nombreux débrayages spontanés à La Poste ou aux TEC, les grèves sectorielles pour le renouvellement des conventions collectives ou encore la manifestation de masse du 21/12/04 pour un meilleur accord interprofessionnel. Les mobilisations dans le non-marchand montrent que les travailleurs sont mobilisables quand le jeu en vaut la chandelle.

    Et pourtant, malgré les nombreuses actions dans les secteurs, le résultat des conventions collectives est souvent plus maigre que ce qui était initialement prévu dans le projet d’accord interprofessionnel! Cela n’est pas dû à un manque de combativité de la base, mais à la couardise des directions syndicales soucieuses de la “santé économique” des entreprises et dont le radicalisme s’exprime en paroles mais pas en actes. Par exemple contre la directive Bolkestein.

    Ce n’est que lorsque ça dépasse vraiment les bornes, comme par exemple avec l’affaire Picanol (où le manager avait empoché un solide magot), qu’ils osent encore élever la voix pour s’en prendre au “mauvais” capitalisme. Où est le temps où, à l’intérieur des syndicats, une aile gauche remettait en cause le capitalisme même? Dans les années 80, la FGTB a encore mené des actions de masse contre la politique des gouvernements Martens-Gol. Aujourd’hui le sommet de la FGTB est un allié du gouvernement Verhofstadt via ses alliés politiques privilégiés (PS et SP.a).

    Il faut bien constater au-jourd’hui que l’aile gauche dans les syndicats est fluette et que les directions syndicales tentent vite de faire taire les voix dissidentes. Le putsch contre Albert Faust, au sein du SETCa de Bruxelles Hal Vilvorde, mené par un quarteron de secrétaires ambitieux, ralliés temporairement au SETCa national, sous la supervision de Mia De Vits, en est l’exemple le plus frappant. Quelques années plus tôt, les délégués les plus en pointe des Forges de Clabecq, en pleine bataille pour la réouverture de leur usine, avaient été exclus de la FGTB sans avoir la possibilité de se faire entendre dans les structures. La direction de la FGTB voudrait – comme à la CSC – une direction fortement centralisée pour pouvoir plus facilement faire la chasse aux dissidents. Cela semble momentanément leur réussir. Mais cela peut changer. Comment?

    Le MRS et le MPDS

    Pendant la lutte des travailleurs des Forges de Clabecq s’est créé le Mouvement pour le Renouveau Syndical (MRS). Ce fut un pôle d’attraction – bien que limité – pour tous ceux qui voulaient refaire du syndicat un organe de lutte. Le fait que la liste Debout, aux élections européennes de 1999, ait récolté 5% des voix dans certains cantons électoraux ouvriers montre l’audience qu’avaient ceux de Clabecq. Le MRS s’est cependant progressivement éteint après la fin du procès des 13 travailleurs des Forges, faute de perspectives et de structuration.

    Après la liquidation d’Albert Faust et son lynchage médiatique, le Mouvement pour la Démocratie Syndicale (MPDS) a été impulsé par les militants de gauche du SETCa de Bruxelles Hal Vilvorde. Cette initiative a tout de suite suscité l’intérêt de militants syndicaux de gauche d’autres secteurs, mais le MPDS, malgré ses efforts pour s’adresser à la gauche syndicale au-delà du SETCa, n’a pas pu réellement s’élargir.

    Le MRS et le MPDS ont pu se développer à partir de l’activisme et le militantisme de syndicalistes de gauche dans une période de lutte. Les militants du MAS présents dans le MRS et dans le MPDS ont insisté sur la nécessité d’avoir une analyse correcte de la situation économique et politique. Etre radical ne suffit pas en soi. Cela doit être encadré.

    Quand la lutte perd de son élan, le militantisme faiblit. La tâche d’une direction est alors d’analyser la situation et de réorienter le cours afin d’éviter la démoralisation des travailleurs et d’étayer le rapport de forces pour de futures luttes. Lorsque les travailleurs de Splintex ont entamé leur lutte courageuse pour le maintien de l’emploi, une gauche syndicale aurait pu jouer un rôle important pour soutenir et élargir le mouvement. En l’absence d’une telle gauche syndicale, les directions syndicales avaient les mains libres pour laisser le conflit s’asphyxier progressivement.

    Comment faire pour avoir des syndicats combatifs?

    Les militants combatifs sont actuellement peu nombreux et dispersés. Aujourd’hui la mise sur pied d’une structure pour les réunir risque de n’être, tout au plus, qu’une réédition de l’expérience du MRS et du MPDS, dans de plus mauvaises conditions. La tâche des syndicalistes de gauche consiste avant tout à œuvrer, sur les lieux de travail mêmes, à rassembler et à former un noyau syndical combatif capable d’analyser la situation et prêt à agir pour mettre en mouvement la masse des travailleurs pour se défendre contre les attaques patronales. Cela implique d’accorder beaucoup d’attention à l’implication des militants et de développer un travail de conscientisation vers les jeunes travailleurs.

    Des contacts informels, au sein du secteur et sur le plan régional, peuvent permettre de tisser peu à peu un réseau de militants syndicaux de gauche. Quand ce réseau aura suffisamment de poids, on pourra songer à le structurer pour mener la bataille au sein des syndicats pour exiger plus de démocratie syndicale.

  • SETCa Bruxelles-Hal-Vilvorde: La bureaucratie veut reprendre les choses en mains

    Après l’élimination d’Albert Faust, beaucoup de militants de gauche qui protestaient contre cette façon de faire ont été progressivement écartés. La bureaucratie a voulu clore ce chapitre en organisant, en deux jours, un congrès de reprise en mains du syndicat. Une modification des statuts, donnant encore plus de pouvoir aux secrétaires, a été proposée au congrès.

    Un participant au congrès

    Lors de ce congrès chaotique, les cris et les noms d’oiseaux ont fusé. Les participants ont manifesté une hostilité ouverte envers l’appareil syndical, et malheureusement, aussi beaucoup de méfiance envers les militants des différents secteurs. Beaucoup d’intervenants ont réclamé plus de transparence et de démocratie syndicale. Finalement, la proposition de modification des statuts présentée par les secrétaires a été amendée : les candidatures à la présidence ne seront plus réservées aux secrétaires mais aussi ouvertes aux militants.

    Le deuxième jour du congrès, le 17 juin, il fallait élire le nouveau président. Il y a d’abord eu beaucoup de confusion sur la durée de son mandat : 1 an  (jusqu’au congrès statutaire de 2006) ou 4 ans ? Une grande majorité des délégués a voté pour une période de « stage » d’un an : c’est suffisamment long pour évaluer le nouveau président. Il fallait ensuite départager les deux candidats : Jean-Marie Frissen et Eric Van der Smissen. Comme l’a déclaré un congressiste « Autant choisir entre la peste et le choléra ! ». Frissen a obtenu 126 voix, Van der Smissen 105 et 19 congressistes se sont abstenus.

  • TEC. Une défaite, malgré la combativité de la base

    Les travailleurs des TEC ont mené, pendant plus de trois semaines, en mai dernier, un enchaînement de grèves à l’occasion du renouvellement de la convention collective. Ce fut à la fois un combat tenace, difficile et courageux car la direction de la SRWT (PS), le gouvernement wallon (et en particulier le ministre des Transports, le CDH André Antoine) et les médias se sont acharnés sur les travailleurs des TEC pour salir leur combat.

    Vincent Devaux

    SRWT, TEC et apparatchiks

    La Société Régionale Wallonne du Transport (SRWT) chapeaute les TEC (transports en commun) du Brabant wallon, de Charleroi, du Hainaut, de Liège/Verviers et de Namur/Luxembourg. En Flandre, il n’y a qu’une seule société (De Lijn) et les billets sont valables dans toute la Flandre. En Wallonie, un billet du TEC Charleroi ne peut être utilisé à Liège. La structure féodale chapeautée par la SRWT a été faite pour placer des directeurs grassement payés (et qui ont en poche la carte du PS). Un exemple? Jean-Claude Phlypo touche 300.000 euros/an comme administrateur général de la SRWT et 200.000 euros/an comme président d’Eurobus holding, une société privée qu’il a créée en 1996 en puisant 650.000 euros dans les caisses des TEC!

    Mensonges et provocations

    A l’annonce du dépôt d’un préavis de grève pour le 9 mai, la direction de la SRWT a déclaré de façon provocatrice que "les syndicats des TEC abusaient de leur position pour poser des revendications déraisonnables". Déraisonnable? Les syndicats demandaient 3% d’augmentation en deux ans. En avril, le conciliateur social avait proposé 6% (index compris), ce qui revenait à une augmentation de 1,1% en deux ans: une misère! La direction de la SRWT a ensuite déclaré dans la presse que les chauffeurs gagnaient entre 1.500 et 2.200 euros nets par mois. Un mensonge éhonté pour isoler les travailleurs des TEC de la population: un chauffeur avec 13 ans d’ancienneté gagne 1.200€ par mois en travaillant tous les jours et deux week-ends par mois!

    L’action se durcit

    Le 12 mai, les chauffeurs ont bloqué le siège de la SRWT avec une centaine de bus. Au cours des négociations menées sous la conduite d’un conciliateur social, la SRWT a proposé une augmentation de 0,15 euro l’heure (le front commun CGSP/CGSLB demandait 0,25€), une prime de 15% pour le travail du samedi (les syndicats demandaient 25%), 30% d’intéressement du personnel aux recettes (les syndicats demandaient 50%). Les médias ont continué de dénigrer les grévistes à tour de bras ("chaos", "climat pourri", "prise d’otage des voyageurs"…). Les conciliateurs, insultés par l’administrateur général de la SRWT ("Marchands de frites!") ont fini par démissionner. Trois grévistes qui avaient arrêté, de façon musclée, un bus d’une société de sous-traitance ont été licenciés.

    Les appareils syndicaux

    La presse a écrit que les dirigeants syndicaux "ne contrôlaient plus leur base"… comme si leur rôle était d’être les gendarmes de la base plutôt que de suivre l’avis des travailleurs qui les ont élus et qui les rétribuent grâce aux cotisations syndicales. Chacun à leur manière, les dirigeants syndicaux ont tenté de reprendre la situation en mains.

    La CCSP (CSC) a proposé une action "tarif zéro" (rouler sans faire payer les passagers). Nous avons déjà expliqué que cette forme d’action est peu efficace (les abonnés ont déjà payé) et peu mobilisatrice. La direction de la SRWT a immédiatement menacé de licencier pour faute grave tout chauffeur qui pratiquerait le "tarif zéro"!

    A la fin mai, les responsables de la CGSP (FGTB) ont commencé à dire "qu’on était condamné à s’entendre" : en fait ils ne voulaient pas se heurter au PS, à travers les responsables de la Région wallonne. La CGSP et la CGSLB ont fini par accepter une augmentation de 0,17 euro l’heure et une prime unique de 35 euros. Brut évidemment! Après une lutte aussi dure, le résultat est maigre! La CCSP, de son côté, n’a rien signé du tout car elle voulait un meilleur intéressement du personnel aux recettes.

    Les limites du conflit

    Ce n’est ni le courage ni la combativité qui ont manqué aux travailleurs des TEC pour remporter une victoire, mais la capacité de mettre sur pied, face à la bureaucratie syndicale qui voulait ménager les dirigeants de la Région wallonne, une direction de grève alternative (un comité de grève wallon démocratiquement élu dans les assemblées de dépôts) qui aurait coordonné les actions et négocié sans prendre de gants avec les responsables politiques.

  • FNAC. Une pilule amère pour les travailleurs

    Interview d’une déléguée SETCa, Irène Kaufer

    Présente en Belgique depuis 1981, la FNAC appartient aujourd’hui au groupe PPR (Pinault Printemps Redoute). En 2003, la filiale belge (Bruxelles, Anvers, Gand, Liège, Louvain, Wijnegem) a réalisé un bénéfice de 4 millions d’euros, entièrement distribué aux actionnaires. En 2004, elle était en perte. La direction a alors imposé un "plan de relance" qui va faire mal aux travailleurs. Nous avons rencontré Irène Kaufer, déléguée principale SETCa.

    Propos recueillis par Guy Van Sinoy

    En quoi consiste ce "plan de relance"?

    “Une suppression d’emplois (25 équivalents temps plein), une nouvelle grille salariale basée sur le mérite au lieu de la grille basée sur l’ancienneté, 5% de contrats à durée déterminée, 5% d’intérimaires, 25 jours par an où l’employeur peut imposer l’horaire de travail sans l’accord du travailleur. Ce n’est donc pas un véritable plan de relance de l’activité commerciale, handicapée par des déficiences en matière d’informatique et de logistique, mais un plan de restructuration pour faire supporter par les travailleurs (baisse de la masse salariale et plus de flexibilité) des erreurs de gestion.”

    Comment ont réagi les organisations syndicales et les travailleurs?

    “Le 15 avril, nous nous sommes rendus à Paris, en bus, en front commun syndical pour rencontrer la direction et mener une action de protestation en commun avec les collègues de la FNAC Champs-Elysées qui manifestent tous les samedis pour de meilleurs salaires. Le 21 avril, les travailleurs du dépôt d’Evere, directement visés par la restructuration ont cessé le travail et ont mis en place des piquets de grève. La direction de la FNAC a immédiatement réagi en faisant appel au tribunal, par une procédure en référé. Le juge a décidé d’infliger une astreinte de 5.000 euros par heure à chaque gréviste présent au piquet ! Dans ces conditions, la grève a continué mais sans piquets.”

    La grève s’est-elle étendue à d’autres sièges?

    “Oui, surtout au siège de Bruxelles. Le personnel du siège de Liège, directement visé par la restructuration a aussi participé aux actions. Cependant, la direction a mis comme préalable à toute discussion l’arrêt de toute action de grève. C’est ainsi que trois rencontres ont été annulées par la direction : la première parce que les travailleurs du dépôt continuaient la grève, la deuxième parce que lors d’une assemblée du personnel j’ai évoqué l’idée d’une grève, la troisième parce que j’en avais parlé dans la presse.”

    Comment a évolué le conflit?

    “La direction de la FNAC a demandé l’intervention d’un conciliateur social qui a proposé de soumettre le plan de relance à un référendum postal. Les secrétaires syndicaux ont accepté. Comme certains travailleurs avaient décidé entretemps de quitter volontairement l’entreprise, l’objectif de supprimer 25 équivalents temps plein était atteint sans licenciements. La direction a déclaré à la presse que si le NON l’emportait lors du réfé-rendum on fermerait des sièges en commençant par les moins rentables (en clair, par Liège).

    "Sur l’ensemble des 6 sièges, 75% de votants ont accepté le "plan de relance". La direction et les cadres ont voté, ce qui est anormal car ils ne sont pas concernés par les pertes de salaire. Les travailleurs en place peuvent choisir entre la nouvelle grille de salaires, au mérite, et l’ancienne, mais celle-ci est tellement remaniée qu’elle ne vaut guère mieux que la nouvelle. Pour certaines catégories de travailleurs, cela représentera en fin de carrière un manque à gagner d’environ 500 euros par mois!”

    Et pour l’avenir?

    “Rien n’est garanti. La convention signée prévoit que la direction "discutera de la possibilité d’ouvrir de nouveaux sièges", sans aucun engagement. Elle prévoit aussi de ne pas procéder à des licenciements économiques… si les objectifs de rentabilité des prochaines années sont atteints.”

  • Droit de grève attaqué. Halte aux requêtes unilatérales et aux astreintes!

    Dans plusieurs conflits sociaux récents (AGC-Splintex, AIS-Genk, Fnac,…) le patronat utilise l’appareil judiciaire contre des actions de grève. Dans chacun de ces cas, une requête unilatérale (plainte déposée par une des parties devant le tribunal sans droit de réplique pour l’autre partie) imposait des astreintes (amendes) aux travailleurs ayant empêché aux non-grevistes de rentrer dans l’usine. L’indignation face à ces attaques reste très grande parmi les syndicalistes, mais qu’est-il possible de faire contre ces requêtes?

    Geert Cool

    Premièrement, il faut noter que les requêtes unilatérales visent à obtenir des mesures urgentes (et " temporaires ") à partir du moment où il n’est pas possible de mener une procédure sur une base contradictoire (une procédure dans laquelle le patron et les syndicats sont impliqués). Le fait que l’on impose, avec ce genre de plainte, des mesures aux travailleurs qui ne connaissent pas la procédure et qui ne savent pas se défendre, n’est pas vu par la justice comme une violation des droits de la défence.

    L’imposition d’astreintes à un piquet de grève est monnaie courante, bien que ce soit une violation flagrante du droit de grève. Le Comité européen des Droits Sociaux a jugé il y a quelques années, dans un rapport sur la Belgique, que les piquets de grève pacifiques font partie intégrante du droit aux actions collectives, les astreintes contre les grévistes ne sont donc pas acceptables. Sans piquet, le droit de grève n’est qu’un vain mot.

    En 2002, une pétition pour ce droit a récolté 80.000 signatures. C’était l’une des raisons de "la paix des braves" (un accord non-contraignant) entre syndicats et patrons, dans lequel le patronat promettait en cas de grèves d’éviter le recours à la justice. Ce qui c’est révélé être un marché de dupes. Une proposition de loi visant à interdire les astreintes dans les conflits sociaux est "en attente" dans le parlement depuis le 26/06/2003.

    En d’autres termes, pour la défense du droit de grève, mieux vaut ne pas compter sur la justice, la bonne volonté du patronat ou le zèle de " nos " représentants politiques. Si nous soutenons bien évidemment toute démarche pour défendre le droit de grève, il n’en faudra pas moins construire un rapport de force qui dissuadera les patrons d’encore recourrir à de telles requêtes unilatérales.

    C’est la leçon centrale que l’on peut tirer des luttes passées pour le droit de grève lui-même. Cela non plus n’était pas une évidence juridique, n’était pas accepté dans le monde politique,… Ce n’est qu’en 1921 que – en termes prudents – le droit de grève a été légalement reconnu et jusqu’au-jourd’hui il n’y a pas de loi qui régit le droit de grève.

    Aujourd’hui, certaines formations politiques veulent revenir à cette situation. En avril, le VLD a fait une proposition de loi pour organiser en cas de grève un référendum parmi les travailleurs, pour que ceux qui n’en acceptent pas les résultats puissent plus facilement être licenciés. Cette proposition de loi n’a aucune chance de passer, mais elle démontre tout de même dans quelle direction le patronat veut aller.

    La raison pour laquelle il n’y a presque pas de législation autour du droit de grève, c’est parce qu’un conflit social dépend des rapports de force de la base : la volonté d’action et le degré d’organisation des travailleurs contre le patronat. Le droit de grève a été imposé en le pratiquant et en l’opposant avec force à chaque attaque du patronat.

    Il y a une grande détermination à protester contre les atteintes au droit de grève via les requêtes unilatérales. Mais ces protestations ne doivent pas rester isolées entreprise par entreprise dans une seule entreprise. En 2002 la colère était canalisée par une pétition sur le droit de grève qui a mené à "la paix des braves", avec laquelle aucune avancée n’a été obtenue. Il faut une campagne large dans tous les secteurs pour répliquer à toute requête unilatérale contre une grève par un élargissement de celle-ci et une mobilisation interprofessionelle.

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