Category: Europe

  • SOUTENONS LA GREVE GENERALE DES TRAVAILLEURS GRECS LE 5 MAI !

    Nous publions ci-dessous une déclaration signée par des députés européens du groupe GUE/NGL (Gauche Unie Européenne) au Parlement Européen. L’initiative de cette déclaration a été prise par Joe Higgins, eurodéputé du Socialist Party (CIO-Irlande). Douze eurodéputés (dont les noms suivent sous la déclaration) ont signé individuellement cette déclaration.

    "Grèce : le Parti de la Gauche Européenne répond positivement aux multiples propositions formulées par de nombreux militants grecs de l’immigration pour qu’ait lieu une manifestation de solidarité avec peuple grec le Mercredi 5 Mai à 13h a la place Luxembourg.

    "Le 5 mai sera une journée de mobilisation et de grève générale en Grèce contre le plan d’austérité draconien imposé par l’Union européenne et le FMI. Les nouvelles dispositions prévues signifient l’application de mesures socialement restrictives et économiquement dangereuses puisqu’elles conduisent au risque évident de récession sérieuse.

    "Il faut répondre positivement et vite à la demande de solidarité des mouvements grecs qui organisent cette journée du 5 mai. Nous sommes tous concernés. A peine sauvés par les États, les banques, les spéculateurs et les divers acteurs des marchés financiers s’en prennent maintenant au monde du travail. Ce n’est pas aux peuples de payer la crise !

    "Il est plus nécessaire que jamais de combattre la stratégie de Lisbonne, le pacte de stabilité et les règles de la Banque Centrale Européenne et toutes ces politiques européennes qui convergent pour imposer aux peuples l’austérité et la régression sociale au seul bénéfice des spéculateurs, des rentiers à la recherche du profit maximum.

    "Il est urgent de rassembler et de lutter pour de véritables politiques européennes de coopération budgétaire et fiscale au service d’objectifs sociaux, écologiques et pour le développement de l’emploi ; urgent d’imposer un contrôle strict et des taxations significa- tives des mouvements financiers ; urgent de mettre à contribution les revenus des ac- teurs financiers et des grands actionnaires dans le cadre de la création de pôles bancai- res publics coopérant à l’échelle européenne ; urgent de transformer profondément la Banque Centrale Européenne pour qu’elle devienne un outil au service des Etats de l’Union et de leurs peuples.

    "Pour toutes ces raisons, nous vous appelons à une concentration le Mercredi 5 mai, à 13h a la place Luxembourg.

    "Venez nombreux avec vos drapeaux et vos calicots !

    "Rassemblement pour la Grèce ce Mercredi 5 Mai, a 13h Place du Luxembourg !

    "Non aux spéculateurs !

    "Non à la stratégie de Lisbonne! Pour une Europe sociale ! Pour un contrôle strict des banquiers !"

    Signataires

    • Joe Higgins, Socialist Party (CWI in Ireland)
    • Nikolas Chountis, Syriza (Greece)
    • Rui Tavares, Left Bloc (Portugal)
    • Miguel Portas, Left Bloc (Portugal)
    • Marisa Matias, Left Bloc (Portugal)
    • Jurgen Klute, Die Linke (Germany)
    • Sabine Wils, Die Linke (Germany)
    • Sabine Losing, Die Linke (Germany)
    • Kyriacos Triantaphyllides, AKEL (Cyprus)
    • Willy Meyer, Izquierda Unida (Spain)
    • Eva Britt-Svennson, Left Party (Sweden)
    • Jean-Luc Melanchon, Parti de Gauche (France)
  • Italie: Les erreurs à gauche et la désillusion ouvrent la voie à la droite

    Les élections régionales italiennes des 28 et 29 mars 2010 ont déterminé l’équilibre du pouvoir pour les années à venir. La situation délicate rencontrée dans le pays a entraîné diverses forces sur le terrain politique, comme l’exprime le Peuple Violet, un mouvement d’opposition qui a pris naissance sur internet. Deux manifestations nationales ont pris place à Rome et une grève générale s’est également déroulée, mais il s’agissait bien plus de spectacle que de la construction d’une relation de forces.

    Article basé sur une analyse de Marco Veruggio (membre de ControCorrente et du CIO)

    Une donnée importante à mettre en relief est certainement l’augmentation des abstentions qui, ajoutées aux votes blancs et nuls, conduit très probablement à 40% des électeurs. Il est difficile de donner une lecture politique claire sur ce phénomène, mais nous ne pouvons qu’observer un fossé toujours plus grand entre le monde politique et celui de la vie concrète de la population. Nombreux sont ceux qui ont affirmé que l’abstention allait pénaliser la droite mais, en réalité – et encore une fois, comme en 2008 – elle a touché les plus grands partis de la gauche. Les 300.000 votes perdus par Rifondazione Communista (PRC) ont assurément été en bonne partie causés par cette abstention généralisée.

    Beaucoup d’encre a coulé pour analyser la soi-disant droitisation du pays en conséquence de la victoire de la Ligue du Nord. Mais les chiffres indiquent plutôt que le nombre de suffrages de la Ligue reste à un niveau identique que précédemment face à un recul pour les autres partis. Les deux blocs électoraux, droite et ‘‘gauche’’, confirment leurs poids réciproques obtenus lors des récentes élections politiques. Le Parti Démocrate (PD, créé en 2007 de la fusion de différentes organisations de ‘‘gauche’’) se confirme comme un parti essentiellement régional, entre la Toscane et l’Emilie-Romagne. Il ne touche ni le sud ni le nord du pays. Le Peuple de la Liberté (PDL, créé en 2009 autour de Berlusconi) essaie quant à lui de sortir de son enracinement territorial au Nord. Sa présence au Sud est instable et sûrement subordonnée aux accords avec les potentats plus ou moins criminels de ces régions.

    On peut également observer l’éternelle oscillation de la Gauche dans l’idée d’un nouvel ‘‘Arcobaleno’’ (Arc-en-ciel), du nom de la coalition électorale formée en 2007 entre le PRC et trois autres formations plus petites et au terme de deux ans de participation au gouvernement capitaliste de Romano Prodi pour le PRC. Le résultat de cette approche a été un laminage complet, la politique néolibérale du gouvernement Prodi avait désillusionné des millions de travailleurs et de jeunes et ouvert la voie au retour de Berlusconi. Reproduire la même tactique est absolument incompréhensible d’un point de vue politique et programmatique, et cela se révèle même dangereux sur le plan électoral.

    Au niveau national, il reste bien peu de chose. La tentation d’un raccourci qui additionne des pommes et des poires ou qui crée un énième désastre du type ‘‘Arcobaleno’’ doit être liquidée pour faire place à une vision plus réaliste des faits.

    Entre les travailleurs touchés par la crise économique et la logique du Capital, les travailleurs précaires, les étudiants qui ont lutté dans de petits et grands mouvements, ce n’est pas le potentiel qui manque pour appuyer et s’impliquer dans une formation qui serait le prolongement de leurs luttes. Cet objectif nécessite d’adopter une indépendance résolue contre les partis qui suivent la logique du néolibéralisme et de s’impliquer dans les luttes pour les généraliser et les développer.

    L’approche politique dont les travailleurs et les jeunes ont besoin en Italie est une approche fondée sur la lutte des classes, une approche marxiste, une approche qui est capable d’aiguiller avec patience les luttes d’aujourd’hui vers la construction d’un rapport de forces conséquent dans la société ainsi que d’une alternative anticapitaliste et socialiste.

  • Grèce: crise économique et révolte contre le bain de sang social

    La crise économique frappe la Grèce de manière très sévère. Le problème central de l’économie grecque est toujours le grand déficit budgétaire, ce qui signifie que le gouvernement grec doit emprunter aux banques pour satisfaire ses besoins. Selon l’Union Européenne, le déficit grec était de 13,4% du Produit Intérieur Brut en 2009. En conséquence, la crédibilité de l’économie a chuté!

    Dimitri Pantazopoulos (CIO-Grèce)

    La Grèce doit emprunter aux banques grecques et internationales avec un taux d’intérêt énorme (de l’ordre de 7 à 9%). Mais le déficit budgétaire s’accompagne de la dette nationale (la Grèce doit rembourser une dette de 50 milliards d’euros en 2010). En réalité, ce qui se passe, c’est que le gouvernement grec doit emprunter aux banques… pour payer les banques.

    Sous la pression de l’Union Européenne, le gouvernement a imposé jusqu’aujourd’hui 3 paquets d’austérités pour diminuer le déficit budgétaire à 8,6% du PIB pour la fin de l’année. Ces paquets comprennent:

    • Une diminution des salaires des fonctionnaires de 7%
    • L’augmentation de le TVA de 19% à 20%
    • Le gel des salaires et des retraites
    • La diminution de 30% des primes de Noël et d’été (connus en Grèce comme les 13e et 14e mois)
    • L’augmentation des impôts sur le carburant, l’alcool et le tabac

    Des recherches démontrent que toutes ces attaques ont diminué le niveau de vie des travailleurs de 10 à 15 %. Mais malgré ces mesures, la Grèce a eu besoin de demander l’activation du mécanisme de soutien de l’Union Européenne, du Fond Monétaire International et de la Banque Centrale Européenne. Il est clair que l’économie fait face à la faillite.

    Mais l’activation du mécanisme présuppose de nouvelles attaques contre la population grecque. L’Allemagne, l’UE et le FMI ont déjà demandé un programme de stabilité de 3 ans pour prêter de l’argent à la Grèce. Cela veut dire que les travailleurs devront encore payer pour rembourser les banques. L’UE et le FMI ont comme objectif d’assurer les intérêts des banques et non d’aider l’économie grecque. Dans le contexte du capitalisme globalisé, la Grèce ne peut pas devenir une économie compétitive, qu’importe le point auquel les salaires et le niveau de vie des travailleurs sont diminués. C’est le niveau technologique qui rend les produits d’un pays compétitifs, mais la Grèce n’a pas le niveau technologique des économies fortes comme l’Allemagne et les Etats-Unis.

    En ce qui concerne la disposition de la société civile à propos de ces mesures, on remarque de la rage contre les coupes, mais la société se sent faible et incapable de réagir efficacement. La démoralisation de la classe ouvrière se base sur le fait que la population reçoit une attaque par des forces (l’UE, le gouvernement, le FMI) qu’il semble impossibles de vaincre. En même temps, la direction syndicale et les partis de masse de la gauche n’ont ni propositions de lutte ni programme satisfaisant pour affronter la crise et les attaques.

    Les directions syndicales sont liées au PASOK (le parti social-démocrate qui est au pouvoir actuellement) et c’est pourquoi ils ne sont pas disposés à organiser la lutte des travailleurs. Même s’ils annoncent des grèves sous la pression de la disposition combative des travailleurs, ils ne les organisent pas de manière satisfaisante. La bureaucratie syndicale n’est pas capable de faire face à ses responsabilités.

    Mais en Grèce, aujourd’hui, la classe ouvrière ne peut pas trouver de sortie au niveau politique, car les partis de la gauche ne font elles non plus pas face à leurs responsabilités historiques.

    Actuellement, le mouvement ouvrier en Grèce n’a pas seulement besoin de grèves et de luttes en général, ou d’une résistance abstraite, il a besoin d’un programme radical et concret. Malheureusement, la gauche ne peut pas comprendre qu’au sein d’une situation pareille où la crise a exposé au grand jour les limites du capitalisme, on a besoin d’un programme qui doit être tout à fait contraire aux intérêts de la bourgeoisie. Ce programme doit être composé de revendications telles que:

    • Le refus de payer la dette nationale aux banques grecques et internationales
    • La nationalisation de banques sous la gestion démocratique et le contrôle des travailleurs
    • La nationalisation des secteurs-clés de l’économie (dont la majorité étaient publics avant d’être privatisés) sous la gestion démocratique et le contrôle des travailleurs
    • L’instauration de taxes drastiques sur les profits des entreprises (la taxation sur les profits est de 20% aujourd’hui contre 45% il y a 10-15 années)
    • L’arrêt du programmes d’équipement de l’armée, qui coûte 8 milliards d’euros chaque année
    • L’instauration de taxes drastiques sur les profits et les grandes propriétés foncières de l’église orthodoxe.

    Il est certain que l’application de ce programme ne peut pas donner de solution immédiate aux problèmes de l’économie grecque et que dans un premier temps, l’économie sera en récession. Mais il faut être clair et expliquer que l’économie grecque est déjà en récession (quelques économistes parlent d’une récession de 10% pour 2010) et que c’est seulement l’application de ce programme qui peut donner une solution favorable aux intérêts de la classe ouvrière et des pauvres.

    Un parti de gauche avec un programme pareil pourrait offrir de réelles perspectives pour la lutte de la classe ouvrière. Xekinima (CIO-Grèce) fait de son mieux pour que ce programme soit adopté par SYRIZA (une coalition de la gauche radicale) et par le mouvement ouvrier en Grèce.

  • Europe : Crise de la zone Euro, conflits inter-capitalistes et lutte des classes

    Le Bureau Européen du Comité pour une Internationale ouvrière (CIO), réuni du 13 au 15 avril, a discuté du potentiel d’explosions sociales, étant donne la crise actuelle, de l’instabilité sociale et politique et des tâches auxquelles font face les marxistes et la classe ouvrière. Nous publions ci-après la résolution émanant de cette réunion qui a rassemblé des représentants d’Autriche, de Belgique, de Chypre, de République Tchèque, de Grande Bretagne, de France, d’Allemagne, de Grèce, d’Islande, d’Irlande (Nord et Sud), d’Italie, de Pologne, du Portugal, de Russie, d’Écosse, de Suède, mais aussi des représentants issus de l’extérieur de l’Europe (du Pakistan et d’Israël).

    Rédigé par le Secrétariat International du CIO

    1. Depuis la réunion du Comité Exécutif International (CEI) en décembre 2009, l’analyse générale du CIO sur la situation mondiale et les évolutions de l’économie mondiale se sont avérées être exactes. Du matériel a été produit concernant la situation générale de l’économie mondiale ; il n’est pas nécessaire d’y revenir en détail dans ce bref communiqué. L’évolution de l’économie mondiale et de la situation politique constituent l’arrière plan de la crise à laquelle font face les classes dirigeantes en Europe, la pire qui a frappé la zone depuis que l’euro a été lancé. L’économie mondiale n’a connu qu’une “relance” très limitée, qui reste faible et fragile. Les énormes plans de relance mis en place en particulier aux USA, en Chine et en Europe ont eu un effet, dans le sens où ils ont pu empêcher un complet effondrement de l’économie mondiale, qui aurait pu se transformer en dépression. Pourtant, les plans de relance ont été limités et n’ont pas résolu la crise sous-jacente.

    2. La “reprise” n’a pas été suivie d’un retour à une croissance solide de “l’économie réelle” et menace de créer les conditions d’une “double chute” de l’économie mondiale. Les derniers chiffres publiés par les économistes renvoient à une augmentation de la “croissance” aux USA et en Europe, mais ne représentent pas une réelle augmentation des capacités de production ni ne ramènent la production au niveau qu’elle avait dans la période précédant le déclenchement de la crise. L’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) prévoit que le commerce international se développera à hauteur de 9.5% cette année. Mais même si cela se produisait, ce ne serait pas suffisant pour rattraper la chute de 12.2% du commerce international en 2009. La “reprise” qui a suivi les plans de relance dans différents pays s’est basée sur des schémas tels que la prime à la casse ou, par exemple, une réduction de la TVA en Grande Bretagne. Ces mesures n’ont été que temporaires et limitées, elles ne représentaient en aucun cas un retour à une croissance stable et durable. L’investissement continue de stagner ou de baisser. En février, le taux de chômage officiel de la zone Euro était de 10%. La croissance aujourd’hui vient en grande partie du fait que les entreprises reconstituent leurs stocks, et parallèlement à la création de nouvelles “bulles” du fait de l’injection massive de liquidités dans l’économie par l’Etat, particulièrement le secteur financier. La Chine et l’Allemagne ont été capables de renforcer leurs exportations dernièrement, mais la question cruciale à laquelle est confronté le capitalisme mondial est l’absence de demande et de nouveaux marchés. Dans le cas de l’Allemagne, la croissance des exportations a été réalisée au détriment de ses concurrents et sans réelle extension de son marché intérieur. Le FMI a revu à la baisse ses prévisions de croissance pour l’Allemagne pour 2010 de 1.5% à 1.2%, au regard de la faiblesse du secteur financier et du commerce international.

    3. Les quelques “exceptions” qui existent pour le capitalisme, comme la Chine, le Brésil et l’Inde dans une moindre mesure, peuvent toujours être frappés tardivement par la crise et se retrouver plongés en récession. La Chine, qui connait une bulle immobilière, pourrait voir une contraction de son économie, qui pourrait par ailleurs provoquer une explosion sociale que le régime ferait tout pour éviter. Même si l’économie mondiale peut retourner vers une période de croissance totale, ce qui sera inévitable à un certain stade, il est important de souligner que ce ne sera pas suffisant pour apporter une solution aux conséquences de la crise, aux privations et aux désastres sociaux auxquels est confrontée la masse de la population mondiale, ni à ses conséquences politiques.

    4. Jusqu’à présent, la conjoncture n’est donc pas une “reprise” au sens propre, mais plus largement une “reprise avec chômage” ; dans laquelle le chômage de masse persiste même en cas de croissance limitée. A l’échelle internationale, les classes dirigeantes cherchent toujours plus à détériorer les conditions de vie et de travail ainsi que les salaires. Ces trente dernières années, nous avons pu observer une phase de dépression sous-jacente, comme nous l’avons expliqué dans les derniers articles et documents publiés par le CIO. Cette tendance a toutefois été masquée par la croissance de la consommation basée sur une extension massive du crédit et sur toute une série de bulles spéculatives qui ont toutes explosé.

    5. Chaque crise du capitalisme contient en elle-même une période de croissance et de reprise partielle, qui conduira à un certain stade à une nouvelle crise, récession ou stagnation. Nous avons connu une série de crises en résultant, une tendance qui se développe toujours. Le déclenchement de la crise, il y a trois ans, représentait un gigantesque coup porté à l’idéologie capitaliste. Ceci a forcé les classes dirigeantes à répondre par une série de mesures de type “capitalisme d’État”, où l’État était obligé d’intervenir sur le marché pour le soutenir et le sauver. C’est une situation entièrement différente de celle qui existait après la seconde guerre mondiale, où l’on observait un développement de “l’économie mixte”. La bourgeoisie acceptait alors qu’une assez grande partie (bien que minoritaire) de l’économie soit sous contrôle d’un État interventionniste, accompagnée par la mise en place de réformes sociales radicales. Aujourd’hui, au contraire, les politiques interventionnistes et de nationalisation ont un caractère à court terme, et sont rapidement suivies de privatisations – accompagnées de contre-réformes et d’attaques brutales contre les conditions de vie et de travail.

    La crise de la zone Euro

    6. Jusqu’à maintenant, l’évolution la plus significative en Europe a été le drame qui a suivi l’explosion de la dette grecque. Les répercussions se sont senties à l’échelle internationale et elle a déclenché une crise majeure dans la zone Euro et l’Union Européenne. Cette crise a révélé les antagonismes nationaux conséquents qui existent entre la Grèce, l’Allemagne, la France ainsi que les autres puissances de l’UE.

    7. Cela a aussi révélé la faiblesse relative de l’euro et a remis en question sa viabilité future. L’incertitude que cela a provoqué représente un réel recul des classes dirigeantes européennes. L’Allemagne, afin de défendre ses intérêts nationaux, a refusé de renflouer la Grèce. La ligne de conduite très stricte adoptée par Angela Merkel reflète la peur de l’impérialisme allemand d’un sauvetage de la Grèce qui créerait un précédent au moment ou des crises se déchaînent notamment en Espagne et au Portugal. En faisant preuve d’une nouvelle vigueur menaçante, Merkel a déclaré que les pays qui plongeraient dans la crise pourraient se retrouver jetés en dehors de la zone Euro, ce qui reflète également la profonde crise des classes dirigeantes européennes. Par ailleurs, autoriser la Grèce à ne pas assurer sa dette pourrait déclencher non seulement une crise politique majeure, mais aussi une nouvelle tempête financière

    8. La réaction des autres puissances européennes (particulièrement la France) et le conflit qui s’est développé entre elles ont transformé la crise grecque en crise européenne, avec une immense pression exercée sur l’Allemagne afin qu’elle change de position. La décision d’inclure le FMI dans le sauvetage de la Grèce représente un coup au prestige des bourgeoisies de la zone Euro et de la BCE. Une des idées à la base de la création de cette dernière était la volonté d’établir un contre pouvoir face à l’impérialisme US et au FMI. Ces récentes évolutions, toutefois, sont bien loin des jours paisibles du triomphe du capitalisme européen au lancement de l’euro, quand existaient alors de fortes attentes quant à une croissance économique, un Euro fort et un chemin stable et harmonieux vers une plus grande intégration européenne. Certains ont même défendu que ce processus aboutirait à une disparition des antagonismes nationaux en Europe et à la fin des État bourgeois nationaux dans l’Union Européenne.

    9. Nous nous sommes opposés à ces illusions, qui, comme le CIO l’avait anticipé, se sont révélées totalement fausses, avec une augmentation des tensions interétatiques pendant la crise. Cela a dévoilé les obstacles à une réelle intégration européenne et une incapacité à dépasser les limites de l’État-nation et les intérêts nationaux des classes dirigeantes de chaque pays. Le degré d’intégration capitaliste à l’UE a probablement atteint ses limites pour cette période, avec un processus qui stagne voire se renverse.

    10. La crise de l’Euro ne veut pas simplement dire qu’il sera abandonné par les classes dirigeantes. Dans la crise à venir, il est plus probable que certains pays s’en retirent, suite à la forte pression que la monnaie exerce sur les gouvernements nationaux. La force des antagonismes nationaux, provoquée par l’insistance de l’Allemagne à défendre ses propres intérêts, s’est reflétée dans la référence faite au rôle de l’impérialisme allemand en Grèce pendant la seconde guerre mondiale. Cela a été repris par Sarkozy qui, selon Le Monde, disait à un ami que “[l’impérialisme allemand] n’avait pas changé.” Le conflit entre les intérêts français et allemands représente clairement un changement par rapport à la dernière période, où la France et l’Allemagne tendaient à agir en tant qu’alliés, au moins concernant l’UE. Parallèlement, cela laisse l’impérialisme français dans une situation précaire. La France souhaite éviter de devoir s’allier à l’impérialisme britannique ou US. Le capitalisme allemand a été en capacité d’exploiter les taux d’intérêts à son avantage, et a finalement pu obliger une France réticente à accepter qu’il impose sa position. L’Allemagne, malgré la croissance de ses exportations, est le moteur de la croissance européenne. Mais face à la crise, elle essaie de “rationner” le reste de l’Europe et exige la mise en place de plans d’austérité drastiques, en particulier de la part des économies européennes les plus faibles.

    11. Une campagne nationaliste féroce a été menée par la classe dirigeante allemande contre le peuple grec. De son côté, la classe dirigeante grecque a également essayé de stimuler le nationalisme en Grèce. Comme nous l’avions expliqué, cela indique qu’un sentiment nationaliste peut se développer et être encouragé par les classes dirigeantes européennes alors que la crise se développe. Il est important que nous contre-attaquions en menant la lutte pour l’unité des travailleurs. Les sections du CIO en Europe devraient entreprendre une campagne pour renforcer l’idée de la nécessité d’une lutte unifiée de tous les travailleurs contre les coupes et les attaques. A ce stade il est peut-être prématuré d’appeler à une grève générale de 24 heures dans toute l’Europe; mais l’idée d’une mobilisation européenne contre les coupes et les attaques sur les conditions de vie est quelque chose que nous devrions défendre énergiquement.

    12. La crise a été aussi dévastatrice pour l’Europe de l’Est et l’Europe centrale. Les espoirs soulevés par la restauration du capitalisme ne se sont pas matérialisés pour les masses. La chute désastreuse des économies dans des pays comme la Lituanie, la Lettonie et l’Estonie est comparable avec la période de grande dépression des années 1930. La Hongrie se débrouille un peu mieux actuellement. Même si la Pologne semble être l’exception, l’accumulation croissante de la dette publique, qui menace d’atteindre les 55% du PIB l’année prochaine, probablement pour grimper rapidement à 60%, sera l’occasion pour la classe dirigeante de procéder à des coupes et des attaques contre la classe ouvrière. Cela doit être pris en compte au regard de la catastrophe en Russie. Le chômage est probablement plus élevé qu’en 1994, quand la production s’est effondrée suite à la chute de l’URSS. Le régime commence à être divisé et une éruption sociale représente une perspective sérieuse dans une période relativement courte.

    13. L’émergence d’antagonismes nationaux en Europe alors que la crise se développe peut également se manifester dans la résurgence de la question nationale et des tensions dans des pays comme la Belgique et l’Espagne. En Irlande du Nord, l’impossibilité de résoudre la question nationale sous le capitalisme se reflète par une augmentation des conflits sectaires entre les différentes communautés, malgré la poursuite du “processus de paix” au sommet. Comme la crise a frappé l’Espagne très durement, la vague de luttes de la classe ouvrière s’est rapidement développée, parallèlement à une augmentation du sentiment régional et national en particulier, surtout au Pays Basque et en Catalogne. 40% des dépenses de l’État sont directement administrées par les régions et provinces. Ceci peut aussi devenir un point de discorde important et conduire à des conflits avec le gouvernement national. Le CIO doit défendre les droits nationaux des différents peuples en Espagne tout en se battant pour une confédération socialiste et l’unité de classe dans tout l’État espagnol.

    Le dénigrement des travailleurs grecs ; les “PIGS” et “STUPIID”

    14. La menace d’un défaut de paiement sur la Grèce rappelle en un sens la situation de l’Amérique Latine des années ‘80 – y compris la revendication de l’annulation de la dette mise en avant par la section grecque du CIO! Aussi importante et significative que soit la crise grecque, ce n’est encore qu’une anticipation de ce qu’il se passera au Portugal et surtout en Espagne. Avec un taux de chômage de près de 20% – approchant les 40% dans la jeunesse, la question d’une révolte au moins aussi forte qu’en Grèce se pose en Espagne. Les effets et la profondeur de la crise aux échelles internationale et européenne ne sont pas uniformes. Globalement, une dépression a été évitée pour le moment. Mais l’Espagne, le Portugal, l’Irlande et la Grèce ont été dévastés par la profondeur de la crise et montrent des éléments de dépression comparables aux années 1930. L’économie de la République d’Irlande continue de se contracter. Ces pays, sous l’acronyme désobligeant de “PIGS”, sont maintenant élargis et compris dans les “STUPIIDS” (Espagne, Turquie, Grande Bretagne, Portugal, Irlande, Islande et Dubaï)!

    Conséquences sociales et politiques

    15. Pour le CIO et ses sections, les conséquences sociales et politiques et leurs effets sur la lutte des classes sont les questions décisives qui se posent lors de cette crise. Les questions des perspectives et des tâches n’ont jamais été aussi liées l’une à l’autre. L’impact de la crise sur la lutte des classes ne s’est pas encore entièrement fait ressentir. Pourtant, d’importants mouvements de masse ont explosé dans différents pays européens, particulièrement en Grèce, en Espagne et au Portugal. Dans d’autres pays, les luttes de la classe ouvrière auraient pu aller beaucoup plus loin sans le rôle de capitulation des directions syndicales en général, qui ont tendu à représenter les intérêts et la pression des patrons plutôt que de défendre la classe ouvrière. Ceci doit être ajouté à la question cruciale du niveau de conscience politique actuellement bas dans la classe ouvrière, hérité de la dernière période ; en prenant aussi en compte l’absence d’une force combative se battant pour une alternative socialiste à une échelle de masse. La faillite des directions ouvrières traditionnelles pour offrir une telle alternative a empêché le développement d’une conscience politique parmi la jeunesse et les travailleurs. Ces faiblesses signifient que la crise aura un caractère complexe et étalé dans le temps. Pourtant, des explosions sociales massives ont déjà eu lieu dans certains pays et vont se développer à travers l’Europe. Les mouvements qui ont déjà eu lieu ne sont qu’une anticipation de ce qu’il reste à venir. Des luttes industrielles et politiques se dérouleront, qui pourront permettre une croissance quantitative rapide des différentes sections du CIO ainsi que de leur influence, pour autant que nous intervenions avec les bons slogans, les bonnes tactiques et une explication générale de notre propagande socialiste. Ce ne sera pourtant pas un processus linéaire ni automatique. Le rythme de la lutte et le développement de la conscience politique seront variables d’un pays à l’autre.

    16. En plus de cette crise économique et sociale, il ne faut pas oublier la crise environnementale et le réchauffement climatique. La déclaration adoptée au CEI reste toujours autant valable. Les conséquences du réchauffement doivent être prises en compte dans nos perspectives économiques et politiques. Cela devient un souci croissant parmi la classe ouvrière alors que de plus en plus de travailleurs et de pauvres en ressentent les conséquences, même en Europe. Les mouvements en Espagne (Andalousie) concernant l’approvisionnement en eau en sont un exemple. Une frange de la bourgeoisie a mis en avant la perspective de nouvelles “éco-industries” comme solution à la crise. Cela dit, il est hautement improbable que cela puisse offrir une sortie de crise à court terme, ou de nouveaux marchés pour la bourgeoisie.

    Les luttes ouvrières et les syndicats

    17. Malgré les contradictions dans la conscience politique qui existent dans de larges couches de la classe ouvrière et de la jeunesse, ce serait une erreur de sous-estimer l’amertume sous-sous-jacente et la colère qui sont déjà présentes. En général, cela n’est pas représenté par les directions officielles des syndicats ou dans leurs structures.

    18. Il y a déjà eu des mouvements ouvriers significatifs dans de nombreux pays en réponse à la crise et aux attaques contre la classe ouvrière. En règle générale, ils ont eu un caractère défensif. En Irlande, au premier semestre de 2009, d’importantes grèves et mouvements de protestation des travailleurs se sont développés. En Grèce, les grèves du secteur public et trois grèves générales massives montrent comment la classe ouvrière a été poussée à la lutte par des attaques si brutales. Au Portugal, les grèves du public et la menace d’une grève générale illustrent à quel point la situation des travailleurs est désespérée. Les énormes manifestations en Espagne et la masse de travailleurs qui soutenaient la revendication d’une grève générale ont terrifié non seulement la classe dirigeante espagnole mais aussi celles du reste de l’Europe. Même si la Turquie n’est pas entièrement située en Europe d’un point de vue géographique, du point de vue social et politique, elle devient de plus en plus intégrée aux discussions sur l’Europe. La formidable grève à TEKEL représente un changement crucial dans la situation.

    19. L’Espagne, avec une plus grande économie et une classe ouvrière plus grande que la Grèce, peut se retrouver au centre de la crise européenne dans la prochaine période. La peur d’une telle explosion a forcé le gouvernement à retirer certaines de ses propositions concernant le recul de l’âge du départ à la retraite qui avaient provoqué l’outrage parmi les masses. Des éléments de situation prérévolutionnaire étaient présents au point culminant du mouvement en Grèce. La faillite de la direction traditionnelle du mouvement ouvrier pour offrir une alternative, le faible niveau de conscience politique et d’auto-organisation ont représenté les principaux obstacles. Pourtant, les masses sont plus radicalisées et plus à gauche que leur direction. Des explosions sociales telles que celles que nous avons vues en Grèce peuvent éclater dans une série de pays européens et pourraient aller encore plus loin qu’en Grèce à ce stade, particulièrement en Europe du sud. Les événements en Grèce ont montré des éléments de situation prérévolutionnaire qui peuvent également se développer dans une série de pays européens dans les prochains mois et années Cette nouvelle période sera plus complexe et longue précisément à cause de l’absence d’organisations ouvrières de masse.

    20. En Grande Bretagne, après les luttes de l’année dernière a Lindsey, Linamar, Vestas, chez les postiers…, 2010 a vu une série de grèves nationales des travailleurs de British Airways, des fonctionnaires du gouvernement et probablement des cheminots, qui montrent qu’une nouvelle situation se développe. La France a également été témoin de la grève nationale du 23 mars. En Belgique, des grèves initiées par la base ont aussi eu lieu.

    21. Ces mouvements, entre autres, ont eu lieu malgré les directions syndicales qui ont été terrifiées par la crise et ont cherché à jouer un rôle d’”arbitres” plutôt que de défenseurs de la classe ouvrière. En France, en Allemagne, en Italie, en Irlande, en Espagne et en Suède, plutôt que de combattre le gouvernement, elles ont cherché à rétablir un “dialogue social” et des “contrats sociaux” et ont évité d’appeler à des journées d’action nationales. Ils se sont exprimés en faveur de coupes salariales pour sauver l’emploi et ont joué les “arbitres” entre les patrons et la classe ouvrière. Quand les directions syndicales ont appelé à des journées de mobilisation, c’était généralement une manière de faire relâcher la pression plutôt que de chercher à conduire une vraie lutte. La combativité de certains travailleurs a été reflétée en Irlande avec les 83% de travailleurs du CPSU (syndicat d’employés gouvernementaux) votant pour entrer en mouvement. Un vote similaire s’est aussi produit chez les travailleurs de British Airways.

    La grève générale

    22. En Italie, malgré une vague d’opposition croissante à Berlusconi, démontrée par les manifestations massives à Rome et à Milan, la CGIL (Confédération Générale Italienne du Travail) n’était préparée qu’à appeler à une grève générale de 4 heures. Comme nous l’avons déjà soulevé, la question de la grève générale est présente de manière objective à travers l’Europe. Nous devons nous assurer que cette question est bien présente dans notre propagande et, si c’est approprié, la mettre en avant comme l’un de nos principaux slogans. Dans des pays comme la Grèce, où une série de grèves générales a été annoncée mais n’a pas été appelée avec un programme d’action clair et une alternative politique, nous devons aller plus loin avec la revendication d’une grève générale de 24 ou 48 heures. Si cela ne force pas le gouvernement à reculer, la question d’actions plus décisives et de plus longue durée pourra être posée – y compris une grève illimitée

    23. La grève générale, sous une forme ou une autre, est une question importante qui se pose objectivement à la classe ouvrière et au CIO dans la plupart des pays d’Europe. C’est une partie de notre programme. A différents moments, selon la situation concrète, nous devons la mettre en avant comme notre principal slogan et principal axe de propagande. Pourtant, c’est plus complexe maintenant que dans le passé, à cause du caractère des directions syndicales et du plus faible niveau de conscience dans la classe ouvrière. Les grèves générales ou les grèves générales partielles qui ont eu lieu dernièrement ont eu un rôle protestataire comparable aux grèves générales de protestation qui ont eu lieu avant la première guerre mondiale dans certains pays européens. Une grève générale illimitée posera inévitablement la question du pouvoir. Mais à ce stade, la conscience politique de la classe ouvrière est en décalage par rapport aux tâches qui lui incombent. Des actions supplémentaires, peut être sur une période plus longue que 24 ou 48 heures, et l’élection de comités d’action, constituent aussi une question dont nous devons nous saisir là où c’est opportun. C’est ce qu’ont fait les camarades grecs, en reliant cette question à la nécessité pour la classe ouvrière de revendiquer que Syriza et le KKE se battent vraiment contre la crise ainsi que pour le socialisme et la démocratie ouvrière.

    24. Les propositions concrètes et spécifiques que nous faisons quand nous intervenons dans les luttes ouvrières – comment les organiser, quelles actions devraient être entreprises – sont particulièrement importantes dans cette période a cause du manque d’expérience de lutte de la nouvelle génération de travailleurs. Des propositions d’actions et d’initiatives faites en temps opportun peuvent énormément augmenter notre influence et notre réputation ainsi que nous distinguer d’autres groupes opportunistes et d’ultra gauche.

    25. La question de l’équilibre entre notre intervention dans les structures syndicales officielles et nos propositions, là où c’est opportun, pour la formation de comités officieux d’action démocratiquement élus, est particulièrement importante, et a été renforcée par la période de crise. La baisse du nombre de syndiqués en Europe, particulièrement chez les jeunes, et le rôle des bureaucraties syndicales lui donnent une importance de premier ordre. Le nombre croissant de jeunes qui ont un travail en CDD ou intérim sans contrat stable est aussi une question qu’il nous faut traiter.

    26. Les mouvements ouvriers qui ont eu lieu ne représentent pourtant que la première réaction face à l’impact de la crise. Il y a également eu différentes phases dans le développement de la conscience politique et des perspectives pour les travailleurs. Dans un premier temps, il y a eu une certaine radicalisation, suivie d’une explosion de colère et d’un sentiment anti-banquiers et anti-riches dans certains pays – comme la Grèce pendant un temps et l’Irlande – ainsi qu’un certain choc voire un effet paralysant au regard de la profondeur de la crise. “Que pouvons-nous faire sinon accepter de nous serrer la ceinture ? ” En d’autres termes, il y a eu un espoir que la crise et ses conséquences ne seraient qu’un problème à court terme ; suivi d’une certaine attente que les plans de relance résoudraient le problème et que “la vie retournerait a la normale”.

    27. En Irlande, la lâcheté des directions syndicales a aggravé le problème de la conscience politique et de la confiance de la classe ouvrière. Après plus de vingt ans de croissance économique, la classe ouvrière fait face à un tsunami économique. Une acceptation amère, réticente, que les coupes sont “inévitables”, qu’il n’y a “pas d’alternative” face a un tel effondrement économique, et l’absence d’une alternative de masse a jusqu’à pressent empêché qu’un mouvement de masse se développe à partir de la base. Bien sûr, nous cherchons à contrer cela, mais notre voix est pour l’instant trop limitée pour changer les perspectives à une échelle de masse. Pourtant, cela peut rapidement changer et ouvrir la voie a une énorme explosion sociale.

    28. Il est important de comprendre ces différents états d’esprit pour adapter notre propagande, nos analyses et nos perspectives. Mais il est tout aussi important de comprendre qu’une telle ambiance d’acceptation réticente est temporaire et peut changer très rapidement et de maniéré très radicale. Parfois, un tel changement peut être occasionné par une attaque relativement mineure, suivie d’une série de mesures plus dures.

    Absence d’une alternative socialiste forte et conséquences

    29. L’absence d’une puissante alternative socialiste clairement définie et d’une telle conscience est le principal obstacle qui existe à la mobilisation des masses pour un tournant socialiste dans la situation actuelle. La bourgeoisie peut s’estimer heureuse qu’à ce stade elle n’ait même pas encore été confrontée a une puissante force réformiste de gauche ou même centriste enracinée dans la classe ouvrière, comme il a pu exister dans le passé. Le manque d’une alternative socialiste de masse se reflète dans un fort taux d’abstention aux élections dans toute une série de pays en Europe.

    30. Actuellement, il n’y a guère de gouvernement qui soit considéré comme stable en Europe. L’instabilité de la situation peut notamment se refléter dans les accrochages entre les ministres de la CDU, la CSU et la FDP dans le gouvernement Merkel. En Italie, la résurgence de l’opposition a Berlusconi et la chute de son taux d’approbation en sont d’autres preuves ; même si la perspective de la chute du centre-droit aux élections régionales ne s’est pas réalisée. La classe dirigeante italienne est visiblement inquiète à propos de Berlusconi. L’existence d’une puissante force de gauche dans la plupart des pays aurait tout simplement balayé les partis au pouvoir ou les gouvernements en place. Face à cela, la situation a été marquée par l’émergence du “moindre mal” dans beaucoup de pays européens. Comme nous l’avions souligné dans le document issu du CEI, cela s’est reflété en Grèce pendant un temps avec la réélection du PASOK. Les élections régionales en France l’ont aussi montré avec une croissance proportionnelle des votes pour le Parti Socialiste, ainsi qu’en Irlande avec une croissance du Labour Party dans les sondages. Même en Grande Bretagne, après trente ans de gouvernement New Labour, la peur d’un gouvernement Tory (conservateur) aura pour conséquence que Brown pourrait obtenir un meilleur résultat que ce qui était probable quelques mois plus tôt. Cela pourrait même résulter dans un gouvernement a minorité New Labour, avec la possibilité de “coalition” officieuse avec les Libéraux à un certain stade. Un gouvernement à minorité Tory reste également possible, mais la situation sociale pour le moins explosive pourrait rendre un gouvernement peu viable a long terme voire à moyen terme.

    31. Des augmentations proportionnelles dans les votes pour les partis traditionnels de la classe ouvrière ne se font toutefois pas sur les mêmes bases que dans le passé. Ces partis ont un ancrage social plus faible, tout comme les attentes que les travailleurs y placent. Les partis qui ont connu une croissance électorale n’ont pas connu une progression active de leur nombre de membres parmi la classe ouvrière. Un élément frappant de la période actuelle est la volatilité ambiante. Il peut y avoir des changements très rapides ; la croissance du soutien électoral pour un parti peut très vite s’évaporer et se transformer en opposition acerbe contre lui.

    32. Cela a été prouvé de façon claire en Islande après l’élection de l’Alliance Sociale-démocrate-Gauche-Verts. En l’espace de quelques mois, les espoirs et les illusions qui résidaient en ce gouvernement (le premier gouvernement social-démocrate de l’histoire islandaise) ont été brisés. La proposition du gouvernement d’accepter les termes de remboursement exigés par le gouvernement britannique a fait face à une intense opposition. Même le Président a été obligé de prendre cela en compte et a refusé de signer l’accord adopté par le Parlement, ce qui a ouvert la voie au référendum refusant l’accord a hauteur de 93%.

    Les nouveaux partis ou alliances de gauche

    33. Globalement, il est toujours vrai que là ou ils existent, les nouveaux partis ou alliances de gauche ont failli à remplir le vide politique ; leur avenir est précaire et incertain. Face à une crise historique du capitalisme, ils ont en règle générale évolué constamment vers la droite et l’effondrement idéologique a continué. C’est indubitablement une des raisons pour lesquelles ces nouvelles formations ne se sont pas développées dans la dernière période. En France et en Grèce, le NPA et SYRIZA ont reculé dans les sondages au fur et à mesure que la crise se développait. Les derniers résultats électoraux du NPA (2.5%) et du Parti Socialiste hollandais sont en fort contraste avec notre formidable victoire électorale en Irlande lors de l’élection de Joe Higgins au Parlement européen.

    34. En Allemagne, Die Linke, malgré un pas à gauche en parole avec son récent “Projet de Programme”, a continue de stagner dans les sondages autour de 11%. Pourtant, selon les derniers sondages, le parti pourrait réussir à entrer pour la première fois dans le plus grand parlement régional (Rhénanie du Nord-Westphalie). Ceci sera vu comme un succès. A ce stade, les nouvelles formations n’ont pas attiré de larges couches de travailleurs. Die Linke représente la faillite à offrir une alternative socialiste claire et conséquente face a la crise, ainsi qu’une incapacité de la direction à combiner travail électoral et intervention dans les luttes des travailleurs et de la jeunesse. Cela reflète aussi partiellement un sentiment “anti-parti” de la part de beaucoup de travailleurs et de jeunes, qui pour l’instant ne voient pas pourquoi ils devraient s’impliquer dans les activités d’un parti et en devenir membre.

    35. Cela changera à un certain stade, lorsque les travailleurs, à travers leurs propres expériences de luttes, la continuation de la crise et avec l’aide des marxistes, et particulièrement ceux du CIO, concluront qu’il n’y a pas d’autre alternative que de construire leur propre outil politique. C’est un processus qui n’est ni facile ni linéaire. Il sera probablement nécessaire qu’une série de nouvelles luttes ait lieu pour qu’une telle force voie le jour en Europe, qui comprenne une participation active et conséquente des travailleurs. Il reste incertain de savoir si les forces qui existent se développeront en ce sens ou si de nouvelles organisations vont émerger. Pourtant, il reste important que nous continuions à participer à ces organisations qui existent et que nous essayions d’avoir une influence sur leur processus de développement, à l’instar de ce que nous faisons dans SYRIZA en Grèce. L’émergence de différents regroupements de gauche dans SYRIZA représentent d’importants pas en avant et peuvent influencer la manière dont cette formation et un parti socialiste de masse de la classe ouvrière grecque se développent. Nous devons être prêts à voir de nombreux retournements dans ces évolutions et nous devons nous préparer à y ajuster rapidement nos tactiques.

    36. Il serait faux de sous-estimer l’impact que nous pouvons avoir dans de tels processus, comme on a pu le voir dans SYRIZA ou le P-Sol. La plateforme que notre section en Angleterre et Pays de Galles construit avec le RMT dans la TUSC (Trade Unionist and Socialist Coalition) est d’une grande importance, notamment du fait qu’elle résulte de l’intervention effective de la section dans des luttes ouvrières.

    37. La formation de nouveaux partis n’est pas une fin en soi, mais un levier pour préserver et améliorer les droits et les conditions de vie de la classe ouvrière. Même une fois qu’ils sont construits comme des partis puissants impliquant de larges couches de la classe ouvrière et de la jeunesse, comme le montre l’expérience du PRC en Italie, si de puissantes forces marxistes n’aident pas à orienter leur développement, les éléments réformistes ou centristes de ces partis peuvent saper leur potentiel ou même les détruire avec de mauvaises méthodes et un programme faux. Là où de telles choses se produisent, la déception qui s’ensuit peut rendre la construction d’une nouvelle force encore plus complexe. La preuve en est faite en Italie, ou la “Fédération de Gauche” (un bloc rassemblant le PRC, PDCI (communistes italiens) et d’autres groupes de gauche) n’a obtenu qu’à peine 3% aux élections régionales. La faillite du PRC et l’inefficacité du Parti Démocrate ont ouvert la voie à l’émergence de mouvements tels que celui du “Peuple Violet”. Des évolutions représentant une confusion et une atonie similaires peuvent émerger dans d’autres pays si de puissants partis socialistes de la classe ouvrière ne sont pas construits.

    38. Alors que la formation de nouveaux partis larges de travailleurs est une tâche importante pour la classe ouvrière et pour nous-mêmes, l’absence de telles formations n’est pas un obstacle à la construction et au renforcement de nos propres sections. Alors qu’une couche plus large de la classe ouvrière serait attirée dans de nouveaux partis, une couche importante de travailleurs et de jeunes peut aussi être attirée directement dans nos rangs si nous y travaillons correctement.

    39. Une des questions qui a émergé dans Die Linke, SYRIZA, le PRC, le P-Sol et le NPA est celle des coalitions et alliances avec les anciens partis sociaux-démocrates. C’est une question importante pour la classe ouvrière et pour nos sections. Nous devons nous impliquer dans ces débats là où ils émergent, en y défendant une position de principe, en oppositions aux coalitions capitalistes, tout en expliquant adroitement nos idées et en prenant en compte les illusions qui peuvent exister dans de telles coalitions. Dans le passé, cette question était plus clairement comprise par les militants de gauche qu’elle ne l’est aujourd’hui ; c’est une autre manifestation du recul de la conscience depuis les années 1990 après la chute des États staliniens.

    L’extrême droite et le racisme

    40. L’absence d’une alternative de gauche a eu pour conséquence la croissance de l’extrême droite dans certains pays. Il s’agit d’une question cruciale pour la classe ouvrière et le CIO. Le renouveau de la croissance du FPÖ en Autriche, la possibilité d’un vote fort pour le BNP en Grande Bretagne aux prochaines élections, les récents résultats électoraux de Le Pen aux régionales en France (en moyenne 17% dans les régions ou le FN se pressentait), la croissance de l’extrême droite en Hollande et en Hongrie et celle de la Ligue du Nord aux élections italiennes illustrent le danger qui existe. La montée de l’extrême droite reflète le vide existant et l’impact qu’a la crise se manifestent de façon négative et réactionnaire dans la résurgence du racisme et d’idées anti-immigrés ou islamophobes parmi certaines couches de la population. L’extrême droite et les forces de droite en général ont toujours utilisé une rhétorique populiste de droite comme moyen de gagner un soutien électoral. Nous devons nous situer en première ligne des activités antiracistes et particulièrement dans notre travail jeune. Nous devons également développer un programme et des revendications sur cette question pour combattre le racisme et lutter pour l’unité de classe de telle manière à ce que nous puissions engager le dialogue avec toutes les couches de la classe ouvrière.

    La jeunesse radicalisée

    41. Nous devons aussi nous assurer qu’en nous adressant aux différentes sections de la classe ouvrière nous prenons en compte l’évolution de l’ambiance parmi une couche significative de la jeunesse dans différents pays européens. Avec les attaques contre l’éducation et la croissance rapide du chômage (selon l’OCDE, 21% des jeunes travailleurs sont au chômage dans la zone Euro), une situation explosive se développe Les mouvements pour l’éducation en Allemagne, en Autriche et en Espagne sont aussi les premières manifestations de luttes qui peuvent se développer dans une majorité de pays européens ou sur une base paneuropéenne. Les attaques émergeant du processus de Bologne ont des conséquences dévastatrices sur l’éducation et peuvent provoquer des mouvements encore plus gros que ce que nous avons vu jusqu’à présent. Il est important que nous soulevions la nécessité de ces luttes et de leur amplification pour tourner les jeunes vers la classe ouvrière, ainsi que la nécessité d’une lutte commune des travailleurs et des jeunes, scolarisés ou non. Souvent, les jeunes sont en première ligne et leurs mobilisations représentent les premiers pas de luttes encore plus puissantes de la classe ouvrière, qui leur sont fréquemment conséquentes. Elle reste très importante pour nous. Une couche significative de jeunes sont entièrement opposés aux partis existants, et dans certains pays à tout l’establishment et au système en général. Beaucoup se retrouvent constamment en lutte avec la police et l’appareil d’État, et certains sont de plus en plus aliénés par la société.

    42. Une couche a été attirée par les organisations et idées anarchistes. Nous devons nous assurer de trouver une voie vers le meilleur de cette jeunesse et aussi de refléter l’amertume et la colère qu’ils ressentent contre le système. Tout en faisant attention de ne pas tomber dans l’ultra-gauchisme, notre approche envers la jeunesse ne doit pas être trop timide. Le degré d’aliénation de certains jeunes s’est déjà reflété en Grèce avec l’émergence de groupuscules terroristes. Cette réaction négative, avec toutes les conséquences qu’elle comporte, peut aussi se développer dans d’autres pays, y compris dans le nord de l’Europe.

    43. La nouvelle situation en Europe est favorable et nous apporte des possibilités d’intervention et de croissance en nombre de membres aussi bien qu’en influence. Cela ouvre la perspective d’un renforcement de nos organisations, à partir desquelles des partis marxistes plus conséquents peuvent être construits, autour du CIO.

    Le Secrétariat International

  • Volcans, chaos et nécessité du socialisme

    Et non, nous ne saurons pas contrôler l’éruption des volcans sous le socialisme. Cependant, nous pourrons nous assurer que les effets de pareils évènements ne conduisent pas à la situation chaotique à laquelle nous assistons actuellement en conséquence de l’éruption d’un volcan en Islande.

    Sonja Grusch, Autriche

    Passagère d’un avion et bloquée à Londres, il ne m’a été possible de rentrer chez moi que par mes propres moyens, sans aucune aide de “ma” compagnie. Une chose était très claire à mes yeux: les privatisations et la “compétition” sous le capitalisme mènent à des situations catastrophiques auxquelles des dizaines de milliers de personnes, sinon des centaines de milliers, doivent faire face à travers l’Europe et ailleurs.

    Aucun plan d’aide international

    Comme le système de transport est divisé en systèmes nationaux et même en différentes compagnies, aucun plan d’aide internationale n’a été établi pour aider les passagers. Dans les faits, l’écrasante majorité des gens n’ont pas reçu d’informations de leur compagnie, qu’ils avaient payé bien cher pour avoir leurs tickets. Les gens n’avaient qu’à chercher par eux-mêmes un endroit où dormir et ce qu’il convenait de faire par la suite.

    Dans un système de transports nationalisé, orienté vers les besoins de la population, la situation auraient été prise en main bien plus vite et bien mieux. Les gens auraient été informés de chaque développement et des possibilités alternatives de voyage et de logement. Ils auraient été pris à l’aéroport et emmenés à l’hôtel rapidement. Il aurait aussi été possible d’assurer une liste de priorités pour ceux qui devaient vraiment rentrer le plus vite possible. Mais dans le système capitaliste actuel, ce sont ceux qui se débrouillent plus vite et mieux que les autres, et particulièrement ceux qui ont de l’argent, qui ont trouvé des solutions, les autres étant juste laissés de côté.

    Avec une planification internationale orientée vers les nécessités de la population, et non vers les profits, trains, bus et ferries pourraient être coordonnés bien mieux qu’ils ne le sont actuellement. Des wagons supplémentaires auraient pu être assurés pour que tous les passagers trouvent de la place. Des bus auraient pu conduire les gens dont les vols avaient été annulés dans des endroits où loger jusqu’à leur prochain départ. Une planification internationale pourrait assurer que les besoins arrivent devant les profits. Cela voudrait dire que les passagers et les produits de premières nécessités seraient transportés avant les marchandises non-essentielles. Un système de transport nationalisé signifierait qu’il n’y aurait pas de compagnies privées augmentant subitement les prix pour faire plus de profits et que les passagers seraient pris en charge sans coût supplémentaire.

    Maintenant, dans cette crise, les passagers ont totalement été livrés à leur sort, sans savoir où aller et comment payer leur logement, les trains et le reste.

    L’argent est un gros problème pour beaucoup de monde. Les compagnies aériennes et les assurances feront tout leur possible pour faire porter la charge des coûts supplémentaires sur le dos des passagers.

    Certaines compagnies aériennes ont déjà déclaré qu’elles auront de sérieux problèmes financiers à cause de cette éruption volcanique et qu’il sera nécessaire pour elles de recevoir un soutien des Etats. C’est un autre truc des compagnies capitalistes pour instrumentaliser la situation à leurs seuls bénéfices. La crise des compagnies aériennes n’est pas due à l’éruption, même si elle augmente leurs soucis. Les compagnies aériennes souffrent de la crise économique générale.

    Pour les travailleurs, il n’est pas seulement question d’argent à débourser en plus. La crise des transports aériens va conduire à une nouvelle vague d’attaques sur les salaries et les conditions de travail du personnel aérien ainsi qu’à une augmentation des prix dans la période à venir. Cela ne doit pas être accepté, les syndicats doivent combattre ces attaques.

    Cette situation chaotique doit être prise en main par les syndicats et les militants réellement socialistes partout en Europe. Il faut demander l’arrêt des privatisations, mais pas seulement. Il faut défendre la nécessité de nationaliser les transports et d’élaborer un plan international de transport. Nous avons besoin d’une autre société, une société socialiste où les besoins de la population sont centraux.

  • Régionales en France: crise politique sur fond de crise sociale

    Les élections régionales françaises se sont déroulées, après trois années de gouvernement Sarkozy et au creux de la crise économique et sociale qui touche l’ensemble du système capitaliste. Alors que la bourgeoisie a ressorti les bouteilles de champagne, le CAC 40 progressant de 23% pour 2009, la crise frappe constamment plus durement travailleurs, allocataires et jeunes. Ces élections sont l’occasion de tirer quelques enseignements de l’état du mouvement social en France.

    par Alain (Namur), article tiré de l’édition d’avril de Lutte Socialiste

    Rejet de la classe politique traditionnelle

    L’abstention a atteint le score historique de 53,67% au premier tour. Ce score illustre le dégout d’une majorité de la population face au système politique actuel, un dégout envers l’UMP de Sarkozy, mais aussi envers le PS même si celui-ci gagne haut la main ces élections en profitant d’un rejet massif de la politique gouvernementale.

    Un des autres enseignements du scrutin, c’est le retour du Front National. Le Pen et son parti ont eu du mal à trouver leur place face aux accents sécuritaires et répressifs de la politique sarkozienne. Néanmoins les conditions objectives qui avaient permis au FN de passer le premier tour des présidentielles en 2002 ont continué à jouer et certains déçus du Sarkozysme se sont tournés vers l’extrême droite pour exprimer leurs frustrations.

    Le FN a réalisé plus de 11% au premier tour et près de 18% en moyenne dans les 12 régions où il avait pu se maintenir au second tour. Une réelle alternative de gauche, avec un programme clair contre la politique de casse sociale, aurait pu éviter un tel retour de l’extrême droite.

    Une claque pour Sarkozy mais quelle alternative?

    Ces élections sont un échec pour Sarkozy. Suite à ses attaques menées exclusivement contre les travailleurs et les allocataires sociaux et sa politique en faveur des capitalistes, les travailleurs ont vite cherché des opportunités pour le combattre. Mais le plan des directions syndicales – ne pas avoir de stratégie et laisser échapper la colère – a eu comme effet que les attaques ont porté leurs fruits et que le mouvement est temporairement démoralisé.

    Alors que la LCR et son porte-parole Olivier Besancenot avaient réalisé un bon score aux présidentielles de 2007, un peu de 4% au premier tour, le résultat des élections régionales du NPA, tout comme ceux des européennes de l’an passé, sont assez décevant: 3, 4% ou 2,85% en moyenne, selon que l’on tienne compte ou non du résultat des trois régions où le NPA s’était présenté avec le Front de Gauche. En Île de France, où Besancenot était tête de liste, le NPA fait 3,13%. Au-delà du fait que les deux élections ne sont pas du même type, l’initiative NPA cherche un second souffle après avoir suscité beaucoup d’espoirs. Néanmoins, le manque de clarté politique, l’absence de débat sur l’orientation stratégique et le tournant électoraliste ont contribué à faire perdre l’enthousiasme de la classe ouvrière envers cette initiative.

    Dans la situation actuelle, un véritable parti des travailleurs doit pouvoir être un instrument pour la lutte que ceux-ci mènent. Un parti résolument tourné vers les luttes des jeunes et des travailleurs ainsi que leur organisation avec une perspective socialiste aurait été capable de gagner de nouveaux militants et de mobiliser l’ensemble des travailleurs. Au lieu de cela, la direction nationale s’est contentée de discussions interminables sur la stratégie de coalition électorale et le vote utile (ce qui revient à appeler à voter PS) ainsi que sur des mots d’ordre vagues de grève générale.

    Pour sa part, le Front de Gauche, composé principalement du Parti communiste et du Parti de Gauche, réalise globalement un score moins mauvais, avec près de 6% au premier tour. Mais sa stratégie d’alliance quasi automatique au second tour avec le PS et Europe Ecologie ne le positionne pas en réelle alternative aux partis traditionnels. Une unité des partis de gauche radicale a bien été tentée à différents endroits, mais il est clair qu’une telle apparente unité sans programme clair et conséquent n’a pas non plus représenté une alternative pour la grande majorité des travailleurs. Les élections n’arrêteront pas la casse sociale

    Il est clair que même si la gauche gouvernementale a remporté la quasi totalité des régions, cela n’arrêtera certainement pas les attaques. Les travailleurs ne doivent avoir aucune illusion sur le fait que les régions, même roses et vertes, ne leur serviront pas de bouclier (comme le disait Martine Aubry le soir du premier tour). Seule la mobilisation et la construction d’un rapport de forces permettra de faire reculer les capitalistes.

  • Capitalisme, dettes, spéculation et “cochonneries”

    Depuis la fin de l’année 2009, nos politiciens et leurs économistes bourgeois se plaisaient à saluer le retour de la croissance. En quelques jours seulement, la tendance s’est inversée vers des discours catastrophiques, notamment au sujet de la Grèce. Que s’est-il donc passé?

    Par Baptiste (Wavre), article tiré de l’édition de mars de Lutte Socialiste

    La crise économique a connu un certain répit après l’intervention des différents gouvernements. Ceux-ci sont intervenus pour sauver les banques de leurs montagnes de dettes (transformées du même coup en dettes publiques), et aussi pour «restimuler» l’économie: liquidités à bon marché, primes à la casse,… Une erreur serait de sous-estimer l’impact que ces interventions ont eu: un plancher a pu être placé et a clairement freiné la crise, du moins temporairement. Mais une autre erreur serait de croire que ces interventions aient pu résoudre la crise du capitalisme.

    La crise est-elle terminée?

    Transférer des dettes du privé vers le public et stabiliser une activité économique en creusant encore plus les déficits publics, cela ne résout en rien la crise de surproduction du capitalisme. Les crédits à bon marché et les différents stimuli ne font que reporter l’échéance tout en permettant de créer des bulles spéculatives sur base de la montagne de dettes.

    Les interventions gouvernementales ont aménagé la crise en collectivisant cette montagne. Après l’instrumentalisation de la crise par les patrons (pour attaquer les emplois et les conditions de travail), c’est en fait une seconde manière de la faire payer aux ménages.

    Un certain nombre d’Etats risquent de ne pas être en mesure de payer leur dette. C’est ce risque qui est derrière l’acronyme anglais de «P.I.G.S.» («cochons»): Portugal, Italie/Irlande, Grèce et Espagne. Les Etats de la zone euro et la Suisse vont devoir emprunter 2.200 milliards d’euros cette année, ce qui revient à dire que 20% des richesses produites en 2010 dans ces Etats serviront à financer les dettes publiques..

    Vers une faillite des Etats et l’éclatement de la zone euro?

    Que des Etats aient une importante dette publique, cela ne date d’hier. Cela n’est pas non plus forcément dangereux pour des pays comme la Belgique où l’Etat peut se baser sur une bourgeoisie relativement forte, avec des institutions financières capables de financer la grande majorité de cette dette. Ce n’est pas le cas pour la Grèce: une majeure partie du financement de la dette publique est réalisée par l’extérieur, ce qui ouvre le risque d’une spéculation forte sur les obligations.

    A cause de l’existence de l’euro, des pays comme la Grèce sont incapables de jouer pleinement sur une dévaluation compétitive de leur monnaie (ce qui aurait pour effet de baisser le prix de leurs exportations) et, d’autre part, les pays riches de la zone euro (comme l’Allemagne et la France) voient une spéculation sur leur monnaie, les amenant à «payer la note» pour les pays du « Club Med’ ».

    Ces tensions ont conduit certains économistes à prédire l’éclatement de la zone euro. Il existe des contradictions entre les différentes bourgeoisies en Europe. L’introduction de la monnaie unique a été réalisée pendant une période de croissance économique avec des profits diluant les tensions entre Etats. Aujourd’hui, le retour de la crise économique remet à l’ordre du jour les tensions et contradictions, menaçant l’euro lui-même.

    Néanmoins, une erreur serait de sous-estimer l’importance du processus d’intégration qui a pris place avec l’euro, à tel point que les élites européennes vont dans un premier temps tout faire pour préserver la zone euro. L’instabilité économique générée par la sortie de la Grèce de la zone euro représenterait un désavantage supérieur à l’avantage qu’une telle sortie pourrait amener. Mais un tel «plan A» ne peut être réalisé qu’avec un retour à la croissance, c’est-à-dire une fois les profits à nouveau suffisants pour payer la note du voisin. Dans le cas contraire, de plus en plus d’Etats feraient face à de telles situations de risque de banqueroute, et il est clair qu’à ce moment-là un tel «plan A» passerait vite à la trappe.

    L’agenda néolibéral comme unique perspective pour les capitalistes

    A l’heure actuelle (le 20 janvier), il n’y a pas encore eu d’accord concret à l’échelle européenne pour un financement de la dette grecque de sorte à contrer la spéculation sur celle-ci, tout simplement parce que les décisions politiques au sein de la zone euro sont prises au niveau national et que les pays «riches» de la zone euro ne sont pas encore prêts à payer pour la dette grecque.

    A la place, les gouvernements de la zone euro ont manifesté une solidarité «politique» à la Grèce en contrepartie de quoi elle doit élaborer un plan d’austérité dur dans les finances publiques. La Grèce constitue un test pour la zone euro: d’une part sur les capacités de l’euro à surmonter une telle crise, mais aussi sur la capacité du gouvernement à faire passer une austérité forte. Le but de ces mesures serait de faire passer le déficit public de 12,7% du PIB en 2009 à 8,7% du PIB en 2010 dans un premier temps, pour finalement redescendre sous la barre des 3% pour 2012 comme le souhaite le Traité de Maastricht. Le parti PASOK (social-démocrate) fraîchement élu au gouvernement est évidemment l’outil politique idéal pour les élites européennes en vue de réaliser le boulot: la rhétorique d’unité nationale est déjà mise en avant pour justifier les mesures d’austérité. Ainsi, parallèlement aux coupes sociales, les plus fortunés devront également participer à «l’effort national», notamment via une lutte accrue contre l’évasion fiscale et une taxation des bonus dans la finance.

    De plus, ce gouvernement social-démocrate tente de maintenir une stabilité sociale en reportant la responsabilité de l’austérité ailleurs: sur les fonds spéculatifs, sur le bilan du gouvernement de droite précédent et évidemment sur l’Union Européenne qui joue à nouveau son rôle d’agent néolibéral imposé depuis l’extérieur, c’est-à-dire un cache-sexe pour les gouvernements néolibéraux..

    Nous ne payerons pas leur crise!

    Néanmoins, cette stabilité dans l’austérité n’est pas acquise pour le gouvernement grec, comme en attestent la grève massive dans le secteur public qui a eu lieu le mercredi 10 février et la grève générale de 24h du 24 février. Au Portugal aussi, le mouvement ouvrier est en train de prendre la rue. Le CIO participe activement aux luttes en Grèce et propose une alternative claire à l’austérité: une planification démocratique de l’économie sous contrôle et gestion des travailleurs.

  • Joe Higgins et la taxe sur les transactions financières

    Ce 10 mars dernier, le Parlement Européen a adopté une résolution consacrée aux transactions financières. 536 parlementaires ont voté pour que la Commission Européenne élabore une proposition à soumettre en ce sens au G20 de juin. Joe Higgins s’est impliqué dans la discussion.

    “Je me suis abstenu dans le vote sur cette résolution concernant la taxe sur les transactions financières parce c’est désespérément trop peu dans la lutte contre l’obscène et asociale spéculation financière mondiale de la part de grand Hedge Funds et de banques prestigieuses telles que Goldman Sachs.

    “Le Wall Street Journal a récemment parlé d’un diner très sélect à New York, le 8 février, durant lequel s’étaient réunis les responsables de 18 grand Hedge Funds pour discuter de spéculation contre l’euro. Pendant des mois, ces requins de la finance qui se cachent derrière le nom de Hedge Funds et qui contrôlent plus de 2.000 milliards d’euros, ont pu spéculer contre l’euro, et contre la Grèce en particulier, pour réaliser des milliards de bénéfices.

    “C’est incroyable, mais la Commission Européenne ne fait rien pour arrêter cela et elle collabore même avec ces criminels financiers en attaquant les travailleurs et les pauvres de Grèce en exigeant de larges coupes dans leur niveau de vie afin que les bénéfices de ces parasites puissent être payés.

    “Nous n’avons pas besoin d’une taxe financière, nous devons rendre propriété publique ces Hedge Funds et les banques et les placer sous contrôle démocratique pour que ces énormes moyens puissent être utilisés pour lutter contre la pauvreté et dans l’intérêt de la collectivité au lieu de sacrifier la société pour l’avarice d’une petite minorité.”

  • Grèce: une société bloquée par la grève générale

    La semaine dernière, le jeudi 11 mars, la Grèce a de nouveau connu un temps mort en conséquence de l’action collective de la classe ouvrière organisée. Les travailleurs du privé et du public s’étaient unis pour la troisième, et la plus grande, grève générale en trois semaines contre le plan d’austérité draconien du gouvernement. L’action a touché 90% du secteur public et environ 90% également du secteur privé. Rien ne fonctionnait et rien ne bougeait. Les transports publics étaient complètement à l’arrêt, et seules quelques lignes de train étaient encore en service à Athènes pour que les travailleurs puissent se rendre aux manifestations et rentrer chez eux ensuite. C’était un exemple éclatant de l’énorme pouvoir dont dispose la classe ouvrière quand elle est organisée et qu’elle agit unie.

    Andreas Payiatsos, Xekinima (CIO-Grèce), Athènes, et Niall Mulholland, CIO, Londres

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    Socialisme 2010: samedi 24 et dimanche 25 avril à Bruxelles

    A noter à votre agenda!

    La résistance contre les plans d’austérité se poursuit en grèce. Cette lutte est la seule possibilité pour les travailleurs et les jeunes de Grèce de réagir à la tentative de l’élite grecque et européenne de faire payer la crise aux travailleurs et aux jeunes. Au week end Socialisme 2010, l’évènement annuel de discussion et de débat du Parti Socialiste de Lutte, nous allons accorder une place de choix à la crise en Grèce, à la résistance qui s’y déroule et à la nécessité d’une alternative face au capitalisme.

    Le PSL a invité Dimitris Pantazopoulos pour ce weekend, un membre de Xekinima (l’organisation-soeur du PSL en Grèce) et de la commission syndicale de SYRIZA (une nouvelle formation de gauche que différents courants à gauche de la social-démocratie ont rejoint).

    Il parlera à différents endroits:

    • Samedi 24 avril. Au meeting d’ouverture sur la lutte contre la faillite du capitalisme (entre 11.30 et 12.15), où il parlera de la crise et de ses conséquences pour les travailleurs en Grèce, aux côtés de Senan de Tamil Solidarity, une campagne contre la répression contre les droits des travailleurs et contre les Tamouls au Sri Lanka.
    • A la commission consacrée aux nouvelles formations de gauche en Europe (de 15.30 à 18.00), et particulièrement au NPA en France avec Alex Rouillard (Gauche Révolutionaire, organisation-soeur du PSL en France) et Syriza en Grèce.
    • Au meeting de samedi soir "Seule la lutte paie!" (de 19.00 à 20.30), Dimitris parlera de la résistance et des grèves générales contre les assainissements et de la nécessité d’un programme socialiste dans cette résistance. A ce meeting nous aurons également comme orateur: Levi Sollie (délégué à Bayer) et Greg Maughan de la Trade Union and Socialist Coalition, qui parlera de la résistance croissante contre la crise en Grande-Bretagne et des élections nationales de mai.

    > Vous pouvez trouver ici le programme intégral de ce week end
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    Les deux fédérations syndicales grecques avaient appelé à la grève pour protester contre le plan additionnel de 4,8 milliards d’euros d’assainissements et d’augmentation de taxes que le gouvernement a annoncé le 3 mars, approuvé par le parlement quelques jours plus tard. Depuis le début de l’année, sous la pression de l’Union Européenne, il s’agissait du troisième paquet d’austérité annoncé, ce qui porte le total à environ 20 milliards d’euros.

    Des rassemblements de protestation ont été appelés par le syndicat GSEE et le syndicat des fonctionnaires ADEDY, un autre a été organisé par le front syndical dirigé par le parti communiste, le PAME. Les rues d’Athènes ont connu une manifestation syndicale de grande ampleur, avec entre 80.000 et 100.000 participants, une des plus grande mobilisations rencontrée ces dernières années. Bien d’autres travailleurs voulaient rejoindre les protestations mais ne le pouvaient pas parce que le plan de transports en commun prévu pour permettre aux travailleurs de rejoindre les manifestations était insuffisant (seules quelques lignes fonctionnaient à Athènes entre 10 heures et 16heures).

    La grève a également touché de plus petites villes et villages, avec de grandes manifestations. La société était complètement paralysée. Mêmes de petits tenanciers de magasins ont rejoint la grève.

    La dictature du marché et de l’Union Européenne

    Sous la pression de l’UE et des marchés financiers, le gouvernement social-démocrate grec du PASOK a présenté la semaine dernière le dernier d’une série de paquets d’austérité pour réduire le déficit budgétaire à 8.7% du Produit Intérieur Brut pour cette année, contre une estimation de 12.7% l’an dernier.

    Entre autres choses, il s’agit de couper de 7% les salaires dans les services publics, de diminuer de 30% les primes de Noël et d’été (qui sont connues comme les ‘13e et 14e mois’), de geler toutes les pensions y compris les plus basses (plus d’un million de pensionnés Grecs ont moins de 500 euros par mois) et d’augmenter les taxes sur le fuel, l’alcool et les cigarettes tout en portant la TVA de 19% à 21%.

    Le sentiment dominant parmi les travailleurs en grève était bien entendu la colère, une colère et une frustration encore exacerbées et élargies par l’annonce de nouvelles économies la semaine dernière. Mais il existe également le sentiment que les actions de grève menées jusqu’à présent ne sont pas suffisantes pour stopper l’avalanche d’attaques.

    Les directions syndicales n’offrent aucune voie pour la fureur des travailleurs

    Les travailleurs sont furieux et veulent mener des actions, mais les dirigeants syndicaux n’offrent pas de plan concret pour faire les prochains pas en avant dans la lutte contre l’assaut du gouvernement. De son côté, le parti social-démocrate au pouvoir, le PASOK, tente de faire porter le chapeau à l’héritage laissé par le précédent gouvernement de droite de la Nouvelle Démocratie, qui a subi une cuisante défaite aux élections générales de 2009. La Nouvelle Démocratie est maintenant dans l’opposition avec 12% de moins que le PASOK, et ce fossé se creuse (le sondage le plus récent parlait d’une différence de plus de 15%).

    A cause de l’absence d’opposition syndicale décisive face aux assainissements, le gouvernement du PASOK a pour l’instant été capable d’aller plus loin dans sa logique. Les travailleurs avec la conscience de classe la plus élevée accusent les fédérations syndicales dominées par le PASOK (GSEE et ADEDY) de ne faire que prétendre offrir une lutte à leurs membres.

    Au vu de la grande colère parmi les travailleurs, il est probable que suivent d’autres grèves générales. Le mouvement de grève contre la ‘réforme des pensions’ et les nouvelles taxes qui vont être votées au Parlement ces prochaines semaines va probablement se poursuivre, ces deux mesures sont celles qui touchent le plus durement les travailleurs. Jeudi dernier, la grève générale avait suivi plusieurs journées d’actions allant crescendo par toutes sortes de syndicats, mais cela s’est largement déroulé sans véritable coordination.

    Pour l’instant, la jeunesse n’a pas été engagée dans les protestations de masse de façon décisive. Cela s’explique partiellement parce que la crise économique ne les a pas encore touchés directement, comme c’est le cas pour les travailleurs des secteurs publics et privés. Les étudiants du secondaire, par exemple, n’ont pas participé aux manifestations en grand nombre. Mais cela peut encore changer dans la période à venir. Tant les étudiants du secondaire que les universitaires ont fait des protestations de masse ces dernières années en Grèce. Il y a un peu plus d’un an (en décembre 2008), les rues étaient remplies d’une éruption de colère parmi la jeunesse contre les brutalités policières. Maintenant, la plupart des universitaires finissent leurs examens et quelques occupations commencent à prendre place contre les conséquences des assainissements dans l’enseignement.

    Occupations d’universités

    Xekinima (CIO-Grèce) appelle à des occupations d’universités pour lancer une vague massive d’occupations, non seulement dans les universités, mais aussi dans les écoles. Xekinima appelle à la constitution de comités d’action de masse et à la liaison des luttes de la jeunesse et de celles des travailleurs.

    Les actions de grève ont besoin d’être coordonnées et étendues. Le prochain pas doit être une grève générale de 48 heures, suivie par des grèves plus longues et répétées pour forcer le gouvernement à reculer. Des comités d’actions doivent être constitués sur les lieux de travail et dans les diverses communautés et ils doivent coordonner et lier entre elles les luttes sur les plans local, régional et national.

    Cependant, si les protestations et les grèves générales ne forcent par le gouvernement à reculer, de plus en plus de travailleurs et de jeunes vont comprendre le caractère réel du gouvernement pro-capitaliste du PASOK et vont se tourner plus à gauche dans la recherche de réponses face à la crise catastrophique et aux attaques. Dans ces conditions, la proposition lancée par Xekinima d’une lutte commune et unifiée des partis de gauche pour stopper ces attaques et pour former la base d’un gouvernement de gauche basé sur les partis de gauche, la coalition SYRIZA et le parti communiste KKE, pourrait trouver de bonnes réponses parmi les travailleurs et la jeunesse. Toutefois, au vu de la frustration et de la colère d’un grand nombre de jeunes et des faiblesses de SYRIZA et du KKE, des explosions sociales aveugles et de tendance anarchistes peuvent une fois de plus dominer la scène.

    Construire une alternative de gauche de masse

    Les partis de gauche comme SYRIZA et le KKE ont une responsabilité cruciale pour former un ‘front unique’ avec un programme clairement socialiste qui comprenne l’opposition au payement de la dette nationale, la nationalisation du secteur bancaire, la fin des gigantesques avantages fiscaux des patrons, un programme d’investissement massif et immédiat dans les secteurs de la santé mais aussi de l’enseignement, du logement et de l’infrastructure. Par-dessus tout, pour porter un tel programme, un gouvernement véritablement de gauche doit nationaliser les services d’utilité publics ainsi que les secteurs clés de l’économie, sous le contrôle et la gestion démocratique de la classe ouvrière, pour mettre en place un plan économique apte à mettre fin à la crise dans les intérêts de la classe ouvrière et des pauvres.

    Seul un gouvernement de gauche, un gouvernement basé sur la défense des intérêts de la classe ouvrière et des jeunes, peut apporter une solution face à la profonde crise économique que nous connaissons, une crise du capitalisme grec et international. Cependant, les principaux partis de gauche refusent de lutter pour un tel programme. Ce facteur est un frein sur la dynamique de développement du mouvement et des mobilisations des travailleurs et des jeunes. Dans ces circonstances, Xekinima (une des organisations qui constituent SYRIZA) popularise la nécessité d’un parti des travailleurs de masse, avec des idées révolutionnaires et socialistes, basé sur les meilleurs éléments présents au sein de SYRIZA et du KKE mais aussi au sein de certaines organisations de ‘l’extrême-gauche’.

    Visite de l’euro-député Joe Higgins

    Joe Higgins, membre du parlement Européen and membre de la section du CIO en Irlande, le Socialist Party, a visité la Grèce cette dernière semaine et y a parlé à plusieurs meetings de travailleurs et de jeunes. Joe a apporté un message de solidarité de la part des travailleurs irlandais, qui font eux aussi face à des attaques draconiennes contre leurs emplois et leurs conditions de vie. Il a appelé à des actions de solidarité à travers l’Europe et contre les tentativezs de monter la classe ouvrière d’un pays contre celle d’un autre. Le CIO appelle à des actions de masse coordonnées et unies ainsi qu’à des grèves à travers l’Europe, pour résister aux attaques de tous les gouvernements et aux diktats de l’Union Européenne des patrons. Lors d’un meeting véritablement réussi, un jour où il n’y avait pas de transports en communs à cause de la grève (les trains ont stoppé après la fin des manifestations) et après de longues heures de marche durant les manifestations ainsi que des confrontations avec la police, plus de 220 personnes avaient fait un effort pour participer à Athènes à un meeting public où parlaient Joe Higgins et un représentant du NPA français (le Nouveau parti Anticapitaliste). Un nombre similaire de personnes ont participé à un meeting à Salonika, où parlaient Joe et un représentant local de SYRIZA.

  • France : élections régionales sur fond de crise et de réforme

    En mars 2010, la France votera pour renouveler les conseils régionaux. En pleine crise économique, la droite et la gauche se lancent dans la campagne électorale. De quel programme, de quel projet politique les travailleurs et les jeunes en France ont-ils besoin ?

    Par Nicolas (Bruxelles), article issu de l’édition de mars de Lutte Socialiste

    “Identité nationale”

    Ces dernières semaines, on a assisté à une stratégie électorale traditionnelle de la part de l’UMP de Sarkozy. Besson (ex-PS), Ministre zélé de l’Immigration, a lancé un débat sur l’identité nationale utilisé pour diffuser des idées racistes. Déjà lors de la campagne des présidentielles, Sarkozy avait joué à fond l’argument de l’insécurité, créant un climat qui détournait l’attention des questions cruciales, sociales et économiques, ce qui lui permettait au passage de prendre des voix à l’extrême-droite.

    Aujourd’hui, le débat n’est pas différent : l’identité nationale a été utilisée pour diviser les travailleurs et les jeunes, en stigmatisant une partie d’entre eux. L’attention a pu être détournée des vrais enjeux : le chômage qui explose, les restructurations qui se succèdent, les retraites à l’aube d’une nouvelle grande réforme. Ces problèmes sont la conséquence des politiques néolibérales menées par les différents gouvernements : privatisation accélérée des services publics, diminution du nombre de fonctionnaires, suppression de la taxe professionnelle (12 milliards de cadeaux en plus aux patrons en 2010), attaques sur les retraites, etc. pour combler les déficits publics creusés par le sauvetage des banques et les baisses de charges patronales.

    Attaques sur le système des pensions

    Dans cette situation, il faut souligner le rôle joué par le PS français en tant que principal parti d’opposition. Martine Aubry, présidente du PS, a même pris de l’avance sur le gouvernement en s’avançant sur le dossier des pensions. Pour dire «pas touche» ? Non bien sûr : Aubry s’est empressée de se présenter comme une interlocutrice «fiable», proposant d’augmenter l’âge de la pension à 62 ans (actuellement à 60 ans).

    Cela fait des décennies que, gouvernement après gouvernement, les acquis sociaux ont été démantelés à grands coups de contre-réformes. Et le PS, sous le gouvernement Jospin notamment, ne s’est pas montré des plus discrets dans le démantèlement des services publics. L’annonce d’une réforme du système des pensions est un signal du gouvernement aux actionnaires pour leur prouver leur bonne volonté à faire payer la crise aux travailleurs. La démarche du PS est identique : montrer à la bourgeoisie sa capacité à mener les réformes aux bénéfices des profits privés.

    Quelle alternative à gauche ?

    La classe des travailleurs, en France comme ailleurs, a besoin de son propre parti, dans lequel ils peuvent s’organiser, mener les luttes, discuter les revendications et se rassembler le plus largement possible, et pas seulement au moment des élections.

    Le développement des nouvelles formations de gauche en Europe et ailleurs met en avant le danger d’une approche essentiellement électoraliste. C’est le cas pour le Parti de Gauche (PG) de Mélenchon, une scission de gauche du PS qui a participé aux dernières élections européennes avec le PCF (Parti Communiste). Le PG dit vouloir rester dans le cadre du parlementarisme «républicain» actuel, tente de convaincre que les réformes sociales par le haut sont possibles et ne cherche pas à jouer un rôle dans les mouvements dans la rue.

    Le NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste), de son côté, avait lancé un appel aux partis de gauche pour un front unitaire afin de défendre les retraites. Mais l’important aujourd’hui est de construire à la base des syndicats, sur les lieux de travail, pour mobiliser vers une lutte générale contre les attaques lancées contre les acquis sociaux. Le NPA doit aussi intervenir dans cette situation en mettant en avant la nécessité d’une alternative socialiste au capitalisme.

    Depuis des mois, le NPA a privilégié la discussion sur les élections régionales plutôt que sur les idées politiques, les interventions dans les luttes et le type de parti à construire. En voulant aller vers des listes unitaires, le NPA a mis de côté toute une série de revendications anticapitalistes. De plus, il n’y a pas une stratégie unifiée pour les élections: chaque région peut choisir de conclure ses propres accords électoraux. Ce manque de clarté est un pas en arrière pour le NPA qui peut démobiliser les membres et les travailleurs qui regardent vers le NPA.

    Nous pensons que le NPA doit être un parti résolument tourné vers les travailleurs et les jeunes pour construire un rapport de forces dans les luttes. C’est ce message qui doit être diffusé au moment des élections : le système capitaliste et ses relais politiques n’offrent aucune solution à nos problèmes.

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