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  • Interview de Joe Higgins sur le NON irlandais

    Interview de Joe Higgins sur le NON irlandais

    Joe Higgins, porte-parole du Socialist Party (CIO-Irlande) et l’un des représentants du "non" au Traité de Lisbonne, était présent ces jeudi et vendredi à Bruxelles afin de protester contre la volonté des chefs d’Etats et de gouvernement d’éviter de prendre en compte le "non" irlandais au Traité. Il nous a également rendu visite, au secrétariat national du Mouvement pour une Alternative Socialiste, afin de discuter avec quelques-uns de nos membres du référendum et de la campagne du Socialist Party en Irlande. Nous ne pouvions le laisser partir sans une interview…

    Interview par Giuliano et Stéphane

    Socialisme.be : Tout d’abord, pourquoi un référendum en Irlande et pas dans les autres pays de l’Union européenne ?

    Joe Higgins : "Un référendum a eu lieu en Irlande et pas ailleurs, non pas parce que l’Irlande est un pays particulièrement démocratique, mais bien parce que les autorités politiques sont obligées de l’organiser pour tout changement de la Constitution. Dans les années ‘80, la Cour suprême a imposé la participation de la population pour toute modification constitutionnelle par voie de référendum."

    Socialisme.be : Que reproche-t-on au Traité de Lisbonne ?

    Joe Higgins : Premièrement, Le document fait 250 pages et il est extrêmement difficile à lire. Il est très difficile d’isoler les mesures d’austérité qui sont bien cachées dans le texte. Par ailleurs, le Traité prévoit l’annulation du droit de veto existant à l’heure actuelle sur les décisions en matière économique. Avec ce nouveau traité, une décision de commercialisation des domaines de la santé, de l’éducation, des services sociaux, et du culturel et de l’audiovisuel pourrait être approuvée au niveau européen malgré la décision contraire d’un Etat membre qui ne bénéficierait plus de son droit de veto. Si ce Traité entrait en vigueur, même si on arrivait à changer le gouvernement, celui-ci ne pourrait pas s’opposer à une décision comme celle de la libéralisation d’un service.

    Deuxièmement, ce Traité plaide pour un développement de l’industrie militaire ainsi que pour un changement radical de la politique étrangère de l’Union européenne. Celle-ci pourrait donc se montrer sur la scène internationale comme un gros bloc capitaliste capable d’intervenir pour défendre ses intérêts économiques, pour la lutte pour les matières premières par exemple. Le Traité prévoit l’instauration d’une force armée européenne sous un commandement unifié. La campagne était donc aussi une campagne contre l’impérialisme. Il est certain qu’on ne peut arriver à une paix généralisée avec le modèle militaire qui vient d’être rejeté par le peuple irlandais. Cette question était surtout importante pour beaucoup de jeunes et aussi de femmes pendant la campagne.

    Troisièmement, le Traité européen comprend la Charte des droits fondamentaux. Le Labour Party et les bureaucraties syndicales en Irlande ont mis en avant la nécessité d’adopter ce Traité car la Charte donnerait de nouveaux droits aux travailleurs européens. Mais il n’en est rien. Les travailleurs européens sont mis en concurrence entre eux et leurs conditions de vie et de salaires sont modelés sur ceux des travailleurs issus des pays où ils sont les moins élevés. Sur demande de certaines entreprises "victimes" de piquets de grève, la Cour européenne de justice (CJE) a plusieurs fois pris position contre les travailleurs s’opposants aux pressions patronales pour, notamment, des diminutions de salaire de ce type. Selon la CJE, les syndicats n’avaient pas le droit de militer contre ces entreprises. Donc, si la Charte prévoit des droits sociaux pour les travailleurs, elle prévoit aussi et surtout beaucoup de dispositions favorables au "big business". La CJE a d’ores et déjà choisi son camp. C’était également une question très importante pendant notre campagne.

    Socialisme.be : La complexité du texte a-t-elle favorisé la victoire du "non"?

    Joe Higgins : Cela a joué un rôle, mais pas le plus important. Le camp du "oui" explique sa défaite essentiellement par la complexité du texte que la majorité des irlandais n’a pas dû bien comprendre… C’est vrai qu’un texte compliqué écrit par des technocrates n’encourage pas à être approuvé par de nombreuses personnes. Mais cette analyse réduit le sentiment général présent en Irlande ; c’est le fondement même, la base du texte qui a stimulé le rejet.

    Le gouvernement et le camp du "oui" en général ont d’ailleurs stimulé la confusion en évitant de parler du contenu même du texte. Les sujets réels qui y sont abordés ont été déserté par la classe politique au profit de slogans tels que : "C’est dans notre intérêt" (Progressive Democrats) ou "Fier d’être irlandais. Oui à l’Europe" (Labour Party).

    Socialisme.be : Le début de la crise économique a-t-il influencé le vote?

    Joe Higgins : C’est clair que le début de la crise a dû peser sur le choix de beaucoup de travailleurs. Comme dans de plus en plus de pays européens, la valeur des maisons est en train de chuter, et 5.000 emplois ont été supprimés ces derniers mois dans le domaine de la construction. Mais, d’un autre côté, la conscience générale n’en est pas encore à des luttes militantes aujourd’hui.

    Socialisme.be : L’Irlande a été le premier pays européen à ouvrir ses frontières aux travailleurs immigrés ; la droite s’est-elle servie de ce thème dans la campagne?

    Joe Higgins : Ce n’était pas évident dans la campagne. Les organisations soutenant le "non" n’ont pas mis en avant cette question de l’immigration pour refuser le Traité. Mais certains disent que cela a eu une certaine influence sur la campagne. La campagne que le Socialist Party a menée n’a en tout cas laissé aucun espace pour ce type de thèmes. Nous avons mené une campagne vers la classe ouvrière, et la plupart des gens savent que les travailleurs immigrés sont utilisés notamment pour mettre une pression à la baisse sur les salaires en vigueur et que c’est l’élite et non les immigrés qui en sont responsables.

    Socialisme.be : Quelles sont les forces qui ont mené campagne pour le "oui" au Traité?

    Joe Higgins : Le camp du "oui" était mené par le gouvernement, composé du Fianna Fail, des Progressive Democrats, et du Green Party, bien que celui-ci soit divisé entre les deux camps, ainsi que par une partie de l’opposition : notamment le Labour Party et le Fine Gael. Les directions syndicales, l’Eglise catholique, très importante en Irlande, et, bien sûr, le "big business" étaient également dans la campagne pour le « oui ».

    Donc, d’un côté, on a la classe politique : sur les 166 députés, 160 ont soutenu le Traité. De l’autre, on a la population qui a dit "non" à 53,4%…

    Socialisme.be : Et quelles étaient justement les forces qui s’opposaient au Traité?

    Joe Higgins : Les deux plus grosses organisations politiques qui ont mené campagne pour le "non" sont le Sinn Féin et le Socialist Party. Par ailleurs, une nouvelle formation politique de droite, Libertas, créée il y a quelques mois, a également soutenu le "non" au référendum. Son fondateur est un millionnaire, voire milliardaire, qui s’est enrichi dans le processus de démantèlement de l’économie planifiée de certains Etats de l’Est de l’Europe, notamment l’Albanie. Libertas défend le faible taux de taxation imposé aux entreprises en Irlande, actuellement de 12,5%. Un des ses principaux arguments de campagne consistait à dire que, avec le Traité, ce serait impossible pour l’Irlande de garder un taux de taxation aussi bas. Mais le Traité n’intervient en aucun cas dans ce domaine.

    Socialisme.be : Le camp du "non" était-il uni dans la campagne?

    Joe Higgins : Même si une coupole rassemblait les différentes organisations s’opposant au Traité ("Campaign against the EU constitution"), chaque composante de ce camp a mené campagne de son côté, avec son propre matériel et ses propres arguments. Libertas a ainsi dépensé la modique somme d’un million d’euros. Le profil de cette organisation dans la campagne était donc extrêmement fort, très visible. Le Sinn Féin, avec ses députés, bénéficiait également d’une tribune très importante. Mais en Irlande, la loi oblige aux médias de donner le même temps de parole aux deux camps, ce qui a permis à notre organisation d’apparaitre publiquement assez souvent.

    Ainsi, quatre porte-paroles du "non" se sont dégagés dans la campagne : un représentant de Libertas, un eurodéputé du Sinn Féin, un représentant du Green Party et moi-même. J’ai ainsi pu profiler le Socialist Party dans de nombreux débats à la télévision et à la radio avec des ministres et des partisans du "oui".

    Socialisme.be : Comment les membres dans les sections locales du Socialist Party se sont-elles impliquées dans la campagne?

    Joe Higgins : Notre campagne a surtout été menée dans les grandes villes où nous sommes le plus présent : Dublin, Cork, Limerick et Galway. Nous avons organisé de nombreux meetings dans ces villes qui ont rassemblé plusieurs centaines de personnes. Nous avons également fait de nombreux stands de rue avec des pancartes, des tracts et notre journal, dans lesquels toute notre argumentation contre le Traité était développée. Nous avons également été invités dans des meetings publics, notamment sur différentes universités.

    C’était une très très bonne campagne, et le résultat est important pour notre organisation. Nous avons évidemment pu faire des contacts, dont une vingtaine sont très intéressés pour rejoindre le Socialist Party.

    Socialisme.be : Que va-t-il se passer maintenant?

    Joe Higgins : Il est clair que la bureaucratie de l’Union européenne n’accepte pas la décision du peuple irlandais. Ils sont en train de chercher, à moitié cachés, une manière de contourner le résultat qui est une claque pour toute l’élite européenne. Ils vont peut-être essayer de modifier quelques points du texte actuel, mais pas les fondements, seulement la décoration. Avec éventuellement l’idée de resoumettre le texte à un référendum, par exemple début 2009. Il est possible que la bureaucratie européenne tente "d’acheter" Libertas, en changeant l’un ou l’autre point contesté par celui-ci, afin d’essayer "d’assurer" une majorité favorable au Traité.

    Socialisme.be : Selon toi, quelle va être la réaction de la population si un nouveau référendum est organisé?

    Joe Higgins : Une proportion importante de la population irlandaise va être très en colère. Le gouvernement aura encore plus de mal à faire changer d’avis cette catégorie de gens. Mais il essayera de jouer avec ceux qui pourraient baisser les bras, et cela pourrait pencher en faveur du "oui".

    Mais il faut regarder le contexte : nous sommes en période de crise économique en Irlande. Par endroits, les travailleurs commencent à entrer en lutte, et si ces luttes prennent de l’ampleur pendant le référendum, cela pourrait être très difficile pour le gouvernement irlandais…

    Socialisme.be : Le Socialist Party va-t-il se présenter aux élections européennes dans un an?

    Joe Higgins : Bien sûr, et ce sera l’occasion pour nos membres de continuer à mener cette campagne et de construire notre organisation.


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  • 3 millions de pauvres en Belgique!

    La première page du Télémoustique de cette semaine (21-27 juin) est sans équivoque: "La Belgique est dans la rue – Déjà 3 millions de pauvres – MAIS OU VA-T-ON? – Témoignage d’un pays qui souffre." Un article de 7 pages qui vient admirablement compléter le dossier du même magazine de la semaine dernière sur la grande fraude fiscale. On aimerait que d’autres médias pourtant réputés plus sérieux aient autant les yeux en face des trous…

    Le premier paragraphe donne le ton : "Alors que ses dirigeants sont englués dans la panade communautaire, la Belgique d’en bas n’en peut plus. L’escalade de la vie fait grimper la pauvreté en flèche. Y compris chez ceux qui travaillent…"

    Ici, on est loin des études qui relayent la propagande patronale et selon lesquelles nous n’aurions pas à nous plaindre. Pensons à celle de Mr Philippe Defeyt – ancien secrétaire fédéral d’ECOLO et actuel président du CPAS de Namur (!) – qui argumente, sur base du fait que nous travaillons autant de minutes aujourd’hui qu’en 1983 pour acheter quelque chose, que rien n’a changé et que le mouvement pour plus de pouvoir d’achat est avant tout un mouvement d’humeur. Sans revenir sur toutes les critiques que nous avons déjà mises en avant dans différents articles, rappelons que la production a, elle, terriblement augmenté (dans quelles poches s’est engouffrée toute cette richesse que nous produisons en plus ?). Rappelons aussi que le nombre de pensionnés et de pauvres (officiels comme non-officiels) a lui aussi, terriblement augmenté.

    Et c’est avec ce constat que commence le dossier du Télémoustique. Il y a en Belgique 1.470.000 pauvres selon les statistiques officielles, soit un septième de la population. "Mais ce chiffre, déjà insupportable, est calculé sur la base d’un seuil de pauvreté qu’on peut franchement qualifier de complètement ridicule : est considéré comme pauvre l’isolé qui dispose d’un revenu inférieur à 860 euros par mois ou le ménage avec deux enfants (!) qui gagne moins de 1.805 euros net par mois. Qui peut vivre avec de telles sommes aujourd’hui ? Les statistiques sont complètement dépassées par la réalité." Le journaliste, Vincent Peiffer, poursuit en faisant remarquer que les données disponibles sont, en plus, datées de 2006, soit avant la flambée actuelle des prix…

    Selon la plupart des spécialistes interrogés pour l’article, tout isolé ou ménage qui n’a pas réussi à joindre les deux bouts, à fournir le strict nécessaire à ses enfants et à lui-même, est considéré comme pauvre. Sur cette base, la pauvreté a explosé en Belgique. Déjà confrontée à la hausse des coûts du logement, la population est depuis une année sous les coups des augmentations des prix de l’énergie et de l’alimentation. "Tous nos interlocuteurs sont d’accord : on peut estimer que la Belgique compte aujourd’hui… 3 millions de pauvres. Sans risquer de se tromper."

    Une situation destinée à évoluer… dans le mauvais sens !

    Il faut encore rajouter ceux qui s’en sortent à peine et pour qui la pauvreté n’est pas bien loin. "Ceux-là basculeront dans la pauvreté au moindre accroc (maladie, accident) et si le coût de la vie (logement, énergie, alimentation) continue de s’envoler. Et plus tard, puisque l’épargne leur est déjà impossible, beaucoup ne pourront compter que sur leur pension légale et rejoindront les rangs déjà bien serrés des «retraités pauvres»." Précisons juste qu’une récente étude de l’Université d’Anvers pointe une montée aigüe de la pauvreté parmi les pensionnés. D’ici 2016, 40% des plus de 75 ans seront sous le seuil officiel de pauvreté si la politique actuelle est maintenue… Pour l’instant, environ un quart des pensionnés sont officiellement pauvres.

    Vincent Peiffer aborde après le cas des "working poors" (voir notre article à ce sujet). "Avoir un emploi n’immunise plus contre la précarité. Depuis quelques mois, de plus en plus de travailleurs pauvres font appel aux CPAS et aux maisons sociales." Histoire d’illustrer ce phénomène neuf, Télémoustique donne la parole à Fabienne Perot, coordinatrice du Centre liégeois de service social : "Récemment, une dame en procédure de divorce est venue nous trouver. Elle travaille à temps plein et gagne 1.250 euros net. Quand elle a payé son loyer, la nourriture, quelques vêtements, les dépenses médicales et un abonnement de transport pour aller travailler, il ne lui reste presque plus rien! Or, sa séparation implique des frais. Elle ne peut donc pas payer les provisions de chauffage et d’électricité. Son fournisseur va lui mettre un compteur à consommation minimale. Ce qui, vu l’état de santé de sa fille, est inenvisageable. Même si sa fille n’était pas malade, elle ne s’en sortirait pas. Elle n’a pas de vacances, pas de loisirs, aucune dépense de plaisir alors que cette dame travaille à temps plein! Et 1.250 euros, c’est un salaire très courant!" Que rajouter de plus ? Plus de pouvoir d’achat par plus de salaire et une hausse des allocations…

    L’eau deux fois plus chère en 2008 par rapport à 2000…

    Et un endettement endémique

    Une étude du groupe Sud-Presse est ensuite relayée. Cette étude a comparé l’augmentation des prix de l’énergie et de l’eau pour deux familles types belges entre 2000 et 2008, à consommation égale. Les dépenses en eau ont ainsi doublé et le chauffage au mazout coûte trois fois plus cher. L’électricité coûte 70% plus cher qu’en 2000 et le gaz 110% plus cher…

    Pour Fabienne Perot : "Ce qui est tout à fait nouveau depuis une petite année, c’est que le CPAS est sollicité par des personnes qui travaillent mais n’arrivent plus à assumer leurs factures de gaz et d’électricité. Avant, nous n’avions que des gens défavorisés. Et là, il y a une grosse affluence de travailleurs qui demandent une aide alimentaire pour pouvoir payer leur énergie. Ce sont des familles monoparentales avec un salaire régulier ou même des ménages à deux revenus, mais modestes. Ceux-là non plus ne s’en sortent plus. Nous accordons l’aide alimentaire quand la personne dispose de moins de 7 euros par jour pour s’alimenter. Quantité de personnes qui travaillent n’ont même plus 7 euros par jour pour s’alimenter…"

    L’article révèle ensuite que près de 340.000 Belges étaient considérés comme endettés en 2007, uniquement pour les crédits à la consommation et les emprunts hypothécaires, sans compter les dettes de soins de santé, d’énergie et les arriérés de consommation. "Fin 2007, 491.000 contrats de crédits défaillants étaient répertoriés auprès de la Banque nationale de Belgique. Et c’était avant la grosse flambée des prix de la consommation… Les spécialistes craignent un surendettement qui toucherait 600.000 à 700.000 Belges fin 2008."

    Cet article est encadré de différents autres, plus petits, qui abordent l’arrivée de l’aide sociale même dans des régions riches, la situation des parents isolés, les loisirs, le logement,… Impossible ici de tout reprendre sans continuer à recopier l’intégralité du dossier, ce que nous avons déjà largement fait ici.

    La conclusion vaut cependant son pesant d’or : "La grogne se transforme petit à petit en sentiment d’écœurement. Sentiment attisé par l’apathie de décideurs embourbés dans la bisbille institutionnelle. Attisé aussi par les salaires indécents de certains patrons, les bénéfices pharaoniques de certaines banques ou entreprises, souvent les mêmes qui vendent leurs "services" et leurs produits beaucoup plus cher en Belgique qu’ailleurs en Europe. Quelque chose ne tourne plus rond. «Quand les gens qui travaillent commencent à ne plus pouvoir nourrir leurs enfants» prévient cette dame active depuis quinze ans dans un CPAS, «il faut craindre la révolte. On dit que le combat communautaire n’a jamais fait de morts, en Belgique. Il va en faire si ça continue. Indirectement.»"

    Ne vous contentez pas d’être en colère, luttez !

    Le constat tiré dans ce dossier est on ne peut plus correct. Il fait froid dans le dos. La question est de voir maintenant comme inverser la vapeur, comment récupérer la richesse produite à la sueur de notre front accaparée par les patrons, les banques et les actionnaires.

    La semaine d’action syndicale pour le pouvoir d’achat s’est terminée il y a maintenant un peu plus d’une semaine. Plus de 80.000 personnes ont défilé dans les rues du pays, beaucoup plus qu’initialement attendu, avec une forte présence de jeunes militants syndicaux et de femmes. Cette semaine était à peine terminée que, ce lundi, le personnel communal er régionnal de Bruxelles défilait avec plus de 2.000 manifestants, toujours sur la question du pouvoir d’achat. Continuons sur cette lancée !

    Yves Leterme a dit qu’il nous "comprend", mais qu’il a des problèmes plus urgents, comme Bruxelles-Hal-Vilvorde. Selon lui, il n’y a pas d’argent. Assez toutefois que pour accorder la déduction des intérêts notionnels : un cadeau de 3,5 milliards d’euros (selon les derniers chiffres cités) au patronat. S’il ne dépendait que des libéraux, cette somme serait encore augmentée. Si rien ne change, beaucoup de travailleurs sont sur la voie d’un hiver froid qu’ils subiront en ayant faim. La résistance de façade du PS à la logique de profit (PS qui a approuvé la chasse aux chômeurs, qui a voté le Pacte des Générations, qui a voté la déduction des intérêts notionnels, qui est directement responsable de la privatisation de Belgacom, des attaques dans l’enseignement,… et bien plus encore!) ne changera pas grand-chose.

    Une journée d’action nationale avec un mot d’ordre de grève nous permettrait de lutter tous ensembles: jeunes et moins jeunes, travailleurs et étudiants, hommes et femmes, Belges et immigrés. Cela clarifierait une bonne fois pour toute que la majorité de la population veut d’urgence des mesures pour plus de pouvoir d’achat. Que les partis établis essayent de mettre 80.000 personnes dans la rue pour BHV!

    Nous ne disposons malheureusement pas de notre propre prolongement politique. Comme aux temps du mouvement contre le Plan Global ou contre le Pacte des Génération, les revendications syndicales n’arrivent pas sur le terrain politique ce qui permet au gouvernement de simplement attendre que l’orage passe. Un parti de type "syndical" serait un outil important pour éviter que les partis traditionnels puissent continuer leurs jeux en occupant seuls la scène politique.

    Le MAS défend l’idée d’une journée d’action nationale après l’été avec un mot d’ordre de grève pour défendre entre autres une augmentation salarial fondamentale (au moins 1 euro de plus par heure en plus de l’index rétabli). Nous voulons sur le même temps poursuivre la discussion sur la nécessité d’une formation politique propre aux travailleurs et aux allocataires.



    Le MAS propose de considérer les revendications suivantes :

    • Plus de pouvoir d’achat par plus de salaire et des allocations liées au bien-être, pour que nous ne payons pas nous-mêmes nos augmentations comme avec des réductions de taxes : 1€ de plus par heure
    • Un index qui reflète réellement le coût de la vie, pas d’accords all-in
    • Abolition de la norme salariale, des accords interprofessionnels comme dans le passé, avec un seuil salarial et non un plafond (un minimum qui revient à tous, pour que les secteurs faibles puissent en bénéficier également)
    • Pour les collègues qui tombent hors de l’AIP: casser tout les accords salariaux de plus de 2 ans, tel que l’accord 2005-2010 dans le non-marchand
    • Une suppression de la TVA sur les produits de première nécessité
    • Un plan massif de construction de logements sociaux publics

    Pour financer cela :

    • Une forte répression de la grande fraude fiscale
    • Un impôt sur les grandes fortunes

    Ces dernières mois, nous avons pu constater à quel point il est désastreux de laisser des secteurs-clés tels que l’énergie et les banques à l’avidité du secteur privé. Quand des grandes banques se trouvent en difficulté, l’Etat peut alors soudainement intervenir. Pour nous, le contrôle de tels secteurs revient à la collectivité. Nous plaidons donc pour leur nationalisation sous le contrôle démocratique du mouvement ouvrier et de toute la collectivité.

  • NON, cela ne veut pas dire oui! IRISH TIMES

    Action au sommet européen

    Le NON irlandais au Traité de Lisbonne a été un choc pour l’establishment européen. C’était donc le sujet de discussion du sommet européen qui se tient actuellement à Bruxelles. Joe Higgins, porte-parole du Socialist Party et de la campagne du NON en Irlande, a milité à ce sommet européen en collaboration avec le MAS/LSP. Environ 25 militants étaient présents pour dire qu’un NON signifie bel et bien un NON.

    Article du quotidien irlandais "Irish Times"

    No side agrees Lisbon deal is dead

    Patrick Smyth, in Brussels

    The message from Sinn Fein’s Mary Lou McDonald MEP and the Socialist Party’s Joe Higgins to the summit leaders was largely the same. No means no, the people have decided, the treaty is dead, ratification should not proceed, we need a new treaty, they both echoed at separate press encounters in Brussels yesterday on the fringes of the European summit.

    Coir’s anti-treaty message was also delivered here by their spokesman Richard Greene.

    Ms McDonald said it was wrong to characterise what had happened as a political crisis – but a political crisis would arise if the public clearly saw that the “European Elite” was determined to ignore the people’s will and to press ahead with the treaty as it stood.

    She insisted that “another deal is possible” and emphasised the “sensible achievable” programme of demands that Sinn Fein says can be the basis of a new treaty.

    Speaking after her press conference she acknowledged that some of the demands relate to opt-outs or clarifications specifically for Ireland in terms of the familiar strategic issues raised by the campaign.

    But she said that an important part of their concern was also the direction of European policy as a whole – changes which affect Ireland alone would not be sufficient. There would have to be new clauses on social policy, on services and defence, and she insisted that in any future EU military structures Ireland would have to retain its place in decision-making and veto on operations, whether or not it was willing to take part in them.

    Mr Higgins, who confirmed that he will be contesting next year’s European elections, said that while the Sinn Fein list touched many of the common concerns shared by the Socialist Party, “no way will they be granted.”

    The purpose of the treaty was to pursue the neoliberal project of deregulation and privatisation, and there was no way that the sort of assurances working people wanted would be met by the EU’s conservative governments.

    “If the €80 billion poured into arms was put into social services and health care, that would be another matter. But it won’t happen,” he said, acknowledging that it was unlikely his party would find itself supporting a revised treaty..

    Coir in a statement said that what was needed was “a new direction not a rehashed treaty”. The group argues that any new document should be put to all the people of Europe for a vote. It should substantially shift power back from the commission to member-states and should leave the right to decided workers rights, taxation and immigration policy at national level.

    Coir also calls for the scrapping of the Charter of Fundamental Rights because “it does not recognise the right to life from conception or support the natural family.”


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  • NON, cela ne veut pas dire oui! vidéo

    Action au sommet européen

    Le NON irlandais au Traité de Lisbonne a été un choc pour l’establishment européen. C’était donc le sujet de discussion du sommet européen qui se tient actuellement à Bruxelles. Joe Higgins, porte-parole du Socialist Party et de la campagne du NON en Irlande, a milité à ce sommet européen en collaboration avec le MAS/LSP. Environ 25 militants étaient présents pour dire qu’un NON signifie bel et bien un NON.

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  • NON, cela ne veut pas dire oui! Reportage photo 2

    Action au sommet européen

    Le NON irlandais au Traité de Lisbonne a été un choc pour l’establishment européen. C’était donc le sujet de discussion du sommet européen qui se tient actuellement à Bruxelles. Joe Higgins, porte-parole du Socialist Party et de la campagne du NON en Irlande, a milité à ce sommet européen en collaboration avec le MAS/LSP. Environ 25 militants étaient présents pour dire qu’un NON signifie bel et bien un NON.

    La campagne pour le NON du Socialist Party n’était clairement pas basée sur le nationalisme, mais sur la défense des droits des travailleurs

    Des membres d’ATTAC-Angleterre ont également été présents quelques temps.

    Des babrelés pour acceuillir la "libre expression".

    Le matériel du Socialist Party ne se limitait pas à quelques phrases, mais argumentait en profondeur sur la nécessité du NON au Traité de Lisbonne.

    Un conseil pour les dirigeants européens?

    "Nous ne voulons pas de traité simplifié, mais de vrais emplois, avec de vrais salaires!"

    "Résistance Internationale, contre l’Europe du capital!"

    Nathan Hertogen, du CAP, a également pris la parole après Joe Higgins


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  • NON, cela ne veut pas dire oui!

    Action au sommet européen

    Le NON irlandais au Traité de Lisbonne a été un choc pour l’establishment européen. C’était donc le sujet de discussion du sommet européen qui se tient actuellement à Bruxelles. Joe Higgins, porte-parole du Socialist Party et de la campagne du NON en Irlande, a milité à ce sommet européen en collaboration avec le MAS/LSP. Environ 25 militants étaient présents pour dire qu’un NON signifie bel et bien un NON.

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    Plus sur le NON irlandais

    Les membres et sympathisants du MAS/LSP intéressés par la campagne contre le Traité de Lisbonne et le travail du Socialist Party en Irlande sont les bienvenus aujourd’hui aux environs de 14h30 au secrétariat national du parti pour une discussion avec Joe Higgins.
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    Les dirigeants européens essayeront peut-être d’obtenir différemment l’application du Traité de Lisbonne, éventuellement après un nouveau référendum en Irlande avec un texte légèrement adapté dans lequel le fond resterait identique, à l’instar du Traité de Lisbonne vis-à-vis de l’ancien projet de Constitution européenne. Le refus irlandais a du mal à passer pour l’establishment politique, et il fera tout pour ne pas respecter cette décision démocratique. NON ne signifie apparemment pas toujours NON pour eux.

    En Irlande, le Traité de Lisbonne a été rejeté essentiellement parce que celui-ci poursuivait le projet néolibéral de l’Union Européenne. L’aversion face à cette politique néolibérale était aussi à la base du NON en France et aux Pays-Bas lors des référendums sur la Constitution européenne. Pour remédier à cela, la Constitution a été remodelée pour devenir un traité simplifié avec le même contenu, mais sans référendum cette fois en France et aux Pays-Bas. Ce n’est qu’en Irlande qu’un vote a pu être organisé et, malgré le soutien au OUI de la part de presque tous partis traditionnels, le camp du NON l’a emporté. Joe Higgins a été un des porte-parole centraux de la campagne du NON. A l’occasion du sommet européen, il est venu à Bruxelles pour continuer à militer contre ce traité. Nous nous sommes donc rendus dans les environs du sommet européen avec Joe Higgins et les journalistes irlandais sont arrivés pour quelques courtes interviews. Ensuite, la police a fermé le site, qui est devenu un espace de « libre expression » accessible par un grand détour. Espace de « libre expression » était un terme un peu fort au regard des barbelés… Cela n’étonnera personne dans une UE « démocratique » qui ne veut pas respecter le NON irlandais.

    Environ 25 militants et sympathisants du MAS/LSP étaient présents à cette action, scandant des slogans comme "nous ne voulons pas de traité silmplifié, mais de vrais emplois, avec de vrais salaires" ou encore "Résistance Internationale, contre l’Europe du capital." Joe Higgins a aussi parlé de l’importance du NON irlandais pour pousser la lutte contre le néolibéralisme plus loin, de la perspective internationaliste de cette lutte en vue de renforcer l’alternative socialiste. Le MAS/LSP a été clair : nous aussi, nous disons NON à Lisbonne, nous sommes solidaires du NON irlandais.

    Photos

    Joe Higgins clarifie pourquoi il vient milter au Berlaymontgebouw :

    Première prise de parole de Joe:

    Nous avions du matériel de campagne tout droit arrivé d’Irlande

    NON à Lisbonne: affiches en bannières du Socialist Party et du MAS/LSP

    L’action a été clôturée par une petit speetch de Joe Higgins

    Natan Hertogen, du CAP, a aussi pris la parole

    Petit cours de logique élémentaire pour les dirigeants européens: NON ne veut pas dire oui…

    Joe Higgins en discussion avec Jef Sleeckx:

    Liens:

  • Manifestation syndicale pour les services publics et le pouvoir d’achat

    Bruxelles

    Dans le cadre des actions menées tout au long de la semaine passée autour du pouvoir d’achat, c’est plus de 2000 travailleurs des soins de santé, CPAS et employés communaux qui sont partis en grève et ont manifesté ce lundi à Bruxelles à l’appel de la CGSP et de la CGSLB. Les manifestants revendiquaient une hausse de leur pouvoir d’achat, une revalorisation de leur statut, plus de personnel et de meilleurs salaires, ainsi que la gratuité des transports en commun pour se rendre au travail.

    Le succès des mobilisations de la semaine précédente a eu un effet déterminant dans la motivation et la combativité présente. On peut alors bien imaginer qu’avec un appel commun de tous les syndicats, la manifestation aurait eu encore plus d’ampleur.

    La détermination de lutter jusqu’à ce que soit obtenue satisfaction s’est clairement faite ressentir sur tout le long du parcours. La manifestation a duré plusieurs heures, en s’arrêtant devant chaque siège des partis au gouvernement afin de faire entendre la colère des travailleurs. Les différents partis se sont bien entendu renvoyés la balle et ont formulé quelques promesses creuses. Sous pression, la direction de la CGSP-ALR a donc dû déjà annoncer de futures actions en septembre si le gouvernement ne réagissait pas rapidement vis-à-vis de cette situation.

    De manière générale, la colère qui peut exister dans le service public quant aux conditions de travail ressortait très clairement dans les discussions. Des slogans pour la défense des services publics et pour de meilleurs salaires ont été scandés tout au long de la manifestation. Notre tract a d’ailleurs été extrêmement bien reçu et nous avons pu vendre une vingtaine d’exemplaires de notre journal.

    Le potentiel pour une lutte massive des travailleurs des services publics est fortement perceptible. La semaine d’action pour plus de pouvoir d’achat a constitué un bon début. Mais les travailleurs ne veulent pas s’arrêter là, ils veulent lutter et obtenir une victoire. C’est pour cela qu’il faut au plus vite discuter dans tous les lieux de travail d’un plan d’action et de la construction de l’unité la plus complète de tous les travailleurs dans la lutte, qu’ils soient bruxellois, wallons ou flamands. C’est pour cela aussi qu’il est important de construire une aile combative au sein de nos délégations qui pourrait construire ce rapport de force et faire aboutir nos revendications.


  • Le personnel communal et régional de Bruxelles en action

    Plus de pouvoir d’achat par plus de salaire!

    La semaine d’action pour le pouvoir d’achat était à peine terminée qu’une nouvelle manifestation s’est déroulée sur le même thème à Bruxelles ce lundi 16 juin. Le personnel des administrations communales et régionales bruxelloises était présent en nombre, environ 3.000 travailleurs, pour revendiquer une hausse des salaires, l’introduction de la prime mensuelle de bilinguisme dans les barèmes, des titularisations et la gratuité des transports en commun pour tous les Bruxellois. Le MAS était bien entendu également présent avec une petite délégation qui a vendu une vingtaine de journaux, diffusé notre tract et engagé sur ces base des discussions avec des dizaines de manifestants. Nous publions ici quelques photos.


  • Joe Higgins appelle à une action de protestation à l’occasion de la réunion du Conseil Européen à Bruxelles ce jeudi

    Joe Higgins appelle à une action de protestation à l’occasion de la réunion du Conseil Européen à Bruxelles ce jeudi

    Déclaration de presse de Joe Higgins et du MAS

    Ce jeudi, 19 juin, 16.00. A la fin de la Rue de la Loi, à l’entrée Parc du Cinquantenaire, dans le « zone free speech ». A proximité du bâtiment Justus Lipsius et du Centre de Presse Internationale.

    Joe Higgins, un des militants les plus en vue de la campagne du ‘Non’ au Traité de Lisbonne et ex-député du Socialist Party d’Irlande (de 1998 à 2006) appelle à une action de protestation devant le Conseil Européen ce jeudi à Bruxelles. Il sera assisté par des socialistes de gauche belges du Mouvement pour une Alternative Socialiste / Linkse Socialistische Partij et des militants syndicaux qui soutiennent le droit de la population irlandaise à dire « non » à Lisbonne.

    Le but de cette action de protestation est de dire aux chefs d’Etat de l’UE qu’en ce qui concerne le rejet du Traité de Lisbonne par le peuple irlandais, « Non » veut bien dire « Non ». Joe Higgins lancera aussi un appel aux militants syndicaux et aux travailleurs de toute l’Union Européenne pour qu’ils exigent de leurs gouvernements qu’ils cessent d’insulter le peuple irlandais et qu’ils respectent le résultat du référendum sur le Traité de Lisbonne.

    Joe Higgins a déclaré aujourd’hui : « Au cours du débat au sujet du Traité de Lisbonne, nous avons soulevé des questions qui sont d’une importance vitale pour tous les travailleurs de l’UE. Nous avons souligné à quel point ce traité donnera une impulsion à la politique économique néolibérale et de droite de l’UE et accroîtra encore la pression pour privatiser les services publics. Nous avons mis en avant la nécessité de renforcer les droits des travailleurs et de résister à `la spirale vers le bas’ dans ce domaine.

    « Il est clair comme de l’eau de roche que l’establishment de l’UE a l’intention de « travailler » la population irlandaise jusqu’à ce qu’elle change sa décision de rejeter ce traité. Il est tout aussi clair que nous ne pouvons pas faire confiance au gouvernement irlandais pour représenter les points de vue de la majorité de la population qui a rejeté Lisbonne. Nous lançons donc un appel aux travailleurs de l’UE pour qu’ils soutiennent leurs collègues en Irlande afin d’exiger que ce Traité ne soit pas imposé de manière malhonnête ni à eux-mêmes ni à l’Irlande. »


    Liens:

  • Le NON irlandais et la propagande des médias

    Rien que des mensonges

    Dans la presse, depuis vendredi dernier, c’est à qui qualifiera le plus les Irlandais d’égoïstes pour avoir rejeté le Traité de Lisbonne. Dans ce cadre, l’éditorial de l’édition du Soir du week-end dernier (“Référendum irlandais et roulette russe”, samedi 14 et dimanche 15 juin 2008) a réussi le tour de force d’être le pire que ce quotidien ait publié depuis l’époque du Pacte des Générations. Un grand bravo à son auteur, Maroun Labaki, à qui nous voulons expliquer l’une ou l’autre chose. Rions un peu…

    Nicolas Croes

    De la part du journaliste principalement chargé des affaires européennes au Soir, certains auraient peut-être attendu quelque chose de différent des habituelles diatribes contre les “Irlandais qui n’ont rien compris”. Et pourtant non. Mr Labaki enchaîne dans son billet des critiques qui ne font que confirmer son attachement aux valeurs chères à l’establishment: la mauvaise foi et l’arrogance.

    Un traité pour faire quoi ?

    “Depuis le début, l’Europe avance par à-coups. Avec le “non” irlandais, la prochaine embardée a été remise à plus tard. Mais face aux défis, pouvons nous encore attendre ?” Car, visiblement, c’est d’urgence qu’il s’agit ici. Mais urgence pour faire quoi ? Là est la vraie question à laquelle Mr Labaki, sans se distinguer de ses collègues, n’apporte aucune précision. Le fil conducteur entre tous les articles de la presse traditionnelle sur l’Europe est qu’il lui faut avancer. Dans quelle direction ? Et à quel prix en termes de lest jeté par-dessus bord ? L’Union Européenne apparaît sous la plume des journalistes comme un absolu abstrait contre lequel toute critique est mauvaise simplement du fait d’exister.

    “Pour nos beaux yeux, Chinois et Indiens vont-ils appuyer sur leur touche “pause” ? Les glaciers vont-ils se remettre au garde-à-vous ? La flambée des prix de l’énergie va-t-elle tourner au feu de paille ? La vague islamiste va-t-elle retomber en d’aimables clapotis ?” Cela en surprendra plus d’un, mais le Traité de Lisbonne permettait de faire tout ça. S’il était sincère en écrivant ces lignes, Mr Labaki sera honteux d’apprendre que plutôt de sauver le monde d’une multitude de problèmes (bien mal posés de cette manière d’ailleurs), le Traité de Lisbonne avait pour vocation de participer activement à la détérioration des conditions de vie de la majorité de la population. Explications :

    • L’article 188c.4 du traité de Lisbonne supprime le droit de veto, excepté dans des “circonstances exceptionnelles”, que peut exercer chaque pays membre contre le fait de pouvoir être forcé d’ouvrir la Santé, l’Education, et les services sociaux, de même que les services culturels et audiovisuels à l’intervention des multinationales, si une telle proposition émerge d’un accord de l’OMC. En clair, avec un vote à la majorité, cela signifie la possibilité pour le patronat de privatiser les parties les plus rentables de ces services. Avec les conséquences que l’on a déjà pu voir dans plusieurs domaines : nombreux sont ceux qui se rappellent que l’énergie devait être moins chère après la libéralisation du secteur…
    • Le protocole n°6 du Traité de Lisbonne déclare : “le marché intérieur comme établi dans l’article 1-3 doit assurer un système où la concurrence n’est pas faussée”. Et l’article 189 mandate l’UE pour assurer “l’abolition progressive des restrictions sur le commerce international et l’investissement direct étranger”. Cela veut dire que le droit pour les capitalistes du privé de commercer, faire du profit et exploiter devient un droit supérieur à tous les autres. Cool.
    • L’article 27.3 du Traité stipule que “chaque Etat membre doit s’efforcer de progressivement augmenter ses capacités militaires”. Il demande également plus de recherche et l’extension de l’industrie d’armement. Sans commentaires.

    Vive la démocratie !

    Mr Labaki, qui ne se rend pas bien compte de ce qu’il écrit ou n’a vraiment pas peur du ridicule, continue ensuite en déclarant : “«L’imagination au pouvoir»: plus que jamais, il faut espérer que nos dirigeants et nos experts en droit rivalisent de créativité. Pour que le Traité de Lisbonne, mort juridiquement ce vendredi 13, survive politiquement.” On se demande quelque peu à quoi cela sert de faire un référendum si c’est pour s’assoir dessus juste après. Mais bon, ce n’est pas la première fois que le respect de l’avis de la population est sacrifié par l’Union européenne. En 2001, le Traité de Nice avait été rejeté en Irlande, puis avait été soumis une nouvelle fois au référendum en 2002, sous prétexte que la participation n’avait pas été suffisante la fois précédente (35%). Manque de bol, vendredi 13 aidant peut-être, l’argument ne vaut plus cette fois-ci: le taux de participation a été de 53%.

    “Les Irlandais avaient évidemment le droit de dire «non».” Précision utile, parce que cela ne ressortait pas limpidement des quelques dernières lignes… “C’est démocratique.” C’est bien vrai. “La démocratie est cependant relative quand moins d’un million de citoyens imposent leur véto à un demi-milliard d’autres.” Patatras! Chassez le naturel et il revient au galop! Il faudrait quand même expliquer une bonne fois pour toute aux zélés (et fêlés) défenseurs du traité – dont une des caractéristiques principales est une mauvaise foi digne du Guinness Book – que les Irlandais n’ont pris en otage personne. Ils ont juste été les SEULS à qui on a demandé leur avis (et encore, sous obligation constitutionnelle et pas de gaité de cœur). Donc, pour être vraiment clair, sur la totalité des personnes qui ont été impliquée dans la décision, une majorité c’est prononcée contre. Point. Une majorité. Dans les autres pays, ce sont les parlementaires qui ont imposé leur vue à la population, en se gardant bien de susciter un véritable débat public. L’argument de la “minorité d’Irlandais contre le reste de l’Europe” n’a de valeur que comme exemple révélateur de la malhonnêteté intellectuelle de ceux qui y ont recours. Mais la vérité est, comme la démocratie, toute relative…

    “Au demeurant, c’est surtout la manière qui heurte. Bien sûr, l’Europe a ses défauts et le traité de Lisbonne est un chef d’œuvre de complexité. Tous, nous le voudrions plus glamour.” En termes de complexité, les 3 points repris ci-dessus expliquent très facilement la nature du Traité. La complexité n’apparaît que quand on veut faire avaler le texte en masquant sa finalité. Mais alors, le truc du “glamour”, ça, c’est pas mal. Une expression pareille, ça veut dire quoi ? “Qui possède un charme sensuel.” Que Mr Labiki ne s’en fasse cependant pas, pour le patronat, ce texte avait du charme à revendre. L’image des euros tombant par centaines de milliers, par millions, sur leurs comptes en banque est tout à fait sensuelle aux yeux des capitalistes. Mais rien ne sait être charmant à la fois aux yeux des travailleurs et à ceux des patrons qui les exploitent. Il faut choisir. Mr Labaki, lui, a choisi.

    “Mais à quoi les Irlandais ont-ils vraiment dit «non»? Nous devons à l’évidence chercher la réponse dans l’hétérogénéité du «non». Comme s’il s’agissait d’un grand défoulement collectif, ils ont dit «non» : à la mondialisation, à l’Europe bruxelloise, aux étrangers, aux pouvoirs, à la vie chère, à la vie moderne, à tout.” On pourrait rajouter “non” aux médias, qui tous étaient derrière le “oui” et qui, comme ici, ne servent que de collection de courroies de transmissions à la classe dirigeante. Certes, le camp du “non” n’était pas homogène. Mais, comme en France et aux Pays-Bas en 2005, c’est des quartiers ouvriers et des populations les plus pauvres que le “non” a surgit, de ces fondements de la société qui créent les richesses sans pouvoir en profiter. C’est ce genre de vol légal, basé sur la propriété privée des usines, entreprises, etc. qui a été rejeté. Se masquer derrière les gugusses nationalistes que les médias ont instrumentalisés pour cacher l’expression de classe du “non”, c’est tomber dans une facilité qui semble plaire particulièrement à Mr Labaki, tout au long de son article en tout cas.

    “Il y a un vrai problème avec ces référendums occasionnels, qui permettent les plus extravagants parasitages du débat public.” Eh oui, grande découverte : lorsqu’on demande son avis à la population, elle le donne, et pas nécessairement dans le sens qu’aimerait le pouvoir en place. “On se souvient que, en 2005, les Français et les Néerlandais avaient envoyé le projet de Constitution Européenne par le fond. A l’époque, on avait déjà dit qu’ils avaient voté sur le contexte davantage que sur le texte.” C’est que ce genre de texte détermine le contexte ; le contexte de privatisation, de néolibéralisme, de pauvreté croissante et de richesse accaparée par une minorité arrogante dont Le Soir, entre autres, s’érige en défenseur.

    On en arrive enfin à la conclusion, qui vaut de l’or et qui serait en droit de rejoindre la mauvaise foi susmentionnée au livre des records, dans la section consacrée au grotesque. “La politique et l’Europe sont choses sérieuses. Sauf le respect dû aux Irlandais, cessons de jouer à la roulette russe des référendums – dès lors qu’ils n’appartiennent pas réellement à nos traditions démocratiques. Et laissons nos parlementaires faire ce pour quoi nous les avons élus.” Merveilleux. Voilà une belle vision de la démocratie, voilà le portrait d’un défenseur du traité de Lisbonne. Cela est en soi un argument supplémentaire pour le “non”.

    Note : Aussi incroyable que cela puisse paraître, rien n’a été changé dans le texte de Mr Labaki, repris dans cet article intégralement et dans l’ordre.


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