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Italie. Effondrement du pont Morandi : vos profits, nos morts.

C’est la soif de profits capitaliste qui est responsable !
Le 14 août, à 11h37, un tronçon d’environ 200 mètres du pont Morandi s’est effondré sur l’autoroute A10 Gênes/Ventimiglia qui traverse les quartiers résidentiels de la ville de Gênes.
Par Giuliano Brunetti, Resistenze Internazionali (CIO-Italie)
L’effondrement du pont Morandi a entraîné la mort de 43 personnes et blessé des dizaines de personnes, dont beaucoup gravement. Le risque d’effondrement d’une autre section du pont a contraint la municipalité de Gênes et la protection civile à exiger l’expulsion immédiate des habitations dans la zone de la via Fillak. Actuellement, plus de 600 personnes ont été déplacées.
Pour donner une idée de la dimension émotionnelle de la tragédie : chaque année, 25 millions de voitures en moyenne circulent sur ce tronçon d’autoroute. Il s’agit d’un pont colossal, ouvert comme symbole du boom de l’Italie en 1967. Le pont était le lien principal entre Gênes et l’ouest de la Ligurie, dans une ville notoirement enclavée entre la mer et les Alpes.
Le viaduc de Polcevera, situé à proximité, était également le principal point de transit à destination et en provenance de la France. Tous les Génois, et beaucoup d’autres, ont traversé le pont Morandi à plusieurs reprises. Cette immense tragédie a choqué toute une ville et tout un pays. Une immense solidarité est arrivée aux victimes de toute la ville de Gênes et de toute l’Italie. Par exemple, la municipalité de Naples a annulé les festivités du front de mer à la mi-août en solidarité avec les victimes. Il y a de plus en plus de rumeurs selon lesquelles le début de la saison de football pourrait être repoussé. Chacun d’entre nous se demande comment il est possible, dans un pays où les ponts et les aqueducs construits il y a deux millénaires par les anciens Romains sont encore debout, qu’une structure aussi imposante, conçue pour durer des siècles, puisse tomber d’un moment à l’autre.
Le jour des funérailles des victimes, alors que les recherches se poursuivent dans les décombres, Resistenze Internazionali entend d’abord se joindre à la solidarité avec les parents et amis des victimes de cette tragédie qui a impliqué principalement des travailleurs. Parmi les morts établis, il y a des transporteurs routiers, des employés d’entreprises municipales de l’AMIU (dont un jeune travailleur qui avait un contrat à court terme) et ASTER, ainsi que des jeunes et des familles qui allaient à la plage.
La privatisation, le profit et le capitalisme sont responsables
Ce massacre aurait pu et aurait dû être évité. L’effondrement du pont Morandi et ses conséquences désastreuses sur la vie de centaines de personnes ont pour seules causes la soif de profit du secteur privé et les politiques criminelles de privatisation du réseau autoroutier italien. Elles ont permis à des particuliers et plus particulièrement à la famille Benetton, l’une des pires du capitalisme italien, de marquer de leur empreinte l’ensemble du réseau autoroutier italien.
L’effondrement du pont Morandi n’est pas le résultat d’un événement imprévisible. Le pont ne s’est pas effondré à cause de grandes précipitations ou parce qu’il a été frappé par la foudre mais à cause d’un choix politique précis ; confier la gestion du réseau autoroutier italien au secteur privé. Un secteur privé qui cache ses intérêts et ses responsabilités par le biais d’un système de sociétés écrans et de filiales protégées par des lois écrites spécialement pour elles.La privatisation du réseau autoroutier italien a été réalisée par le gouvernement dit de centre-gauche de Massimo D’Alema en 1999. Cependant, pour être honnête, nous devons reconnaître que la frénésie de privatisation a commencé dans les années 1980 et a été menée à la fois par le “centre-droit” et par le “centre-gauche” au cours des vingt dernières années, avec son apogée lorsque le “centre-gauche” était au gouvernement.
Dans le cadre de cette politique de privatisation, l’État a accordé une concession sur les 6.500 km d’autoroutes à des intérêts privés qui, en échange du paiement d’une redevance annuelle symbolique, ont empoché des sommes vertigineuses grâce aux péages sans investir dans l’entretien. Les coûts de maintenance sont en contradiction ouverte avec le principe cardinal des capitalistes individuels dans leur économie capitaliste : la maximisation du profit à tout prix, même lorsque cela va à l’encontre des intérêts généraux de la société.
En 2000, la famille Benetton a pris le contrôle de la plus grande société concessionnaire, Autostrade per l’Italia, qui gère la majeure partie du réseau autoroutier, y compris le tronçon du pont Morandi.
Autostrade per l’Italia, qui gère l’ensemble du réseau autoroutier national, est aujourd’hui contrôlée par Atlantia SpA, une société holding contrôlée à 30% par la famille Benetton. Atlantia gère et contrôle des autoroutes et des aéroports dans le monde entier avec des investissements de plusieurs milliards de dollars en Inde, au Brésil, en France et, depuis 2018, également en Espagne grâce à l’achat d’actions d’Abertis Infraestructuras, qui gère les péages sur les autoroutes espagnoles. Ce géant a réalisé, rien qu’en 2018, un chiffre d’affaires de 1,7 milliard d’euros par le seul péage, ce qui fait qu’il ne s’agit pas vraiment d’une entreprise en crise.
Comme on le sait, la famille Benetton, qui est l’actionnaire majoritaire d’Atlantia, a des investissements et des participations dans divers secteurs et n’épargne aucun effort pour maximiser ses profits. Des liens ont été démontrés entre cette famille et les entreprises bangladaises pour lesquelles travaillaient les victimes de la tragédie du Rana Plaza, en 2013, catastrophe au cours de laquelle un bâtiment de huit étages s’est effondré à Dhaka, tuant plus d’un millier de travailleurs du textile.
En Argentine, la même famille est impliquée dans la privatisation des terres agricoles en Patagonie et dans la “disparition” en 2017 de l’activiste mapuche Santiago Maldonado qui luttait pour la défense de sa terre.
En réponse aux rumeurs selon lesquelles sa concession pour la gestion des autoroutes pourrait être révoquée (qui durerait normalement jusqu’en 2042), la société a déclaré qu’elle considérait ces rumeurs comme des attaques injustifiées, soulignant qu’en cas de révocation, elle exigera le paiement de la valeur restante de la concession, qui, selon une première estimation, s’élèverait à 20 milliards d’euros.
Bref, nous avons affaire à une famille de capitalistes cyniques, rapaces et assoiffés de profit. Mais le problème, ce n’est pas la famille Benetton, c’est un système qui leur confie la gestion privée des infrastructures, un système qui privatise les gains et socialise les pertes.
Rage et colère parmi les victimes et le public
Aujourd’hui, samedi 18 août, les funérailles nationales ont eu lieu pour les victimes de la tragédie. De nombreuses familles ont refusé de participer aux funérailles d’État. La mère de l’une des victimes a ouvertement dénoncé les politiciens qui se rendaient sur les lieux de la catastrophe. La mère d’une autre victime a dit : “L’État a causé tout cela et il y a eu un défilé politique honteux : ils ne doivent pas se montrer”. Le père d’un autre des garçons morts a écrit sur Facebook “Nous ne voulons pas une farce funéraire, mais une cérémonie à la maison, dans notre église de Torre del Greco. C’est une douleur privée, vous n’avez pas besoin de défilés. A partir d’aujourd’hui commence notre guerre pour la justice, pour la vérité : cela ne doit plus se produire”.
Le fait que tant de familles aient rejeté les funérailles d’État est un fait extrêmement significatif et démontre l’abîme qui existe entre les citoyens ordinaires, les institutions et l’élite politique considérée comme responsable de cette tragédie.
Les funérailles d’État se sont déroulées dans une atmosphère surréaliste, toute la ville semblait endormie avec des boutiques et des restaurants qui fermaient en signe de deuil et de respect pour les victimes. Les plus hautes fonctions de l’État ont pris part à la cérémonie. Le président de la république Sergio Mattarella était présent, de même que le premier ministre Giuseppe Conte et les vice-premiers ministres Salvini et Di Maio. Les journalistes et les commentateurs du régime ont parlé d’applaudissements pour les représentants du gouvernement. En fait, les applaudissements s’adressaient aux pompiers, aux hommes et aux femmes de la protection civile et aux travailleurs de la santé qui travaillent depuis des jours dans les ruines du pont Morandi.
S’il est vrai qu’il n’y a pas eu d’hostilité particulière à l’égard des politiciens du gouvernement, cela est dû à leur promesse de ‘‘mettre en œuvre la justice’’ et à la décision prise par le ministre des Infrastructures, Toninelli, d’engager des procédures pour retirer la concession d’Etat des autoroutes italiennes au groupe Atlantia. Ce sentiment fait écho à la force de l’atmosphère anti-establishment, canalisée vers un gouvernement auquel beaucoup de gens ordinaires délèguent en ce moment leurs espoirs de vengeance.
Cela dit, la distance entre les paroles des représentants du gouvernement et la solidarité réelle issue d’en bas, des milliers et milliers de citoyens génois solidaires des victimes, était palpable.
L’effondrement du pont Morandi a ouvert un grand débat dans la société italienne. Cet événement a eu et aura des conséquences sociales et politiques incalculables. Pour de nombreux citoyens ordinaires, cela signifie l’effondrement définitif de la confiance dans les institutions. Beaucoup se demandent : ” Si je ne peux pas faire confiance aux “experts” et aux techniciens, même pour l’entretien d’un pont sur l’une des autoroutes les plus fréquentées d’Italie, à quoi et à qui puis-je faire confiance ?’’
L’élite politique en désarroi – pour une nationalisation sans compensation du réseau autoroutier !
L’effondrement a mis les principaux partis politiques en difficulté. Par exemple, le M5S a dû supprimer de ses sites les articles qui décrivaient l’effondrement possible du pont Morandi comme un ‘‘conte de fée’’. En même temps, il est apparu que les Benettons finançaient les campagnes électorales du Parti démocrate et de la Lega dirigée par Salvini, actuellement vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur. Le premier ministre actuel, Conte, alors qu’il travaillait auparavant comme avocat, a été conseiller juridique de l’Aiscat, l’association italienne des autoroutes et tunnels, et de l’A4 Brescia-Padova, dont il a défendu les intérêts.
Malgré cela, sous la pression de l’opinion publique, Conte a déclaré que l’annulation de la concession des autoroutes au groupe qui les gère actuellement était possible. La révocation de la concession au groupe est déjà peu. Mais en restant dans le cadre des règles de l’économie capitaliste, cependant, l’Etat risque de devoir payer une “pénalité” pour l’annulation de la concession et, paradoxalement, d’enrichir davantage les actuels propriétaires de la concession.
En outre, retirer le contrôle des autoroutes d’un grand groupe capitaliste pour le remettre entre les mains d’un autre ne résoudra pas le problème de l’entretien, des péages coûteux et du profit privé.
Une récente enquête réalisée peu après la tragédie a montré que 81 % des Italiens sont favorables à la renationalisation des autoroutes. C’est la voie à suivre ! Il est nécessaire de renationaliser au plus vite l’ensemble du réseau autoroutier, de l’arracher aux griffes du privé et de procéder immédiatement au contrôle et à l’entretien de toutes les infrastructures à partir de celles en béton armé construites dans les années 1960.
Mais pour éviter que les coûts de la nationalisation ne retombent sur les gens ordinaires, peut-être sous la forme d’une nouvelle augmentation des péages, il est essentiel qu’elle soit effectuée sans aucune forme de compensation pour les anciens opérateurs du réseau autoroutier.
La critique légitime de la privatisation et du groupe Benetton ne doit toutefois pas nous empêcher de voir le lien entre cette catastrophe et la crise à long terme du capitalisme en Italie et les politiques d’austérité. Les investissements dans les routes italiennes sont passés d’environ 14 milliards d’euros en 2007 à 5 milliards d’euros en 2015. Le pont Morandi est le 12e pont italien à s’être effondré depuis 2004.
En voulant canaliser la colère populaire contre l’effondrement du pont en direction de l’Union européenne, Matteo Salvini, le dirigeant de la Lega qui est vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur, a déclaré que cet effondrement était dû aux politiques d’austérité souhaitées par Bruxelles.
Cette tentative maladroite et grossière d’instrumentaliser la colère populaire qui existe dans la société italienne contre l’Union européenne vise d’une part à masquer la responsabilité directe et indirecte de son parti et de son gouvernement dans cet effondrement. D’autre part, elle sert à détourner l’attention des véritables responsables et à essayer de dévier la colère populaire pour éviter d’affronter les thèmes des concessions étatiques, des privatisations et de la renationalisation des autoroutes. Cette tentative doit être immédiatement rejetée. Nous n’acceptons pas qu’un ministre de l’Intérieur qui, le soir de la tragédie, n’a pas visité la ville, mais a fait la fête avec ses amis siciliens instrumentalise les événements pour son profit médiatique. Ce n’est pas un hasard si Salvini, ne voulant pas ou ne sachant pas comment commenter sérieusement l’incident, continue de publier des interviews contre les migrants. Le jour des funérailles d’État, il a pris des selfies avec ses partisans durant la cérémonie !
Nous devons rejeter les tentatives nationalistes de Matteo Salvini de détourner les critiques du capitalisme lui-même et de la classe dirigeante italienne en blâmant simplement les politiques d’austérité souvent exigées par l’Union européenne (UE). L’UE a imposé des politiques d’austérité à de nombreux pays, mais à elle seule, une rupture avec l’UE et ses politiques ne produira pas de changement fondamental.
Seule une rupture structurelle avec le capitalisme et les lois qui régissent son fonctionnement pourront prévenir des tragédies similaires à l’avenir. Une société socialiste, basée sur le pouvoir et l’auto-organisation des travailleurs et des gens ordinaires, n’affecterait pas seulement des ressources à l’entretien et au contrôle des infrastructures, mais choisirait de construire des ponts, des routes et des autoroutes en utilisant le critère de l’utilité, du bénéfice social et de l’impact écologique et non celui du profit à court terme. C’est pour cette perspective que Resistenze Internazionali (section italienne du Comité pour une Internationale Ouvrière) se bat.
Pour éviter que ces tragédies ne se reproduisent et pour honorer les victimes de cet effondrement, Resistenze Internazionali exige :
- La création d’une commission d’enquête non gouvernementale indépendante et reposant sur des organisations. populaires comme les syndicats et les groupes communautaires, afin de déterminer la responsabilité pénale de ce qui s’est passé.
- L’indemnisation appropriée des familles des victimes et des personnes déplacées.
- Le contrôle immédiat de la sécurité de toutes les structures à risque en commençant par le remplacement de tous les piliers en béton armé par des structures en fer.
- La révocation sans compensation de la concession de l’État au groupe Autostrade per l’Italia.
- L’abolition du secret d’État sur toutes les concessions d’État.
- La suppression des péages autoroutiers.
- La renationalisation, sans compensation d’entreprises comme Atlantia, du réseau autoroutier italien et sa mise sous contrôle et gestion des travailleurs du secteur et de leurs représentants, avec le financement public nécessaire, dans le cadre d’un plan de transport global.

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Nous exigeons notre part du gâteau : un meilleur salaire minimum, maintenant !

Aux USA, la lutte pour un salaire minimal a connu un développement massif. Lors du congrès fédéral de la FGTB qui s’est tenu fin mai, les revendications offensives tenaient le haut du pavé : un salaire minimum de 14 euros par heure, une pension minimum de 1500 euros par mois et une réduction collective du temps de travail. L’obtention de ces exigences constituerait un énorme pas en avant pour des centaines de milliers de travailleurs et leurs familles. N’en restons pas aux mots : il nous faut une campagne offensive et un calendrier d’actions. Questions/réponses sur le salaire minimum.
Par Geert Cool
Pourquoi augmenter le salaire minimum à 14 euros par heure ?
Alors qu’auparavant, jamais autant de richesses n’ont été concentrées chez une si petite élite, les couches plus larges de la population éprouvent nombre de difficultés pour joindre les deux bouts. Tout devient plus cher: le logement, les transports, les loisirs, les crèches, les soins aux aînés, etc. Tout augmente, sauf nos salaires. Entre 2000 et 2016, notre productivité a en moyenne augmenté de 14% alors que les salaires n’ont augmenté que de 7%. La pression augmente au travail, mais sans les revenus qui y correspondent. Ou ces messieurs-dames de la haute société pensent-ils vraiment qu’ils sont les seuls à travailler durement ? Qu’ils échangent leurs costumes avec les vêtements d’un ouvrier d’usine, d’un employé de supermarché ou d’une infirmière pour quelques semaines !
Nous travaillons plus intensément; disposer d’un meilleur salaire n’est que justice. L’augmentation du salaire minimum à 14 euros de l’heure mettrait un terme à la propagation du virus des bas salaires. Il s’agit d’une mesure concrète contre la pauvreté. Cela instaurerait de plus une pression pour une tendance générale à la hausse des salaires. Un salaire minimum de 14 euros par heure représente un salaire mensuel net de 1.700 euros en tant que travailleur à temps plein. Cela permet de joindre les deux bouts.
Un revenu de base ne serait-il pas une meilleure alternative ?
Cette proposition d’un revenu de base part du constat correct que, pour beaucoup, les fins de mois sont difficiles et que de plus en plus de gens sont laissés pour compte. Le problème, cependant, n’est pas tant le système de travail salarié que la répartition des richesses. Si, sur la base des ressources dont disposent actuellement les travailleurs ordinaires, nous accordons à chacun un montant de base mensuel fixe, il serait très bas et pourrait également porter atteinte à la sécurité sociale (celle-ci est désormais financée par des cotisations sur nos salaires). Avec un revenu de base de 500 euros ou 600 euros par mois, la pauvreté ne fera qu’augmenter.
Obtenir un montant plus élevé exige de se battre pour une autre redistribution des ressources. La meilleure façon de mener cette bataille est d’utiliser notre place dans le processus de production : ce sont les travailleurs qui créent la richesse par leur travail, et les travailleurs peuvent donc toucher l’élite en cessant le travail. Le lien entre la richesse et le travail est essentiel ; desserrer ce lien avec un revenu de base n’aidera pas notre lutte.
En optant pour un salaire minimum de 14 euros par heure, une pension minimum de 1.500 euros et une allocation de chômage minimum de 1.200 euros, tout le monde sera au-dessus du seuil de pauvreté. Dans ce cas, il n’y aura pas besoin d’un nouveau système tel qu’un revenu de base.
D’autres revendications, autour des heures de travail notamment, ne sont-elles pas plus importantes ?
Notre approche démarre de ce qui est nécessaire pour les travailleurs et leurs familles, ce qui comprend diverses mesures qui ne peuvent être considérées isolément les unes des autres. Un salaire minimum plus élevé n’est pas suffisant en soi pour obtenir un travail et une vie de qualité. Cela exige une réduction efficace de la pression du travail en répartissant le travail disponible entre ceux qui peuvent travailler. Une réduction générale du temps de travail sans perte de salaire et avec embauche supplémentaire est donc nécessaire. Nous avons aussi besoin de davantage d’investissements publics dans les services publics, tels que l’éducation, les soins de santé, le logement social, etc. et il faut également augmenter les prestations et les allocations sociales.
En fixant un montant pour certaines revendications, comme un salaire minimum de 14 euros par heure, le programme devient plus concret et il est plus facile de mener une campagne d’information et de mobilisation plus large.
Est-il possible d’obtenir 14 euros par heure ?
Les huit personnes les plus riches au monde possèdent plus que la moitié la plus pauvre de la population mondiale. Voilà qui réfute tous les arguments sur le caractère inabordable des revendications sociales.
En Amérique du Nord, dans de nombreuses villes et régions, des luttes concrètes menées sur le terrain ont imposé un salaire minimum de 15 dollars de l’heure. Seattle a été la première grande ville où cela s’est produit. Cette mesure s’est traduite par un transfert de 3 milliards de dollars des riches vers les pauvres. Cela n’a pas entraîné de pertes d’emplois : au cours de la première année suivant l’introduction de la mesure, il y a eu une augmentation du nombre d’emplois de 2,5 % et le salaire moyen dans la ville a augmenté de 3,5 %. Ces chiffres étaient supérieurs à la moyenne nationale.
Il est possible d’arracher de meilleurs salaires. Ce combat doit être mené tant sur la scène syndicale que sur la scène politique. C’est ainsi que, dans le passé, la journée des 8 heures et le système de sécurité sociale ont été obtenus. Les capitalistes ne feront de concessions que s’ils ne voient pas d’autre moyen d’arrêter ou de ralentir un mouvement social croissant et radical en faveur d’un changement social. C’est la menace de la révolution qui a ouvert la voie aux congés payés ou à l’octroi du suffrage universel. La lutte pour un salaire minimum plus élevé fait selon nous partie de la construction d’une relation de force pour un changement de société vers le socialisme, une société orientée vers la satisfaction des besoins de la majorité de la population.
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Grève chez Ryanair : solidarité contre les menaces de la direction

Grévistes à Zaventem. Photo : CNE Ce n’est pas un secret : les syndicats ne sont pas bien vu chez Ryanair. Le patron de la compagnie, Michael O’Leary, avait d’ailleurs déclaré l’an dernier qu’il préférerait se couper les mains plutôt qu’avoir à faire aux syndicats ! Et alors qu’un mouvement de grève éclatait aujourd’hui, la direction a annoncé un plan de réduction de sa flotte en Irlande qui menace directement 300 emplois ! L’entreprise préfère recourir au licenciement plutôt que de traiter avec les syndicats.
Ce mercredi, le personnel de cabine de Ryanair était donc en grève en Belgique, en Espagne, au Portugal et en Italie pour de meilleures conditions de travail et le respect des législations nationales du travail. Le mouvement se poursuivra demain, sauf en Italie. La CNE craint que Ryanair fasse venir du personnel d’autres sites en Europe pour remplacer les grévistes.
En Belgique, le premier jour de grève fut un véritable succès. Hans Elsen, secrétaire LBC-NVK a déclaré à la presse : «C’est un jour de grève historique, des dizaines de travailleurs ont fait grève. Des meilleures conditions de travail, c’est le message envoyé à la direction. D’autres actions suivront». Selon la CNE, la participation à la grève était de 80 % du personnel à Zaventem aujourd’hui. Environ 90 % des avions Ryanair sont restés au sol. A l’aéroport de Charleroi, environ 60% des vols avaient été annulés.
Cela fait des années que Ryanair méprise les droits des travailleurs et intimide son personnel. Maintenant qu’il est entré en action, les intimidations et les menaces montent d’un cran. La grève se poursuivra demain et d’autres journées sont également prévues pour riposter contre l’arrogance patronale.
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Le gouvernement n’a pas la force qu’il prétend, continuons le combat sur les pensions !

Un gouvernement Michel II ? Charles Michel et ses comparses veulent nous faire croire la chose inéluctable. Mais, sondage après sondage, il semble plutôt difficile à la N-VA, au MR, à l’Open-VLD et au CD&V de trouver une nouvelle majorité parlementaire (70 sièges alors qu’il en faut 76), même avec le soutien d’un CDH en chute libre (75). Le 11 juin dernier, le Grand baromètre Le Soir-RTL-TVI-Ipsos-Het Laatste Nieuws-VTM a donné de nouvelles sueurs froides à Michel et sa bande : à la question de savoir si les sondés sont d’avis que la coalition actuelle soit reconduite si les élections le permettent, une majorité se prononce contre. Au Nord comme au Sud.
Par Nicolas Croes
C’est effectivement 64 % des sondés qui ont répondu par la négative à l’échelon national : 77 % en Wallonie, 66 % à Bruxelles et 57 % en Flandre. Un gouvernement fort ? C’est surtout la faiblesse de l’opposition qui lui permet de tenir !
Le gouvernement recule sur les pensions
Concernant les pensions, la popularité du gouvernement fédéral est au ras des pâquerettes. Toujours selon le ‘‘Grand baromètre’’, les Belges désapprouvent les mesures prises par le gouvernement Michel et par le gouvernement Di Rupo qui l’a précédé. Pas moins des deux tiers de la population rejettent la décision du gouvernement Michel de porter l’âge de la retraite à 67 ans d’ici 2030. Ce qui est bien compréhensible dans un pays où l’espérance de vie en bonne santé n’atteint pas les 64 ans en moyenne et se situe même en-dessous des 55 ans pour les travailleurs peu qualifiés.
D’autre part, en Wallonie, 82 % des sondés estiment que le système de retraite ne pourra pas leur garantir une fin de vie correcte. En Flandre et à Bruxelles, ils sont 71 % à penser de cette manière. Selon les sondés, une retraite décente se situe à 1.615 euros. C’est bien au-dessus de la moyenne actuelle de 1.181 euros pour les hommes et de 882 euros pour les femmes, ce qui ferme les portes des maisons de repos à nombre de nos aînés.
Pensions à point : la résistance sociale repousse l’attaque
Que la colère soit largement ressentie, c’était évident au regard du succès des diverses mobilisations syndicales. Après une vaste campagne d’information avec le Journal des pensions, une grande manifestation a suivi le 16 mai. Selon le quotidien patronal De Tijd, il s’agissait des funérailles du système des pensions à points. Ce projet a été reporté à la prochaine législature.
Histoire de préparer le terrain, le gouvernement veut d’abord se pencher sur le régime des pensions pour les professions lourdes. Selon le CD&V – qui prétend être le ‘‘visage social’’ du gouvernement – le dialogue social sera la clé de voûte du projet. Mais quelle marge de négociation peut-il bien rester si le budget global pour les professions lourdes est fixé à l’avance ? La seule chose que le gouvernement permet de négocier, c’est l’ampleur de l’attaque, un peu plus dure pour les uns, un peu plus douce pour les autres. Une excellente façon de diviser en montant les professions les unes contre les autres.
C’est ce à quoi nous avons assisté avec la proposition à destination du secteur public : environ 50% des employés y seraient couverts par le régime des métiers pénibles. A droite, ce fut le tollé. Ces cris d’indignation visaient toutefois surtout à masquer le recul social : dans le cadre du régime existant, 62 % des fonctionnaires bénéficient d’un régime de retraite avantageux (celui des ‘‘bonus préférentiel’’) ! Ne nous laissons pas monter les uns contre les autres : si le gouvernement laisse un peu de répit à certaines professions, c’est pour mieux leur enlever leurs ‘‘privilèges’’ ensuite, après une première vague d’économies. Et n’oublions pas que l’abandon du régime actuel dans le secteur public facilitera l’introduction du système des pensions à points.
Continuons le combat
La riposte en défense de nos pensions doit être à la hauteur de l’attaque. La manifestation pour des ‘‘pensions dignes à un âge décent’’ du 16 mai a donné un aperçu de ce qui est possible avec 70.000 manifestants. Le gouvernement a dû reporter le système des pensions à points.
Ne laissons pas au gouvernement et aux partons l’initiative, et partons à la contre-offensive avec les revendications défendues par les syndicats : une pension minimale de 1.500 euros par mois, une pension équivalente à 75% du dernier salaire au lieu de 60% actuellement, le retrait de toutes les mesures du gouvernement actuel et des gouvernements précédents contre les fins de carrière.
Autour de ces exigences, nous avons déjà l’opinion publique de notre côté. Ce gouvernement n’est pas aussi fort qu’il le prétend. Qu’attendent donc les dirigeants syndicaux pour annoncer une campagne de mobilisation crescendo à l’automne ?
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Espagne : Un activiste risque trois ans de prison pour avoir aidé une migrante victime d’une attaque policière

Photo de solidarité, Gand. Le mercredi 6 juin, notre camarade Tohil Delgado, ancien secrétaire général du Sindicato de Estudiantes (SE) et membre d’Izquierda Revolucionaria (section du Comité pour une Internationale Ouvrière dans l’État espagnol), siégera sur le banc des accusés au tribunal pénal n° 8 de Madrid. Il risque trois ans de prison pour “atteinte à l’autorité”. Son crime est d’être venu en aide à une jeune migrante de 21 ans sauvagement battue lors d’une descente de police raciste.
Les événements se sont produits en 2010. Notre camarade aurait pu s’éloigner et regarder de l’autre côté, mais il ne l’a pas fait. Les parents de la jeune femme – également équatoriens – ont essayé d’éviter l’agression policière. Mais ils ont tous fini en prison 39 heures, avec Tohil. Lors de leur arrestation et de leur transfert ainsi que durant toute la durée de leur détention, ils ont été battus et ont reçu des menaces de mort de même que des insultes racistes. Ils n’ont pas reçu d’eau ou de nourriture pendant plus de huit heures. Ils n’ont pas eu le droit de communiquer avec qui que ce soit. Il ne s’agit malheureusement pas d’un cas isolé. C’est une réalité quotidienne pour de nombreux migrants, souvent victimes de persécutions policières et de raids racistes dans nos quartiers. Ils sont traités de façon déplorable, sans respecter leurs droits fondamentaux.
Le camarade Tohil risque trois ans de prison pour s’être opposé à un acte brutal et injuste. Deux des policiers qui l’ont attaqué prétendent que ce sont eux qui ont été attaqués. Mais des vidéos existent – enregistrées par des voisins alarmés – dans lesquelles il apparaît très clairement que la seule violence a été perpétrée par la police. Une fois de plus, nous sommes confrontés à cette réalité de plus en plus répandue qui consiste à traiter les victimes comme des agresseurs.
“Ils ne nous feront pas taire”
Cette grande injustice n’est pas non plus un cas unique, loin de là. Chaque jour, nous sommes témoins de l’utilisation de la justice contre tous ceux qui s’opposent à l’inégalité, qui dénoncent l’injustice et qui tentent de changer les choses. Pour cette simple raison, les prisons sont maintenant la destination des rappeurs, des twitterers, des syndicalistes et des militants de gauche. Pendant ce temps, des hommes politiques et des hommes d’affaires corrompus, des parents de monarques et d’autres personnes influentes, des défenseurs du régime, de la précarité, du sexisme et des expulsions règnent librement comme si rien ne s’était passé. Mais ils ne nous feront pas taire.
Le Sindicato de Estudiantes (SE) et Libres y Combativas, la plateforme féministe socialiste de SE et Izquierda Revolucionaria (section du CIO dans l’Etat espagnol), appellent tous ceux qui désirent que cela cesse à montrer leur solidarité avec notre camarade. Si Tohil Delgado est condamné à la prison, ce sera une sentence contre nous tous qui combattons dans la rue. Nous vous demandons de faire connaître cette affaire et de signer la résolution de protestation demandant son acquittement.
Une manifestation de solidarité pour Tohil et les autres accusés aura lieu le mercredi 6 juin devant le tribunal correctionnel de Madrid. Avec une pression de masse, nous pouvons empêcher cette injustice de se produire !
Assez du sexisme et du racisme de la police !
- Signez la résolution de soutien
- Prenez des photos de solidarité avec cette affiche et envoyez les à redaction@socialisme.be
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Compte-rendu de la grande journée d’action contre Macron en France samedi dernier
Les Etudiants de gauche Actifs et le Parti Socialiste de Lutte ont participé à paris à la Marée Humaine contre Macron
Le président français Macron est au pouvoir depuis environ un an. Son élection a été le résultat d’un concours spécial de circonstances telles que l’énorme discrédit des partis politiques traditionnels et le fait que beaucoup de gens voulaient absolument stopper Le Pen au second tour. Macron se rend compte qu’il s’agit d’une occasion unique. Il veut l’utiliser pour mettre un terme à un certain nombre de conquêtes historiques du mouvement ouvrier français. Il se heurte à une résistance obstinée, y compris de la part des cheminots, qui font grève deux jours par semaine depuis deux mois. Mais Macron ne cédera pas à la légère.Par Eric et Sander
Au même moment, les universités ont été occupées par des étudiants qui protestent contre la manière dont Macron et son gouvernement des riches veulent s’en prendre à la démocratisation de l’éducation. Pendant la journée, la police tente d’évacuer les campus, la nuit, ce sont les gangs néo-fascistes qui prennent en charge le sale boulot de la police. La colère est générale, la grève s’est étendue à divers secteurs.
Cela a pris un certain temps mais, en fin de compte, le principal opposant politique de Macron, La France Insoumise (LFI) de Mélenchon, a réussi à forger un large front dans ce qui a été appelé une ‘‘marée humaine’’. Mélenchon a également appelé à la mise en place de comités de mobilisation avant le 26 mai. Il s’agit d’un premier pas vers la poursuite de la lutte de manière constructive et organisée. Les Etudiants de Gauche Actifs et le Parti Socialiste de Lutte ont exprimé leur solidarité lors de la grande manifestation du 26 mai à Paris, mais il y a également eu des manifestations dans plusieurs autres villes françaises.
LFI, CGT, PCF, Action, la ZAD et divers partis de la gauche radicales, associations et syndicats ont soutenu l’appel vers la Marée Humaine pour qu’une vague de protestation soit entendue dans tout le pays. Le taux de participation a été important, 280 000 personnes à travers la France et l’atmosphère était combative. Le slogan “Macron un an, ça suffit !’’ était l’expression parfaite de la colère contre la poursuite et l’intensification des politiques néolibérales de ses prédécesseurs. Pourtant, ce n’est pas devenu la surprise que certains avaient espéré et, bien que combatif, l’événement comprenait aussi des éléments de résignation clairement perceptibles parmi les manifestants.
Plusieurs participants nous ont expliqué que la division de la gauche est un frein sérieux sur le mouvement. Beaucoup convenaient avec nous que le fait que Lutte Ouvrière (LO), le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) et Hamon (PS) ont eu tort de ne pas retirer leurs candidatures en faveur de Mélenchon avant le premier tour des élections présidentielles du printemps dernier. Deux semaines avant le jour des élections, il était déjà très clair que leurs candidats ne figureraient pas au deuxième tour. Ils auraient parfaitement pu expliquer qu’ils avaient une excellente campagne derrière eux, mais n’avaient aucune chance eux-mêmes et qu’en dépit de divergences, ils retiraient leurs candidatures en faveur de Mélenchon. Cela aurait non seulement placé la gauche dans une bien meilleure position pour le deuxième tour, mais cela aurait également simplifié l’unité dans la lutte actuelle.
La plupart des manifestants ont convenu avec nous que l’appel de Mélenchon pour la mise en place de comités de mobilisation pour le 26 mai était une excellente initiative. Lorsque nous leur avons demandé combien de leurs collègues et/ou voisins étaient venus, la réponse était malheureusement généralement décevante. Il n’y avait pas non plus de véritables délégations des campus occupés ou des écoles secondaires. En bref, ce n’est pas parce que les gens sont généralement d’accord avec un appel qu’ils comprennent comment le mettre en pratique sur le terrain. Ce sont de vieilles traditions qui ont dans une large mesure été perdues. Aussi importants que les médias sociaux aient pu être pour la campagne électorale de Mélenchon et le lancement de La France Insoumise, ils ne suffisent pas pour restaurer ces traditions. Pour cela il faut un débat démocratique et une structure d’organisation. Mélenchon et La France Insoumise doivent s’attaquer d’urgence à ce problème.
Les dirigeants des syndicats, le carburant de la protestation, espèrent que Macron “descendra de son piédestal pour écouter le peuple”. Cependant, c’est une illusion d’imaginer que Macron va écouter et peut être reculer grâce au dialogue social. Interrogé sur la volonté de la CGT de le dégager par la grève, Martinez a malheureusement répondu par la négative. Chez FO, le secrétaire général a été démis de ses fonctions et remplacé en raison de son manque de combativité. Nous ne pouvons et ne devons pas compter sur la bonne volonté d’un gouvernement et d’un président de cette sorte. En Belgique, nous avons connu une situation similaire en 2014, et le premier plan d’action des syndicats a fait vaciller le gouvernement. Il y a même eu des discussions sur un gouvernement en affaire courantes pour calmer les choses. L’absence d’un nouveau plan d’action au début de l’année 2015, à commencer par une grève générale de 48 heures, a donné au gouvernement l’occasion de se restaurer. Le mouvement a été forcé de se mettre sur la défensive et nous en ressentons encore les conséquences aujourd’hui.
C’est pour cette raison que notre organisation-sœur française, la Gauche Révolutionnaire, a défendu la préparation d’une journée nationale de grève en juin lors des manifestations du 26 mai. Si les syndicats et LFI ne renversent pas Macron et son gouvernement, le même scénario qu’en Belgique menace. C’est une chose de faire tomber le gouvernement, mais que mettre à la place ? Cela nous ramène à la division de la gauche. Lors de la manifestation à Paris, elle a même eu une expression physique : le PCF, le Parti Ouvrier Indépendant Démocratique (POID), le NPA et LO avaient chacun leur propre délégation, ce que nous pouvons très bien comprendre, mais ce qui est beaucoup plus difficile pour nous est le fait que les services d’ordre de chaque délégation fermaient hermétiquement leurs blocs pour l’extérieur, seuls LFI et le NPA avaient une attitude plus ouverte. Non seulement cela entrave le dialogue et l’échange d’expériences entre participants, mais cela peut aussi indiquer que les dirigeants de ces partis veulent contrôler tout débat par en haut.
Au contraire, un programme devrait être discuté et élaboré à partir de la base du mouvement, du bas vers le haut. Toutes les forces, partis de gauche, associations et syndicats devraient être réunis autour de ce programme, qui poserait les bases d’un gouvernement des travailleurs qui ne se concentrerait plus sur la soif de profits d’une petite élite, mais utiliserait les moyens existants pour répondre aux besoins de la grande majorité. Pour l’instant, cela semble être un rêve inaccessible à la plupart des manifestants. Nous avons néanmoins estimé qu’il était important de mettre cette idée en action maintenant, car nous sommes convaincus qu’à mesure que la lutte de classe devient plus ouvertement aigüe, de plus en plus de travailleurs et de jeunes adopteront cette idée. Et dès qu’une idée est soutenue par des couches plus larges de la société, elle devient une force sociale.
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Fight for Pride !
La Belgique est considérée comme un pays qui se porte bien en termes de droits des personnes LGBTQI+(1). Depuis 2003, le mariage est ouvert aux personnes de même sexe ; les discriminations sur base d’orientation sexuelle, d’identité de genre et d’expression sexuelle sont interdites, les couples LGBTQI+ peuvent adopter ; etc. Ces réalisations sont importantes, mais il faut reconnaitre que l’égalité juridique est insuffisante pour assurer le bien-être des personnes LGBTQI+. Les nombreux problèmes rencontrés par les membres de cette communauté démontrent que la lutte doit toujours être menée pour une réelle émancipation.Par Elise (Gand), article tiré de l’édition de mai de Lutte Socialiste
Fight for Pride is still needed
Le mois dernier, deux hommes ont à nouveau été victimes de la violence homophobe alors qu’ils se promenaient main dans la main au centre de Bruxelles. Les violences ciblant les personnes LGBTQI+ ont augmenté à travers le monde ces dernières années. Cette violence adopte plusieurs formes – verbale et psychologique, physique et sexuelle (qui touche respectivement 79%, 27% et 32% des trans en Belgique(2)) – et est présente partout : en rue, mais aussi à l’école, sur le lieu de travail, à la maison…
Les taux de suicide au sein de la communauté LGBTQI+ sont également particulièrement élevés. En Belgique, pas moins de 62% des trans ont déjà pensé au suicide et 22% d’entre eux ont effectué au moins une tentative de suicide.(3) Ces chiffres alarmants soulèvent de nombreuses questions notamment sur la persistance des stéréotypes et des préjugés dans l’éducation, les médias,…
La politique d’austérité des autorités empire le manque de logements abordables et de qualité et d’emplois décents. Ce contexte fait le jeu des discriminations à l’embauche ou pour bénéficier d’un logement. Pas moins de 53% des trans sont victimes de discrimination dans leur recherche d’emploi. En Belgique, avec l’absence totale de refuges, cela signifie que de nombreuses personnes LGBTQI+, en particulier les jeunes, connaissent la pauvreté ou même le sans-abrisme pour avoir voulu mener une vie en accord avec leur orientation sexuelle et/ou leur identité de genre.
Pride is a protest – Avec la Campagne ROSA
Partout dans le monde, des gens ripostent aux attaques contre la communauté LGBTQI+ en occupant la rue. Cela est également nécessaire en Belgique. Pour la campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité), la Pride doit redevenir un événement politique et militant, dans la droite ligne de la création de la Pride suite au soulèvement de Stonewall contre les discriminations et l’exploitation en 1969. Nous nous opposons à la commercialisation de la Pride !
La Pride est l’occasion idéale non seulement d’accroître la visibilité de la communauté LGBTQI+, mais aussi de discuter des solutions à offrir face aux problèmes que connaît la communauté. La Campagne ROSA se distancie clairement des partis politiques traditionnels qui participent au défilé dans l’espoir de gagner des électeurs aux prochaines élections avec une image de ‘‘LGBTQI+ – friendly’’.
Nous sommes en désaccord avec la politique d’identité, dans laquelle les personnes LGBTQI+ devraient voter en faveur de politiciens LGBTQI+, quel que soit leur programme ! Nous refusons de nous associer sous les drapeaux arc-en-ciel avec des politiciens qui défilent à la Pride mais défendent en même temps une politique de coupes budgétaires dans des domaines cruciaux pour le bien-être des personnes LGBTQI+ ! Nous défendons des revendications qui représentent une réelle amélioration pour la communauté LGBTQI+ : des investissements dans l’éducation, dans les services publics et sociaux, dans les refuges, les logements sociaux et les soins de santé !
Une lutte commune pour des revendications commune
La LGBTQI+ phobie n’est caractéristique ni des êtres humains, ni d’une culture particulière. À l’instar du racisme et du sexisme, il s’agit d’un moyen de dévier l’attention d’enjeux tels que les politiques d’austérité dans un contexte où les pénuries s’empilent dans la société, tandis que les profits disparaissent dans les poches d’une petite minorité. La lutte de la communauté LGBTQI+ ne saurait être menée avec succès que par les travailleurs et les étudiants ensemble, qu’ils soient hétéros, cisgenres (4), LGBTQI+, femme, hommes,… Ensemble, nous pouvons faire pression pour arracher diverses revendications sociales, les faire respecter et lutter ensemble pour une société radicalement différente consacrée au bien-être de la majorité de la population : une société socialiste.
Participez à la Pride à Bruxelles avec la Campagne ROSA – samedi 19 mai
12.00 : Stand de la Campagne ROSA – Gare centrale
14.30 : Départ de la parade, avec une délégation ROSA
(1) Lesbiennes, gays, bisexuels, transgenre, queers, intersexeset et toutes les autres orientations sexuelles et/ou identités de genre
(2) https://www.zelfmoord1813.be/sites/default/files/Factsheet_LGBT.pdf
(3) https://transgenderinfo.be/wp-content/uploads/Everythingtransgender.pdf
(4) Cisgenre : qui se sent confortable avec le genre qui lui a été assigné à la naissance -
Trop c’est trop ! Il faut affronter cette culture misogyne mondiale !

L’article 40.3.3 de la Constitution irlandaise (le 8e amendement) garantit le droit à la vie de l’enfant à naître, ce qui interdit le droit à l’avortement à moins que la vie de la mère ne soit gravement menacée. C’est la loi la plus stricte d’Europe. 35 ans après que ce changement de constitution a été co-écrit par un archevêque et ensuite envoyé au Pape pour approbation, la lutte pour libérer l’Irlande de son oppression catholique est en cours.
Par Laura Feeney
Un référendum historique
Un référendum a été convoqué pour le 25 mai afin d’abroger ce 8e amendement, mais il aura fallu une longue lutte pour que le sujet soit discuté au Parlement. C’est la pression de la rue qui en est responsable, en grande partie organisée par l’organisation socialiste-féministe ROSA. En Irlande, la campagne ROSA (for Reproductive rights, against Oppression, Sexism & Austerity) a été créée après le décès de Savita Halappanavar, morte à la suite de complications liées à sa grossesse et à l’incapacité du médecin à l’opérer en raison du 8e amendement.
En réponse à ce flot continu d’injustices horribles, une Assemblée citoyenne a voté en faveur de l’abrogation du 8e amendement et pour un accès non restrictif à l’avortement jusqu’à 12 semaines. Ces recommandations étaient beaucoup plus radicales que celles des politiciens traditionnels. Une commission parlementaire a été mise sur pied tandis que les actions de ROSA et de la députée Ruth Coppinger (élue de Solidarity et membre du Socialist Party) ont souligné quelle était l’utilisation de pilules abortives illégales en Irlande. Cela a eu un impact significatif. Il est évident que l’avortement est déjà pratiqué en Irlande, sa légalisation en rendrait la pratique plus sûre. Les tensions sont vives avant la tenue du référendum qui survient dans un contexte où d’autres développements majeurs sont en cours sur le terrain de la lutte contre le sexisme et de radicalisation, particulièrement parmi les jeunes Irlandaises.
‘We stand with her’
En Irlande du Nord, un procès très médiatisé impliquant une jeune femme de dix-neuf ans face à des joueurs de rugby professionnels a récemment attiré l’attention sur le combat à mener plus largement contre l’oppression sexiste. Ce procès était des plus pénibles pour les victimes d’agressions sexuelles. La jeune femme a été interrogée beaucoup plus longuement que les accusés, le jury a fait circuler ses sous-vêtements et une ancienne députée a déclaré qu’une fille de la classe moyenne ne se serait jamais retrouvée dans une telle situation. Lorsque le verdict a été annoncé, non coupable, la colère fut générale. Des rassemblements ont immédiatement eu lieu avec le hashtag #IBelieveHer (je la crois). Deux jours plus tard, des milliers de personnes ont défilé dans les rues de Dublin et devant le palais de justice de Belfast. Une pétition en ligne réclamant la tenue d’une enquête sur le comportement des joueurs a recueilli 65.000 signatures. L’Irish Rugby Union et l’Ulster Rugby ont dû annoncer que les contrats des deux joueurs, Paddy Jackson et Stuart Olding, étaient révoqués. 30.000 euros ont été récoltés pour le Dublin Rape Crisis Centre dans les deux jours qui ont suivi l’annonce du verdict.
Les actions ont été absolument monumentales sur l’ensemble de l’île. Elles s’inscrivent dans un sentiment global. En Pologne, les femmes sont également choquées par l’éthique catholique réactionnaire et se battent pour changer leur loi archaïque sur l’avortement. Lors de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, une ‘‘grève féministe’’ a été déclenchée en Espagne et pas moins de 5,3 millions de personnes sont descendues dans la rue pour lutter contre les abus sexuels et l’écart salarial ! En Irlande, durant les manifestations, de nombreuses pancartes reprenaient une citation de la militante Angela Davis : “Je n’accepte plus les choses que je ne peux pas changer. Je change les choses que je ne peux pas accepter.’’ ‘‘Trop, c’est trop !’’ est devenu un cri de ralliement. Ces femmes ne recherchent pas des réformes ou des solutions rapides et bâclées.
‘‘Je ne vais pas me rendre à la police. Je ne vais pas affronter l’Ulster Rugby.’’ C’est le message effrayant que la jeune victime a envoyé à son amie au lendemain de son agression. Les femmes savent que le système n’est pas à leurs côtés, mais contre elles. Ces hommes puissants n’allaient jamais être réprimandés dans une culture qui considère tout cela comme du ‘‘discours de vestiaire’’. Nous devons lutter contre ce système d’exploitation qui protège les plus puissants plutôt que les plus vulnérables. La ‘‘culture machiste’’ est ancrée à tous les niveaux de la société capitaliste : y compris les forces de police, les tribunaux et l’État. Nous savons que ces institutions ne sont pas là pour la démocratie ou l’égalité, ce sont des outils pour réprimer la révolte de la classe ouvrière. Les mesures qui ont été prises en réponse à cette situation devraient déclencher un feu dans le ventre de chacun. Le changement est imminent et nous n’attendrons plus. Trop, c’est trop.
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[Interview] “Il n’y a jamais eu une telle grève chez Lidl”

Le magasin de Deurne Nord. Photo : socialisme.be Ce samedi, c’était le quatrième jour de grève à Lidl. Les négociations de la veille ont abouti à une proposition de la direction rejetée par le SETCa / BBTK. Les deux autres syndicats veulent défendre la proposition. Hier, plus de 100 magasins avaient encore portes closes. Parmi le personnel, la colère gronde depuis un certain temps maintenant. Nous en avons discuté hier avec un délégué sydcial de Lidl à Anvers.
Interview réalisée par Luc (Anvers)
Avant-hier, les négociations ont échoué. Quelle est la situation aujourd’hui ?
“En ce moment, nous faisons le tour de tous les magasins pour informer nos collègues. Avec plus de 100 magasins fermés aujourd’hui, il est clair que nous allons continuer. Les négociations sont bloquées sur notre demande de 42 heures supplémentaires par semaine à allouer immédiatement à chaque magasin, ce qui est une mesure urgente. La direction ne veut l’autoriser que pour une période temporaire de six mois et, dans l’intervalle, entamer des négociations sur une nouvelle convention collective de travail (CCT). Sans nouvelle CCT après 6 mois, les 42 heures supplémentaires seront perdues et nous nous nous retrouverons à nouveau avec rien. Nous voulons que ces 42 heures par magasin/semaine soient permanentes. Ensuite, la pression pour conclure une convention collective de travail saine incombera à la direction et non aux syndicats. Dans le pire des cas, nous aurons toujours ces 42 heures.”
Le porte-parole de Lidl s’est déclaré “amer” suite au rejet de l’accord. Il estime que l’accord était bon et qu’il comprenait même plus que ce que les syndicats demandaient.
“Ils ont fait beaucoup de promesses mais, avec des promesses, nous n’en sommes nulle part. Lidl a déjà promis tant de choses pour faire face à la pression du travail, mais rien n’arrive jamais. L’année dernière, par exemple, l’entreprise a envoyé un courriel à tous les employés pour leur dire que, après les consultations avec les syndicats, il était devenu évident que la charge de travail posait problème et que cela allait être réglé. Rien n’a été fait. Dans les faits, ils nous promettent des choses depuis deux ans. J’ai tout un dossier remplis de points d’action et de plans de la direction pour faire face à la charge de travail. Mais rien n’a encore été réalisé.”
Comment la grève a-t-elle commencé ? Elle semble s’être développée en grande partie spontanément ?
“Il y a quelques semaines, une grève a éclaté dans un magasin d’Oostkamp après le licenciement d’un directeur des ventes. La problématique de la charge de travail a également été posée. La CSC a lané un préavis de grève pour l’ensemble du groupe Lidl. Des consultations ont eu lieu mercredi dernier mais, une fois de plus, la direction n’a pas été plus loin que les promesses de s’en prendre à la charge de travail. Pour couronner le tout, la direction voulait aussi parler de prolongation des heures d’ouverture et d’ouverture le dimanche.
“A ce moment, un certain nombre de magasins se sont mis en grève presque immédiatement. Quelques magasins étaient bien préparés et se sont mis en grève immédiatement après la consultation. Le personnel de nombreux autres sites s’est joint spontanément au mouvement. C’est aussi la force de la grève. On a pu voir où les syndicats sont plus présents, mais dans beaucoup d’endroits, la grève a commencé spontanément de bas en haut, sans que la délégation syndicale ait beaucoup de contrôle sur elle.
“Dans la région d’Anvers, où je travaille, c’est parfois plus difficile en raison de la rotation et de la composition du personnel. Parfois, je dois commencer par expliquer ce qu’est un syndicat. Mais je reçois aussi des appels de collègues qui me demandent s’ils peuvent fermer leur filiale. En considérant que les directeurs de filliale et la direction répandent beaucoup de mensonges et que des menaces de sanctions existe, on se rend compte que cette vague de grèves est vraiment forte.
“Cette grève est déjà historique. Jamais auparavant Lidl n’avait fait grève à une telle échelle. Dans de nombreux magasins, les collègues ont spontanément pris l’initiative de se joindre au mouvement de grève. Les pressions sont toutefois nombreuses de la part de la direction et des directeurs de filliale. Localement, il y a des menaces de licenciement, de délocalisation, etc. Hier, dans certaines filiales, il a été dit qu’il ne fallait pas faire grève puisque des négociations étaient en cours. Cela a été officiellement contredit, mais il est clair qu’il y a une stratégie derrière ces allégations. Pour de nombreux collègues, ce n’est pas facile de s’opposer à leur direction, mais ils le font.”
Quelles sont les prochaines étapes ?
“En ce moment, c’est plutôt chaotique. Aujourd’hui, nous informons le plus grand nombre possible de collègues sur l’état des lieux. Une certaine confusion existe et parfois des doutes, parce que les dirigeants syndicaux ne sont pas du même avis. Certains pensent qu’il vaudrait mieux accepter la proposition de la direction parce que c’est quelque chose de concret à avoir et que sinon nous courons le risque de nous retrouver les mains vides. En même temps, la prise de conscience que ce n’est pas une véritable solution se développe.
“Le défi est maintenant, avant tout, de faire du lundi une grande journée d’action où le plus grand nombre possible de magasins resteront fermés. Tous les magasins ne seront peut-être pas en grève, mais les actions vont s’étendre.”
La concurrence dans le secteur de la distribution est féroce. Fin de l’année dernière, il y a eu l’annonce d’une restructuration chez Carrefour, et cela été le cas chez Delhaize. Comment situes-tu ce problème dans son contexte ?
“Oui, Lidl veut concurrencer Delhaize, Carrefour,…. Lidl est passé d’un hard discounter à des magasins avec une gamme plus large : avec des marques, sa propre boulangerie, un plus vaste rayon frais,… Tout exige de prendre plus de temps, mais nous devons tout faire avec le même nombre de collègues, voire même moins. Nous devons travailler plus et plus intensément pour recevoir moins d’argent.
“En ce moment, Aldi connaît une forte progression. Il y a de bonnes chances que Lidl soit rattrapé ou dépassé dans la compétition. De cette telle manière, nous sommes aux prises avec une spirale infernale où la pression ne cesse d’augmenter sur nos épaules afin de protéger les profits. Il est important d’y faire face.
J’imagine que des mesures gouvernementales comme la Loi Peeters ne sont pas particulièrement utiles non plus.
“Nous travaillons déjà de manière extrêmement flexible. Une grande partie des mesures introduites par Peters étaient déjà en vigueur depuis un certain temps. Un problème particulier pour nous est l’extension des emplois flexibles au commerce et la facilitation du travail de nuit pour le commerce électronique. Le commerce électronique est actuellement très limité chez Lidl, mais il peut avoir un impact énorme sur nos conditions de travail. Sans parler des pensions. Presque personne chez Lidl n’a un contrat à temps plein. Les conséquences pour nos pensions seront désastreuses si les projets du gouvernement sont effectivement mis en œuvre.
Comment penses-tu que des avancées peuvent être arrachées ?
“Tout d’abord, il est important que nous gagnions cette bataille et ainsi, à court terme, de gagner ces 42 heures de manière permanente. Cela ne sera possible que si nous sommes en mesure d’étendre les actions ce lundi. En fait, j’avais espéré que d’autres enseignes rejoignent la lutte, mais ce n’est malheureusement pas le cas. Mais si nous voulons contrecarrer la concurrence actuelle dans le secteur de la distribution, ce sera la voie à suivre et nous devons étendre la lutte à l’ensemble du secteur.”
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La crise est finie, vive la crise !

L’anarchie de la production en régime capitaliste ne peut rien signifier d’autre que des crises économiques, sociales et environnementales.
‘‘La croissance s’intensifie et le nombre de citoyens européens au travail est sans précédent. Profitons de ce momentum pour effectuer un bond résolu en avant’’(1) déclarait Charles Michel le 4 mars. Ce n’est qu’un des derniers exemples de la confiance de façade affichée par la bourgeoisie et son personnel politique. Mais, au vu de la situation économique, le bond en avant annoncé pourrait aussi bien être une glissade.
Par Clément (Liège)
Il est vrai qu’une certaine reprise économique semble se manifester. En 2017, le PIB mondial aurait crû de +3% (+2,4% dans la zone euro) selon la Banque mondiale(2). Le FMI et l’OCDE s’accordent pour annoncer la perspective d’une croissance de 3,9% pour les deux années à venir (2,2% dans la zone euro)(3). En Belgique, la Fédération des Entreprises de Belgique se réjouit de la perspective d’une croissance de 2% pour 2018 (1,7% selon la Banque nationale) et annonce que ‘‘le moteur de l’emploi tourne à plein régime’’(4).
Les germes d’une nouvelle crise sont bien présents
Cela doit immédiatement être nuancé, car ces niveaux de croissance restent bien inférieurs à ceux d’avant la crise. Ensuite, tant l’OCDE que le FMI soulignent que les tensions géopolitiques, les phénomènes climatiques extrêmes, l’instabilité politique et le protectionnisme économique constituent de sérieuses menaces pour l’économie(5). Le risque de guerres commerciales est également présent(6). Lors de la chute des valeurs boursières de février 2018, ‘‘l’indice de la peur’’ sur les marchés boursiers (le VIX, ‘‘the fear index’’) a atteint des sommets inconnus depuis 2009(7), poussant le FMI à appeler à ne pas céder à la panique. Les capitalistes et leurs économistes ne sont finalement pas si confiants que ça.
Dix ans après la crise, la dette cumulée des États, des entreprises et des ménages est environ 64% supérieure au niveau de 2007 et représente plus de 300% du PIB mondial(8). La croissance actuelle reste dépendante de l’injection d’argent dans l’économie pour éviter un effondrement total. L’assouplissement quantitatif (créer des liquidités pour racheter des titres de la dette) est toujours de mise et actuellement la BCE rachète mensuellement pour 30 milliards de ces titres, avec 2.400 milliards rachetés depuis mars 2015. Malgré de timides augmentations aux USA, les taux d’intérêts auxquels les banques centrales prêtent aux banques privées restent très bas, ce qui stimule les comportements à risque.
Martin Wolf, directeur du Financial Times, souligne que ‘‘parmi les pays du G7, le taux d’investissement net reste en dessous de son niveau d’avant la crise, et que la productivité du travail y est en-dessous de sa moyenne entre 1995 et 2007’’ (Financial Times 5/12/2017). Et pour cause, les liquidités injectées auront principalement servi à gonfler les dividendes reversés aux actionnaires ou auront servi à des fins de spéculation boursière où un fort profit à court terme reste assuré, plutôt qu’à développer les forces productives ce qui, bien qu’indispensable, assure un profit moindre.
Au vu de ces différents éléments la question n’est pas tant de savoir si une nouvelle crise surviendra, mais plutôt quand elle arrivera, d’où et sous quelle forme.
Contre la casse de nos conditions de vie, il nous faut une alternative
Si les représentants de la bourgeoisie célèbrent la croissance avec tant d’emphase, c’est notamment qu’ils essayent de renforcer la légitimité de leur système. Ainsi, sur l’année 2017, 1% de l’humanité a capté 82% de la valeur créée(9). La casse des conditions de travail et des salaires n’est pas étrangère à un tel résultat. Se focaliser sur la quantité en parlant des ‘‘bons chiffres de l’emploi’’ masque la qualité de ces emplois : les relativement bons emplois qui ont disparu sont systématiquement remplacés par des contrats précaires, ultra-flexibles ou à temps partiel. La pénibilité présente sur les lieux de travail couplée aux discours triomphalistes sur la croissance peut aussi stimuler la lutte, comme cela a été le cas en Allemagne, où le syndicat IG Metall a pu obtenir une augmentation salariale de 6% (voir notre édition précédente).
Lutter pour de meilleures conditions est évidemment indispensable, mais cela ne suffira pas à fondamentalement régler le problème. La recherche de profit des capitalistes se fait à court terme, sans la moindre attention pour répondre aux besoins de la population, tant que l’exploitation reste possible. L’anarchie de la production sous le capitalisme ne peut signifier autre chose que des crises économiques, sociales et environnementales. Nous avons besoin d’un système économique rationnel, d’une économie démocratiquement planifiée pour répondre aux besoins de la majorité sociale et de l’environnement. Revendiquer le contrôle des secteurs-clefs par les travailleurs est une condition cruciale pour y arriver.
1) http://premier.fgov.be/fr/r%C3%A9action-face-%C3%A0-la-%C2%AB-grande-coalition-%C2%BB-en-allemagne-nous-ne-pouvons-pas-perdre-de-temps
2) http://www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2018/01/09/global-economy-to-edge-up-to-3-1-percent-in-2018-but-future-potential-growth-a-concern
3) http://www.oecd.org/fr/eco/perspectives/perspectives-economiques-analyses-et-projections/
https://www.imf.org/fr/Publications/WEO/Issues/2018/01/11/world-economic-outlook-update-january-2018
4) https://www.rtbf.be/info/economie/detail_previsions-de-croissances-et-d-emploi-la-feb-optimiste-pour-2018?id=9802823
5) http://trends.levif.be/economie/politique-economique/la-banque-mondiale-optimiste-sur-la-croissance-mais-pas-a-long-terme/article-normal-781249.html
6) https://www.lesechos.fr/monde/europe/0301388896700-le-risque-de-guerre-commerciale-incite-la-bce-a-la-prudence-2159200.php
7) https://www.lecho.be/actualite/archive/La-fete-est-finie-La-volatilite-revient-sur-les-marches/9981413
8) https://www.reuters.com/article/us-global-debt-iif/worldwide-debt-more-than-triple-economic-output-as-central-bank-shift-looms-idUSKBN1CU1V9
9) Rapport sur les inégalités d’Oxfam, édition de 2018, “Récompenser le travail, pas la richesse”.