Author: sander

  • Foulard. Quelques arguments contre une loi excluant les jeunes musulmanes de l’école publique

    Cet article a été repris du site de la Gauche révolutionnaire, la section française du CIO.

    Ne faut-il pas défendre l’école publique et laïque ?

    On nous présente souvent la laïcité comme la neutralité à l’école où il ne faudrait aucun insigne religieux, politique, philosophique, etc. Autrement dit ce serait un sanctuaire qui préserverait les enfants des bagarres que se livrent les adultes. Raisonnons cinq minutes. Est-ce que ce gouvernement défend vraiment la laïcité en général ? Non. Dans sa campagne il ne s’élève à aucun moment contre le fait qu’en Alsace on trouve des croix sur les murs des écoles, que des aumôniers payés par l’Etat y enseignent… Ensuite l’année scolaire est organisée autour de la religion même pas chrétienne mais catholique : fêtes religieuses, congés scolaires organisés selon cette religion. Ajoutons que l’état subventionne les écoles privées.

    En vérité il s’agit bien d’une attaque contre les musulmans et ça fait partie du contexte actuel où on montre les musulmans du doigt comme une secte à part, qui aurait la "mauvaise religion", la plus "intolérante". De telles exclusions justifient la multiplication d’écoles coraniques privées et entame l’idée d’école laïque encore plus. Ces propositions racistes et les mesures adoptées par tous les gouvernements viennent du contexte de ségrégation depuis le 11 septembre. Celui-ci a ouvert la voie à ce genre de mesures, depuis la prétendue lutte contre le terrorisme, le "danger intégriste"…sous la pression de l’aile la plus réactionnaire de la droite.

    Ce gouvernement fait ça pour la défense des femmes…

    D’abord la liberté ne s’impose pas mais se conquiert. Depuis quand ce gouvernement lutte t-il contre l’oppression des femmes ? Il facilite des plans de licenciement mettant à la rue beaucoup de salariés, dont une bonne partie sont des femmes (contraintes alors ensuite à la dépendance du foyer). En finançant les établissements catholiques, il contribue à créer le contexte anti-femmes puisque ce genre d’écoles refuse les distributeurs de préservatifs, combat toute information sur la contraception…ou l’avortement. Même dans certaines écoles publiques, cela est remis en cause. Ce gouvernement veut tellement défendre les femmes qu’il expulse un bon nombre de sans-papières, les renvoyant dans leurs pays où elles risquent parfois, la prison familiale ou le mariage forcé…

    Le voile n’est-il pas un signe d’oppression ?

    Evidemment, le voile est un signe de l’oppression de la femme car il suggère que la femme doive se soumettre de manière visible. Mais c’est leur droit et ça n’est pas moins oppressif que les discours qui disent que la femme doit être avant tout désirable. Comment lutter alors contre cette oppression ? Certainement pas en les excluant. La logique de la gauche (qui utilise le plus l’argument de défense des femmes) revient à dire que c’est pour leur bien qu’on les exclut et que les laisser venir à l’école ne les aiderait pas à fuir le poids réactionnaire de leur environnement. Et les virer, c’est quoi ? En les expulsant, on les renvoie dans le carcan du foyer et on les condamne à être enfermées dans le cadre familial où le poids de la religion est plus lourd, avec parfois les grands frères ou pères qui jouent les flics au sein de la famille. Laisser venir ces jeunes filles à l’école, même voilées, c’est au moins leur permettre d’évoluer et de s’instruire, grâce à ce qu’il reste de qualité à l’enseignement. Enfin, pour la libération de la femme, il ne suffit pas simplement qu’une jeune fille puisse se mettre en mini jupe pour être émancipée. Quant aux raisons de le porter, le défi face à la société de ségrégation est l’un d’elles, il est donc urgent de renforcer la lutte contre le racisme. Seul le combat contre le racisme montrera aux jeunes qu’il n’y a pas besoin de la religion en tant que refuge mais qu’il faut lutter.

    Le mieux serait alors d’interdire tous les insignes politiques, philosophiques ou religieux car la loi concernerait tout le monde… C’est la position souvent annoncée par des partisans sincères de la laïcité. Mais une telle position reviendrait à expulser par dizaines de milliers des élèves de l’enseignement public. Car hormis la question du voile, on ne connaît pas tous les signes "ostensibles" dont parle ce gouvernement. On pourra éventuellement se faire expulser parce qu’on est communiste, parce qu’on portera un keffieh palestinien, un badge du Ché, un t-shirt Malcolm x ou encore parce qu’on aura une coupe de rasta ou des cheveux verts…La vraie position juste est de lutter pour la liberté totale d’expression et d’association pour tous les élèves, y compris vestimentaires, droits en partie arrachés par les luttes. L’école n’est pas un domaine particulier isolé de la société, la liberté d’expression et de conscience doit donc y être respectée.

    Et la neutralité de l’école, qu’en faites-vous ?

    On accuse souvent ces filles de mettre en cause la neutralité de l’école. Mais elle n’a jamais été neutre et ne peut pas l’être. Les manuels scolaires d’Histoire et d’instruction civique n’ont -ils pas toujours enseigné en concordance avec l’idéologie dominante ? En effet, l’Histoire de France dans les manuels scolaires n’a t-elle pas été enseignée en accentuant l’importance et la légitimité de l’empire français. Jules Ferry ne parlait-il pas alors de "devoir de civilisation des races supérieures" ? L’école n’est pas neutre. Cette prétendue neutralité sert à masquer l’idéologie dominante et à nous endoctriner pour que ce système tienne et soit adopté par tous.

    Mais l’intégrisme islamiste est très réactionnaire…

    La seule façon de combattre à la fois l’oppression et l’influence de l’intégrisme est de proposer une vraie alternative qui respecte chacun. Pourquoi l’Islam serait-t-il plus réactionnaire que les autres religions ? Il ne faut pas tomber dans ce piège car les arguments sur "l’Islam qui menace la civilisation de l’occident" de ce gouvernement sont racistes. Rien ne permet de dire que les filles expulsées sont intégristes ou de famille intégriste hormis quelques cas minoritaires. Leur exclusion est une attaque discriminatoire déguisée. Le plus juste est de défendre le droit de ces jeunes filles à l’école publique.

    Ce genre de campagne contre l’intégrisme musulman ou le "danger intégriste" nous fait aussi oublier un autre intégrisme, l’intégrisme catholique bien présent de ces gens qui manifestent contre le PACS, les droits de la femme tels que l’avortement ou la contraception, parfois violemment. Aucune campagne n’a été menée contre eux.

    La défense de la laïcité exige deux critères : la séparation complète des institutions religieuses et de l’état et une seule école publique et gratuite. Aucune condition n’est réalisée pleinement en France, pays pourtant considéré comme laïc. La laïcité ne concerne pas les élèves mais l’institution scolaire. Ça signifie au contraire la plus grande liberté d’expression et d’organisation pour tous les lycéens. Nous sommes pour que toutes les personnes, qu’elles soient athées, agnostiques, musulmanes, chrétiennes, juives, etc.…aient leur place en un seul système éducatif public et gratuit. Mais parce que cette idée se heurte aux institutions étatiques de ce système, la vraie laïcité passe par le renversement du capitalisme.

  • Situations à l’américaine dans l’enseignement

    CELUI QUI lit "Mike contre-attaque" de Michael Moore trouve au cinquième chapitre un aperçu peu flatteur des situations intolérables dans l’enseignement américain.

    Kristof Bruylandt

    Infrastructures dangereuses, surpopulation, assujettissement du contenu des cours à la commercialisation sous l’effet du sponsoring, endoctrinement, personnel mal rémunéré et élèves démotivés. Celui qui pense que cela ne se passe qu’aux USA se trompe. Car chez nous ces situations sont aussi de plus en plus fréquentes.

    Un tas d’écoles belges ne sont pas à la hauteur des réglementations de sécurité, mais elles ne sont pas fermées car on manque de bâtiments. Dans certaines écoles, le nettoyage est même effectué par les enseignants. Ces derniers ne sont pas dédaigneux vis-à-vis de ce type de travail, mais le nettoyage ne fait pas partie de leurs tâches et en outre le personnel de nettoyage voit disparaître ses emplois.

    Entre-temps, différents groupes d’écoles proposent maintenant, après la privatisation des cantines, la sous-traitance du nettoyage aux firmes qui embauchent des nettoyeuses intérimaires qui "ne sont jamais malades". Les syndicats ont des arguments valables contre cette dégradation des conditions de travail, mais n’ont aucune stratégie pour s’opposer à cela. Dans beaucoup d’écoles ils donnent même leur aval "parce que il n’y a pas suffisamment d’argent pour continuer à payer une équipe de nettoyage avec une enveloppe beaucoup trop limitée."

    Sous prétexte d’autonomie locale, l’enseignement est impitoyablement mis sur la voie de la privatisation. Les enseignants syndiqués qui invoquent les conventions collectives pour s’opposer à la surcharge des tâches supplémentaires (ex: une colle le mercredi après-midi) doivent faire face au discours de la direction qui invoque la position concurrentielle de l’école. Les stagiaires qui ne plaisent pas au directeur qui n’ont pas suffisamment "l’esprit maison" sont écartés sous prétexte qu’ils nuisent à la réputation de leur établissement.

    Des profs de travaux pratiques sont mis sous pression par la direction pour qu’ils produisent pour des clients (par exemple des imprimés) au lieu d’apprendre aux élèves de nouvelles techniques. Et bien que la Constitution proclame que l’enseignement est gratuit jusqu’à l’âge de 18 ans, les parents doivent supporter chaque année des frais scolaires de plus en plus lourds. Dans certains établissements, les élèves doivent même payer pour l’accès à Internet.

    En Communauté française, le ministre de l’Enseignement secondaire, Pierre Hazette (MR) a lancé l’idée d’imposer aux professeurs du libre qui voudraient passer dans l’officiel subventionné une formation de 20h à la *neutralité+, ce qui, d’après Pierre Hazette, *ne serait pas un cours mais une formation à l’esprit de tolérance et à certaines valeurs qui feraient outre des conceptions idéologiques ou religieuses des enseignants, dans un but de neutralité indispensable à l’école publique+. En clair, cela signifie dépenser de l’argent pour former la main-d’oeuvre à la non-critique tout en maintenant par une autre voie les barrières liées à l’origine des diplômes, et ce alors que la pénurie d’enseignants est plus que jamais d’actualité.

    Le projet a finalement été revu, et ces cours de neutralité seront insérés dans la formation initiale de tous les futurs profs. On constate un réel refus de remédier aux vrais problèmes, tout en continuant d’appliquer les mesures d’austérité par la petite porte. Ainsi le même Pierre Hazette veut *apporter du renfort aux directeurs d’école+ par le système des titres-services, via les ASBL liées aux écoles. Autrement dit augmenter la flexibilité en favorisant une filière qui créerait de nouveaux sous-statuts dans l’enseignement. Les négociations salariales, quant à elles, sont en cours. Les syndicats exigent une augmentation des salaires de 10% en 7 ans. Mais ces revalorisations salariales ont une fâcheuse tendance à être écartées par la politique, qui préfère miser sur une nouvelle attaque sur les fins de carrière en instaurant un système de départ régressif à la retraite exprimé en 1/5 temps (au lieu de mi-temps ou temps plein), ceci afin de dissuader les vétérans de décamper.

  • Bologne: Cheval de Troie de la privatisation

    Ces dernières semaines, plusieurs manifestations se sont déroulées contre le décret Dupuis, du nom de la ministre PS de l’Enseignement supérieur. Mercredi 12 novembre, 12.000 grévistes (personnel et étudiants des Hautes Ecoles flamandes) se sont rassemblés à Bruxelles.

    Nicolas Croes

    Le jeudi 11 décembre, 15.000 étudiants des hautes écoles francophones ont manifesté à Bruxelles. Peu avant, des milliers d’étudiants ont manifesté à Liège et à Mons pour exprimer leur colère, entre autres devant les bureaux du PS. Le décret de Dupuis vise l’application en Communauté française des accords internationaux de Bologne.

    Les principaux mots d’ordre des étudiants des hautes écoles mettaient en avant la différence de niveau probable, à l’avenir, entre écoles supérieures et universités. En effet, si le décret prévoit de porter le nombre d’années d’études universitaires à 5 ans au lieu de 4, rien n’est prévu pour les hautes écoles, qui garderaient des cycles de 3 ou 4 ans. Ces étudiants craignent donc que leurs diplômes ne soient dévalorisés sur le marché de l’emploi, et font de l’augmentation du temps d’études leur principal slogan. Cependant s’ils se prononcent contre le décret Dupuis, ils ne remettent aucunement en cause les accords de Bologne. Et pourtant…

    Par exemple, un des grands axes de Bologne est la mobilité, prévoyant d’encourager les études à l’étranger, valorisées par un système de points additionnels sur le diplôme (ECTS). Mais rien n’est prévu pour financer ces voyages. Tout favorisera donc les étudiants aisés… De plus, outre la disparité entre les différentes institutions d’enseignement, l’harmonisation prévoit surtout un enseignement orienté aux besoins du marché, donc dans lequel le patronat aurait beaucoup plus à dire.

    La législation européenne prévoit que nul secteur ne peut être privatisé s’il ne répond pas à deux critères: fournir la preuve que ce secteur peut être fonctionnel sans une intervention de l’Etat et s’assurer que ce secteur produit des marchandises exportables. En ce qui concerne l’enseignement sans aide de l’Etat, les écoles supérieures privées anglaises, très élitistes, montrent qu’elles peuvent très bien se passer d’une intervention de la communauté, leurs étudiants étant issus de milieux (très) aisés. Par contre, l’enseignement supérieur ne produira pas de diplômes exportables, tant que Bologne ne sera pas mise en application. Bologne signifie augmentation du minerval, diminution de la qualité des études, disparition de certains secteurs "non rentables", diminution de crédits pour d’autres "moins rentables",… Cette longue liste nous rappelle la situation dans d’autres secteurs privatisés. C’est pourquoi nous devons lutter tous ensemble.

  • Prépensions. Lettre à Frank

    Cher ministre de l’Emploi et des Pensions,

    J’ai lu que tu vas commencer un débat sur l’avenir des prépensions et d’autres systèmes de pensions anticipés. Mais les élections sociales, européennes et régionales doivent d’abord être passées. Tu dois d’abord être sûr d’une victoire étourdissante des partis de la coalition violette, il faut d’abord répartir les postes et puis… il faut tirer des conclusions.

    Johan Douveren

    Parce que tu nous a avertis: "Sans une réforme profonde de notre marché de travail nous ne pouvons pas garder notre niveau de prospérité ". Le système des prépensions est donc en haut de la liste des choses à grignoter. Oui, je veux dire grignoter. Parce qu’il y a aussi une pression de l’Europe de bouffer le système en une fois. Mais viens, tu veux goûter. Peu à peu tu vas t’attaquer aux prépensions… jusqu’à un certain jour où les gens ne pourront plus jouir de la pré-pension lors d’une fermeture d’entreprise.

    Le grignotage a commencé. Cher Ministre, tu désires de nous que l’on travaille tous plus longtemps afin de continuer à pouvoir payer les pensions. Et nous devons construire notre carrière de façon plus flexible. Un de tes collègues libéral dit même que chaque homme/femme doit devenir le manager de son ou de sa propre carrière.

    Beaucoup de jolies phrases, mais que va-t-il se passer si la crise économique continue à ramper et si toi et tes amis violets continuez entre-temps de grignoter la sécurité sociale… Peut-être qu’une grande couche de la population devrait commencer à gérer leur vie dans la pauvreté? Je suis trop grossier? Probablement. Mes excuses, monsieur le Ministre, parce qu’ils disent que tu es le plus intelligent de la classe et le plus brave selon Yves Desmet du journal De Morgen. Le plus brave, parce que tu oses parler de la problématique du vieillissement et de la brève durée de travail des Belges, qui sont les causes pour lesquelles notre sécurité sociale est mise sous pression.

    Est-ce que ça demande tant de courage de chercher une solution en coupant dans les droits acquis des travailleurs, pendant que les profits de ceux qui ont vraiment le pouvoir restent intacts. Nous devons avoir le courage d’ouvrir véritablement le débat. Nous devons oser poser chaque question. Tout le monde se focalise sur le vieillissement, mais notre sécurité sociale n’est-elle pas sous pression parce que notre type d’économie est sous pression?

    Pourquoi dans ce débat ne parle-t-on jamais d’une économie des besoins au lieu des profits? Pourquoi crois-tu tellement dans une troisième voie (un marché libre avec des petits côtés sociaux) si tu sais (comme tu es le plus intelligent de la classe) que pendant une crise économique les côtés sociaux sont coupés avec les ciseaux du petit groupe qui a beaucoup de pouvoir?

    Ton président de parti appelle les socialistes qui choisissent la troisième voie des socialistes "modernes". Les socialistes qui ne choisissent pas cette voie sont nommés des "vieux" socialistes. Bien, monsieur le Ministre de l’Emploi et des Pensions, le MAS/LSP est en train de se construire avec beaucoup de "vieux" travailleurs, lycéens et étudiants,… pour un socialisme combatif. Le MAS/LSP lutte pour le maintien des prépensions, pour une pension complète à l’âge de 60 ans pour tous les hommes et les femmes, contre la privatisation du système de pensions, pour le rétablissement total de l’index et contre l’érosion des pensions d’état.

  • STIB: construire le rapport de forces

    Les travailleurs de la STIB (tram, bus et métro bruxellois) et leurs organisations syndicales ont mené deux journées d’actions réussies les 6 et 12 décembre. Le samedi 6 les conducteurs ont fait rouler les bus, trams et rames de métro sans faire payer les passagers. Le vendredi 12 une grève de 24h a paralysé l’ensemble du réseau.

    Guy Van Sinoy

    L’étincelle qui a mis le feu aux poudres est l’arbitraire avec lequel la direction entendait distribuer, de façon inéquitable et uniquement au personnel du métro, une prime de certification (la prime allait de 200 euros à plusieurs milliers d’euros selon que l’on était conducteur de rame ou cadre de haut vol). Rien n’avait été négocié avec les syndicats. Lors des assemblées syndicales préparatoires aux deux journées d’action, la revendication d’une prime égale de 200 euros pour l’ensemble des 6.000 travailleurs de la STIB a émergé.

    Le 12 décembre, aux piquets à l’entrée des différents dépôts, le ras-le-bol des travailleurs éclatait: "La prime de 200 euros, ce n’est pas le plus important. On en marre des conditions de travail qui empirent: un conducteur n’a plus le temps de souffler pendant sa journée de travail. La montée des passagers par l’avant (une mesure qui vient d’être instaurée sur certaines lignes de bus) va faire perdre du temps. Au métro les conducteurs devront prendre leur service directement à l’une ou l’autre station sur le réseau. Jusqu’à présent ils commençaient par pointer au dépôt. Désormais le temps pour se rendre à la station de prise de service ne fera plus partie du temps de travail (surtout si on fait des services coupés) et on n’a plus l’occasion d’avoir le contact avec les collègues au dépôt. De plus il est prévu que l’entretien des nouveaux trams soit confié à des firmes de sous-traitance".

    D’autres sujets revenaient aussi sur le tapis: le mécontentement à propos de la dernière convention signée par les permanents syndicaux et les premiers délégués de dépôt, sans informer les travailleurs et contre l’avis de la majorité des délégués. Le calcul du temps de travail sur une moyenne annuelle va faire perdre des jours de récupération à certains conducteurs et suscite une grande méfiance. L’assurance-groupe auprès d’une compagnie d’assurances privée rencontre aussi une large opposition à la base.

    Au cours des semaines précédant la grève, le MAS/LSP a diffusé simultanément sur quasi l’ensemble des dépôts un bulletin d’information critique réalisé par des travailleurs de la STIB. Il est certain que ce petit bulletin, malgré les conditions modestes dans lesquelles il a été réalisé, a fait réfléchir et a apporté sa pierre au mouvement.

    Mais rien n’est encore gagné. A quelques mois des élections sociales, il faut craindre que les appareils syndicaux n’organisent la surenchère et la division entre syndicats.

    Les travailleurs n’ont que faire des divisions. Ils ont besoin d’unité comme de pain! Des assemblées générales dans les dépôts de tous les travailleurs peuvent souder le personnel et faire reculer les plans de la direction d’aller vers plus de flexibilité et vers une semi privatisation.

  • Ecoles pour caïds. Quatre écoles pour le prix d’une!

    Ecoles pour caïds.

    Pierre Hazette, ministre (MR) de l’Enseignement secondaire en Communauté française a proposé en novembre 2002 la création d’un centre à Bruxelles pour élèves exclus d’écoles ou coupables de faits particulièrement graves. Cette école pour caïds aurait constitué une structure supplémentaire venant s’ajouter à ce qui existe déjà pour les élèves exclus du système scolaire. Un débat a eu lieu au gouvernement car le PS et Ecolo s’opposaient à une logique de ghettoïsation des jeunes difficiles et préféraient favoriser la mise sur pied d’équipes mobiles qui iraient dans les écoles. Ils voulaient également renforcer les dispositifs existants, c’est-à-dire les services sociaux chargés de s’occuper des jeunes en crise (SAS).

    Céline Moulin

    L’exécutif de la Communauté française a finalement décidé de subventionner quatre nouveaux SAS (à côté des 8 existants). En fait, cela revient à créer 4 écoles pour caïds au lieu d’une seule.Pierre Hazette admet cependant que cela risque d’encourager les écoles à exclure plus facilement les élèves difficiles mais il prétexte que le fait qu’il n’y ait que 4 fois 25 places limitera cette tentation. Il ajoute pourtant qu’il souhaite, par souci de proximité, multiplier ce type d’établissements et augmenter leur capacité d’accueil.

    Notons également que Pierre Hazette est un adepte des titres services qu’il tente de faire entrer dans l’enseignement: il suggère clairement aux écoles subventionnées d’y avoir recours pour faire face à certaines tâches administratives… Bref, de plus en plus d’exclusions "organisées" par les pouvoirs publics pour les jeunes les plus fragiles économiquement, le tout sur fond d’emplois précaires.

  • Russie: Poutine gagne les élections parlementaires

    AUX ELECTIONS parlementaires du 7 novembre en Russie le parti de Poutine, Russie Unie, a obtenu la victoire. Avec 37,1% des voix il va probablement être capable (avec les autres partis qui défendent la même politique asociale) de former une majorité des 2/3 à la Douma, le parlement russe. Cette suprématie va lui permettre de changer la constitution. Les lois régissant le travail et l’enseignement vont être les premières dans le collimateur.

    Laurent Grandgaignage

    Après Russie Unie, le Parti communiste (PC) et les Démocrates libéraux (LDPR) obtiennent respectivement 12,7% et 11,6% des voix. Le nouveau bloc nationaliste Rodina (Pays Natal) a obtenu 9,1%. Les autres partis n’ont pas obtenu le seuil électoral de 5%.

    La victoire de Poutine doit être relativisée par la faible participation aux élections. La population russe n’a plus confiance en la pseudo "démocratie dirigée" du Kremlin. La politique pro-occidentale de Poutine et de ses prédécesseurs n’a pas amélioré le niveau de vie du russe moyen.

    Russie Unie dispose maintenant d’une marge de manoeuvre pour mettre en application les libéralisations sans protestation d’une opposition sérieuse. Les travailleurs et les jeunes en feront les frais tant qu’il manquera un parti ouvrier capable de défendre les intérêts de la population.

    Ce n’est pas une coïncidence si depuis la chute de l’Union soviétique le parti du président obtient la majorité. Ces dernières années les droits démocratiques ont été systématiquement bafoués. Une nouvelle loi empêche les petits partis de mener campagne. Pour être "validé" un petit parti doit avoir un certain nombre de membres, une infrastructure (comme des bâtiments) et doit exister dans toute la Russie. Il est évident que les petits partis n’en ont pas les moyens.

    Comme le CIO l’avait prédit après la chute du stalinisme, il n’est pas possible de construire une démocratie capitaliste stable en Russie. Avec Poutine comme bonapartiste (quelqu’un qui se base sur la force ouverte de l’état) cette perspective à été confirmée.

    De plus, les médias sont sous contrôle de l’état. Pendant les élections, ils étaient du côté du Kremlin. Une potentielle opposition au gouvernement aurait été effrayée d’avance. A l’automne, l’arrestation de l’oligarque notoire Chodorkovski a été arrêté un avertissement aux capitalistes russes: soutenir l’opposition peut avoir des conséquences néfastes! Et Poutine a eu le soutien de la puissante bureaucratie d’état.

    Malgré les critiques des observateurs internationaux, sur un nombre de normes démocratiques qui n’ont pas été respectées et sur une éventuelle fraude dans quelques républiques de Russie, il n’y a quasiment pas d’opposition politique contre Poutine. Le PC a perdu sa crédibilité – beaucoup de ses membres sont passés à LDPR et Rodina – et donc a perdu à peu près la moitié de ses voix. Au cours des quatre dernières années, le PC na pas été capable de mener une opposition contre le Kremlin. De plus il a mis aux places éligibles sur ses listes majoritairement des industriels du pétrole.

    Nous ne pouvons pas oublier que 5% des électeurs ont utilisé l’option électorale "contre tous les candidats". Le vide politique à la gauche existe, mais les tentatives de deux fédérations syndicales indépendantes de fonder un parti ouvrier ont échoué.

    Résistance socialiste (la section du CIO dans la CEI) a accueilli, au début, favorablement les tentatives de former un parti ouvrier et voulait aussi le soutenir aux élections. Mais nous ne pouvions pas être d’accord avec la participation de ce groupe au bloc chauvin de Rodina. En fin de compte nous avons appelé a voter "contre tous les candidats" et en même temps à construire une alternative politique concrète. Seul un parti ouvrier fort avec un programme socialiste est capable de monter une opposition forte contre le Kremlin et contre le capitalisme russe.

  • Manifeste avec nous contre le NSV!

    11 mars 2004 à Anvers

    Le 11 mars, le NSV (l’organisation étudiante officieuse du Vlaams Blok) organise une marche fasciste à Anvers.

    Le NSV, Organisation étudiante Nationaliste, écrivait en 1996 dans son journal : "Un nègre, qui a grandi dans la jungle en Afrique, qui allonge les propres lobes de ses oreilles jusqu’au sol, qui enduit ses propres cheveux avec de la bouse de vache peut singer nos habitudes d’homme blanc, mais il n’arrivera jamais sur le plan intellectuel à notre niveau car entre autres le volume de son cerveau est de toute façon plus petit."

    Cette année le NSV a organisé un concert à Gand avec un groupe nazi le jour de la commémoration de la Nuit de Cristal (le jour où les nazis ont commencé, dans les années 30, les rafles contre les juifs).

    Blokbuster et Actief Linkse Studenten (ALS) appellent à une contre-manifestation le 11 mars pour empêcher le NSV de parader dans la métropole anversoise. La seule année où il n’y avait pas eu de contre-manifestation contre le NSV, en 1997 à Anvers, des immigrés et des militants de gauche ont été physiquement agressés par des nervis du NSV.

    Nous voulons manifester contre le NSV car ce n’est pas un banal cercle étudiant. C’est une pépinière de futurs parlementaires fascistes et un endroit où se préparent les coups de main violents. La lutte contre le fascisme n’est pas une lutte révolue: le concert nazi organisé lors de l’anniversaire de la nuit de cristal l’atteste.

    Avec cette manifestation, nous voulons nous protester contre le racisme mais aussi manifester pour une véritable opposition à la politique antisociale du gouvernement, une opposition de gauche qui résiste contre la politique d’austérité néolibérale qui crée le terreau idéal pour une montée de l’extrême droite.

    Nous vous appelons tous à participer à la préparation et à l’organisation de cette manifestation (mettre sur pied un comité de mobilisation, nous contacter pour faire des tractages, nous aider financièrement,…). Tous ensemble contre le racisme.

    NO PASARAN!

  • Un vrai emploi. OUI! Un petit boulot. NON!

    Vandenbroucke (SP.A) prétend créer 25.000 "emplois" grâce aux chèques services. Dans les six mois ceux qui travaillent en échange de chèques services doivent avoir au moins un mi-temps, sauf pour ceux qui travaillent en noir et qui passent dans le système des chèques services. Les chômeurs ne peuvent refuser car l’ONEm considère ces petits boulots comme un "emploi à part entière".

    Anja Deschoemacker

    Il s’agit d’une gigantesque mystification. La discussion sur les chèques de services ne tient pas compte des besoins réels de la société ni de comment y répondre. Elle vise à détruire la notion de véritable emploi avec un vrai salaire. C’est à dire un emploi qui procure un salaire à part entière.

    Les deux dernières décennies ont vu une extension phénoménale du travail à temps partiel. L’argument pour introduire massivement le travail à temps partiel, surtout pour les femmes, a été d’harmoniser la vie professionnelle et familiale. On voit aujourd’hui le résultat dans une société qui place les profits avant les besoins. Des chômeuses seront forcées de faire une partie du ménage des femmes qui travaillent dans le cadre d’un contrat précaire, sans salaire à part entière.

    Au lieu de socialiser les tâches domestiques, comme le revendiquent les marxistes, on propose une solution individuelle. Les acquis des travailleurs sont ainsi grignotés. Un temps de travail inférieur au mi-temps est aujourd’hui considéré comme "emploi à part entière". Vandenbroucke va de plus en plus loin pour placer la Belgique dans le sillage des Etats-Unis en matière de politique d’emploi. A défaut d’une résistance organisée, la catégorie des travailleurs pauvres va connaître dans notre pays une extension rapide comme outre Atlantique.

    On devrait s’attendre normalement à une résistance organisée par les syndicats. On voit au contraire Mia De Vits (FGTB) voler au secours du gouvernement pour mettre le SP.a et le PS d’accord. De Vits, qui devrait lutter pour de vrais emplois avec de vrais salaires pour tous, a proposé la régionalisation du système. Les exécutifs wallons et bruxellois auront donc une marge de manoeuvre dans la mise en application du système. Cela permettra au PS de sauver la face et de masquer sa responsabilité en matière de création d’emplois précaires.La flexibilité accrue, l’extension du travail à temps partiel, la possibilité de forcer les chômeurs à accepter un emploi à temps partiel inférieur à un mi-temps,… – et tout cela subsidié par le gouvernement (donc par nos impôts) – sabotent toute solution collective du chômage et aggrave la pression sur les travailleurs sur le lieu du travail. La solution pour donner un vrai emploi à chacun avec un vrai salaire est la diminution du temps de travail sans perte de salaire, avec embauches supplémentaires et la création de services collectifs. C’est une solution qui répondrait au besoin de socialiser les tâches domestiques accomplies aujourd’hui quasi gratuitement par les femmes. Un service public, devrait créer en plus des emplois statutaires, à temps plein et avec un salaire décent.

    Ce n’est pas la voie suivie par le SP.a ni par le PS. Cela montre que pour eux il ne s’agit plus de créer des emplois mais d’enjoliver les statistiques du chômage et d’exclure encore plus les femmes d’un véritable emploi, seule garantie de leur indépendance financière.

  • “La flexibilité à fond la caisse!”

    Les nouveaux esclavagistes

    CHAQUE JOUR des dizaines de milliers d’intérimaires travaillent dans les entreprises de Belgique. Engagés la plupart du temps pour une durée d’une semaine, ce sont des travailleurs sans droits car la moindre protestation entraîne le non renouvellement du contrat. Nous avons rencontré un travailleur intérimaire qui nous parle de ses conditions de travail. Comme il a besoin de travailler pour vivre, il a préféré garder l’anonymat. Nous l’appellerons donc René.

    Propos recueillis par Guy Van Sinoy

    Quand nous écrivons que les travailleurs intérimaires sont surexploités, certains pensent que nous exagérons. Peux-tu parler de ton expérience?

    René: Une mauvaise expérience dont je peux parler, c’est chez Mamma Lucia, une entreprise du zoning de Nivelles qui fabrique des lasagnes industrielles. La première chose qui frappe en entrant dans la boîte, c’est que la majorité des travailleurs sont intérimaires, ce qui est déjà illégal. En effet, la loi ne permet le recours aux intérimaires que pour remplacer des travailleurs contractuels malades ou en congé, ou encore en cas de travail exceptionnel. Chez Mama Lucia, l’exception est la règle!

    Deuxièmement: tu sais quand tu rentres mais tu ne sais pas quand tu sors. Il n’y a pas d’heures fixes (Ce qui est illégal car les horaires doivent être fixés par le règlement de travail décidé par le Conseil d’entreprise. ndlr). Si tu es en équipe d’après-midi, tu commences à 14h mais tu peux finir à minuit, 2h ou 4h du matin selon les besoins de la production.

    Cela fait donc parfois des journées de travail de plus de 12 heures?

    Cela m’est arrivé de rester au travail plus de 14 heures, mais eux ne comptent pas comme cela. Mon travail consistait à emballer les plats préparés sortant de la machine. Quand la machine de la production a du retard, on doit attendre à la cafétéria mais on n’est pas payé. Il se peut que l’on doive rester 1h15 à la cafétéria sans que cela ne soit considéré comme temps de travail.

    C’est le secteur de l’alimentation? Quel était le salaire horaire?

    Cela tournait autour de 10 euros de l’heure. Les primes d’équipes sont minimes: après 22 heures la prime est de 15%.

    En quoi consistait ton travail?

    Les plats préparés sortent de la chaîne et il faut les mettre à la main dans des plastiques qui sont pressés puis cela passe dans une machine qui étiquette. C’est assez stressant car il faut suivre le rythme, debout, avec masque, bottes et gants.

    Il n’y a pas de syndicat dans cette entreprise?

    Je n’ai jamais vu de délégué. Je suppose que le poids syndical doit être faible, voire nul, car la majorité des travailleurs sont intérimaires. Sans compter les employés qui sont dans les bureaux, j’estime qu’il doit y avoir une centaine d’ouvriers au travail dans cette usine dont 2/3 d’intérimaires.

    Comme les travailleurs sont en contact avec des denrées alimentaires, je suppose que les intérimaires passent – c’est prévu par la loi – un examen médical pour vérifier s’ils n’ont pas de maladies contagieuses?

    Oui, c’est possible, mais on ne m’a jamais fait passer d’examen médical! On m’a juste demandé d’avoir les mains propres!

    Où trouve-t-on ces lasagnes dans le commerce?

    Tu vas rire car c’est le même produit qui est emballé sous des noms différents: Mamma Lucia, Carrefour, GB. Tout à coup on arrête la chaîne, on change les étiquettes et on remet la chaîne en route!

    Tu étais engagé à la semaine?

    C’est même pis car ils font des contrats à la journée. Sur la semaine on te fait quatre contrats d’une journée car souvent on ne travaille pas le vendredi. C’est vraiment la flexibilité à fond la caisse!

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