Category: Afrique

  • Nigéria : Les élections de 2011 et la quête d’un scrutin libre et juste

    Ce jeudi 9 septembre 2010, la Commission pour le Développement de la Justice et pour la Paix (Justice Development and Peace Commission – JDPC) de l’Archidiocèse catholique de Lagos a organisé une manifestation à Lagos pour sensibiliser tous les Nigérians sur la nécessité de protéger le scrutin des élections de 2011 contre la fraude. C’était le dernier de toute une série de meetings organisés par différents groupes en vue des élections nationales.

    Rapport par Keye Ewebiyi

    La manifestation a démarré à l’église catholique Saint Léon, rue Toyin, à Ikeja, à exactement 10h45, après que des messages de solidarité aient été envoyés par Abiodun Aremu, co-secrétaire de la Coalition pour le Travail et la Société Civile, par le Révérend Frère E. A. Fadele, Directeur Exécutif de la JDPC, par Mme Ngozi Nwere et par d’autres activistes présents.

    Cette procession a rassemblé environ 2500 personnes, y compris des vendeuses du marché, des commerçants, des artisans, des taxi motos, des acteurs, des enfants, etc. qui passaient par la rue Toyin, par l’avenue Mobolaji Bank Anthony, par la rue Kodesoh, par la route Obafemi Awolow et par l’avenue Allen, toutes situées dans Ikeja, capitale de l’Etat de Lagos. Dagga Tollar, membre du Comité Exécutif National du Mouvement Socialiste Démocratique (DSM, CIO- Nigéria), a pris la parole lors d’une des pauses prévues pour les discours le long du parcours.

    Parmi les chants de solidarité, les danses, et la distribution de tracts, des slogans tels que «Ne vendez pas votre vote», «Un homme – une voix», «2011 : nos votes doivent compter», «2011 : nous devons défendre notre scrutin» ont été entonnés tout au long de la manifestation. Les discours adressés par différents orateurs étaient centrés sur la nécessité de s’inscrire sur les registres d’électeurs et de défendre sa voix. L’ambiance générale lors de la marche était un grand désir de changement de système, ce que les gens croient erronément possible de se produire à la suite d’un scrutin électoral libre et juste dans le cadre du système capitaliste actuel pro-riches et antipopulaire.

    Les réactions de la part du public étaient en contraste véritablement pessimistes, beaucoup sont persuadés que rien de bon ne peut sortir des élections de 2011, et que la vie reprendra son cours par la suite. A un parking pour motos le long de l’avenue Bank Anthony, les taxis motos ont exprimé leur désenchantement par rapport au Gouvernement de l’Etat de Lagos dirigé par Raji Fashola après sa politique anti-pauvres. Un des conducteurs, un homme d’âge moyen, a tenu à dire ceci : «On ne votera pas pour Fashola ; il a chassé les vendeuses de leurs échoppes et du marché pour satisfaire son programme d’embellissement de la ville, et maintenant il se tourne vers nous, il veut nous jeter des routes de Lagos, alors comment on fait pour vivre ?» Poursuivant : «On va aller voter, mais on sait déjà que notre vote ne comptera pas». Une jeune dame sur le même parking disait ceci : «S’ils peuvent me payer, moi je leur vendrai mon vote ; après tout, je ne bénéficie pas non plus des fruits de la démocratie».

    Le Gouvernement de Lagos, sous prétexte de bâtir une mégalopole, a continué à infliger de nombreuses souffrances et attaques néolibérales aux pauvres vivants dans cet Etat. Il a continué à mettre des propriétés privées à la disposition du profit privé et ce, aux dépens du peuple, avec son Programme Public-Privé (PPP), comme par exemple la concession de la route Lekki-Epe en cours en ce moment. Qui plus est, malgré d’immenses revenus provenant d’allocations mensuelles et de taxes multiples, la plupart des routes et des écoles publiques de l’Etat sont en mauvaise santé.

    De manière ironique, le gouvernement de Raji Fashola est considéré comme étant le plus performant dans le pays à tous les niveaux. Ceci démontre à quel point l’élite nigériane se comporte comme un pays des aveugles, ou le borgne est roi. La population laborieuse du Nigéria ne mérite pas ça.

    Ceci amène par conséquent la question cruciale d’un parti de la population laborieuse qui servira en tant que plate-forme alternative pour les travailleurs, pour les paysans, les artisans, les vendeurs et vendeuses, afin d’arracher le pouvoir des mains des partis pro-capitalistes et anti-pauvres qui occupent maintenant le pouvoir à tous les niveaux. Un tel parti mettra les ressources publiques à la disposition de tous. Le Labour Party formé par la NLC a été confisqué par des richards et des carriéristes politiques. Par conséquent, de la manière dont il est constitué et orienté, il ne pourra pas servir les intérêts de la population laborieuse pauvre lors des prochaines élections. Les syndicats doivent récupérer le parti ou, en alliance avec les organisations pro-masses et socialistes, doivent former un parti des travailleurs combatif. Ceci signifie qu’à environ quatre mois des élections de 2011, il se pourrait qu’il n’y ait aucun parti qui représente les aspirations des travailleurs au jour du scrutin. Il n’est cependant pas trop tard pour la direction syndicale si elle veut sauver la situation en se mettant sérieusement en lutte pour récupérer le Labour Party ou entamer le processus de la formation d’une véritable alternative politique pour les travailleurs, avec un programme socialiste. Même si le parti ne tire pas un très bon résultat des élections à cause du court délai, il pourrait offrir un programme socio-économique alternatif contre l’agenda pro-capitaliste et anti-pauvre en cours en ce moment, et une base solide aurait été posée pour l’édification d’une véritable alternative.

    Il est important de constater qu’il y a eu toute une série de manifestations et meetings à la veille des élections, ce qui est un fait sans précédent. Ceci indique le désir de la population d’obtenir des élections libres et justes. Toutefois, ces manifestations n’ont malheureusement pas pu apporter quoi que ce soit de fondamental pour les masses. Ceci, parce que les élections ne seront qu’un concours entre les différentes sections des partis politiques anti-pauvres qui sont unis autour du même programme capitaliste néolibéral anti-pauvres.

    Le parcours de la procession devait normalement se terminer au bureau du Gouverneur de l’Etat de Lagos, Alausa-Ikeja, mais n’a pas pu y aller à cause du jour de congé promulgué pour célébrer la fin de Ramadan. Quatre membres du DSM ont participé à la marche et y ont vendu 101 copies de notre journal Socialist Democracy.

  • Manifestation: Le Congo aux Congolais!

    Le malaise social qui sévit au Congo, pays où selon les rapports de la Banque Mondiale, plus de la moitié des habitants vit largement sous le seuil de la pauvreté, est probablement une des principales raisons pour laquelle ce mercredi 30 juin ils étaient plus de deux cents à avoir répondu l’appel des diverses organisations pour manifester contre la commémoration du cinquantenaire de l’indépendance du Congo. Les slogans, nombreux, criés ou bradés sur des drapeaux et pancartes, étaient unanimes : Le Congo aux congolais ! Et ils ne parlaient pas simplement de cette indépendance sur le papier dont on fête déjà les cinquante-ans, mais de quelque chose de bien plus profond.

    Par Damaris (Bruxelles)

    La manifestation a eu départ à la place Poelart, en face du palais de justice, pour prendre en suite la direction du quartier "africain" de mantongé, où encore d’autres manifestants ont rejoint la foule et aux environs de 17h, elle est arrivée à son terme au rond-point Schuman, devant le siège du Conseil de l’Union Européenne.

    L’indépendance réelle ne viendra, malheureusement, qu’à travers la prise de conscience de chaque travailleur et de chaque paysan congolais que sans leur union, sans une lutte organisée et une révolution qui mettrait à bas le système capitaliste, rien ne changera au Congo, que ce soit avec Kabila ou un autre.


    Pour un Congo véritablement indépendant – Pour un Congo socialiste (extrait de notre dossier)

    50ans après l’indépendance, nous voyons un pays sous tutelle des institutions financières internationales, un pays où la population ne voit pas un franc de ses richesses. En 2011 auront lieu les élections présidentielles et législatives et, quel que soit le vainqueur (Joseph Kabila, un opposant issu du PPRD, du MLC ou de l’UDPS), cet Etat des lieux de changera pas car tous ont la volonté d’être celui qui plaira le plus à l’impérialisme, tous sont prêts à vendre leur pays pour quelques privilèges. Au parlement, tous seront prêts à aller chercher leur enveloppe de dollars pour voter ‘‘comme il faut’’.

    La réappropriation du pays passe par la prise en mains de ses richesses par les travailleurs et le peuple tout entier et par la prise en mains par les paysans des grandes concessions octroyées aux amis de Mobutu.

    La résolution de la question agraire et la nationalisation des concessions minières, voilà ce qui permettra, grâce au profit immense qu’elles produisent, de dégager de l’argent pour construire les infrastructures nécessaires au développement du pays, pour investir dans l’éducation et dans la santé. Cette nationalisation doit être véritable et démocratique, c’est-à-dire entre les mains de ceux qui y travaillent et aux mains du peuple tout entier et non entre les mains de quelques dirigeants corrompus.

    Ce programme doit être réalisé en tenant compte des leçons enseignées par l’Histoire : ne faisons pas confiance aux élites prêtes à vendre le pays pour quelques privilèges ; ne nous allions pas avec des impérialistes, nos intérêts sont opposés ; ne nous allions pas avec des capitalistes, l’appropriation collectives des richesses est le seul gage d’une indépendance réelle ; impliquons les masses au maximum dans ce processus révolutionnaire, elles seules ont la force de résister aux agressions, elles seules peuvent éviter le pouvoir d’une élite corrompue ; la lutte commence au sein des travailleurs des villes par les grèves et les manifestations, la lutte armée n’est qu’un outil périphérique qui, utilisé seul, mène à la dictature.

    • Lire notre dossier sur les 50 ans d’indépendance formelle du Congo

  • Algérie: Arcelor Mittal connaît sa seconde grève à durée indéterminée de l’année!

    Nationalisation du site sous contrôle démocratique des travailleurs

    Depuis le 20 juin, plusieurs milliers de travailleurs du site du sidérurgiste Arcelor Mitall à Hel-Hadjar, près de la ville d’Annaba (au nord-est de l’Algérie), sont en grève pour une durée indéterminée sur base d’un conflit portant sur les salaires. Entre autres choses, les grévistes revendiquent une augmentation salariale comprise entre 13 et 20%.

    Par Chahid Gashir, CIO

    Arcelor Mittall est la plus grande compagnie sidérurgique au monde mais aussi le plus grand investisseur étranger d’Algérie, en dehors des secteurs pétrolier et gazier. Depuis 2001, la compagnie contrôle 70% de l’ancienne usine d’Etat d’El-Hadjar, la compagnie SIDER, contrôlée par l’Etat, ne possédant plus que 30% du site. Les travailleurs ont menacé de faire grève jusqu’à ce que l’Etat renationalise l’entreprise ou, au moins, augmente son contrôle sur elle.

    Cette usine, un des plus grands sites industriel du pays, produit 750.000 tonnes d’acier annuellement et emploie quelques 7.200 travailleurs. 5.000 d’entre eux avaient précédemment pris part à une assemblée générale et ont voté à l’unanimité pour paralyser le site. Un travailleur de l’usine a fait remarqué que 95% de la force de travail est maintenant en grève. “Nous allons poursuivre jusqu’à la satisfaction complète de nos revendications” a déclaré le même travailleur. Plus tôt cette année, les travailleurs de cette usine avaient déjà engagé une grève de 9 jours concernant la fermeture d’une unité de production de coke et la menace de pertes d’emplois.

    La colère est généralisée

    Ces derniers mois, l’exaspération face à l’augmentation des prix et à la pénurie d’emplois et de logements a entraîné plusieurs vagues successives de grèves et de protestations en Algérie. Les médecins, les enseignants, les fonctionnaires, les travailleurs dans les industries, etc. ont été impliqués dans différentes actions de grève, avec la question des salaires comme point central. Dans un precedent article sur ce site, nous avons écrit “ces conflits ont encourage d’autres secteurs à prendre la voie de la lutte avec leurs propres exigences”. Cela est particulièrement le cas quand les travailleurs remportent une victoire, comme lors de la récente grève nationale de 8 jours des cheminots en mai.

    10.000 travailleurs de la compagnie ferroviaire nationale SNTF, qui revendiquaient une augmentation salariale, ont paralysé tout le réseau dans une grève à durée indéterminée qui a finalement duré 8 jours. La plupart des cheminots recevaient un salaire inférieur au salaire minimum (qui autour de 15.000 dinars – soit environ 150 euros par mois). Cette grève des cheminots était la plus importante de ce type depuis que l’Algérie a connu une indépendance formelle en 1962. Alarmé par l’effet contagieux de ce conflit, le gouvernement a accepté une augmentation de salaire de 20%, “une concession qui, ont prévenu certains économistes, pourrait encourager d’autres grèves dans ce pays de l’Afrique du nord”, a-t-on pu lire dans le communiqué de l’agence Reuters juste après la grève.

    Renationalisation de l’usine! Les entreprises privées et publiques doivent être retirées des mains des capitalistes et du mauvais fonctionnement bureaucratique!

    Les grévistes d’Arcelor Mittal ont reçu le soutien et la solidarité de travailleurs du site SNVI à Rouiba (Alger), de même que celui de travailleurs de plusieurs autres compagnies, avec l’encouragement de poursuivre leur lutte.

    Le CIO soutien également fermement cette grève, et suggère non seulement la nationalisation de l’usine, mais aussi sa mise sous contrôle démocratique de représentants des travailleurs démocratiquement élus et révocables à tout moment. Le CIO propose aussi de lier ce conflit aux autres secteurs faisant face à des problèmes similaires, en instaurant une économie entièrement placée sous une véritable panification socialiste et démocratique. Cela constituerait un encouragement énorme pour que la classe ouvrière joue un rôle décisif dans l’économie et afin d’utiliser les vastes ressources du pays au bénéfice de tous, tout en évitant le disfonctionnement et la corruption qui arrivent quand les compagnies publiques sont dirigées par des responsables de type mafieux.

  • Pour l’indépendance réelle et pour le socialisme !

    50 ans d’indépendance formelle de la RD Congo, suka wapi (*) ?

    Ce 30 juin 2010, au regard du bilan de ces 50 ans ‘‘d’indépendance’’, on verra qu’il ne reste plus grand-chose de cette indépendance et que la grande fête du 30 juin 1960 n’aura que peu duré. Depuis lors, le Congo n’a connu que la dictature pro-impérialiste de Mobutu, les guerres, la souffrance et la misère. Pour une réelle indépendance et pour que les énormes richesses du pays reviennent à la population, une société socialiste est nécessaire.

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    République Démocratique du Congo

    Population en 2009 : 68.692.542 (6 fois la Belgique, autant qu’en France)

    Quelques dates :

    • 1885: Léopold II achète le Congo en tant que propriété personnelle, et s’enrichit par la vente de caoutchouc. Entre 1885 et 1908, au moins 5 millions de Congolais meurent des suites de l’exploitation et de la maladie
    • 30 juin 1960: le Congo obtient son indépendance, sous la Présidence de Kasavubu et avec Lumumba comme Premier Ministre. Lumumba est assassiné en 1961
    • 1965-1997: le Général Mobutu prend le pouvoir. En 1971, le Congo est rebaptisé Zaïre. En 1984, la fortune de Mobutu était estimée à 4 milliards de dollars
    • 18 mai 1997: Kabila entre dans Kinshasa avec ses troupes de l’AFDL
    • 1998: début de la guerre civile, lorsque le Rwanda et l’Ouganda se liguent contre Kabila
    • 2001: Kabila est assassiné lors d’une tentative de coup d’Etat, son fils prend le pouvoir à sa suite
    • 2006: Kabila Jr. remporte les élections

    Une indépendance arrachée de haute lutte

    ‘‘L’indépendance du Congo constitue l’aboutissement de l’œuvre conçue par le génie du Roi Léopold II’’ voilà ce que déclare le roi Baudouin à Léopoldville (Kinshasa) le 30 juin 1960, en affirmant que l’indépendance est le sommet de l’œuvre civilisatrice de la Belgique en Afrique. Un beau mensonge, destiné à justifier la colonisation afin de garder une mainmise ‘amicale’ (sic) sur le Congo et à préserver le prestige de la Belgique sur la scène internationale. La vérité, la voilà : l’indépendance du Congo a été acquise au prix de la lutte implacable du peuple congolais et au prix du sang de nombreux combattants de cette indépendance.

    Ainsi, le 4 janvier 1959, la foule de Léopoldville s’était attaquée aux symboles du colonialisme, police et armée en tête, après l’interdiction et la répression d’un meeting de l’ABAKO de Joseph Kasa-vubu(1), au prix d’une centaine de morts. Ce n’est qu’après cet événement que la Belgique s’est résolue à l’indépendance, en comprenant qu’elle était incapable d’assumer une lutte prolongée. Avant cette date, l’indépendance était inconcevable à court terme. Ainsi, le professeur Van Bilsen, de l’UCL, parlait alors d’une éventuelle indépendance du Congo par l’intermédiaire d’un plan étalé sur 30 années.

    Cette cérémonie du 30 juin à Kinshasa révèle trois choses. Premièrement, la Belgique ne compte nullement abandonner sa mainmise sur le Congo. Deuxièmement, le discours du président Kasa-Vubu montre que la plupart des élites congolaises est prête à vendre cette indépendance que le peuple a obtenue pour quelques privilèges personnels. Le président Kasa-Vubu remercie ainsi Baudouin pour avoir ‘‘aimé et protégé’’ la population du Congo. La troisième chose rétablit la vérité sur l’indépendance du Congo et est révélée dans le discours de Patrice Lumumba(2), qui affirme que ‘‘cette Indépendance (…) nul Congolais digne de ce nom ne pourra jamais oublier que c’est par la lutte qu’elle a été conquise, une lutte de tous les jours, une lutte ardente et idéaliste, une lutte dans laquelle nous n’avons ménagé ni nos forces, ni nos privations, ni nos souffrances, ni notre sang.’’

    C’est de ce discours, où Lumumba salue les combattants de l’indépendance, ses ‘‘frères de lutte’’, dont nous nous souviendrons ce 30 juin 2010.

    Du colonialisme au néocolonialisme

    Comme l’a annoncé Baudouin, la Belgique ne compte pas abandonner ses ‘‘droits’’ sur le Congo et, plus spécifiquement, sur les richesses minières du pays. Quand il se rend compte que Lumumba, le premier ministre, veut vraiment faire profiter les richesses du pays aux Congolais, l’Etat belge décrète sa mise à mort ainsi que celle de son gouvernement nationaliste. Cela se concrétise tout d’abord par un soutien à la sécession du Katanga (où se trouvent la plupart des richesses minières et la puissante Union Minière) et à celle du Sud-Kasai (où se trouvent les ressources diamantifères) et ensuite par l’assassinat de Lumumba et le soutien au Coup d’Etat du général Mobutu.

    Le régime mobutiste est un régime de dictature et de terreur instauré avec le soutien de la Belgique et des Etats-Unis, à travers la CIA qui travaillait déjà avec Mobutu depuis plusieurs années. La formule qui dit que ‘‘contre des privilèges personnels, les élites congolaises sont prêtes à vendre leur pays aux intérêts occidentaux’’, se vérifie.

    Le régime de Mobutu est soutenu par les puissances occidentales afin de protéger les intérêts économiques occidentaux au Congo (devenu Zaïre en 1971) et pour être la plaque tournante de la CIA contre le ‘‘communisme’’ en Afrique. Ainsi, le Zaïre a par la suite été la base arrière de l’UNITA, qui luttait pour les intérêts occidentaux en Angola contre le Mouvement Populaire de Libération de l’Angola (MPLA) au pouvoir.

    Grâce à une aide occidentale considérable, le régime de Mobutu peut offrir quelques miettes à la population ; le niveau de vie s’améliore durant quelques années, avec des résultats corrects dans l’éducation par exemple. Mais cette relative et très brève période de réussite n’est due qu’au financement occidental et, quand les régimes occidentaux décident que Mobutu va trop loin et qu’ils le lâchent définitivement après la chute du mur de Berlin et la fin de la ‘‘nécessaire lutte contre le communisme’’, le régime s’effondre.

    Dépourvu du soutien occidental, le Zaïre de Mobutu sombre dans le chaos et la violence : Kengo wa Dondo, le chef du gouvernement du parti unique MPR (et actuel président du Sénat), ‘‘remet de l’ordre’’ dans les finances de l’Etat en pratiquant une politique néolibérale brutale, saccageant tous les acquis des travailleurs et de la population et allant même jusqu’à ne plus payer les fonctionnaires. Cette politique engendre une violence généralisée dans le pays et on assiste aux grands pillages opérés par les FAZ (l’armée officielle), qui n’avait plus touché leur salaire depuis longtemps.

    Cette période où l’impérialisme lâche Mobutu voit aussi l’organisation de la Conférence nationale souveraine (CNS) sensée opérer une transition démocratique pour le pays. On voit alors ‘‘l’opposant’’ de Mobutu, Etienne Tshisekedi (3) et son UDPS, monter en puissance pour finalement accepter de devenir premier ministre de Mobutu à plusieurs reprises. Cela illustre une fois de plus à quel point les élites congolaises sont prêtes à vendre leur pays pour quelques privilèges.

    La fin de Mobutu

    Extrait de l’édito de ce journal en juin 1997

    «Kabila a accompli ce que tous les pouvoirs impérialistes voulaient éviter à tout prix: prendre d’assaut Kinshasa. La position de Kabila est donc forte aujourd’hui. Ce qu’il va ensuite faire reste provisoirement une énigme. Les besoins sont immenses: emplois, salaires, soins de santé, enseignement, logement, transport et communications… L’objectif n’est pas seulement la reprise de l’économie et sa gestion dans l’intérêt des masses, mais aussi la reconstruction d’une économie totalement ruinée.’’

    «Cela ne peut se faire en ouvrant le pays à la dictature du marché et au capitalisme mondial. L’Alliance semble pourtant suivre cette voie: avant la prise du pouvoir, des accords d’exploitation ont déjà été signés avec des entreprises américaines et sud-africaines. Cela ne peut aboutir qu’à des zones franches dans les provinces disposant de richesses minérales où des journées de 16 heures de labeur avec des salaires de famine seront la norme.’’

    «Seul un gouvernement qui nationalise et planifie l’économie en faveur des masses peut offrir une solution. Les ouvriers et les paysans pauvres doivent être impliqués dans la mise sur pied et l’application d’un plan de reconstruction.’’

    «Le Congo devra évidemment faire du commerce avec le capitalisme mondial. Il sera donc soumis à une pression gigantesque. En restant indépendant de l’impérialisme et en mettant l’intérêt du peuple au centre de ses préoccupations, le Congo peut être un exemple pour tous les Africains et un pôle de solidarité internationale.’’
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    Les erreurs de Laurent-Désiré Kabila

    C’est dans ce contexte d’un Etat chancelant que démarre, en 1996, la guerre de l’AFDL, dont le porte-parole est Laurent-Désiré Kabila, qui tenait son maquis d’inspiration maoïste à Hewa Bora au Sud-Kivu depuis les années ’60. En réalité, derrière cet homme se trouvent les armées rwandaise et ougandaise, désireuses de profiter de la faiblesse du Zaïre pour piller les richesses de l’Est du pays (or, coltan, cassitérite, etc.) et pour traquer les génocidaires hutus de 1994 réfugiés au Zaïre. Vouloir ‘‘libérer’’ le pays avec des armées liées à l’impérialisme dans son dos, voilà la première erreur de Kabila.

    La population, qui veut en terminer avec le pouvoir chaotique de Mobutu, accueille favorablement les miliciens de l’AFDL jusqu’à Kinshasa, où le régime passe définitivement aux mains de Kabila le 17 mai 1997. Enfermé dans la théorie maoïste des deux étapes, et redevable envers ses ‘‘amis’’ rwandais, ougandais, angolais, zimbabwéens,… et occidentaux ; Kabila veut accueillir les ‘‘bons’’ capitalistes contre les ‘‘mauvais’’ qui avaient soutenu le régime mobutiste. Il octroie donc des concessions aux sociétés multinationales qui avaient financé la guerre de l’AFDL. Seconde erreur: impossible de libérer un pays du joug de l’impérialisme en l’accueillant à bras ouvert sur son sol ; impossible de développer un pays en permettant à des sociétés assoiffées de profits d’exploiter ses richesses. Un réel développement indépendant passe par la mise sous contrôle des travailleurs des entreprises pour que les richesses produites profitent à la population toute entière, que le développement s’effectue sur base nationale et pour éviter l’exportation des bénéfices vers l’étranger.

    Alors que les Congolais avaient accueilli l’AFDL à bras ouverts pour mettre fin au chaos mobutiste et à la dictature de parti unique du MPR ainsi qu’au ‘‘multi-mobutisme’’ instauré avec la CNS (celles-ci avaient permis la création de parti ‘d’opposition’, tous d’anciens mobutistes convertis à la démocratie comme Kengo, Tshisekedi, Karl-i-Bond, etc.), Kabila échoue à intégrer les masses dans un projet révolutionnaire. Les CPP (comités de pouvoir populaire) devaient, à la base, être le centre du pouvoir de Kabila, son instrument démocratique. Mais, au lieu de cela, les CPP jouent rapidement le rôle de courroie de transmission des ordres du haut vers le bas et non de réel pouvoir populaire. Rien d’étonnant : la lutte de Kabila était avant tout une lutte armée plus qu’un mouvement révolutionnaire populaire.

    Les caractéristiques principales d’une lutte armée sont de ne pas impliquer toutes les masses pauvres mais seulement les combattants ainsi que d’obéir à un système hiérarchique strict où la démocratie n’a pas place. C’est ce modèle qui s’applique désormais à l’ensemble de la société congolaise. C’est la troisième erreur fondamentale de Kabila et, lorsque les alliés rwandais et ougandais se sont retournés contre l’enfant turbulent Kabila, celui-ci n’a pu compter sur aucune base et s’est retrouvé seul, sans réel appui autre que celui de l’Angola jusqu’à son assassinat en 2001.

    Les parrains contre le filleul, le fils contre le gendre

    En 1998, Kabila s’émancipe trop de ses parrains, et ceux-ci décident de lancer une nouvelle guerre de ‘‘correction révolutionnaire’’ (sic). Ainsi nait le RCD, où se retrouvent pêle-mêle les anciens cadres de l’AFDL, des anciens FAZ, des membres de l’UDPS,… Bref, toute la clique pro-impérialiste du pays et tous les aventuriers prêts à gagner quelques privilèges contre services rendus à l’impérialisme. En réalité, les armées rwandaises et ougandaises ne tardent pas à se disputer la part du lion. Les troupes s’entretuent à Kisangani et l’Ouganda crée le MLC dirigé par Jean-Pierre Bemba, gendre de Mobutu. Le vieux Kabila assassiné, le fils prend la relève et, quelques millions de morts plus tard (on parle de 4 millions), on arrive aux accords signés à Sun City en 2002, qui prévoient un gouvernement commun Kabila-MLC-RCD et des élections en 2006. Cet accord a été rendu possible car les différentes parties étaient finalement d’accord sur l’essentiel depuis la mort de Kabila : satisfaire les occidentaux en accueillant les institutions financières internationales et répartir les postes de pouvoir. Quel cynisme ! Le fils de l’ancien président Kabila et le gendre de Mobutu (Jean-Pierre Bemba est également le fils de Jeannot Bemba Saolona, ancien président de l’ANEZA – association nationale des entreprises du Zaïre sous Mobutu, le patron des patrons), ensemble pour l’occident et les privilèges.

    Les élections donnent Kabila vainqueur et celui-ci réalise la politique voulue par l’impérialisme et les institutions financières internationales. Mais il n’y a aucun doute sur le fait que Jean-Pierre Bemba aurait réalisé le même programme, voire encore pire, lui qui est le fruit de l’union entre Mobutu et le patronat zaïrois.

    Un pays sous tutelle

    Aujourd’hui, à qui profitent les richesses du Congo ? Certainement pas à son peuple qui se voit accablé d’une pauvreté extrême. Dans des provinces comme l’Equateur ou le Bandundu, le taux de pauvreté atteint les 90%. Dans l’ensemble du pays, l’espérance de vie atteint péniblement les 54 ans et 1 million de personnes décèdent chaque année du SIDA. Et, en effet, le Congo n’a pas son avenir en main. En acceptant les plans des institutions financières internationales, Joseph Kabila leur a donné les clés de la maison. Aujourd’hui, par exemple, c’est un Canadien qui dirige la Gécamines, ancien fleuron de l’économie zaïroise et société nationale active au Katanga. Celui-ci a pour mission d’octroyer des concessions minières au plus offrant et c’est tout le capitalisme sauvage qui se retrouve au Katanga : du capitaliste belge Georges Forrest aux sociétés chinoises en passant par les multinationales venues d’Inde, du Canada, etc.

    Les programmes sociaux d’éducation, de santé,… sont inexistants. Les fonctionnaires ne reçoivent que rarement leur salaire, s’adonnant à la corruption pour survivre. Les infrastructures promises par Kabila dans ses ‘‘5 chantiers’’ sont invisibles. Rester dans le cadre du FMI ne pourra que faire perdurer cette situation : avec la dette immense laissée par Mobutu (pour construire des villas en Suisse, ce que les bailleurs savaient parfaitement), le Club de Paris – les grands créanciers des pays endettés – possède un moyen de pression extraordinaire pour pousser le régime congolais à libéraliser au maximum son économie, faisant ainsi place aux capitalistes qui pillent le pays. Cette question de la dette empêche également le Congo de toute capacité d’action puisque le budget de l’Etat s’en retrouve amoindri.

    Pour un Congo véritablement indépendant – Pour un Congo socialiste

    50ans après l’indépendance, nous voyons un pays sous tutelle des institutions financières internationales, un pays où la population ne voit pas un franc de ses richesses. En 2011 auront lieu les élections présidentielles et législatives et, quel que soit le vainqueur (Joseph Kabila, un opposant issu du PPRD, du MLC ou de l’UDPS), cet Etat des lieux de changera pas car tous ont la volonté d’être celui qui plaira le plus à l’impérialisme, tous sont prêts à vendre leur pays pour quelques privilèges. Au parlement, tous seront prêts à aller chercher leur enveloppe de dollars pour voter ‘‘comme il faut’’.

    La réappropriation du pays passe par la prise en mains de ses richesses par les travailleurs et le peuple tout entier et par la prise en mains par les paysans des grandes concessions octroyées aux amis de Mobutu.

    La résolution de la question agraire et la nationalisation des concessions minières, voilà ce qui permettra, grâce au profit immense qu’elles produisent, de dégager de l’argent pour construire les infrastructures nécessaires au développement du pays, pour investir dans l’éducation et dans la santé. Cette nationalisation doit être véritable et démocratique, c’est-à-dire entre les mains de ceux qui y travaillent et aux mains du peuple tout entier et non entre les mains de quelques dirigeants corrompus.

    Ce programme doit être réalisé en tenant compte des leçons enseignées par l’Histoire : ne faisons pas confiance aux élites prêtes à vendre le pays pour quelques privilèges ; ne nous allions pas avec des impérialistes, nos intérêts sont opposés ; ne nous allions pas avec des capitalistes, l’appropriation collectives des richesses est le seul gage d’une indépendance réelle ; impliquons les masses au maximum dans ce processus révolutionnaire, elles seules ont la force de résister aux agressions, elles seules peuvent éviter le pouvoir d’une élite corrompue ; la lutte commence au sein des travailleurs des villes par les grèves et les manifestations, la lutte armée n’est qu’un outil périphérique qui, utilisé seul, mène à la dictature.


    (*) Ça se termine où (quand) ?

    (1) L’ABAKO est l’Association des Bakongos, un parti régionaliste de la province du Bas-Congo dirigé par le président Kasa-vubu (1913-1969) qui représentait les positions pro-occidentales et soutenait la dictature de Mobutu.

    (2) Lumumba (1925-1961) était un chef de file du Mouvement national congolais (MNC) qui a remporté les élections en décembre 1959. Opposé à la déclaration d’Indépendance – parrainée par la Belgique – de la riche province du Katanga, il avait fait appel au soutien de l’Union soviétique. La radicalisation de Lumumba a donné lieu à son assassinat soutenu (ou organisé) par l’Occident.

    (3) Etienne Tshisekedi a toujours été un « opposant » au service de l’impérialisme. En 1965, il devient ministre de l’Intérieur sous Mobutu et participe, en 1967, à la rédaction de la nouvelle constitution de parti unique et au manifeste de Nsele qui fonde le MPR, Parti-Etat. Ce n’est qu’en 1982 qu’il fonde l’UDPS pour obtenir le pouvoir qu’il voulait partager avec Mobutu mais que celui-ci monopolisait. Lors de la transition ‘‘démocratique’’ et de la CNS, Tshisekedi sera plusieurs fois Premier Ministre de Mobutu comme demandé par les impérialistes qui voulaient le compromis entre ces deux hommes. Après la chute de Mobutu, l’UDPS a en permanence cherché des alliés contre Kabila. En 2006, l’UDPS soutient Jean-Pierre Bemba au second tour de la présidentielle après avoir boycotté l’élection.

  • Coupe du monde : La police anti-émeute attaque les travailleurs au stade Durban

    La police anti-émeute sud-africaine a tiré des gaz lacrymogènes sur des centaines de stewards qui protestaient contre des réductions de salaires, 90 minutes après le match entre l’Allemagne et l’Australie à Durban.

    socialistworld.net

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    Coupe du monde 2010

    • A qui profite la coupe du monde de foot ?
    • Afrique du Sud : La coupe du monde de… l’inégalité!
    • Rubrique “Afrique du Sud” de socialist world.net

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      «Ils nous donnent 205 rands [environ 20 €]; nous avons commencé à midi et travaillons jusqu’à minuit», explique Sikhumbuzo Mnisi, un homme de 44 ans de Durban, selon le New York Times, «Différentes choses ont été dites aux gens, mais on nous avait promis 1.500 rands (environ 140 euros) par jour”. Il a encore déclaré: «Nous avons commencé à protester parce que nous voulions négocier.»

      Selon d’autres rapports, environ 400 employés des stades ont protesté contre une baisse de salaire de 250 à 190 Rand Rand (environ € 18) par jour.

      Des centaines de stewards se sont réunis pour protester. Selon les mots de Rich Mkhondo, chef de la communication pour le comité local d’organisation de la Coupe du Monde: «La police a été appelée afin de disperser les stewards qui protestent», décrivant le conflit comme «une dispute interne entre la société de sécurité principale employée par le comité d’organisation et quelques-uns des stewards de sécurité utilisé par la société lors du match.»

      Au moins une femme a été blessée par des balles en caoutchouc. Deux travailleurs ont été arrêtés. Lorsque la police a tenté de disperser les travailleurs d’un parking près du stade, on a utilisé une grenade assourdissante.

      Il y a un an déjà, des travailleurs de la Coupe des Confédérations de la FIFA avaient protesté car ils avaient eu moins que le salaire initialement prévu.

  • NIGER : L’armée met un terme à l’impasse politique

    Un avertissement pour les masses laborieuses d’Afrique

    Peu avant le coup d’Etat qui a renversé le gouvernement de Mamadou Tandja le 18 février 2010, il était clair que quelqu’un allait devoir tomber. En tant qu’ancien dirigeant militaire devenu dirigeant civil, Tandja a émasculé l’opposition et s’est forcé un passage vers ce qui était censé constituer une présidence a vie.

    Par Lanre Arogundade (Democratic Socialist Movement, CIO-Nigéria)

    De même qu’on le disait souvent quant à la situation au Nigéria sous le régime civil de Shehu Shagari, avant que le Général Muhammadu Buhari ne le renverse en décembre 1983, le pouvoir était dans les rues. Mais dans ce cas particulier, ce n’était pas un cas de «n’importe qui aurait pu le ramasser», mais plutôt que seule l’armée pouvait le récupérer.

    Bien que le Niger ait par le passé souffert de la succession de plusieurs régimes militaires, il ne faisait aucun doute que le peuple n’avait aucune sympathie pour le régime maintenant renversé. De nombreuses personnes ont en fait poussé un soupir de soulagement en voyant un dictateur bourgeois notoire se faire ainsi mettre à la porte.

    Cherchant à s’auto-maintenir au pouvoir, Tandja a l’an passé organisé un référendum truqué qui lui a anticonstitutionnellement octroyé un troisième mandat, après qu’il ait presté ses deux mandats légaux. La nouvelle constitution aurait fait de sa Présidence et du Conseil des Ministres un organe supérieur à l’Assemblée Nationale, dont la seule fonction serait devenue d’avaliser le budget annuel. Quelle qu’ait été sa décision, elle aurait dû être ratifiée par un Sénat nouvellement créé, dont deux-tiers des membres auraient été cooptés par Tandja et dont il aurait facilement pu ignorer ou faire annuler les motions.

    Les protestations contre ces actes anticonstitionnels ont été brutalement réprimées et même, à un certain stade, Tandja a dissout les Cours qui avaient osé intervenir dans l’impasse politique. Les soi-disant politiciens d’opposition n’ont été d’aucun secours. Lorsque la Cour Constitutionnelle a condamné les traitements juteux versés aux cadres du gouvernement, ces politiciens ont été les premiers à s’opposer à ce jugement, sans tenir compte du fait que la majorité de la population vit dans la pauvreté la plus abjecte. Les politiciens d’opposition ont ensuite décidé de soutenir la Cour Constitutionnelle lorsqu’elle a décidé que Tandja ne pouvait pas utiliser un référendum pour s’offrir un troisième mandat. Tandja a alors bien entendu dissout la Cour.

    En l’absence d’une intervention politique organisée par la classe ouvrière et d’une direction ouvrière a la tête de celle-ci, le dernier coup d’Etat mené par le Chef d’Escadron Salou Djibo, maintenant à la tête d’un Conseil Suprême pour la Restauration de la Démocratie, était inévitable. Mais bien que certaines sections de la population aient applaudi ce coup d’Etat, celles-ci doivent être averties que l’on ne peut pas faire confiance à la junte pour restaurer la démocratie de manière urgente et fondamentale, à moins que cette junte ne soit placée sous une pression démocratique massive par les travailleurs, les jeunes et les paysans. En fait, il n’est pas exclu que Djibo puisse devenir un autre Tandja après avoir exploité le mécontentement populaire pour prendre le pouvoir. Le fait que cette même junte qui a proclamé que le Niger était un «exemple de démocratie et de bonne gouvernance» a également suspendu la Constitution et dissout tous les organes élus devrait constituer un avertissement.

    C’est là le refrain bien familier de “soldier go, soldier come”, tel qu’il a été chanté par le chanteur révolutionnaire nigérian, feu Fela Anikulapo Kuti. Par exemple, la junte militaire dirigée par le Capitaine Daddis Camara en Guinée-Conakry est revenue sur sa promesse de tenir des élections en 2009, promesse qui avait été faite au moment ou elle est arrivée au pouvoir après la mort de Lansana Conté et l’effondrement de son régime impopulaire en décembre 2008. Depuis, la junte guinéenne est en fait partie à l’offensive contre les forces d’opposition qui s’étaient liguées contre Conté. Lors du Lundi noir d’octobre 2009, une manifestation de masse contre la tentative de Camara d’accéder à la Présidence a été brutalement réprimée. Cet instant de folie complète à l’intérieur du stade national de Conakry a été une sorte de reprise du massacre de la place Tiananmen, les soldats tuant plus d’une centaine de gens et violant des femmes en public.

    Les éléments ouvriers doivent noter qu’une telle situation pourrait se développer au Niger. Ils doivent également noter que l’expérience du Niger pourrait elle-même se dérouler à nouveau dans d’autres pays ou des dirigeants soi-disant civils ont fini par arranger la Constitution et par décontenancer les souhaits du peuple. Chez nous au Nigéria, l’incapacité du Président Yar’ Adua, gravement malade, à quitter le pouvoir comme l’exige la Constitution, à cause de sa maladie, a plongé le pays dans une nouvelle crise politique, qui s’ajoute à la corruption, à la pauvreté et au chômage perpétuels en plus des vagues de licenciements et de la croissance du militantisme ethnique et religieux. Aujourd’hui, nous avons un Président invisible et un Président par intérim, un soi-disant Commandant en Chef que l’état-major militaire défie ouvertement. Ce genre de blocage politique sans marge de manœuvre peut à un certain moment, en l’absence d’une alternative politique et sociale viable apportée par la classe ouvrière, être exploité par l’armée pour une fois de plus prendre le pouvoir.

    Le Niger, en tant qu’ex-colonie française, souffre, comme beaucoup d’autres ex-colonies en Afrique, des divisions ethniques, de la corruption et de la pauvreté. C’est un pays principalement agricole, qui est toutefois riche en ressources minérales précieuses telles que l’uranium et le pétrole. Beaucoup de ces activités économiques dépendant de l’aide extérieure (a laquelle est liée des plans néolibéraux incluant des privatisations, la dérégulation et la hausse des prix des marchandises) de la part de pays impérialistes tels que la France, le Nigéria, la Russie, les Etats-Unis, la Russie et la Chine. Parmi les politiciens nigériens, la lutte pour le pouvoir revient à la lutte pour le contrôle des millions de dollars provenant de l’uranium, de la même manière que les pétrodollars définissent la politique au jour le jour des politiciens capitalistes nigérians. Il n’y a rien qui puisse suggérer que la nouvelle junte ne va pas poursuivre ce pillage tout en imposant des mesures d’austérité à la population.

    Le Niger n’a qu’une petite population ouvrière, mais malgré cela, elle pourrait remplir le vide politique en fournissant l’alternative d’une plate-forme politique ouvrière qui utiliserait la solidarité pour construire un mouvement massif pour les masses, qui offrirait une alternative socialiste afin de remplacer la politique capitaliste néolibérale, et qui appellerait au soutien du mouvement ouvrier large dans toute l’Afrique occidentale et sur l’ensemble du continent africain.

    Les travailleurs et la jeunesse du Niger doivent revendiquer la fin immédiate de la junte militaire. En particulier, les travailleurs et les jeunes doivent lutter pour la convocation immédiate d’une Assemblée Constituante composée de représentants démocratiquement élus des syndicats, de la jeunesse, des partis politiques, des femmes, des communautés ethniques, etc. dont les fonctions seraient entre autres de rédiger une Constitution plus démocratique.

    Ceci devrait aussi constituer le premier pas vers des élections nationales véritablement démocratiques. Au cours de telles élections, le parti politique de la classe ouvrière devrait logiquement se présenter avec un programme qui s’oppose au néolibéralisme, incluant entre autres la nationalisation des secteurs-clés de l’économie sous le contrôle et la gestion démocratique des travailleurs. De cette manière, les ressources qui auraient autrement été pillées par la clique civilo-militaire pourraient être utilisées dans le but de pourvoir aux besoins de base de la population.

  • DOSSIER : Le cauchemar d’être femme au Congo

    L’histoire du Congo est turbulente et son actualité ne présente aucune stabilité. En ce moment, selon l’association Human Rights Watch, le Congo est le pire endroit au monde pour les femmes.

    Par Tina (Louvain)

    C’est le système qui en est la cause

    Dès le début de l’introduction du capitalisme, les énormes richesses naturelles de la région ont constitué une source permanente de conflits. Les impérialistes ont tout fait pour s’assurer le contrôle des nombreux gisements dont le Congo est riche. Au sein du système capitaliste, seuls les profits sont pris en compte et tout le reste – comme la qualité de vie de la population – est sacrifié afin de garantir l’enrichissement d’un petit groupe.

    Pour garantir l’exploitation de la population, les gens sont montés les uns contre les autres sur tous les terrains possibles: origine, sexe,… C’est le principe du diviser-pour-mieux-régner et, effectivement, l’exploitation prend des formes des plus épouvantables là où les gens sont les plus ligués les uns contre les autres. La division assure qu’aucun rapport de forces ne soit construit contre la classe dominante. De cela, la situation au Congo – où la faillite du capitalisme est douloureusement claire – en est un cas d’école.

    En leur temps, pour pouvoir exploiter la population, les autorités belges – en tant qu’impérialistes et représentants des intérêts du capital – ont monté les différents groupes ethniques les uns contre les autres, sous couvert d’éducation et de ‘‘civilisation’’ de la population locale. Les tensions ethniques ont au contraire tout à voir avec la manière artificielle dont les communautés tribales ont été divisées en différents Etats, l’impérialisme remettant en général le pouvoir aux mains d’un groupe minoritaire dans la population. C’est par exemple le cas de la minorité Tutsi au Rwanda, ce qui au final a conduit au génocide de 1994.

    Mais hommes et femmes ont également été ligués les uns contre les autres en donnant aux hommes certains droits sur leurs femmes. Le ‘‘code familial’’, par exemple, instituait la règle selon laquelle les femmes devaient obtenir la permission de leur mari pour toutes sortes de choses. La législation du travail a bel et bien été réformée pour que les femmes ne doivent plus aujourd’hui demander l’autorisation de leur mari pour aller travailler mais, selon ce code familial, il est encore toujours prévu qu’une entreprise qui engage une femme à l’insu de son mari doit licencier celle-ci et verser l’indemnisation à son mari. Les femmes sont donc complètement dépendantes de leur mari pour leur subsistance.

    Les conflits – qui remontent tous déjà à l’indépendance du Congo en 1960 – créent une nouvelle division: les hommes abandonnent leur famille pour participer aux conflits (pour bon nombre, par nécessité, la seule alternative étant le chômage) et les viols de femmes sont utilisés comme une arme de guerre. Les femmes violées sont répudiées par leur mari. Tout cela a pour conséquence que les véritables ennemis – les puissances étrangères, les impérialistes et les multinationales – peuvent continuer leur travail de pillage des richesses du Congo sans être inquiétées le moins du monde.

    L’horrible histoire du Congo

    C’est au 15e siècle qu’a commencé le commerce entre l’Afrique centrale et l’Europe, principalement le commerce d’esclaves, qui a ‘‘exporté’’ un grand pourcentage de la population. Cela a marqué le début de la régression et de la pauvreté pour le Congo. Lorsqu’au 19e siècle les Européens ont pour la première fois été explorer par eux-mêmes l’intérieur des terres africaines, les impérialistes tels que le Roi des Belges Léopold II ont procédé au partage de l’Afrique en 1885, lors de la Conférence de Berlin (à laquelle étaient présents 14 pays européens et les Etats-Unis). Lors de ce partage arbitraire de l’Afrique en colonies, il n’a absolument pas été tenu compte des zones tribales préexistantes.

    Le Congo est ainsi devenu propriété personnelle du Roi Léopold II, qui a pu devenir scandaleusement riche sur base du caoutchouc et d’autres richesses naturelles convoitées. On estime que près de 5 millions de Congolais ont péri entre 1885 et 1908 – dans l’extraction du caoutchouc et d’autres matières premières – des suites de maltraitance, de l’exploitation et des maladies. Sous la pression internationale, le Parlement belge a dû reprendre la colonie au Roi Léopold II en 1908. La situation s’est bien très légèrement améliorée, mais n’était de toute façon plus viable à long terme. La population s’est révoltée et a forcé l’indépendance du Congo en 1960. Toutefois, les commandants à la tête de l’armée congolaise étaient toujours belges.

    On commémore en ce moment un peu partout le cinquantième anniversaire de l’indépendance du Congo. Mais il n’y a aucune raison de se réjouir. Avant 1960, c’était l’impérialisme qui déterminait ce qui se passait au Congo et, après 1960, cela n’a pas changé. Ce ne sera que lorsque le Congo se sera libéré des puissances impérialistes et que les Congolais se seront eux-mêmes appropriés les richesses du pays par la nationalisation des secteurs-clé de l’économie que le pays sera véritablement indépendant.

    C’est l’anti-impérialiste de gauche Lumumba qui est devenu le premier Premier Ministre du Congo. Les autorités coloniales belges et les autres puissances impérialistes occidentales, particulièrement les Etats-Unis, voyaient d’un mauvais œil ce qu’ils considéraient comme une menace. Ils craignaient que Lumumba ne cherche à se rapprocher de l’Union Soviétique. Lumumba a donc été assassiné, dans des circonstances qui n’ont toujours pas clairement été élucidées, ce qui a permis l’arrivée au pouvoir de Mobutu en 1965 via un coup d’Etat et avec l’aide de la CIA. En pleine guerre froide, Mobutu a ainsi établit au Congo la dictature que les puissances impérialistes occidentales ont pu utiliser dans le cadre de la lutte contre le ‘communisme’ dans toute l’Afrique centrale. Ce coup d’Etat a marqué le début d’une guerre civile continuelle, toujours en cours aujourd’hui, qui a eu notamment pour conséquence le niveau de vie misérable que connaît la population congolaise, et les congolaises en particulier.

    La dictature de Mobutu au ‘Zaïre’ – avec son régime de parti unique – a pris fin avec la prise de pouvoir de Laurent-Désiré Kabila en 1997, mais cela n’a hélas signifié aucune amélioration pour la population congolaise. Cet évènement a surtout été l’expression du fait qu’avec la Chute du Mur de Berlin, une dictature n’était plus nécessaire aux yeux des puissances occidentales, puisque la menace d’une alliance avec l’Union Soviétique avait complètement disparu. Du coup, plus rien ne se dressait sur la route de l’impérialisme qui s’est même mis à prôner une forme de démocratie (ambigüe) – et pas seulement au Congo.

    L’espoir qu’un changement puisse se produire avec la prise de pouvoir par Kabila a vite dû être abandonnée. Bien que le Congo soit une des régions les plus riches au monde, pas la moindre de ces richesses ne revient au peuple, qui travaille pourtant très dur afin de les extraire. Cela fait déjà des décennies que les multinationales réussissent à poursuivre l’exploitation des richesses du Congo avec le soutien des régimes installés et soutenues par elles.

    Avec des mesures socialistes, comme la planification démocratique de l’économie afin de développer le pays et la nationalisation des secteurs-clé de l’économie et des mines, la population congolaise pourrait enfin profiter d’une vie stable et de qualité. Ce n’est qu’ainsi que pourront être satisfaits les besoins de la population tels que la paix, de bons soins de santé, un logement, un travail décent,…

    En guise d’éducation politique, Kabila senior avait été formé à l’école de la théorie stalinienne des ‘deux stades’. Selon cette théorie, les pays sous-développés doivent d’abord devenir des pays capitalistes bien développés avant même d’envisager leur transition vers le socialisme. C’est pourquoi Laurent-Désiré Kabila a entamé des négociations avec les investisseurs capitalistes et qu’il a commencé à mener une politique de plus en plus dans la ligne de celle de Mobutu.

    Sans rupture claire avec le capitalisme, il n’est pas possible pour un pays tel que le Congo de se développer autrement que comme une colonie. Dans le cadre du capitalisme, ce sont les intérêts des multinationales qui priment, et ces mêmes multinationales continueront à investir dans des armées rebelles et à soutenir des seigneurs de guerre pour leur permettre l’accès aux précieuses ressources naturelles du pays. Seule une rupture immédiate avec le capitalisme et l’instauration d’une société socialiste au service de la majorité de la population pourra assurer la véritable indépendance du pays ainsi que l’autodétermination des Congolais.

    La désillusion de la population congolaise par rapport à Kabila senior a finalement ouvert la possibilité de le mettre de côté, avec le soutien du Rwanda et de l’Ouganda, en 1998. Cela a constitué le début d’une guerre civile sanglante au cours de laquelle près de 7 millions de victimes sont tombées (surtout dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu). Ici aussi, il était question des richesses naturelles congolaises. Ainsi, plusieurs multinationales ont soutenu différents seigneurs de guerre afin de représenter leurs intérêts. Sur le plan national, l’espérance de vie est passée à 45,8 ans et, au Nord-Kivu, à 43,7 ans. 73% de la population congolaise vit dans la pauvreté. En 2008, plus d’un million de Congolais étaient au chômage. Le Nord-Kivu a en outre été touché par des phénomènes tels que l’utilisation massive d’enfants-soldats et la violence sexuelle. Les Nations-Unies estimaient le nombre de viols à 350 par mois. Selon les sources locales, ce chiffre s’élevait cependant à plus de 800 viols en avril 2008.

    La situation des femmes au Congo

    Parce que beaucoup d’hommes sont impliqués dans ces conflits armés, ont perdu la vie ou se sont enfuis, ce sont les femmes qui, au Congo, forment la base du tissu social. Par leur travail, elles font tourner l’ensemble de la société. Et c’est justement le Congo qui, selon Human Rights Watch, est le pire endroit au monde pour les femmes. Elles sont massivement touchées par les viols, la violence, l’analphabétisme et la misère.

    Selon l’expert en droits de l’homme Yakin Erturk, les atrocités actuelles au Congo vont bien au-delà des viols. Les femmes subissent l’esclavage et sont victimes de viols collectifs, d’incestes forcés (souvent en présence de membres de la famille et de la communauté), de meurtres et de cannibalisme. Marie-Noël Cikuru – fondatrice de l’organisation d’aide aux femmes Vision d’Espoir – explique que le viol au Kivu n’est pas une forme de violence ordinaire des hommes contre les femmes, mais est une arme stratégique afin de détruire le tissu social existant.

    Il y a des villages dans lesquels presque chaque femme a été violée. Les blessures physiques sévères, les cauchemars, les troubles psychosomatiques,… ont pour conséquence qu’énormément de femmes ne peuvent ou ne veulent plus travailler. Souvent, elles sont mises au ban de la communauté et n’ont pas accès à des soins de santé. Pourtant, les coupables ne sont jamais ou rarement punis. Soit les femmes n’osent pas s’adresser a la justice, soit la procédure prend tellement de temps qu’elles abandonnent. Et, évidemment, la condamnation des coupables n’est pas une garantie en soi. Pour éviter que de pareils actes ne se reproduisent à l’avenir, il faut éliminer les causes de ces atrocités.

    L’alternative

    Il est impossible de surmonter cet état d’urgence dans le cadre de ce système – qui en est lui-même responsable. Marie-Noël Cikuru tente avec Vision d’Espoir d’offrir une aide aux femmes des régions montagneuses. Médecins Sans Frontières organise aussi de telles initiatives. C’est évidemment une bonne chose, mais peu de gens sont touchés et il s’agit plus d’une lutte contre les symptômes que d’une solution fondamentale.

    Déjà en 2000, Anne-Marie Mpundu, coordinatrice de la commission électorale indépendante congolaise a Bruxelles, et Marie Bapu, experte en genres pour le programme de développement des Nations Unies (UNDP), avaient déjà placés leurs espoirs dans la résolution 1325 des Nations-Unies au sujet du rôle des femmes, de la guerre et de la paix. Diverses conférences et actions ont été organisées autour de ce thème. Pourtant, cela n’a entraîné aucun changement fondamental. Depuis que le résultat de ses recherches ont été soumis au Conseil pour les Droits de l’Homme en 2007, Yakin Erturk n’a, elle non plus, rien pu changer de fondamental à la situation des femmes au Congo.

    La seule manière de ramener la stabilité au Congo est de rompre avec un système où la soif de profits prime sur les gens et sur leur environnement. Dans une société socialiste, il ne serait pas question de l’occupation de régions, mais de droit à l’autodétermination pour chacun. En outre, chacun devrait avoir accès à l’enseignement, à un logement, aux soins de santé, à un travail décent, à des transports gratuits et décents,… Les horreurs qui se produisent aujourd’hui au Congo seraient impossibles dans une telle société.

    Il faut des organisations ouvrières démocratiques qui surmontent les divisions ethniques et de genre. Les travailleurs, les paysans et les pauvres doivent lutter ensemble contre la maltraitance par les rebelles, par les clans, par les troupes du gouvernement et par les forces étrangères. Seules des mesures socialistes telles que la collectivisation de l’extraction des ressources afin de mettre les richesses à la disposition de l’ensemble de la société peuvent offrir une issue au cauchemar capitaliste qui prend des formes de plus en plus grave au Congo.

    Comme nous l’avons déjà écrit dans l’article La nouvelle alliance pro-impérialiste entre Kabila et Kagamé scellée avec le sang congolais :

    ‘‘Ces guerres et ces exactions sont le résultat de luttes inter-impérialistes. La seule manière de mettre fin à cette situation est de rompre définitivement avec l’impérialisme et le capitalisme. La MONUC, bras armé de l’impérialisme, hors du Congo! Pour un Congo libéré de l’impérialisme et la possibilité pour les congolais diriger leur pays en toute indépendance; indépendance qui passe par la réappropriation des secteurs-clés de l’économie par le peuple congolais! Cette lutte, seules les masses pauvres des villes et des campagnes peuvent la mener. Pour la création d’organisations ouvrière et des masses pauvres des villes et des campagnes. Pour un Congo socialiste dans une Fédération socialiste des Etats d’Afrique centrale incluant le Rwanda et l’Ouganda, seul gage d’une véritable paix juste et durable dans la région!»

    Tant que nous demeurons dans le cadre du capitalisme, aucune amélioration ne pourra être obtenue concernant la situation des femmes. Ni au Congo, ni ailleurs.


    Témoignages

    Yakin Erturk, expert de l’ONU pour les droits de l’homme: «Les atrocités perpétrées par ces groupes armés sont d’une brutalité inimaginable et elles vont bien au-delà du viol […] Les femmes sont violées par des groupes violents, souvent en présence de leurs familles et de la communauté. Dans de nombreux cas, les hommes de la famille, sous la menace d’armes à feu, sont forcés de violer leurs propres filles, mères ou sœurs».

    Selon Yakin Erturk, les femmes sont souvent abattues après avoir été violées, ou leurs organes sexuels sont mutilés au couteau. Les femmes qui ont survécu à des mois d’esclavage racontent que leurs tortionnaires les forçaient à manger leurs excréments ou la chair de leurs proches assassinés.

    Il affirme encore qu’en 2007, 4.500 cas de violence sexuelle ont été enregistrés dans la région, mais que le nombre réel est probablement beaucoup plus élevé.

    L’hôpital Panzi à Bukavu, près de la frontière rwandaise, reçoit chaque année 3.500 femmes souffrant de fistules et d’autres problèmes génitaux dus aux sévices subis, déclarait Erturk, qui a cité l’exemple d’une fille de 10 ans qui a dû subir une opération d’urgence parce qu’un bâton avait été enfoncé dans son vagin.

    Marie-Noël Cikuru, du centre d’aide Olame, est responsable de la campagne pour les droits des femmes à Bukavu, capitale provinciale. Elle raconte: «Au Kivu, les viols ne sont pas un acte de violence ordinaire des hommes contre les femmes, mais se produisent de manière systématique et intentionnelle, ils sont une véritable arme stratégique. Il y a des villages dans lesquels on ne peut trouver aucune femme qui n’ait été violée. Mais pour nous, la femme est le moteur de la famille. Pouvez-vous vous imaginer ce que cela provoque ? Des centaines d’individus avec des lésions physiques graves, des cauchemars et des troubles psychosomatiques, qui sont exclues, qui ne peuvent plus travailler ? Cela signifie que l’ensemble du tissu social se désagrège.»

  • Nigéria : Répression après les meurtres commis par la police

    Le 7 avril, la police a arrêté Dagga Tolar, le secrétaire de la section de Lagos de la Labour and Civil Society Coalition (LASCO – Coalition du travail et de la société civile) et membre du Democratic Socialist Movement (DSM, CIO-Nigeria), de même qu’Akpos Okoro et Aderemi Ismail, membres de la section d’Ajegunle du DSM.

    Segun Sango, secrétaire general du DSM (CIO-Nigeria)

    Le DSM condamne ces arrestations et appelle au relâchement immédiat de ces activistes ainsi que de ceux qui ont été arrêtés et sont détenus depuis les protestations non-violentes du 3 avril.

    Ces militants ont été arrêtés dans les locaux du président du gouvernement local d’Ajeromi, Mr. Kamal Bayewu, qui les avait invités pour un meeting consacré à la crise que traverse actuellement la communauté. Ces arrestations sont liées aux protestations qui se sont tenues le 3 avril, à la suite du meurtre de Charles Okoroafor par la police le 1er avril, au centre d’Ajegunle. Le 3 avril, les protestations étaient non-violentes jusqu’à ce que la police tire brutalement sur les protestataires en laissant 4 jeunes décédés.

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    L’impact de la compagne international de solidarité: les militants relâchés !

    La police de Lagos n’a retenu aucune charge criminelle contre Dagga Tolar et les deux autres camarades du DSM (CIO-Nigéria) arrêtés ce mercredi. La police a également relâché Presque tous les jeunes arrêtés depuis le meurtre du 1er avril.

    La champagne international de protestation qui a immédiatement commence à l’arrestation des camarades du DSM a joué un rôle clé. Le DSM remercie tous ceux qui y ont participés.

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    Les autorités policières, qui ont depuis qualifié sans vergogne les manifestants de “voyous”, ont commencé depuis le 3 avril une champagne d’arrestations et de détention illégale dans le voisinage. Ils passent aussi de maison en maison pour rechercher les militants. Avant les arrestations du 7 avril, environ 30 jeunes ont été arrêtés et la police prévoit d’imposer des condamnations criminelles. Le porte parole de la police de Lagos, Frank Mba, a déclaré dans la presse que les jeunes arrêtés pour les protestations du 3 avril avaient sur eux des pistolets, des munitions, des couteaux, etc.

    Ainsi, Dagga Tolar, qui est aussi président de l’Association des auteurs nigériens (ANA) à Lagos, et d’autres seront accusés d’infractions pénales dans le but de leur interdire d’être libérés sous caution.

    Le 5 avril, Dagga Tolar avait participé à une grande conférence de presse massivement relayée dans les médias et organisée par la section de Lagos de la LASCO pour dénoncer les meurtres et exiger, entre autres, la justice pour les victimes et la fin des brutalités policières à Ajegunle et ailleurs.

    Nous exigeons la libération immédiate et inconditionnelle de Dagga Tolar et des autres activistes. Nous mettons au défi la police de les trouver coupables de quoi que ce soit. La police s’est embarquée dans une série d’arrestations arbitraires et illégales de militants destinée à couvrir les crimes de la police.

    Nous appelons les autres organisations de défense des droits du peuple à rejoindre la lutte pour mettre fin à la répression contre les habitants d’Ajegunle et pour la condamnation des officiers de police responsables de la mort de Charles Okoroafor, Tunde Olotu et bien d’autres. Nous exigeons la libération immédiate et inconditionnelle des personnes arrêtées dans le cadre des protestations du 3 avril. Le responsable de la police d’Apapa, Kenneth Ebirimson, qui a ordonné les tirs contre les manifestants, doit être démis de ses fonctions, arrêté et condamné.

    Nous rejoignons la Coalition du travail et des droits civils (LASCO) pour exiger :

    • Une enquête publique immédiate effectuée par une commission compose de représentants des syndicats, des organisations de défense des droits de l’homme, des organisations de quartier et d’ONG pour éclaircir les circonstances qui ont conduit aux décès de Charles Okorafor, Tunde Olotu et d’autres.
    • Pour une enquête sur la morts de ces jeunes
    • Pour l’arrestation immédiate et la condamnation des officiers de police impliqués dans la mort de Mr. Charles Okorafor , Tunde Olotu et des autres.
    • Pour le libération immédiate et inconditionnelle des personnes arrêtées dans le cadre des protestations.
    • Le déplacement des policiers qui ont servi plus de 4 ou 5 ans à Ajegunle, de même que tous ceux qui ont été engagés dans ces raids illégaux.
    • L’arrestation immédiate de Kenneth Ebirimson, le responsable de la police à Apapa, qui a ordonné de tirer sur les manifestants le 3 avril.
    • La fin immédiate des brutalités policières à Ajegunle et dans d’autres communautés dans le pays ainsi que des raids, de l’extorsion d’argent et des emprisonnements illégaux quotidiens.
    • Pour un salaire minimum qui ne descende pas sous les 52, 200 N, comme l’exigent les syndicats pour tous les travailleurs, y compris les officiers de police et les membres des forces de l’ordre, pour décourager les activités d’extorsion d’argent par la police.
    • Pour un syndicat démocratique de la police, qui puisse organiser les officiers de police pour lutter pour de meilleurs conditions de vie et de salaire.
    • Pour une police démocratique contrôlée par la communauté où les responsables seraient élus par les officiers de police de base ainsi que par les représentants de la communauté et soumis à la révocation directe à tout moment et qui gagne le salaire d’un travailleur qualifié.
    • Pour l’instauration de services juridiques locaux et d’Etat qui fournissent des services légaux gratuits pour que tous puissant avoir accès à la justice.
    • Comme mesure immédiate pour prévenir de tells évènements désastreux, le DSM plaide pour la formation de comités démocratiques de défense de la communauté composés de membres des syndicats, de militants socialistes, d’activistes de la communauté et de jeunes.

    Nous appelons à l’envoi de lettres de protestations aux autorités policières du Nigéria et aux ambassades du Nigéria à travers le monde. Là où cela est possible, des protestations devant les ambassades du Nigéria seraient appréciées. Des appels peuvent être donnés à l’Inspecteur générale de la police, Ogbonna Onovo (+234 803 304 1483) et au responsable des forces de police Emmanuel Ojukwu (+234 803 830 5707) pour demander la libération immédiate des personnes arrêtées, sans poursuite judiciaire. Les officiers de polices suivants peuvent être appelés pour enregistrer les protestations: Mervel Akpoyibo, Lagos State Commissioner of Police (+234 803 301 1052) et Frank Mba, Lagos State Police Public Relations Officer (+234 803 837 5844).

  • Algérie : Révolte de masse et actions de grève continuent de secouer le pays

    Les travailleurs et les pauvres ont besoin de leur propre voix politique

    Bien que peu rapporté dans les médias traditionnels, le début de l’année 2010 a été marqué par une intensification des luttes par les travailleurs et les pauvres d’Algérie. L’énorme ressentiment et la frustration sont à la hausse en raison de l’aggravation constante des conditions de vie, la montée en flèche du chômage (selon certaines estimations, le chômage des jeunes atteint 66%) et la hausse incessante du coût de la vie. A cela s’ajoute le manque de droits démocratiques et la corruption systématique de la classe dirigeante et de la bureaucratie. Toutes ces questions sont de plus en plus à l’agenda sur la place publique dans tous les coins du pays.

    Chahid Gashir, CIO

    Jusqu’à présent, le régime du président Abdelaziz Bouteflika a manié la carotte et le bâton pour tenter de faire cesser les nombreuses protestations, les émeutes des jeunes et la grève des travailleurs: forte répression, menaces et intimidations systématiques ont été déployés, en particulier contre les grèves, y compris des poursuites, les arrestations arbitraires, les suspensions de salaires, des menaces de dissoudre les syndicats appelant à la grève, et les menaces d’exclusion des services publics. Après l’éruption de grèves importantes ces derniers mois, ces méthodes ont révélé les faiblesses du régime et ses craintes de perdre le contrôle de la situation, surtout si l’ «artillerie lourde» de la classe ouvrière entrait en scène avec caractère plus généralisé.

    D’autre part, la crise aiguë du logement – dans la capitale, Alger, plus de 45.000 personnes vivent dans 600 bidonvilles – et les explosions sporadiques et locales de colère liées à cette question ont forcé le régime à prendre certaines mesures pour reloger les familles afin de freiner l’incendie. Dans la plupart des cas, cependant, ce genre de «concession» a convaincu de nouvelles couches de battre à leur tour le pavé. Se référant à l’annonce par les autorités que de nouvelles maisons seraient allouées à des centaines de familles dans le quartier pauvre de Diar Echem, dans la commune d’El Madania (Alger), le journal El Watan, a fait remarquer que «les exigences contaminent désormais chaque ghetto d’Alger». La même idée a été exprimée par Le Jour d’Algérie: «Le relogement des habitants de Diar Echem après le soulèvement a finalement créé un précédent et soulève la menace de la propagation des protestations. Les gens pensent maintenant que pour être admissible à une maison, vous devez aller dans la rue. "

    Alice au pays des merveilles … ou l’autoroute de l’enfer?

    Les médias officiels cachent ce qui se passe sur le front social et font l’éloge du régime politique. Mais la réalité est le contraire de ces mensonges honteux. Dans l’un de ses éditoriaux récents, El Moudjahid, l’une des voix officielle du régime et ardent défenseur des politiques de Bouteflika, a offert une image du pays qui semble être tirée d’Alice au pays des merveilles: "En une décennie, l’impact sur le terrain de l’amélioration des conditions de vie de la population, grâce au programme du Président de la République, est incroyable. Partout où vous allez, il n’y a pas un domaine qui n’a pas bénéficié d’une action ou l’autre des nombreux projets destinés à lutter contre la précarité du logement, pour améliorer l’infrastructure dans des domaines comme les transports, travaux publics, éducation, santé, sport, tourisme, culture, et ainsi de suite."

    Cela sonne comme une blague cynique à la population, comme les 12.000 habitants du plus grand bidonville d’Alger, qui se sont révoltés contre leurs conditions de vie misérables et pour le droit à des logements décents, qui ont seulement rencontré la brutale répression des forces antiémeutes, qui ont tiré des grenades lacrymogènes dans leurs maisons. Les gens de ce bidonville ont décrit comment leurs enfants, parfois physiquement déformés et souffrant de problèmes chroniques de la peau en raison de la terrible insalubrité, sont contraints de marcher à travers les eaux usées, les décharges, les vieux pneus, et odeurs nauséabondes sur leur chemin de l’école tous les matins. Ils ont dit qu’ils ont fait porter des bottes à leurs enfants la nuit "pour les empêcher de se faire mordre par les rats".

    Les travailleurs ripostent: les enseignants et les professionnels de la santé en première ligne.

    Depuis plusieurs mois, les travailleurs du secteur public, les enseignants et les médecins en particulier, ont été engagés dans une grève prolongée et massive, appelée par les syndicats indépendants. Ces syndicats indépendants, bien que n’étant pas officiellement reconnus par le gouvernement, sont de plus en plus le canal par lequel la classe ouvrière exprime sa colère. L’UGTA syndicat officiel est totalement incapable de mener toute forme de résistance. Il a longtemps été totalement discrédité en tant que fonctionnaire du régime, et a ouvertement trahi lors des récents contentieux.

    Par leur position et exigences, les travailleurs expriment les sentiments de larges couches de la population. C’est pourquoi le gouvernement a déployé toute une série de mesures visant à empêcher ces «mauvais exemples» de se propager, et d’entrainer une radicalisation.

    Depuis le début de l’année scolaire, les enseignants ont été dans une mobilisation intense, avec une longue série de grèves courageuses. Notamment, ils exigeaient une revalorisation de leurs salaires et la pleine reconnaissance de leurs syndicats. En outre, le manque de personnel enseignant est devenu un problème critique, avec une moyenne nationale de 44 élèves par classe dans les écoles secondaires, atteignant parfois 65. Cette situation a atteint un tel point absurde que certaines écoles ont été fermées pendant des années parce qu’il n’y a pas suffisamment de personnel pour les ouvrir.

    Les grèves dans le secteur de l’éducation ont fait face aux intimidations constantes du régime. Au cours de leurs protestations, certains enseignants grévistes ont été sauvagement battus par la police. Cela s’est accompagné d’une offensive de propagande: un flux constant de mensonges, de publication de faux chiffres de salaires des enseignants, ou les décrivant comme des «privilégiés», sacrifiant l’avenir de leurs élèves en les empêchant d’étudier. Malgré cela, la participation massive des enseignants grève de la a été maintenue. La dernière grève, qui a débuté le 24 Février, a vu 93% des 500.000 travailleurs de ce secteur au niveau national participant, avec 100% de taux de participation dans presque toutes les écoles des wilayas (régions) de Annaba, Guelma, Souk-Ahras et El-Tarfwas , 98% à Tizi-Ouzou, 93% en Bejaia, 95% à Boumerdès, etc

    Le ministère de l’Éducation nationale prétend que pratiquement personne ne s’est mis en grève dans certains domaines, et que les enseignants en grève ont été totalement isolés. Mais pourquoi développer une telle batterie d’intimidation et de propagande si le mouvement était si marginal? Le gouvernement a alors utilisé des moyens légaux pour tenter de briser le mouvement. La grève a été déclarée «illégale» par un verdict d’une cour le 3 Mars. En dépit de ces menaces croissantes et permanentes, les enseignants ont poursuivi leur grève en grand nombre. Le ministre de l’éducation a ensuite appelé à la suspension de tout enseignant poursuivant la grève.

    Dans la même veine, les praticiens de la santé publique sont en grève illimitée depuis près de quatre mois, pour un salaire décent et une révision de leur statut. Une grève de cette ampleur dans ce secteur est sans précédent. D’une part, la grève a été accueillie avec une vague importante de soutien et de sympathie des gens ordinaires et des travailleurs. D’autre part, elle a été frappée par la répression de l’Etat, et par les attaques contre le droit de grève. A plusieurs reprises, les médecins fait face aux interventions brutales de la police lors de leurs manifestations, avec quelques manifestants grièvement blessés, combinée à une campagne d’accusations visant à isoler leur lutte. Toutefois, ces mesures n’ont pas été en mesure de briser la ténacité et la combativité des médecins. Enfin, à la fin du mois de Mars, le ministre de la Santé a eu recours aux tribunaux afin de déclarer la grève «illégale», et a annoncé le licenciement de tous les travailleurs qui continuent de défier l’autorité.

    Contagion

    Accompagné par d’autres grèves importantes au début d’année, ces conflits encouragent d’autres secteurs à prendre le chemin de la lutte avec leurs propres exigences. À la fin Janvier, 126,000 chauffeurs de taxi ont fait une grève nationale de deux jours. Les travailleurs de la formation professionnelle ont été engagés dans une grève nationale de trois jours à partir du 22 Mars. Les conducteurs de train à Alger se sont spontanément mis en en grève le 28 Mars pour demander une augmentation de salaire. Les travailleurs du Conseil local, forts de 500.000 travailleurs du public, ont décidé d’aller sur une grève nationale de deux jours le 30 Mars, pour dénoncer la «dégradation des conditions de travail et du pouvoir d’achat". Ils ont l’intention d’avoir une grève de trois jours renouvelable à partir de la deuxième semaine du mois d’avril. Le régime n’a pas le temps de s’occuper d’un litige qu’un autre est en développement dans un autre secteur. «Les différends commencent à ressembler à des éruptions volcaniques à partir de laquelle la lave se répand à travers tout le pays." (El Watan, 15 Mars)

    Plus que jamais, la nécessité vitale d’une lutte unifiée doit être mise à l’ordre du jour! Une grève nationale de tous les travailleurs du secteur public pour une augmentation des salaires réels, la pleine reconnaissance de syndicats indépendants, et pour la défense du droit de grève, pourrait être une première étape pour unir les différents secteurs ainsi que dans un front uni contre les tentatives du gouvernement pour faire taire la voix de la classe ouvrière.

    Les bas salaires de la majorité, l’enrichissement d’une mince couche privilégiée

    La question des salaires a été le point de départ pour de nombreux litiges. Tout au long des années 1990, sur demande du FMI, le régime algérien a fortement dévalué la monnaie nationale (le dinar), ce qui réduit à l’extrême les salaires réels des travailleurs et de leurs familles. Entre 1990 et 2000, la valeur du dinar a chuté de 500%! En outre, la libéralisation du commerce a ouvert la porte à toutes sortes de spéculateurs qui ont fait artificiellement monter les prix des denrées de base, afin de faire des profits sur le dos des plus pauvres. Les masses algériennes ont subi des hausses de prix record, en particulier dans les denrées alimentaires, des produits comme les fruits, les légumes, le sucre, l’huile de cuisson, le beurre et le café, etc, selon l’Office national de statistiques, les prix des produits agricoles ont augmenté en moyenne de 20,54% en 2009. Par exemple, en l’espace de quelques mois seulement, les légumes secs ont vu leurs prix augmenter de plus de 70%. «Une« explosion »de la population est sérieusement à craindre, parce que les familles, les travailleurs salariés, et même la classe moyenne ne peuvent pas boucler la fin du mois.» (El Watan, 21 Février)

    Bien qu’il n’y ait soi-disant pas de place pour une augmentation des salaires misérables des travailleurs, ou accorder des subventions décentes pour les chômeurs et les retraités, il y a beaucoup d’argent pour remplir les poches des propriétaires de l’entreprise et des politiciens. Au cours de l’ère Bouteflika, les députés et ministres ont été régulièrement récompensés par des augmentations de salaires généreux (le dernier étant à 300%), tandis que certains des plus pauvres dans la société sont affamés. En outre, les multinationales et l’ensemble de la couche des« Nouveaux riches » étrangers ont fait fortune en profitant des réformes néolibérales mises en œuvre au cours des deux dernières décennies, y compris le démantèlement et la privatisation des anciennes entreprises d’État. Une source officielle proche du ministère des Finances a admis: "En fait, dans les fortunes douteuses et de nouvelles prises, il y a un peu de tout: l’argent du terrorisme, les enlèvements, les extorsions de fonds, l’économie informelle. Mais il y a aussi des gens qui s’enrichissent en toute légalité. Ce n’est pas interdit."

    Il y a également eu une avalanche de scandales de corruption et de fraude qui a frappé au cœur du régime: les chefs du cabinet, les directeurs de sociétés nationales, des membres ou ex-membres du gouvernement, etc. Un des scandales très médiatisés met en cause l’administrateur en chef de la compagnie pétrolière appartenant à l’état, Sonatrach. Enrageant les travailleurs et mettant la crédibilité du régime en jeu, ces scandales sont d’ailleurs révélateur que, dans la partie supérieure de la société, il y a une lutte interne pour le pouvoir dans les coulisses entre les factions de l’armée et le service de renseignement militaire, et la clique de Bouteflika, pour préparer l’ère post-Bouteflika.

    Pour l’unité de la classe ouvrière! Pour un parti de tous les travailleurs, des opprimés, et des pauvres!

    Les efforts de l’équipe nationale de football sont régulièrement utilisés pour déclencher le sentiment patriotique. Et l’élite dirigeante (dont une partie provient encore de la vieille génération des dirigeants du FLN de la guerre d’Algérie) essaie toujours d’exploiter le profond sentiment anticolonialiste afin de se doter d’une nouvelle dose de légitimité. Toutefois, ces tentatives pour opérer un détournement de la crise sociale va rapidement atteindre ses limites.

    La classe ouvrière et les pauvres font preuve d’une disposition extraordinaire à se battre. Grève après grève, protestation après protestation, celles-ci transforment le pays en une marmite sociale prête à exploser à tout moment. Quelle que soit les réponses du gouvernement, elles ne seront pas suffisantes en soi pour empêcher les travailleurs, les chômeurs, les jeunes et les pauvres de montrer en masse qu’ils sont de plus en plus déterminés à lutter pour un avenir meilleur. La base sociale du régime a été ébranlée. Ceci le force à augmenter la répression avec la propagande qui décrit les luttes des masses comme une minorité voulant «déstabiliser le pays».

    Cela pourrait avoir un certain impact si le front des travailleurs reste divisé, et leurs actions cloisonnées. La propagande du régime contre les enseignants en grève a été en mesure de trouver des oreilles grandes ouvertes, car ils étaient en quelque sorte isolés et ont souffert d’un manque d’action coordonnée de leurs propres syndicats. Les enseignants en grève aurait dû inclure des exigences pour obtenir le soutien d’autres secteurs, et les lier avec leurs luttes et leurs préoccupations. Par exemple, une position claire sur des questions comme le manque de transport public pour envoyer leurs enfants à l’école (en particulier dans les zones rurales), aurait pu trouver un soutien massif des étudiants et leurs parents, en présentant en même temps un moyen de créer de nombreux emplois utiles pour les chômeurs dans ces zones.

    Une stratégie claire et globale pour aller au travers la propagande du gouvernement et de sa politique de diviser pour mieux régner est absolument vitale. Pour ce faire, la classe ouvrière a besoin de ses propres organisations et structures à travers lesquelles ces stratégies pourraient être démocratiquement discutées et mises en place. La formation de comités de lutte démocratiques doit être établie dans les lieux de travail et les communautés, pour organiser une réponse générale des ouvriers, des pauvres et toutes les personnes qui en ont assez de l’état actuel des choses.

    Sans un programme politique clair et des structures permettant d’unifier les luttes, l’énergie des masses court le risque d’être gaspillée. Pire que cela, le désespoir dans certaines couches de la population, et l’aliénation de certaines sections de la jeunesse, pourraient être détournées vers des conflits entre les communautés de travail. Cela s’était déjà produit l’année dernière avec les violents affrontements du peuple algérien contre les immigrants chinois qui travaillent dans la capitale et d’autres domaines. Il est urgent qu’existe un parti qui puisse jouer le rôle de «concentrer toutes les gouttes et les ruisseaux du ressentiment populaire en un gigantesque torrent unique», comme disait la célèbre formule de Lénine. Un tel parti pourrait devenir la jonction entre les différentes actions des travailleurs et les nombreuses protestations locales pour l’amélioration des infrastructures et des conditions sociales. En dernière analyse, pour que ces batailles soient victorieuses, ils devront faire face à la puissance politique et les intérêts de l’élite capitaliste. En d’autres termes, ils auront besoin de retirer les ressources du pays des mains de la mince couche qui les contrôlent à l’heure actuelle, et les mettre dans les mains de la classe ouvrière.

  • L’impérialisme a endeuillé la Coupe d’Afrique des Nations

    Ce 8 janvier 2010, le bus transportant l’équipe de football du Togo a été attaqué par les indépendantistes du Mouvement de libération cabindais (FLEC) en traversant le Cabinda pour se rendre en Angola, le pays organisateur de la Coupe d’Afrique des Nations (C.A.N.). Cette fusillade meurtrière a fait trois morts dont l’entraineur adjoint de l’équipe togolaise. Après le retour au pays des joueurs demandé par le gouvernement togolais, la confédération africaine de football a disqualifié l’équipe du Togo.

    José Eduardo Simba et Boris Malarme

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    Football et business sur fond de misère et de famine

    L’Afrique et de nombreux jeunes et travailleurs partout dans le monde ont vécu pendant trois semaines au rythme de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) organisé en Angola. La moitié du milliard d’habitant qui peuple le continent suit cette fête du foot africain.

    Mais ne dites plus CAN mais « CAN Orange ». Pas pour la couleur du maillot de la Côte d’Ivoire mais pour la multinationale française de téléphonie mobile, déjà partenaire des Lions Indomptables camerounais, qui est déjà présente dans 15 pays en Afrique et qui, pour renforcer cette position, a déboursé 60 millions d’euros pour devenir le sponsor officiel des compétitions africaines pendant 8 ans.

    Comme autre sponsor on retrouve PepsiCo, Standard Bank, Nasuba Express, Adidas et Samsung. Les droits de télévision et le sponsoring de la CAN 2010, commercialisés par l’agence de marketing Sportfive pour la période 2008-2012, pèsent 400 millions d’euros. L’arrogance des multinationales n’a pas de limite. Evoquant le drame survenu à l’équipe togolaise, Christophe Bouchet, directeur général de Sportfive, a déclaré qu’il « n’avait senti aucune fébrilité » de la part des sponsors.

    Les jeunes diamants du football africain suscitent la convoitise : 60 recruteurs venant de tous les clubs les plus prestigieux (qui sont aussi évidemment aussi les plus riches) sont présents. Pour ces entreprises cotées en bourse, ces joueurs ne sont rien d’autre qu’un moyen de faire de (gros) profits pour leurs actionnaires. Entre toute cette manne financière d’un côté et la misère ambiante de l’autre, le contraste est saisissant.

    Beaucoup de pays africains qui connaissaient une forte croissance économique avant la crise ont vu celle-ci se transformer en stagnation voire en récession. La période de « boom » n’a cependant pas profité à tous : pendant que les multinationales s’engraissaient, la population subissait les attaques néolibérales, s’appauvrissant toujours un peu plus. L’Angola, pays organisateur de la CAN, est confronté à un manque criant d’infrastructures (écoles, hôpitaux,…) et à la privatisation de ses secteurs publics (eau, électricité,…). 68% des Angolais vivent sous le seuil de pauvreté. Pendant ce temps, les multinationales dictent leurs lois au nom du profit.
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    L’Angola et le Cabinda, tous deux des protectorats portugais, jusqu’à leur indépendance en 1975ont été mis sous une administration coloniale commune en 1956. Le Cabinda, enclavé entre la République démocratique du Congo et le Congo-Brazzaville, est aujourd’hui la province la plus riche d’Angola. L’Angola a été une zone de conflit entre l’impérialisme américain et l’Union Soviétique. Depuis, comme dans beaucoup d’autres parties de l’Afrique, la lutte entre impérialistes pour le contrôle des ressources a engendré des tensions et des divisions nationales et ethniques. Derrière la guérilla nationaliste cabindaise, on retrouve les intérêts français. Tandis que le gouvernement angolais est, lui, sous le joug des Etats-Unis.

    Le Cabinda détient d’énormes richesses naturelles (pétrole, minerais, diamant) qui ne profitent ni à sa population ni à celle des autres parties de l’Angola. 60 % du pétrole angolais sont produits au Cabinda, dans la « Pointe Noire » et représentent 42% du PNB angolais et 90 % du budget de l’Etat. Mais ces énormes richesses sont pillées par les impérialistes et la bourgeoisie nationale. La plus vieille concession pétrolière du Cabinda « Bloc Zéro » (qui représente environ un tiers de la production cabindaise) est exploitée par une joint-venture composée de la société publique angolaise SONANGOL qui détient 41% des parts, une filiale de la multinationale américaine Chevron (pour 39%) et les multinationales pétrolières française, Total, et italienne, ENI, qui détiennent chacune environ 10% des parts.

    Pendant que les multinationales engrangent des profits immenses, les travailleurs et les masses pauvres, tant au Cabinda qu’ailleurs en Angola, sont confrontés au chômage et au manque d’infrastructures, d’écoles, d’accès aux soins, … Le secteur public, comme la distribution de l’eau ou le secteur de l’électricité sont privatisés. Près de 80% de la population vit sous le seuil de pauvreté au Cabinda pour une moyenne de 68% pour tout le territoire angolais. L’élite angolaise et les multinationales ont la main mise sur toute l’activité économique. La bourgeoisie cabindaise ne peut mettre fin à la domination impérialiste dans la région. Les actions guerrières et de terrorisme individuelle du FLEC pousse les travailleurs angolais à soutenir la répression du gouvernement et de l’armée au Cabinda.

    Il est impossible de résoudre la question nationale au Cabinda sous le capitalisme. Sur base de ce système, une déclaration d’indépendance du Cabinda provoquerait probablement une nouvelle guère civile vu l’importance économique de la région par rapport au reste du territoire Angolais. La nationalisation du secteur pétrolier et des ressources naturelles sous contrôle démocratique des travailleurs et des pauvres permettrait d’utiliser d’immenses richesses pour sortir la population de la misère et de la violence. Il faut construire les organisations du mouvement ouvrier au Cabinda et en Angola. Car c’est la seul force dans la société qui peut offrir une issue à la question nationale et aux problèmes sociaux pour les masses.

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