Category: Europe

  • Irlande. L’Etat veut museler la campagne Jobstown Not Guilty

    Les accusés de Jobstown sont apparus bâillonnés à l’Assemblée pour la justice. Photo: Jobstown Not Guilty

    L’Assemblée pour la justice défie les tentatives visant à réduire l’opposition anti-austérité au silence

    Le 29 mars dernier, un nouvel événement dramatique a vu le jour dans le cadre de l’offensive autoritaire de l’État irlandais.

    Par Danny Byrne, Comité pour une Internationale Ouvrière

    Cette offensive vise à criminaliser l’opposition et les actions de protestation, tout particulièrement l’emblématique manifestation de Jobstown contre la taxe sur l’eau et l’austérité qui a retardé la voiture de la vice-première ministre Joan Burton durant une courte période au cours d’une visite du quartier ouvrier de Jobstown, à Dublin, en 2014. Pour avoir participé à cette manifestation, 18 personnes – parmi lesquelles le député de Solidarity (anciennement Anti-Austerity Alliance) et membre du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière) Paul Murphy et d’autres membres du Socialist Party – font face à des accusations forgées de toutes pièces pour «false imprisonment» (détention arbitraire ou séquestration). Le procès devrait débuter le 24 avril et, en cas de condamnation, les accusés sont passibles d’une peine de prison à vie.

    C’est en réponse à cet outrage que la campagne «Jobstown Not Guilty» (Jobstown Non Coupable) a été créée, afin d’exiger l’abandon des charges et de mener une campagne publique pour défendre la vérité au sujet de ce qui est arrivé lors de cette manifestation de Jobstown, en défendant l’innocence des accusés.

    La campagne a mobilisé une large solidarité en distribuant quantité de tracts expliquant la vérité sur cette affaire et en mobilisant pour un rassemblement – une «assemblée pour la justice» – à Dublin le 1er avril. Les personnes issues de la classe ouvrière ont été indignées par cette attaque flagrante contre le droit de mener des actions de protestation et contre la lutte historique contre la taxe sur l’eau et l’austérité. Le soutien dont bénéficie la campagne est très large.

    Les autorités saisies de peur

    Cette campagne et la menace d’une entrée en action de la classe ouvrière et de sa radicalisation représentent un cauchemar pour l’establishment. Les autorités avaient espéré trainer les accusés de Jobstown devant les tribunaux et ensuite les envoyer en prison rapidement, en faisant le moins de bruit possible. A mesure que la campagne gagnait en élan et en écho, des centaines d’affiches annonçant la «l’Assemblée pour la justice» déployées à travers le centre-ville de Dublin, les autorités ont été saisies de peur, elles voulaient désespérément faire taire ceux qu’ils visent à envoyer injustement en prison.

    Le 29 mars, le «directoire des poursuites pénales» (DPP) a convoqué les accusés au tribunal sous les 24 heures pour leur signifier que la campagne Jobstown Not Guilty violait l’intégrité de la cour. Il a cherché à étendre les conditions de mise en liberté des accusés en leur interdisant de participer à la campagne, d’assister à des événements de protestation et même de se prononcer sur l’affaire en public ou sur les médias sociaux ! L’idée est bien entendu d’interdire aux accusés de sensibiliser le public au sujet de cette attaque historique contre le droit de protester.

    Le DPP a demandé que les accusés soient contraints de respecter ces restrictions faute de quoi ils seraient immédiatement emprisonnés. Cela leur signifierait de passer sous les verrous toute la période qui nous sépare du procès et pendant le procès lui-même, qui devrait s’étaler sur au moins six semaines. Présenter aux accusés un tel ultimatum, et un préavis de 24 heures, était clairement une tentative de les forcer à se soumettre.

    Ces derniers ont toutefois fait preuve d’une remarquable détermination, en indiquant clairement qu’ils estimaient totalement inacceptables ces conditions draconiennes, qu’ils les refusaient et qu’ils étaient prêts à aller en prison pour défendre leur droit de proclamer leur innocence face à ces accusations inventées de toutes pièces.

    Il s’agissait d’une tentative d’en finir avec la campagne Jobstown Not Guilty, de briser la dynamique autour de l’Assemblée pour la justice et de miner l’efficacité de la campagne d’information. Mais les choses se sont toutefois retournées contre l’establishment de toutes les façons possibles.

    Le député Paul Murphy a déclaré le 30 mars, avant la tenue de l’Assemblée pour la Justice : ‘‘Nous avons réagi à cette dernière attaque contre le droit de protester comme nous le faisons toujours : en exerçant ce droit. En conséquence de cela, le DPP a abandonné sa demande d’extension des conditions de mise en liberté sous caution. Au lieu de cela, nous avons pris l’engagement limité que si nous allions assister à l’Assemblée pour la justice et y prendre la parole, nous ne mentionnerons pas le procès. D’autres auraient à parler de notre campagne. Dès que cette assemblée sera terminée, nous serons libres d’à nouveau mentionner le procès, tant que nous n’interférons pas avec l’administration de la justice, ce qui n’a jamais été notre intention. Nous continuerons notre implication active dans la campagne d’information Jobstown Not Guilty.’’

    Cela signifie que l’Etat ayant eu un aperçu de l’indignation de masse suscitée dans les 48 heures par cette demande du DPP, a préféré – temporairement au moins – éviter d’imposer ces nouvelles conditions draconiennes de caution. Tout cela illustre de manière plus limpide que jamais la nature antidémocratique de cette affaire.

    L’Assemblée pour la Justice

    Le 1er avril, plus de 700 personnes se sont réunies dans le très emblématique local syndical ‘‘Liberty Hall’’ de Dublin. Ce fut une brillante démonstration de force, un défi militant envoyé vers les couloirs du pouvoir.

    L’événement a été ouvert par l’arrivée des accusés, alignés et portant des baillons, qu’ils ont ensuite déchiré et jeté à terre sous les applaudissements. L’événement a été électrique, une effusion massive de colère, de solidarité et de détermination, avec une solide participation ouvrière. Des figures de renom des médias, de la culture et du sport ont rejoint à la tribune des syndicalistes, des militants du droit au logement et des socialistes.

    Paddy Hill, des fameux «6 de Birmingham» et Paul Murphy se sont distingués par leurs contributions lors de ce meeting de 3 heures constamment ponctué d’ovations. Paddy Hill a fait 16 ans de prison après avoir été condamné à perpétuité avec 5 autres Nord-Irlandais pour des attentats commis dans des pubs de Birmingham en 1975. Il s’agissait d’une affaire montée de toutes pièces par les autorités britanniques et leurs condamnations ont été annulées en 1991.

    L’après-midi a réuni différents courants de résistance ainsi que différentes communautés et luttes ouvrières conscients de la pertinence et de l’importance de cette lutte historique.

    Quelque chose de pourri dans l’Etat ?

    L’establishment est embourbé dans la crise, son autorité et sa crédibilité sont gravement compromises. Les forces de police sont tout particulièrement au centre de celle-ci. Ces derniers mois, les actualités n’ont pas manqué d’histoires consacrées à la corruption et au népotisme qui sévit au sommet de la police, la commissaire en chef Noreen O Sullivan étant spécialement en ligne de mire.

    Mais l’éléphant dans le magasin de porcelaine, celui qui se trouve au centre de toutes ces crises, c’est l’affaire Jobstown. La même commissaire de la Garda (la police irlandaise) a été directement impliqué dans ce cas et a mis en place une équipe de 4 Gardai qui ont travaillé durant des mois pour tenter de criminaliser la protestation de Jobstown. Une opération d’espionnage a été lancée – l’opération Mizen, sous la direction du mari de la commissaire! – pour essayer de salir Paul Murphy et d’autres personnes impliquées dans la protestation de Jobstown et le mouvement plus large contre la taxe sur l’eau… Des millions d’euros puisés dans l’argent des contribuables ont été gaspillés pour s’en prendre à 18 activistes.

    La hiérarchie de la Garda a ensuite divulgué que les manifestants allaient être accusés de détention arbitraire avant même que l’accusation n’ait été faite aux activistes.

    Les accusés de Jobstown sont les victimes d’une sombre machine d’État qui perd le peu de respect et de légitimité dont elle dispose encore parmi la classe ouvrière et la jeunesse. À l’Assemblée pour la justice, Paul Murphy a défendu l’approche du Socialist Party selon qui une force de police alternative véritablement démocratique est un besoin de plus en plus pressant. La campagne Jobstown Not Guilty veut exposer la véritable nature de l’appareil répressif de l’État irlandais aux yeux de milliers de travailleurs et de jeunes réveillés par la lutte.

    Une nouvelle phase de conflits sociaux

    L’offensive de l’État sur le droit de protester et de s’organiser se produit au moment où les luttes sociales reprennent de plus belle. Une nouvelle phase de conflit social et de grèves s’ouvre en Irlande. Le 31 mars, le jour où les accusés de Jobstown contestaient au tribunal l’avis du DPP, le pays a connu une grève générale des transports, les travailleurs des chemins de fer et des autobus entrant ensemble en action en solidarité avec les grévistes de la société de bus Eireann, en grève depuis plus de dix jours maintenant. Les luttes ouvrières connaissent un renouveau, les travailleurs du secteur des transports ayant rejoint ceux de la vente au détail, de l’enseignement et d’autres encore qui sont entrés en lutte avec des méthodes de plus en plus combatives.

    Si l’establishment parvient à ses fins avec ce procès, ce qui signifie qu’une protestation pacifique pourrait être considérée comme une détention arbitraire, de telles actions pourraient faire face à de pareilles accusations. Le droit de faire un piquet de grève ou même de manifester dans un centre-ville en retardant le trafic est menacé.

    Une délégation de grévistes des transports en commun s’est d’ailleurs rendue en uniforme de son piquet de grève à l’Assemblée pour la Justice et a été accueillie avec certainement une des plus grandes acclamations de l’événement. L’un des principaux activistes syndicaux du conflit s’est adressé à la foule présente, de même que Jimmy Kelly, dirigeant du syndicat UNITE.

    Une lutte décisive

    Nous ne sommes encore qu’au début de ce combat qui peut être déterminant pour la suite de la lutte de classe en Irlande. Le Socialist Party, qui est membre de Solidarity – The Left Alternative (anciennement Anti Austerity Alliance) est au centre d’événements très significatifs qui peuvent constituer un tournant pour le développement d’une nouvelle gauche socialiste combative de masse. Notre vision socialiste du changement révolutionnaire a été le fil rouge d’une grande de l’événement de samedi, elle peut gagner l’oreille de beaucoup plus de gens dans les mois à venir.

    Nous luttons pour réunir les luttes et les revendications de Jobstown Not Guilty, du mouvement féministe de masse pour le droits à l’avortement (toujours interdit en Irlande) et de la marée montante des luttes ouvrières en un mouvement politique visant à remplacer l’establishment décadent et la classe dirigeante irlandaise corrompue et arriérée par une réelle démocratie socialiste.

    La classe ouvrière et la jeunesse, en Irlande et au-delà, devraient rendre hommage à Jobstown ; une petite communauté ouvrière courageuse, militante et déterminée. Cette communauté se tient aux côtés des accusés et lance un défi à la répression et à l’intimidation des autorités. Cela mérite l’attention et la solidarité des travailleurs, des syndicalistes, des jeunes et des socialistes à travers le monde.

  • Etat turc. Seule l’unité des progressistes et des syndicats en lutte peut stopper le régime présidentiel

    Photo : Wikipédia

    L’oppression brutale des minorités, la forte influence de l’armée et l’exportation des conflits politiques turcs en Europe n’ont jamais fait le poids face aux intérêts économiques, militaires et politiques turco-européens. Les élites européennes n’ont toutefois jamais pu se permettre d’entretenir des relations avec le régime turc sans émettre quelques critiques de temps à autre. A l’occasion du referendum turc du 16 avril portant sur la révision de la constitution – referendum qui revient dans les faits à un coup d’Etat présidentiel – ces relations chargées ont viré en engueulades et en succession de représailles.

    Par Eric Byl

    Tout semblait pourtant plein de promesses pour l’Occident. En 2009, le gouvernement AKP a présenté son ‘‘Initiative kurde’’. Il semblait que la langue kurde allait être autorisée. Une sixième chaîne émettant en kurde s’est ajoutée à l’offre de la télévision publique. Le gouvernement a promis d’investir dans la région et des frigos ont même été distribués gratuitement.
    En 2007 déjà, l’AKP avait coupé l’herbe sous le pied du Parti kurde (DTP) et était parvenu à sortir grand vainqueur des élections législatives dans les territoires kurdes. Au moment des révolutions et mouvements de masse en Afrique du Nord et au Moyen orient (2011-2012), l’AKP et Erdogan semblaient représenter un islam modéré et moderne considéré par les puissances occidentales comme une alternative aux tendances plus fondamentalistes.

    Erdogan montrait cependant déjà régulièrement son vrai visage. ‘‘Un musulman ne peut commettre de génocide’’, a-t-il déclaré en défense d’Omar al-Bashir (Soudan) alors poursuivi par la cour pénale internationale pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l’Humanité. En 2012, il comparait la contraception à la haute trahison. En 2013, un petit sit-in à Istanbul pour le maintien du parc Gezi s’est transformé en protestations de masse contre Erdogan. La répression policière a causé des morts et fait plusieurs milliers de blessés. Fin 2014, le palais qu’Erdogan s’était fait construire pour 600 millions de dollars dans un domaine protégé à Ankara a été ouvert. Il est impliqué dans plusieurs scandales de corruption et impose personnellement une censure sur les médias turcs. Erdogan en est même venu aux mains avec les proches des victimes de la catastrophe minière de Soma (2014).

    Mais ce sont surtout les succès militaires des Kurdes syriens et la crainte du développement d’un Etat kurde indépendant qui ont provoqué un revirement, en plus du fait que l’AKP n’a pas obtenu de majorité absolue aux élections de 2015 étant donné le succès du HDP pro-kurde. La forte croissance économique du pays s’est aussi effondrée fin 2015, de parfois plus de 10%. L’inflation a atteint les 8%, le chômage presque 13%. La fuite des capitaux fut massive. Le coup d’Etat manqué du 15 juillet 2016 a fourni l’excuse à Erdogan pour imposer un état d’urgence permanent. Plus de 45.000 personnes, dont 59 députés du HDP et 162 journalistes, ont été jetées en prison. 130.000 fonctionnaires ont été licenciés. 2100 établissements scolaires et 149 journaux ont été fermés. Des actions pour une valeur de 10 milliards de dollars ont été saisies et distribuées aux oligarques fidèles à Erdogan. Le prochain referendum vise à instaurer un régime présidentiel pour consolider son emprise sur la société.

    En cas de réussite, Erdogan pourrait alors régner par décret, déterminer le budget, déclarer l’état d’urgence et nommer personnellement qui il veut. Il serait chef de l’armée et des services secrets. Les ministres ne seraient responsables que vis-à-vis de lui et le parlement serait mis hors-jeu. Les tribunaux et même la Cour constitutionnelle perdraient toute indépendance. Selon ses propres termes : ‘‘Il s’agit d’une chance historique. Grâce à un pouvoir fort, notre pays sera libéré de toute tutelle, des groupes de pression et des coups d’Etat.”

    Pour la gauche, la défaite serait cuisante. Jusqu’à il y a un mois, le camp du ‘‘non’’ était en tête dans les sondages (45,7%, contre 43,7% et 10,6% d’indécis). C’est pourquoi Erdogan veut mobiliser les presque 2 millions d’électeurs turcs en Europe qui sont généralement plus en sa faveur. Mais son coup d’Etat constitue une telle violation ouverte de tout ce que l’UE prétend défendre que les gouvernements de l’UE ne peuvent pas simplement fermer les yeux. L’interdiction des meetings avec des représentants gouvernementaux turcs en Allemagne à Gaggenau et Hamburg et ensuite, l’interdiction à Rotterdam et l’expulsion par le premier ministre néerlandais Rutte d’un ministre turc pour des raisons purement électorales sont tombées à point.

    Il est compréhensible que certains progressistes turcs et kurdes espèrent que des sanctions et des interdictions d’entrée pour des représentants gouvernementaux turcs renforcent l’opposition démocrate en Turquie. Ils se trompent.

    Cela pourrait au contraire jouer sur le scepticisme – justifié – de la population turque à l’égard de l’impérialisme occidental et de sa politique au Proche-Orient. Cela soulignera qu’il y a deux poids, deux mesures par rapport à Trump, Poutine ou aux Saoudiens dont on n’entrave pas l’action. Erdogan pourra se présenter en ‘‘victime des intérêts occidentaux’’ et détourner l’attention de l’effondrement économique ainsi que de l’échec de sa politique syrienne.

    La gauche ne doit pas tomber dans le piège de la surenchère réciproque entre les gouvernements occidentaux et turc et tomber dans le camp de l’une des puissances capitalistes. Ces interdictions pourraient créer un précédent qui pourrait se retourner contre des activités des Kurdes ou des Turcs progressifs. L’opposition turco-kurde doit au contraire pouvoir faire appel au mouvement ouvrier et à tous les progressistes. La solidarité avec les représentants du HDP emprisonnés, le mouvement féministe et les grèves de protestation en faveur des droits démocratiques sont cruciaux pour contrer la division nationale et religieuse de la population dans l’Etat turc. De grandes mobilisations communes des Turcs, Kurdes, de la gauche européenne et des syndicats ainsi qu’une campagne commune dans les quartiers et les entreprises pour un ‘‘non’’ au referendum sont les réponses qu’il faut donner aux meetings organisés par le régime dans l’Etat turc et en dehors.

  • Mélenchon et la France Insoumise. Comment réaliser ‘‘l’insurrection citoyenne contre la monarchie présidentielle’’?

    Photo : Parti de Gauche

    Le moins que l’on puisse dire, c’est que la dynamique de la France Insoumise impressionne… Sur le net, Jean-Luc Mélenchon et son mouvement font un carton (plus de 240.000 abonnés à sa chaîne youtube !). Dans la ‘‘vraie vie’’, la mobilisation du 18 mars dernier a coupé le souffle à plus d’un commentateur : 130.000 personnes avaient répondu à l’appel et s’étaient retrouvées à Paris pour commémorer ensemble les débuts de la Commune de Paris (1871), la ‘‘première tentative de république sociale’’.

    Dossier de Stéphane Delcros et Nicolas Croes

    Les comités de la France Insoumise lancés en février 2016 organisent aujourd’hui près de 300.000 militants, qui ont par ce biais participé à l’élaboration du programme notamment via une grande Convention de la France Insoumise en octobre 2016. Le 1er décembre sortait le premier tirage du livre L’Avenir en Commun, disponible à 3 euros (mais également gratuitement en ligne sur www.laec.fr), qui détaille les 83 mesures proposées par le candidat. Les 50.000 premiers exemplaires ont fondu comme neige au soleil et le livre-programme est devenu un succès de libraire. Dès sa première semaine, il s’est placé à la neuvième place des meilleures ventes de livres en France… tous genres confondus ! Il a depuis largement dépassé les 100.000 exemplaires vendus.

    Ce succès n’a pas seulement été obtenu en librairie. Comme cela avait déjà été le cas lors de la candidature de Mélenchon en 2012, la France Insoumise invite ses partisans à être eux-mêmes actifs, à tenir des tables politiques en rue et sur les marchés (voire tout simplement à s’installer sur le pas de sa porte avec du café, une radio et une table de présentation), à s’adresser aux collègues et amis,… En 2012 déjà, chaque participant aux meetings de sa campagne recevait un ‘‘kit militant’’ comprenant quelques tracts, des affiches, etc. Mélenchon expliquait alors : ‘‘mon équipe préfère réparer les dégâts de l’action que ceux de l’inaction’’. Cette approche visant à transformer un soutien passif en implication active est un élément crucial pour que la gauche soit capable de redonner espoir et de contester la place tant du Front National que des partis traditionnels de l’establishment. Il n’est déjà pas impossible que la France Insoumise dépasse le PS au premier tour des présidentielles, ce qui donnerait un formidable élan aux discussions et initiatives pour une recomposition radicale du spectre de la gauche anti-austérité en France.

    La solidarité pour sortir de la peur ‘‘Il faut compter sur le peuple, sur son intelligence, son humour, sa dérision, sa finesse pour convaincre et entraîner. Car il faut convaincre et entraîner. Il faut sortir de la sinistrose, (…) il faut sortir de la peur qui est le seul nouveau lien social que la droite ait proposé au peuple pour se rassembler. (…) Autrefois, le grand lien social étaient la solidarité, la fraternité et personne ne trouvait à y redire quand bien même était-il de droite. La cupidité était considérée comme une tare ; aujourd’hui elle est considérée comme le premier moteur de l’activité. Chacun est amené à développer son égoïsme personnel comme une affirmation de soi.’’ -L’Avenir en Commun

    Notre soutien à la démarche de la France Insoumise n’est pas sans critique, loin de là. Mais les propositions programmatiques formulées représentent selon nous un pas dans la bonne direction. Elles participent à la nécessaire reconscientisation politique des travailleurs et de la jeunesse après des années de dégoût, de désillusion et de désespoir. Cet exercice est par ailleurs accentué par les divers canaux de diffusion des idées défendues par la France Insoumise : présence quasi permanente sur les différents réseaux sociaux, vidéos youtube,… Tout cela permet d’aller toucher des couches de la société qui se sont détournées de la politique depuis des années. Jean-Luc Mélenchon et son bras droit Alexis Corbière se sont même aventurés dans les milieux du jeu vidéo en critiquant Assassin’s Creed Unity et sa vision extrêmement tronquée de la révolution française, tout en reconnaissant cependant les prouesses graphiques du jeu.

    Un plan d’investissement pour répondre aux urgences sociales et écologiques

    Dans son introduction à L’Avenir en Commun, Jean-Luc Mélenchon explique : ‘‘À nos yeux, l’urgence écologique, le désastre social et le délabrement de la démocratie sont les trois visages d’une même réalité. Nous étouffons sous le règne de la finance. Elle gouverne le monde avec sa cupidité insatiable, sa certitude absurde que les intérêts particuliers sont seuls légitimes, que tout peut s’acheter et tout peut se vendre, que le libre-échange des marchandises et la circulation sans contrôle des capitaux sont les meilleurs organisateurs de toutes les activités humaines. Voilà bien ce qui détruit la planète et les êtres humains. Et pire que tout, le règne de la finance détruit cette formidable capacité des êtres humains à coopérer entre eux pour résoudre leurs problèmes, ce que nous nommons démocratie.’’

    Comment y faire face ? Il est question, pêle-mêle, de la ‘‘convocation d’une assemblée composée de gens qui n’ont jamais été élus au Parlement auparavant pour écrire une nouvelle Constitution’’, celle de la VIe République ; d’une ‘‘planification écologique’’ pour organiser ‘‘le changement global de notre façon de produire, d’échanger et de consommer, pour mener une vie en harmonie avec la nature dont nous sommes partie prenante’’ reposant sur l’agriculture paysanne, l’économie de la mer, la sortie du nucléaire et la transition vers 100?% d’énergie renouvelable ; le développement de l’enseignement ; la sortie de l’OTAN ; etc. Tout cela reposant sur une ‘‘profonde et méthodique réorganisation de l’usage et de la répartition des richesses produites. (…) contre les abus de l’obsolescence programmée, des incitations à un consumérisme irresponsable et à un mode d’alimenttion nocif. Une société plus égalitaire est nécessaire non seulement pour donner à chacun les moyens de développer son potentiel personnel, mais aussi pour en finir avec un modèle d’arrogance, d’accumulation et de consommation ostentatoires, aussi nuisibles et immorales que ridicules.’’

    Pour y parvenir, le programme détaille l’instauration d’un barème d’impôt progressif étalé sur quatorze tranches, une échelle des salaires limitant l’écart de un à vingt au maximum, le partage du temps de travail libéré par les progrès de l’automatisation et de l’intelligence artificielle, réparti dans la semaine, le mois, l’année et dans la durée de la vie professionnelle, la limitation du droit du capital en fonction de la durée de son investissement, la définition d’une véritable citoyenneté dans l’entreprise, etc.

    Un programme de gauche ambitieux, mais insuffisant

    Tout ceci constitue un exercice extrêmement intéressant d’élaboration d’un programme de gauche disposant d’un ‘‘programme d’urgence’’ immédiat et de perspectives à plus long terme. Nous manquons hélas de place pour aborder les détails de ce projet et la manière dont il est chiffré.
    Le chiffrage du programme se base essentiellement sur l’idée d’un ‘‘multiplicateur keynésien’’ selon lequel de l’argent investi provoque, à terme, une augmentation de l’activité économique et donc des recettes publiques. Le FMI estime que pour 1 euro d’argent public investi dans l’économie réelle, il en résultera 2 à 3 euros d’activité et de recettes publiques. Les économistes de la France Insoumise s’appuient sur ‘‘l’hypothèse prudente’’ d’un multiplicateur de 1,4. Ils disent d’ailleurs avoir été très prudents en général et avoir même mis de côté plusieurs recettes ‘certaines’.

    Mais ce mode de calcul a tendance à nier la crise de surproduction du système capitaliste. Il réduit tout au fait que le problème essentiel serait la sous-consommation, elle-même causée par des salaires trop faibles. La crise du système capitaliste est toutefois plus globale, elle ne se limite pas à cette sous-consommation. Augmenter les salaires est très important, mais cela ne résoudra pas tout. C’est l’ensemble du système économique qui doit être balayé, pas juste certaines de ses conséquences corollaires parmi les plus visibles.

    L’économie n’est pas mathématique, elle résulte d’un rapport de force

    Comme autre élément de financement de son programme, la France Insoumise propose une ‘‘révolution fiscale’’. Nous partageons le constat selon lequel les plus nantis de cette société sont caressés dans le sens du poil et ne contribuent qu’à peine aux caisses de la collectivité. Mais chaque militant sait d’expérience qu’à la moindre menace d’augmenter l’imposition des plus riches et des grandes entreprises, c’est la fuite des capitaux vers d’autres cieux. Or, quand il est question de ‘‘mettre au pas la finance’’, beaucoup de choses sont abordées, sauf la nationalisation des banques sous contrôle et gestion démocratiques. Sans cela, comment contrôler effectivement les capitaux et empêcher qu’ils ne fuient vers des paradis fiscaux ?

    Il en va de même pour les mesures qui visent à renforcer le contrôle des travailleurs sur les entreprises et à empêcher les licenciements boursiers. Nous ne sommes pas contre ces propositions, mais la réaction des employeurs sera soit de délocaliser, soit d’organiser la grève des investissements, soit de saboter l’activité économique. L’exemple de la Grèce et du gouvernement SYRIZA a on ne peut plus clairement illustré que le camp du capital est capable de choisir le risque d’un désastre économique plutôt que d’assister à l’essor d’une alternative politique de gauche. Face à tout cela s’imposent l’arme de la nationalisation sous contrôle des travailleurs des entreprises qui menacent de licenciements collectifs ou de délocalisation de même que celles du contrôle des flux de capitaux et du monopole d’Etat sur le commerce extérieur.

    UE : un ‘Plan A’ impossible

    Nous estimons illusoire de vouloir changer cette institution qu’est l’Union Européenne. L’UE est, depuis le début, un instrument aux mains de la classe dominante pour défendre ses intérêts ; en plus d’être non démocratique, le néo-libéralisme est dans son ADN.

    Mélenchon va heureusement plus loin que la conception connue comme ‘‘l’européanisme de gauche’’ consistant à vouloir petit à petit changer l’Europe de l’intérieur, principalement grâce à des victoires de la gauche dans différents Etats. Mais même s’il promeut l’idée d’une coordination européenne avec d’autres forces anti-austéritaires, le ‘Plan B’ de sortie de l’UE ne va pas assez loin. Il faut non seulement rompre avec cette ‘Europe du Capital’, mais aussi avancer pour construire une Europe des travailleurs, à l’aide d’un programme socialiste basé sur la mobilisation par en bas pour s’attaquer au pouvoir de la classe dominante. Il est important d’expliquer dès maintenant cette nécessité, même si elle peut temporairement recevoir un écho plus limité.

    De la même manière, au sujet de la dette publique, proposer de ‘‘réaliser un audit citoyen de la dette publique pour déterminer la part illégitime et préparer un réaménagement négocié (échelonnement des remboursements, baisse des taux d’intérêt, annulation partielle…)’’ peut sembler tout à fait rationnel et raisonnable. Mais souvenons-nous de ce qu’il en a été en Grèce. Un audit ne peut avoir de sens que comme moyen d’aider à conscientiser et mobiliser les travailleurs vers le refus pur et simple de rembourser cette dette qui n’est pas la nôtre.

    Pour un plan de nationalisation des secteurs-clés

    Le programme de la France Insoumise remet en partie le concept de nationalisation à l’avant-scène. Mais seulement partiellement : il ne s’agit jamais d’un secteur en entier, seulement d’entreprises-clés ou d’un ‘‘pôle public’’. Nous avons pourtant besoin de la gestion et du contrôle démocratiques des travailleurs et de la communauté sur la production dans tous les secteurs-clés de l’économie. La nationalisation du secteur financier dans sa totalité et la création d’un organisme public unique de crédit est la seule solution pour assurer un contrôle des capitaux et empêcher les capitalistes de contrôler les investissements.

    Nous pensons que les secteurs-clés (banque, finance, télécoms, sidérurgie, pétrochimie,…) doivent être nationalisés dans leur entièreté, sans rachat ni indemnité sauf sur base de besoins prouvés. C’est la seule réponse efficace aux menaces de délocalisations qui viendront de la part de nombreux grands patrons. Sans cela, la ‘‘VIe république’’ à laquelle appelle Mélenchon pourrait subir un sort identique aux volontés anti-austérité affichées par SYRIZA avant son arrivée au pouvoir en Grèce.

    Pour un changement de système, pour une société socialiste démocratique

    Reconnaissons que le projet de VIe République visant à abolir le système actuel a le mérite de remettre en cause les institutions qui protègent la domination de la classe capitaliste dominante. Une série de mesures qui y sont attachées dans ce programme s’orientent vers une rupture avec le système, sans toutefois clairement oser pointer du doigt cette nécessité.

    Il faut aller plus loin. Pourquoi ne pas appliquer ce brillant projet de planification écologique défendu par la France Insoumise à l’échelle de l’économie elle-même ? Une planification économique démocratique permettrait d’orienter la production vers ce qui est nécessaire, vers les besoins réels de l’immense majorité de la population et ceux de notre planète.

    Il faut discuter et avancer vers un autre type de système économique, vers une société débarrassée de l’exploitation et de la loi du profit : une société socialiste démocratique. C’est la seule capable d’assurer qu’une poignée d’ultra-riches ne décide de tout en fonction de ses intérêts. C’est la seule capable d’assurer l’existence harmonieuse des hommes, des femmes et de leur environnement. Ce manque d’audace concernant l’alternative à opposer, non seulement à ‘‘l’oligarchie financière’’ mais au capitalisme lui-même permet de comprendre d’autres points faibles à nos yeux, tels que le repli sur la ‘‘nation souveraine’’ ou l’idée d’une ‘‘nouvelle alliance altermondialiste des peuples et peser de tout notre poids pour créer un monde ordonné autour de la communauté des nations qu’incarne l’ONU’’.
    Pour changer les choses, il faut s’organiser et se mobiliser !

    L’une des grandes forces de cette candidature, c’est la mobilisation et l’activation de larges couches de travailleurs et de jeunes autour d’un projet commun. En nous rendant en France à différentes reprises soutenir l’intervention de nos camarades français de la Gauche Révolutionnaire, notamment à l’occasion du rassemblement du 18 mars, nous avons pu nous rendre compte par nous-mêmes de l’espace de discussion que représente la France Insoumise.

    Comme l’expliquent nos camarades de la Gauche révolutionnaire : ‘‘Des milliers de travailleurs et travailleuses sont en grève ou en action chaque jour. Ces luttes vont continuer même si elles seront absentes des médias : la colère est énorme, il n’y a pas de résignation !

    C’est pour cela aussi qu’il faut utiliser la campagne et le vote Mélenchon, pour encourager ces combats et leur donner une perspective politique. Nos votes peuvent vraiment rassembler notre camp avec un candidat qui défend des politiques radicalement différentes des pro-capitalistes. Être organisés, voilà ce qui va être indispensable pour construire une riposte efficace face aux politiques d’austérité et pour lutter contre ce système absurde et criminel qu’est le capitalisme. Ce qu’il nous manque, c’est une véritable force politique de lutte, un parti de masse, réellement démocratique, qui parle non seulement de changer cette Vème république injuste et antidémocratique mais défende également le projet d’une société débarrassée de l’exploitation et de la loi du profit, une société socialiste démocratique. C’est un tel parti de lutte qui sera un réel rempart au Front National.

    Pour stopper les plans des capitalistes ou mettre en œuvre les propositions de Mélenchon, il faudra une vaste lutte, peut-être une grève générale, des travailleurs et des jeunes tous ensemble. La campagne électorale doit permettre de s’y préparer.’’

    [divider]

    Comment le programme a-t-il été élaboré ?

    L’Avenir en Commun a pris comme point de départ ‘‘L’Humain d’abord’’, le programme porté par Jean-Luc Mélenchon en 2012. Lorsque Jean-Luc Mélenchon a officiellement annoncé sa candidature pour les présidentielles de 2017, en février 2016, ce programme a été discuté et actualisé sous la direction de Charlotte Girard, juriste, et de Jacques Généreux, économiste.

    Entre février et août 2016, environ 3?000 contributions ont été déposées sur le site internet jlm2017.fr. Elles ont été lues et synthétisées par une équipe d’une vingtaine de rapporteurs répartis par thème. Ensuite, seize auditions programmatiques ont été organisées avec divers chercheurs, professionnels et militants. Dans un troisième temps, les forces politiques appuyant la candidature de Jean-Luc Mélenchon ont aussi apporté leurs contributions. Tout cela a été validé le 16 octobre 2016 lors de la Convention nationale de la France Insoumise.

    Au dire des animateurs nationaux de la France Insoumise, ce travail collaboratif ne doit pas s’arrêter là : ‘‘Ce texte ne clôt pas la réflexion, il lui donne un nouvel élan’’. De la même manière que le programme de 2017 représente une avancée sur certains points (nous pensons à l’écologie notamment), nous espérons que l’avenir permettra de clarifier les différentes notions dont il est question dans ce dossier.

  • [INTERVIEW] Paul Murphy: “Le droit de protester est en danger en Irlande!”

    Irlande : des activistes menacés de plusieurs années de prison

    Il y a 2 ans, une manifestation spontanée a pris place à Jobstown – un quartier ouvrier de la banlieue de Dublin – à l’occasion de la visite de la Vice-Première ministre d’alors, Joan Burton (Labour Party, sociaux-démocrates). Durant la manifestation, sa voiture a été encerclée par les manifestants et elle a été retardée d’environs 2 heures. Suite à cette action, des charges ont été retenues à l’encontre de 18 ‘‘meneurs’’ pour séquestration, avec parmi eux Paul Murphy, le député de l’Anti-Austerity Alliance (Alliance Anti-Austérité) et membre du Socialist Party.

    Merci de discuter avec nous, Paul. Tout d’abord, pourrais-tu nous expliquer pourquoi la présence de la Vice-Première ministre dans ce quartier a provoqué une telle réaction? Est-ce uniquement suite à la taxe sur l’eau ?

    Paul : ‘‘Le Premier ministre a dit au sujet du mouvement contre la taxe sur l’eau que ce ‘‘n’est pas juste à propos de l’eau’’. C’est l’une des rares choses sur lesquelles nous pouvons nous mettre d’accord avec lui. Les raisons de ce mouvement contre les charges sur l’eau étaient terriblement profondes, dues au fait qu’elles arrivaient après des années d’austérité. La population a dû faire face à des pertes d’emplois, des jeunes se sont retrouvés forcés d’émigrer, les salaires ont été coupés et les services publics dévastés. Des centaines de milliers de personnes ont été plongées dans la pauvreté.

    ‘‘Le quartier où se tenait cette manifestation avait été particulièrement touché par les politiques d’austérité du gouvernement. Pour donner un exemple, la manifestation a eu lieu sur le parking d’une banque alimentaire.

    ‘‘Joan Burton était aussi ministre de la Protection sociale et elle a initié une guerre contre les personnes nécessitant une aide sociale, comme les parents isolés. Elle est aussi la dirigeante du Labour Party, qui s’était toujours dépeint comme un défenseur des travailleurs. C’est sur cette base que le Labour Party a reçu un soutien électoral massif à Jobstown. Le sentiment de trahison par ce parti est dès lors ressenti de manière très aiguë.’’

    Quelles seraient les conséquences d’une condamnation des militants inculpés, notamment pour le mouvement contre l’austérité ?

    ‘‘Une accusation de séquestration, c’est très sérieux, c’est pratiquement du kidnapping. À la demande du procureur d’État, l’affaire a été portée devant une juridiction supérieure, ce qui signifie qu’en cas de condamnation, la peine encourue peut aller jusqu’à l’emprisonnement à vie. Il ne fait aucun doute quant au fait que si quelqu’un est condamné, il devra faire face à plusieurs années de prison !

    ‘‘Un jeune homme de 17 ans a, lui, déjà été condamné par la justice pour mineur. Le juge a expliqué qu’il est coupable parce qu’il s’est assis devant d’une voiture, qu’il avait encouragé d’autres à faire de même, qu’il a participé à une ‘‘marche lente’’, qu’il s’était momentanément tenu sur le chemin de Joan Burton en demandant à lui parler et qu’il a utilisé un mégaphone pour scander des slogans. Ce verdict est la preuve de l’élargissement dramatique de la définition de ‘‘séquestration’’ qui peut inclure de nombreuses formes de manifestations, c’est une attaque majeure contre le droit de manifester.

    ‘‘En plus de ça, si je devais être envoyé en prison pour plus de 6 mois, je serais exclu du parlement et je ne pourrais pas me présenter aux prochaines. C’est une attaque directe contre les droits démocratiques de ceux qui ont voté pour l’Anti Austerity Alliance.’’

    Quand le gouvernement est tombé il y a deux ans, le Labour a subi une défaite électorale écrasante ; l’avenir de la taxe sur l’eau est incertain… Pourquoi est-il aussi important de chercher à faire condamner les manifestants ?

    ‘‘Le mouvement contre la taxe sur l’eau a réellement fait trembler l’establishment politique. Pour la première fois depuis l’éclatement de la crise économique de 2008, la classe ouvrière s’est soulevée et s’est organisée contre une mesure d’austérité majeure du gouvernement et elle a gagné.

    ‘‘Bien que les taxes n’aient pas été à 100% abolies, elles ont été suspendues et ce sera très difficile pour eux de les réintroduire. Suite à cela, les travailleurs ont été massivement boostés par le mouvement. Cela se voit dans une certaine mesure avec les grèves victorieuses menées dans les services de bus et de trams à Dublin. Les infirmières, les profs et les vendeurs sont également en train de mener des actions de grève en ce moment.

    ‘‘De plus en plus, la ligne officielle d’une reprise économique rentre en confrontation avec la réalité des gens qui se prennent toujours de plein fouet l’austérité avec des emplois plus précaires et des salaires bas. L’establishment capitaliste sait qu’il devra probablement faire face à plus de mouvements et de grèves. Du coup, il espère utiliser les procès de Jobstown pour envoyer un signal clair aux travailleurs: si vous manifestez, si vous faites grève, vous pouvez être criminalisés.’’

    Comment les activistes sont-ils en train de construire une campagne contre ces attaques ? Comment peut-on construire la solidarité ?

    ‘‘Malgré les énormes tentatives de la part des médias de l’establishment et de la droite, il y a une opposition massive à l’idée que les gens soient poursuivis pour avoir participé à une manifestation. Nous devons aller à l’offensive et construire une campagne d’opposition active. Les inculpés et soutiens ont construit le groupe “Jobstown Not guilty” (Jobstown Non-Coupable) pour construire une telle campagne. Nous allons activement à la rencontre des gens pour exposer les faits autour de cette manifestation et discuter de la portée des attaques auxquelles nous faisons face. Nous recevons beaucoup de soutien. Beaucoup de sections des syndicats, de fédérations étudiantes et de communautés locales ont exprimé leur soutien à la campagne.

    ‘‘Nous avons également eu beaucoup de signes de solidarité internationale de syndicalistes, de représentants élus et de personnalités connues, dont beaucoup de Belgique. De tels signes de solidarité sont un élan majeur pour la campagne. J’encourage les gens à aller voir leur délégation syndicale et leurs organisations pour faire passer des motions et envoyer des messages de solidarité.’’
    Si le mouvement contre la répression est victorieux et que les charges tombent, quel en serait l’impact ?

    ‘‘Le gouvernement est dans une crise profonde suite à la révélation que des supérieurs de la police ont été impliqués dans une campagne de diffamation contre des policiers de rangs inférieurs ayant exposé la corruption existante. Cela a été jusqu’à répandre de fausses rumeurs d’abus sur des enfants. Il est probable que le Premier ministre soit poussé à la démission suite à ce scandale. Il y a un dégoût énorme et un questionnement envers l’establishment. Si nous gagnons sur Jobstown, cela soulèvera des questions sur qui sont exactement ceux qui ont décidé de mener les poursuites et leurs motivations politiques. Le rôle de la police, mais aussi des médias serait également questionné et exposé et cela affaiblira encore plus le gouvernement.’’

  • #Jobstown not guilty: Action de protestation à l’ambassade irlandaise

    Protester n’est pas un crime! Abandon des charges contre les inculpés de Jobstown !

    Ce midi, nous étions une trentaine à manifester face à l’ambassade d’Irlande à Bruxelles contre la très honteuse tentative de criminaliser le droit de mener des actions en Irlande. Une bonne délégation du groupe de la Gauche Unitaire Européenne (GUE/NGL) était également présente en solidarité, avec des représentants de Grèce, du Portugal, de Galicie, d’Irlande, d’Allemagne, de France, d’Autriche, du Danemark et même d’Argentine. Parmi eux se trouvaient deux députés européens, Luke Ming Flanagan (député indépendant) d’Irlande et Lidia Senra (Alternativa Galega de Esquerda) de Galicie.

    Des lettres de protestation signées par des syndicalistes, des activistes des droits humains, des jeunes,… ont été données à l’ambassade, de même qu’une déclaration commune signée par une longue liste de personnalités du monde, syndical, culturel et politique, dont 30 députés européens du groupe GUE/NGL et divers élus belges.

    Cette action prenait place dans le cadre d’une journée internationale d’action. Des rassemblements similaires ont eu lieu en Autriche, en Australie, au Chili, en Angleterre et au Pays de Galles, en Ecosse, en Allemagne, à Hong Kong, à Taiwan, au Portugal, en Espagne, en Afrique du Sud, aux USA, en Suède, en Italie, au Brésil, au Nigeria, en Grèce et en Israël. En tout, des actions auront eu lieu dans plus de 30 ambassades et consulats de 25 pays différents.

    Cela n’est encore que le début du mouvement international de soutien aux activistes de Jobstown. Le mois prochain, la campagne connaîtra un autre moment important avec un grand meeting à Dublin le 1er avril.

    Pour en savoir plus :

    Action de solidarité #JobstownNotGuilty Solidariteitsactie

  • Hamon et Mélenchon : un avenir en commun ?

    Photo: flickr/pierre-selim

    Le 29 janvier dernier avaient lieu en France les élections primaires de la ‘‘Belle alliance populaire’’ (du Parti ‘‘socialiste’’ et de ses alliés) afin de désigner son candidat aux élections présidentielles du 23 avril prochain. La victoire de l’aile gauche du PS à travers la candidature de Benoit Hamon exprime la recherche d’une alternative, mais aussi le rejet toujours grandissant des politiciens traditionnels.

    Par Simon (Hainaut), article tiré de l’édition de mars de Lutte Socialiste

    Une enquête parue récemment indiquait que 80%(1) des Français n’ont plus confiance dans les institutions. Cette réalité s’est exprimée au travers des échecs consécutifs d’Alain Juppé et Nicolas Sarkozy aux primaires ‘‘de la droite et du centre’’ en novembre dernier, mais aussi dans la défection de l’élection présidentielle par François Hollande, une première pour un président sortant dans l’histoire de la Vème République. Peu après, ce fut au tour de son bras droit Manuel Valls, le plus fidèle représentant de l’appareil du PS, d’être mis au placard. Cette vague ‘‘dégagiste’’ comme l’appelle Jean-Luc Mélenchon est une illustration inédite de la crise des instruments traditionnels de domination de la classe capitaliste.

    Comme partout en Europe, les partis traditionnels, et plus particulièrement la social-démocratie, sont entrés dans une phase de crise très sévère. Des années de trahison par la mise en place des véritables saignées sociales à l’encontre des travailleurs sont aujourd’hui durement sanctionnées par la population. La victoire d’un Benoit Hamon ou encore la campagne et la candidature de Pedro Sanchez en Espagne qui défie la direction actuelle du PSOE apparaissent donc comme l’expression de la recherche de solutions à travers des candidats parfois marqués un peu plus à gauche que le reste de l’appareil de leurs partis. Acculer et face à une débâcle historique de leurs partis, tous deux veulent redorer le blason de leur parti en leur donner une image de gauche tout en restant dans le cadre de ce qui acceptable pour l’establishment.

    Il ne suffit pas de se dire de gauche, encore faut-il s’en donner les moyens

    Les propositions défendues par Benoit Hamon se situent à la gauche de celles de la majorité des dirigeants du PS (abrogation de la loi travail, maintien des 35h, embauche de 40.000 enseignants,…). L’une de ses revendications phares est l’instauration d’un revenu universel de 750€ par mois, revendication qui fait débat et qui semble progressiste à certains. Reste que ses modalités d’application sont obscures et que cela pourrait représenter un cheval de Troie pour des attaques libérales dévastatrices contre notre sécurité sociale (voir ci-dessous). Pourquoi ne pas plutôt défendre l’instauration d’une allocation de chômage inconditionnelle de 1200€ par mois ? Cela aurait d’ailleurs pour effet d’exercer aussi une pression à la hausse sur tous les salaires et conditions de travail.

    L’approche de Benoit Hamon a pour principal défaut de vouloir construire un rapport de force… en reposant sur un appareil politique qui a déjà servi de bélier contre les conquêtes des travailleurs ! Jean-Luc Mélenchon a raison d’affirmer que: ‘‘Benoit Hamon ne peut prétendre à la fois nous tendre la main et recycler dans sa campagne tout le PS dont nous avons combattu la politique ces dernières années.’’(2) Seul un nouveau parti de masse des travailleurs basé sur les luttes sociales serait de nature à défendre les revendications de gauche dont nous avons besoin. En ce sens la candidature de Jean-Luc Mélenchon au travers du mouvement ‘‘La France Insoumise’’ est un premier pas dans le processus de reconstruction d’un outil de lutte indépendant aux mains des travailleurs.

    Un pas en avant

    Le programme de la France insoumise est beaucoup plus offensif (gratuité des soins de santé, réduction collective du temps de travail à 32h/semaine, …). De plus, la mise à l’avant-plan de mots d’ordre tels que la planification écologique ou la nationalisation de Total renoue avec l’idée que les travailleurs doivent prendre le contrôle de l’économie. Par ailleurs, l’appel à une VIème république a le mérite de souligner la nécessité impérieuse de réorganiser la société de fond en comble.

    Cette idée d’une nouvelle constitution reste toutefois dans les carcans du capitalisme et n’exprime pas assez l’idée de la nécessaire prise du pouvoir par les travailleurs. Le programme politique défendu gagnerait en outre en clarté si un appel à la nationalisation sans rachats ni indemnités des principaux secteurs clés de l’économie sous contrôle démocratique des travailleurs était lancé.

    L’expérience nous démontre qu’il est impossible de ménager la chèvre et le chou. La ‘‘révolution bolivarienne’’ d’Hugo Chavez au Venezuela reposant sur la rente pétrolière, par exemple, a très vite été confrontée aux réalités du capitalisme. Nous ne nions pas le caractère progressiste qu’a eu ce régime ni celui de la campagne de Jean-Luc Mélenchon, mais nous voulons toutefois prévenir du danger de certaines illusions. Un capitalisme ‘‘à visage humain’’ est impossible.

    La campagne de Jean-Luc Mélenchon en 2012, avec son slogan ‘‘Prenons le pouvoir’’ portait en elle plus d’éléments révolutionnaires qu’en 2017. Il faut profiter de l’espace de discussion de la campagne de la France insoumise pour entrer en débat avec les dizaines de milliers de personnes impliquées concernant la manière de construire un bon rapport de force et sur base de quel programme. Le caractère massif des meetings de Jean-Luc Mélenchon démontre l’énorme potentiel présent. Cette énergie est de nature à donner un caractère massif au rassemblement du 18 mars à Paris – date anniversaire de la Commune de Paris. Ce sera l’occasion de discuter de la stratégie, du programme et des tactiques dont nous avons besoin pour un changement socialiste de société.

    (1) http://www.lefigaro.fr/politique/le-scan/2016/03/08/25001-20160308ARTFIG00166-selon-un-sondage-80-des-francais-font-confiance-aux-citoyens-plutot-qu-aux-politiques.php
    (2) http://www.lci.fr/elections/presidentielle-2017-jean-luc-melenchon-ecarte-l-idee-d-une-alliance-composite-avec-benoit-hamon-et-yannick-jadot-2025685.html

  • Etat espagnol: des centaines de milliers de participants aux mobilisations du 8 mars!

    A l’occasion de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes du 8 mars, la campagne ‘Libres y Combativas’ et le Sindicato de Estudiantes avaient appelé à une grève étudiante contre la violence sexiste et en faveur de la défense des droits des femmes de la classe des travailleurs.

    La campagne ‘Libres y Combativas’ est une plateforme féministe et socialiste lancée par le Sindicato de Estudiantes (dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises sur ce site à l’occasion des grèves étudiantes de la fin de l’an dernier) et par des membres d’Izquierda Revolucionaria (organisation qui est actuellement en processus de fusion avec le Comité pour une Internationale Ouvrière, dont le PSL est la section belge). Leur appel à la grève étudiante contre les violences sexistes et en défense des droits des travailleuses a attiré dans la rue des centaines de milliers d’étudiants à travers tout l’Etat espagnol.

    Il s’agit d’une étape historique puisque jamais auparavant une grève de cette dimension n’avait pris place à l’occasion du 8 mars et de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes. Des assemblées et des actions de protestation ont eu lieu dans plus d’un millier d’écoles et de campus. Des centaines de personnes ont signé pour rejoindre Libres y Combativas afin de renforcer les rangs des féministes anticapitalistes, révolutionnaires et socialistes.

    Grève contre les violences sexistes dans l'Etat espagnol

  • Action de solidarité #JobstownNotGuilty

    Le 23 mars, 13h, à l’ambassade irlandaise à Bruxelles, 50 rue Froissard.

    Le droit de protestation est menacé en Irlande ! Un jeune de 17 ans a déjà été reconnu coupable de séquestration en raison de sa participation à une manifestation contre Joan Burton, alors vice-première ministre, dans la cadre de l’opposition à la taxe sur l’eau. Cette taxe est aujourd’hui suspendue en conséquence de la résistance de masse, mais l’establishment irlandais veut criminaliser le mouvement et envoyer un message effrayant à tous ceux qui voudraient protester dans les années à venir – syndicalistes, défenseurs des droits des femmes et autres.

    Le 24 avril, le premier des trois procès de 18 adultes pour «séquestration» et les accusations connexes commencera. S’ils sont reconnus coupables, ils sont passibles d’une peine d’emprisonnement maximale. En plus de la dévastation de la vie des défendeurs et de leurs familles, une peine de plus de 6 mois entraînerait l’élimination automatique d’un des accusés, Paul Murphy, en tant que député, ce qui réduirait la décision démocratique de ces personnes qui l’ont élu.

    La protestation n’est pas un crime! Dans différents pays, nous avons vu des mouvements de personnes contre l’austérité et ils ont souvent été confrontés à des attaques contre les droits démocratiques. Il est essentiel de rester ensemble parce qu’une blessure à un est une blessure à tous.

    Nous sommes solidaires des accusés et de la campagne #JobstownNotGuilty. Toutes les accusations portées contre les manifestants doivent être abandonnées, le droit de protestation doit être défendu.

    Ce 23 mars, nous participerons à une journée de solidarité internationale en nous réunissant devant l’ambassade irlandaise.

    Participez vous aussi !

    => Evénement Facebook

  • faites comme Yanis Varoufakis: opposez-vous à la criminalisation de la résistance sociale en Irlande!

    Voici ci-dessous le texte d’une déclaration de solidarité avec la campagne #JobstownNotGuilty signée par l’économiste et homme politique grec Yanis Varoufakis, au côté d’autres figures proéminentes de gauche. Cet appel est notamment signé par Noam Chomsky et jean-Luc Mélenchon.

    Vous pouvez également directement envoyer par vous-mêmes des e-mails de protestation. Un exemple et un article de fond consacré aux accusés de Jobstown est disponible ici : + adresse e-mail peuvent être trouvés ci-dessous cet article sur le processus de Jobstown: Le plus grand procès politique en Irlande depuis des décennies: Soutenez les activistes de Jobstown!

    Le droit de protestation est menacé en Irlande. Il est profondément inquiétant qu’un jeune de 17 ans ait été reconnu coupable de séquestration en raison de sa participation à une manifestation contre Joan Burton, alors vice-première ministre. Le 24 avril, le premier des trois procès de 18 adultes pour «séquestration» et les accusations connexes commencera. S’ils sont reconnus coupables, ils sont passibles d’une peine d’emprisonnement maximale. En plus de la dévastation de la vie des défendeurs et de leurs familles, une peine de plus de 6 mois entraînerait l’élimination automatique d’un des accusés, Paul Murphy, en tant que député, ce qui réduirait la décision démocratique de ces personnes qui l’ont élu.

    Ces condamnations auraient pour effet de criminaliser la contestation et d’envoyer un message effrayant à tous ceux qui voudraient protester dans les années à venir – syndicalistes, défenseurs des droits des femmes et autres. En tant que représentants de gauche à travers l’Europe, nous pensons que la protestation n’est pas un crime. Dans différents pays, nous avons vu des mouvements de personnes contre l’austérité et ils ont souvent été confrontés à des attaques contre les droits démocratiques. Nous croyons qu’il est essentiel de rester ensemble parce qu’une blessure à un est une blessure à tous.

    Nous sommes solidaires des accusés et de la campagne #JobstownNotGuilty. Nous demandons que toutes les accusations portées contre les manifestants soient abandonnées et que le droit de protestation soit défendu.

  • France. Infligeons une défaite au PS, à la droite et au FN ! Votons Mélenchon!

    Mélenchon devant 1500 personnes à Tourcoing lors de son meeting le 8 janvier. Au même moment, non loin de là Valls rassemblait 200 personnes… La dynamique populaire est du côté de France Insoumise (Radio France – Antoine Rolland)

    À trois mois et demi de l’élection présidentielle, il y a encore un peu d’incertitudes sur les candidats, par contre il est certain que les capitalistes français disposent d’une belle brochette de politiciens pour défendre leurs intérêts. Fillon, l’héritier de Thatcher et le pourfendeur de la sécurité sociale, Valls en chevalier blanc voulant faire oublier sa politique et le 49-3 utilisé à 6 reprises pour faire passer des lois de régression sociale majeures. Et puis il y a Le Pen, qui tire profit de la colère et du dégoût, espérant faire passer sous silence son vrai programme contre les travailleurs ainsi que les scandales et fractures qui secouent son parti.

    Article de Leïla Messaoudi publié dans L’Egalité (journal de la Gauche révolutionnaire, CIO-France) n°181

    Il est impensable que ces trois représentants des capitalistes – et tous leurs petits clones – monopolisent le débat politique, alors que les travailleurs et les jeunes ont tenu le haut du pavé au printemps 2016 ! Les politiques menées par Hollande et Valls et celle de Sarkozy avant, ont déjà été sanctionnées ; l’éviction de Sarkozy par K.O. puis celle de Hollande par forfait reflètent cette envie forte pour qu’ils dégagent tous !

    Le Pen, Fillon, Valls ou un autre : à nous de les dégager !

    Une très grande majorité de la population veut voir ce gouvernement prendre une claque et refuse le retour de la droite au pouvoir ! Mais le camp des travailleurs et des jeunes à la gauche du PS est trop faible. Il faut chercher à faire tous les pas qui permettraient d’inverser la vapeur. Car pour le moment, le FN peut encore se permettre d’essayer de récupérer la colère sociale et y compris les voix de certains qui veulent mettre une claque au PS et à la droite dans les urnes.

    Les élections n’ont pas la portée ni la puissance politique d’un long mouvement de luttes pendant lequel on se politise en discutant et agissant ensemble. Mais des résultats électoraux peuvent être un signal positif et donner la force pour engager la lutte plus forts et plus unis.

    La candidature de Jean-Luc Mélenchon est la seule réelle opportunité dans ces élections d’être des millions à dire non à cette politique au service des grands patrons et des gros actionnaires, tout en refusant le racisme et l’exclusion que le Front national porte. Les sondages montrent qu’avec 13 à 15 % des intentions de vote, Mélenchon est situé devant les candidats de la primaire PS. De plus en plus de travailleurs, de jeunes réfléchissent sérieusement à voter pour lui. Il faut utiliser ce potentiel !

    Une opposition politique au PS, à la droite et au FN doit prendre forme pendant cette campagne !

    Chaque jour, des centaines de grèves et de luttes, passées sous silence, ont lieu pour défendre des conditions de travail décentes, empêcher des licenciements ou des suppressions de postes, augmenter des salaires que les patrons cherchent toujours davantage à rogner.

    Une partie des syndicalistes combatifs ont signalé leur intention de voter Mélenchon, et ce, malgré des désaccords, conscients de l’enjeu et du fait que le vote Mélenchon est le seul aujourd’hui qui peut permettre d’infliger une défaite politique sévère aux représentants des capitalistes et à leur politique.

    Les questions sociales : les salaires, l’emploi, la précarité sont le coeur des discussions dans la rue et dans les lieux de travail. Lors de la convention de lancement du mouvement France Insoumise à Lille en octobre 2016 une quinzaine de points a été adoptée pour la campagne : retraite à 60 ans, rejet des traités européens, abrogation de la loi travail, augmentation des salaires, planification écologique… Plus qu’un soutien passif, il faut élargir la campagne en faisant entendre ces revendications devant les lieux de travail et dans les quartiers, dans les mobilisations et luttes. Autour des axes décidés à la convention, les groupes d’appui peuvent s’adresser plus directement à la population et en particulier aux travailleurs et jeunes qui sont les premiers concernés. Ce sont de telles revendications qui peuvent permettre une véritable mobilisation, montrer ce pour quoi il faut lutter.

    Nous le savons, un vote ne suffira pas pour stopper les capitalistes, comme l’ont montré les exemples grec et espagnol où Syriza et Podemos ont capitulé devant les exigences des institutions capitalistes. Il faut s’organiser dès maintenant et poser les jalons d’une nouvelle force politique large et militante nécessaire pour riposter. Les mobilisations syndicales et politiques en 2017 sont des moments privilégiés pour nous retrouver sur ces revendications depuis le soutien aux Goodyear Amiens en passant par les journées d’actions syndicales de janvier-février et au 18 mars pour la grande manifestation de soutien à Mélenchon à la Bastille. Le candidat Mélenchon, et plus encore, les groupes « d’insoumis » doivent en être les premiers porte-paroles. C’est le sens de notre appel à voter et de l’implication des militant-e-s de la Gauche révolutionnaire dans la campagne.

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