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Category: Europe
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Berlusconi expulsé du trône, mais pas sa politique…
Jamais dans toute son histoire l’Italie n’aura connu de telles élections. Deux grosses coalitions s’affrontaient dans une campagne électorale ultra agressive, surmédiatisée mais surtout dénuée de tout programme politique concret, d’un côté comme de l’autre. Cette campagne a une fois de plus mis en évidence l’absence cruelle d’une alternative politique conséquente pour les travailleurs et les jeunes.
Christel Dicembre
La coalition de "centre-droite", regroupant les ultra-libéraux de Forza Italia (le parti de Berlusconi) et de l’UDC, les séparatistes de la Lega Nord, l’Alleanza Nazionale ainsi que le parti néo-fasciste Alternativa Sociale ont centré toute leur campagne sur la personnalité de Berlusconi et sur la menace de voir l’Italie dirigée "par des communistes adorateurs de Mao, Staline et Pol Pot"… La coalition de centre-gauche, l’Unione, emmenée par Prodi et composée des socio-démocrates, des démocrates chrétiens, des ex-communistes, des Verts et de la Rifondazione Comunista, avait à peu près comme seul point d’attache la volonté de se débarasser du "Cavaliere", l’homme le plus riche d’italie mouillé dans des affaires de corruptions et malversations.
L’affluence aux urnes fut massive: 83,6% des italiens sont allés voter (contre 81,4% en 2001). Cela s’explique principalement par deux facteurs: d’une part les nombreuses campagnes publicitaires menées par Berlusconi incitant les indécis et les abstentionnistes traditionnels à voter en sa faveur-vu qu’il détient un quasi monopole des médias italiens, on peut s’imaginer l’abus d’influence. Et d’autre part le haut niveau de conscience politique qui règne en Italie. Plus que jamais en effet, les travailleurs et certainement les jeunes voulaient faire entendre leur volonté de détrôner leur chef de gouvernement ainsi que leur désir de changement, après des années d’attaques perpétuelles sur leur niveau de vie.
Après des heures de suspens, la victoire de l’Unione fut annoncée. Cette "victoire" est cependant plus que relative: ce n’est qu’avec l’ajoût des bulletins des électeurs italiens vivant à l’étranger (qui avaient la possibilité de voter pour la première fois) et la nouvelle loi électorale mise en place par Berlusconi que la coalition de Prodi remporte la majorité tant à la chambre qu’au sénat (342 sièges contre 281 pour Berlusconi à la chambre et 158 sièges contre 156 au sénat).
Comment expliquer une si faible victoire de la gauche?
Ces dernières années, l’Italie vit une forte remontée des luttes. En 5 ans, elle connu 6 grèves générales et c’est par millions que les jeunes et les travailleurs ont manifesté contre les attaques sur leurs conditions de travail, leurs pensions, les lois sur l’immigration et la guerre en Iraq. Mais aucune force de gauche n’a été capable de canaliser ce mécontentement et cette combativité en un prolongement politique. Même la Rifondazione Comunista s’est contentée de servir d’aile gauche à la nouvelle coalition en surfant sur l’anti-Berlusconisme ambiant. Poutrant très active lors des mouvements antimondialistion et antiguerre, elle ne s’est jamais profilée, lors de la campagne, comme anticapitaliste et n’a mis en avant aucune perspective capable de mettre fin aux privatisations et de faire payer aux patrons le prix de la crise de leur propre système. Alors que tant de travailleurs et de jeunes plaçaient leurs espoirs en ce parti, il n’a jamais adopté une position de classe claire en proposant un programme socialiste ou communiste afin de se démarquer distinctement du programme néo-libéral de Prodi.
Bien que la victoire du centre gauche peut apporter certaines illusions, les italiens se souviennent surtout de Prodi comme du libéral qui a fait entrer l’Italie dans l’euro entrainant une augmentation sauvage du coût de la vie. Bien des jeunes et des travailleurs sont conscients qu’il s’avère être le meilleur atoût de la bourgeoisie pour continuer les plans d’austérité. Des discussions avec la Confindustria (principale confédération patronale) ont d’ailleurs déjà été menée sur les futures baisses des charges patronales et un nouveau "contrat social" visant à freiner l’augmentation salariale et restreindre les possibilités de mouvements de grèves.
Très vite, cette coalition du moindre mal sera confrontée à l’énorme pression de sa base. Un parti large avec un vrai programe de défense des travailleurs, unissant ceux-ci et les jeunes dans des mouvements de luttes massifs, est indispensable pour se débarasser définitivement de Berlusconi et défendre nos acquis.
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La France: A ceux qui veulent précariser les jeunes nous répondons: Résistance!
Ces dernières semaines, un mouvement d’une rare ampleur mobilise les jeunes en France. Les manifestations du 18 mars ont rassemblé 1,5 million de personnes. Et les travailleurs entrent de pleinpied dans ce mouvement lancé par les étudiants!
Stephane Ramquet
Le CPE (contrat première embauche) permettra de licencier un jeune de moins de 26 ans pendant deux ans sans aucun motif. Cette mesure antisociale du gouvernement Villepin vise à instaurer une concurrence entre travailleurs afin de faire baisser les salaires et les conditions de travail. Le CPE ne créera aucun emploi! Il ne fera que remplacer les Contrats à Durée Indéterminée par des emplois précaires!
Les étudiants ont compris qu’ils en seraient les futures victimes et ils ont immédiatement réagi! A travers des assemblées générales, les étudiants ont déclaré la grève jusqu’au retrait du CPE. Désormais, soixante-huit universités sont bloquées et occupées, ainsi qu’un quart des lycées!
Les étudiants, organisés dans la Coordination Nationale des Etudiants, et les lycéens étaient massivement présents lors de la manifestation du 18 mars et formaient le principal du cortège. Les mots d’ordre des étudiants en lutte – qui réclament l’annulation totale du CPE et qui appellent à la grève générale – débordent largement ceux des syndicats étudiants.
Les syndicats de travailleurs (CGT, CFDT, FO,..) étaient cette fois venus en nombre à la grande manifestation du 18 mars réclamant la suppression du CPE. L’attitude des directions syndicales, peu enclines à lancer la grève générale, tranche avec la détermination des travailleurs et des délégués de base sur lesquels plane la menace d’un « contrat senior ».
De leur côté, le PS et le PC limitent leur « action » à une joute parlementaire. Ils se profilent comme les meilleurs garants de la « paix sociale » et ne voient dans le mouvement qu’un tremplin pour les élections de 2007.
Le gouvernement est resté de marbre, même après la gigantesque mobilisation du 18 mars, et les CRS ont attaqué les manifestants rassemblés Place de la Nation et les étudiants massés devant la Sorbonne pour qu’on leur rende leur faculté.
Nos camarades de la Gauche Révolutionnaire, notre organisation soeur en France, étaient présents lors de la grande manifestation du 18 mars avec leurs journaux, leurs tracts, etc. La foule était très réceptive et leur intervention fut une réussite. Une quinzaine de camarades belges sont venus à Paris et à Lille pour leur prêter main forte.
Mais la grève et les manifestations des étudiants et lycéens ne suffiront pas à faire plier ce gouvernement au service des patrons. Frappons-les là où ça leur fait mal: leurs profits, à travers la grève générale!
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La France: Vers un nouveau mai 68?
La crise des banlieues de la fin de l’année passée semblait promettre à la droite française des lendemains qui chantent. Le Ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, caracolait en tête des sondages et des observateurs soi-disant avertis annonçaient un glissement à droite général de la société française.
Thierry Pierret
Lors de cette crise, nous écrivions que le soutien dont bénéficiait le gouvernement Villepin-Sarkozy dans les sondages était purement conjoncturel et ne faisait que traduire le désarroi des travailleurs et de leurs familles face à la rage (auto)destructrice d’une partie de la jeunesse des banlieues. Nous écrivions également que la popularité de Sarkozy baisserait à nouveau dès lors que la lutte des classes reprendrait le dessus.
Le gouvernement a cru habile de tenter de dévier la protestation violente des jeunes des banlieues contre leurs conditions de vie – dont le chômage de masse – au profit de son projet néolibéral. Il a fait voter un ensemble d’attaques baptisé cyniquement « loi sur l’égalité des chances » qui prévoit toute une batterie de mesures visant à casser encore plus le marché du travail : abaissement de l’âge du stage professionnel de 16 à 14 ans, abaissement de l’âge du travail de nuit à 15 ans, Contrat Nouvelle Embauche (CNE) qui instaure un stage de 2 ans pour tous les travailleurs des entreprises de moins de 20 salariés. Le Contrat Première Embauche (CPE), qui étendait ce stage aux jeunes de moins de 26 ans, devait couronner ce dispositif. Mais c’était compter sans la lame de fond anti-libérale qui avait balayé la Constitution européenne et qui avait eu raison du prédécesseur de Dominique de Villepin.
Après avoir quelque peu tergiversé face à l’ampleur du mouvement, la droite a fait bloc autour de Villepin. Elle sait que reculer devant la jeunesse en retirant le CPE risque d’ouvrir une brèche dans laquelle les travailleurs du public comme du privé pourraient s’engouffrer massivement. Un scénario analogue, certes dans un contexte différent, s’était jadis produit en Mai 68. A l’époque, la bureaucratie stalinienne du PCF et de la CGT avait abusé de l’autorité immense qu’elle avait dans la classe ouvrière pour sauver le régime chancelant de de Gaulle. Si un mouvement d’une telle ampleur devait se reproduire, ni le PCF ni le PS ni aucune organisation syndicale n’aurait cette fois l’autorité suffisante pour le canaliser. Mais il n’y a pas davantage d’organisation de masse de travailleurs capable de le conduire à des victoires décisives, sans même parler d’une issue révolutionnaire.
L’unité de la droite autour de Villepin n’est pourtant que de pure façade. Si le mouvement continue de prendre de l’ampleur au lieu de s’essoufler comme l’espère Villepin, ce sera le sauve-qui-peut qui verra tous les dirigeants de la droite chercher désespérément une porte de sortie. Les antagonismes internes n’en ressurgiront alors qu’avec plus de vigueur.
Quelle que soit son issue, le mouvement contre le CPE a déjà sérieusement entamé le crédit de la droite. Villepin et Sarkozy ont vu leur cote de popularité s’effondrer en quelques semaines. L’un et l’autre sont donnés perdants au deuxième tour des élections présidentielles de 2007 face à l’éventuelle candidature de la compagne du président du PS, Ségolène Royal, qui ne cache pourtant pas son admiration pour Tony Blair ! Bien qu’encore improbable à ce stade, une réédition à l’envers du scénario du 22 avril 2002 n’est pas à exclure, qui verrait le ou la candidat(e) du PS affronter celui du FN au second tour en raison d’un effondrement des candidats de la droite classique.
La question d’une alternative socialiste se pose ici de façon très concrète. Il y a un vide béant à gauche que seul un nouveau parti de masse des travailleurs pourrait combler. Les organisations traditionnelles de l’extrême gauche française, comme la LCR et LO, pourraient prendre des initiatives décisives pour la création d’un tel parti. Le feront-elles cette fois-ci ou laisseront-elles une fois de plus passer l’occasion?
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Rapport de l’action de solidarité avec la lutte des jeunes en France contre la précarité
Ce mardi 28 mars était une journée historique en terme de mobilisation en France. Près de 3 millions de personnes, étudiants, chômeurs, travailleurs confondus ont défilé dans les rues de l’hexagone pour protester contre la loi de régression sociale dite de « l’égalité des chances ».
Les Etudiants de Gauche Actifs
Les Etudiants de Gauche Actifs soutiennent vigoureusement cette lutte contre la précarisation de l’emploi et ont tenu à organiser un rassemblement devant le consulat de France à Bruxelles afin de concrétiser leur soutien (d’autres sont allés manifester dans les rues de Lilles ou de Paris) et de protester contre le démantèlement social que subit l’ensemble de l’Europe.
Plusieurs communiqués de presse avaient été envoyés et nous avions mobilisé pendant deux semaines et notamment à la manifestation contre le décret Simonet avec un tract faisant un lien entre les attaques que l’enseignement subit ici en Belgique et celles mises en place en France pour l’emploi des jeunes.
Nous étions pourtant qu’une petite vingtaine (étudiants de la VUB, de l’ULB, de la Haute Ecole de la Poste, et travailleurs) devant le consulat, mais sans aucun doute, combatifs et déterminés (sous les slogans de « non à la précarité, étudiants , travailleurs solidarité » ou encore « résistance internationale contre l’Europe du capital »).
Il est important de montrer une solidarité internationale face aux attaques qui nous touche tous. En effet, le pacte des générations, celui contre les chômeurs, les attaques dans l’enseignement, etc.… ne sont pas des mesures isolées mais se retrouvent dans un contexte d’attaques néolibérales appliquées au niveau européen. Et c’est à l’échelle internationale que nous devons nous y opposer.
Ci dessous la lettre donnée au consulat:
Bruxelles, le 27 mars 2006
Les Etudiants de Gauche Actifs
Tel : 0497/92.12.63
Site web: www.gauche.be
Email: ega@gauche.beMadame, monsieur
Le cercle des Etudiants de Gauche Actifs de toutes les universités et hautes écoles de Belgique, et les personnes venues appuyer leur lettre, tiennent à vous faire part de leur total désaccord avec la loi dite pour l’égalité des chances. Cette loi n’annonce que précarisation, flexibilité, avenir misérable pour les jeunes, et n’est que le reflet d’une politique ultra-libérale appliquée partout en Europe et dans le monde. Cette politique qui ne profite qu’au patronat nous la refusons. Nous trouvons également scandaleuses les méthodes répressives employées pour discréditer et museler l’opposition criée par les jeunes et les travailleurs.
Le gouvernement français n’a le droit de rester sourd à ce mouvement de contestation qui traverse sont pays. Il est clair que la majorité de la population s’oppose au moins au CPE.
Si ce gouvernement refuse de retirer cette mesure, c’est qu’il ne représente nullement son pays. Le mot d’ordre de la coordination nationale étudiante appelant à la démission du gouvernement nous semble des plus légitimes en ce sens.
Nous constatons que partout en Europe (et certainement dans le reste du monde) des attaques visant à reprendre nos acquis sociaux sont lancées. La précarisation de la vie et du travail se fait ressentir de plus en plus clairement. Face à ce démantèlement social nous nous devons de réagir. C’est pourquoi nous soutenons vigoureusement la lutte des étudiants, des lycéens et des travailleurs contre cette loi de plus, synonyme de régression sociale.
Salutations socialistes,
Les Etudiants de Gauche Actifs
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L’appel à une alternative de gauche a de plus en plus d’écho en Europe… Mais quelle alternative?
Bas de Ruiter, Offensief (notre organisation soeur aux Pays-Bas)
Pays-Bas: défaite du gouvernement et progression de la gauche
Les élections communales du 7 mars ont provoqué un séisme politique aux Pays-Bas. Les partis qui en sont sortis vainqueurs sont le PvdA (l’équivalent de notre PS) qui est passé de 15,6% des suffrages à 23,3%, et le Socialistische Partij (un parti de gauche plus radical) qui a progressé de 2,9% pour atteindre 5,7% des voix.
La victoire électorale de ces deux partis a eu des répercussions au plan national. Selon un sondage du 17 mars, le PvdA et le SP disposeraient ensemble d’une majorité de 79 des 150 sièges au parlement. Ce résultat montre qu’une grande partie de la population est à la recherche d’une alternative à la politique d’austérité néolibérale menée par le gouvernement de droite. Mais toute la question est de savoir en quoi consiste cette alternative et comment elle pourra se mettre sur pied.
Les négociations pour la formation de coalitions locales vont bon train et des majorités réunissant le PvdA, le SP et Groen Links (les Verts) sont possibles dans plusieurs communes. Selon nous, une coalition communale qui prétend défendre les intérêts des travailleurs et des jeunes devrait au minimum satisfaire les revendications suivantes pour faire la différence avec la politique actuelle:
* Investir massivement dans des logements à un prix abordable;
* Etendre la gratuité des transports en commun au lieu de les privatiser;
* Créer des emplois en nombre dans les services communaux (maisons de quartier, écoles, services de nettoyage, transports en commun, pompiers,…), avec des contrats à durée indéterminée et un salaire décent;
* Augmenter les budgets du secteur non-marchand (soins à domicile, transport des handicapés,…) et refuser toute ingérence du privé dans ce secteur;
* Augmenter les allocations et les aides sociales;
C’est le minimum pour commencer à résoudre les problèmes sociaux. Un tel programme coûte évidemment de l’argent et il va souvent à l’encontre de la législation nationale. Un collège de gauche devra donc engager la lutte contre le gouvernement de Balkenende en mobilisant la population et en organisant des actions de protestation. Mais toute la question est évidemment de savoir si les partenaires pressentis du SP pour une coalition de gauche, à savoir le PvdA et GroenLinks, sont prêts à s’engager dans une telle lutte…
Si, en dépit de cela, le SP décidait tout de même de gouverner avec ces deux partis, il prendrait le risque considérable d’être considéré comme coresponsable de la politique d‘austérité. Là où le SP fait déjà partie d’une coalition locale, comme à Nijmegen, la fraction SP du conseil communal a été placée devant la ‘nécessité’ d’économiser dix millions d’euros et a même approuvé la privatisation des bus et du service du logement!
Que faire alors?
Des améliorations peuvent aussi être imposées depuis l’opposition si le SP honore son ancien slogan “pas de fraction sans action” et mobilise la population, si possible avec les syndicats. L’Histoire nous apprend que rien n’est acquis sans lutte, que ce soit sur les plans local, national ou international. Si le SP prend la tête de ces luttes locales et s’il les lie à la lutte plus générale pour une société socialiste, il pourra se transformer en un véritable parti des travailleurs, un parti capable de transformer réellement la société. Offensief, l’organisation soeur du MAS/LSP aux Pays-Bas, milite pour cette stratégie, au sein et en dehors du SP.
Un grand potentiel pour la gauche en Allemagne
Dans le feu de la lutte contre l’offensive générale que le gouvernement de coalition entre socialistes et écolos de Schröder a menée ces dernières années contre les travailleurs et les chômeurs, une nouvelle formation politique de gauche, le WASG, a vu le jour. Aux élections nationales du 18 décembre dernier, les listes communes du WASG et du PDS (l’exparti communiste d’Allemagne de l’Est) ont obtenu 8,7% des voix et 54 sièges. Aujourd’hui le WASG compte 12.000 membres. Depuis les élections, les directions de ces deux partis souhaitent accélérer la fusion des deux formations.
En préparation aux élections régionales qui auront lieu en septembre, il y a eu une discussion sur la politique que le PDS a menée à Berlin avec le SPD, le parti social-démocrate, dans le gouvernement régional. A Berlin, le PDS s’est rendu coupable d’une politique qui a notamment introduit les emplois “à un euro” et la vente/ privatisation des services publics, entre autres celle de 60.000 logements sociaux. Ce sont les caractéristiques d’une politique néolibérale dont le WASG se distancie au niveau national et qui ne constituent évidemment pas une base saine pour la formation d’un nouveau parti de gauche. Comme l’a déclaré Lucy Redler, présidente du WASG à Berlin et membre du SAV (notre organisation-soeur en Allemagne), “on ne peut pas causer du socialisme le dimanche et imposer des coupes d’austérité pendant la semaine”.
Pour une candidature indépendante
Lors du congrès berlinois du WASG le 25 février, deux tiers des délégués ont voté une résolution qui prône une candidature indépendante du WASG lors des élections régionales de septembre. Cette décision a été prise après une période d’intense discussion démocratique dans les organes élus et dans les sections locales du parti. Les membres ont ensuite validé cette décision par un référendum interne. Un sondage préélectoral a aussi confirmé cette option : la coalition « rouge-rouge » (SPD/PDS) serait sanctionnée pour sa politique néolibérale et le WASG recueillerait 4,5% alors qu’il n’a encore mené aucune campagne. 5% des voix suffiraient pour que le WASG obtienne des élus au parlement régional, qui pourraient alors faire entendre une voix réellement à gauche. Si le WASG ne se présente pas seul, bon nombre de votes de protestation iraient sans doute à l’extrême droite.
L’unité oui, mais laquelle?
Cette décision va donc à l’encontre de la volonté de la majorité du comité national du WASG et de la direction nationale et locale du PDS (maintenant Linkspartei.PDS) qui veulent imposer à tout prix une liste commune lors des élections régionales et, dans la foulée, une fusion entre les deux formations.
Le WASG berlinois ne s’oppose ni à l’unité à gauche ni à la constitution d’un grand parti démocratique au plan national, mais il refuse d’endosser la responsabilité de la politique néolibérale menée par le PDS berlinois en coopération avec le SPD. En effet, l’unité à gauche ne peut s’enraciner que dans la lutte contre la politique néolibérale.
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ITALIE: Pour barrer la route à la politique de Berlusconi, il faut un programme socialiste!
ITALIE
Ce week-end des 18 et 19 mars fut marqué par des manifestations dans le monde entier pour protester contre la guerre et l’occupation impérialiste de l’Irak, celle-ci entrant à présent dans sa quatrième année. C’est à Rome que le nombre de personnes descendues dans les rues fut le plus massif: on évoque des chiffres allant jusqu’à 150.000 manifestants. Il Tempo, le principal journal contrôlé par Berlusconi, parlait quant à lui de moins de 10.000 manifestants!
Cédric Gérôme
L’approche des élections législatives italiennes (qui auront lieu les 9 et 10 avril 2006) n’y est pas pour rien dans ce genre de distorsion de l’information: en effet, dans le cadre de la campagne électorale, la coalition concurrente à celle de Berlusconi, L’Unione (coalition dite de « centre-gauche » autour de Romano Prodi, ancien président de la Commission Européenne) fait du retrait des troupes italiennes un de ces chevaux de bataille.
Il est clair cependant que le discours pacifiste des partis qui forment la coalition de centre-gauche a ses limites: pour preuve, le DS (Democratici di Sinistra, principal parti de la coalition) a refusé de participer à la manifestation de samedi sous prétexte que la plate-forme ne condamnait pas assez explicitement le terrorisme ; pour les mêmes raisons, la direction de la CGIL (le plus gros syndicat italien, qui compte dans ses rangs plus de 5 millions d’adhérents et joue habituellement un rôle-moteur dans le mouvement anti-guerre) a elle aussi boycotté la manifestation. Cela n’a pas empêché nombre de militants de la base d’assister au défilé, mais les mots d’ordre absentéistes du sommet ont tout de même contribué à déforcer grandement le cortège.
De plus, la plupart des dirigeants parlent d’un retrait des troupes « conditionné à l’approbation des Nations Unies ». Quoiqu’il en soit, il est clair que l’évocation du retrait des troupes, même si elle est mise en pratique sous un futur gouvernement Prodi, sera surtout un moyen de gagner des points sur la politique étrangère en jouant sur le fort sentiment anti-guerre présent parmi la population italienne dans le but de détourner l’attention de la politique interne, qui risque de ne pas se distinguer fondamentalement de la politique anti-sociale appliquée pendant 5 ans par le gouvernement de Berlusconi.
L’Unione semble en effet se profiler comme la formule gagnante du patronat pour poursuivre ses attaques. Pendant que des dizaines de milliers de jeunes et de travailleurs descendaient dans la rue contre la guerre, Prodi s’entretenait avec le grand patronat pour lui présenter le programme de son futur gouvernement: un programme de recettes néo-libérales (réduction des charges patronales et autres cadeaux fiscaux aux entreprises, nouvelles privatisations, augmentation de la flexibilité sur le marché du travail,…). Le titre révélateur du Giornale d’Italia en dit long sur ce qu’en pense les patrons: « Les oligarques veulent un gouvernement de gauche » (!) D’ailleurs, un sondage paru dans La Repubblica – «Les pronostics des industriels»- fournit des chiffres révélateurs quant à l’état d’esprit de la bourgeoisie: à la question « Qui gagnera les élections ? », 44% des patrons de la Confindustria- la principale confédération patronale du pays, équivalent de la FEB en Belgique- répondent Prodi, et seulement 12% affirment qu’il s’agira de Berlusconi.
Les intentions de vote des électeurs semblent confirmer cette tendance: dans les derniers sondages, L’Unione jouit de presque 5 points d’avance sur son adversaire. Il est clair que la majorité des travailleurs et des jeunes veulent en finir avec ce bandit milliardaire qu’est Berlusconi, ainsi qu’avec La casa delle libertà – La Maison des Libertés, sa coalition dite de « centre-droit », abritant en réalité nombre de néo-fascistes notoires.
A ce titre, Berlusconi vient tout récemment de conclure une alliance avec Alessandra Mussolini, petite-fille du Duce, et ouvertement nostalgique du régime de son grand-père. Son parti, Alternativa Sociale, s’ajoute ainsi à l’Alleanza Nazionale de Gianfranco Fini (n°2 du gouvernement, considérant le Duce comme « le plus grand homme d’Etat du 20ème siècle ») et du ministre Gasparri (ancien président du Front de la Jeunesse, mouvement d’extrême-droite). Berlusconi n’avait-il pas lui-même déclaré, en septembre 2003: « Mussolini n’a jamais tué personne, tout au plus envoyait-il les gens en vacances aux abords des frontières » ?
La haine des travailleurs à l’égard d’«Il Cavaliere » et les scandales à répétition qui l’ont éclaboussé (collusions avec la mafia, faux bilans, banqueroute frauduleuse, mise en accusation pour être soupçonné d’avoir versé 600.000 $ à l’avocat anglais David Mills en remerciement d’un faux témoignage, publication de faux sondages le profilant en tête pour les prochaines élections, démission de son ministre des réformes institutionnelles Calderoli –de la Ligue du Nord- après que celui-ci eut fièrement exhibé sur un plateau de télévision un T-shirt à l’effigie des caricatures danoises de Mahomet,… pour ne citer que quelques exemples récents) ont fait de Berlusconi un pion gênant pour la bourgeoisie italienne. Les relations entre celle-ci et le premier ministre ne sont plus au beau fixe ; bien au contraire, elles se sont envenimées au point de se transformer en une véritable foire d’empoigne dont la presse italienne fait quotidiennement ses choux gras. Ainsi, La Repubblica du lundi 20 mars avait pour titre à la une: « La Confindustria contre Berlusconi »…
Toutefois, la mainmise de ce dernier sur les médias du pays (Berlusconi possède et contrôle directement ou indirectement les médias audiovisuels et la presque entièreté de la presse écrite) lui assurent encore, d’ici au 9 avril, la possibilité de convaincre les quelques 24% d’électeurs indécis et de faire ainsi basculer les urnes en sa faveur. La possibilité que Berlusconi reste au pouvoir n’est donc pas totalement exclue: un tel scénario pourrait constituer l’élément déclencheur de nouvelles luttes de masse en Italie.
L’Unione, copie conforme de L’Olivier… avec le PRC en plus
A la différence des précédents gouvernements de centre-gauche (L’Ulivo), un éventuel gouvernement de L’Unione incluerait directement le PRC (Partito della Rifondazione Comunista), lequel prendrait alors sur ses épaules la responsabilité de la politique gouvernementale. De la part de Prodi, cette alliance avec le PRC n’est évidemment pas anodine: grâce au soutien dont dispose encore ce parti parmi de larges couches de travailleurs et de jeunes, celui-ci s’assure une bonne couverture sur la gauche. L’autorité dont bénéficie le PRC parmi les couches les plus combatives des travailleurs de la CGIL et de COBAS (= deuxième syndicat le plus important d’Italie) d’une part, et la ligne de plus en plus opportuniste suivie par la majorité des dirigeants du PRC d’autre part, ouvrent l’espace à Prodi pour former un gouvernement de collaboration de classes amortissant les luttes ouvrières et liant ainsi les mains des travailleurs au grand capital grâce à la complicité de la bureaucratie syndicale.
Le 13 mars, Bertinotti, secrétaire général du PRC, affirmait, en réponse à une question qui lui était posée par un internaute: « Une alliance plurielle entre plusieurs partis, dont Rifondazione, s’est constituée sur un programme partagé et très engagé: un programme de réforme. Nous soutenons celui-ci avec conviction. » On comprend un peu mieux la nature de ce programme lorsque l’on sait qu’il est soutenu –avec tout autant de conviction- par la Confindustria: Luca di Montezemolo, le patron des patrons, s’est en effet dit « très satisfait » par l’entrevue qu’il avait eu avec Prodi, entrevue portant précisément sur ce fameux programme de gouvernement que Bertinotti défend de vive voix…
« Battre Berlusconi et le gouvernement de droite est nécessaire », affirme le PRC. Il s’agit bien entendu d’un souhait partagé par des centaines de milliers de jeunes et de travailleurs italiens ; cependant, ceux-ci ne veulent pas se débarasser de Berlusconi et de la droite pour les voir revenir au pouvoir quelques années plus tard. Or, le soutien à la politique néo-libérale de Prodi ne peut que creuser le lit pour une telle perspective. Au nom d’une unité sacrée contre Berlusconi et ses sbires, les dirigeants du PRC semblent avoir mis sous le tapis les leçons du passé: c’est précisément la politique du précédent gouvernement de centre-gauche, arrosée d’attaques sur les acquis sociaux et de privatisations en tout genre, qui avait ouvert la voie au second gouvernement de Berlusconi en 2001.
La Rifondazione conserve toujours le support de nombre de travailleurs et de jeunes qui veulent en finir avec la politique néo-libérale. Il était pourtant clair lors de la manifestation de samedi que beaucoup d’entre eux réalisent que le parti prend une mauvaise orientation. Car l’objectif poursuivi par la direction du parti n’est pas seulement de se présenter sur une liste pour contribuer à la défaite de Berlusconi, mais bien d’être une composante directe d’un gouvernement qui fera inévitablement payer la crise sur le dos de la classe ouvrière et de la jeunesse.
Les dirigeants du PRC, tel Bertinotti, bercent leur base de phrases creuses et de slogans apolitiques – « Pour que l’Italie change vraiment » est ainsi le slogan principal de leur campagne – au lieu de mettre en avant une position de classe claire et indépendante et un programme de revendications qui soit dans la lignée de ce que le nom de leur parti laisse suggérer.
L’Italie est en proie à une crise économique profonde, le pouvoir d’achat en chute libre. Le FMI estime que le déficit du PIB italien atteindra en 2006 les 4,1% et que la croissance demeurera nulle. La propension des familles italiennes à l’endettement a pratiquement doublé en 10 ans, et, selon la Banque d’Italie, la moitié des jeunes entre 15 et 29 ans travaillent sous contrat à durée déterminée. Un jeune travailleur italien sur quatre est en outre considéré comme travailleur précaire.
Toutefois, il est clair que les craintes d’une dégradation de cette situation ne sont en rien balayées par la perspective d’un nouveau gouvernement de centre-gauche. Le seul moyen d’en finir avec cette politique est de rompre avec les politiciens bourgeois responsables d’attaques vicieuses sur les travailleurs et les jeunes et de construire la lutte et les instruments pour une politique vraiment socialiste. Ceci devrait être l’ABC pour ceux qui se proclament communistes et représentants des intérêts du mouvement ouvrier.
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Paris: des centaines de milliers de manifestants contre le CPE
France
Ce 18 mars avait lieu dans toute la France des manifestations pour dénoncer le train de mesures asociales du CPE (Contrat Première Embauche) . Selon les médias, il y avait des manifestations dans plus de 150 villes. La CGT estime que 1.5 millions de gens ont manifesté dans les rues de France.
Vincent Devaux
Cela fait bien longtemps qu’il n’y a plus eu de mobilisations aussi massives en France et malgré que la contestation soit présente depuis des semaines, cela ne pourrait bien être que le début d’un mouvement plus large si De Villepin et le gouvernement Chirac s’entêtent dans leur ligne arrogante de détricotage social.
Rien qu’à Paris le cortège aurait compté plus de 350.000 personnes. Alors que les gens en fin d’après-midi terminaient le défilé Place de la Nation, d’autres ne l’avaient toujours pas commencée et étaient toujours sur la place Denfert-Rochereau, le point de rendez-vous à 6km de là. La mobilisation était immense et toutes les tranches d’âges dans la société étaient présentes.
Tout le monde se rend compte que la précarisation est générale. Beaucoup de gens font également le parallèle avec mai 68 ; il est clair que la récente occupation de la Sorbonne y est pour quelque-chose ; elle est devenue un symbole de résistance contre l’arrogance du gouvernement Chirac. Egalement, c’est le mouvement étudiant et lycéen par son ampleur, sa capacité d’organisation qui a amené des secteurs plus larges de la population dans les rues. Si elles seront les premières victimes du Contrat Première Embauche, les mesures du gouvernement Chirac toucheront également les moins jeunes, par exemple au travers des « Contrats Séniors ».
La Coordination Nationale des Etudiants formait la tête du cortège – malgré les essais de récupération bureaucratique par l’UNEF- principal syndicat étudiant en France- et était bien plus importante que cette dernière. Etudiants et lycéens mis à part on pouvait noter la présence des syndicats (majoritairement la CGT, mais également la CFDT, FO,…), mais également une délégation d’une organisation de parents, des délégations de sans-papiers (la coordination nationale des sans-papier était présente), les Intermittants du spectacle,…
Beaucoup de personnes « non-organisées » étaient présentes dont beaucoup de travailleurs et de personnes plus âgées. Dans le cortège on pouvait entendre une délégation chanter « La Sorbonne on l’a gagnée, la Sorbonne on la gardera ». D’autres slogans traduisaient la rage envers le gouvernement et le patronat : « À ceux qui veulent précariser les jeunes, les jeunes répondent : "Résistance !" », « Villepin t’es foutu, la jeunesse est dans la rue » , « Villepin Démission », certaines délégations avançaient le mot d’ordre de grève générale mais en tout cas le mot d’ordre principal qui ressortait clairement dans toute la manif était le « Retrait du CPE ».
Notre organisation soeure en France, La Gauche Révolutionnaire, est intervenue avec ses journaux et des tracts, aidée par des camarades venus de Belgique. Les gens étaient en tout cas très curieux et très demandeur vis-à-vis de tracts, ce qui peut être expliqué par un processus d’une politisation qui va au delà d’une simple radicalisation et de recherche d’alternative –la gauche institutionnelle étant discréditée-.
Dominique de Villepin est désormais sous une énorme pression; il est clair qu’il ne pourra pas maintenir une position aussi inflexible telle que jusqu’ici. Son taux de popularité est en baisse; il n’a plus que 37% d’opinion favoribale soit une baisse de 16 % en deux mois. Selon un sondage, actuellement 68% des français veulent le retrait du CPE ; ce qui entre en contradiction avec les propos hypocrites du gouvernement qui voudraient faire passer « les masses silencieuses » pour des gens qui seraient favorables au CPE.
Les syndicats ont prévu de se réunir ce lundi pour décider de l’appel à la grève afin d’obtenir le retrait du CPE. La semaine va redémarrer dans les lycées et les unifs par des assemblées générales pour décider de la suite des mobilisations Une grande journée de mobilisation est déjà prévue pour jeudi prochain (le 23). La mobilisation doit s’élargir et l’appel à la grève dans les usines doit être utilisé pour prendre à la gorge le patronat et son bras armé gouvernemental dans ce qu’il lui est le plus chèr: les profits.
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Rome: manif anti-guerre
Comme dans tant de villes à travers le monde, Rome a vu défiler ce samedi 18 mars des milliers de manifestants contre l’occupation impérialiste de l’Irak. Le nombre de personnes présentes à la manifestation n’est pas encore connu avec exactitude, la plupart des médias italiens étant en grève ce week-end.
Cédric Gérôme
Seul le principal journal contrôlé par Berlusconi, “Il Tempo”, a osé avancer des chiffres : celui-ci parle de moins de 10.000 Manifestants, chiffre absolument ridicule destiné sans aucun doute à minimiser l’ampleur de la manifestation et du sentiment anti-guerre existant parmi de larges couches de la population en Italie. Outre la guerre en Irak et la participation effective du gouvernement Berlusconi à ce conflit, c’est l’ensemble de la politique néo-libérale du gouvernement qui était clairement pointée du doigt par la majorité des manifestants. Parmi les importantes délégations présentes dans le cortège, on pourra noter celle du syndicat COBAS – une des principales unions de la base. Les autres directions syndicales avaient tout simplement refusé d’appeler à manifester.
Pendant que des milliers de jeunes et de travailleurs descendaient dans la rue, Romano Prodi, figure de proue de l’alliance de centre-gauche –“L’Unione”- négociait les futurs accords avec Cofindustria, principale confédération patronale du pays. Cela donne un avant-goût assez illustratif de la politique qu’il est prêt à mener dans le cas probable où il serait élu : une politique au service du grand patronat. D’ailleurs, le DS (le principal parti de l’alliance) a boycotté la manifestation anti-guerre, nouvel exemple du fait que sa « réthorique de gauche » et ses discours contre la guerre ne sont que des appâts électoraux destinés à s’attirer la sympathie des travailleurs et des jeunes. Il est à déplorer qu’au nom de l’unité contre la droite, la majorité des dirigeants de la Rifondazione Comunista entre dans ce jeu et se cachent sous le manteau de Prodi et sa clique.
Pendant La manifestation, nous sommes intervenus avec trois camarades du CIO, et avons vendu près de 150 exemplaires de notre journal “Lotta per il socialismo” (càd. La lutte pour le socialisme); nous fumes en général bien accueillis malgré notre force numérique limitée.
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France. Contrat Promotion Esclave!
Deux mois après les émeutes qui ont secoué les banlieues françaises, le gouvernement Villepin a sorti ses "solutions" pour corriger les insuffisances du modèle d’intégration français sous forme de la loi pour "l’égalité des chances". Mais de même qu’ici en Belgique, le Pacte de solidarité entre les générations était tout sauf un exemple de solidarité, cette fameuse loi sur "l’égalité des chances" n’apportera rien à l’égalité mais beaucoup à l’appétit sans fin du patronat.
Nicolas Croes
Dans cette loi se trouve notamment la création de nouvelles Zones Franches Urbaines (ZFU) – dans les banlieues, dans lesquelles la moitié des bénéfices des entreprises ne seront pas imposés – qui se combinent à des diminutions fiscales directes dans des communes qui manquent déjà cruellement de moyens. Toutes les mesures prévues par cette nouvelle législation sont du même acabit. Celle-ci remet ainsi en cause la scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans par l’instauration de l’apprentissage dès 14 ans – ce qui autorise le travail de nuit dès cet âge ! – ou encore permet de supprimer les allocations familliales aux parents d’enfants trop turbulents.
Mais la mesure la plus décriée est le Contrat Première Embauche (CPE) qui instaure une période de stage de deux ans. Ce CPE est une véritable attaque contre le contrat à durée indéterminée (CDI). Ce dernier n’est pas le rempart absolu contre les abus des employeurs, mais permet au moins de ne pas se retrouver licencié sans savoir pourquoi, ou pour des prétextes aussi peu valables que de laisser sa place à un cousin du patron, … Bref, le CDI est une protection face au licenciement arbitraire. Avec le CPE, cette protection n’existe plus et les jeunes peuvent ainsi se faire licencier à tout moment sans justification durant 2 ans!
Une attaque d’une telle ampleur ne pouvait que susciter la résistance. Des centaines de milliers d’étudiants, de lycéens et de travailleurs sont déjà descendus dans les rues clamer leur opposition à cette régression sociale. Le gouvernement français en est bien conscient. C’est pourquoi il a fait passer la loi à l’Assemblée Nationale (l’équivalent de notre Chambre) en utilisant une disposition qui permet de couper court au débat parlementaire, et surtout de décourager tous ceux qui sont rentrés en lutte. Reste le Sénat, où l’UMP n’a pas de majorité absolue, qui doit se prononcer sur le projet de loi pour le 3 mars, soit quatre jours avant la journée de manifestations prévue par les syndicats. Mais s’il existe bien des partis d’opposition, leur volonté d’en découdre est des plus limitées.
Selon François Hollande, président du Parti Socialiste, il faut être "réaliste, le texte va passer ". Et il ajoute : " Le travail d’explication que nous engageons trouvera son dénouement non dans la rue mais dans les urnes, en 2007". Il ne s’agit pas pour lui et ses amis "socialistes" de défendre les intérêts des travailleurs, mais bien les leurs en vue des élections présidentielles. Même son de cloche, ou si peu différent, du côté du Parti Communiste Français ou des Verts.
Beaucoup d’opposants au CPE font référence aux luttes contre le Contrat d’Insertion Professionnelle en 1994. Cette loi destinait les jeunes à être payés au maximum à 80% du salaire minimum et elle fut abandonnée alors qu’elle était déjà passée à l’Assemblée Nationale. Mais cette victoire fut obtenue par une grève de plusieurs semaines là où, aujourd’hui, aucune perspective claire de grève combative contre le gouvernement n’est prévue par les directions syndicales.
La lutte contre le CPE et les autres mesures de la loi sur "l’égalité des chances" ne concerne pas seulement les jeunes. Les patrons soutiennent à fond Villepin-Sarkozy, car ils espèrent que, le CPE étant passé, il sera après cela possible de l’étendre à tous les salariés. La résistance de tous les travailleurs doit faire front face à la soif de profits du patronat.
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France. Etudiants en lutte: l’avenir des jeunes plus que jamais menacé
Rapport d’un participant
La France est secouée par les mobilisations étudiantes et lycéennes contre la « loi sur l’égalité des chances »… d’être exploité. AJB, membre d’Etudiants de Gauche Actifs (EGA/ALS) et du Mouvement pour une Alternative Socialiste (MAS/LSP), est parti en France, conscient que ces luttes sont dirigées contre un ennemi commun à tous, par-delà les frontières : le néo-libéralisme et le capitalisme qui l’a engendré.
Propos recueillis par Nicolas Croes
- Paris: des centaines de milliers de manifestants contre le CPE
- France. Contrat Promotion Esclave!
- Pour une grève tous ensemble, jeunes et travailleurs. Retrait du CPE
- Tracts, déclarations,… de la Gauche révolutionnaire
Peux-tu nous expliquer ce qu’est cette loi sur l’égalité des chances ?
Il s’agit d’une attaque sans précédent, orientée contre les jeunes, mais qui concerne l’ensemble des travailleurs. Ce projet de loi est constitué de trois parties: la possibilité d’aller en apprentissage dès 14 ans, celle d’effectuer du travail de nuit dès 15 ans, et la dernière partie est le fameux Contrat Première Embauche (CPE). Selon le CPE, tout jeune pourra, jusqu’à 26 ans, être licencié sans justification durant les deux premières années qui suivent son embauche. En cas de licenciement, après trois mois d’attente, il pourra de nouveau être engagé aux mêmes conditions… De quoi apprendre à accepter n’importe quoi sous la menace constante de se retrouver sans emploi à tout moment !
Cela a évidemment mené à des actions de protestation…
Oui, qui ont atteint une ampleur qui n’est pas sans rappeler mai 68. Je suis arrivé à Paris ce mardi 7 mars au matin, juste à temps pour participer aux manifestations contre le CPE qui se sont déroulées partout en France et qui ont fait battre le pavé à plus d’un million de personnes à travers l’hexagone, dont 150.000 à Paris.
Dans une ambiance peu commune on imagine.
Il est assez difficile de se représenter ce que cela peut être quand on vient de Belgique. La grande majorité des manifestants étaient des jeunes, étudiants ou lycéens, et la combativité était très grande, même si elle variait selon les facultés. Certaines revendiquaient le retrait de la totalité du projet de loi, d’autres uniquement le retrait du CPE, au cri de «C comme chômage, P comme précarité, E comme exploitation : retrait du PCE, retrait du CPE !». J’étais déjà venu pour les mobilisations du 7 février qui avaient réuni 45.000 jeunes à Paris, et plus ou moins 400.000 dans toute la France, et ce en plein congé scolaire, ce qui rendaient impossibles les descentes d’information dans les écoles. La fac’ de Rennes était déjà occupée à ce moment.
Qu’en est-il aujourd’hui ?
Ce vendredi 10 mars, 42 facultés étaient occupées, sur les 80 que compte le pays. Plus de la moitié donc, et une faculté non occupée n’est pas une faculté non mobilisée!
Que s’est-il passé après la manif’ ?
Nous nous sommes réunis à la faculté de Jussieux. Enfin, il a tout de même fallu passer au-dessus des grilles que les vigiles avaient placées… Nous étions à peu près 200 étudiants et une cinquantaine de lycéens. Etaient présents également quelques jeunes travailleurs précaires. La majeure partie de ces jeunes les plus motivés étaient syndiqués à l’UNEF (Union Nationale des Etudiants Français) ou au syndicat SUD et organisés dans des organisations politiques comme la Confédération Nationale du Travail (CNT), la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR), la Jeunesse Communiste (JC) ou encore Lutte Ouvrière (LO). Ils composaient environ 75% de l’assemblée. J’espérais retrouver des camarades de la Gauche Révolutionnaire (organisation-sœur du MAS en France), mais, dans la capitale, ils étaient principalement à Paris 8.
A cette réunion, il a été décidé de faire des descentes dans les autres facultés le lendemain pour en bloquer un maximum. A chaque fois, les blocages ont été votés à une bonne majorité.
Et ensuite?
Le jeudi matin, je suis allé à une des facultés les plus mobilisées, celle de Nanterre, qui était occupée. Tout y était bloqué, y compris la fac’ de droit (ce qui n’était plus arrivé depuis au moins une quinzaine d’années). Là, j’ai rencontré l’UNI…
L’UNI ? Qu’est-ce c’est ?
Il n’y a pas que les organisations de gauche qui sont présentes dans les facultés, les partisans de la chasse aux pauvres du gouvernement sont aussi présents. En fait, l’UNI est un mouvement de jeunes de droite, proche de Sarkozy, qui comprend une aile d’extrême-droite. Mais bon, quand on entend Sarko dire qu’il voulait nettoyer les banlieues au Karcher, on comprend qu’une proximité puisse exister entre ses partisans et ceux de Le Pen. Mardi, ils étaient une vingtaine à avoir fait le tour des blocages en chantant la Marseillaise en faisant le salut nazi. A cela, les grévistes répondaient « Nanterre, Précaires, on est tous solidaires ! » et en chantant l’Internationale.
Ils ont réussi à rentrer à l’intérieur d’un bâtiment occupé, aidés par une dizaine de vigiles (en tout, ils ne devaient pas être plus d’une vingtaine). Une centaine d’étudiants en droit qui voulaient avoir cours en ont profité pour rentrer aussi. Finalement, ils ont été repoussés après une lutte entre grévistes et membres de l’UNI.
Ceux-ci en sont restés là ?
Non. Ils ont réussi à regrouper un millier de d’étudiants, venus à l’appel de « contre le blocage », et ils ont participé à l’Assemblée Générale de la faculté. En fait, si beaucoup de jeunes sont contre le CPE et la « loi pour l’égalité des chances », beaucoup s’opposent également aux blocages. Et là, dans les discussions, la situation a été complètement retournée. Des étudiants grévistes et moi-même sommes intervenus dans l’AG contre l’UNI et les étudiants qui voulaient reprendre les cours, et le blocage a été de nouveau voté!
Qu’as tu mis en avant ?
L’importance d’avoir une vision globale du problème. Que la loi sur l’égalité des chances est une suite logique des attaques libérales contres les travailleurs, les jeunes et les étrangers. Que les attaques contre le travail ont commencé par des attaques contre les retraites en Allemagne, en France et, comme on le sait, il y a quelques semaines en Belgique. Le gouvernement français élu de manière quasi-illégitime (Le Pen – Chirac au second tour) ne cesse d’attaquer de manière frontale tous les acquis sociaux. On se rappelle aussi la manière dont ils ont réprimé successivement le mouvement lycéen, le mouvement étudiant contre le système « LMD », le mouvement des intermittents du spectacle, les émeutes dans les banlieues,… Aujourd’hui la réponse que le gouvernement amène passe encore par la répression policière. J’ai terminé mon intervention sur l’obligation d’ouvrir la lutte aux jeunes de banlieues qui seront les premières victimes du CPE mais aussi aux travailleurs sans attendre l’appel des bureaucraties syndicales qui se font assez discrètes dans la hantise de revoir un nouveau mai 68 ou des grèves massives comme celle de 1995.
Comment les différentes facultés sont-elles coordonnées ?
La coordination d’Ile-de-France, c’est à dire de Paris et de sa région, se réunit tout les deux jours. Les différentes facultés se réunissent tous les jours en Assemblées Générales, auxquelles tous peuvent participer. C’est là que sont à chaque fois élus les étudiants qui iront à la prochaine réunion de la coordination d’Ile-de-France: 7 représentants par faculté occupée, et 3 par faculté mobilisée, mais non-occupée. S’ils fonctionnent comme ça, c’est pour éviter que les facultés de droite ne bloquent tout. Et au niveau national, cela fonctionne comme ça aussi, mais les réunions sont hebdomadaires.
A l’intérieur des fac’, des commissions ont été mises sur pied: actions, interprofessionnelle (pour aller à la rencontre des associations et des travailleurs à l’extérieur de la faculté), sécurité, mobilisation, enseignants et travailleurs (orientée vers les travailleurs de la faculté), et enfin lycéenne. Dans plusieurs facultés, des motions de soutien ont été votées par les travailleurs en solidarité avec les étudiants, et beaucoup de lycées sont bloqués et occupés également. A titre d’exemple, une école professionnelle près de Nanterre est venue donner un coup de main pour bloquer la fac’. Le niveau de conscience politique des lycéens à Paris est très élevé. J’ai pu à de nombreuses reprises le remarquer, par les discussions politiques avec ceux-ci mais aussi en écoutant les interventions dans les assemblées générales. Les AG se tiennent dans des décors surréalistes avec comme slogans sur les murs : « Arrêtez d’étudier l’histoire, faites-la », « Une seule solution, la révolution » ou une des phrases mythique du Che « Hasta la victoria siempre » (Jusqu’à la victoire, toujours).
Des actions sont donc prévues conjointement ?
Tout à fait, et c’est tant mieux parce que c’est vraiment nécessaire. Isolés, séparés, les étudiants ne peuvent rien. Par exemple, le jeudi après-midi, il a été décidé de faire des diffusions de tracts dans un maximum de gares de la capitale afin d’expliquer la problématique du CPE et les positions des étudiants et aussi de mettre sur pied des manifestations « sauvages » – c’est à dire non annoncées – pour le vendredi.
C’est ainsi que 2.000 étudiants ont déboulé sur les Champs-Elysées, pour la première fois depuis mai 68! La manifestation s’avançait, au rythme de l’Internationale et de slogans comme « Etudiants, salariés, même combat ! » ou encore, « Le pouvoir est dans la rue », « Tout est a nous, rien n’est à eux… ». Nous sommes restés deux heures Place de l’Etoile, en face de l’Arc de Triomphe, qui est un grand symbole. Il y a eu là-bas quelques heurts avec la police, mais les étudiants sont partis d’eux-mêmes pour bloquer les Champs-Elysées durant quatre heures, juste avant d’aller à la Sorbonne. En fait, la Sorbonne était occupée depuis la veille au soir par 150 étudiants et un bon millier d’autres manifestaient à l’extérieur, juste séparés de leurs camarades par les CRS. Or, pendant ce temps, les autres facultés étaient toujours occupées et il y avait mille tâches à faire. Les chiffres de manifestants ne sont donc pas révélateurs du nombre d’étudiants impliqués dans ces mobilisations. Des barricades ont été élevées au Boulevard Saint-Michel et au Quartier Latin, hauts lieux des évènements de mai ‘68, dans les chants et les slogans comme le traditionnel « CRS : SS » ou encore « Police partout, justice nulle part », « La police est en colère, le pinard il est trop cher », « On veut étudier, pour pas finir policier »,…
Et vendredi, la Sorbonne tenait toujours bon…
Oh oui. Nous étions 1500-2000 à protester à l’extérieur, tout en lançant de la nourriture aux occupants qui n’avaient rien mangé depuis la veille. Un groupe est rentré par derrière, un autre, dont je faisais partie, a réussi à rentrer par les toits. A l’intérieur, nous nous sommes retrouvés à environ 500. Il y avait des discussions politiques, des pièces de théâtre sur Mai 68’, sur la Commune de Paris (dont nous allons fêter le 135e anniversaire le 18 mars), de la musique,… Les flics, de l’extérieur, essayaient de voir où étaient les étudiants pour lancer des lacrymogènes à cet endroit.
Mais finalement, le samedi, vers 4h du matin, les CRS ont chargé le bâtiment et évacué la fac’. La grande majorité des occupants a pu s’enfuir, grâce aux manifestants de l’extérieur qui ont tout fait pour aider leurs camarades de lutte. Mais il y a tout de même eu 27 arrestations. Une manifestation le lendemain a été organisée aux cris de « Libérez nos camarades ». Deux heures plus tard, tous les camarades ont été libérés.
Et c’est ce jour là que je suis rentré en Belgique, crevé, courbaturé, mais avec un moral qui résistera à bien des coups durs avant de retomber !
Et les actions continuent !
Les actions continuent, et continueront encore. Dominique de Villepin, le premier ministre, vient encore de dire maintenant (dimanche 12 mars) qu’il était hors de question de retirer le projet de loi. Qu’attendre d’autre de la part d’hommes pour qui seuls comptent les profits des patrons? La « loi sur l’égalité des chances » n’est qu’un gigantesque cadeau pour eux, ils sont les seuls bénéficiaires de ce retour en arrière. Le MEDEF (la fédération patronale) appuie évidement le premier ministre tout en affirmant que le Contrat Première Embauche et le Contrat Nouvelle Embauche n’étaient pas suffisants et qu’il fallait élargir les facilités de licenciements qu’offrent ceux-ci à tous les types de contrats !
Tout ce que tu dis est très intéressant. D’autant plus que l’on a entendu un autre son de cloche ici.
Oui, le rôle des médias dans toute cette histoire est on ne peut plus honteux. Ils ne disent pas la vérité, où alors ils la déforment à l’avantage des partisans du projet de loi. Contrairement à ce qui a été dit, rien n’a été cassé à la Sorbonne, sauf le local des réactionnaires de l’UNI, qui a été saccagé. Des papiers ont même été collés aux murs pour ne rien abîmer tout en écrivant partout slogans, réflexions et revendications. De même, il a été dit que les étudiants avaient brûlé des livres inestimables, alors que s’il y a bien eu un feu dans la cour, seules les publications de l’UNI et des syllabi périmés ont été jetés au feu. Un autre exemple est l’histoire de cette fille handicapée (Paris 10 Nanterre), qui voulait passer le blocage au-dessus de plusieurs escaliers, et qui est tombée en se cassant le bras par accident. Directement, le gouvernement, relayé par la presse sans que personne ne cherche à savoir ce qui s’était passé, a déclaré que les étudiants jetaient des gens dans les escaliers!
Une dernière chose importante, il a été constamment répété que la Sorbonne était occupée par des intermittents du spectacle, des travailleurs précaires, bref, tout sauf des étudiants. Je n’ai rencontré que trois participants à l’occupation qui n’étaient pas étudiants. Il y avait des étudiants d’autres facultés, c’est vrai, mais la majorité était de la Sorbonne.