Category: Moyen-Orient et Afrique du Nord

  • Stop au massacre! Stop à l’occupation! Renforçons l’action de masse!

    En un mois à Gaza, 2 Palestiniens sont morts pour 300 habitants. 20 morts par heure pendant un mois. L’horreur de l’impitoyable offensive de l’armée israélienne a culminé avec l’attaque contre l’hôpital Al-Shifa le 15 novembre. Hôpitaux, médicaments, communications, écoles, camps de réfugiés, routes et convois de réfugiés… rien ni personne n’est à l’abri du terrorisme d’État israélien dans la bande de Gaza.

    Par Michael Bouchez, article tiré de l’édition de décembre-janvier de Lutte Socialiste

    Les Palestinien.ne.s en fuite sont chassé.e.s comme du gibier et regroupés dans le sud. La pénurie de carburant et le manque d’électricité rendent non seulement inutilisables les équipements médicaux tels que les couveuses, mais ils paralysent également les pompes à eaux usées. Les médecins craignent l’apparition de maladies et d’épidémies faute d’espace, d’hygiène, d’eau potable et de médicaments.

    Entre-temps, la violence s’intensifie en Cisjordanie : plus de 200 personnes ont été tuées depuis le 7 octobre et des communautés entières ont été chassées par les colons.

    Pour un véritable cessez-le-feu

    Des millions de travailleurs, de travailleuses et de jeunes sont descendus dans la rue et ont participé à des manifestations allant de quelques dizaines à des centaines de milliers de personnes dans presque tous les pays. Des grèves étudiantes ont également eu lieu dans l’Etat espagnol, en Grande-Bretagne ou encore aux États-Unis tandis que des comités de solidarité ont été créés dans plusieurs universités françaises. Le mouvement ouvrier est elle aussi entrée en action avec des grèves et des actions de blocage. En Belgique, le front commun des syndicats du transport a appelé à refuser de prendre en charge le matériel militaire destiné à Israël dans les aéroports du pays. Des blocages ont été organisés par des dockers, des activistes et des jeunes en Catalogne, à Gênes, dans divers ports ou entreprises d’Australie, du Canada, des États-Unis, du Royaume-Uni, etc.

    L’indignation de masse et le rejet du massacre ont imposé à des gouvernements initialement unilatéralement favorables au gouvernement israélien à demander des pauses humanitaires. De telles pauses représentent un véritable soulagement pour la population gazaoui. Mais le passé a amplement démontré à quel point le régime israélien se moquait de tels accords. Pour les masses palestiniennes, la perspective de nouvelles attaques, de nouveaux bombardements et de nouveaux morts restent une dure réalité. Fin novembre, le PS a déposé une résolution dans l’hémicycle en faveur d’un cessez-le-feu total et de la reconnaissance de l’État palestinien. Cette résolution a été soutenue par le PTB mais honteusement boycottée par les élus de l’Open VLD, du MR et de Vooruit qui ne se sont même pas présentés au vote. Bon nombre d’entre eux appellent officiellement à une pause humanitaire, mais il ne s’agit que d’un intérêt de pure forme pour la souffrance des Palestiniens. Ils soutiennent dans les faits l’occupation israélienne et une forme plus “humaine” de carnage.

    Cette résolution était d’ailleurs essentiellement symbolique et à visées électorales pour couvrir le rôle hypocrite du PS vis-à-vis des livraisons d’armes de la FN Herstal, détenue à 100% par la Région wallonne et qui a encore livré des armes à Israël en 2022 selon Amnesty International. Et aujourd’hui? “Le Ministre-président ne s’exprime jamais sur la thématique de l’octroi des licences d’exportation d’armes”, a expliqué (sans rire) le porte-parole d’Elio Di Rupo.

    Face aux guerres qui menacent, opposons la lutte de classe !

    En fin de compte, nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes et sur l’escalade internationale des mobilisations, des actions de blocage et des grèves pour obtenir un cessez-le-feu complet et durable. De telles actions actions initiées et développées à partir de la base et autour de la force du mouvement ouvier entreront inévitablement en conflit avec les intérêts impérialistes et géopolitiques des entreprises belges et internationales.

    C’est par ce type d’actions que nous pourrons démasquer celles et ceux qui souhaitent avant tout éviter de se mettre en travers des intérêts des profiteurs de guerre. La guerre et la destruction sont des activités très lucratives. Les dépenses militaires mondiales ont atteint 2.240 milliards de dollars en 2022. Depuis début octobre, les grandes entreprises d’armement ont vu leur valeur augmenter de plusieurs milliards. Imaginez que ces fonds soient consacrés aux besoins de la population au lieu de tuer des enfants et de provoquer des massacres ! Cela garantirait immédiatement la sécurité et l’avenir du monde entier.

    La lutte pour la liberté de la Palestine est également une lutte contre l’impérialisme, le capitalisme et la société de classes. La lutte peut apporter des victoires sociales au sein du capitalisme, mais une transformation socialiste de la société est nécessaire pour élever le niveau de vie des masses palestiniennes et israéliennes au-dessus des meilleures conditions possibles dans le cadre du capitalisme.

    Pour former l’unité dans la lutte pour la transformation socialiste, il est crucial de reconnaître le droit à l’autodétermination de tous les peuples. Ce n’est que sur cette base qu’il sera possible de parvenir à une égalité totale des droits dans tous les domaines et de garantir une Palestine socialiste indépendante avec sa capitale à Jérusalem-Est. Avec une transformation socialiste d’Israël au sein d’une confédération socialiste volontaire du Moyen-Orient avec une garantie d’égalité des droits pour toutes les nations et minorités.

  • Gaza. En finir avec la guerre et l’occupation par une mobilisation de masse et des grèves !

    Parallèlement à la mobilisation des parents des otages israéliens, des mobilisations internationales de masse sont parvenues à imposer une première trêve humanitaire de quatre jours avec échanges de prisonniers. Il est possible d’aller beaucoup plus loin en maintenant ces mobilisations, en les élargissant et en les accompagnant d’actions de grève de plus en plus importantes. Ce sont les méthodes de lutte du mouvement ouvrier : la clé non seulement pour stopper ce carnage, mais aussi pour mettre fin à ses racines : l’occupation, le blocus, l’expansion des colonies et la misère.

    Par Eric Byl

    Un déluge de mort et de destruction

    Rien ni personne n’est épargné par l’offensive israélienne sur Gaza. Au cours des trois premières semaines, plus de bombes y ont été larguées que sur l’ensemble de l’Afghanistan à l’époque. 18.000 tonnes de TNT au total, soit l’équivalent de la bombe atomique lâchée sur Hiroshima. Après 48 jours, le bilan est de 14.758 morts, mais il pourrait déjà s’élever à 20.000 car on estime que plus de 6.000 corps gisent encore sous les décombres. Au moins 6.000 enfants et 4.000 femmes ont été tués. Sur une population de 2,3 millions d’habitants, 1,7 million sont aujourd’hui à la rue, la plupart déplacés hors des camps de réfugiés où leurs familles s’étaient retrouvées après la Nakba de 1948.

    Plus de la moitié des maisons, soit 278.000, ont été détruites ou endommagées. Les survivants trouvent refuge dans les écoles et les hôpitaux dans l’espoir que le régime israélien respecte le droit international de la guerre. Entre-temps, 311 écoles et 87 ambulances ont déjà été endommagées, seuls 9 des 35 hôpitaux fonctionnent encore et 200 travailleurs de la santé ont été tués. La bombe qui a explosé sur l’hôpital Al Ahli Arab, puis le siège de l’hôpital Al Shifa et de l’hôpital indonésien ont illustré que rien ne peut consituer un abri. Au 22 novembre, 53 journalistes ont déjà été tués, dont 46 Palestiniens. Le régime israélien bloquant l’approvisionnement en eau, en nourriture, en médicaments et en carburant, la population doit utiliser de l’eau salée et polluée. Les maladies infectieuses et la famine menacent de devenir incontrôlables.

    C’est un tsunami de mort et de destruction que la machine de guerre israélienne déverse sur Gaza pour se venger de l’attaque surprise du Hamas du 7 octobre. Ce dernier présente celle-ci comme une lutte partisane contre le siège et le blocus, vision des choses aujourd’hui renforcée par les destructions massives causées par la machine de guerre israélienne. En réalité, il s’agit d’un horrible massacre planifié au cours duquel 1.200 Juifs, Arabes palestiniens et travailleurs migrants, y compris des enfants et des bébés, ont été tués. Dans le sillage de cette attaque, 240 otages ont été capturés. Ce faisant, le Hamas voulait contrecarrer le processus de normalisation des pays arabes avec Israël, une stratégie délibérée visant à faire tomber la cause palestinienne dans l’oubli. Le Hamas savait que le régime israélien riposterait durement. Son objectif n’était pas d’améliorer la situation à Gaza, mais de remettre la Palestine à l’ordre du jour.

    Le mouvement de protestation

    Le gouvernement de droite et d’extrême droite de Netanyahou avait été contesté pendant dix mois par un mouvement de masse contre son projet de coup d’État légal et ses politiques antisociales. Il s’est saisi de ce crime pour alimenter une vague de vengeance, de nationalisme et de racisme, tout en créant un semblant d’unité nationale et en cherchant à s’assurer le soutien de l’opinion publique internationale. Jamais auparavant ses alliés occidentaux n’avaient pris le parti d’Israël de manière aussi inconditionnelle et aveugle. Quiconque osait mentionner l’occupation et le blocus était accusé de soutenir le Hamas, le terrorisme voire l’antisémitisme. Des manifestations pro-palestiniennes ont été interdites et qualifiées de “marches de la haine”. Le port de drapeaux palestiniens ou du keffieh a été criminalisé, de même que certains slogans.

    Mais rapidement, le cycle du sang, de la destruction et de la punition collective à Gaza a éclipsé le crime du Hamas. Même la machine de propagande israélienne n’a pas pu l’ignorer. D’imposantes manifestations pro-palestiniennes ont eu lieu à travers le monde. Elles ont également exercé une pression énorme sur les régimes arabes favorables aux États-Unis. Aux États-Unis, on parle d’un fossé générationnel où les personnes de plus de 50 ans sont majoritairement favorables à Israël, alors que plus la population est jeune, plus le soutien aux masses palestiniennes est important, y compris parmi les jeunes de la communauté juive. Cela met à mal l’hypocrisie du bloc occidental en tant que gardien de la démocratie face aux crimes de guerre. Cela met même en péril la réélection de Biden. En Europe, de plus en plus de chefs de gouvernement ne peuvent s’empêcher de se prononcer en faveur d’une trêve des armes et d’une paix négociée.

    Le cabinet de guerre israélien qualifie son offensive vengeresse de “frappe défensive” visant à détruire le Hamas et à libérer les otages. Mais pendant ce temps, c’est toute la population qui est visée et toutes les infrastructures détruites. Israël ne parviendra pas plus à détruire le Hamas que les États-Unis ne sont parvenus à détruire les talibans à l’époque. En soutenant sans réserve la «guerre de défense» d’Israël, le bloc impérialiste occidental a voulu intégrer pleinement Israël dans son bloc de pouvoir et clarifier immédiatement à toute la région, ainsi qu’à la Chine et à la Russie, qui a le pouvoir militaire au Moyen-Orient. La présence de porte-avions américains visait à dissuader les milices pro-iraniennes au Liban, en Syrie, en Irak et au Yémen, l’Iran lui-même et d’autres pays arabes d’intervenir. Elle a immédiatement préparé le terrain pour qu’Israël puisse poursuivre ses activités à Gaza.

    Pour l’instant, l’impérialisme occidental reçoit son dû sur le plan militaire, mais au prix d’un affaiblissement politique, tandis que la Chine se positionne hypocritement comme un artisan de la paix et que Poutine abuse de la tragédie palestinienne pour justifier sa propre agression en Ukraine. Aucune des puissances impérialistes dominantes ne souhaite une extension régionale de la guerre, mais ce risque est ancré dans la situation. De plus, personne n’a de stratégie de sortie sérieuse et Israël et le bloc occidental sont dans une impasse stratégique qui pourrait finir par les miner militairement aussi. Plus la trêve durera, plus il sera difficile pour le régime israélien de reprendre les attaques. Mais ce gouvernement est le plus à droite du monde précisément parce qu’il maintient l’occupation.

    Stopper le carnage

    La première tâche, et la plus importante, consiste à stopper le carnage, à rétablir l’approvisionnement en eau, en nourriture, en médicaments et en carburant, ainsi qu’à procéder à un échange intégral de prisonniers, comme le réclament également les proches des otages. La meilleure façon d’y contribuer est d’élargir les mobilisations internationales. La spontanéité est une bonne chose, la création de comités de mobilisation dans les écoles et les universités en est une meilleure encore.

    L’appel des syndicats belges du transport pour empêcher le chargement et le déchargement de matériel militaire et de marchandises en provenance des colonies a trouvé écho en Catalogne et à Gênes. Dans plusieurs endroits, plusieurs centaines de militants ont bloqué la production et/ou le transport d’armes. Des actions de solidarité ont été menées dans les hôpitaux et par des journalistes du monde entier. Tout cela répondait à un appel lancé par les syndicats palestiniens.

    Le succès initial des mobilisations de masse et des grèves démontre que ce ne sont pas seulement les calculs géopolitiques des gouvernements capitalistes, mais aussi la lutte des classes qui peuvent en fin de compte contribuer à déterminer le cours de l’histoire. Des millions de travailleurs et de personnes opprimées à travers le monde montrent qu’ils et elles ne laisseront pas la classe dirigeante s’en tirer à bon compte avec ses crimes. La généralisation et l’intensification de l’action ouvrière peut réellement les stopper.

    La libération nationale par la libération sociale

    Le PSL, son parti frère le Mouvement de Lutte Socialiste en Palestine/Israël et leur internationale Alternative Socialiste Internationale sont engagés dans le développement du mouvement de solidarité internationale. Cependant, tant que les Palestiniens se verront refuser le droit à leur propre État, de nouvelles confrontations, encore plus horribles, éclateront. Sur une base capitaliste, la libération de la Palestine s’est avérée illusoire, que ce soit dans le cadre d’un seul État ou d’une solution à deux États. C’est précisément la raison pour laquelle la diplomatie et les forces internationales ne peuvent au mieux que retarder la prochaine confrontation.

    La libération nationale de la Palestine ne peut être séparée de la libération sociale. Elle ne peut être et ne sera pas imposée par une confrontation militaire, mais par la seule chose qui ait jamais pu forcer des concessions jusqu’à présent : une lutte de masse politique et sociale où la lutte armée est un outil sous le contrôle démocratique de la population. Nous appelons – en Palestine et en Israël – à la création de comités de lutte démocratiques dans l’esprit de la première Intifada (1987-1993) et de la Grève de la dignité (2021). Ce n’est que de cette manière qu’une Palestine indépendante avec une capitale à Jérusalem peut être mise en œuvre, en même temps que seule une Palestine socialiste peut apporter la prospérité en exploitant la richesse nationale au profit de la grande majorité de la population.

    Une telle Palestine socialiste serait un pôle d’attraction et une source d’inspiration pour les masses de tout le Moyen-Orient, une impulsion en faveur d’une confédération socialiste volontaire du Moyen-Orient. Reconstruire Gaza, sans parler d’une Gaza prospère, semble impossible aujourd’hui. Cela nécessiterait un plan Marshall, mais serait similaire ou plus dur encore que la reconstruction de l’Afghanistan ou, disons, de l’Irak. Une confédération socialiste volontaire du Moyen-Orient tirerait parti des vastes ressources de la région pour y parvenir.

    Le régime israélien présente de fortes caractéristiques d’apartheid, mais avec une population juive elle-même déchirée par les divisions de classe et la discrimination. Contrairement aux régimes coloniaux précédents, cette population n’a pas de métropole en dehors de la région où aller. Le régime abuse de cette situation pour créer un sentiment de citadelle assiégée et instrumentaliser le désir de sécurité. Une Palestine socialiste, sans parler d’une confédération socialiste du Moyen-Orient, inciterait fortement la classe ouvrière israélienne à se battre également pour une transformation socialiste, surtout si cela s’accompagne de la reconnaissance de son droit à l’autodétermination et à la sécurité. Cela signifierait non seulement la fin de l’occupation, mais jetterait également les bases de la reconnaissance de l’injustice historique et d’une interprétation juste du droit au retour des réfugiés palestiniens. Nous luttons pour un État socialiste démocratique avec une égalité totale des droits en Palestine et un Israël démocratique et socialiste, avec les deux capitales à Jérusalem et une égalité totale pour toutes les minorités, dans le cadre d’une confédération socialiste régionale volontaire.

  • L’armée israélienne alimentée depuis la Belgique? Résistance!

    Le 16 octobre 2023, les syndicats palestiniens ont appelé leurs “homologues internationaux et toutes les personnes de conscience” à mettre fin à toutes formes de complicité avec les crimes du gouvernement d’Israël, en cessant de toute urgence le commerce d’armes avec cet État, ainsi que le financement de toute recherche militaire.

    Par Baptiste (Liège)

    Ce vendredi 1er décembre – rassemblement à 19h face à l’entreprise Challenge à Liège – Rue de l’Aéroport 76, 4460 Grâce-Hollogne, Belgique, à l’initiative du Collectif Liège Palestine Solidarité

    Cet appel n’est pas resté sans réponse. En Europe, les travailleur.se.s elles.eux mêmes ont pris spontanément l’initiative de tirer la sonnette d’alarme et de dénoncer l’envoi d’armes depuis leur lieu de travail. On a ainsi vu le front commun des syndicats belges du transport (CNE, UBT, Setca et CSC Transcom) appeler ses affilié.e.s à refuser de manipuler des armes destinées à l’État israélien. A Barcelone et à Gênes, des dockers ont refusé de charger les bateaux d’armes à destination d’Israël. Partout dans le monde, aux Etats-Unis, en Australie, au Canada, au Royaume-Uni, en Afrique du Sud des initiatives de syndicats et de la société civile sont prises pour freiner l’approvisionnement de matériel meurtrier destiné au massacre de la population palestinienne. Malgré le climat de haine dominant et la lâcheté des gouvernements, les travailleur.se.s lancent des actions courageuses sans attendre l’action des partis traditionnels.

    Pour assurer un cessez-le feu qui ne soit pas une caricature ainsi qu’un véritable embargo militaire contre la machine de guerre israélienne, ces actions doivent être renforcées et développées par l’organisation des travailleur.se.s sur leurs lieux de travail.

    La Belgique complice des massacres et de l’oppression

    Rien qu’en 2022, on estime que les entreprises wallonnes ont participé à armer les forces impérialistes dans le monde (dont Israël) à hauteur de 830 millions d’euros. La FN d’Herstal contribue par exemple à armer l’Arabie Saoudite, responsable du massacre de la population yéménite, une des plus grandes catastrophes humanitaires du monde.

    A partir de Liège, l’entreprise israélienne Challenge, anciennement CAL-LACHS, envoie explosifs et drones militaires à Tsahal, l’armée israélienne. Bien que le CEO de Challenge, Yossi Choukroune, déclarait le 8 novembre à La Libre que « Nous amenons des ambulances et de la nourriture vers Israël, pas des armes », un article du Soir du 21 novembre révélait que du matériel destiné à la confection d’explosifs provenant des États-Unis avait encore transité par Liège ce même 8 novembre! De plus, le 11 octobre, le ministère israélien de la Défense lui-même tweetait avoir reçu une livraison d’armes en provenance d’un avion-cargo immatriculé 4X-ICA appartenant à l’entreprise Challenge… qui avait décollé de Bierzet le 8 octobre à 17h06 !

    Cette entreprise fleurissante peut compter sur le soutien des autorités belges qui lui octroient régulièrement des permis de livrer du matériel électrique servant à la confection d’explosifs ou encore de balles en plastiques destinées à la police israélienne qui réprime aujourd’hui l’opposition au gouvernement d’extrême-droite de Netanyahou. L’entreprise livre par ailleurs en Europe des marchandises extorquées aux populations palestiniennes des colonies, comme par exemple des tonnes de fleurs ayant bénéficié de l’appropriation des ressources aquifères des territoires palestiniens.

    Selon l’Association Belgique-Palestine, Challenge a pu développer sa filiale ACE à Liège sous l’œil bienveillant d’une délégation du gouvernement belge envoyée en 2017 en Israël, et menée par le premier ministre de l’époque, Charles Michel (MR). L’entreprise fait aussi partie d’un consortium (avec Instro, de nombreuses filiales d’Elbit, Motorola et d’autres entreprises) financé via le 7ème programme cadre européen (projet Idetct4All). Challenge bénéficie également de règles très flexibles, comme par exemple l’absence de contrôle en cas de non-transbordement des avions en transit se posant à Liège. Que transportent ces avions ? Des fleurs exotiques ou des drones ? Nous pouvons dès lors questionner la responsabilité du gouvernement actuel, qui se montre si partisan d’un cessez-le-feu, et qui se rend pourtant complice du développement d’une telle entreprise de mort.

    Le devoir de la classe travailleuse dans le conflit

    Force est de constater que ce sont les travailleur.se.s, directement au contact de ce matériel militaire, qui sont les mieux placé.e.s pour empêcher son envoi. La tradition anti-guerre du mouvement ouvrier est riche, pensons notamment à la révolution allemande de 1918 ou encore à la grève de 1949 organisée par la CGT à Marseille contre la guerre d’Indochine. Il a un rôle décisif à jouer dans la lutte contre l’impérialisme israélien.

    Le blocage du transport de l’armement ne peut pas être simplement laissé à l’initiative des travailleur.euse.s à titre individuel. Le mieux est de discuter de la meilleure manière de concrétiser l’appel des syndicats palestiniens en assemblées générales du personnel, autour des délégations syndicales. De multiples initiatives peuvent être prises, avec le soutien d’autres délégations syndicales et celui de comités de solidarité locaux, à l’image du Collectif Liège-Palestine Solidarité nouvellement créé.

    Dans les secteurs qui ne sont pas directement concernés, des motions de solidarité peuvent être votées pour assister l’établissement de la confiance vers de telles actions de blocage. Les délégations syndicales devraient aussi discuter de participer aux comités de solidarité locaux ainsi qu’aux manifestations et actions avec leurs banderoles syndicales, en tant que délégations d’entreprises.

    C’est une étape nécessaire dans la construction d’un mouvement de masse international en faveur de l’émancipation nationale et sociale du peuple palestinien ainsi que contre la militarisation grandissante de nos États et leurs politiques impérialistes. L’expropriation et la nationalisation du secteur militaro-industriel sous contrôle et gestion des travailleur.euse.s est l’unique solution pour abattre les prétentions des profiteurs de guerre et reconvertir les entreprises d’armement pour une production socialement utile. Les technologies actuelles permettent de le faire aisément. Les travailleur.se.s de Belgique ont aujourd’hui une occasion importante de se montrer solidaires du peuple palestinien dans le cadre d’un combat qui vise à mettre un terme au règne du capitalisme qui s’épanouit sur la haine, l’exploitation et l’oppression.

  • La résistance au massacre à Gaza continue de se développer !

    La manifestation de ce samedi à Bruxelles fut massive. La police a parlé de 21.000 participants, une sous-estimation parfaitement ridicule. Si certains partis au pouvoir s’orientent vers une critique prudente des violences commises à l’encontre du peuple palestinien, les autorités en tant que telles continuent de prendre clairement parti. Le flot de manifestants n’a pas cessé d’affluer. Pendant plus d’une heure, nos stands à la gare de Bruxelles Nord ont été débordés. Des centaines de manifestants sont venus y chercher un tract, acheter un badge et/ou un journal. Nous étions sans doute plus de 50.000 manifestants.

    L’approche internationaliste du PSL/LSP et d’Alternative Socialiste Internationale a été appréciée, tandis que la nécessité d’un changement de système était largement soutenue. Ce système trouve des milliards pour la destruction et la misère, alors que ces ressources sont nécessaires pour construire un véritable avenir pour nous toutes et tous. Comme nous le disions dans notre brochure : “En temps de guerre, les moyens semblent inépuisables. Ils donnent une idée de ce qui peut être utilisé pour assurer le bien-être de chaque personne dans la région avec l’expropriation des gigantesques profits de guerre et du secteur bancaire et leur prise en charge publique sous contrôle et gestion démocratiques.”

    Les mobilisations ont été très importantes dans plusieurs endroits du monde. À Londres, plus d’un demi-million de personnes ont manifesté. Même en Israël, des milliers de manifestants ont demandé un cessez-le-feu. La protestation continue à prendre de l’ampleur, les tentatives d’y mettre un terme par la répression n’aboutissent plus. Les politiciens traditionnels sont pressés de dénoncer ce qu’ils appellent la violence “disproportionnée”, comme s’il existait aussi un terrorisme d’État “proportionné”. À partir de combien d’enfants assassinés devient-on “disproportionné” ? Seules la droite et l’extrême droite continuent à soutenir hardiment le régime belliciste israélien. Bart De Wever a déclaré précédemment que seul le « camp des lumières et de la démocratie » pouvait être choisi. Il pense peut-être trop aux Romains, en particulier à Tacite. Ce dernier écrivait : “Voler, assassiner, piller, c’est ce qu’ils appellent avec un mensonge ‘gouverner’ et là où ils font des ravages, ils parlent de ‘paix’”.

    L’ampleur de la manifestation n’est pas sans rappeler le mouvement qui a précédé le début de la guerre en Irak en 2003. Nous avons alors assisté à la plus grande journée internationale de protestation de l’histoire, le 15 février 2003, avec des millions de manifestants à travers le monde. Nous étions alors 100.000 à Bruxelles. Cette protestation s’est accompagnée de grèves dans les écoles et chez les étudiants et de grandes manifestations locales le jour où la guerre a commencé, le jour X. Aujourd’hui, la guerre est déjà en cours. Cependant, le potentiel de mobilisation dans les écoles, les campus et de nouvelles actions locales est important.

    Ce qui a manqué en 2003 pour stopper la guerre, c’est un boycott conscient et bien organisé de tout effort de guerre par la classe travailleuse. Le mouvement ouvrier est capable d’arrêter les guerres, car ce sont les travailleurs qui sont responsables de toutes les opérations de production et de logistique. L’appel du front commun des syndicats du secteur transports – CNE, UBT, Setca et CSC-Transcom – pour ne plus charger ou décharger du matériel militaire à destination d’Israël dans les différents aéroports du pays est très important. Les dockers de Catalogne ont fait de même. Ils répondent ainsi à l’appel international des syndicats palestiniens pour refuser de fabriquer ou transporter des armes destinées à Israël. Les syndicats des autres secteurs doivent suivre cet exemple !

    Un tel mouvement renforcerait la classe ouvrière palestinienne, les pauvres et les personnes opprimées. Il mettrait l’accent sur des méthodes déjà familières dans la lutte pour l’émancipation nationale et sociale palestinienne : les grèves et les manifestations de masse, comme lors de la première Intifada (1987-1993) ou lors de la récente grève de la dignité en mai 2021.

    Comme à l’époque, des comités populaires démocratiquement élus peuvent être mis en place. Ceux-ci peuvent prendre en charge les mesures de sécurité du mouvement et l’autodéfense lors des manifestations contre les bombardements, l’occupation et les colonies. C’est aussi la base d’une lutte pour les ressources nécessaires à un droit de retour digne pour tous les réfugiés, à la reconstruction des quartiers détruits, à l’assistance médicale et psychologique pour toutes les victimes du conflit…

    Cette autre voie est nécessaire face aux méthodes désespérées reposant sur la violence aveugle au lieu de l’auto-organisation des masses et de leur action. La stratégie de violence aveugle et désespérée du Hamas n’offre pas d’issue. Sa violence s’exerce d’ailleurs aussi contre les masses palestiniennes : il y a peu, il a réprimé les manifestations à Gaza contre la crise énergétique et les prix élevés, tout comme l’Autorité palestinienne a réprimé en Cisjordanie les manifestations contre l’offensive israélienne à Gaza.

    Comme nous l’avons noté dans notre tract, Il faut saisir toutes les occasions de briser le cycle de la haine et de la violence. Le Parti Socialiste de Lutte / Linkse Socialistische Partij (PSL/LSP) est la section belge d’Alternative Socialiste Internationale, qui comporte également une section en Palestine-Israël : le Mouvement de Lutte Socialiste. Nos membres sur place participent par exemple activement à la résistance sur les campus israéliens contre les tentatives de l’extrême droite d’expulser des universités celles et ceux qui expriment leur soutien aux Palestiniens. Comme toujours en situation de guerre, la cherté du coût de la vie augmente à vue d’œil, de même que les profits d’une petite clique de parasites capitalistes (grandes entreprises de l’armement, distribution, etc.) : cela assistera la compréhension des véritables mécanismes derrière cette logique d’occupation et de massacre. »

    La lutte pour l’émancipation palestinienne est également une lutte contre l’impérialisme, le capitalisme et la société de classe. La lutte pour les besoins sociaux des travailleuses et travailleurs peut arracher des conquêtes sociales dans le cadre du capitalisme, mais une transformation socialiste de la société est nécessaire pour élever le niveau de vie des masses palestiniennes et israéliennes au-dessus des meilleures conditions permises par la société d’exploitation capitaliste.

    Parvenir à l’unité dans la lutte pour une transformation socialiste exige de reconnaître le droit à l’autodétermination de tous les peuples. Ce n’est que sur cette base que l’on pourra obtenir une égalité totale des droits dans tous les domaines et que l’on pourra assurer une Palestine socialiste indépendante avec sa capitale à Jérusalem-Est et une transformation socialiste en Israël dans une confédération socialiste volontaire du Moyen-Orient, avec une garantie d’égalité des droits pour toutes les nations et minorités.

    Reportage-photos par Pol

    Photos de Philip et Nico

  • Stop au massacre à Gaza!

    • Solidarité avec toutes les victimes
    • Pour des mobilisations internationales contre le bain de sang à Gaza
    • Stop aux livraisons d’arme à Israël

    De la démonstration de solidarité à la construction d’un rapport de force

    Jour et nuit, les masses palestiniennes sont confrontées à l’horreur. À travers le monde, les foules expriment leur dégoût et leur solidarité dans la rue et sur les réseaux sociaux. Par-delà les frontières, nous sommes unis dans notre indignation et notre volonté d’agir, comme nous l’avons déjà constaté avec la nouvelle vague de luttes féministes, avec Black Lives Matter ou encore avec les grèves pour le climat. Les jeunes et les travailleuses et travailleurs ont immédiatement manifesté leur solidarité avec les masses palestiniennes opprimées ainsi qu’avec toutes les victimes du terrorisme d’État et du terrorisme.

    Les gouvernements occidentaux ont en revanche soutenu le déluge de feu sur Gaza, jusqu’à même interdire les manifestations, comme en France. Sous la pression grandissante de l’horreur du massacre aveugle perpétré à Gaza et des protestations grandissantes, de premières fissures apparaissent toutefois. On entend des appels au « respect du droit international » et à la « prise en compte des besoins humanitaires ». Comme si les masses palestiniennes n’étaient pas déjà victimes d’une oppression brutale avant les débuts de l’actuelle offensive israélienne…

    Contre l’hypocrisie, la force de la classe travailleuse

    Le CD&V, ECOLO/GROEN, Vooruit et le PS se sont prononcés en faveur du boycott des produits issus des territoires occupés. En sachant bien qu’aucune majorité parlementaire n’existait pour cela… Par contre, le ministre-président de la Région wallonne, Elio Di Rupo (PS), peut décider en une minute de stopper les exportations d’armes de la FN-Herstal (détenue à 100% par la Région) vers Israël. Mais dès qu’il s’agit de sortir de la mascarade électorale, c’est silence radio.

    N’attendons pas ces hypocrites ! En front commun, les syndicats du secteur transports CNE, UBT, Setca et Transcom ont appelé à ne plus charger ou décharger du matériel militaire à destination d’Israël dans les différents aéroports du pays. Les dockers de Catalogne ont fait de même. Ils répondent ainsi à l’important appel international des syndicats palestiniens pour refuser de fabriquer ou transporter des armes destinées à Israël. Les syndicats des autres secteurs doivent suivre cet exemple !

    Les gouvernements capitalistes, même lorsqu’ils sont sous pression, pensent tout d’abord aux intérêts géopolitiques et à la défense des intérêts de leurs commanditaires, ceux qui détiennent les leviers du pouvoir économique.

    La résistance contre le bain de sang à Gaza peut être organisée avec les collègues, en organisant des assemblées pour voter démocratiquement des motions de soutien à l’appel des syndicats palestiniens, en organisant une participation aux manifestations antiguerre en tant que délégation syndicale (avec banderoles et pancartes), en diffusant les appels aux actions, etc. La solidarité, c’est l’outil par excellence de la classe travailleuse et de la jeunesse.

    À partir de ces premiers pas, qui peuvent être très rapidement franchis, nous pouvons construire un mouvement international de masse reposant sur des comités démocratiques d’action dans les quartiers, sur les lieux de travail, dans les écoles et les universités. Nous avons eu en 2019 les grèves dans les écoles pour le climat, pourquoi ne pas organiser des grèves contre l’occupation et l’offensive contre Gaza ? C’est ainsi que nous pouvons au mieux, du local à l’international, instaurer une pression mondiale sur la machine à tuer israélienne et mettre fin à l’occupation, la cause fondamentale de toutes ces souffrances.

    L’auto-organisation et la solidarité de classe

    Un tel mouvement renforcerait la classe ouvrière, les pauvres et les opprimés palestiniens en soulignant des méthodes déjà éprouvées dans le combat pour l’émancipation nationale et sociale : les grèves et les manifestations de masse, comme durant la première Intifada (1987-1993) ou durant la récente Grève de la Dignité en mai 2021.

    Comme à l’époque, des comités de base démocratiquement élus pourraient être créés et prendre en charge les mesures de sécurité et l’autodéfense du mouvement lors de manifestations contre les bombardements, l’occupation et les colonies. C’est également sur cette base que l’on pourra lutter pour aller chercher les moyens d’assurer un droit au retour décent pour tous les réfugiés, la reconstruction des quartiers dévastés, l’aide médicale et psychologique de toutes les victimes du conflit,… 

    Cette autre voie est nécessaire face aux méthodes désespérées reposant sur la violence aveugle au lieu de l’auto-organisation des masses et de leur action. La stratégie de violence aveugle et désespérée du Hamas n’offre pas d’issue. Sa violence s’exerce d’ailleurs aussi contre les masses palestiniennes : il y a peu, il a réprimé les manifestations à Gaza contre la crise énergétique et les prix élevés, tout comme l’Autorité palestinienne a réprimé en Cisjordanie les manifestations contre l’offensive israélienne à Gaza.

    En temps de guerre, les moyens semblent inépuisables. Ils donnent une idée de ce qui peut être utilisé pour assurer le bien-être de chaque personne dans la région avec l’expropriation des gigantesques profits de guerre et du secteur bancaire et leur prise en charge publique sous contrôle et gestion démocratiques.

    Pour une lutte contre le capitalisme et l’impérialisme

    Chez les Palestiniens, c’est actuellement le soutien au Hamas qui domine, inspiré par la volonté justifiée de résistance contre l’horreur de l’offensive israélienne. Chez les Israéliens, ce sont les appels à la vengeance pour le massacre du 7 octobre qui l’emportent. Ce fossé dans la conscience nécessite une approche sensible qui tienne compte des dommages et des traumatismes subis, offre une perspective de sécurité et de prospérité pour toutes les communautés et reconnaît et réalise le droit à l’autodétermination d’une manière acceptable et attractive pour les deux communautés.

    Il faut saisir toutes les occasions de briser le cycle de la haine et de la violence. Le Parti Socialiste de Lutte / Linkse Socialistische Partij (PSL/LSP) est la section belge d’Alternative Socialiste Internationale, qui comporte également une section en Palestine-Israël : le Mouvement de Lutte Socialiste. Nos membres sur place participent par exemple activement à la résistance sur les campus israéliens contre les tentatives de l’extrême droite d’expulser des universités celles et ceux qui expriment leur soutien aux Palestiniens. Comme toujours en situation de guerre, la cherté du coût de la vie augmente à vue d’œil, de même que les profits d’une petite clique de parasites capitalistes (grandes entreprises de l’armement, distribution, etc.) : cela assistera la compréhension des véritables mécanismes derrière cette logique d’occupation et de massacre.

    La classe ouvrière israélienne a un rôle important à jouer, qu’il est parfois difficile de comprendre aujourd’hui. La propagande de guerre et d’occupation est une pierre angulaire de la société de classe israélienne. Cette méthode de « diviser pour régner » sert à garantir les intérêts de la classe capitaliste et offre aux puissances impérialistes et aux multinationales le contrôle de la région.

    Par conséquent, la lutte pour l’émancipation palestinienne est également une lutte contre l’impérialisme, le capitalisme et la société de classe. La lutte pour les besoins sociaux des travailleuses et travailleurs peut arracher des conquêtes sociales dans le cadre du capitalisme, mais une transformation socialiste de la société est nécessaire pour élever le niveau de vie des masses palestiniennes et israéliennes au-dessus des meilleures conditions permises par la société d’exploitation capitaliste.

    Parvenir à l’unité dans la lutte pour une transformation socialiste exige de reconnaître le droit à l’autodétermination de tous les peuples. Ce n’est que sur cette base que l’on pourra obtenir une égalité totale des droits dans tous les domaines et que l’on pourra assurer une Palestine socialiste indépendante avec sa capitale à Jérusalem-Est et une transformation socialiste en Israël dans une confédération socialiste volontaire du Moyen-Orient, avec une garantie d’égalité des droits pour toutes les nations et minorités.

  • Gaza. « Il n’y ni pain, ni eau, ni électricité et les avions font pleuvoir la mort »

    Les habitants de la bande de Gaza vivent l’enfer sur terre, tandis que le massacre de la vengeance mené par le gouvernement Netanyahu-Ganz s’intensifie. Le poète, journaliste et activiste social Ahmed Abu Artema a été blessé dans le bombardement qui a également coûté la vie à son fils Abdullah, âgé de 12 ans, à ses deux frères et à sa belle-mère.

    Par Uri Bar-Shalom Agmon et Tuvaal Klein, Mouvement de lutte socialiste (ISA en Israël-Palestine)

    « Face au spectacle de la mort, s’occuper des nombreux détails de la vie semble insignifiant, même si, dans une situation normale, ils constituent une partie fondamentale de la vie à laquelle on ne peut renoncer. Il n’est pas possible d’obtenir du pain du tout. Je dis à mes enfants : peut-être qu’un biscuit est une bonne option pour l’instant, au lieu du pain, jusqu’à ce que nous voyions où en sont les choses. L’électricité est complètement coupée. Des sentiments étranges naissent en moi. Dois-je rester avec tous mes enfants au même endroit ? Si nous vivons, nous vivrons ensemble, et si nous mourons, nous mourrons ensemble… Quelle mort est préférable ? Que nous mourions tous ensemble ou que certains d’entre nous meurent et que d’autres restent en vie ? »

    C’est ainsi qu’Ahmed Abu Artema décrivait l’enfer sur terre qui se déroule à Gaza dans une vidéo publiée sur Al-Jazeera, quelques jours avant le bombardement qui l’a touché, lui et sa famille le week-end dernier.

    Les bombardements étaient  incessants. La poussière de destruction que l’armée israélienne a déchaînée sur Gaza dans une attaque sans précédent depuis les airs, la mer et la terre, n’est pas encore retombée. Le nombre de morts, de blessés et de déplacés est encore inconnu, notamment en raison de la coupure des réseaux Internet et de téléphonie mobile dans les minutes qui ont précédé l’attaque. Dans le même temps, nous avons été informés que quelques jours auparavant, les tirs avaient également fait de nombreuses victimes dans la famille d’Ahmed Abu Artema, qui a été grièvement blessé et dont cinq membres ont été tués, y compris son fils Abdullah, âgé de 12 ans.

    En coupant l’internet et les communications mobiles, l’armée israélienne a coupé les habitants de Gaza les uns des autres. Les familles n’avaient aucun moyen de connaître le sort de leurs proches, et ceux qui étaient ensevelis sous les décombres ne pouvaient pas contacter les forces de secours. Cette coupure est également une déconnexion du monde, des masses au Moyen-Orient, en Europe, aux États-Unis, en Afrique, une déconnexion de ceux qui, au cours des quatre dernières semaines, ont pris part à des protestations croissantes après avoir vu les rapports, les photos et les vidéos des horreurs déchaînées par le régime israélien dans son massacre de vengeance à Gaza. Jusqu’à présent, l’attaque sanglante contre les habitants de la bande de Gaza a coûté la vie à plus de 9200 personnes, dont plus de 3800 enfants. Plus de 2000 personnes sont portées disparues sous les ruines des bâtiments.

    Nous exprimons notre douleur et notre colère face aux tueries, aux destructions et aux pertes que le gouvernement Netanyahu-Ben Gvir-Ganz fait pleuvoir du ciel sur Ahmed et sa famille, et face aux bombes qui ont emporté les vies et les rêves de tant d’autres familles, dont certaines ont été complètement anéanties. Nous sommes solidaires des gens ordinaires de toutes les communautés, des deux côtés de la barrière, qui ont perdu des proches.

    Ahmed est un poète, journaliste et activiste, l’un des initiateurs des « marches du retour » en 2018. Des dizaines de milliers de personnes s’étaient alors héroïquement dirigées vers la clôture de la plus grande « prison à ciel ouvert » du monde, dont environ 70 % de la population est constituée de « 48 réfugiés et de leurs descendants ». Bien que la manifestation populaire ait été accueillie par des tirs de sniper qui ont tué environ 200 manifestants non armés et laissé des milliers de personnes handicapées, les protestations se sont poursuivies et ont refusé de s’éteindre pendant de nombreuses semaines.

    Dans une interview d’Ahmed que nous avons réalisée en 2018 au sujet des « marches du retour », il a déclaré qu’il y avait eu « une participation populaire sans précédent – hommes, femmes, adultes et personnes âgées – tout le monde est venu » et a ajouté : « Nous espérons et essayons de créer un mouvement civil démocratique pour l’égalité des droits pour tous les gens, pour tous les civils, sans discrimination. Et nous essayons de nous battre avec tous nos partenaires dans la lutte et toutes les personnes qui croient en la liberté, de toutes les nationalités – Palestiniens, Israéliens, et partout dans le monde – et nous sommes confiants que nous allons encore gagner cette bataille. » Pendant la guerre, dans une vidéo publiée le 11 octobre, Ahmed a cherché à transmettre un message au monde entier : « Restez du bon côté de l’histoire, soutenez les hommes et les femmes qui se battent pour leur liberté. »

    Nous n’avons pas de mots de réconfort. Juste une promesse. Nous nous engageons à poursuivre la lutte pour mettre fin à la guerre de vengeance brutale du capitalisme israélien, dont les bombardements provoquent un désastre effroyable et menacent de déclencher une guerre régionale encore plus catastrophique.

    Contrairement aux mensonges des médias de l’establishment, des ministres et des généraux israéliens, cette guerre sanglante n’est pas une « guerre défensive », mais une guerre pour la réorganisation du siège de Gaza, du régime d’occupation et de l’oppression nationale du peuple palestinien. Elle constitue également une menace sérieuse pour la sécurité des gens ordinaires en Israël et dans la région.

    Nous nous engageons à continuer à travailler pour stopper la guerre, pour renverser le régime d’occupation et de siège et pour mettre fin à l’oppression nationale des masses palestiniennes, dans le cadre de la construction d’une lutte, avec nos camarades ici et dans le monde entier, pour une vie reposant sur l’égalité, le bien-être et la paix véritable pour tous les travailleurs, les pauvres et les jeunes, de toutes les communautés nationales, dans le cadre du changement socialiste nécessaire dans la région.

  • Podcast “Marx, la lutte et nous” : L’horreur à Gaza, une analyse marxiste

    Le PSL vient de lancer un podcast “Marx, la lutte et nous” pour assister les discussions sur toute l’actualité du marxisme. Après un épisode “zéro” qui reprenait les prises de paroles de Geert Cool et Arne Lepoutre lors du meeting de rentrée des Etudiant.e.s de Gauche en Action (EGA) à Liège consacré à la lutte antifasciste en Flandre, le premier véritable épisode est dorénavant disponible. Il aborde l’offensive israélienne contre Gaza et plus globalement le conflit israélo-palestinien, en compagnie d’Eric Byl, membre de l’Exécutif international d’Alternative Socialiste Internationale.

  • La première Intifada (1987-1993) : une lutte des masses contre l’occupation israélienne

    Dans la nuit du 8 au 9 décembre 1987 un transporteur de chars israélien percutait un taxi qui attendait dans une file pour entrer à Gaza. Parmi les quatre morts, trois résidents d’un camp de réfugiés qui, comme 100.000 autres Palestiniens, étaient forcés d’effectuer le trajet quotidiennement pour aller bosser dans des emplois de misère en Israël. Le lendemain, un jeune manifestant fut abattu par les forces israéliennes. Le soulèvement allait faire tache d’huile.

    Par Christian (Louvain)

    Après les épurations ethniques de 1947 et 1967, l’occupation n’avait rien d’autre à offrir qu’exploitation, répression (200.000 Palestiniens étaient passés par les prisons israéliennes au cours des 20 années précédentes) et expansion inéluctable des colonies. Après des années de luttes intenses, la population avait appris à compter sur elle-même plutôt que sur des événements extérieurs ou sur l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) en exil. La stratégie de cette dernière consistait à gagner le soutien de régimes arabes afin notamment de lancer des offensives armées contre Israël (comme lors de la guerre des Six Jours en 1967 et de la guerre du Kippour en 1973). Elle était arrivée dans l’impasse.

    L’extrême jeunesse de la population palestinienne a joué un rôle d’accélérateur pour le mouvement : plus des deux tiers de celle-ci avaient moins de 24 ans. Cette jeunesse n’avait rien à perdre et ressentait moins le poids des défaites passées. La répression israélienne fut un autre accélérateur. Au cours de la première année seulement de l’Intifada, elle causa plus de 300 morts.

    Le rôle crucial de l’auto-organisation

    Si le soulèvement tout d’abord spontané a su à ce point persister dans la durée, ce fut grâce à la création de structures de pouvoir populaire. Un comité de coordination fut mis en place et, dès janvier 1988, des comités de lutte ont vu le jour. Ces comités étaient souvent le prolongement des organisations de bénévoles créées pour pallier diverses pénuries découlant de la colonisation. Ces comités constituaient un pôle d’attraction pour des gens souvent de gauche, des syndicalistes et des étudiants. Des comités de femmes ont non seulement organisé leur implication dans le soulèvement, mais ont aussi assuré qu’elles puissent jouer un rôle dans la direction de la lutte.

    Même si l’efficacité des comités populaires pouvait varier selon les domaines, il s’agissait d’importants symboles d’autogestion. Leur activité fut essentielle dans le ravitaillement des camps de réfugiés souvent placés en véritable état de siège. Sans surprise, l’État d’Israël a durement réprimé ces comités populaires. Quiconque y appartenait risquait 10 ans de prison.

    Les méthodes de lutte de masse et de grèves, voire d’émeutes, étaient au cœur du mouvement. L’image emblématique de l’époque reste celle de jeunes lanceurs des pierres affrontant les gaz lacrymogènes et les balles en caoutchouc ou réelles. Les comités insistaient sur la nécessité de garder les armes à feu hors des manifestations. L’État d’Israël fut ainsi incapable de déployer ses armes les plus modernes et destructrices. Le mouvement ouvrier joua un rôle considérable. Le 22 décembre 1987, une grève générale des travailleurs palestiniens en Israël a entraîné des centaines de milliers d’Arabes israéliens.

    Yasser Arafat a utilisé l’autorité de l’OLP pour s’assurer la tête de la lutte. Mais, durant longtemps, ce sont la rue et les comités populaires qui ont imposé leur agenda politique aux « dirigeants ». C’est ainsi que le roi de Jordanie abandonna ses prétentions territoriales sur la Cisjordanie et que l’OLP déclara la création d’un État palestinien en novembre 1988.

    L’OLP reprend la main… et trahit la lutte

    Cette rébellion de masse eut un impact non négligeable sur la société israélienne. Une partie croissante de la population vint à comprendre que l’occupation n’était pas une option viable. Les Israéliens étaient inspirés à soutenir les Palestiniens dans leur lutte. Plusieurs milliers de femmes palestiniennes et israéliennes ont par exemple manifesté ensemble en franchissant la frontière entre Jérusalem-Ouest et Jérusalem-Est. Dans l’armée israélienne, 1.500 soldats ont refusé de servir dans les Territoires occupés.

    Malgré son impact majeur, l’Intifada ne pouvait vaincre l’État israélien à elle seule seule. Un rapport de force international plus favorable était nécessaire. Si le mouvement palestinien avait pu s’allier à d’autres mouvements de la classe ouvrière à travers le Moyen-Orient pour renverser les régimes corrompus et dictatoriaux de la région, en affrontant ainsi également l’impérialisme et le capitalisme, la situation aurait été bien différente.

    Inexorablement isolé, le mouvement de contestation a connu un certain épuisement. À la répression s’ajoutait aussi l’impact économique pour les populations palestiniennes en raison des fermetures de commerces et des grèves. Avec le temps, les actes de désespoir et de terrorisme individuel ont pris plus de place.

    La direction de l’OLP a alors saisi l’occasion de reprendre la main. Réfugiée à Tunis, elle courait le risque d’être évincée par une nouvelle direction issue de l’auto-organisation des masses. Yasser Arafat a donc mené des négociations secrètes avec Israël qui ont abouti à la signature de l’accord d’Oslo en septembre 1993, prévoyant une autonomie limitée sur quelques parcelles de territoires occupés. Il a utilisé son immense autorité pour convaincre la direction intérieure de mettre fin au mouvement. Les comités populaires ont été remplacés par les fonctionnaires et la police : l’Autorité palestinienne était née. Dans les faits, elle devint la gérante du régime d’occupation tandis que le régime israélien multipliait les faits accomplis dans les territoires.

  • Tragédie à l’hôpital Al-Ahli de Gaza

    La catastrophe survenue à l’hôpital Al-Ahli Al-Ma’amadani, dans le centre de la ville de Gaza, est effroyable. L’explosion dans la cour de l’hôpital a eu lieu le mardi 17 octobre, alors que 5.000 personnes fuyant d’autres parties de la bande de Gaza y avaient trouvé refuge, avec un grand nombre de blessés, de secouristes et de personnel soignant. Au moment où nous écrivons ces lignes, on estime que 500 Palestiniens ont perdu la vie dans ce qui est l’événement le plus meurtrier dans la bande de Gaza depuis 2008.

    Par Michael Kurtzer et Yasha Marmer (Mouvement de lutte socialiste, section d’ASI en Israël-Palestine)

    Aucune partie indépendante n’a pour l’instant réussi à déterminer avec certitude la source directe de l’explosion dans la cour de l’hôpital. Le contexte est toutefois clair : la décision politique du gouvernement Netanyahu, Ben Gvir et Ganz, soutenue par l’état-major militaire, de lancer une offensive sans précédent contre Gaza couplée à un blocus désastreux.

    Netanyahou, son gouvernement et le chef de l’armée ont cyniquement rejeté toute responsabilité dans cette atrocité. Trois jours avant l’attaque de l’hôpital, l’armée israélienne a demandé au Croissant-Rouge palestinien d’évacuer l’hôpital Al-Quds dans la ville de Gaza. Cela indique clairement que les installations médicales de la bande de Gaza sont prises pour cible.

    Plusieurs versions « officielles » israéliennes de la catastrophe sont contradictoires. À tout le moins, le changement précipité de versions indique que des conclusions ont été tirées avant qu’une enquête approfondie n’ait eu lieu. Par ailleurs, un porte-parole de l’armée israélienne a admis que l’armée de l’air avait mené des attaques dans la région à peu près au moment de l’explosion. Le Washington Post fait état d’une vidéo où l’on entend un bourdonnement avant l’explosion, probablement celui d’un avion.

    L’enquête sur la catastrophe de l’hôpital doit être totalement indépendante du gouvernement Netanyahou, de l’armée et des services de sécurité israéliens, qui ont tous intérêt à se décharger de toute responsabilité. Ce fut le cas dans le passé lorsque des écoles ou des hôpitaux ont été bombardés, ou encore lorsque la journaliste Shireen Abu Akleh a été tuée à Jénine l’année dernière.

    L’une des méthodes utilisées pour nier toute responsabilité consiste à transformer les atrocités en événements isolés. Mais est-il possible de dissocier l’explosion de l’hôpital de la pluie de bombes sans précédent qui s’abat sur Gaza ?

    Le choc et l’horreur ressentis par les gens ordinaires en réponse au massacre de l’hôpital ont déjà conduit à des manifestations de solidarité à travers le Moyen-Orient et dans le monde. Le soir de l’attaque de l’hôpital, des manifestations spontanées impressionnantes ont eu lieu en Égypte, en Jordanie, en Turquie, en Libye, en Tunisie, au Maroc, au Liban et ailleurs.

    L’Autorité palestinienne, dirigée par le Fatah, a décrété une journée de deuil. Cependant, lors des manifestations de solidarité à Jénine et à Ramallah, des unités de police de l’Autorité palestinienne ont tiré sur les manifestants. Cela souligne une fois de plus le rôle de l’Autorité palestinienne en tant que sous-traitant de l’occupation. Lors de la manifestation de Ramallah, des slogans ont également été scandés contre Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne. Des manifestations de masse au Moyen-Orient et dans le monde entier, et des deux côtés de la ligne verte, pourraient contraindre le gouvernement Netanyahu-Ben Gvir-Ganz à mettre fin à la guerre de vengeance.

  • Israël-Palestine – «La vérité est l’une des premières victimes de la guerre»

    Entretien avec Ariel Gottlieb, membre du conseil exécutif de l’Union des journalistes en Israël, du Comité uni des journalistes de Ynet et de Yediot Ahronot, et membre du Mouvement de lutte socialiste (section d’ASI en Israël-Palestine).

    Le gouvernement de droite de Netanyahou, Ben-Gvir et Smotrich s’est lancé dans la persécution politique et la censure dès sa création. Avec l’éclatement de la guerre, cette tendance s’est accentuée sous le gouvernement élargi. Le ministre des communications, Shlomo Deri, a pris des mesures visant à emprisonner les «citoyens qui sapent le moral national». Parallèlement, Deri, en collaboration avec le procureur général du gouvernement, a pris des mesures pour fermer Al-Jazeera en Israël. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’une tentative visant à limiter et censurer les médias qui ne s’alignent pas sur la propagande du gouvernement concernant la guerre.

    Le soutien du gouvernement à l’extrême droite, en particulier en temps de guerre, se traduit par des persécutions publiques et des menaces à l’encontre des voix critiques face à la guerre, y compris les journalistes, qu’ils soient palestiniens ou pas. Le journaliste indépendant Israel Frey et sa famille ont par exemple été menacés d’agression physique. Les éditeurs en chef et propriétaires des grands médias, qui se font eux-mêmes l’écho du nationalisme et du soutien à la guerre, ne sont pas là pour protéger les journalistes des pressions croissantes et des menaces politiques qui pèsent sur certains d’entre eux. Le secteur est également confronté depuis quelques années à une précarité croissante de l’emploi – avec notamment des licenciements au sein du groupe “Yediot” – ce qui, en soi, ajoute à la pression exercée sur les journalistes pour qu’ils s’autocensurent. Nous avons besoin de puissantes organisations syndicales de journalistes pour lutter contre ces attaques.

    Nous nous sommes entretenus avec Ariel Gottlieb, membre du conseil exécutif de l’Union des journalistes en Israël (UJI), du Comité uni des journalistes de Ynet et de Yediot Ahronot, et membre du Mouvement de lutte socialiste (ASI en Israël/Palestine), au sujet de ces développements, du rôle des syndicats dans l’industrie pendant la guerre, ainsi que des licenciements au sein du groupe “Yediot”. Il s’exprime ici à titre personnel.

    Interview effectuée par Neta Most

    Les journalistes se retrouvent souvent en première ligne de la guerre. Nous savons également que certains journalistes avec lesquels vous travaillez ont été assassinés.

    Oui, un photographe de la rédaction d’Ynet, Roee Idan, et sa femme ont été assassinés au kibboutz de Kfar Aza le premier jour de la guerre. Sa petite fille n’a pas été retrouvée. D’autres journalistes ont risqué leur vie, en particulier au cours des premiers jours de la guerre, et d’autres travaillent simplement 24 heures sur 24.

    Quatre autres journalistes ont été tués le premier jour de la guerre lors de l’attaque du Hamas dans le sud. Depuis lors, 21 journalistes ont été tués à Gaza, soit plus que le nombre total de journalistes tués à Gaza depuis 2001. Un photographe de Reuters a également été tué dans un attentat à la bombe au Liban.

    Outre la menace physique immédiate, il règne aujourd’hui une atmosphère de chasse aux sorcières nationaliste sur les lieux de travail et dans les écoles, visant en particulier les travailleurs ou les étudiants arabo-palestiniens. Cette persécution est-elle ressentie dans le domaine du journalisme ?

    Même s’il n’y a pas d’attaque physique contre les journalistes, nous sommes confrontés à des actes d’intimidation et au harcèlement. Le gouvernement a intentionnellement créé une atmosphère publique qui rend très difficile le travail des journalistes et crée une tendance à la surveillance étroite pour s’assurer que les journalistes ne rapportent que la ligne officielle. Nous avons déjà vu ce genre de choses : lors des escalades de guerre passées et lors du mouvement de protestation de masse en Israël cette année. Mais bien sûr, cela se fait maintenant à un niveau beaucoup plus élevé.

    Les médias étrangers, en particulier les médias arabophones qui opèrent encore ici, sont les plus durement traités. L’UJI a envoyé une lettre au département des médias du gouvernement, qui est chargé de veiller à ce que les médias étrangers puissent faire leur travail, pour exiger qu’il protège leurs droits et les défende.

    La situation s’est fortement aggravée avec les tentatives du ministre des communications, M. Deri, de fermer la branche locale d’Al-Jazira.

    Je pense qu’il existe en outre une influence beaucoup plus large : les journalistes réfléchissent à deux fois à ce qu’ils écrivent, à ce qu’ils disent à l’antenne, une sorte d’autocensure qui découle de la reconnaissance de la nouvelle situation. Je suppose que les journalistes palestiniens en Israël ressentent cela beaucoup plus fortement, tout comme les journalistes juifs plus critiques à l’égard des intérêts du gouvernement israélien.

    Pour que les journalistes puissent rendre compte de la guerre de manière plus honnête, sans s’autocensurer, nous avons besoin d’une organisation syndicale forte dans le secteur, d’abord pour garantir l’emploi et les droits des journalistes et des autres travailleurs des médias et, dans ce contexte, défendre également l’environnement de travail des journalistes contre les pressions du gouvernement.

    Dans le cadre des menaces gouvernementales, les militants d’extrême droite menacent également la liberté de la presse. Entre autres, “La Familia” (supporters d’extrême droite du club de football Beitar Jerusalem) a organisé une “manifestation” dans la nuit du samedi 14 octobre, avec des feux d’artifice, devant le journaliste indépendant Israel Frey. Ce dernier a été contraint de fuir avec sa femme et ses enfants et de se cacher dans un endroit secret. L’UJI n’a pas encore commenté cette persécution ou celle d’autres journalistes. Ne s’agit-il pas d’une question sur laquelle l’Union devrait faire une déclaration ?

    Le syndicat n’a pas encore fait de déclaration, le bureau exécutif en discute et je fais partie de ceux qui ont soutenu la publication d’une déclaration publique. L’allégation selon laquelle M. Frey a été persécuté parce qu’il soutenait le Hamas est totalement inacceptable, il a simplement fait un commentaire empathique sur la tragédie à laquelle sont confrontés les enfants des deux camps.

    Il s’agit d’une situation très extrême, où même pour un tel commentaire, vous pouvez être menacé et subir des persécutions qui mettent votre vie en danger. Je pense absolument que nous avons besoin d’une déclaration claire de l’UJI sur ce cas spécifique, en particulier parce que cela constitue un dangereux précédent : Si nous n’essayons pas de protéger Frey maintenant, d’autres journalistes et leurs familles risquent d’être victimes d’agressions physiques de la part de militants d’extrême droite.

    Si le syndicat n’élabore pas de déclaration, comme ce fut le cas pour d’autres questions politiques controversées, nous pourrions alors élaborer une déclaration signée uniquement par certains membres du conseil exécutif afin de garantir qu’il y ait au moins une déclaration claire, même si ce n’est pas sous le nom officiel du syndicat. Il en va de même pour les bombardements israéliens de journalistes tués dans l’exercice de leur métier à Gaza et au Liban.

    Parallèlement aux différentes menaces qui pèsent sur le journal pendant cette guerre, la direction du groupe de presse “Yediot” poursuit-elle en dépit du conflit son plan de consolidation, qui comprend des coupes budgétaire et des licenciements ?

    Les travailleurs travaillent beaucoup plus dur aujourd’hui qu’avant la guerre, qu’il s’agisse des travailleurs en première ligne, des journalistes ou des remplaçants, tout le monde travaille beaucoup plus dur et doit faire de plus grands sacrifices. Mais la direction n’était pas disposée à prendre en compte tout cela, même au niveau le plus élémentaire, en disant “ok, nous ne poursuivrons pas le plan pour l’instant”.

    En fait, une partie du plan a déjà été mise en œuvre, parce qu’ils ont lancé un plan de prétendue auto-retraite. Je dis “prétendu” parce que les gens ne veulent pas partir, mais ils subissent des pressions et reçoivent des compensations insuffisantes.

    La direction a maintenu la pression lors des discussions avec les travailleurs. Elle a encouragé les gens à partir, même si cela n’en valait pas la peine. De nombreuses personnes sont parties ou sont sur le point de partir.

    La direction a programmé deux sessions de négociation avec le syndicat avant la guerre pour préparer les audiences de licenciement, puis nous leur avons demandé de suspendre ce processus jusqu’à ce que la situation soit clarifiée. Ils n’ont même pas accepté la suspension. Lorsque nous avons constaté qu’ils organisaient des auditions sur Zoom au lieu d’organiser des réunions en personne, nous avons fait savoir aux travailleurs que nous avions décidé de ne pas y participer.

    Vous avez dit précédemment que les attaques du gouvernement et de l’extrême droite nuisaient à l’environnement de travail des journalistes. En plus de la ligne officielle présentée par les grands médias et du phénomène des “médias enrôlés” qui déforment déjà ce qui se passe, les journalistes pratiquent l’autocensure, en particulier en temps de guerre et en ce qui concerne ce qui se passe “de l’autre côté de la barrière”.

    C’est exact. C’est vrai en ce qui concerne ce qui est présenté au public israélien et en ce qui concerne ce qui se passera si Al-Jazeera est fermée en Israël. Cela signifie que les téléspectateurs internationaux d’Al-Jazeera ne seront pas exposés à certains aspects de l’impact de la guerre sur la société israélienne. En tout état de cause, il s’agit d’une attaque contre la capacité à recevoir une image plus large et plus honnête des faits. Cela montre une fois de plus que la vérité est la première victime de la guerre.

    Il n’y a pas longtemps, les syndicats palestiniens ont publié une déclaration appelant à mettre fin aux bombardements israéliens sur Gaza, déclaration également signée par l’association des journalistes palestiniens. Un syndicat de journalistes étranger a-t-il contacté l’UJI à ce sujet ?

    Je n’ai pas connaissance d’une quelconque tentative d’approche. S’il y en a eu, ils se sont probablement adressés au président du syndicat, mais nous n’avons reçu aucun message. Quoi qu’il en soit, le développement d’une discussion et d’une collaboration entre l’UJI et d’autres syndicats, au niveau local et international, ne peut qu’être utile, surtout si le syndicat des journalistes palestiniens y est associé.

    Je suis tout à fait d’accord avec les appels à prendre position et à agir contre les attentats dans cette crise difficile. L’UJI a tendance à s’abstenir d’adopter une position officielle claire, même lorsque ses membres sont d’accord sur différentes questions politiques, par volonté de représenter tous les journalistes, y compris ceux qui ont des opinions plus à droite. Je pense que dans cette situation, nous devons trouver des moyens de fournir aux membres de base un moyen de discuter des questions politiques et d’exprimer leur opinion. J’ai dit la même chose à propos de la discussion au sein du syndicat concernant le récent mouvement social contre le “coup d’État judiciaire” du gouvernement.

    Le fait qu’il y ait des désaccords ou des opinions différentes n’est pas une raison pour éviter d’exprimer des opinions ou d’avoir une discussion. Au contraire, c’est précisément la raison pour laquelle il faut avoir cette discussion et former une position qui présente les intérêts des journalistes et des travailleurs en général, en ce qui concerne les questions politiques, telles que la question de la guerre, qui est une question cruciale pour les travailleurs qui vivent ici.

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