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Category: Politique belge
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Un “dimanche noir” se profile à l’horizon… N’attendez pas pour entrer en résistance !
À 100 jours des élections, le Vlaams Belang était donné à 27,8 % des intentions de vote en Flandre. Et, malheureusement, nous ne sommes pas encore au bout de nos peines alors que la N-VA s’enfonce de plus en plus dans les sondages et dans la surenchère de droite à propos des mesures d’austérité à réaliser sur le dos de la population. Si la gauche veut représenter une réponse, elle devra dépasser la stratégie du marketing politique. Une campagne audacieuse et mobilisatrice basée sur la lutte et la solidarité pour défendre une société qui ne laisse personne de côté.
Par Geert Cool
Migration et pouvoir d’achat
Selon le même sondage, les deux principales priorités des électeurs sont la migration et le pouvoir d’achat. Il existe un lien entre les deux. La politique du sous-investissement chronique pour toutes les matières sociales et de soutien sans faille aux souhaits patronaux exerce une pression sur les conditions de vie de la classe travailleuse tout en créant un espace pour la politique du bouc émissaire. A cela s’ajoutent encore les multiples crises du capitalisme à travers le monde (pas pour tout le monde: le fossé est grand entre l’élite au sommet qui s’enrichit toujours plus et la précarité croissante pour la majorité sociale) qui alimentent le flot de réfugiés à la recherche d’un meilleur avenir, voire d’un avenir tout court. Faire porter la faute de l’échec du système sur les migrants, cela revient à culpabiliser les victimes. L’extrême droite est passée maître en la matière, mais d’autres partis y ont également de plus en plus recours. Soyons clairs : ce ne sont pas les réfugiés de Gaza, de Syrie ou d’Afghanistan qui planquent des milliards d’euros dans les paradis fiscaux !
La droite dit que la gauche veut plus de réfugiés, c’est faux. Nous défendons tout au contraire un système fondamentalement différent où plus personne n’aura à fuir la misère et l’exploitation, mais pourra s’épanouir auprès de ses proches et ne chercher d’autres cieux que de plein gré. C’est parfaitement possible, mais cela exige de mobiliser les moyens et richesses disponibles pour répondre aux besoins de la majorité de la population, et non pour satisfaire la soif de profit de la classe capitaliste. Avec une stratégie anticapitaliste consciente, les marxistes s’attaquent aux racines des nombreux problèmes inhérents au système dominant. Par exemple, si l’on veut répondre aux inquiétudes liées au pouvoir d’achat, ce n’est pas vers les migrants qui survivent dans les rues de Bruxelles qu’il faut regarder, mais vers les profits records des grandes entreprises. Parallèlement, nous défendons de fournir un abri digne à chacun, par exemple en examinant que faire du million de mètres carrés d’espaces de bureaux vacants à Bruxelles. Mais pour l’extrême droite, trouver l’argent là où il se cache ou s’attaquer à la spéculation immobilière, ce sont des tabous.
La croissance électorale de l’extrême droite révèle la rupture grandissante à l’égard de la politique dominante, mais cette voie n’offre comme perspective qu’une aggravation de tous les excès. Dans cette ère d’inégalités extrêmes, il est naturel que beaucoup de gens se révoltent. La contradiction est grande entre la série de crises du capitalisme et le gigantesque potentiel que permettent les richesses et le savoir-faire technologique actuels. Cette contradiction n’est pas une question d’origine, mais de classe. La seule issue est une lutte de classes menée par la classe travailleuse dans toute sa diversité et à l’échelle internationale. Au lieu d’être sur la défensive et divisés, nous devons nous unir dans le combat pour prendre le contrôle des richesses que nous produisons.
La menace est réelle
Tout ce que défend le Vlaams Belang sera encore plus banalisé avec un nouveau succès électoral. C’est inévitablement synonyme d’attention plus forte sur tout ce qui divise la classe travailleuse mais aussi d’incidents violents. C’est déjà ce à quoi nous avons assisté après les élections précédentes, lorsque le VB a atteint 18,5 %. D’autre part, la menace ne se limite pas à la Flandre. En Wallonie, il existe le parti “Chez Nous”, sous perfusion de fonds et d’assistance technique du VB et du Rassemblement national français, entre autres. Heureusement, la mobilisation antifasciste et le poids électoral du PTB font contrepoids. L’exemple portugais du parti Chega montre toutefois que l’extrême droite peut rapidement progresser : l’extrême droite est passée de 1,3 % en 2019 à 18,1 % en mars. L’incapacité de la gauche radicale portugaise à former une alternative au gouvernement prétendument “de gauche” n’y est pas étrangère. À Bruxelles, Chez Nous ne se présentera pas, de manière à laisser tout l’espace d’extrême droite aux listes du VB, ce qui pourrait conduire à un blocage politique.
La nouvelle génération de dirigeants d’extrême droite sait comment mieux se positionner dans le débat public, mais leur fonds de commerce reste la discrimination violente. Le président du VB Tom Van Grieken a été présenté comme une sorte de “gendre idéal”, c’est également de cette manière que le nouveau président du RN français, Jordan Bardella, tente de faire oublier Jean-Marie Le Pen. Van Grieken a fait ses premières armes politiques au sein du NSV, le cercle étudiant officieux du VB, connu par son racisme outrancier et son ouverture au combat de rue. L’emballage a évolué, rien d’autre.
Nombre de mesures défendues par l’extrême droite ont été progressivement adoptées par d’autres partis, ce qui ne les a pas rendus plus “modérés”. La normalisation de l’extrême droite conduit à davantage de tensions sociales et de violence. Cela augmente aussi le risque que l’extrême droite parvienne au pouvoir. Le cordon sanitaire est incapable à lui seul de stopper l’extrême droite, mais il est effectivement irresponsable de lui permettre de participer au pouvoir. Cela ne lui “brûlerait pas les ailes”, cela la placerait dans une meilleure position pour concrétiser sa haine et attaquer le mouvement ouvrier, entre autres. Avec l’arrivée de Bart De Wever (N-VA) au maïorat d’Anvers, la police a été déployée pour réprimer les grévistes au port d’Anvers et traduire les dirigeants syndicaux en justice. L’arrivée de Van Grieken & Co dans une coalition reproduira la chose à une échelle encore plus grande. C’est un danger pour tous les syndicalistes, les personnes LGBTQIA+, les féministes, les migrants…
Ce qu’il faut faire
Laisser la lutte contre l’extrême droite aux partis traditionnels, aux médias ou aux juges est un acte de faiblesse et d’irresponsabilité. Certes, la condamnation de Dries Van Langenhove (Schild&Vrienden) est positive, mais elle ne met pas fin à la menace. Cela lui permet au contraire de se présenter comme une prétendue victime de l’establishment. La stratégie politique du mouvement ouvrier et de la gauche ne peut pas se concentrer sur ce que les institutions capitalistes devraient faire à notre place.
Par notre antifascisme constant, nous nous opposons au statu quo et au terreau sur lequel l’extrême droite peut se développer. Nous nous opposons à l’establishment capitaliste et refusons de faire confiance aux partis traditionnels. Nous ne nous tournons pas vers les responsables des politiques actuelles pour apporter des réponses à l’extrême droite, mais vers la classe travailleuse dans toute sa diversité. En nous organisant et en nous unissant dans la lutte, nous pouvons arracher un véritable changement. L’antifascisme militant limite l’espace de l’extrême droite et offre des opportunités pour défendre un programme social avec plus de force. C’est également dans ce cadre que nous appelons au meilleur vote possible en faveur du PTB. Tout cela vise à construire un rapport de forces qui permette à terme à notre classe de renverser le capitalisme.
Nous avons élaboré du matériel de campagne sous la forme d’un tract, d’un livret et d’autocollants. Le PSL participe avec enthousiasme à la Coordination antifasciste de Belgique et s’engage dans les actions antifascistes, telles que la manifestation anti-NSV à Anvers le 25 avril ou Pride is a Protest à Gand le 30 juin. Les 6 et 7 juillet, nous organiserons un week-end antifasciste afin d’approfondir, avec des militants de Belgique et d’ailleurs, la question de savoir ce que représente l’extrême droite et comment la combattre le plus efficacement possible. Antifascistes : organisez-vous et passez à l’action !
Manifestation anti-NSV à Anvers le 25 avril, 19h, Dageraadplaats.
Départs Collectifs: rendez-vous à Bruxelles : 17h30, hall de la Gare Centrale // A Liège : 16h45, face à la gare des Guillemins.
Dimanche 30 juin : trois semaines après le « dimanche noir », Pride is a Protest avec un « dimanche arc-en-ciel » à Gand.
6-7 juillet : week-end antifasciste
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Entretien avec Julien Dohet (FGTB) sur la création de la Coordination antifasciste de Belgique
La coïncidence méritait d’être soulignée. C’est alors qu’il se préparait à participer aux commémorations liégeoises de la Commune de Paris de 1871 et du soulèvement ouvrier de 1886 en Belgique que nous avons rencontré Julien Dohet pour discuter d’antifascisme. L’importance d’une riposte de classe face au système pourri qui engendre et alimente l’extrême droite s’imposait tout naturellement. Julien, Secrétaire politique du Setca-Liège et auteur de plusieurs ouvrages sur l’antifascisme, a joué un rôle de premier plan dans la création de la toute récente Coordination antifasciste de Belgique.
Propos recueillis par Nicolas Croes
Peux-tu commencer par nous expliquer comment on en est arrivé à cette coordination antifasciste nationale, une première depuis 30 ans l’air de rien…
Alors, la Coordination antifasciste de Belgique est officiellement née le 17 février dans le cadre des cinq ans du Front Antifasciste à Liège. Une première réunion a eu lieu à la mi-octobre à Bruxelles avec un premier texte pour baliser un peu vers quoi on allait. C’était une étape, mais aussi une forme d’aboutissement d’une réflexion en cours depuis quelques années, autour de la relance du Front antifasciste à Liège, de ce qui se passait avec le Réseau ADES ou Stand-Up à Bruxelles et avec la dynamique renouvelée d’autres groupes locaux. L’élément vraiment déclencheur qui a fait passer à quelque chose de concret et au-delà des discussions entre groupes, c’est la manif à Bruxelles contre le Vlaams Belang, de mémoire fin mai, et tout ce qui s’est passé en amont et en aval, avec toutes les difficultés constatées et identifiées dans les réunions de débriefing.
De là, l’initiative s’est mise en place tout doucement, avec des contacts qui existaient déjà, par la participation notamment de gens du Front antifasciste de Liège à toute une série d’actions. Par exemple, on a essayé d’assurer une présence à chaque fois qu’il y avait un appel clair précis de la part de camarades néerlandophones, même avec une petite délégation, à Anvers en 2019 contre un meeting avec Salvini (de la Ligue, parti d’extrême droite italien) ou tout récemment à Louvain en février dernier.
C’est de tout ça qu’est née une forme de coordination, un lieu d’échange pour structurer un minimum le réseau qui existe déjà et aider à son développement, parce qu’on pense qu’il y a beaucoup de trous à combler.
Plusieurs choses distinguent cette initiative de celle de 1996, particulièrement l’implication syndicale, à la fois dans les différents groupes locaux et directement dans la coordination. Cela souligne le rôle que doit jouer le mouvement ouvrier organisé dans le combat antifasciste.
C’est avec des échelles et des applications différentes en fonction des réalités de terrain, mais c’est bien le cas. Historiquement, le mouvement ouvrier a toujours été impliqué dans le combat antifasciste. Dès le départ, dans les années 1920, l’organisation syndicale a pris la mesure du danger en se mobilisant en Belgique contre la Légion Nationale d’Henri Graff (1922), contre les groupes de Pierre Nothomb (Parti de la Renaissance Nationale en 1919, Action Nationale en 1921, Parti National Populaire en 1925), etc. On résume souvent la montée de l’extrême droite dans les années 20-30 en Belgique au VNV (Vlaams Nationaal Verbond, soit Ligue nationale flamande) de Staf Declercq d’un côté et au parti Rex de Léon Degrelle de l’autre, on oublie qu’il y a eu des tentatives mises en échec avant cela. L’organisation syndicale les a contrées en plus d’être toujours en soutien des exilés italien par rapport à ce qui se passait en Italie, avec notamment des manifestations faisant suite à l’assassinat du socialiste italien Giacomo Matteotti par les fascistes en 1924.
À l’époque comme aujourd’hui, les fascistes ont cette idée de supprimer les corps intermédiaires, de supprimer les organisations syndicales, de casser le droit de grève, etc. Et donc forcément, ce mouvement est encore plus notre ennemi que la droite classique, ce qui ne veut pas dire que la droite classique est notre amie, mais à un moment donné, il y a un changement d’échelle et donc une réaction qui doit se faire en proportion.
À l’époque, dans un contexte différent, cela a conduit à la création de milices d’autodéfense ouvrières et ce genre de chose. L’étude de cette période est intéressante, on se rend par exemple compte que des débats que nous connaissons bien aujourd’hui existaient déjà : est-ce qu’on fait un contre-meeting ? Ou une contre-manifestation ? Ce jour-là ou alors à une autre date ? Est-ce qu’on ne les aide pas à se faire connaître en se mobilisant contre eux ?
Sur ce point, le récent Courrier hebdomadaire du CRISP (Centre de recherche et d’information socio-politiques, n°2579-2580) consacré au parti d’extrême droite wallon « Chez Nous » souligne à partir d’entretiens avec des militants du parti que les mobilisations antifascistes systématiques ont eu un effet démoralisant et démobilisateur sur nombre d’entre eux, parfois jusqu’à l’abandon de l’activisme.
C’est également ma conviction, une conviction qui s’impose notamment suite à 5 ans d’activités du Front antifasciste à Liège. Plusieurs facteurs expliquent la faiblesse de l’extrême droite organisée en Belgique francophone, mais l’un d’eux, c’est la mobilisation. Dès le départ, dès le début de l’émergence d’un embryon de structuration de l’extrême droite, tu dois les étouffer et les empêcher de se développer.
Plusieurs témoignages et plusieurs études montrent que la tactique est bonne, tu leur poses vraiment des difficultés en les empêchant de se réunir, en les marquant à la culotte à chaque fois qu’ils veulent faire un meeting. Tu ne sais pas les empêcher de faire un post Facebook, pas non plus les empêcher d’être à 3 sur un marché à distribuer cinq tracts pendant une demi-heure pour justifier leur photo postée sur les réseaux sociaux, mais les empêcher de s’organiser ou de coller leurs affiches, c’est possible. Le CRISP estime qu’ils ont 250 membres en Wallonie, mais être membre ce n’est pas être militant. Là, on parle plutôt de 20-30 militants. Mais avec de premiers élus aux élections à venir, ça peut changer.
La situation se présente différemment en Flandre, où le Vlaams Belang dispose de centaines d’élus depuis des années, avec un cadre qui s’est constitué au cours de décennies et un environnement où un jeune peut se dire qu’il va faire carrière dans ce courant politique sans être pour autant ostracisé.
Cela pose donc également la question de l’alternative politique et de la lutte sociale en commun pour concrétiser des revendications qui nous unissent pour les soins de santé, l’accès à des services publics de qualité, etc.
Moi, je dis toujours que je ne connais aucun militant antifasciste qui ne soit simplement qu’antifasciste. Dans l’antifascisme, tu vas retrouver des gens qui sont par ailleurs militants syndicaux, par ailleurs militants dans le social, par ailleurs militants dans toute une série de combats sociaux. Et le combat antifasciste, c’est un combat social. L’extrême droite, ça n’est jamais qu’une émanation. On est dans une crise du capitalisme, une crise de la répartition des richesses, avec une explosion de la pauvreté et en même temps une explosion des super riches.
On a besoin d’une politique de gauche, mais vraiment, car si c’est pour faire une politique de droite, alors c’est encore pire de participer au pouvoir plutôt que de ne pas y aller. Si la gauche ne représente plus d’alternative, il ne reste que l’extrême droite pour ceux qui sont dégoûtés et ont le sentiment d’être exclus. A un moment donné, tu as un électorat qui est en colère, qui est dégoûté par ce qui se passe, tu dois lui offrir un débouché politique à gauche. Sinon il passe à droite ou il déserte simplement.

Photo : Collectif Krasnyi -
Entretien des écoles communales à Gand, NON aux coupes budgétaires !
Fin 2022, le conseil communal « progressiste » de Gand s’est félicité d’avoir annoncé une nouvelle série de restrictions budgétaires de 21,5 millions d’euros, tout en précisant qu’il ne réduirait pas les budgets consacrés à la jeunesse, à l’éducation, à la petite enfance et à la culture. Mensonge !
Par Emilie (Gand)
Les coupes budgétaires sont entrées par la petite porte. La ville a appliqué une formule bien connue du monde de l’entreprise et a réalisé des économies substantielles sur ses sous-traitants. Depuis le 1er septembre 2023, Gand dépense 20 % de moins auprès des entreprises ISS et Atalian. Il s’agit de deux grandes entreprises qui fournissent au total quelque 250 membres du personnel d’entretien pour environ 70 écoles et musées de la ville. L’une des entreprises a procédé à des licenciements secs, l’autre a réduit le nombre d’heures de travail.
La fréquence des nettoyages a été ramenée de trois fois par semaine à une seule fois. Au cours de cette seule séance de nettoyage, les salles de classe, les couloirs, les réfectoires, les espaces sportifs et extérieurs ainsi que les installations sanitaires doivent être nettoyées. C’est tout bonnement impossible !
Les couloirs sont sales, surtout en hiver. Dans les salles de classe, les poubelles débordent. Les toilettes doivent être nettoyées tous les jours, mais le temps manque. Les coupes budgétaires de la ville de Gand affectent à la fois le personnel d’entretien, les enseignants et les élèves.
Beaucoup d’agents d’entretien ne supportent pas de laisser l’école sale et font des heures supplémentaires non rémunérées pour continuer à travailler. En raison des économies réalisées, ils et elles travaillent souvent dans différentes écoles, ce qui accroît le temps de déplacement. De plus, les contrôles sur le nettoyage sont toujours aussi stricts. La charge de travail et le stress sont très élevés. La plupart des employé.e.s sont de langue étrangère, n’osent pas se manifester et ont peur de perdre leur emploi.
Dans de nombreuses écoles, on demande aux enseignant.e.s de vider les poubelles et de contribuer à l’entretien des salles de classe et des couloirs. Après l’énorme pénurie d’enseignant.e.s, les heures de remplacement des collègues absents qui l’accompagnent et la forte pression administrative dans l’enseignement, on leur demande maintenant de compenser les réductions de personnel d’entretien !
Les élèves témoignent qu’ils attendent d’être rentrés chez eux pour aller aux toilettes parce que les installations sanitaires sont trop sales et qu’il n’y a pas de papier hygiénique. Eux aussi sont parfois appelés à nettoyer, que ce soit à titre de punition ou non. Il est logique que les élèves apprennent à nettoyer et à prendre soin de leur environnement, mais il est inacceptable qu’ils soient obligés de prendre en charge les tâches des agents d’entretien par souci d’économie.
Par conséquent, la Campagne ROSA soutient les actions du personnel d’entretien, de la SAAMO et des syndicats pour l’annulation des coupes budgétaires.
Le personnel d’entretien doit redevenir du personnel communal à part entière. Pour la réintégration immédiate du service donné aux sous-traitants dès maintenant !
- Annulation du paquet d’économies budgétaires de septembre 2023 !
- Augmentation de la fréquence de nettoyage des salles de classe et autres espaces dans les écoles !
- Garantie, grâce à du personnel supplémentaire, d’une charge de travail viable pour les agents de nettoyage dans les écoles, les musées et les autres bâtiments de la ville !
- Un salaire minimum de 17 €/heure !
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Lettre au PTB : relevons ensemble les défis de cette ère du désordre
La période électorale qui s’annonce revêt un caractère unique à plus d’un titre. Sur le fond, elles prennent place au beau milieu d’une crise profonde du système capitaliste et d’un processus de radicalisation et de polarisation croissantes. Sur la forme, toutes les échéances électorales se suivent en quelques mois, élections sociales incluses. Nous sommes convaincus que le résultat électoral obtenu par le PTB/PVDA représentera un atout pour la classe travailleuse et nous souhaitons donc assister votre dynamique de campagne.
Par le Bureau exécutif du PSL/LSP
Les services publics s’effondrent, tout comme notre pouvoir d’achat. La charge de travail est insoutenable et donne lieu à une véritable épidémie de burnouts. Les listes d’attente interminables règnent partout. La faillite de la politique dominante est déjà évidente dans tous les domaines alors que la crise climatique s’aggrave et que le danger de conflits militaires grandit. L’ampleur du manque de moyens donne une idée de celle des défis à relever pour une véritable politique de rupture. Sans cela, les nombreuses oppressions de ce système inégalitaire continueront d’être renforcées tandis que s’aggravera la menace contre nos droits démocratiques.
Sans surprise, la confiance dans toutes les institutions et leurs porte-paroles est au plus bas : le parti du Premier ministre n’atteint plus les 10 % dans les sondages ! Les partis traditionnels francophones ont beau s’en tirer un peu mieux, le déclin vertigineux de confiance est un processus global. En avril dernier, le Grand Baromètre RTBF-Ipsos soulignait que sept Belges sur dix se méfient de la politique actuelle (69%, un chiffre qui grimpait à 74% en Wallonie).
Comme le disait Gramsci : «Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres.» Il est de plus en plus clair que le capitalisme lui-même provoque et renforce les multiples crises et que les résoudre exige de renverser ce système. Tant qu’il n’existe pas de compréhension largement partagée de la manière de le faire, vers quelle alternative et avec quelle force sociale, cet enchevêtrement de crises sera un terreau propice au désespoir contre-révolutionnaire.
Le Vlaams Belang n’a pas grand-chose à faire pour marquer des points. Les autres partis ne cessent de lui donner de nouvelles opportunités et de banaliser sa politique. Mais si le racisme reste important, ce n’est pas son seul thème. Le VB cherche à jouer sur toutes les formes de mécontentement, en mettant l’accent sur la jeunesse et les populations rurales. Il tente de se différencier de la N-VA en critiquant les conséquences des politiques antisociales, même si le VB continue de rouler pour les riches. Le parti qu’il contrôle, Chez Nous, pourrait faire élire les premiers élus de l’extrême droite francophone depuis des années. Ce danger dans les urnes s’exprimera également par plus de violences raciste, sexiste et queerphobe dans les rues, alimentées également par les résultats de l’extrême droite et de la droite populiste d’autres pays.
Tout annonce qu’une nouvelle crise politique historique naîtra des élections fédérales et régionales dans un contexte où le FMI appelle les autorités belges à économiser à nouveau 30 milliards d’euros au cours des six prochaines années.
Dans ce contexte, nous avons été nombreux en Belgique à ressentir du soulagement au vu des prévisions de résultats électoraux à la faveur du PTB/PVDA en Wallonie, à Bruxelles et en Flandre. Nous sommes convaincus que la situation de la classe travailleuse en Belgique sera positivement renforcée par le résultat du PTB/PVDA et nous voulons y contribuer et mener campagne avec nos membres et sympathisants.
Leur enthousiasme ainsi que leur engagement dans la campagne serait stimulé par la présence de candidats de notre parti sur vos listes. Le PSL/LSP dispose de membres qui ont gagné un respect et influencent politiquement leurs collègues et au-delà. Ils et elles démontrent quotidiennement leur engagement sans faille dans le combat pour l’émancipation de la classe travailleuse, que cela soit au travers d’un travail syndical ou de l’implication dans les luttes féministes, antiracistes, contre la queephobie… Tant au niveau des élections européennes, fédérales, régionales que communales, nous pouvons contribuer à tous les niveaux à la dynamique combative nécessaire à la construction d’un rapport de force électoral. Nous pouvons également le faire sur les lieux de travail à l’occasion des élections sociales.
Nous comprenons bien la préoccupation centrale actuelle du PTB/PVDA, celle d’acquérir tout d’abord une expérience à l’échelon local avant de viser plus loin. Mais le mouvement social au sens large, des associations aux organisations syndicales, ne manque pourtant ni d’expériences ni de talents. Le PTB/PVDA pourrait les engager à ses côtés en utilisant sa campagne dans le but affiché de parvenir non pas simplement à des gouvernements de « gestion sociale » du statu quo avec le PS et ECOLO, mais à de véritables gouvernements de rupture reposant sur la force et la pression de la classe travailleuse organisée, dans le respect de sa diversité. Les listes du PTB/PVDA seraient encore plus positivement considérées par les travailleuses et travailleurs en reflétant ouvertement la diversité d’opinions de toutes celles et ceux qui veulent se battre pour une véritable politique de rupture.
Nous estimons que la meilleure campagne repose avant tout sur la lutte sociale. C’est la meilleure façon de démasquer le PS et ses promesses creuses. C’est justement ce pourquoi les sommets syndicaux font tout leur possible pour mettre les mobilisations syndicales en veilleuse jusqu’aux élections, un calcul dangereux pour protéger les « partis-amis » au pouvoir. Le plus efficace pour imposer nos revendications dans le débat public, c’est la mobilisation, la manifestation de masse, la grève. Les partis traditionnels seraient dès lors contraints de se prononcer au sujet des préoccupations des travailleuses et travailleurs au lieu d’alimenter une surenchère raciste dont seul profite le Vlaams Belang. La lutte sociale, c’est aussi la meilleure manière d’empêcher l’extrême droite de capter la colère et les frustrations quotidiennes.
Une telle dynamique de lutte est également importante pour construire la confiance dans l’action collective et préparer les combats à venir, une fois les élections passées. De sombres perspectives austéritaires se profilent pour tous les niveaux de pouvoir, y compris pour les communes dont de nombreuses sont sous tutelle financière de la Région bruxelloise ou du Centre régional d’aide aux communes, le « FMI wallon ». Il faudra une lutte intense pour briser la camisole de force budgétaire qui existe à tous les niveaux de pouvoir et pas seulement aux niveaux du fédéral et des régions.
Un changement fondamental et révolutionnaire de la société, c’est-à-dire la fin de la propriété privée des grands moyens de production, est une question d’urgence sociale, écologique et économique absolue. Y faire face exige un sens de l’urgence et une stratégie claire et ouverte vers la transformation socialiste de la société. Nous souhaitons participer à vos côtés à cet important débat ainsi qu’à la discussion sur la manière dont les échéances électorales peuvent être utilisées à cette fin, notamment autour d’une campagne ambitieuse concernant la « taxe des millionnaires ».
Nous vous proposons donc d’organiser une rencontre afin de discuter concrètement de la manière dont nous pouvons maximiser les gains électoraux des 9 juin et 13 octobre dans le cadre d’une campagne électorale liée à des initiatives de lutte et visant à populariser les thématiques de classe et la nécessité d’une transformation socialiste de la société.
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“Mutinerie” : un réquisitoire virulent contre la pourriture du capitalisme
Avec “Mutinerie” (qui sera disponible en français le 1ᵉʳ mars), Peter Mertens livre un nouveau best-seller de non-fiction. Cela est sans aucun doute dû à son style d’écriture fluide et incisif, mais indépendamment de cela, le livre est hautement recommandé pour les militants de gauche. Il apporte beaucoup d’informations utiles et aborde certains des développements les plus importants qui façonnent la nouvelle ère du désordre d’aujourd’hui. Mais en fin de compte, il est toutefois un peu maigre pour délivrer des réponses fondamentales quant à la façon de combattre le capitalisme à notre époque.
Par Jeroen (Gand)
La prise de pouvoir par les multinationales
De nombreux lecteurs découvriront une série de nouvelles idées et d’arguments bien utiles face au capitalisme. Certains des passages les plus puissants du livre décrivent de manière très vivante l’accumulation sans précédent du capital et du pouvoir qui l’accompagne entre des mains de moins en moins nombreuses.
Peter Mertens évoque par exemple la concentration dans le secteur alimentaire, où quatre entreprises (les ABCD : ADM, Bunge, Cargill et Dreyfus) contrôlent ensemble environ 70 % de la production céréalière mondiale. Ces quatre entreprises ont ainsi la possibilité d’augmenter arbitrairement les prix pour s’enrichir de manière démesurée. Mertens attire l’attention sur les 245 milliardaires du secteur alimentaire (il y en avait 64 sur la liste des milliardaires du magazine Forbes en 2021) qui ont vu leur fortune augmenter de 45 % au cours des deux dernières années ! Pendant ce temps, les prix des denrées alimentaires pèsent de plus en plus sur les travailleurs du monde entier, provoquant une pauvreté abjecte et la faim pour des centaines de millions d’entre eux. Ainsi, le monde comptera 600 millions de personnes souffrant de sous-alimentation chronique d’ici à 2030 (sans nouvelles guerres, mauvaises récoltes ou pandémies).
Mais l’environnement et la biodiversité font également les frais de la soif de profits de ces capitalistes prédateurs qui, par le biais des brevets sur les semences, des pratiques agricoles industrielles, de la déforestation et des monocultures, ruinent la planète. “Mutinerie” n’est pas avare d’autres exemples qui mettent en évidence la pourriture de ce système capitaliste.
La lutte des classes contre la “cupideflation”
En attendant, ce que font les ABCD a un nom : la cupideflation (traduite de l’anglais “greedflation”), l’inflation causée par la cupidité. Toutefois, si l’on en croit les politiciens et les patrons, le danger n’est pas le prix exorbitant de notre caddie, mais la soi-disant “spirale prix-salaires” par laquelle les augmentations salariales se traduiraient par des augmentations de prix et donc par une inflation toujours plus forte. Leurs arguments sont clairement réfutés et Mertens souligne par ailleurs le moindre écho dont ils bénéficient dans des couches larges de la société. Il laisse par exemple la parole à plusieurs personnes du Royaume-Uni, où “l’été du mécontentement” a débouché sur une conclusion claire, selon les termes de Mick Lynch, du syndicat ferroviaire RMT : “La classe ouvrière est de retour”.
Le livre aurait certainement gagné en profondeur en soulignant plus clairement l’importance de revendications audacieuses et radicales dans la mobilisation de masse. Les syndicalistes belges savent pertinemment qu’il n’est pas toujours évident d’impliquer les collègues dans les luttes. Mais s’engager pour des revendications salariales similaires à celles de l’UAW (le syndicat des travailleurs de l’automobile aux États-Unis), qui demandent 30% d’augmentation, c’est évidemment directement plus mobilisant que la maigre perspective de 0,2% d’augmentation sur deux ans comme c’est le cas dans nos négociations collectives actuelles. Quant au fait que la classe travailleuse n’aura guère d’autre choix, dans la période à venir, que de lutter plus intensément contre le spectre de l’inflation et “l’austérité 2.0” envisagée par les partisans de la ligne dure néolibérale, c’est une conclusion sur laquelle nous nous rejoignons entièrement.
Les semi-conducteurs, l’IA et un monde sans combustibles fossiles
Outre le retour de la lutte des classes, la nouvelle “Ère du désordre” dans laquelle nous sommes aujourd’hui plongés est également de plus en plus définie par l’importance accrue de la géopolitique et des changements dans le rapport de force entre grandes puissances. C’est abordé dans le livre. Il souligne par ailleurs certains des développements clés qui alimentent les contradictions.
Par exemple, lors de la récente COP28, la perspective d’un monde sans combustibles fossiles a été discutée pour la première fois, à contrecœur et à l’encontre des souhaits du pays hôte, Dubaï. La prise de conscience inéluctable que le capitalisme est incapable de dépendre indéfiniment des combustibles fossiles sans menacer sa propre survie et celle de l’humanité tout entière a immédiatement engendré une nouvelle course entre superpuissances. Chacune tente de s’assurer l’accès aux matières premières telles que le lithium pour ses propres entreprises. À l’instar de la concurrence aiguë qui a marqué la guerre pour l’accès au pétrole, les grandes puissances se lancent aujourd’hui à nouveau à corps perdu dans la bataille pour le nouvel “or blanc”.
L’usine du futur ne sera pas seulement alimentée par d’autres sources d’énergie. Elle sera également encore plus automatisée et reposera sur l’intelligence artificielle. Les données nécessaires à l’entraînement de cette intelligence artificielle et les semi-conducteurs (puces) à la base de leur puissance de calcul sans précédent sont aussi en jeu. Peut-être aurait-il été utile de s’attarder davantage sur les applications militaires de l’intelligence artificielle, d’autant qu’on assiste aujourd’hui à Gaza aux premiers bombardements effectués à l’aide de l’intelligence artificielle. Les grandes puissances tentent de s’interdire l’accès aux données ou aux matières premières pour les semi-conducteurs et se livrent à une véritable guerre de subsides pour favoriser leurs “propres” entreprises.
Le monde multipolaire qui ne sera pas
Nous partageons l’indignation de Mertens face aux pratiques des multinationales et des chefs de gouvernements impérialistes. Pour assurer sa position dominante, le capitalisme occidental a derrière lui une longue histoire d’exploitation néocoloniale, de massacres et d’oppression brutale. Mais l’appel de Peter Mertens en faveur d’une approche plus “équitable” et d’un “commerce mondial équitable” ressemblent à de surprenant vœux pieux. Cela rappelle l’approche utopique du mouvement ouvrier à son éveil au 19ᵉ siècle, avant que le marxisme ne développe une compréhension scientifique du capitalisme.
Frederick Douglas affirmait : “S’il n’y a pas de lutte, il n’y a pas de progrès”. Dès lors qu’il s’agit d’identifier les acteurs de cette lutte, Mertens se trompe parfois de cible. Il désigne à juste titre la classe travailleuse d’Europe et des États-Unis. Mais il regarde également vers des régimes considérés comme des “mutins” simplement parce qu’ils s’opposent aux intérêts directs de l’impérialisme américain. Ces régimes, en particulier ceux des BRICS (acronyme pour désigner le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du sud), seraient à l’origine d’une tendance vers un monde multipolaire, selon Mertens. Il défend l’idée d’un équilibre entre blocs de puissances pour garantir la paix.
Il s’agit d’une illusion manifeste. Les “mutins” dont parle Peter Mertens sont pareillement capitalistes et agissent dans l’intérêt de leur propre classe capitaliste nationale. Ce faisant, ils n’hésitent pas à se comporter de manière aussi prédatrice que les “grands” de l’Occident. Le Venezuela, par exemple, a récemment revendiqué environ un tiers de la Guyane voisine (qui se trouve être une région riche en pétrole). Un monde aux multiples petits impérialistes ne constituerait pas une rupture avec l’agressivité, la guerre, les annexions et l’exploitation de quiconque est plus faible que son voisin.
Le principal problème de son raisonnement est qu’il n’existe aujourd’hui aucune tendance vers un monde multipolaire. Deux blocs hostiles de plus en plus distincts émergent aujourd’hui : l’un autour de l’impérialisme américain et l’autre autour du capitalisme chinois, avec certains des BRICS.
Cette polarisation se traduit par une guerre aujourd’hui encore largement “froide” entre les deux blocs. Elle alimente une Ere du désordre avec davantage de conflits, chacun d’entre eux ayant en outre le potentiel de déclencher une guerre plus large, comme on le craint aujourd’hui en Palestine.
Il s’agit d’un danger mortel pour tous les travailleurs à travers le monde. Les travailleurs du monde entier qui mènent de plus en plus les mêmes combats contre la “cupideflation” des multinationales qui affame le monde, contre le réchauffement climatique, contre la guerre, contre l’oppression et les politiques réactionnaires… C’est à peine si cette lutte par en bas est évoquée dans le livre. C’est pourtant cette mutinerie-là qui est essentielle.
C’est la mutinerie du mouvement révolutionnaire des femmes en Iran, des paysans en grève en Inde, des personnes lésées par la crise immobilière en Chine, du mouvement mondial pour le climat… qui mérite notre solidarité pleine et entière. Ces révoltes seraient grandement renforcées par un programme révolutionnaire visant à mettre fin au capitalisme mondial en amenant les moyens de production centraux sous la propriété et le contrôle démocratiques de la classe travailleuse.
Ceux qui lisent “Mutinierie” pour y trouver des idées sur la manière d’y parvenir resteront sur leur faim. Ce lecteur disposera cependant d’un ensemble d’arguments supplémentaires qu’il pourra utiliser dans la lutte pour une société socialiste.
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Economiser ou investir?
« Le prochain gouvernement fédéral devra économiser au moins 10 milliards d’euros pour maîtriser la dette publique », affirme la Banque nationale. Elle estime également qu’il n’est pas possible d’augmenter les salaires réels avant au moins 2026.
Par Jon (Bruxelles)
C’est toujours la même histoire : les salaires et les impôts seraient déjà beaucoup trop élevés, nous vivons donc au-dessus de nos moyens et il serait temps de se serrer la ceinture, en bon père de famille, de faire plus avec moins, etc.
L’austérité néolibérale
Les budgets sont élaborés – à tous les niveaux – en partant du principe que le budget est fixe et largement insuffisant pour réaliser tous les investissements nécessaires ; il s’agit donc de hiérarchiser et de répartir les déficits. C’est ainsi que la quasi-totalité des services publics ont été progressivement supprimés et érodés au cours des dernières décennies. La privatisation et la commercialisation ont entraîné des problèmes structurels dans les hôpitaux, les transports publics, l’enseignement, la petite enfance, les maisons de repos et de soin, les logements sociaux, etc.
Les travaux d’infrastructure tels que les barrages et les écluses sur les voies navigables ont été négligés. Après les inondations dans la vallée de la Dendre en 2010, on a conclu que douze anciens complexes de barrages (datant de 1863 !) devaient être rénovés de toute urgence : cinq en Wallonie, sept en Flandre. Mais la rénovation, ça coûte. Cet argent n’a apparemment pas été trouvé, surtout en Flandre : les déversoirs wallons ont tous été rénovés entre-temps, mais du côté flamand, pas un seul déversoir rénové n’a été achevé. Pour cinq des sept barrages flamands, les travaux n’ont même pas commencé ! Sans même parler d’une solution réellement durable, où l’aménagement du territoire n’est pas laissé au lobby immobilier, mais où il existe une politique sérieuse et coordonnée avec suffisamment d’espace pour les zones inondables.
Un budget réellement socialiste
Un budget véritablement socialiste partirait des besoins sociaux réels. Les ressources existent pour répondre à tous les besoins. Il est possible d’améliorer les services publics au lieu de les réduire, d’investir dans les énergies renouvelables et dans des logements sociaux modernes et économes en énergie, dans une éducation de qualité et gratuite, dans les transports publics, dans les soins de santé, etc.
Les défis sociaux et environnementaux nécessitent des investissements à grande échelle, surtout si nous voulons non seulement éviter les pires catastrophes et détériorations, mais aussi obtenir des avancées conséquentes.
Une fois que nous avons déterminé démocratiquement ce qui est nécessaire et souhaitable, nous pouvons commencer à chercher l’argent nécessaire. Nous partons du principe que les épaules les plus fortes doivent porter le fardeau le plus lourd. Or, c’est loin d’être le cas actuellement.
Une fiscalité équitable
L’impôt sur le revenu des personnes physiques est progressif : les salaires élevés paient plus d’impôts en pourcentage. Mais dans l’ensemble, notre système fiscal est loin d’être progressif. Il existe toutes sortes de déductions et de régimes fiscaux favorables aux plus aisés. Les accises et la TVA (54,8 milliards au total) sont des impôts antisociaux car bien que les pauvres consomment moins que les riches, ils doivent consacrer une part plus importante de leurs revenus à l’achat de biens de consommation. Mais ce qui fait qu’ à ce jour les épaules les plus solides ne supportent pratiquement aucune charge, c’est que les revenus du capital sont à peine taxés. Les plus-values sur les actions ne sont pas du tout taxées en Belgique. Les revenus locatifs ne sont quasiment pas taxés. Les bénéfices des sociétés sont en principe taxés à 25 % (au maximum), mais il existe toutes sortes de techniques « d’optimisation fiscale » qui assurent que, dans la pratique, les grandes entreprises ne paient presque pas d’impôts sur leurs bénéfices. Ainsi, un propriétaire en quête de rente peut gagner dix fois plus qu’une infirmière, tout en payant moins d’impôts !
Dans le budget 2024, 145 milliards d’euros de recettes proviennent des impôts sur le travail : 62 milliards au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, 83 milliards au titre des cotisations sociales. Le capital est beaucoup moins taxé : le précompte mobilier (sur les revenus du patrimoine, tels que les dividendes et les intérêts) ne rapporte que 5,4 milliards et l’impôt sur les sociétés (sur les bénéfices des entreprises) 26,6 milliards. À titre de comparaison, en 2022, la masse salariale totale en Belgique s’élevait à 268 milliards, les revenus du patrimoine à 154 milliards et les bénéfices des sociétés à 200 milliards.
Le PTB propose d’utiliser un impôt sur la fortune pour collecter 8 milliards supplémentaires auprès des millionnaires et pour mieux lutter contre la fraude fiscale (y compris dans les paradis fiscaux), estimée à 40 milliards. C’est un bon début, mais il faudra aller beaucoup plus loin pour parvenir à un système fiscal équitable capable de dégager des fonds suffisants pour répondre à tous les besoins sociaux. Et même dans ce cas, les riches s’enrichiront et les pauvres s’appauvriront. Les corrections fiscales peuvent atténuer les symptômes, mais la source de l’inégalité et de l’insoutenabilité demeure : le système capitaliste. Une solution juste et durable nécessite un changement de système révolutionnaire pour construire une société socialiste démocratique !
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Travailler jusqu’à 67 ans? Non merci! Gino, 55 ans, mécanicien automobile
Nous publions une série de témoignages qui montrent clairement que travailler jusqu’à 67 ans est impossible. Ci-dessous, Gino, mécanicien automobile. Dans un prochain numéro, nous donnerons la parole à Sylvie, infirmière.
Par Guy Van Sinoy
« Bonjour ! Je m’appelle Gino et j’ai toujours été passionné par la mécanique automobile. Je suis né dans la région liégeoise en 1968. Une bonne année ! Mes parents étaient venus d’Italie dans les années 50. Mon père a été embauché chez Cockerill et ma mère faisait les ménages. Après l’école primaire, je suis entré à l’école technique, car je voulais devenir mécanicien automobile. Mon père aurait voulu que je rentre comme lui, à Cockerill. Mais pour moi je ne voulais pas faire les pauses et les feux continus(1). Quand je vois ce qu’est devenue la sidérurgie en Wallonie, je me dis que j’ai bien fait de ne pas y être entré.
« Dès que j’ai touché mon premier salaire, j’ai économisé pour m’acheter une voiture d’occasion. Une Alfa ! Pour frimer devant mes copains et devant les filles… Comme mon Alfa réclamait pas mal de petites réparations et de réglages, je me suis fait la main sur ma première voiture.
« Après être passé par quelques garages, j’ai été embauché dans un atelier de voitures allemandes de bonne réputation. Je suis bien payé, mais les conditions de travail sont assez strictes. Les différentes opérations sont minutées. Quand on voit les incessantes évolutions techniques du secteur automobile (essence, diesel, moteurs à injection, turbo, ABS, véhicules électriques) on doit bien conclure qu’il faut sans cesse se recycler. Là où je travaille, la maison mère dispose d’un centre de formation bien documenté. Mais c’est loin d’être le cas pour toutes les marques.
« Mon épouse travaille chez Delhaize, dans un magasin qui sera bientôt franchisé. Elle ne sait pas encore quelles seront ses prochaines conditions de travail. Nous avons deux fils : l’un est géomètre, l’autre instituteur. On peut se dire qu’ils sont casés et financièrement indépendants. Notre maison est payée. Mais étant donné la situation incertaine de mon épouse, je dois absolument continuer à travailler à 100 % jusqu’à ma pension.
« L’an dernier, j’ai glissé sur le sol glissant du garage et je suis tombé (mal) sur une caisse à outils. Trois côtes fêlées et trois semaines d’incapacité de travail. Je suis syndiqué à la centrale des métallurgistes FGTB mais là où je travaille il n’y a pas de délégation, car l’entité est trop petite. Je suis allé à la FGTB, Place St-Paul, pour connaître mes droits, surtout en matière de pension. Né après 1967, je devrais continuer à travailler jusqueà mes 67 ans ! Incroyable ! Mais surtout pas possible ! Ceux qui ont inventé ça n’ont jamais effectué un travail physiquement lourd. »
1) Les feux continus : en sidérurgie, rythme de travail qui consiste en 7 jours de travail de 6h à 14h, suivi de 7 jours de 14h à 22h, suivi de 7 jours de 22h à 6h du matin. Après cela, une semaine de repos.
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Antisémitisme & islamophobie. Combattre leur instrumentalisation en en combattant les causes
Un mois après l’attaque du Hamas du 7 octobre et l’offensive israélienne contre Gaza qui a suivi, les plaintes pour antisémitisme ont été multipliées par 5 en Belgique, selon Unia, le service public indépendant de lutte contre la discrimination et de promotion de l’égalité des chances. Par ailleurs, en septembre, des tracts ont été distribués à Louvain-la-Neuve avec des croix gammées à chaque coin de la page et comme titre « Homme blanc, tu en as assez des médias juifs ».
Par Nicolas Croes, article tiré de l’édition de décembre-janvier de Lutte Socialiste
Certains veulent s’appuyer sur l’émotion légitime suscitée par la recrudescence d’attaques ciblant les personnes juives pour imposer une unité réactionnaire derrière le gouvernement israélien. L’objectif est de légitimer le massacre à Gaza, de criminaliser la solidarité envers les masses palestiniennes et de donner un nouvel élan aux discours islamophobes et une nouvelle vigueur à la logique de “diviser pour régner”.
En 2019, Bart De Wever avait jugé que le char du carnaval d’Alost qui représentait les Juifs en insectes était répréhensible, mais sans réelle intention antisémite. Son collègue de parti et bourgmestre d’Alost, Christoph D’Haese, a fait valoir que le contexte du carnaval permettait de dépasser les bornes. Il n’en fallait pas plus pour régler la question. Si De Wever adopte aujourd’hui une approche totalement différente, c’est pour une seule raison : il veut se servir des actes antisémites pour nourrir l’islamophobie. Il appelle donc carrément à déployer l’armée dans les rues !
L’armée, c’est un peu sa solution magique. Il avait également défendu d’y faire appel en début d’année à propos de la lutte anti-drogue. La manœuvre vise à protéger l’activité très lucrative du port d’Anvers en passant sous silence la nécessité d’y renforcer les contrôles et de nier les causes sociales qui alimentent les réseaux criminels en chair humaine. De Wever aime répondre à la barbarie avec encore plus de barbarie. Ce qui ne l’empêche pas d’oser prétendre se ranger du côté des « Lumières » ! Pour lui, s’aligner sur le gouvernement israélien est une obligation dans un conflit « civilisationnel » où s’affrontent l’Occident et la barbarie islamiste.
Sans surprises, le Vlaams Belang n’a été que trop heureux de lui emboîter le pas. Le parti héritier par excellence des collaborateurs de la seconde guerre mondiale n’a pas pour autant opéré de virage à 180°. Pour lui aussi, tous les moyens sont bons pour s’en prendre premièrement à la communauté musulmane ou considérée comme telle. Dans le même ordre d’idées, le 12 novembre dernier, la « grande marche civique » contre l’antisémitisme organisée en France à l’initiative du gouvernement a été rejointe par le Rassemblement National (parti fondé par d’anciens SS et collaborateurs du régime de Vichy et dirigé longtemps par le négationniste Jean-Marie Le Pen) ou encore par Éric Zemmour, grand admirateur du maréchal Pétain.
Tout ce qui nous divise nous affaiblit
Tout ce monde nauséabond cherche à nous faire avaler que la contradiction principale de notre société réside dans les différences de “cultures”, “de religion”,… Ils cherchent ainsi à dévier l’attention du fait que nous vivons dans une société divisée en classes sociales. Les deux classes sociales principales ont des intérêts diamétralement opposés : la classe capitaliste des actionnaires et des grands patrons et celle des travailleuses et travailleurs salarié.e.s. Assurer l’exploitation de cette dernière exige d’en assurer la division, à n’importe quel prix. De là l’intérêt du racisme, du chauvinisme, de l’antisémitisme, de l’islamophobie, de l’homophobie et de la transphobie, etc.
Même les conséquences néfastes des politiques impérialistes menées jadis au Moyen Orient ou ailleurs et leur faillite sont retournées à notre désavantage. Rappelons-nous que ce sont les puissances impérialistes qui furent les sponsors les plus enthousiastes des courants islamistes radicaux afin d’affaiblir la gauche dans la région. Et aujourd’hui leurs héritiers politiques prétendent que les populations du Moyen Orient sont “naturellement” portées sur la barbarie !
Dans les années ’30, Trotsky disait que l’établissement d’un État juif en Palestine n’était qu’un raccourci par lequel on répondait aux crimes de l’antisémitisme par un autre crime. En juillet 1940, il expliqua notamment : « La tentative de résoudre la question juive grâce à l’émigration des Juifs en Palestine révèle à présent sa vraie nature : c’est une tragique mystification pour les Juifs. [… ] Les développements futurs de la guerre pourraient bien transformer la Palestine en un piège meurtrier pour des centaines de milliers de Juifs. Jamais aussi clairement qu’aujourd’hui le salut des Juifs n’est apparu si indissociablement lié au renversement du capitalisme. » Ce constat est toujours valable, que l’on parle de l’antisémitisme ou de l’islamophobie.
Répondons à chaque acte de haine par la solidarité en action des personnes exploitées et opprimées, dans une lutte commune contre ce système capitaliste qui n’a que la barbarie à nous offrir !
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Si le pouvoir n’est pas au Parlement, où se trouve-t-il donc ?
Début 2022, alors qu’il venait d’être élu président du PTB, Raoul Hedebouw expliquait sur RTL : « Nous sommes dans une société de classes et c’est cela que l’on veut changer ». Puis, poursuivant sur sa lancée : « Je crois qu’il faut une révolution, clairement. » On imagine sans peine quelques amis de Georges-Louis Bouchez et Bart De Wever recracher leur café… Moins de deux ans après, le PTB est à 20% dans les sondages en Wallonie (en 2e position, à peine à un cheveu du PS selon le sondage IPSOS-Le Soir de fin septembre), à 15% à Bruxelles et à 10% en Flandre. Avant même que la moindre campagne électorale n’ait été lancée…
Par Nicolas Croes
Qui détient le pouvoir ?
Nous sommes toujours du côté de Raoul Hedebouw quand, dans la même émission, il tirait comme constat : « Le vrai pouvoir en Belgique, il n’est pas au parlement, cela fait 7 ans que je ne vois pas le pouvoir au parlement. Le pouvoir, il est chez les ministres, dans les cabinets. Et qui dirige, qui fait du lobby terrible? Ce sont les multinationales. »
Comment expliquer autrement qu’en 2020 encore, la Belgique a octroyé près de 13 milliards d’euros de subsides directs et indirects aux énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz fossile)?(1) Comment expliquer autrement que lorsque le tribunal de l’Union européenne a jugé que les exonérations fiscales accordées par la Belgique à des multinationales étaient illégales, la Belgique a contesté la décision ? Depuis 7 ans, l’Etat belge est engagé dans une bataille juridique pour éviter d’aller récupérer 700 millions d’euros d’impôts impayés chez AB InBev, le groupe britannique pétrolier BP, le chimiste allemand BASF, Proximus, Pfizer, Celio ou encore Bridgestone.(2) On pourrait encore parler des largesses complices des autorités vis-à-vis de la fraude et de l’évitement fiscaux.
Construire un contre-pouvoir
Raoul Hedebouw soulignait encore : « Je crois en le pouvoir de la rue et en une mobilisation parlementaire. Il y a une dynamique qui est en marche, mais il faudra du temps ». La question est essentielle: comment pleinement utiliser la force d’un parti comme le PTB – ses milliers de membres, ses nombreuses positions syndicales, ses talents et moyens de communication – pour accélérer la dynamique vers un véritable changement ?
La meilleure campagne, c’est la lutte sociale. Les sommets syndicaux font tout leur possible pour mettre les mobilisations syndicales en veilleuse jusqu’aux élections, un calcul dangereux pour protéger les « partis-amis » au pouvoir. Le plus efficace pour imposer nos revendications dans le débat public, c’est la mobilisation, la manifestation de masse, la grève, la contestation devant les sièges des partis traditionnels. Ceux-ci seraient dès lors contraints de se prononcer au sujet des préoccupations des travailleuses et travailleurs au lieu d’alimenter une surenchère raciste dont seul profite le Vlaams Belang. La lutte sociale, c’est aussi la meilleure manière d’empêcher l’extrême droite de capter la colère et les frustrations quotidiennes. Ce n’est pas rien, le Vlaams Belang menace d’arriver en première place en Flandre.
Une telle dynamique de lutte est également importante pour construire la confiance dans l’action collective et préparer les combats à venir, une fois les élections passées. En septembre, Raoul Hedebouw expliquait dans Le Soir : « Pour être honnête vis-à-vis de notre base aussi, ça va être très difficile, en négociations, d’arriver aux niveaux régional et fédéral à des points de rupture suffisants en termes de stratégie. » Sophie Merckx, Cheffe de groupe PTB à la Chambre, écarte elle une participation régionale : « Quand l’Europe va dire ‘vous devez appliquer l’austérité dans votre pays’, est-ce qu’on va le faire ou est-ce qu’on va ensemble avec le peuple se révolter contre ça ? » Mais 2024, « C’est aussi les élections communales et là, on a de grandes ambitions ».
Le PTB n’explique pour l’instant pas comment il compte affronter la tutelle financière de la Région qui pèse sur dix des dix-neuf communes bruxelloises. En Wallonie, des villes comme Charleroi et Liège dépendent toujours du Centre régional d’aide aux communes, le Crac, sorte de FMI wallon qui impose l’austérité et une stricte orthodoxie budgétaire en échange d’aides financières. La camisole de force budgétaire existe à tous les niveaux de pouvoir, la révolte doit être organisée à la même échelle pour la briser.
Le temps presse
La préoccupation centrale actuelle du PTB est en réalité de tout d’abord acquérir une expérience à l’échelon local avant de viser plus loin. Le mouvement social au sens large, des associations aux organisations syndicales, ne manque pourtant ni d’expériences ni de talents. Le PTB peut les engager à ses côtés en utilisant sa campagne dans le but affiché de parvenir non pas simplement à des gouvernements de « gestion sociale » du statu quo avec le PS et ECOLO, mais à de véritables gouvernements de rupture reposant sur la force et la pression du mouvement des travailleurs, dans le respect de sa diversité.
Nous aussi, nous croyons qu’il faut une révolution, c’est-à-dire la fin de la propriété privée des grands moyens de production. Mais nous estimons aussi qu’elle ne tombera pas du ciel et qu’il faut lui préparer le terrain. Le système capitaliste actuel est plongé dans une « ère du désordre » où tourbillonnent guerres, crise climatique, drames sociaux ainsi qu’une polarisation politique qui est une véritable course contre la montre face aux monstres d’extrême droite ou fondamentalistes religieux. Y faire face exige un sens de l’urgence et une stratégie claire et ouverte vers la transformation socialiste de la société.
- Calculs réalisés par l’administration fédérale des Finances et celle de l’Environnement, sur base des informations disponibles au 15 mars 2021. Le Soir, « La Belgique subsidie toujours massivement les énergies fossiles », 2 mai 2023.
- « La justice européenne confirme l’illégalité du régime fiscal belge réservé aux multinationales », LesEchos.fr, 23 septembre 2023.
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Industries en crise et pertes d’emplois
L’usine de papier Sappi à Lanaken fermera ses portes au début de l’année 2024, ce qui entraînera la perte de 644 emplois. Chez Audi à Forest, une grève a éclaté début octobre car le modèle Q4 ne sera probablement plus produit qu’à Zwickau (Allemagne) en raison de la baisse des commandes. Au cours du premier semestre, le secteur de la chimie anversois a enregistré une baisse de production de 13% par rapport à l’année précédente (moins 12% pour l’ensemble de l’Europe). Le secteur ne tourne qu’à environ 70% de sa capacité.
Secteurs industriels en crise
La crise mondiale et la récession en Allemagne sont toujours pointées du doigt. La fédération patronale Essencia déclare : « Nous le ressentons fortement dans l’industrie chimique, car nous sommes au début d’une longue chaîne de valeur qui s’étend sur plusieurs secteurs : la construction, l’automobile, l’alimentation… » L’économie allemande se porte mal, y compris dans le secteur automobile. La hausse des taux d’intérêt freine le secteur de la construction. Et la consommation chinoise est en panne.
Les économistes de droite ont tenté de faire du tam-tam autour du « coût salarial » prétendument élevé en Belgique. Mais en Allemagne et aux Pays-Bas, où les salaires ne sont pas indexés, le ralentissement est plus marqué qu’en Belgique.
La production industrielle de plusieurs secteurs est sous pression depuis plusieurs mois. Cela a entraîné une légère baisse des marges bénéficiaires brutes en 2022, qui sont passées de 44,2 % à 43,8 %, ce qui reste supérieur aux niveaux records d’avant la pandémie. Les patrons craignent que cette tendance ne s’intensifie et ont lancé des alertes sur les bénéfices. Cette situation provoque un retour du chômage économique et de premiers licenciements.
L’usine de caoutchouc Arlanxeo à Zwijndrecht a fermé ses portes, entraînant la perte de 278 emplois. La demande de butyle – un caoutchouc synthétique utilisé dans les pneus de voiture – a fortement chuté à la suite de la hausse des prix des produits fabriqués à Zwijndrecht et de l’augmentation de la capacité de production d’autres usines du groupe Aramco, notamment en Inde et en Chine. L’an dernier, Aramco a réalisé un bénéfice mondial impressionnant de 161 milliards de dollars !
Le groupe chimique Ineos prévoit de construire à Anvers un nouveau site qui devrait créer 450 emplois. Entre-temps, le chômage économique touche Ineos à Doel et à Geel, et 30 emplois sont menacés chez Ineos à Zandvliet.
La crise du secteur affecte l’emploi et sert de prétexte pour limiter au strict minimum les négociations relatives aux conventions collectives d’entreprise.
Et les bénéfices ?
Peter Van den Houtte, d’ING Belgique, attribue la crise du secteur chimique à l’Allemagne : « De nombreux produits chimiques fabriqués dans la province d’Anvers sont utilisés dans les voitures allemandes. Mais l’industrie automobile allemande a raté le coche des voitures électriques. Elle a trop longtemps misé sur le diesel. De nombreuses pièces des voitures électriques commandées en Allemagne proviennent désormais de Chine, ce qui entraîne une perte de travail pour les fournisseurs automobiles allemands et, par conséquent, pour les entreprises chimiques anversoises. »
De colossaux bénéfices ont été réalisés ces dernières années. Ils ont été principalement distribués aux actionnaires sous la forme de dividendes et de rachats d’actions. Innovia Films, par exemple, a annoncé le 22 septembre qu’elle arrêtait sa production de films plastiques en Belgique, menaçant ainsi 124 emplois à Merelbeke. Entre 2018 et 2023, Innovia a réalisé un peu moins de 20 millions d’euros de bénéfices après impôts. Ce montant a été entièrement transféré au Royaume-Uni, siège d’Innovia. Seuls les investissements les plus indispensables ont été réalisés. Après avoir annoncé des bénéfices records en 2022, la société faîtière CCL Industries a immédiatement déclaré avoir racheté pour 200 millions de dollars de ses propres actions.
Les bénéfices importants n’ont pas été investis dans le renouvellement des outils de production et de protection de l’environnement. Les entreprises se tournent à présent vers les pouvoirs publics. Aux États-Unis, le gouvernement apporte déjà un soutien important et les entreprises européennes veulent faire de même. Les charges pèsent sur la collectivité, les bénéfices vont dans la poche des actionnaires. La main-d’œuvre est coincée entre les deux et risque de se faire écraser. Elle paie le prix d’un système exploiteur.
Pour les actionnaires, les emplois, les conditions de travail et l’environnement sont d’une importance secondaire. Seuls les profits comptent et les investissements sont orientés en ce sens. Il faut une planification de la production axée sur nos besoins sociaux, où les connaissances existantes ne sont pas gaspillées, mais utilisées et renforcées pour des ajustements et des innovations en matière de production écologique. De cette manière, des emplois corrects peuvent être créés et maintenus.