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  • Manifestation de solidarité avec le peuple Grec : Communiqué de presse

    AvecLesGrecs_affichesPlus de 50 organisations* appellent à manifester ce dimanche 21 juin contre l’austérité et en soutien au peuple grec. Le rassemblement est prévu à 13h30 à la Gare Centrale de Bruxelles. Des concerts de soutien et une exposition attendront les manifestant dès 15h30 sur la Place de l’Albertine. Cette activité s’inscrit dans le cadre d’une semaine européenne d’action en solidarité avec le peuple grec.

    Communiqué de presse de la plateforme “Avec les Grecs”

    La Grèce est la preuve concrète que les politiques d’austérité et de précarisation ne fonctionnent pas. Six années de coupes budgétaires sans précédent, de désinvestissement dans le secteur public et de politique salariale régressive ont conduit le pays au chaos. L’économie a reculé de 25% par rapport à 2010, la pauvreté a explosé, le taux de chômage est désormais de 26%, un jeune sur deux se retrouve sans travail, les services publics et le système de santé ont été démantelés… Partout, il est donc nécessaire de donner la priorité à l’emploi, au redéploiement économique, via l’investissement public et des politiques de redistribution.

    C’est pour réaliser ces tâches que les électeurs grecs ont élu un nouveau gouvernement. Face à l’UE qui refuse de respecter ce choix démocratique, nous devons exprimer notre soutien sans faille au peuple de Grèce et exprimer notre opposition à ceux qui cherchent à lui imposer les mêmes recettes néolibérales : toujours plus d’austérité, toujours plus de chômage, toujours plus d’inégalités. La Grèce ne sortira du piège de l’endettement continu qu’en empruntant une voie qui, notamment, combattra la corruption et les injustices inacceptables du système fiscal.

    La Grèce a le droit de rétablir les conventions collectives et le Code du travail démantelés par la Troïka ; la Grèce a le droit de prendre des mesures sociales d’urgence pour combattre la pauvreté et d’arrêter les privatisations ; la Grèce a le droit, comme tous les autres peuples d’Europe, de faire un audit de sa dette publique et d’exiger l’annulation des dettes illégitimes.

    A quelques jours du sommet du Conseil européen du 25 et 26 juin nous serons nombreux à montrer notre soutien au peuple grec et à exiger une autre Europe, démocratique et de justice sociale.

    Contact
    FR, EN : Sebastian Franco, +32 488 15 02 16
    NL, EN : Herman Michiel, +32 470 08 60 55

    Plus d’informations
    Evénement facebook
    Semaine européenne d’action : www.change4all.eu

    #stop austerity #change4all #changenow #20JBrussels #20J(and your city)

    International activities
    27th of June : Political event and European social movements meeting in Athens
    17th : Frankfurt, Greece
    20th : Rome, Berlin, Lille, London, Paris, Munich
    21th : Brussels, Amsterdam, Vienna
    23th : London
    25th : Oslo
    27th : Madrid

    *Signataires

    Réseaux

    Alter Summit Belgium, ACIDe, Acteurs des temps présents, D19 20, HART BOVEN HARD, Tout Autre Chose

    Syndicats

    FGTB Fédérale, La Centrale Générale FGTB/ De Algemene Centrale ABVV, ACOD-vrt, CGSP Wallonne, CSC Bruxelles Hal Vilvorde – Priorité aux travailleurs, Mouvement Ouvrier Chrétien, JOC Bruxelles, Métallos MWB-FGTB , Solidaris – Mutualité Socialiste, Cne-Gnc / Centrale nationale des employés

    Associations

    Attac Wallonie-Bruxelles, Attac Vlaanderen, Ander Europa, CADTM Belgique, Intal Globalize Solidarity, Femmes Prévoyantes Socialistes, Fewla, Vrede vzw, ZIN TV , Initiative de Solidarité avec la Grèce qui resiste – Bruxelles , CNAPD asbl, Global Social Justice, Vie Féminine Bruxelles, Allileggya Koinotita, Corporate Europe Observatory, la Plate-forme d’action Santé et Solidarité/Actieplatform Gezondheid en Solidariteit et le Centre Bruxellois de Promotion de la Santé (CBPS), Appel pour une école démocratique (Aped), Europe4People,

    Partis

    SYRIZA Belgique,PTB/PVDA,Ecolo, PSL/LSP, ROOD!, Mouvement VEGA, Comunisti Belgio (Federazione Comunista del Belgio), Parti Humaniste (Belgique), LCR / SAP, Ligue Communiste des Travailleurs – Communistische Werkersbond, Parti Communiste, Vonk/Révolution, LEEF Herzele, Antarsya Belgique, Bloco d’Esquerda, Die Linke. BO Brüssel ,SEL Belgio , Izquierda Unida – Belgica, écolo j, Comac, Étudiants de Gauche Actifs – EGA, ,…

  • Tax shift : ne nous laissons pas à nouveau tondre la laine sur le dos !

    ls202Selon les mots des ministres de l’Emploi Kris Peeters (CD&V) et des Finances Jan Van Overtveldt (N-VA), la période estivale, débarrassée de contrôles et d’ajustements budgétaires, correspond au moment idéal pour conclure un ‘‘Tax Shift’’. Cette grande réforme fiscale, dont l’importance devrait atteindre 5 à 10 milliards d’euros, prétend avoir pour objectif de ‘‘rééquilibrer’’ le poids de la fiscalité que chacun doit supporter afin de stimuler l’emploi et le pouvoir d’achat. Qu’en est-il réellement ?

    Par Baptiste (Nivelles)

    Lors du plan d’action contre le gouvernement fin 2014, une énorme colère s’était exprimée contre les politiques d’austérité brutales du gouvernement Michel. Ces dernières visent à toujours faire payer à la majorité de la population pour mieux assurer les profits du 1% le plus riche. Michel & Co avaient alors agité le Tax Shift pour prétendre qu’il existait également un contenu social dans le projet du gouvernement et que l’effort serait équitablement réparti entre les différentes classes sociales.

    Pourtant ce gouvernement est bien incapable de s’en cacher : c’est celui rêvé par les riches. Les attaques contre nos conquêtes sociales ont été lancées tous azimuts dès sa formation. Au vu des déclarations provocantes des différents ministres dans la presse, que ce soit sur l’emploi, les services publics ou encore l’immigration, ce gouvernement de droite ne s’arrêtera pas tant que la route ne lui sera pas barrée. Si cela ne tient qu’à eux, aucun doute ne persiste que la réforme fiscale annoncée ira dans le sens de servir les riches au détriment des autres.

    D’ailleurs, tout le camp patronal est en train de se positionner sur le sujet depuis plusieurs semaines. Les fédérations patronales Agoria et FEB veulent que la réforme serve à améliorer la sacro-sainte compétitivité des entreprises en ‘‘allégeant les charges sociales’’. Ce ‘‘cout du travail’’, comme il est souvent présenté, n’est autre que notre salaire indirect, le ciment, la condition sine qua none à l’existence de notre sécurité sociale. Réduire en substance ces cotisations reviendrait à poursuivre encore un peu plus le démantèlement d’une de nos conquêtes! Sur ce terrain, les fédérations patronales ont à nouveau reçu l’aide idéologique de leurs institutions; Commission européenne en tête, elles ne cessent de rappeler à quel point ces charges salariales représentent un cout trop élevé, au point d’être un handicap pour l’économie. Quel cynisme alors que le fossé entre les plus pauvres et les plus riches ne cesse de se creuser !

    Ne soyons pas dupes, nous n’avons aucune confiance à avoir en ce gouvernement, y compris en ses composantes soi-disant plus sociales comme cherche à se profiler le CD&V. N’importe quelle mesure présentée comme favorable aux travailleurs – telle que diminuer les impôts sur les salaires – est systématiquement détournée en une attaque antisociale. Le gouvernement l’a une fois de plus démontré, par l’entremise du thatchérien Van Overtveldt. Débarrassé de la pression du plan d’action syndicale, il a alors déclaré exclure toute augmentation de taxes sur les revenus du capital pour compenser une diminution de la fiscalité sur le travail. À partir de là, l’enjeu de la réforme fiscale ne peut constituer qu’à reprendre d’un côté aux travailleurs ce qui leur aura été rendu d’un autre, le tout en donnant un coup de canif aux mécanismes de solidarité d’une sécurité sociale pourtant déjà insuffisante.

    Augmentation de la TVA, taxes ‘‘écologiques’’ (augmentation des accises sur le diesel, taxe kilométrique pour les voitures,…) : les formes de taxation socialement les plus injustes sont envisagées pour mieux préserver les grandes fortunes, les plus-values boursières, l’évasion fiscale et les cadeaux fiscaux dont jouissent le grand patronat et les nantis. Au mieux, une taxation symbolique sera imposée à certains revenus du capital pour vendre une réforme soi-disant équilibrée, alors qu’en réalité s’agira qu’un nouveau transfert de richesses des poches des travailleurs vers celles des capitalistes.

    La raison d’être de ce gouvernement constitue à casser tout ce qui peut l’être parmi les conquêtes du mouvement des travailleurs. Tant que ce gouvernement tiendra debout, de nouveaux objectifs asociaux seront énoncés. Pour que cela cesse, une seule solution : nous devons repartir à l’offensive avec un plan d’action bien élaboré et construit comme fin 2014 avec pour objectif d’anéantir ces plans néolibéraux. Se contenter d’une accalmie de ce gouvernement est illusoire. En dernière instance, nous devons nous battre pour faire chuter ce gouvernement et lutter pour une alternative politique au délabrement capitaliste et à sa brochette de politiciens !

  • Liège : Visite de solidarité auprès des grévistes de Bpost

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    La poursuite du processus de privatisation des «Sociétés Anonymes de Droit Public» Proximus (anciennement Belgacom) et Bpost, dans lesquelles l’Etat dispose encore de la majorité des actions, représente une grande menace tant pour les travailleurs que pour les usagers. Le conseil des ministres a approuvé vendredi dernier l’avant projet de loi qui vise à faire passer la participation de l’Etat dans ces deux entreprises sous la barre fatidique des 50%.

    Il est jusqu’ici impossible au Gouvernement de se séparer de sa participation dans certaines entreprises. Mais la vente pourrait s’avérer juteuse… à court terme! Par contre, pour les acteurs privés, ce serait le jackpot. En cas de vente totale, l’Etat pourrait toucher un peu moins de 6 milliards d’euros dans le cas des actions de Proximus et environ 2,6 milliards pour celles de Bpost. Pour la CGSP, l’Etat belge donnerait ainsi au privé «les instruments qui régulent actuellement les deux plus importants marchés des communications.» L’emploi serait également menacé en cas de privatisation : «Au final, personne ne sort gagnant d’une telle stratégie. L’Etat belge perd ses dividendes annuels au profit d’un ‘one shot’; le citoyen risque de payer plus pour des services de moindres qualités et le personnel se retrouve dans une situation professionnelle incertaine.»

    bpost_02En région liégeoise, une grève a été lancée par la CGSP dès mercredi dernier afin de protester contre la possible privatisation de l’entreprise. L’action est menée par la CGSP, mais la CSC a décidé de couvrir ses affiliés désireux de rejoindre le mouvement. Nous reviendrons sous peu sur ce site sur les discussions que nous avons pu avoir en rendant visite à un piquet tôt ce matin.

    La menace de poursuite de la privatisation des entreprises publiques ne fait qu’illustre, s’il le fallait encore, que ce gouvernement de droite dure veut poursuivre son assaut antisocial. Il faut absolument tirer les leçons du mouvement anti-austérité de l’automne dernier ainsi que des hésitations qui ont prévalu depuis lors dans les sommets syndicaux (voir notre dossier à ce sujet) : nous avons su mener une lutte tous ensemble – privé et public, par-delà les frontières linguistiques et les couleurs syndicales – qui a fait vaciller le gouvernement, grâce à un plan d’action sérieux, allant crescendo, avec une grève générale bien préparée et annoncée suffisamment longtemps à l’avance. Poursuivons la lutte avec un nouveau plan d’action, plus massif et plus dur, jusqu’à la chute de ce gouvernement des riches!

    Avec des amis comme ça…

    Lorsque la question est arrivée à la Chambre jeudi dernier, la veille de l’approbation de l’avant-projet de loi par le Conseil des Ministres, Alexander De Croo a été interrogé par les députés. Il a notamment déclaré «Je suis quand même un peu étonné par la critique de la ‘gauche conservative’. Votre glorification de l’Etat est quand même un peu émouvante. Je vais paraphraser quelqu’un qui a dit ‘Je n’ai pas de blocage idéologique à ce sujet, je ne braque pas sur le maintien des 51%’ Qui a dit cela ?, c’était Paul Magnette le 12 janvier 2013. Chers amis du PS, je suis tout à fait d’accord avec monsieur Magnette.» L’opposition du PS est, il est vrai, profondément hypocrite!

    Derrière la privatisation des entreprises publiques, on a souvent trouvé le PS… C’est notamment à Elio Di Rupo que l’on doit le principe des «consolidations stratégiques» et autres «entreprises publiques de droit privé» qui ont ouvert la voie à la privatisation! Quand il fut ministre en charge des entreprises publiques, il signa en 1999 l’arrêté ouvrant à la concurrence le secteur du courrier de plus de 350 grammes. SNI (Distrigaz), Belgacom, Sabena, SNCI et INCA (banques), Crédit Communal, CGER, BIAC,… Le PS a participé avec enthousiasme au gigantesque transfert des richesses de la collectivité vers le privé, au mépris des intérêts des travailleurs et des usagers.

    Il nous faut lutter, oui, c’est vrai. Avec vigueur, en prenant base sur la manière dont l’élan vers la grève générale nationale du 15 décembre dernier avait été construit. Mais il est également grand temps de sérieusement réfléchir à la construction d’une alternative politique issue du monde du travail, capable de regrouper toutes les forces et les individus à la gauche du PS et d’Ecolo désireux de lutter ensemble contre la logique austéritaire au sein d’un instrument de lutte large et ouvert à tous, dans le respect des spécificités de chacun.

  • Rojava à la recherche d’une alternative. Rapport d’une visite de solidarité

    Délégation de solidarité. A l'avant, sur la gauche : Orhan. Photo: solidariteitsdelegatie

    Mi-mars, une délégation belge du comité de solidarité avec Kobanê s’est rendue à Rojava (Kurdistan syrien). Ils sont allés voir par eux-mêmes ce qu’il s’y passe et nous en font rapport. Nous avons rencontré Orhan Kilic, l’un des membres de la délégation.

    Cette interview a été réalisée pour l’édition de mai de Lutte Socialiste

    Quel était le but de votre voyage à Rojava et que veut faire le comité de soutien en Belgique ?

    Depuis la grande attaque sur Kobanê (mi-septembre 2014), les Kurdes ont protesté massivement pendant des semaines, non seulement dans cette région mais ici chez nous aussi, en Europe et en Belgique. Kobanê a alors attiré l’attention du monde entier. L’opposition des Kurdes mais plus important encore leur projet politique pour l’autonomie et une société pluraliste et démocratique ont été depuis lors, plus largement débattus. A ce moment-là, une campagne d’aide humanitaire a été lancée et largement diffusée par les Kurdes eux-mêmes avec quelques acteurs de terrain belges. Nous essayons d’ancrer cette bonne volonté politique et humanitaire via le comité de solidarité. Cette collaboration va sans aucun doute mieux canaliser la campagne d’aide et l’élargir. Mais sur le plan politique aussi, ce comité veut soutenir et aider à défendre les acquis des Kurdes de Syrie. Nous voulons lancer un mouvement de solidarité entre la Belgique et Rojava. La meilleure manière de débuter était d’organiser cette délégation. Des gens qui voient les choses de leurs propres yeux et qui le transmettent a d’autant plus d’effet. Nous sommes partis à 6, tous des activistes politiques faisant partie de différentes organisations ou courants politiques en Belgique. Ce pluralisme est aussi très clairement présent dans le comité de solidarité même. Je trouve cela très important. La délégation a tenu un blog avec des contributions très intéressantes : www.rojavaproject.net.

    Quelle est la situation actuelle dans la région ?

    Les Kurdes syriens ont le vent en poupe. C’est très clair quand on parle avec des gens de la région. Malgré le grand danger d’un fascisme islamique d’ampleur inconnue, les Kurdes sont incroyablement positifs et pleins d’espoir face à l’avenir. Malgré l’expérience négative de Kobanê (qui a été reprise après 4 mois de lutte héroïque), les gens croient au projet politique d’ ” Autonomie démocratique” et de “Confédéralisme démocratique”. Il se passe quelque chose de concret et de palpable et cela pousse à y contribuer. Ce n’est pas un hasard si le TEV-DEM (le mouvement populaire kurde syrien autour du PYD) bénéficie d’un énorme soutien parmi la population. Un soutien qui dépasse d’ailleurs les clivages ethniques et religieux. Rien que ça, c’est un énorme pas en avant que nous devons soutenir et défendre. Généralement, en Occident, le Moyen-Orient est associé au fondamentalisme et aux guerres civiles sectaires. Mais Rojava est déterminée à être une alternative à cela. Ils ont déjà le soutien de beaucoup d’autres minorités et tribus arabes. Les Kurdes sont très ambitieux et disent que leur projet politique est une issue à l’impasse et à la guerre civile qui est entrée dans sa cinquième année. L’attitude de l’occident à l’égard d’Assad et de la Syrie est devenue beaucoup plus indulgente. On a pris conscience du fait qu’il faut négocier pour résoudre le conflit. Cela offre aussi aux Kurdes des possibilités de réaliser leurs acquis et d’ainsi poser la base pour une république syrienne pluraliste et démocratique. Mais nous voyons surtout que l’Occident ignore complètement Rojava et n’a pas l’intention de reconnaître ou soutenir l’administration autonome de facto. Malgré le soutien (hésitant) sous forme de bombardements de l’EI, l’occident joue tout de même un rôle néfaste.

    Vous avez été arrêtés par le gouvernement régional kurde (irakien)? Que s’est-il passé ?

    Effectivement. Nous voulions entrer à Rojava via le Kurdistan (irakien) parce que les frontières côté turc étaient soit fermées soit uniquement accessibles aux personnes de nationalité syrienne. Comme nous ne pouvions pas compter sur la bonne volonté de la Turquie, nous pensions que nous pourrions traverser sans problème à partir du Kurdistan (irakien). Ce que nous avons vu là est proprement scandaleux. Malgré le fait que les Kurdes irakiens ont énormément de sympathie pour ce qui se passe à Rojava et qu’il y a ouvertement du soutien pour le PYD et le YPG ainsi que pour les forces de combat YPJ, nous avons vu que le régime KDP du clan de Barzani a, tout comme la Turquie, instauré une forme d’embargo sur Rojava. Les voies d’accès sont strictement contrôlées et le passage est rendu impossible aux membres du PYD et ses sympathisants. Des fonctionnaires du PYD se plaignaient même de ne pas pouvoir passer de l’aide humanitaire d’une partie du Kurdistan à une autre. La raison à tout cela est que le KDP ne soutient pas les avancées du PYD à Rojava parce que cela constitue une menace pour eux. Le KDP représente le féodalisme et le capitalisme dans la région. La démocratie, le pluralisme, l’anti-capitalisme et le mouvement de femmes de Rojava a un grand effet de contagion. Les Kurdes de ce côté de la frontière n’en sont pas immunisés. On voit déjà la minorité Yazid exiger ses droits démocratiques et l’auto-gestion face aux dirigeants autoritaires du KPD. L’inégalité et les problèmes sociaux augmentent au Kurdistan irakien et ce, tandis que tout près, un autre parti kurde est en train de construire une alternative viable. Il est clair qu’un cordon sanitaire est placé autour du PYD et de Rojava et nous en avons malheureusement été les victimes. Nous sommes donc restés au Kurdistan irakien mais ce que nous avons fait là a largement dépassé nos espérances. Nous y avons suivi de près le travail envers les réfugiés. Notre visite dans les montagnes Kandil (un bastion des rebelles kurdes de Turquie en Irak, NDLR) pour la célébration de Newroz (fête traditionnelle des peuples iraniens et turcs consacrée au nouveau calendrier persan, NDLR) et nos reportages avec des dirigeants du KCK (le grand mouvement populaire autour du PKK) est aussi de très grande valeur.

    L’exemple des comités auto-gérés de Rojava est un développement intéressant. Quel est leur stade d’avancement ? Sont-ils des lieux de débat et d’action où d’autres tendances de gauche et révolutionnaires peuvent être actives ? Quelle est l’implication de larges couches de la population ?

    Il y a là un système avec des comités auto-gérés et démocratiques qui règlent presque tous les aspects de la vie publique et ce, sans la présence de l’état syrien. Ces comités sont aussi présents à tous les niveaux, des conseils de quartiers et de villages à l’administration des cantons de Rojava. Il y a là un système échelonné du bas vers le haut. A la base, il y a les nombreux conseils populaires (meclis) qui nomment les organes d’administration des communes locales aux cantons. Il y règne une culture de démocratie de base et de participation. Chacun peut assister aux conseils populaires et participer aux décisions. Il est également question d’autonomie interne. Chaque meclis est une autorité en soi et peut fonctionner de manière autonome. Il y a aussi des communes et coopératives qui essaient de régler la vie économique. Tout ceci signifie explicitement qu’il doit y avoir une large participation d’en bas. Et elle existe. Ce système se maintient depuis déjà presque 3 ans dans les circonstances les plus défavorables et les attaques militaires les plus brutales et sans aide extérieure notable. Ils ne comptent que sur eux-mêmes, les personnes, paysans et jeunes. C’est justement ce qui inspire tant de gens bien au-delà des frontières de Rojava et attire la sympathie. Il y a tant à raconter sur Rojava, chaque aspect en soi mérite un article. L’auto-défense volontaire et militaire, la présence proéminente des femmes à chaque niveau d’administration, le système obligatoire de co-présidence pour chaque mandat public, la sorte de pluralisme qui non seulement permet à toutes les cultures et ethnies de coexister mais favorise aussi l’auto-organisation et l’autonomie… Je n’ai pas l’espace pour m’étendre sur tout cela dans le cadre de cet article. Mais si je dois quand même donner une ébauche, nous devons alors nous intéresser à l’idéologie d’Abdullah Öcalan et du PKK. Car tout vient de là. Les idées de démocratie de base radicale, l’implication des femmes, l’anticapitalisme…

    Quelles sont les perspectives de développement ultérieur ?

    Il faut faire attention à ne pas tomber dans le piège de l’idéalisme. Essayer de présenter Rojava comme un paradis sur terre, une utopie, lui causerait énormément de tort. C’est ce que les fonctionnaires du PYD disent aussi, littéralement. Ils craignent que Rojava ne soit présentée de manière trop idéaliste et romantique dans certains milieux en Occident. Mais cela ne sert pas leur cause. Nous devons garder les pieds sur terre et voir les immenses problèmes. Chacun de ces problèmes requiert une solution. C’est ce qui est ressorti de nos discussions à Kandil et de l’interview que nous avons faite avec le co-bourgmestre de Kobanê. Rojava est très inspirant et enthousiasmant mais il y a aussi d’immenses problèmes socio-économiques. Tous les moyens, si faibles soient-ils, vont à la guerre (ce qui est bien compréhensible et inévitable). Ils se trouvent sur un territoire très hostile, avec toutes sortes d’organisations terroristes sanguinaires et des régimes locaux répressifs qui essaient d’étouffer le printemps kurde dans l’œuf. Dans ces circonstances, le progrès et la révolution sociale risquent de reculer. C’est le grand danger qui menace le modèle de Rojava de l’intérieur. Rojava n’a pas d’industrie, pas d’usines. Uniquement de petits ateliers (qui sont pour l’instant réquisitionnés pour les besoins de la guerre). L’agriculture et l’élevage sont leur source principale de revenus mais cela ne suffit pas en soi. Ils ont aussi du pétrole mais pour l’instant, cela ne leur sert pas parce qu’ils ne peuvent pas le raffiner à grande échelle ou l’exporter. L’embargo de fait des régimes avoisinants empêche le développement économique. La seule chose qui soit florissante, c’est le marché noir. Il est aussi dirigé publiquement via les comités mais ce n’est pas une excuse. Cela ne constitue pas une base saine de développement.

    Que doit-il se passer ?

    Tout d’abord, il y a chez eux une forte conscience qu’ils doivent faire cela eux-mêmes. Ils avancent peut-être à petits pas mais cette auto-organisation et cet “auto-sauvetage” sont un fondement solide pour l’avenir. Lors d’une discussion sur les problèmes sociaux, le co-président du PYD, Salih Muslim a déclaré qu’eux, en tant que parti, peuvent seulement aider les gens à s’organiser mais que finalement, c’est le peuple lui-même qui doit décider de ce qui doit se passer. C’est cette culture démocratique et l’invitation à une large participation qui tient Rojava debout depuis 3 ans déjà. L’auto-défense à laquelle il était difficile de croire au début et les grands succès militaires contre l’EI inspirent aussi, ce qui consolide la base de pouvoir de l’auto-administration autonome. C’est dans cet élan que des personnes rejoignent volontairement le modèle de Rojava pour le faire vivre. Cela continuera ainsi encore un temps. Il y a aussi beaucoup de support matériel et humain de la part des Kurdes du Kurdistan turc. Même si le contexte turc constitue un frein important, nous voyons qu’ils amènent vraiment beaucoup de biens et de machines derrière la frontière quitte à devoir s’opposer à la police anti-émeutes turque et à l’armée. Comme nous l’avons vu pendant le siège de Kobanê de septembre à janvier.

    La solidarité internationale est aussi absolument nécessaire. La solidarité entre les peuples. Nous devons certainement demander à ce que les pays (occidentaux), l’UE et l’ONU reconnaissent et soutiennent l’administration autonome. Mais cela ne suffit pas en soi. Si nous voulons que le modèle de Rojava subsiste et continue à se développer, il faut que nous le soutenions maintenant. De la même façon qu’avec une certaine conscience, nous sommes, par exemple, solidaires des peuples grec et portugais et que nous voulons renforcer leur combat politique contre la tyrannie moderne de l’UE, nous devons aussi prendre notre responsabilité par rapport à Rojava. Le socialisme n’est pas affaire de considérer et de constater qu’il est là ou pas mais doit être construit. Cela demande une attention constante. De toutes les sociétés du Moyen-Orient, celle de Rojava est la plus ouverte et la plus combative pour le moment. Des idées socialistes et radical-démocratiques sont en pleine expérimentation et nous devons être là pour les expérimenter aussi.

    • Page Facebook du comité de solidarité
    • Website de la délégation
  • L’alternative du socialisme contre des années d’austérité

    PremierMAI_generiqueComme toutes les personnes âgées de la quarantaine, j’ai grandi à un moment où il se disait que la Belgique disposait du meilleur système de sécurité sociale au monde. Des soins de santé accessibles et de haute qualité, l’indexation automatique des salaires, des conventions interprofessionnelles qui permettaient aux secteurs les plus forts de faire progresser les secteurs plus faibles, des allocations de chômage illimitées dans le temps, un complément du salaire de temps partiel grâce à une allocation de chômage à temps partiel, le soutien aux étudiants démunis par un système de bourses d’étude leur ouvrant l’accès aux études supérieures,… Même s’il était quelque peu exagéré d’affirmer qu’il était ‘‘le meilleur au monde’’, il faut toute de même bien se demander ce qui nous en reste aujourd’hui.

    Par Anja Deschoemacker

    Rien de tout cela n’a jamais été offert en cadeau. L’instauration du système de sécurité sociale après la Seconde Guerre mondiale fut le résultat de la pression causée par la lutte parfois tumultueuse qui a abouti à de véritables confrontations (la Question Royale en 1950, la grande grève de l’hiver 60-61) et par l’action syndicale continuelle qui a, entre autres, forcé les patrons à relever le montant de leurs contributions ‘‘patronales’’ à la sécurité sociale et à payer des salaires décents. Vu la situation de quasi plein emploi, les patrons ne pouvaient alors guère faire autrement que de satisfaire (partiellement) les revendications des travailleurs. Leurs profits continuaient à s’accroître grâce à la hausse de la productivité. Là non plus, nous n’avons rien reçu gratuitement.

    À partir de la fin des années ‘70, nous sommes cependant entrés dans une période où la sécurité sociale, les services publics, les conditions de travail, etc. ont commencé à être attaqués. Année après année, gouvernement après gouvernement, nos conquêtes sociales se sont vues rabotées.

    Aujourd’hui, pour bénéficier de soins de santé, les patients payent en Belgique beaucoup plus de leur propre poche que dans les pays voisins. De plus en plus de gens préfèrent reporter à plus tard une visite chez le médecin. Le principe de l’indexation des salaires et des allocations a été miné, notamment par l’introduction de ‘‘l’index santé’’ (qui a retiré du panier fixant la hausse des prix des biens tels que le tabac, l’alcool, l’essence et le diesel). Les négociations salariales nationales ont été tellement remodelées que les secteurs plus puissants sont maintenant aspirés vers le bas par les secteurs plus faibles. L’allocation de chômage ne permet de vivre que difficilement, les chômeurs cohabitants ont pour ainsi dire perdu tous leurs droits, y compris le droit à une allocation chômage à temps partiel pour ceux qui trouvent un emploi temporaire. Dans l’enseignement, les frais pris en charge par les parents ne font qu’augmenter, tandis qu’on ne voit plus le moindre investissement dans l’infrastructure ou dans le personnel.

    Mais pour les patrons et les politiciens qui servent les intérêts de ces derniers, ce n’est jamais assez. Aujourd’hui, la N-VA est à l’avant-garde de l’élaboration d’un programme d’appauvrissement massif au profit de l’enrichissement d’une petite minorité. Avec ces politiciens-là, il devient de suite plus facile aux autres partis d’avoir l’air ‘‘plus social’’. Mais sans leur politique de casse sociale systématique, jamais un parti petit-bourgeois radical tel que la N-VA n’aurait pu s’implanter de manière aussi spectaculaire. Mes parents et grands-parents votaient pour la social-démocratie, le parti qui garantissait la pension pour tous. Quand les pensionnés regardent aujourd’hui le montant de leur pension, eux aussi trouvent sans doute que les sociaux-démocrates sont responsables de ce qu’ils voient, mais sans la moindre pensée positive…

    La social-démocratie a pu devenir un facteur stable de la société durant la longue période de croissance économique d’après-guerre. Grâce à la résistance des travailleurs et à la pression qui en découlait, elle a pu arracher certaines réformes et devenir championne du niveau de vie croissant des travailleurs. En Flandre, elle a dû partager cette position avec l’aile ouvrière de la démocratie chrétienne, pas en Wallonie. Mais depuis la fin des années ‘70, on a vu arriver une période de dépression économique, et nous sommes passés du réformisme au contre-réformisme. Aujourd’hui, un gouvernement dirigé par le PS ne représente pas la moindre alternative à la brutalité de la N-VA, à moins que le but soit simplement d’étaler la casse sociale dans le temps pour qu’elle soit plus douce.

    Ce 1er mai, l’appel émis par la FGTB de Charleroi Sud-Hainaut en 2012 restera d’actualité: nous devons construire une nouvelle force politique qui représente les intérêts des travailleurs avec autant d’acharnement que les partis établis défendent les intérêts des riches. Nous devons à nouveau définir un programme de lutte qui pose la question de la répartition des richesses que nous créons : vers les 1 % de super-riches ou vers les 99 % de la population ?

    En Belgique, la classe des travailleurs est-elle objectivement assez puissante pour gagner cette lutte ? Cela a été démontré par la magnifique riposte syndicale du premier plan d’action contre Michel Ier fin de l’an dernier. Il faut à présent un nouveau plan d’action avec une participation aussi active que possible de la part de l’ensemble des travailleurs, via des discussions démocratiques dans les entreprises et dans les syndicats eux-mêmes, pour que la classe des travailleurs dans toute sa masse soit apte à tirer les leçons du mouvement. À ce moment-là, nous n’aurons plus besoin de poser la question de ce qui reste de nos conquêtes sociales, nous pourrons directement nous intéresser à la manière dont nous pourrons les restaurer et à la manière dont nous pourrons atteindre l’objectif de garantir un niveau de vie décent pour tout un chacun !

  • Le premier mai à travers le monde

    Le 1er mai est une journée internationale de lutte et de solidarité. Seul le mouvement des travailleurs est en mesure d'organiser une telle mobilisation internationale. 125 ans après la première célébration du 1er mai, la lutte internationale ainsi que le message de solidarité et de socialisme qu'il porte restent particulièrement d'actualité. Voici une série de photos et de brefs rapports de diverses interventions de nos organisations-sœurs (qui sont tout comme le PSL membres du Comité pour une Internationale Ouvrière) à travers le monde.

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    Nigeria
    nigeria
    A Lagos, au Nigeria, les membres du Democratic Socialist Movement ont mené campagne avec des stands d’information, leur nouveau journal et des tracts du Socialist Party Nigeria, le front électroal auquel participe le DSM.

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    Pakistan
    pakistan-hyderabad
    Manifestation à Hyderabad, dans la province de Sindh, au Pakistan. Plus de photos des interventions dans la province de Sindh se trouvent ici.

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    Malaisiemaleisie
    A Kuala Lumpur, nos militants ont vendu 200 exemplaires de leur journal et 64 du magazine théorique de Sosialis Alternatif.

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    Turquieturkije
    turkijemagazineEn Turquie, notre tout jeune groupe de camarades a lui aussi mené campagne. Ce premier mai a été l’occasion de lancer le premier numéro d’un nouveau magazine marxiste, en turc. Un pdf de ce magazine est disponible auprès de la rédaction de socialisme.be.

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    Brésil
    brazilie rio
    A Rio de Janeiro, Brésil, nos camarades ont particulièrement mené campagne contre la violence raciste.
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    Allemagne
    duitsland dortmund
    Nos camarades allemands ont participé à des dizaines d’activités dans tout le pays. Cette photo a été prise à Dortmund.

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    Espagne
    spanje barcelona
    A Barcelone, l’intervention de nos camarades a été renforcée par un membre du PSL.
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    Portugal
    portugal
    Lisbonne, Portugal.

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    Suède
    zweden
    A Göteborg, nos camarades ont vendu 456 exemplaires de leur hebdomadaire “Offensiv” et ont réalisé 37 abonnements. Trois nouveaux membres ont rejoint Rättvisepartiet Socialisterna ce jour-là.

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    Hong Kong

    hongkongune action a pris place à Hong Kong avec environ 3.000 participants, parmi lesquels une équipe de Socialist Action, qui a aussi participé à une action de migrants indonésiens.

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    Taïwan

    taiwan15.000 manifestants ont participé au cortège du premier mai à Taïpei. Là aussi, le Comité pour une Internationale Ouvrière était présent.

  • Contre l'austérité, lutter n'est pas assez : il nous faut une alternative de société!

    LS201Plus d’une demi-année après la formation du gouvernement Michel, il est temps de faire une évaluation de son activité et du mouvement de lutte qui a riposté à ses attaques antisociales. Nous ne pouvons pas laisser cela aux mains des médias capitalistes. Ceux-ci vont, au mieux, évaluer le gouvernement et la riposte sociale sur base de ce qui est nécessaire pour garantir la continuité du capitalisme belge. Notre journal et notre parti procèdent à partir d’un angle différent : comment ce gouvernement peut-il contribuer au bien-être de la majorité sociale, la classe des travailleurs ?

    Par Els Deschoemacker, article tiré de l’édition de mai de Lutte Socialiste

    Ce gouvernement est appelé à juste titre le gouvernement des riches. Ses partisans ne le nieront pas, il suffit d’un regard objectif sur son activité pour voir qui il sert. Même le ‘‘tax shift’’ (allégement de la fiscalité sur le travail et déplacement vers d’autres formes de fiscalité) doit être évalué ainsi. Les manifestants de la première heure, qui battaient le pavé avant même que le gouvernement ne soit officiellement formé, étaient furieux que l’on soit toujours à la recherche d’économies chez les mêmes. Médias et politiciens ont tenté de dévier ce ressentiment avec le ‘‘tax shift’’. Si les fortunes doivent être taxées, que cela serve à alléger les charges sur le travail, pensent-ils. Il serait ainsi possible de garantir la compétitivité du capitalisme et donc de la couche la plus riche de la population belge. Le dogme selon lequel le travail coûte trop cher en Belgique est repris par quasiment tout le monde y compris, hélas, par la plupart des dirigeants syndicaux. Cela cadre dans le contexte de compétition entre pays européens et blocs commerciaux internationaux qui vise à rendre le travail, salaires directs et indirects, le moins cher possible, qu’importe si cela doit se faire au détriment des services publics et de la sécurité sociale.

    L’idée derrière la tradition du 1er mai en tant que jour de lutte est à nouveau d’actualité. Le mouvement international des travailleurs voulait disposer de la meilleure protection sociale possible afin d’atténuer les effets des crises périodiques du capitalisme sur la majorité de la population. En dépit de ses limites, la social-démocratie et sa forte base ouvrière ont alors représenté un outil important de ce combat. Aujourd’hui, les partis sociaux-démocrates ne sont guère plus considérés que comme des partis bourgeois. Ils ne peuvent que s’en prendre à eux-mêmes. Ils ont complètement suivi la logique du libre marché, du système capitaliste, et ont jeté par-dessus bord chaque réponse à la dégradation sociale. L’opposition parlementaire ‘‘socialiste’’ actuelle est particulièrement invraisemblable puisque, comme Di Rupo l’a dit lui-même: ‘‘70 % des mesures du gouvernement Michel ont été prises par le gouvernement fédéral précédent.’’

    La lutte contre ce gouvernement et contre toute la politique d’austérité ne peut parvenir à vaincre que si elle dispose d’une alternative sérieuse. A travers l’Europe, de nouveaux partis de gauche progressent. L’un est moins neuf que l’autre, mais il ne s’agit que de versions plus radicales de la social-démocratie. L’opposition à l’austérité et la promesse de mettre fin à cette politique favorable à la classe des riches sont des éléments indispensables au soutien qu’ils reçoivent. Mais faire des promesses est une chose, les réaliser en est une autre. Le gouvernement SYRIZA en Grèce peut en témoigner. Le capitalisme grec et européen ne reculera devant rien pour forcer le gouvernement à se retrouver à genoux.

    Le refus du capital de satisfaire même les besoins les plus immédiats des pauvres, de peur de la ‘‘contagion’’ que cela pourrait susciter, démontre qu’il n’y a pas de remède autre qu’une rupture anticapitaliste et socialiste, basée sur le contrôle public démocratique des leviers économiques et financiers. Le message central qui doit être défendu ce premier mai devrait donc être de lier la lutte pour chaque réforme sociale à la nécessité de changer fondamentalement de société!

  • Kenya. Le massacre de Garissa, al-Shabbaab et l'impérialisme américain

    chebabsLe 2 avril, des terroristes chebabs, combattants de la filiale somalienne d’al-Qaeda, al-Shabbaab, ont massacré 148 étudiants de l’université de Garissa au Kenya. Quinze heures durant, et après avoir séparé les étudiants musulmans des chrétiens, les terroristes ont torturé et exécuté leurs victimes. Les visages défigurés par les tirs à bout portant ont rendu quasi impossible l’identification des victimes par leurs parents.

    Shaun Arendse, Workers and Socialist Party (WASP, CIO-Afrique du Sud)

    Al-Shabbaab est une organisation réactionnaire barbare. Tout comme les talibans en Afghanistan et au Pakistan, tout comme le réseau terroriste mondial Al-Qaïda, et tout comme le groupe État islamique au Moyen-Orient, al-Shabbaab est une création de l’impérialisme américain. Pendant des décennies, afin de vaincre ses rivaux et d’empêcher le développement de la lutte de masse des travailleurs, l’impérialisme américain s’est reposé sur les forces les plus réactionnaires du monde. Il a abrité et nourri des monstres qui ont à présent rompu leurs chaines, terrorisant la classe des travailleurs et les pauvres, mais menaçant également dans la foulée les intérêts stratégiques de l’impérialisme américain lui-même.

    Al-Shabbaab cache son programme de droite anti-travailleurs et antisocial sous une perversion difforme de la religion islamique. L’« internationalisme califal » des chebabs n’a rien à voir avec l’internationalisme socialiste de la classe des travailleurs. L’internationalisme socialiste aspire à l’élévation du niveau de vie pour tous, à la démocratie populaire, à la paix et à la liberté. Les chebabs quant à eux rêvent de la tyrannie en vigueur dans les régimes féodaux des siècles passés, fondés sur l’arriération économique, la misère, l’ignorance, et l’absence de tout droit démocratique même le plus basique. Au lieu de promouvoir la paix et la coopération entre les peuples du monde entier, al-Shabbaab se considère comme partie prenante d’une « guerre entre les civilisations ».

    L’opposition des chebabs à l’Occident et aux États-Unis en particulier n’a rien à voir avec les luttes anti-impérialistes et anticoloniales relativement progressistes qui ont été menées dans le passé. Ces luttes se basaient sur la mobilisation des masses populaires, du prolétariat et de la paysannerie. Au contraire al-Shabbaab occupe le terrain en raison du vide politique qui a été créé en raison de décennies de conflit qui ont affaibli, désorganisé et atomisé la classe des travailleurs. Ce groupe s’appuie sur les formes précapitalistes les plus réactionnaires pour qui ne comptent que le clan et la religion.

    L’opposition des chebabs à la politique impérialiste menée par la classe capitaliste américaine provient de ses propres intérêts antidémocratiques et antiprolétariens. Les États-Unis, tout en soutenant divers régimes procapitalistes, seigneurs de guerre et autres bandits corrompus, empêchent les chebabs d’étendre leur influence et de mettre en place leur projet de mise en place d’une dictature religieuse qui étoufferait complètement les masses dans toute la sous-région. Les socialistes ne peuvent soutenir ni l’impérialisme, ni les forces réactionnaires des chebabs.

    De plus en plus d’instabilité dans la sous-région

    Le massacre de Garissa est l’épisode le plus extre?me dans une série d’attaques de plus en plus violentes en Afrique de l’Est. En 2010, 76 personnes qui regardaient paisiblement un match de la Coupe du monde à Kampala en Ouganda ont été tuées par une bombe placée par les chebabs. En septembre 2013, 67 personnes ont été assassinées lors du massacre du Westgate, un centre commercial de Nairobi au Kenya. Depuis 2013, plus de 400 Kenyans ont été tés par les chebabs au cours de diverses attaques terroristes à petite échelle.

    Garissa n’est pas non plus la première fois où les chebabs tentent de susciter des divisions religieuses. En 2007, ils ont fait exploser une église chrétienne en Éthiopie. Lors de l’attaque du Westgate également, les musulmans ont été relâchés pendant que les non musulmans étaient massacrés. Mais il ne faut pas oublier qu’en Somalie aussi, les chebabs persécutent les musulmans qui ne se reconnaissent pas dans leur interprétation inhumaine de l’islam.

    Le massacre de Garissa rappelle aussi l’enlèvement de 276 lycéennes du Nigeria par le groupe islamiste Boko Haram au Nigeria, le jumeau idéologique d’al-Shabbaab. Il semble que la stratégie suivie n’est pas seulement de cibler des citoyens innocents qui auraient choisi la « mauvaise » religion ou le « mauvais » style de vie, mais aussi de s’en prendre à nos enfants afin de répandre une terreur absolue.

    Les conditions sociales sont à la base des atrocités

    Al-Shabbaab est apparu en Somalie dans les années ‘2000. Ce n’est que plus tard que ce groupe a commencé à répandre dans les pays voisins son idéologique réactionnaire de « djihad mondial » et ses méthodes contrerévolutionnaires de terreur aveugle. Al-Shabbaab est né à cause de la politique de « diviser pour mieux régner » et des rivalités entre les différentes élites locales qui durent depuis des dizaines d’années, du grave sous-développement économique et du conflit militaire prolongé à travers toute la sous-région. Tout comme Boko Haram au Nigeria, al-Shabbaab incarne la face négative du choix auquel l’Afrique est aujourd’hui confronté : le socialisme ou la barbarie.

    Les conséquences du tracé des frontières coloniales dans la Corne de l’Afrique est un facteur important dans les conflits entre les élites rivales de la sous-région. Lorsque les puissances coloniales européennes se sont retirées de la sous-région, elles ont insisté pour que soient maintenues les frontières héritées de leur propre découpage, qui divisaient l’ethnie somalie entre trois pays : la Somalie, le Kenya et l’Éthiopie. Dans les années ’50, les puissances mondiales ont forcé l’Éthiopie et l’Érythrée à former une « fédération », ce qui a déclenché des décennies de guerre pendant lesquelles les Érythréens étaient brutalement réprimés par l’élite d’Addis Abeba. La Somalie elle-même est un territoire fondé en collant au hasard le Somaliland britannique et la Somalia italienne. Dans les années ’80 et ’90, le Somaliland a été fortement discriminé par le régime de Mogadiscio (soutenu par les États-Unis). Bien que le Somaliland ait proclamé son indépendance en 1991, aucun autre pays au monde n’a encore reconnu son existence.

    La Corne de l’Afrique est une région stratégique pour le système impérialiste mondial. Elle est proche des pays pétroliers du Moyen-Orient. On estime que 30 % du pétrole mondial passe en bateau au large des côtes somaliennes (sans compter l’ensemble des bateaux faisant la route entre la Chine et l’Europe). C’est pourquoi les États-Unis et la France ont construit une très grande base militaire, le camp Lemonnier, au Djibouti (un petit pays qui touche la Somalie). Depuis 2008, cette base est placée sous la direction de l’Africom, le commandement militaire étatsunien pour l’Afrique, dont le but est de coordonner les interventions impérialistes américaines sur tout le continent africain vu que l’importance stratégique de ce continent ne cesse de croitre. Mais, vu que l’ONU est (forcément) de plus en plus discréditée, les États-Unis encouragent à présent le rôle de l’Union africaine (UA) dans le « maintien de la paix » sur le continent afin de ne plus devoir sacrifier directement des soldats américains. Aujourd’hui, les deux tiers du budget de l’UA proviennent de l’Union européenne ou des États-Unis.

    La Guerre froide et la destruction de la Somalie par l’impérialisme américain

    À partir des années ’70, la Corne de l’Afrique est devenue un champ de bataille dans le cadre de la Guerre froide que se livraient l’URSS et l’impérialisme américain. Ces deux puissances rivales rivalisaient de manœuvres en s’appuyant sur les régimes dictatoriaux en Éthiopie et en Somalie afin de promouvoir leurs propres intérêts géostratégiques dans la sous-région. Tout au long des années ’80, l’impérialisme américain soutenait militairement le régime somalien de Siyaad Barre ; de son côté, l’URSS se basait sur le régime « communiste » en Éthiopie. Les États-Unis soutenaient le régime somalien non seulement dans le cadre de sa guerre contre l’Éthiopie, mais aussi de la brutale guerre civile que ce régime menait contre sa propre population.

    Malgré le soutien américain, le régime Barre s’est effondré en 1991, laissant la place à divers seigneurs de guerre. En même temps, l’effondrement de l’URSS la même année a mis en même temps un terme à la Guerre froide, ce qui fait que la principale raison de l’intervention de l’impérialisme américain dans la sous-région disparaissait du même coup. Les États-Unis se sont donc retirés de la région début 1994. L’impérialisme américain laissait derrière lui une Somalie dévastée et gravement sous-développée, divisée entre différents seigneurs de guerre. C’est ce terrain qui s’est avéré favorable à l’implantation et à la croissance d’al-Shabbaab.

    L’émergence d’al-Shabbaab en Somalie

    Pour les simples Somaliens, les seigneurs de guerre ont imposé un « règne » brutal et arbitraire. Les méthodes mafieuses de ces chefs leur ont fait perdre l’étroite base de soutien dont ils disposaient parmi leurs milices privées rarement payées ; ils étaient en réelle perte de terrain dès les années ‘2000. À Mogadiscio, des tribunaux islamiques mis en place par différents clans ont été créés autour des élites religieuses afin de tenter d’amener un semblant de sécurité et de stabilité dans la vie quotidienne.

    Ces tribunaux ont été encouragés et soutenus par l’élite bourgeoise somalienne qui revenait d’exil en nombre à partir de la fin des années ’90, attirée par la possibilité d’empocher des contrats juteux avec différentes ONG et programmes de distribution de vivres.

    Au départ, l’élite bourgeoise organisait ses propres milices. Ainsi, la filiale locale de Coca-Cola avait 200 hommes en armes. La principale entreprise de télécoms en avait 1000. Le pire profiteur de tous, M. Aboubokor Umar Adane, qui contrôlait des contrats avec des ONG au niveau du transport et de la distribution de nourriture, avait plus de 2000 miliciens armés. Il va sans dire bien entendu que non seulement ces milices avaient pour tâche de protéger les capitaux de l’élite de bandits et de chefs de guerre, mais elles pouvaient également être facilement envoyées contre les ouvriers, les ingénieurs, les chauffeurs de camion et les dockers afin de les décourager de mener toute tentative d’organisation syndicale.

    En 2006, c’est cette alliance entre les élites capitaliste et religieuse qui a pris le contrôle total de Mogadiscio, lorsque les différents tribunaux islamiques locaux se sont unifiés sous le nom de l’Union des tribunaux islamiques (Midowga Maxkamadaha Islaamiga, MMI). La milice à la solde de ce mouvement a été nommée al-Shabbaab (« La Jeunesse »). Les tribunaux bénéficiaient d’un relatif soutien populaire. Par rapport à la situation sous le règne des seigneurs de guerre corrompus et criminels, la vie était plus stable et plus sure sous la direction de la MMI. Le crime a quasiment disparu de Mogadiscio et, même si la MMI imposait ses taxes à la population, celles-ci étaient beaucoup plus légères et prévisibles que le système de racket purement arbitraire mis en place par les chefs de guerre.

    L’impérialisme américain revient dans la sous-région

    Après les attaques terroristes du 11 septembre 2001 perpétrées par Al-Qaïda aux États-Unis, l’impérialisme américain a recommencé à s’intéresser à la région puisque qu’elle avait constitué un terrain de lancement pour Al-Qaïda. En 1998, Al-Qaïda avait fait exploser une bombe dans les ambassades américaines de Nairobi (Kenya) et de Dar es-Salaam (Tanzanie), faisant 224 tués. En 2002, des kamikazes avaient attaqué un hôtel de Mombasa (deuxième ville du Kenya), causant le décès de 13 employés kényans de cet hôtel, alors que l’attentat était censé viser des visiteurs israéliens. Entre 2002 et 2006, les États-Unis ont enclenché une « guerre de l’ombre » consistant en des raids aériens censés détruire les bases d’Al-Qaïda en Afrique de l’Est. L’effet immédiat de cette politique a été que les combattants d’Al-Qaïda démobilisés sont partis gonfler les rangs des chebabs.

    En même temps que la « guerre de l’ombre », l’impérialisme américain a intensifié ses efforts en vue d’installer un régime capitaliste pro-occidental à Mogadiscio, en appuyant la création d’un gouvernement fédéral de transition (Dowladda federaalka kumeelgaarka, DFK) basé à Nairobi. Le DFK se basait sur des divisions de clan et cherchait le soutien des chefs de guerre discrédités. En décembre 2006, l’Éthiopie a envahi la Somalie avec le soutien de bombardements américains afin d’installer le DFK et de chasser la MMI et al-Shabbaab hors de Mogadiscio. Cela a déclenché deux années de guerre civile entre les islamistes d’un côté, et de l’autre le DFK à Mogadiscio, sous la protection de l’Éthiopie et de l’impérialisme américain. Mais au milieu de l’année 2009, al-Shabbaab était parvenue à récupérer un territoire sous son contrôle d’une superficie comparable à celle du Togo, comptant 5 millions d’habitants. Fatiguée, l’armée éthiopienne a fini par se replier.

    L’élite kényane joue un rôle plus affirmé dans la sous-région

    En octobre 2011, tandis que les combats se poursuivaient, le gouvernement kényan a pris la décision fatidique d’envahir la Somalie. Le prétexte de son intervention était qu’il espérait ainsi faire cesser les enlèvements de touristes par les chebabs. L’Union africaine, avec le soutien de l’impérialisme américain, a depuis « légitimé » l’invasion et l’occupation de la Somalie par le Kenya, qui continue à ce jour, sous le nom de « Mission africaine en Somalie » (Amisom). Pendant vingt ans, la classe dirigeante kényane avait refusé de s’impliquer directement dans les conflits en cours à ses frontières nord et est. Cependant, l’élite kényane a vu sa confiance renforcée par la croissance économique et par l’obtention du statut de « pays à revenu moyen » auprès de la Banque mondiale. Mais trop de confiance mène à trop d’assurance.

    Selon les calculs de l’élite kényane, il aurait été avantageux pour ses intérêts sécuritaires de se tailler un « État tampon » à sa frontière orientale, en détachant le Jubbaland du reste de la Somalie. Avec le soutien tacite de l’impérialisme américain, la classe dirigeante kényane s’est sentie assez forte pour partir au combat. Il y a depuis d’innombrables rapports faisant état de forces d’occupation kényanes qui soutiennent divers clans anti-Mogadiscio, parmi lesquels elles promeuvent l’idée d’une indépendance ou du moins d’une « autonomie » vis-à-vis de Mogadiscio. Tout leader somalien qui se reconnait dans ce plan est certain de pouvoir bénéficier des largesses de la classe capitaliste kényane en retour de son allégeance. Pareille politique ne peut qu’aggraver le conflit en Somalie et rendre encore plus intolérables les souffrances de la population somalienne.

    Tout comme l’attaque du supermarché Westgate, celle de Garissa et les dizaines d’autres attaques de ces dernières années l’ont bien démontré, le peuple kényan aura à payer de son sang le prix du soutien donné à l’impérialisme américain par les régimes qui se sont succédé au Kenya sous Kibaki, Odinga et maintenant Kenyatta. L’occupation du Jubbaland par l’armée kényane, qui continue à ce jour, sert de prétexte à al-Shabbaab pour commettre toutes les horribles attaques qu’elle a perpétrées et va encore perpétrer à l’encontre du peuple kényan.

    La classe des travailleurs souffrent de la politique étrangère de l’élite kényane aussi sur le plan économique, vu les pertes d’emplois et les pertes de salaires dans le secteur touristique, qui est une très importante source d’emplois dans le pays. Vingt-trois grands hôtels ont déjà fermé depuis le début de cette année, et le groupe Heritage a imposé une baisse de salaire de 20-30 % à son personnel. Malgré cela, rien n’indique que le régime Kenyatta est prêt à se retirer de la Somalie. Bien au contraire, l’armée kényane a déjà lancé une série de frappes aériennes en guise de réponse au massacre de Garissa.

    Le régime capitaliste de Kenyatta

    Uhuru Kenyatta, président du Kenya, appartient à une des plus riches familles du continent africain, dont le patrimoine est évalué à plus de 500 millions de dollars (300 milliards de francs CFA). En tant que détenteur du pouvoir d’État, son intérêt est uniquement de s’enrichir, d’enrichir sa famille et d’enrichir ses amis politiques. Il n’a pas la moindre attention envers le peuple de son pays. Depuis le début des attaques terroristes des chebabs au Kenya, Kenyatta a décidé d’organiser une répression à grande échelle de l’ensemble de l’ethnie somalienne vivant au Kenya (2 millions de Kényans), et de la population musulmane du pays de manière générale. Les arrestations, détentions et le harcèlement sur une base purement religieuse ou ethnique font aujourd’hui partie de la vie quotidienne.

    Kenyatta a déjà toute un passif d’incitation à la violence ethnique. Il a échappé de justesse aux accusations de « crime contre l’humanité » portées contre lui à la CPI, selon lesquelles il aurait incité les populations à des violences ethniques afin de se renforcer ainsi que ses alliés politiques dans le cadre des élections générales de 2007. Cet épisode de conflit ethnique avait fait plus de 1300 morts.

    Kenyatta aurait accéléré le recrutement de 10 000 nouveaux policiers dans le cadre de sa nouvelle campagne antichebab. Mais sous le contrôle personnel de Kenyatta, ces policiers seront surtout utilisés contre les minorités religieuses et ethniques du pays. Les travailleurs et les pauvres du Kenya doivent rester vigilants et éviter de tomber dans le piège sectaire qui leur est tendu par Kenyatta dans le seul but de renforcer sa propre base de soutien. De même, il ne faudrait pas que les étudiants qui manifestaient cette semaine à Nairobi pour demander le renfort de la sécurité sur les campus universitaires donnent par mégarde leur soutien à un renfort de l’appareil de répression au service de ce président pro-impérialiste et procapitaliste. Car ces forces finiront à tous les coups par être utilisées contre le mouvement étudiant et le mouvement syndical.

    Ces dernières semaines, sous prétexte d’une campagne anticorruption, cinq ministres et dix-sept autres hauts cadres ont été poussés à la démission. Il est intéressant de noter que c’est la présidence qui a dirigé cette affaire pluto?t que le procureur public. C’est parce que cette campagne anticorruption n’est en réalité qu’une nouvelle tentative de renforcer la position de Kenyatta. Presque toutes les personnes visées étaient des rivaux politiques de Kenyatta. Kenyatta et son gouvernement ne peut obtenir la moindre confiance de la part des travailleurs, des pauvres et de la jeunesse.

    Construire les forces du socialisme en Afrique

    Le Comité pour une Internationale ouvrière est en train de construire ses forces sur le continent africain. La classe des travailleurs, les pauvres, les étudiants et les jeunes doivent s’unir dans une lutte pour une Afrique socialiste et un monde socialiste. Nous nous battons contre l’impérialisme sur le continent, contre les régimes procapitalistes corrompus au Kenya et partout ailleurs, contre les institutions barbares comme al-Shabbaab. Nous appelons à la construction de partis de masse de la classe des travailleurs et des pauvres. Nous appelons le peuple du Kenya, du Somalie, de toute la sous-région et de tout le continent à nous rejoindre et à nous aider à assembler un cadre révolutionnaire reposant fermement sur les idées du socialisme.

    Notre programme :

    • L’impérialisme hors d’Afrique ! Fermer les bases militaires américaines, françaises et autres sur le continent. Non à tout déploiement militaire des Nations-Unies, de l’Union africaine et de toute autre agence de l’impérialisme sur le continent.

    • Démanteler la force de police corrompue soutenue par les États-Unis en Somalie. Pour des organisations d’autodéfense de masse démocratiques, multiethniques, multireligieuses, multiclaniques, afin de protéger les quartiers et les villages du terrorisme des chebabs et de la brutalité des forces d’occupation.

    • Non au régime des élites prédatrices, qu’il s’agisse des chebabs, des chefs de guerre ou des régimes imposés par l’impérialisme. Pour un gouvernement des travailleurs, des pauvres et des paysans.

    • Pour les droits des minorités et le droit à l’autodétermination de tout groupe national opprimé.

    • Pour les libertés démocratiques : liberté de parole, de réunion et d’organisation. Pas en tant que porteparole de l’impérialisme, mais afin de permettre à la classe des travailleurs, des pauvres et de la jeunesse de s’organiser et de lutter pour de meilleures conditions de vie.

    • Pour un développement économique et une création d’emplois massifs partout dans le continent gra?ce à la nationalisation de l’industrie, des richesses minérales et de toutes les ressources naturelles sous contrôle démocratique de la population, réforme foncière sous le contrôle des communautés rurales.

    • Toute l’aide au développement, toute l’aide alimentaire, doit être contrôlée démocratiquement par des comités élus de travailleurs et par la population.

    • Pour une lutte unie contre les pertes d’emplois et de salaires dans le secteur du tourisme au Kenya. Nationalisation et mise sous contrôle du personnel des grosses entreprises qui licencient.

    • Pour des partis prolétariens de masse armés d’un programme socialiste partout en Afrique, qui s’uniront dans le cadre d’une lutte commune. Construire les forces révolutionnaires du CIO.

    • Pour une Afrique socialiste et un monde socialiste.

     

  • Afrique du Sud : La fédération syndicale Cosatu se scinde en deux

    vavi_afriquedusudL’expulsion de Vavi ouvre un nouveau chapitre dans la lutte des classes

    Vingt ans de collaboration de classes dans le cadre de l’Alliance tripartite (qui réunit le parti ANC, le parti « communiste » SACP et la fédération syndicale Cosatu, Congrès des syndicats sud-africains) ont finalement mené à une scission irréversible au sein de la fédération syndicale Cosatu. Le 30 mars, le comité exécutif central (CEC) du Cosatu a exclu son secrétaire général Zwelinzima Vavi, un fervent critique de la politique antisociale menée par le gouvernement ANC (Congrès national africain, le parti de feu Nelson Mandela) tout au long des seize années qu’il a passées à la tête de la fédération. De plus, le CEC du Cosatu a décrété que l’expulsion du Numsa (Syndicat des travailleurs du métal d’Afrique du Sud) serait désormais permanente. Le Cosatu a admis en son sein le Syndicat libéré des travailleurs du métal d’Afrique du Sud (Limusa), un syndicat « jaune » (« amagundwane », c’est-à-dire « les rats» en langue zouloue) dirigé par l’ancien président du Numsa, Cedric Gina.

    Par des correspondants du Workers and Socialist Party (Wasp, CIO-Afrique du Sud)

    Cette scission survenant au sein du Cosatu est la conclusion logique de ces vingt dernières années. Le journal du WASP, Izwi La Basebenzi (« La Voix des travailleurs »), a toujours souligné le fait que l’Alliance tripartite reposait sur des classe sociales dont les intérêts sont diamétralement opposés ; que loin d’être nécessaire pour l’unité de la classe des travailleurs comme le SACP (Parti « communiste » sud-africain) l’a toujours défendu, cette Alliance garantissait sa désunion. Izwi a donc appelé la base du Cosatu à reconquérir l’indépendance politique de classe de leur fédération en faisant sortir le Cosatu de l’Alliance.

    La contradiction était qu’une fédération syndicale à l’histoire militante et à l’idéologie socialiste ne pouvait rester dans une alliance avec l’ANC, un parti pro-capitaliste, et avec les chantres du capitalisme sud-africain regroupés au sein du Parti « communiste » sud-africain. Cela ne faisait que menacer l’unité des travailleurs. La fédération syndicale fut déchirée par des pressions irréconciliables : la loyauté et la soumission politiques à l’ANC d’une part et les intérêts des travailleurs qui ont édifié le Cosatu par leur sueur et leur sang d’autre part.

    De fait, cela fait des années que l’on assiste à un processus de scission du Cosatu au ralenti, au vu des nombreuses scissions à petite échelle au niveau des syndicats membres du Cosatu. Le massacre de Marikana en 2012 (la police tirant sur des grévistes et faisant de nombreux morts) a été le choc final qui a ébranlé les fondations de l’Alliance et qui a tracé une ligne nette entre les forces qui s’alignaient du côté du gouvernement ANC ainsi que des patrons des mines et les revendications des comités de grève indépendants mis en place par les mineurs qui aspiraient à une indépendance politique de classe. Marikana a constitué le point tournant qui a fait se transformer la quantité en qualité. Depuis ce moment charnière, la scission définitive du Cosatu était garantie ; la seule chose que nous ne pouvions prédire était de savoir exactement comment et quand elle allait se produire. Les réponses à ces deux questions ont maintenant été données.

    Une nouvelle fédération en voie de constitution

    Depuis l’expulsion du Numsa en novembre dernier, Vavi et les dirigeants de divers syndicats (Syndicat des travailleurs du secteur public et alliés – Pawusa, Organisation démocratique des aides-soignants d’Afrique du sud – Denosa, Syndicat des travailleurs de l’alimentaire et alliés – Fawu, Syndicat des travailleurs de l’État d’Afrique du Sud – Sasawu, Syndicat des travailleurs de la communication – CWU, Syndicat des footballeurs sud-africains – Safpu, Syndicat des travailleurs du commerce et de l’hôtellerie d’Afrique du Sud – Saccawu) boycottent les réunions du Cosatu en solidarité avec le Numsa.

    La question d’une nouvelle fédération syndicale se pose aujourd’hui ouvertement et les discussions sont déjà en cours en vue de sa réalisation. Vavi a déclaré qu’une réunion des alliés du Numsa au sein du Cosatu se tiendra les 5 et 6 mai prochain afin de discuter de la suite des évènements et de préparer un « Congrès des travailleurs » au mois de juin. On dit aussi que le Numsa est en train de discuter avec la fédération Nactu (Conseil national des syndicats), avec l’Amcu (Association des syndicats des travailleurs des mines et de la construction) et avec d’autres syndicats indépendants.

    Les défenseurs des idées du socialisme se battent pour l’unité la plus large possible de la classe des travailleurs. Mais à certains moments de l’histoire, une scission telle que celle qui est à présent en train de se produire au sein du Cosatu a le potentiel d’être progressiste à partir du moment où elle donne la possibilité d’accroitre la combativité de la classe des travailleurs.

    Cela fait maintenant deux ans que le Cosatu est paralysé. Malgré des résolutions en vue de mener des campagnes et des luttes sur divers thèmes tels que le personnel de sous-traitance et les péages routiers, rien ne s’est concrétisé. Nous reprenons l’appel de Vavi : « Arrêtez de pleurer, organisez-vous ! » En outre, Vavi a également déclaré : « Vous me trouverez partout, en train de marcher avec les travailleurs, en train de les mobiliser, en train de renforcer le recrutement des travailleurs (…) en train de négocier, de mener des campagnes contre la sous-traitance, contre les péages, contre l’exploitation, contre les licenciements (…) » Il est clair que les meilleures traditions de combativité ont quitté le Cosatu en même temps que le Numsa et Vavi. La lutte doit se trouver au cœur de la nouvelle fédération.

    Le WASP soutient le plan proposé pour aller de l’avant. Nous avons constamment appelé le Numsa et ses alliés à convoquer un tel congrès, surtout vu le mépris ouvert de la direction pro-ANC du Cosatu par rapport à ses propres statuts, qui exigent notamment la tenue d’un congrès extraordinaire pourtant exigée par les textes en pareilles circonstances. Nous écrivions en novembre dernier : « Une date doit être donnée pour une conférence au début de l’an prochain afin de discuter de l’avenir du mouvement syndical. Cette conférence devra être ouverte non seulement au Numsa et à ses alliés, mais à tous les membres et structures des autres centrales membres du Cosatu, aux membres de la fédération syndicale Nactu, aux syndicats indépendants et à des groupes de travailleurs non organisés qui luttent pour fonder de nouveaux syndicats. » Il est très important que tout « Congrès des travailleurs » cherche à lancer un pont vers tous les travailleurs qui sont encore détenus comme otages dans ce qui reste du Cosatu et fasse tous les efforts possibles pour les rallier.

    La question pressante est maintenant l’orientation et le caractère politiques de cette éventuelle nouvelle fédération. Toute nouvelle centrale syndicale devra se baser sur des syndicats démocratiques et contrôlés par les travailleurs, comme cela était d’ailleurs l’intention des fondateurs du Cosatu en 1985.

    Le mouvement doit se purger de la corruption envahissante des dernières vingt années. Une leçon cruciale à tirer de la chute du Cosatu est de reconnaitre l’impact nocif de la collaboration de classes. Vavi insiste sur la corruption en tant que cause première de la chute du Cosatu, mais en réalité, cette corruption n’est qu’un symptôme, la conséquence inévitable de la politique de collaboration de classes. La nouvelle fédération doit restaurer les idées socialistes de départ du Cosatu pour donner une fondation aux luttes qui s’ouvrent devant nous.

    La désintégration du Cosatu va accélérer les divisions au sein du SACP, la parti « communiste » sud-africains. Elle va aussi continuer à saper l’autorité de l’ANC, ce qui s’est déjà reflété dans les élections générales de l’année passée, où la soi-disant majorité de 62 % attribuée à l’ANC masque en réalité le fait qu’à peine 34 % des électeurs sont venus voter pour lui. Toute nouvelle fédération devra lutter pour regagner l’indépendance de classe des travailleurs non seulement sur le plan syndical mais aussi politique. L’objectif du « Congrès des travailleurs » qui est proposé doit être non seulement de lancer une nouvelle fédération syndicale, mais aussi un nouveau parti des travailleurs de masse armé d’un programme socialiste. Le lancement d’un parti des travailleurs de masse est absolument impératif : il y a déjà un large soutien pour l’idée d’un tel parti.

    Le fantôme du Cosatu

    Il ne reste plus du Cosatu qu’une poignée de « dirigeants » corrompus qui tiennent le reste des membres en otage. Ces « dirigeants » considèrent les syndicats comme leur moyen d’enrichissement personnel et rien de plus. L’alignement sur l’ANC est la meilleure façon de réaliser leur appât du gain personnel. Qu’est-ce qui reste du Cosatu ? Le Numsa, le plus grand syndicat du continent africain, y a été remplacé par le Limusa, une organisation d’à peine 1600 membres, qui n’est rien de plus qu’une « boite postale » quand on la compare aux 340 000 membres du Numsa ! Le Num (Syndicat national des mineurs), dont les mains des dirigeants sont encore rouges du sang de leurs anciens membres à la suite du massacre de Marikana, voit son influence restaurée à l’intérieur du Cosatu.

    Ceux qui restent au Cosatu ne sont pas unis derrière leurs dirigeants et leurs actions. Un travailleur du Samwu (Syndicat des travailleurs des communes d’Afrique du Sud) a téléphoné à une émission de Radio 702 pour expliquer que le Samwu ne soutient pas l’exclusion de Vavi et que lui et ses camarades attendent la convocation d’un congrès extraordinaire pour pouvoir venir y défendre leur ancien secrétaire général. Ce syndicaliste représente sans doute l’opinion de dizaines de milliers de travailleurs. Il faut s’attendre à de nouvelle scissions au sein des syndicats qui font encore partie du Cosatu.

    Le Cosatu va devenir encore plus dépendant de l’ANC. Vavi a révélé que la fédération fait désormais face à un déficit budgétaire de 300 000 rands par mois (23.200 euros) vu qu’elle ne reçoit plus les cotisations du Numsa, qui s’élevaient à 11 millions de rands par mois (850.000 euros). Ce qui reste du Cosatu n’est plus qu’une « cinquième colonne » de traitres au sein du mouvement syndical.

    Perspectives

    Depuis des années, la politique de la direction de l’ANC a été de chercher à transformer le Cosatu en un simple « bureau du travail ». Cela ne veut pas dire que la direction de l’ANC est contente de l’exclusion de Vavi, pas plus qu’elle n’a été contente de l’exclusion du Numsa. L’ANC a tout fait pour maintenir l’unité du Cosatu, non pas avec le soucis de l’unité des travailleurs, mais parce que l’ANC comprend bien qu’une opposition de la classe des travailleurs pourrait se rassembler autour du Numsa indépendant. Tous ses efforts de médiation n’avaient pour but que le maintien du Numsa en tant que prisonnier de l’Alliance tripartite. Le secrétaire général de l’ANC, M. Gwede Mantashe, a déjà exprimé sa déception par rapport à l’expulsion maladroite de Vavi. Toute la « stratégie » de l’ANC s’effondre comme un château de cartes.

    La manière dont la scission du Cosatu se déroule à présent ne peut qu’accélérer la chute de ce qui restait de soutien à l’ANC parmi la classe des travailleurs. Vu l’intensification de la rivalité entre syndicats qui s’ensuivra après la naissance d’une nouvelle fédération, les patrons, encouragés par les services que l’ANC leur a rendu à Marikana, s’attendront à ce que ces méthodes se poursuivent, surtout au vu de la grave crise de l’économie du pays. Sous cette pression, l’ANC va à son tour mettre la pression sur ce qui reste du Cosatu pour l’aider à « gérer les attentes » qui existent au sein de la classe des travailleurs.

    Dans l’immédiat, la première épreuve seront les négociations salariales du secteur public. Le petit groupe pro-ANC qui contrôle encore le Cosatu ne pourra trouver nulle place où se cacher. L’ANC, le maître politique du Cosatu, se fait passer pour son allié alors qu’il est en même temps son employeur. Si le Cosatu est perçu comme étant de manière trop flagrante dans la poche de l’ANC et des patrons, il va perdre ce qui lui restait de crédibilité, et l’hémorragie de membres vers la nouvelle fédération va le saigner jusqu’à ce que mort s’ensuive. D’un autre côté, si le Cosatu tente une offensive par opportunisme, il va endommager ses relations avec l’ANC, qui y verra un acte de déloyauté. À ce moment, puisque le Cosatu ne lui sera plus d’aucune utilité, il sera écarté et le gouvernement ANC aura à accomplir lui-même le sale travail en attaquant frontalement la classe des travailleurs.

    L’ANC est donc à présent confronté à une situation « perdant-perdant ». La scission du Cosatu va aggraver les pertes de l’ANC au cours des élections locales de 2016, qui se dérouleront dans moins d’un an. L’idée d’un nouveau parti indépendant des travailleurs va se poser de plus en plus clairement dans l’esprit de la classe ouvrière. Nous avons anticipé cela dans notre déclaration du nouvel an où nous écrivions que « Le réalignement du mouvement syndical va se poursuivre en 2015 et la bataille pour le Cosatu va entrer dans sa phase finale ». L’expulsion de Vavi et l’admission du Limusa au Cosatu a enfoncé le dernier clou dans le cercueil de cette fédération.

    Lorsque le Numsa s’est embarqué dans l’aventure de son congrès national extraordinaire de décembre 2013, il était seul. Il a à présent été rejoint par sept membres du Cosatu dans la lutte pour une nouvelle fédération, par de nombreuses formations politiques et par toute une série d’organisations de quartier, d’associations étudiantes et de jeunes, et d’autres formations dans le cadre d’un front uni pour préparer le Mouvement pour le socialisme auquel le Numsa appelle. A la base de toutes ces organisations se trouve un ardent désir d’unifier les différentes luttes au sein et à travers des trois arènes de lutte que sont les services publics, l’enseignement supérieur et les entreprises sous la direction d’un parti de masse des travailleurs. Un nouveau chapitre de la lutte de la classe des travailleurs s’ouvre donc. L’histoire nous attend. En avant pour un nouveau parti de masse des travailleurs armé d’un programme socialiste !

  • En Grèce, en Belgique et ailleurs – Contre l'austérité: Restons mobilisés!

    LS199Le scandale du Swiss Leaks a une fois de plus mis en lumière que si nous vivons tous sur la même planète, nous ne sommes décidément pas du même monde… Alors que l’austérité continue de ravager nos conquêtes sociales et que le monde patronal remet en question des droits essentiels tels que celui de faire grève, la fête n’en finit plus pour les riches. Une seule donnée suffit à illustrer la nocivité du système capitaliste : en 2014, 80 personnes possédaient autant que les 3,5 milliards de personnes les plus pauvres au monde. Leur patrimoine a doublé entre 2009 et 2014. La crise ? Quelle crise ?

    Par Nicolas Croes

    En 2009, les 1% les plus riches au monde possédaient 44% du patrimoine mondial. En 2014, ils en possédaient 48% et selon Oxfam, à l’origine de ces données, les 50% seront dépassés en 2016. Cela signifie donc que le 1% le plus riche possèdera plus que le reste de l’Humanité. L’inégalité est telle que les 80% les plus pauvres de la population mondiale ne possèdent que… 5,5% des richesses !

    Lux Leaks, Swiss Leaks,… et ensuite ?

    A l’automne dernier des journalistes avaient publié qu’un bon millier d’entreprises parmi les plus importantes de la planète avaient secrètement négocié avec l’État luxembourgeois l’obtention d’accords fiscaux très avantageux pour elles. Le Swiss Leaks ravale le scandale de cet évitement fiscal au rang d’arnaque de collégiens : on parle ici de pas moins de 180 milliards d’euros qui ont su échapper à l’impôt grâce à un très complexe mécanisme de comptes numérotés en Suisse, avec la complicité active de la banque britannique HSBC. La clientèle de ce système d’évasion fiscale est composée d’un large panel d’illustres représentants de ce 1% de parasites juchés sur une montagne d’argent au sommet de la société.

    Combien de montages similaires existent-ils encore à travers le monde? Quelles sommes sont-elles ainsi cachées à la collectivité tandis que cette dernière est pressée comme un citron? Soyons clairs, il ne s’agit aucunement de dérives. Les États et institutions internationales encouragent ces pratiques en estropiant tout à fait sciemment les organismes de lutte contre la fraude fiscale. En Belgique, par exemple, l’austérité s’est également abattue sur le SPF Finances qui a perdu 2375 fonctionnaires uniquement entre fin 2008 et début 2012 (9,1% de personnel en moins…). Les autorités auraient tout aussi bien pu crier ‘‘Fraudez les gars, vous ne risquez rien !’’

    Et il ne faut même pas nécessairement aller jusque-là. Les riches et les grandes entreprises, en Belgique ou ailleurs, peuvent parfaitement éviter l’impôt en toute légalité grâce à la déduction des intérêts notionnels, à l’absence d’impôts sur les plus-values, etc. Aux Pays-Bas, les autorités ont conclu divers convention pour éviter la double imposition entre ce pays et d’autres, les royalties ne sont pas imposables,…

    On lâche rien !

    Le contrôle budgétaire de mars s’annonce ardu. Les mesures antisociales supplémentaires que décideront les autorités viendront s’ajouter à toute la batterie de mesures d’austérité déjà annoncée. Ne laissons rien passer !

    L’arrivée au pouvoir d’un gouvernement grec dirigé par le parti de gauche radicale Syriza a parlé à l’imagination d’innombrables jeunes et travailleurs en Europe et au-delà. Une grande frayeur a gagné les élites européennes et leur riposte ne s’est pas fait attendre. C’était comme si le sort du monde se jouait dans ce pays qui ne représente que 2% de l’économie de la zone euro… Comme l’expliquait le dirigeant syndical irlandais James Larkin : ‘‘Les grands de ce monde n’ont l’air grands que parce que nous sommes à genoux. Levons-nous!’’ Voilà ce qui fait trembler l’establishment capitaliste : que les masses réalisent la puissance de leur nombre face à celle toute relative des comptes en banque.
    En Grèce, les travailleurs et les jeunes doivent continuer à se mobiliser pour assurer que les nouvelles autorités grecques ne cèdent pas à l’ignoble chantage des institutions européennes. Les masses doivent les pousser à aller plus loin, vers une claire rupture anticapitaliste.

    Nous n’avons pas à rester spectateurs. En Belgique, le potentiel pour balayer le gouvernement par la grève reste entier. La concentration syndicale du 11 mars ne doit être qu’un premier pas dans le cadre d’un deuxième plan d’action allant crescendo jusqu’à une grève générale de 48 heures, reconductible si besoin est.

    Le monde entier est secoué par les troubles politiques, sociaux et économiques à un rythme sans cesse croissant. La classe dirigeante capitaliste est dépourvue de toute solution à long terme. Cela place de colossales responsabilités sur les épaules de la classe des travailleurs, seule capable de construire un monde débarrassé de l’austérité et de l’exploitation. Notre classe a la capacité de bloquer l’économie par la grève pour ensuite la faire tourner à l’avantage de la collectivité, débarrassée des vermines qui vivent de notre travail.

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