Category: International

  • Pays-Bas: “La coupe est pleine!”

    Aux Pays Bas, après des années de silence imposées par des négociations entre les partis politiques, les patrons et la direction syndicale, le célèbre modèle Polder, utilisé par la bourgeoisie pour maintenir la paix sociale au détriment des conditions de vie des salariés, a été définitivement enterré.

    Jan Van Emous

    Depuis le début des années 80, une modération salariale constante est prônée pour améliorer la compétitivité face aux pays voisins. Aux Pays Bas, les coûts salariaux seraient trop élevés. L’année dernière, le gouvernement Balkenende 2 mettait brutalement fin à ce modèle Polder.

    L’économie néerlandaise a souffert lourdement des récessions précédentes. La réponse du gouvernement a depuis prit la forme d’une attaque massive des acquis sociaux pour un montant historique de 17 milliards d’euros. L’indignation grandissante a mené en 2003 à une manifestation de 25.000 personnes à Amsterdam menée par le groupement de la gauche hollandaise "Renverser le courant". La direction syndicale n’avait cependant pas l’intention d’organiser la résistance puisque, pendant l’automne, elle négociait avec le gouvernement un ajournement de 2 milliards de réduction des dépenses en échange d’une nouvelle modération salariale globale. Pour 2004 et 2005, on n’a concédé aucune marge salariale en dépit des aspirations de la majorité des militants syndicaux.

    Offensive contre les acquis sociaux

    Depuis, le gouvernement a tiré la conclusion qu’il devait renforcer la pression. Au printemps 2004 et dans le budget 2005, on a encore proposé des économies pour 2 à 2,5 milliards d’euros. La situation se détériore sur tous les terrains sociaux: l’enseignement, les soins de santé, les allocations et les pensions font tous l’objet de mesures d’austérité. Les conditions de travail sont aussi dans le collimateur. L’allongement du temps de travail la semaine de 60 heures et la journée de 12 heures est à l’ordre du jour. On décourage fiscalement les prépensions pour les plus de 60 ans. On abolit les dispositions des conventions collectives qui limitent la concurrence salariale au sein d’un secteur.

    Ce printemps a vu la mise sur pied de la plate forme d’action "La coupe est pleine" à l’initiative de militants syndicaux du port de Rotterdam. Ce groupement, auquel participe aussi notre organisation soeur Offensief, a reçu beaucoup d’écho dans l’ensemble du pays. Ce succès pousse maintenant la direction syndicale à soutenir les actions contre le gouvernement afin de garder un pied dans le mouvement. Le gouvernement a clairement choisit d’entrer en confrontation avec le mouvement ouvrier organisé. Il espère sans doute que les syndicats soient incapables d’organiser une résistance digne de ce nom.

    Le premier jour de grève a drainé 60.000 manifestants dans les rues de Rotterdam: 3 fois plus que prévu. A Amsterdam, un jour de grève est organisé et une manifestation nationale est prévue pour le 2 octobre.

    Il faut la grève générale!

    La résistance peut facilement amener des centaines de milliers de personnes dans la rue car le gouvernement Balkenende ne recueille plus la confiance que de 20% des électeurs. Il reviendra aux militants de mettre en avant les bonnes tactiques et les bons slogans pour stopper les mesures d’économie.

    Offensief utilise le slogan: "Dehors le gouvernement!" avec comme sous titre: "Il faut la grève générale! Pas de compromis pourri avec le gouvernement. Le MAS/LSP enverra une délégation à la manifestation nationale du 2 octobre à Amsterdam.

  • L’insoluble conflit tchétchène dégénère en massacre dans une école

    Personne n’a oublié les images choquantes du dénouement sanglant de la prise d’otage de Beslan, début septembre dernier. 1.200 enfants, parents et enseignants étaient enfermés dans une école de la république russe d’Ossétie du Nord par un commando pro tchétchène. Les otages ont été privés d’eau et de nourriture par les ravisseurs qui portaient des ceintures d’explosifs. La prise d’otage a pris fin après quelques jours lorsque les troupes russes ont attaqué le bâtiment. 335 personnes sont mortes dans cet assaut dramatique, dont beaucoup restent encore à identifier. L’opinion publique mondiale et plus particulièrement russe en restera très longtemps choquée.

    Laurent Grandgaignage

    La manière brutale et chaotique employée par l’armée russe nous rappelle évidemment le tragique événement du théâtre de Moscou en 2002. A l’époque, il y eut 700 ou 800 otages d’une cinquantaine de Tchétchène lourdement armés. Les terroristes revendiquaient le retrait des troupes russes de Tchétchènie. L’armée réagit par des gaz toxiques, faisant plus de 120 victimes. Couplée aux récentes attaques contre deux avions et contre une station de métro à Moscou, le drame de Beslan ne peut que réaffirmer l’impasse du conflit tchétchène.

    La Tchétchènie opprimée depuis des siècles

    Le peuple tchétchène est depuis longtemps opprimé par des forces d’occupations étrangères. En 1830 le tsar Nicolas I envahit le pays. Ce n’est qu’après la Révolution russe de 1917 que le pays reçu le droit à l’autodétermination et, comme beaucoup d’autres républiques de la région, rejoignit librement l’Union soviétique.

    Après la contre-révolution stalinienne les nationalités furent à nouveau opprimées et en 1944 la plus grande partie du peuple tchétchène subit la déportation. En 1991 le pays devint indépendant, mais trois ans plus tard Boris Eltsine l’envahit. Face à la résistance, le pays finit par sombrer dans le chaos. La lutte entre différents seigneurs de guerre fit rage, parallèlement à l’extension de l’influence islamiste. En 2000 Poutine ordonna le rétablissement de l’ordre prorusse à Grozny et l’escalade de violence consécutive à la répression militaire a provoqué des centaines de milliers de victimes des deux côtés. En fait, la politique intérieure du président russe est essentiellement préventive: si une région revendiquant l’indépendance parvenait enfin à l’obtenir, d’autres régions risqueraient de s’engager dans la même voie.

    L’Occident se tait face à l’occupation russe

    Les décennies passées furent donc très dures pour le peuple tchétchène. La répression russe – villes détruites, massacres d’hommes, femmes et enfants – a créé le terreau sur lequel les mouvements réactionnaires et terroristes ont grandi. L’hypocrisie règne quand Poutine présente l’occupation comme une pièce de la stratégie de la "guerre contre le terrorisme international". Les puissances occidentales ne critiquent pas cette guerre car beaucoup d’entre-elles sont impliquées dans cette alliance antiterroriste. De plus, il est important pour l’Europe et l’Amérique du Nord de garder de bonnes relations avec la CEI qui possède un potentiel économique important. La région caucasienne est aujourd’hui très importante au point de vue de la production du pétrole et du gaz. La Russie est le premier exportateur de gaz naturel au monde et le deuxième exportateur de pétrole après l’Arabie Saoudite.

    Le capitalisme russe en déclin

    La colère du peuple russe face aux attaques terroristes n’est pas seulement dirigée contre les organisations pro Tchétchènes armées mais également contre le président Poutine. Beaucoup l’estiment responsable de la persistance du conflit tchétchène. Le peuple subit les conséquences de ces tensions ethniques et doit en plus endurer les effets de la politique néo libérale du président Poutine.

    Les récentes coupes dans la sécurité sociale ont plongé des dizaines de millions de travailleurs russes dans la misère. Depuis la réintégration du capitalisme, la pauvreté et l’inégalité n’a cessé de croître dans le pays. La "guerre contre le terrorisme" est habilement utilisée par Poutine pour détourner l’attention du mécontentement grandissant. En tant que marxistes, nous condamnons non seulement le terrorisme mais également la répression militaire de la Russie. Les marxistes ont pour tâche de construire un mouvement de masse qui uni travailleurs tchétchènes et russes en surmontant les différences nationales, ethniques et religieuses. Ce n’est qu’en luttant ensemble que l’on pourra enfin sortir de cette spirale de violence découlant de la crise capitaliste.

  • Irak: une résistance ouvrière s’organise

    L’AFFRONTEMENT DANS la ville sainte de Najaf entre le nouveau gouvernement intérimaire installé par les Américains et l’Armée du Mahdi, le mouvement du chef chiite intégriste Moqtadr Al Sadr, a fini par déboucher sur un accord provisoire qui soulage le gouvernement. Mais la situation de celui-ci reste toujours aussi délicate.

    Jean Peltier

    Les forces d’occupation ne contrôlent que de petites enclaves fortifiées et des points de passage stratégiques. Les attaques quotidiennes contre les pipelines perturbent gravement les exportations de pétrole. La reconstruction annoncée est un fiasco: le Congrès US a voté un crédit de 18 milliards de $ pour reconstruire l’Irak mais jusqu’ici seuls 600 millions ont été débloqués et ils ont essentiellement servis à tenter d’accroître la sécurité.

    La grande majorité des Irakiens veulent la fin de l’occupation américaine et n’accordent aucun crédit au nouveau premier ministre Allawi. Mais, face au pouvoir, la résistance est loin d’être homogène. Une première branche, établie dans la zone à dominante sunnite, est dirigée par d’anciens dignitaires et militaires du régime baathiste de Saddam Hussein. Une partie d’entre eux ne seraient sans doute pas opposés à chercher un accord avec Allawi. Ce qui inquiète fortement les dirigeants religieux de la majorité chiite qui craignent de se retrouver demain exclus du pouvoir comme ils l’étaient sous Saddam. Toutefois, si Moqtadr El Sadr jouit d’un grand prestige parmi la population des quartiers pauvres, il reste assez isolé parmi les responsables chiites dans sa stratégie d’affrontement ouverte avec les Américains. Mais d’autres chefs religieux pourraient basculer eux aussi dans l’opposition ouverte si Allawi tente de reconstruire un pouvoir autoritaire basé sur les sunnites.

    Loin de l’attention des médias se développe pourtant depuis un an une autre résistance qui a, elle, pour objectif premier de défendre les intérêts des travailleurs, des chômeurs et des femmes. Après deux guerres et dix ans d’embargo, l’industrie tourne au ralenti, les salaires sont très bas et souvent impayés, le chômage est massif, la sécurité sociale réduite à néant.

    Les autorités d’occupation n’ont rien fait pour améliorer cette situation et encore moins pour permettre aux travailleurs de s’organiser. Au contraire, elles ont commencé par durcir les lois antisyndicales instaurées en 1987 par le régime de Saddam Hussein! En septembre dernier, elles ont réduit les salaires payées aux travailleurs des services publics et supprimé les aides pour l’alimentation et le logement. Lorsqu’en octobre, elles ont tenté d’étendre ces mesures aux travailleurs du pétrole, ceux-ci ont créé un nouveau syndicat et sont partis en grève. Sous la menace de bloquer la production et de rejoindre la résistance armée, les travailleurs de la Southern Oil Company ont obtenu le retrait des mesures. Depuis lors, des grèves ont éclaté dans les ports et les stations électriques où, là aussi, les autorités ont dû faire marche arrière.

    Des dizaines de syndicats indépendants se sont formés non seulement dans le sud du pays mais aussi à Bagdad et les villes du centre et même au Kurdistan et une partie s’est regroupée récemment dans une Fédération des Syndicats et des Conseils Ouvriers d’Irak. Parallèlement, d’autres mouvements se sont formés. L’Union des Chômeurs a organisé des manifestations et des occupations de bâtiments publics pour exiger le paiement d’allocations et la création d’emplois et affirme organiser plus de 100.000 chômeurs. L’Union des Familles sans Toit réclame un programme de reconstruction rapide de logements. L’Organisation pour la Liberté des Femmes lutte contre la sharia (la loi islamique qui impose notamment un statut de soumission à la femme) que les religieux appliquent brutalement dans les zones qu’ils contrôlent mais que le gouvernement veut aussi généraliser.

    Toutes ces organisations, qui luttent à la fois contre l’occupation américaine et son gouvernement fantoche et pour défendre les droits des travailleurs et des femmes et refusent de s’aligner derrière les diverses milices saddamistes et intégristes, représentent le meilleur espoir pour le peuple irakien. C’est à elles que doit aller notre solidarité active.

  • Crise et révolte en Amérique latine

    FIN JUILLET, près de 350 camarades provenant de 14 pays se sont retrouvés lors de l’école d’été du CIO, parmi lesquels des camarades du Brésil et du Venezuela. La discussion sur l’Amérique latine, qui a pris toute une journée, était une des discussions les plus importantes.

    Tina De Greef

    Regimes en crise

    Tout le continent est en mouvement et en crise. La profondeur de celle-ci diffère selon les pays. L’industrie textile est presque intégralement délocalisée vers l’Inde et la Chine. Les Etats doivent rembourser des dettes colossales. Actuellement au Pérou, 35% du budget sert au remboursement de la dette. Les richesses naturelles de l’Amérique latine sont en grandes parties tombées entre les mains des capitalistes.

    Presque partout nous voyons les symptômes d’un régime en crise, parfois même avec des composantes pré révolutionnaires. Le Chili et le Pérou sont en ce moment les régimes les plus stables d’Amérique latine. Il y a cependant eu récemment deux grèves générales au Chili. Le gouvernement Fox au Mexique est sur une pente glissante. En Bolivie le président Sanchez de Losada a été chassé car il voulait vendre le gaz aux Etats-Unis. Carlos Mesa, son successeur, essaie quand même d’organiser cette vente, malgré la résistance des masses.

    A Haïti, le revenu moyen par personne de l’ensemble de la population est inférieur à un dollar par jour. Aristide – qui a une approche anti-impérialiste seulement en paroles – a dû s’exiler. Au Pérou, Toledo est pour le moment le dirigeant le moins populaire de toute l’Amérique latine. Il a dû faire face il y a quelques semaines à une manifestation de masse, malheureusement dirigée par Garcia le leader de l’opposition bourgeoise.

    La révolte au Venezuela reflète le refus de la politique néo-libérale menée au cours de la dernière décennie dans toute l’Amérique latine. Le chômage officiel est passé de 12% à 17%. La population pauvre se radicalise et place le populiste de gauche Hugo Chavez au pouvoir en 1998. Celui-ci va décider – sous la pression des masses – d’envoyer 3.500 médecins vers les gens qui n’en avaient encore jamais vus. La Constitution changea de sorte que les propriétaires terriens perdirent leurs terres et que le pétrole soit placé sous le contrôle des autorités publiques.

    Les supermarchés itinérants avec de la nourriture bon marché et une nouvelle entreprise nationale de télé-communications sont les récentes initiatives de Chavez. Pour faire ces concessions, Chavez dépend des prix élevés du pétrole. Pour le moment le Venezuela est le cinquième producteur de pétrole du monde avec 3,1 millions de barils par jour. Cette réforme politique n’est cependant pas tenable à long terme dans un cadre capitaliste. La bourgeoisie, qui a perdu partiellement le contrôle de l’appareil d’état, déteste Chavez car il est a prêt à céder sur de nombreux terrains sous la pression des masses. C’est une situation dangereuse pour l’impérialisme.

    Pour rencontrer fondamentalement les revendications des masses et pour élever leur niveau de vie il faut rompre avec le capitalisme. Contrairement au Chili et à d’autre pays du continent, le Venezuela n’a jamais connu de tradition socialiste ou communiste. Même Chavez ne saisit pas la chance pour mobiliser une véritable révolution socialiste: il veut installer un «capitalisme plus humain».

    Pas de réconciliation avec l’opposition de droite

    Chavez voudrait réconcilier la révolution et la contre-révolution. Il louvoie entre les deux: d’une part entre la pression des masses vénézuéliennes et d’autre part la bourgeoisie et l’impérialisme. Les tentatives pour une réconciliation avec l’opposition de droite vont démoraliser les masses. Seul un parti révolutionnaire – condition décisive pour une victoire révolutionnaire: le facteur subjectif – sera capable de mener les masses vers la révolution. Seul un changement total de la société, rompant avec le capitalisme, pourra mettre un terme à la crise et en finir avec le chômage et la pauvreté.

    Les masses expérimentent aujourd’hui un processus important d’auto-organisation: les comités populaires, et les Cercles bolivariens initiés par Chavez. Ces organes doivent s’élargir vers toutes les couches des opprimés, et se transformer en organes réels de la lutte des travailleurs.

    Des comités populaires dans les entreprises et les quartiers doivent se baser sur les principes de la démocratie ouvrière: éligibilité, révocabilité des élus, un salaire pour les élus qui ne dépasse pas le salaire moyen d’un ouvrier qualifié,…

    La population doit s’armer au travers de cette forme d’auto-organisation, pour se protéger contre de nouvelles tentatives de coup d’état ou de contre-révolution violente. L’armement en soi n’est cependant pas une garantie pour une victoire: il faut aussi un véritable programme socialiste. L’appel de Chavez pour «armer la population» sont des paroles en l’air. De ce fait et si aucun véritable parti révolutionnaire ne se développe, une contre-révolution ne peut être battue.

    L’armée au Venezuela est essentiellement composée de travailleurs qui reflètent clairement la pression de la société. Cette situation est quelque peu comparable avec celle de l’armée durant la révolution des oeillets au Portugal. Au Portugal, le Mouvement des Forces Armées trouvait dans son programme des éléments socialistes qui allaient beaucoup plus loin que le mouvement d’aujourd’hui au Venezuela.

    Un tel parti révolutionnaire pour amener les masses à la victoire, fait défaut aujourd’hui au Venezuela.Toutes les mesures positives entreprises par Chavez jusque maintenant ont été essentiellement mises en avant par le sommet du régime. Les Cercles bolivariens forment le point d’appui dans la société pour Chavez et son gouvernement, mais il y a souvent des tentatives pour les contrôler par le haut.

    Récemment il fallait élire un responsable dans un Cercle bolivarien. Le gouvernement a essayé de mettre en avant son candidat, ce qui a provoqué la protestations des travailleurs qui avaient leur propre candidat. Il y a une grande pression du bas pour une démocratisation de ces organes, où maintenant déjà une couche de la population est représentée.

    L’opposition perd le référendum

    La réaction de Chavez après le référendum de la mi-août – qui portait sur sa révocation – montre qu’il ne cesse de vouloir concilier le processus de révolution et la contre-révolution. Le résultat, après une participation massive, est maintenant connu: Chavez l’a emporté avec 58.25 % des voix (contre 41.74% des voix en faveur de sa révocation). L’opposition ne reconnaît pas sa défaite. Elle a lancé une enquête sur d’éventuelles fraudes électorales.

    Dès l’annonce du résultat, le prix du baril de pétrole à la bourse de New-York a baissé. En fait Bush ne peut intervenir dans l’immédiat. Le prix élevé du cours du pétrole et l’importance du Venezuela comme pays producteur de pétrole, couplé à la guerre en Irak oblige l’administration américaine à remettre à plus tard une intervention dans les affaires intérieures au Venezuela.

    Nouveau parti au Brésil

    Au Brésil le PT social-démocrate, dirigé par Lula, est au pouvoir. Lula, un ancien métallo devenu dirigeant syndical, est arrivé au pouvoir en promettant de donner de la terre aux paysans sans-terres. Juste après avoir été élu, il a fait vote-face. Il a notamment annoncé que les fonctionnaires devaient travailler 12 ans de plus pour toucher leur maigre pension. Le chômage a pris des proportions énormes et plus de gens ont faim qu’autrefois. Quatre parlementaires restés fidèles au programme originel de Lula ont été exclu du PT. Le gouvernement Lula marche sur les traces du précédent gouvernement, qui suivait la politique du FMI.

    Les 200.000 emplois pour les jeunes que Lula avait promis n’ont pas vu le jour. En outre Lula joue localement un rôle impérialiste. Il aide à mener la guerre en Irak pour se procurer une petite place au conseil des Nations-Unies.

    Récemment, en réaction à la politique droitière du PT, un nouveau parti a vu le jour: le PSoL (Parti pour le Socialisme et la Liberté). Notre section au Brésil participe à la construction du PSoL dont les perspectives de croissance sont indubitables. Seul le programme est sur pied. Il comprend de fort accents révolutionnaires mais aussi des éléments de politique de réformisme keynésien. Mais ce n’est pas suffisant: l’action est nécessaire. Le débat interne porte aussi sur les statuts: il y a des propositions pour qu’ils soient très démocratiques. L’impact potentiel d’un parti de masse des travailleurs comme le Psol est important pour toute l’Amérique Latine. A ce jour, 20.000 militants ont pris part aux assemblées locales pour la fondation de ce nouveau parti.

    Le combat entre révolution et contre-révolution aujourd’hui à l’oeuvre en Amérique latine est d’une importance capitale à l’échelle du monde.

  • Allemagne: Mobilisation contre le gouvernement et le patronat

    ALORS QU’ICI le Parti socialiste ne compte plus ses efforts pour garder son image «de gauche», en Allemagne, c’est le Parti Social-Démocrate (SPD) qui mène les attaques contre les travailleurs.

    Nicolas Croes

    Attaques, d’abord, contre les chômeurs. Car, dans le cadre de «l’agenda 2010», visant à rendre l’Allemagne plus compétitive, il est prévu de diminuer les indemnités de chômage. Dans certaines régions, à partir de janvier 2005, c’est presque 20% de la population qui devra se contenter de 345 euros, augmentés d’une aide minime pour le loyer. Les chômeurs ne pouvaient rester inactifs contre cette loi. Reprenant l’exemple des manifestations du lundi qui, en 1989, protestaient contre le régime stalinien d’Allemagne de l’Est, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues, cruel camouflet pour Schröder, maintenant comparé à un Honnecker…

    Bien loin de s’essouffler, ces mobilisations gagnent en intensité et l’on attend 2 millions de manifestants pour le 3 octobre. Ce sera nécessaire pour élargir la lutte des chômeurs vers les entreprises afin de créer une dynamique soutenue contre l’Agenda 2010. Il faut des actions de grève régionales et nationales, comme pas suivant dans la mobilisation, pour montrer la force de frappe des travailleurs et de leur famille, capable de bloquer la machine capitaliste.

    Il faut dire que les chômeurs ne sont pas seuls sur la sellette, puisque les pressions pour augmenter le temps de travail continuent. A l’origine prévue comme un «rempart contre la délocalisation», les 40 heures sont maintenant appliquées dans certains services publics régionaux allemands (on peut cependant difficilement imaginer comment délocaliser l’administration locale).

    Face aux chômeurs et aux travailleurs qui voient leurs conditions de vie et de travail diminuer de manière inqualifiable, la coalition rouge-verte au pouvoir proteste, s’indigne même. Non pas contre les patrons, premiers à mettre en avant l’austérité et derniers à en payer les frais, mais contre cette «hystérie» qui s’est emparée du précieux électorat allemand (la population est-elle encore considérées autrement?).

    Vers un nouveau parti des travailleurs?

    En effet, en plus des mobilisations, un nouveau parti se constitue à la gauche du SPD et de nombreux membres du parti du chancelier Schröder sont tentés, dégoûtés par la politique néo-libérale des sociaux-démocrates.

    Cette nouvelle formation issue de deux groupes («Alternative électorale» et «Initiative pour le Travail et la Justice sociale») dispose déjà de moyens importants: 3.000 membres, 70 sections locales,… et suscite un tel intérêt dans la population qu’il semble impossible pour le SPD et Shröder de remporter les prochaines élections.

    Jusqu’à présent cette nouvelle formation est peu radicale, mais cela montre qu’il existe un espace pour un nouveau parti des travailleurs. Mais il est possible que l’orientation politique change sous la pression de la base: qu’elle ne se limite pas aux revendications immédiates (maintien des allocations sociales, refus des privatisations, etc.) mais qu’elle mette à nu les causes véritables de la politique menée (la crise capitaliste). Notre organisation soeur Sozialistische Alternative Voran (SAV) participe à cette nouvelle initiative afin d’y développer une opposition révolutionnaire socialiste.

    Il est important de suivre les répercussions, dans notre pays, des événements d’Allemagne. La proposition du patronat de Marichal Ketin d’augmenter le nombre d’heures de travail sans augmentation de salaire ou le plan Vandenbroucke visant à diminuer le nombre de chômeurs montrent que l’offensive de la bourgeoisie touche également la Belgique. Nous assistons tous à des attaques en règles contre nos acquis, et si le Parti socialiste est encore fort en gueule, jamais des mesures concrètes n’ont étés proposées, et leurs quelques lamentations bruyantes n’auront offert d’emplois qu’aux journalistes.

  • Les consommateurs paient le prix de la politique de Bush

    Augmentation du prix des produits pétroliers

    LE PRIX du pétrole a commencé cet été à grimper à un rythme effréné. Ceci reflète la politique instable et la situation économique dans le monde. L’État belge percevra 60 à 65 millions d’euros de rentrées supplémentaires via les taxes sur les produits pétroliers.

    Bart Vandersteene

    Entre-temps, les multinationales pétrolières maximalisent leurs bénéfices: comparé à l’année 2003, ceux-ci ont augmenté de 35% pendant les six premiers mois de cette année. Exxon Mobile prévoit un bénéfice annuel de 25 milliards de dollars, ce qui équivaut aux bénéfices de toutes les entreprises belges mis en commun. Les cinq plus grosses multinationales pétrolières pourraient finir l’année 2004 avec un bénéfice total de 100 milliards de dollars. Quand on examine les prix de l’essence à la pompe et du mazout de chauffage, qui ont déjà grimpé de plus de 34% depuis le début de cette année (chiffres au 20/08), on se rend compte que c’est une fois de plus le consommateur qui paie la facture.

    On attribue souvent la montée du prix du pétrole à la forte croissance économique en Chine et aux USA mais, dernièrement, celle ci a commencé à ralentir. Cet explication pourrait conduire à une menace de déficit. En fait, la montée du prix du pétrole est surtout l’expression de la peur que la situation politique internationale ne mène à une rupture dans l’approvisionnement de pétrole.

    La production pétrolière est très fragile au Moyen Orient et surtout en Irak. L’intervention militaire dans ce pays avait pour but de placer à long terme l’approvisionnement pétrolier sous le contrôle direct des Etats Unis. La force de l’OPEP devait ainsi diminuer. Cependant, la production pétrolière en Irak est encore plus basse un an et demi après le début de la guerre qu’avant celle ci. Dans le nord du pays, l’exportation de pétrole est paralysée depuis des mois déjà et, dans le sud, les installations pétrolières sont de plus en plus fréquemment la cible d’attentats.

    En Arabie Saoudite aussi, la crainte d’attentats contre la production pétrolière est grande. En outre, il faut prendre en compte les problèmes liés au groupe pétrolier russe Youkos et l’instabilité politique au Nigéria et au Venezuela (ce dernier exporte chaque jour 3,1 millions de barils vers les USA, soit plus que l’Arabie Saoudite).

    La chaîne se brise toujours dans son maillon le plus faible. Concernant l’économie mondiale, ce maillon pourrait être en ce moment l’approvisionnement pétrolier. La montée du prix du pétrole pourrait freiner la consommation aux Etats Unis. Hors, une consommation privée était fondamentale ces dernières années pour reporter la crise. Un retard de la croissance aux Etats Unis pourrait entraîner le monde entier dans une longue dépression, une dépression qui démontrera la fragilité des arguments allant en faveur de la dernière reprise économique.

  • Jeux Olympiques. Médaille d’or pour le néo-libéralisme

    Jeux Olympiques

    LES JEUX OLYMPIQUES d’Athènes ont été marqués par l’empreinte de l’idéologie néo libérale qui se sert de cet événement comme d’une puissante machine de marketing, non sans conséquence pour les athlètes, les spectateurs et les travailleurs. Le budget de ces Jeux olympiques s’élève à plusieurs milliards d’euros dont 1,2 milliards sont réservés aux dispositifs de sécurité soit 5 fois plus que pour Sydney en 2000, transformant ainsi la capitale grecque en un véritable forteresse sous le contrôle de l’OTAN.

    Stéphan Delcros

    Il s’agit d’un coût exorbitant quand on connaît la situation de précarité dans laquelle vit une grande partie de la population. Les Roms ou Tziganes , très nombreux à Athènes et en particulier près de l’emplacement du village olympique, ont été "priés" de s’installer plus loin, à l’abri des regards." Il aurait en effet été fort gênant que les milliers de spectateurs et de sportifs remarquent que la Grèce préfère investir des millions dans l’installation d’un toit pour le stade olympique à l’architecture "tournée vers le XXIe siècle", plutôt que d’aider cette minorité à sortir de sa précarité sociale en commençant, par exemple, par leur offrir un logement décent pour remplacer leur taudis sans eau courante ni électricité. Il en va de même pour les mendiants, réfugiés et toxicomanes errants dans les parages des sites olympiques qui furent soit expédiés du champ de vue général, soit enfermés dans une nouvelle prison, construite pour l’occasion.

    L’hypocrisie ne s’arrête évidemment pas là. A la demande des responsables de la ville d’Athènes, la législation concernant la prostitution et le proxénétisme a été assouplie afin d’attirer les prostituées dans la capitale pour que les touristes et les athlètes puissent en disposer plus facilement. Il s’agit là d’une valorisation scandaleuse de l’exploitation de la femme à des fins capitalistes qui contraste clairement avec l’idéal de "pureté" proclamé par les organisateurs des Jeux olympiques d’Athènes.

    La "fête du sport" a également été ternie début août par la mort de 13 ouvriers sur les chantiers de construction. Subissant de nombreuses pressions pour terminer les travaux dans les délais, les ouvriers ont parfois dû travailler plus de 15 heures par jour, réduisant ainsi leur concentration et leur vigilance et augmentant les risques d’accident, parfois mortels.

    On ne peut parler des Jeux olympiques sans évoquer les fameux "dix commandements" dictés par les sponsors aux spectateurs. Il était par exemple interdit à ceux ci d’emporter leur propres boissons ou nourriture, certaines firmes multinationales comme Coca ou McDo ayant le monopole à l’intérieur des différents sites. Interdiction également de porter des vêtements de marques concurrentes ou même de faire une quelconque publicité pour des entre-prises ne sponsorisant pas les Jeux.

    Ce qui aura retenu l’attention lors de ces Jeux olympiques, ce sont les affaires de dopages avec notamment l’abandon pour non présentation à un contrôle antidopage des deux sprinters grecs Thanou et Kenteris, énormément appréciés dans leur pays. Marqué par l’idéologie individualiste, le sportif est devenu une "star", un exemple à suivre pour la jeunesse. Exploité par les sponsors, il est entraîné dans une spirale sans fin de recherche de la réussite à tout prix. Si l’on combine ceci à l’appât toujours plus grand du gain, nécessité également véhiculée par le système capitaliste, on comprend aisément pourquoi le sport actuel est souvent synonyme de dopage.

    Sous couvert de "trêve olympique" ou "d’amitié entre les peuples", les organisateurs des Jeux veulent lancer un message d’espoir, de paix et d’égalité entre tous. Le plus grand événement sportif de la planète n’est pourtant que le reflet de notre société et de la situation internationale économique et financière. L’idéologie néo libérale y est omniprésente et ce au détriment du sport en lui même, souvent relégué au second rang.

  • Algérie: le risque d’une explosion sociale?

    En Algérie, les tensions s’accumulent. Les grèves de l’automne dernier, la colère du peuple devant l’inaction de l’Etat pour reloger les victimes du tremblement de terre de Boumerdes, les émeutes quasi insurrectionnelles qui se multiplient dans de nombreux villages… en sont autant de démonstrations. Les classes dirigeantes sont très divisées comme l’a montré la scission du FLN entre les partisans de Benflis, ancien premier ministre, et ceux de Bouteflika.

    Alexandre Rouillard

    Le processus de restauration du capitalisme a été ralenti suite aux grèves dans de nombreux secteurs mais il a entraîné de nombreuses privatisations qui n’ont été évidemment profitables, que pour les anciens dirigeants. Ils essaient de se transformer au plus vite en capitalistes alors que le peuple vit toujours dans de mauvaises conditions. En 2003, l’Algérie a une croissance de 6,8%, mais le chômage officiel reste à 24%.

    Des milliards pour qui?

    En quatre ans de croissance continue, les dirigeants algériens ont largement permis que certains s’enrichissent sur le dos du peuple. La croissance ne repose en fait que sur deux secteurs: les hydrocarbures et l’agriculture, tous deux tournés avant tout vers les exportations. La balance commerciale est largement excédentarie (les exportations ayant rapporté 10 milliards d’euros de plus que les importations).

    Par contre, l’industrie et le bâtiment ont eu des croissances très faibles. Autrement dit, les milliards engragés ne vont ni directement à la grande masse des algériens ni même dans l’accomplissement de travaux publics ou le développement d’infrastructures et de services publics.

    Le début de restauration du capitalisme et l’accroissement de la production de gaz et de pétrole n’ont profité qu’aux mêmes: les dirigeants algériens et les nouveaux capitalistes. Tous accumulent des capitaux en attendant les prochaines privatisations. L’économie algérienne risque à tout moment une situation de rupture, ses capacités de production n’ayant pas été plus développées, sauf dans les hydrocarbures. Le risque de recourir de plus en plus aux importations peut en plus provoquer une vague d’inflation qui détruira les maigres augmentations de salaires gagnées l’an dernier.

    Comment réagir?

    Les grèves récentes dans les transports, les industries du pétrole etc. ont montré une réelle combativité des travailleurs algériens. Les émeutes dans de nombreux villages montrent que la colère contre les classes dirigeantes est loin d’être éteinte mais qu’elle cherche une voie.

    Le peuple algérien voit bien qu’une poignée s’enrichit sur le dos des travailleurs. Les acquis de la révolution algérienne qui avait, malgré la bureaucratie, assuré un certain niveau de vie et de développement, sont liquidés.

    Les partis qui ont participé à la presidentielle et les courants islamistes se battend en fait pour se partager le gâteau. Quant à la grande centrale syndicale, l’UGTA, elle avait accepté les privatisations, ne demandant que des aménagements en termes de "transparence" et c’est contre l’avis de sa direction que la base du syndicat a lutté.

    Le président Bouteflika a reconduit le même gouvernement qu’avant les élections. Les négociations continuent entre l’Algérie et l’OMC sur l’ouverture du marché algérien à la concurrence. Nul doute que le peuple algérien aura beaucoup à souffrir des nouvelles mesures qui risquent d’être prises. Bouteflika avait ralenti son programma de privatisations sous la pression des grèves, par crainte que les luttes ne s’étendent à toute la société. L’offensive du capitalisme va donc continuer et même se faire encore plus violente.

    Cette période va certainement voir une multiplication des luttes. C’est autour de celles ci contre les privatisations, pour de réelles infrastructures (routes, habitations, etc) que les travailleurs, les jeunes, les paysans pauvres etc peuvent se rassambler et avancer vers un nouveau parti. Ils devront alors se doter d’un programme de défense des intérêts des capitalistes algériens ou étrangers. Seule une organisation authentiquement socialiste de l’économie permettra que les énormes richesses de l’Algérie aillent réellement à l’ensemble de la population, pour la satisfaction de ses besoins, et mettre fin à l’exploitation capitaliste avec son cortège de misère, de chômage, de discriminations sexistes ou religieuses.

  • IRAK: Le fantôme du Vietnam revient hanter Bush

    Le 30 juin est la date retenue pour le passage symbolique du pouvoir en Irak à une nouvelle autorité. Ce changement sera évidemment de pure façade: une autorité non élue et choisie par l’occupant américain sera remplacé par une nouvelle autorité… non élue et choisie par l’occupant américain. Mais, demain comme hier , le pouvoir réel appartiendra toujours à l’armée américaine.

    Jean Peltier

    Car le fait le plus marquant de ces dernières semaines est la montée du nombre d’attaques contre l’armée US et surtout contre ceux qui collaborent avec elle. Les postes de recrutement pour la police et l’armée sont devenues les cibles quotidiennes des groupes de résistants, tandis que l’organisation liée à Al-Qaïda multiplie les enlèvements de militaires et de civils étrangers, de manière à faire monter la pression sur les gouvernements de ces pays pour qu’ils se retirent du pays.

    Quinze mois après le début de la guerre, le bilan est désastreux pour Bush. L’Irak devait devenir un « modèle » pour l’instauration de la démocratie « à l’américaine » au Moyen-Orient ; aujourd’hui, le pays est dans un état chaotique et le nouveau régime installé par l’armée américaine ne dispose d’aucune base populaire en dehors du Kurdistan. La chute de Saddam Hussein devait représenter un coup fatal au terrorisme ; l’Irak est devenu une base d’accueil pour les militants des mouvements intégristes radicaux de tout le monde musulman. La mainmise sur l’Irak devait assurer aux compagnies américaines le contrôle de l’appareil de production pétrolier et surtout des énormes réserves enfouies dans le sol du pays .

    Aujourd’hui, la production reprend à grand peine, les actes de sabotages dans les raffineries et les pipelines se multiplient et le cours du pétrole s’envole sur les marchés internationaux. Et, cerise sur le gâteau, la guerre devait assurer à Bush une réélection dans un fauteuil. Au lieu de quoi sa cote de popularité baisse avec régularité.

    Bush est maintenant confronté à un dilemme extrêmement douloureux. Soit il opte pour un gouvernement fantoche et une administration reconstruite et soumise aux USA. Mais, pour cela, vu l’impopularité énorme de l’occupation parmi la population et la multiplication des attentats, l’administration américaine sera obligée d’envoyer de plus en plus de troupes en Irak. Soit le gouvernement US essaie d’échapper à l’enlisement et retire peu à peu ses troupes d’Irak, laissant ses partisans se débrouiller sur place. Mais cela paraîtrait aux yeux du monde entier comme l’aveu d’un échec colossal…. avec le risque, en plus, de voir l’Irak basculer dans un chaos complet.

    Trente ans après, le fantôme du Vietnam revient hanter le pensionnaire de la Maison Blanche : soit l’enlisement pendant des années, soit le retrait sans gloire et lourd de conséquences, soit l’un puis l’autre !

    Mais, quoiqu’il arrive en Irak, un mythe s’est déjà effondré : celui de la superpuissance américaine que, depuis la chute du mur de Berlin et l’accélération de la mondialisation, rien ne pourrait plus arrêter. La résistance de la population irakienne, comme auparavant celle du Vietnam, montre les limites de la puissance US : elle peut, grâce à son énorme potentiel technologique et militaire, gagner sans trop de difficultés une guerre conventionnelle – surtout contre un régime dictatorial du Tiers- Monde. Mais elle ne peut imposer sa volonté face à la résistance massive d’un peuple.

    « Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage » (Jean Jaurès)

    Le vingtième siècle a été un siècle de guerres d’une ampleur jamais égalée jusque là : 10 millions de morts lors de la Première Guerre Mondiale, 55 millions lors de la Deuxième, 2 millions dans les guerres successives d’Indochine et du Vietnam et des dizaines de millions d’autres au cours de la centaine d’autres guerres locales ou régionales qui ont ravagé un grand nombre de pays depuis 1945.

    Certes, les guerres font partie de l’histoire de l’humanité depuis des millénaires mais le passage au capitalisme a donné une nouvelle ampleur à cellesci. Dès le 16e siècle, les premières bourgeoisies marchandes ont largement assis leur fortune sur la conquête du continent américain, qui a entraîné l’extermination d’une grande partie des populations indiennes d’Amérique, et sur la colonisation de l’Afrique, où le pillage des richesses s’est accompagné de la déportation de millions d’Africains vers les Amériques. Dans ce monde colonial, les grandes puissances européennes, l’Espagne, puis la France et la Grande-Bretagne, ont utilisé continuellement la guerre pour accroître leurs richesses et leur empire.

    Ces guerres de rapines et de pillages menées par les Etats ne diffèraient encore des anciennes guerres féodales que par leur ampleur. Mais il est un autre type de guerre plus propre au capitalisme qui va ensuite se développer : celle qui prolonge directement la concurrence économique entre les entreprises.

    Au cours des cent cinquante dernières années se sont constituées dans les pays économiquement les plus avancés de grandes entreprises ne visant plus seulement un marché national devenu trop étroit mais aussi une expansion internationale qui les pousse à l’affrontement avec leurs concurrents d’autres pays. Dans ce jeu, chaque Etat national exerce toute la pression dont il est capable – y compris au plan militaire – pour aider ses propres capitalistes à prendre l’avantage sur leurs rivaux étrangers. Aussi longtemps que l’économie est en expansion, la plupart des multinationales peuvent espérer réaliser des profits suffisants pour continuer à se développer. Mais quand une crise économique survient et s’approfondit, la concurrence économique devient une véritable guerre économique et la lutte pour la vie des capitalistes peut devenir une lutte pour la vie entre Etats, chacun disposant de moyens de destruction grandissants.

    Les deux grandes guerres mondiales ont été des guerres impérialistes, c’està- dire des conflits entre des alliances d’Etats capitalistes pour le contrôle des ressources et des marchés et pour la domination du monde. Par la suite, la grande majorité des guerres ont eu comme toile de fond les luttes entre les multinationales et leurs Etats pour s’emparer du contrôle de positions économiques et stratégiques décisives.

    Les deux guerres du Golfe avaient évidemment pour enjeu le contrôle du pétrole. Mais des guerres beaucoup plus locales n’échappent pas à cette logique. Ainsi, dans les multiples conflits qui ensanglantent l’Afrique, derrière les luttes entre chefs locaux pour le pouvoir se dessinent les manoeuvres des USA pour élargir leur emprise au détriment des anciennes puissances coloniales anglaises et françaises.

    La concurrence et la guerre sont inséparables et elles sont toutes deux au coeur même de l’existence du capitalisme. Ce n’est qu’en renversant ce système barbare et en construisant un système réellement socialiste – remplaçant la concurrence et la course effrénée au profit par une planification démocratique permettant d’orienter la production vers la satisfaction des besoins de la majorité de la population – que nous pourrons instaurer une véritable paix mondiale.

  • Élections européennes: une défaite pour l’establishment

    LES ELECTIONS européennes de juin ont gravement sanctionné Blair, Schröder, Berlusconi, Chirac , Verhofstadt et Co. La faible participation de l’électorat (en moyenne 42%) et le succès des formations résistant contre le projet de l’Union Européenne (UE) ou ayant un discours populiste en disent long sur l’engouement pour l’UE.

    Geert Cool

    Les résultats de nos camarades ailleurs en Europe

    Le MAS n’avait pas seulement des candidats en Belgique, ses organisations soeurs étaient présentes aux élections dans plusieurs pays : en Irlande, le Socialist Party a obtenu 5,5% des voix à Dublin pour les élections européennes. Ses forces était surtout mobilisées pour les communales où le nombre d’élus du Socialist Party a doublé de 2 à 4. Nous avons maintenant des conseillers communaux à Dublin et Cork.

    A Coventry St. Michaels, les marxistes ne devaient pas nécessairement se contenter d’un beau pourcentage après la virgule: le Socialist Party a obtenu 4,2% et a décroché deux élus. De bons résultats ont aussi été enregistrés ailleurs en Angleterre et au Pays de Galles.

    Enfin, 2,5% dans la ville Rostock a permis à notre organisation soeur allemande d’obtenir sa première élue communale. C’est un résultat significatif car Rostock fut, au début des années 90, le théâtre du spectaculaire incendie d’un centre d’asile provoqué par des groupements néo-nazis. Aujourd’hui, une véritable opposition est présente dans le conseil communal de Rostock.

    La quasi totalité des partis au gouvernement ont perdu des plumes : les sociaux-démocrates de Schröder récoltaient 21,5% des votes (jamais il n’ont fait si peu depuis 1932), le Labour Party de Blair n’était que le troisième parti (après les Tories et les Liberal- Democrats) aux élections communales et n’obtenait que 22% aux européennes (leur score le plus bas depuis 1918), l’UMP de Chirac faisait juste 17%…

    Pour une couche croissante de la population, il devient évident que l’UE est un instrument du capital, responsable des attaques sur les acquis sociaux et les conditions de travail: l’UE fait pression sur les états-membres pour progressivement supprimer les allocations de chômage, pour augmenter l’âge de la retraite, L’UE propose de libéraliser les services (via la directive Bolkestein, par exemple), ce qui va exercer ici une pression énorme sur les salaires et les conditions de travail. Rien d’étonnant à ce que l’enthousiasme pour l’UE soit si limité. Remarquons aussi que dans les nouveaux états-membres, la participation électorale était de 28%.

    La défaite de l’establishment ne peut être expliquée que partiellement par la politique de l’UE. L’élément le plus important est le dégoût général envers ces gouvernements sur le plan intérieur et/ou vis-à-vis du soutien pour la guerre en Irak : Blair et Berlusconi payent cher ce soutien à l’encontre de l’opinion publique ; les privatisations et les assainissements dégradant le niveau de vie sont aussi des éléments majeurs à la perte de confiance envers les instruments politiques de la bourgeoisie. Le plus grand problème lors des élections européennes était l’absence générale d’alternatives claires. Des formations populistes pouvaient donc facilement gagner du terrain. L’UK Independance Party (UKIP) d’un politicien raté Labour Kilroy-Silk (ayant échoué contre les socialistes de gauche dans le Labour Party à Liverpool et qui est ensuite devenu présentateur TV) obtenait un score spectaculaire de 16,7% pour les élections européennes. Faut-il le souligner ? L’UKIP n’a pas de membre et manque cruellement de sections dans des grandes parties de la Grande-Bretagne.

    D’autres scores remarquables ont été enregistrés pour des figures vues comme incorruptibles, comme Paul Van Buitenen (fonctionnaire de l’UE s’étant fait connaître en résistant à la corruption) avec sa liste "Europe Transparent" aux Pays-Bas qui a obtenu 7%. En Autriche, il existait une liste comparable. La montée rapide de telles formations est surtout l’expression d’un manque total de confiance envers les partis traditionnels. La défaite de ces derniers était d’ailleurs le message central des européennes.

    Ceci rend très concrète la question d’une alternative politique. Que va faire la gauche pour répondre aux couches de la population toujours plus larges qui se détournent de l’establishment politique ? Qu’il ne s’agisse pas d’une question facile est devenu clair en France, où l’alliance LO/LCR (deux formations avec lesquelles nous avons des divergences fondamentales) est retombée à 3,3%, perdant ainsi ses cinq parlementaires européens. Deux ans auparavant, lors des élections présidentielles LO et LCR obtenait ensemble 10,4%. N’ayant pas saisi les opportunités pour construire un puissant nouveau parti des travailleurs, LO/LCR s’est vu dans l’incapacité de créer une dynamique pour maintenir et améliorer son score.

    C’est un avertissement aux autres partis de gauches qui ont obtenu de bons résultats comme le Bloc de Gauche au Portugal, la Rifondazione Comunista en Italie et le SP aux Pays- Bas. La méfiance envers les partis traditionnels est flagrante. C’est positif en soi, mais il faut aller plus loin en développant une phase dans laquelle des parties importantes de la classe ouvrière s’engagent activement dans des mouvements de lutte pour défendre leur acquis sociaux.

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