Category: National

  • Comment stopper les requins capitalistes ?

    Il nous faut une riposte socialiste contre la dictature des marchés

    Si le mois de juin est habituellement celui des déclarations d’impôts, la fiscalité a cette année-ci été plus largement présente dans les médias. Ainsi, la Commissaire européenne Neelie Kroes (1) s’en est prise aux géants Apple, Google ou encore Amazon pour avoir délocalisé leurs profits vers des paradis fiscaux, en toute légalité. L’évasion fiscale était également l’un des grands thèmes de discussion des dirigeants des grandes puissances industrielles du G8 (2) réunis fin juin en Irlande du Nord. Alors, ça y est, on va enfin s’en prendre aux grandes entreprises et à leurs superprofits ?

    Edito de l’édition d’été de Lutte Socialiste, par Nicolas Croes

    Rien n’est moins sûr, et ce n’est pas une surprise. Face à la crise du système, les classes dominantes doivent parvenir à convaincre que la clé du problème est en marge du système et non pas en son cœur, tout en donnant l’illusion que les ‘‘grands’’ aussi vont devoir (un peu) payer. Bref, un beau tour de passe-passe destiné à détourner l’attention.

    Un simple dysfonctionnement ?

    Cette approche n’est pas sans conséquence, y compris à gauche où l’on trouve nombre d’analyses qui se contentent finalement de dénoncer le sommet fiscal de l’Iceberg sans aller au fond des choses. Le thème de la ‘‘justice fiscale’’ est ainsi un des points essentiels – si pas le seul dans certains cas – abordés par divers collectifs militants ou par les structures syndicales.

    Alors, évidemment, sur ce terrain, la situation est proprement aberrante. Le contrôle budgétaire de juin a abouti à un sixième effort budgétaire (en un an et demi !) de l’ordre de 526 millions d’euros pour boucler 2013 et 3,5 milliards d’euros doivent déjà être trouvés pour le budget 2014. Pendant ce temps, le fisc perd chaque année des sommes colossales à cause de la fraude et de l’évasion fiscales, sans oublier les différents cadeaux offerts aux patrons, tels que les Intérêts Notionnels (3). Mais comment croire qu’une meilleure fiscalité suffira à résoudre les problèmes de l’économie capitaliste ? Comment éviter l’évasion du capital vers d’autres pays ? Et comment traiter les 1.000 milliards d’euros d’actifs toxiques qui restent stockés dans les ‘‘bad banks’’ européennes (4) ?

    Il est légitime de prendre appui sur des thèmes qui révoltent de larges couches de la population, mais prendre appui signifie d’aller ensuite plus loin et de tracer la voie vers un autre type de société. Le système fiscal est très inéquitable, certes, et il est surtout impossible à réformer efficacement sans enlever aux riches les moyens de pression dont ils disposent: les leviers économiques majeurs que sont les secteurs de l’énergie, de la finance, de la sidérurgie,…

    Contre un cancer généralisé, l’homéopathie ne fonctionne pas

    Cette question fondamentale du contrôle public et démocratique des secteurs-clés de l’économie a disparu de l’analyse de la plupart des forces anti-austérité. Même dans les rangs syndicaux, on trouve de nombreuses déclarations contre le ‘‘capitalisme financier’’ et non pas contre le capitalisme tout court, à l’instar de la CGSP-Wallonne qui parlait de ‘’L’économie capitaliste [qui] est aujourd’hui dominée par la finance et la spéculation, cela mine l’économie réelle et détruit notre modèle social’’ dans le cadre de la journée d’action du 24 juin. La finance et la spéculation se nourrissent des réserves que les capitalistes ‘‘industriels’’ refusent d’investir à cause de la crise de surproduction du capitalisme. S’en prendre à la spéculation, cela signifie avant tout de leur couper leurs fonds d’approvisionnement, et donc de saisir l’argent qui dort sur les comptes des multinationales et grandes entreprises afin de répondre à la multitude de besoins sociaux qui manquent de moyens.

    Ce mois de juin fut aussi celui des révoltes extraordinaires en Turquie et au Brésil. Ces deux exemples ont, une nouvelle fois, exprimé que la colère peut se développer sous un calme apparent et s’exprimer ensuite massivement à la suite d’une petite étincelle. Reste à organiser cette rage et l’orienter contre le système lui-même. Là-bas comme ici, nous avons besoin d’un plan d’action offensif – basé sur des mobilisations de masse et des grèves générales – qui pose ouvertement les jalons vers une société où l’économie serait débarrassée de la logique de profit, une société socialiste démocratique.


    Notes

    (1) Commissaire européenne en charge des Nouvelles Technologies, citation extraite de ‘‘Europe : les géants d’internet invités à ne plus contourner le fisc’’, RTBF.be, 17 juin 2013.

    (2) Le ‘‘G8’’ ou ‘‘Groupe des 8’’ est un groupe de discussion et de partenariat économique qui réunit huit pays parmi les plus puissants au monde : les États-Unis, le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie, le Canada et la Russie.

    (3) En 2010, le fisc belge a perdu plus de 5 milliards d’euros de recettes à cause du système de la Déduction des Intérêts Notionnels. (Marianne.net, La Belgique, un paradis pour les multinationales françaises, 15 juin 2013)

    (4) LesEchos.fr, « Bad Banks » : une bombe de 1.000 milliards d’euros pour les contribuables européens, 17 juin 2013

  • A bas la monarchie, pour une république socialiste démocratique!

    L’abdication du roi Albert II n’est pas une complète surprise. Les nombreux scandales dans lesquels la famille royale s’est compromise ces dernières années avaient rendu une abdication de plus en plus probable. L’ascension du prince Philippe laisse peu de place à l’enthousiasme : le visage change, l’institution féodale reste…

    Par Tim (Bruxelles)

    Préparons nous à une escalade de propagande en mode Disney autour de la famille royale dans les médias dominants ces prochaines semaines. Quels invités royaux seront présents au couronnement de Philippe, quelle sera la couleur de la robe de la petite Élisabeth, quel chapeau portera la reine Fabiola,… les journaux seront vites remplis.

    En tant que socialistes, nous ne partageons pas ces sentiments romantiques pour la monarchie. Pour nous, la maison royale est en premier lieu une institution désespérément obsolète, une vieille relique de la société féodale adaptée au système capitaliste dans le but d’aider à défendre les intérêts et privilèges de l’élite capitaliste, et souvent même la partie la plus réactionnaire de cette élite.

    La monarchie belge : une création de la bourgeoisie et de l’impérialisme

    L’installation de la maison royale belge fut le résultat d’un accord entre la bourgeoisie belge et les puissances impérialistes les plus importantes de l’époque. Après le congrès de Vienne, en 1815, la Belgique constituait la partie sud du ”Royaume Uni des Pays Bas”. La Belgique était de loin la part la plus industrialisée du Royaume et a connu assez tôt le développement d’une importante classe ouvrière industrielle. Le mécontentement contre ce régime élitiste et réactionnaire combiné à l’extrême misère dans laquelle vivait la plupart des travailleurs de l’époque a entraîné toute une série de protestations et d’actions spontanées au cours des années ’20 du 19ième siècle, avec finalement un soulèvement de masse en 1830. Les travailleurs ont massivement investi les rues, ont occupé des usines et des bâtiments publics et sont parvenus à faire fuir les troupes hollandaises de Bruxelles. Les insurgés s’inspiraient de la révolution française de 1789 : des drapeaux français sont apparus dans les rues et la Marseillaise résonnait partout dans les quartiers populaires.

    La bourgeoisie belge n’était initialement pas favorable au soulèvement, mais a très vite compris qu’elle devait tenter de contrôler le mouvement afin de maintenir sa propre position. Les milices bourgeoises ont ainsi été créées et le soulèvement populaire a été détourné en une lutte pour l’indépendance nationale. La bourgeoisie a fait quelques concessions symbolique au mouvement, comme en modifiant le drapeau traditionnel brabançon tricolore (dont les lignes étaient horizontales à l’origine) afin qu’il ressemble au drapeau français – un symbole révolutionnaire au début du 19ième siècle – mais l’absence d’une organisation politique indépendante de la classe ouvrière a assuré que la bourgeoisie belge puisse avoir très vite les choses en main.

    Les premiers mois après le soulèvement, la Belgique était une république gérée par un organe constituant : le Congrès National. La bourgeoisie belge était néanmoins trop faible pour gérer ses propres affaires : une invasion hollandaise n’a seulement pu être stoppée que par l’intervention militaire de la France. Désespérément à la recherche de soutien international, elle s’est entre autres jetée dans les bras de la riche famille financière Rothschild. Les Rothschild était plus que prêts à donner un coup de main : les riches mines de charbon et fer faisait de la Belgique un pays prometteur pour les investisseurs. Mais quelques conditions étaient nécessaires, dont l’installation d’une monarchie stable capable de défendre les intérêts du grand capital. Les Rothschild ont même été tellement généreux qu’ils ont proposé leur propre candidat au trône : Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha, un aristocrate sans emploi qui partageait son temps entre la Cour anglaise de la Reine Victoria et les casinos de Londres. Léopold lui-même n’était pas vraiment enthousiaste au sujet de cette nouvelle carrière : il n’avait pas envie de partir vers – selon ses propres termes – ”un pays pitoyable avec des politiciens médiocres et des conditions météorologiques misérables.” Mais son addiction aux casinos lui avait valu tellement de dettes qu’il fut obligé d’accepter la proposition. Les Rothschild avaient promis de payer toutes ses dettes pour peu qu’il parte pour Bruxelles. Le roi Léopold Ier a néanmoins continué de se plaindre de sa situation : il pensait que son palais était trop petit et trop sale et que la constitution belge lui donnait trop peu de pouvoirs.

    Les traditions autoritaires des Saxe-Cobourg

    Cette mégalomanie autoritaire semblait être très profondément encrée dans les gènes des Saxe-Cobourg, même après des générations de consanguinité aristocrate. Léopold II s’est taillé une renommée internationale comme ”Boucher du Congo”. De très nombreuses habitants du pays centre-africain ont perdu leur main ou leur vie sur ordre du roi, propriétaire privé de l’immense ”État indépendant du Congo”. D’énormes quantités de richesses ont été pilées du pays tandis que des projets de prestige mégalomanes étaient construits à Bruxelles. La bourgeoisie bruxelloise a pu se croire quasiment égale à ses homologues de classe parisiens. Le roi Albert Ier a quant à lui utilisé son autorité pour pousser des centaines de milliers de jeunes ouvriers vers les horreurs des tranchées de la première guerre mondiale tandis que lui-même s’occupait de son image du ”Roi-Chevalier”, loin de la mêlée. Léopold III avait des sympathies plus que superficielles pour les idées autoritaires du fascisme, et a vécu les années de guerre dans un confort relatif comme ”otage” des nazis.

    Les idées extrêmement autoritaires et hyper-conservatrices de la famille royale – pensons seulement à la crise provoquée par le roi Baudouin en 1993 lorsqu’il a refusé de signer la loi sur l’avortement – ont entraîné de nombreuses confrontations entre la monarchie et la classe ouvrière belge. Le point culminant du conflit a été la ”Question Royale” après la deuxième guerre mondiale. Le roi Léopold III voulait retourner sur le trône après ses ”vacances de guerre”, mais il s’est vu confronté à un des plus grands mouvements de contestation de l’histoire du mouvement ouvrier belge : beaucoup de travailleurs considéraient comme inacceptable que le roi soit allé prendre son café avec Hitler tout en vivant dans des conditions assez confortables lors de son ”exil” durant la guerre. Ce luxe était en trop grand contraste avec les souffrances que la population avait endurées lors de l’occupation et avec les risques que des dizaines de milliers de résistants avaient encouru pendant toutes ces années. La Question Royale a finalement été ”résolu” avec l’abdication du roi Léopold III en faveur de son fils ainé Baudouin. Quelques partisans du roi autoritaire ont exprimé leur frustration quelques semaines plus tard en assassinant le dirigeant communiste Julien Lahaut, qui avait fait expression du sentiment général de la classe ouvrière en criant ”Vive la République” lors de la prestation de serment du Roi Baudouin au Parlement.

    L’autorité de la monarchie sous pression

    À plusieurs reprises, la monarchie a été mise en avant par la bourgeoisie belge comme symbole du statu-quo. Souvent, on essaie de représenter ce rôle comme étant progressiste, le roi étant le ”gardien de l’unité de la Belgique”. En réalité, le roi a surtout pour rôle de défendre l’élite. Lors de la ”Marche Blanche” après l’affaire Dutroux en 1996, le roi a été utilisé pour détourner le mécontentement profond qui existait dans la société et pour repousser tout contenu politique qui pouvait profondément remettre en cause le système. Chaque fois qu’une crise politique est venue briser l’autorité des partis traditionnels, l’autorité morale du roi a été utilisée pour restaurer la confiance.

    Ces derniers mois et années, cette autorité morale a été mise à rude épreuve à cause de bon nombre de scandales. En temps de crise, de plus en plus de gens se posent des questions quant au coût élevé de la monarchie avec les dotations royales et les nombreux privilèges qui se font sur le dos de la société. La famille royale vit dans un luxe extrême avec palais, voitures de luxe, yachts et avions privés alors que la majorité de la population voit son niveau de vie systématiquement attaqué par le gouvernement. Il y a aussi les construction financières douteuses créées par plusieurs membres de la famille royale : les ”fondations” du prince Laurent ou de la reine Fabiola avec lesquelles ils cherchent à éviter les droits de succession. A tout cela est encore venu récemment s’ajouter le scandale autour de Delphine Boël, la fille illégitime du roi Albert II. L’attitude obstinée, égoïste et insensible du souverain lui a fait perdre beaucoup de respect. Dans les semaines à venir, la presse fera probablement beaucoup d’efforts pour créer une atmosphère de conte de fée autour de la maison royale pour ainsi rétablir cette autorité morale.

    En tant que socialistes, nous sommes en faveur de l’abolition de la monarchie. Nous allons néanmoins plus loin que le républicanisme bourgeois. Nous n’entretenons aucune illusion sur ce que serait une république bourgeoise, peu importe la manière dont le président serait élu. Nous militons pour une république socialiste démocratique, c’est-à-dire pour une société où le secteur financier, les services publics et toutes les plus grandes entreprises seraient sous contrôle démocratique de la population. Ainsi, les richesses seraient produites au service des besoins de tout le monde. Les privilèges monarchiques n’ont pas leur place dans une telle société, tout comme la course aux profits de l’élite capitaliste.

  • L'austérité, ça ne marche pas ! Organisons la résistance !

    Même les prévisions économiques les plus optimistes prévoient que le chômage continuera d’augmenter, jusqu’à toucher 12,7% de la population active en 2014. Le Bureau fédéral du Plan prévoit une croissance économique nulle pour cette année et une croissance de 1,1% pour l’année prochaine. Mais ces dernières années, toutes les prévisions économiques des institutions capitalistes se sont rejointes sur un point : être systématiquement en deça de la réalité. Qui peut encore croire les projections de ces économistes qui n’ont pas vu venir la crise?

    Par Geert Cool

    A n’en pas douter, les mauvaises conditions économiques donneront à nouveau lieu à une offensive où les commissaires européens, les politiciens néolibéraux et les porte-paroles des patrons et des banquiers réclameront à corps et à cris de nouvelles mesures d’austérité. Pour eux, si un médicament ne guérit pas un patient, il suffit simplement d’augmenter la dose. Et tant pis pour l’overdose, pour ces junkies de la casse sociale, il en faut toujours plus, toujours plus.

    Le comble, c’est qu’on a pu entendre ce genre d’exigences de la part de grandes banques, qui ont osé réclamer plus d’assainissements pour diminuer la dette publique. Et les plans de sauvetage des banques ? Ça n’a rien à voir avec l’explosion de la dette publique ? Mais là, voyez-vous, c’était nécessaire pour soutenir l’économie… Que quelqu’un ose proposer aujourd’hui que les grandes banques et les grandes entreprises contribuent à l’effort de la collectivité (à la place de planquer leurs réserves dans des paradis fiscaux) et on dénonce l’atteinte à la compétitivité des entreprises et le frein sur l’économie.

    Pour les patrons et leurs pantins politiques, les travailleurs et leurs familles doivent payer le prix de la crise. Ce sont des requins qui ont senti le sang, qui y ont goûté, et qui en veulent encore plus. La tragédie grecque s’est déjà répandue à toute l’Europe du Sud, mais cette perspective ne les arrêtera pas. Chez nous aussi, le gouvernement se prépare à une nouvelle série de mesures antisociales. Entre 0,5 et un milliard d’euros doit être trouvé pour boucler le budget de cette année, et on parle déjà de 3,5 milliards d’euros pour le budget 2014, alors que les besoins sociaux qui réclament urgemment plus de moyens sont déjà légion.

    Le gouvernement se cache derrière ‘‘l’Europe’’, cette même Europe que des politiciens belges comme Karel De Gucht (commissaire européen) ou Herman Van Rompuy (président du conseil européen) n’ont aucun mal à rejoindre pour poursuivre leur carrière politique. Les politiques européennes d’austérité sont élaborées par le même type de politicien qui les applique au niveau national. C’est une belle hypocrisie de se laver les mains en accusant un autre niveau de pouvoir, comme vont bientôt le faire les autorités communales face au fédéral.

    Selon le comité de monitoring, les villes et communes devront partir à la recherche d’un milliard d’euros d’économies ce qui, selon les syndicats, menace directement 25.000 emplois et indirectement 15.000 autres uniquement pour la Flandre. Les régions doivent quant à elles débourser 267 millions d’euros. L’avalanche d’austérité frappe tous les niveaux de pouvoir.

    Ce contexte engendre un grand mécontentement. Le 6 juin, il y avait, selon les syndicats, 35.000 manifestants dans les rues de Bruxelles contre le gel des salaires et pour un statut unique décent tant pour les ouvriers que pour les employés. Sur le plan local, les premiers germes d’une résistance commencent à apparaître. Toute cette colère doit être réunie et coordonnée pour construire un bon rapport de force, tout en menant la discussion sur le type de politique alternative dont nous avons besoin. C’est le défi auquel fait face le mouvement syndical. Chaque faiblesse de notre camp attise la volonté d’agression de la part de celui d’en face.

    La nécessité de disposer d’un vrai plan d’action – conséquent, discuté avec l’implication active de la base et comprenant une ou plusieurs grèves générales – se fait sans cesse plus pressante. Parallèlement, nous devons opposer à la pensée unique néolibérale des politiciens de l’establishment une autre logique basée sur la construction d’une société favorable non plus au 1% le plus riche, mais aux 99% restants. Cette société où la majorité de la population pourrait démocratiquement décider de l’orientation de la production, c’est ce que nous appelons une société socialiste démocratique. C’est la seule alternative crédible face à la crise capitaliste.

  • Emprunt populaire ou triche populaire ?

    Pas de réponse crédible face à la grève de l’investissement des capitalistes

    Le ministre des finances Koen Geens a encore pas mal de choses à apprendre : être ministre, c’est clairement autre chose qu’être académicien. Lorsqu’il a lancé le débat sur l’emprunt populaire, toute la discussion s’est perdue dans l’hystérie concernant la deuxième partie de sa déclaration : l’annulation de l’exemption d’impôt sur les revenus des livrets d’épargne. Directement, ce fut le chaos, et la discussion sur l’emprunt populaire est devenue inaudible. Il s’agit néanmoins d’une discussion fondamentale : où se trouvent les richesses dans cette société, et comment les mobiliser ?

    Par Tim (Bruxelles)

    Après à peine 4 jours de grève des travailleurs de Swissport, il a fallu que le ministre Wathelet menace de condamnations et de réquisitions. Aucun mot sur l’énorme pression au travail, sur la très lourde flexibilité et sur les horaires inhumains : que les travailleurs stoppent leur grève ou la justice s’en mêlera ! De son côté, le grand capital – qui est en grève d’investissements depuis des années déjà – reste impuni. Au moins 25.000 milliards de dollars sont cachés dans les paradis fiscaux, soit quasiment un tiers du PIB global ! Les banques centrales essayent désespérément de tirer cet argent vers l’économie réelle : les taux d’intérêt historiquement bas doivent forcer les banques et les capitalistes à investir dans la production. Sans succès jusqu’ici.

    Bien au contraire : l’entreprise Apple repose sur une montagne de cash de 145 milliards de dollars, en grande partie cachée ‘‘en franchise d’impôt’’ dans les paradis fiscaux. Et ce n’est pas tout ! Non seulement ces moyens ne sont pas utilisés pour investir dans l’économie réelle, mais l’entreprise compte maintenant utiliser ces taux d’intérêt historiquement bas pour emprunter l’argent à verser en dividendes à ses actionnaires, et ainsi économiser les 9,2 milliards de dollars d’impôts que coûterait le rapatriement de son argent des paradis fiscaux ! C’est ça la Grande Grève du Capital : comme les investissements dans l’économie réelle ne rapportent plus assez, tout l’argent reste dans les paradis fiscaux où il est mobilisé pour la spéculation.

    Voilà la raison sous-jacente à cette idée de ‘‘l’emprunt populaire’’. Comme le grand capital ne bouge pas, c’est à la classe des travailleurs de sauver les meubles, en utilisant ses modestes épargnes.

    En soi, nous ne sommes pas opposés à l’idée d’un ‘‘emprunt populaire’’, mais cela doit être considéré dans le cadre d’un secteur bancaire nationalisé, sous contrôle et gestion démocratiques de la population. Un tel secteur financier public permettrait d’assurer les petits épargnants d’un taux d’intérêt garanti. D’autre part, ces moyens pourraient être consacrés à des prêts bon marché pour les PME et pour investir dans les services publics. Mais, nous irions surtout chercher l’argent là où il se trouve véritablement : aux mains du 1% de super-riches au sommet de la société. La crise à Chypre nous a montré qu’il est techniquement possible de placer sous contrôle un secteur bancaire entier, d’avoir une vue sur les transferts d’argent internationaux et sur l’évasion fiscale, afin de la stopper. Ces possibilités devraient être utilisées pour mobiliser les 25.000 milliards de dollars cachés dans les paradis fiscaux pour les investir dans l’enseignement, la recherche scientifique, les soins de santé, l’énergie verte, et tout autre besoin de la population entière.

  • Nationaliser les secteurs-clés de l’économie, c’est nécessaire pour sauver des vies

    Le “marché libre”, selon la doctrine officielle, devrait entraîner de meilleures conditions de vie pour chacun. Reste alors à comprendre pourquoi sur les sept milliards de personnes qui vivent sur terre s’en trouvent plus de 2,6 milliards qui doivent vivre avec moins de 2 dollars par jour et qui souffrent de la faim…

    Par Anja Deschoemacker, membre du Bureau Exécutif du PSL et porte-parole de Gauches Communes

    Pas besoin toutefois de quitter le sol belge pour constater que le marché soi-disant libre n’est pas uniquement une menace pour l’emploi, mais aussi pour nos vies. Récemment, l’actualité a été marquée par le cas du petit Viktor souffrant d’une maladie rare – et il n’est pas le seul – et dont la vie est menacée par le prix des médicaments (19.000 euros par mois) ou encore par la catastrophe ferroviaire de Wetteren (un mort et 17 blessés). De tels secteurs économiques aussi cruciaux pour la population ou qui peuvent potentiellement mettre des vies en danger peuvent-ils être laissés dans les mains d’entreprises qui ne recherchent que le profit maximal au plus court terme ? La discussion porte sur les médicaments de Viktor, qui souffre du SHUa, une maladie rénale extrêmement rare, qui pouvaient être remboursés par l’assurance maladie. Les parents d’enfants touchés par des maladies rares et mortelles ont appelé à des mesures structurelles et non pas à une politique du ‘‘cas par cas’’. Dans ce débat, on a pu entendre que la recherche pour de tels médicaments est très onéreuse, mais les profits sont limités puisque le nombre de patients est limité. Et sans profit, pas d’investissement dans la recherche…

    En d’autres termes : c’est tout à fait normal. Le seul levier d’action des autorités publiques est de tenter de négocier pour pousser les prix vers le bas. Si la ministre Onkelinx avait refusé de rembourser le coût très élevé du médicament, c’est elle qui aurait été considérée comme la ‘‘meurtrière’’ du petit Viktor par ‘‘l’opinion publique’’, plutôt que l’entreprise Alexion qui a versé 250 millions de dollars à ses actionnaires cette année-ci !

    Le PSL défend la nationalisation du secteur pharmaceutique, sous contrôle et gestion démocratiques. C’est la seule manière d’assurer que ce secteur fonctionne pour la collectivité et non pas pour les profits. Ces dernières décennies, la connaissance et le savoir-faire développés par la collectivité ont de plus en plus été bradés au secteur privé (comme l’entreprise Alexion qui est une spin-off sortie de l’université de Yale), pour qui la population ne peut bénéficier des recherches que si elle en a les moyens. Dans des régions du monde plus pauvres, Viktor n’aurait eu une chance de survie que si sa famille était extrêmement riche.

    La catastrophe de Wetteren illustre aussi la nécessité d’un plus grand contrôle exercé par la collectivité. Le secteur du transport de marchandises a de plus en plus été sous l’emprise de ‘‘cowboys pour qui la sécurité est un coût qui encombre les profits.’’ Et si chaque accident ferroviaire peut coûter des vies, c’est encore plus le cas quand on parle du transport de produits chimiques dangereux. Alors que dans toutes les (grandes) entreprises chimiques, les syndicats jouent un rôle déterminant dans le contrôle de la sécurité sur le lieu de travail et dans l’élaboration des procédures d’urgence – des procédures qui protègent les vies du personnel et des riverains contre la soif de profit du patronat – aucun contrôle de la collectivité ne s’exerce sur le transport de ces produits.

    Malgré l’état actuel de la science, faire tout qu’il faut et qui est possible pour sauver des vies restera impossible tant que l’économie n’est pas dans les mains de la collectivité et doit uniquement tourner pour enrichir une élite de super-riches. La nationalisation des secteurs-clés de l’économie n’est pas seulement une mesure capable de sauver des emplois, ce serait aussi un pas en avant dans la construction d’une société où personne n’aurait le pouvoir de décider que les profits sont plus importants que la vie.

  • TEC, STIB: Suppression de la gratuité pour les seniors

    Ce n’est pas à nous de payer leur crise!

    Il y a un an, tous les politiciens, promettant de ne pas s’en prendre “aux plus faibles”, désavouaient les propos de Kris Lauwers (le patron de la STIB) qui, lors d’une interview au quotidien flamand DeMorgen, envisageait ‘‘de traire le client’’ en s’en prenant particulièrement au abonnés qui pouvaient se déplacer à pied ou à vélo plutôt que de faire de courtes correspondances. Pensait-il déjà aux pensionnés qui font quelques arrêts avec leurs caddies pour se rendre au marché ?

    Par Boris Malarme

    “Traire” nos ainés?

    Aujourd’hui, ceux-là mêmes qui jureraient encore tous en chœur il y a peu que les mesures budgétaires des gouvernements régionaux allaient être ‘‘indolores’’ mettent fin à la gratuité des transports en commun pour nos ainés. Des dizaines de milliers de personnes âgées de 65 ans et plus doivent désormais payer 60€ leur abonnement annuel à la STIB et 36 euros celui des TEC. Ce coût supplémentaire frappe nos ainés alors qu’ils disposent de pensions parmi les plus basses d’Europe et alors que 20,3 % d’entre eux vivent déjà sous le seuil de pauvreté.

    En Wallonie, sur les 320.000 seniors qui bénéficiaient de la gratuité, on estime que 110.000 d’entre eux prendront l’abonnement à 36€ rapportant ainsi 3,9 millions €, que 60.000 pourront bénéficier d’un statut BIM-Omnio et que la moitié renonceront à prendre un nouvel abonnement. Cette offensive antisociale accroit l’isolement des personnes âgées et entraine une diminution de leur mobilité et donc également de leurs activités physiques. Toutes choses positives pour leur santé et leur bien-être.

    Solidaires des jeunes?

    Comble de l’ironie, le ministre Ecolo de la mobilité Philippe Henry a attribué le nom de ‘‘Contribution de solidarité’’ au nouvel abonnement TEC payant pour les +65 ans. L’argument est le même qu’à Bruxelles : puisque la Communauté Française a arrêté de financer les réductions sur les abonnements scolaires, la région doit le faire sur le dos des séniors. Cette rhétorique hypocrite est récurrente : ‘‘c’est la faute à un autre niveau de pouvoir’’, mais ce sont pourtant bien les mêmes partis (PS, Cdh et Ecolo) qui se retrouvent aux diverses majorités. Tous les partis traditionnels défendent une politique d’austérité particulièrement dramatique pour les plus fragilisés. Ils refusent de faire payer la crise aux véritables responsables.

    Pour des transports en commun publics, gratuits et de qualités

    La déclaration gouvernementale régionale bruxelloise de 2009 affichait la volonté de viser à la gratuité des transports publics et avait fait de la mobilité une priorité face aux embouteillages et à la pollution. C’est le chemin inverse qui est suivi avec les nouvelles coupes budgétaires. Ces désinvestissements sont aux frais des usagers qui subissent, année après année, des hausses de tarifs incessantes (deux fois l’inflation en moyenne sous les deux dernières législatures Picqué). Ce sont aussi les conditions de travail et de sécurité du personnel qui sont mises à mal. Même partis, mêmes promesses électorales non tenues et même politique en Wallonie. Le pire, c’est que ce sous-financement crée des problèmes qui serviront à terme de prétexte pour expliquer que la privatisation est la solution aux dysfonctionnements et aux pénuries.

    Aujourd’hui, on nous dit que la gratuité n’est plus possible, qu’il s’agit d’un choix politique. Nous ne pouvons pas compter sur ces politiciens ! Luttons pour défendre des services publics de qualités et pour réaliser un plan radical d’investissements publics pour les transports en commun mais aussi pour les écoles, les maisons de repos, les crèches, les logements sociaux,…

  • Le retour des coopératives

    Affronter le capitalisme avec ses propres armes ?

    La colère ressentie contre les banquiers et leurs dettes de jeu contractées au casino du capitalisme est très grande, un constat évident au vu de l’enthousiasme pour New-B, le projet de nouvelle banque coopérative belge qui compte aujourd’hui près de 40.000 inscrits. De son côté, la corporation basque Mondragon (la plus grande structure coopérative au monde) réunit plus de 250 entreprises et emploie plus de 80.000 personnes.

    Le débat consacré aux avantages et limites du travail avec des coopératives a traversé l’histoire du mouvement socialiste. Travailler et produire ensemble ou organiser l’achat et la distribution de denrées de manière collective sans que la logique de profit ne soit centrale sont des idées qui reposent sur la solidarité instinctivement fortement présente parmi les travailleurs et leurs familles. Il s’agit d’une tentative collective d’améliorer la qualité de vie dans un système capitaliste qui fonctionne dans le sens inverse.

    Mais cette approche a des limites. Dans le contexte du système capitaliste, aucune entreprise ne peut se soustraire à ses lois. Qui n’est pas compétitif finit par disparaître… Les coopératives sont ainsi prises entre le marteau et l’enclume : dans quelle mesure exploiter son propre personnel pour faire face à cet aspect concurrentiel ?

    Dans une période de ralentissement économique, on peut davantage mettre l’accent sur l’éthique. Mais que faire si, dans ce contexte de crise, survient une brève période de croissance limitée avec des possibilités de spéculation et les profits qui y sont associés ? Une banque coopérative refuserait-elle de s’impliquer dans tout ça ? L’exemple d’Arco, la coopérative du mouvement ouvrier chrétien, et de sa participation au désastre Dexia sont encore frais dans nos mémoires… Il existe encore l’exemple historique de la Banque du Travail tombée en faillite en 1934.

    La militante marxiste allemande Rosa Luxemburg faisait remarquer en 1900 déjà qu’une coopérative de production signifie avant tout que ‘‘les travailleurs sont appelés à jouer le rôle de l’entrepreneur capitaliste’’, une contradiction ‘‘généralement à la base de l’échec des coopératives qui se sont soit converties en pures entreprises capitalistes soit ont été dissoutes, dans le cas où elles continuaient à considérer comme centraux les intérêts des travailleurs’’.

    Une coopérative de consommation (de même que les Groupes d’Achats Communs) part de l’idée tout à fait correcte qu’il est possible d’obtenir un meilleur prix en achetant à plus large échelle. Ce constat explique le succès des achats groupés d’énergie, ce n’est d’ailleurs pas une coïncidence si l’on voit cette approche se développer dans un secteur où les prix sont très élevés en conséquence directe de la libéralisation. Nous soutenons toutes les mesures visant à atténuer les effets de la libéralisation, mais nous voulons défendre une alternative à la libéralisation elle-même.

    Cette idée de coopérative revient régulièrement sur la table du côté du PS. En 2009, en pleine crise du lait, l’idée d’une coopérative laitière wallonne est venue dans le débat. Mais le plus concret a encore été le lancement des magasins ‘‘C Populaire’’ en avril 2010, à l’initiative du PS, de la FGTB et des Mutualités Socialistes (Solidaris), avec l’objectif de ‘‘Favoriser les relations entre producteurs et consommateurs, valoriser la production régionale et offrir des produits de qualité accessibles à tous.’’ Sauf que, trois ans après, ces magasins n’existent plus, sans que les fermetures n’aient bénéficié du quart de la couverture médiatique de leur lancement. De telles initiatives restent par essence limitées, noyées dans un océan capitaliste.

    Le capitalisme ne peut être domestiqué, il doit être combattu et abattu. La Charte de Quaregnon – le programme historique du mouvement ouvrier socialiste en Belgique – ne se limite pas à des achats groupés d’énergie ou à un meilleur contrôle des banques, elle exige de placer l’ensemble du secteur financier et du secteur de l’énergie entre les mains de la collectivité. Voilà une solution qui dépasse le cadre de l’aspirine contre le cancer, cela poserait les bases d’un enseignement gratuit, de l’éradication de la pauvreté, d’une création de bons emplois socialement utiles,…

  • Les villes et les communes introduisent l’austérité

    Pour un plan d’action dans les localités !

    Ces nouvelles tombent tous les jours. Gand, Ixelles, Malines, Saint-Nicolas, n’ont été que les premiers exemples. Les communes ont des soucis financiers et cherchent à résoudre ces problèmes à l’aide d’assainissements, de privatisations, de limitations des services publics, d’augmentations des taxes et de réductions du nombre de statutaires. Ce que nous connaissons déjà bien au niveau national (faire payer la crise à l’homme de la rue) se poursuit maintenant au niveau local.

    Article de Marc Van Hecke, ancien secrétaire CGSP-ALR (Administrations Locales et Régionales)-Termonde

    Avant les élections communales, la plupart des partis politiques se sont tus (dans toutes les langues) au sujet de l’année 2013 et des suivantes. Bien que parfaitement au courant de ce que l’avenir réservait, les partis traditionnels n’ont pas osé en parler. Aujourd’hui, les seules divergences ne portent que sur l’intensité de l’austérité, pas sur son principe même. Tel parti réclame des assainissements plus vigoureux, tel autre veut une ‘‘rigueur’’ avec un peu moins de licenciements. Toujours est-il qu’aucun parti traditionnel n’est prêt à remettre en question le système.

    Quand la spéculation financière frappe les localités

    Avant, il y avait des banques publiques comme la CGER (Caisse générale d’épargne et de retraite), le Crédit communal ou le Crédit à l’Industrie. Ces banques fonctionnaient et réalisaient même des profits, mais le gouvernement a estimé nécessaire de les transférer au secteur privé qui allait soi-disant leur permettre de mieux fonctionner.

    Le Crédit communal était le financier (le prêteur) des communes. Mais après sa vente, le Crédit communal est devenu Dexia et les communes devaient s’adresser à la nouvelle banque privée. Cette dernière, tout comme les autres banques, spéculait en bourse, rémunérait excessivement ses PDG et débordait d’options et d’actions spéculatives.

    Les dividendes augmentaient, les limites du possible étaient sans cesse repoussées et les communes étaient satisfaites. Comme tout tournait à merveille, personne ne se souciait de rien. Enfin, en tout cas jusqu’au moment où il s’est avéré que Dexia était elle aussi bourrée de dettes à cause de crédits et d’actifs toxiques. L’argent public avait été utilisé pour la spéculation, puis est arrivée la crise du secteur bancaire de 2008.

    Un problème de coûts des pensions?

    Le principe des statuts dans la fonction publique est basé sur celui de continuité. L’administration publique ne peut pas dépendre du parti politique qui détient provisoirement la majorité et doit être protégée de l’arbitraire politique. Vu que les statutaires ne peuvent (en principe) pas être licenciés, ils n’étaient pas catégorisés dans le même système de transfert de fonds que les travailleurs du secteur privé. Le gouvernement a donc créé une mutualité et un système de pensions propres aux fonctionnaires.

    Ces dernières décennies, on n’a pas gardé beaucoup de statutaires. Le secteur local a constitué le laboratoire de toutes formes d’emplois alternatifs. En 1976, au moment où j’ai commencé mon travail dans une administration locale, 90% des fonctionnaires étaient statutaires. Aujourd’hui, il n’en reste qu’un tiers environ.

    Entretemps, la plupart des communes ont transféré des services pour lesquels elles étaient précédemment compétentes au secteur privé. Dans le temps, il y avait des services publics de nettoyage, des services de distribution d’eau, etc. dans à peu près toutes les villes. Gand avait même une entreprise de gaz et d’électricité tandis qu’Anvers avait une capitainerie portuaire publique. A côté de tout ça, il y avait l’entretien des parcs et des espaces verts, des parkings propres, du personnel de nettoyage,… Il ne reste aujourd’hui pas grand-chose de tout cela. L’externalisation est devenue la règle et tout ce qui n’est pas externalisé devient une ‘‘entreprise publique autonome’’ ou une ‘‘ASBL’’. Même si la tendance est plus marquée en Flandre, Bruxelles et la Wallonie n’ont pas été épargnés par le phénomène.

    Comme dans le secteur privé, il existe dans le secteur public un système de répartition où la population active paye les pensionnés d’aujourd’hui. Vu que le nombre de statutaires diminue, le nombre d’actifs qui payent pour les pensions a diminué. Ainsi, les fonds de pension s’épuisent. Cela n’a rien à voir avec les ‘‘coûts des pensions’’, il s’agit d’une conséquence directe du démantèlement du statut.

    Politique d’austérité et assistance sociale

    Les chômeurs qui ne peuvent plus joindre les deux bouts, ceux qui, sans cesse plus nombreux, sont incapables de rembourser leurs emprunts hypothécaires, les pensionnés qui ne peuvent plus s’offrir de place dans une maison de repos, ceux pour qui la facture d’hôpital est insurmontable,… Où sont-ils envoyés ? Au CPAS.

    Le CPAS n’assure pas seulement le revenu d’intégration (l’ancien minimex), il a aussi une fonction d’assistance psychosociale, de médiation de dettes,… En bref, il aide les personnes en difficulté. Mais les moyens dont ils disposent sont loin de pouvoir faire face aux demandes actuelles, et la demande ne cesse de croître. Combien de terribles drames sociaux se cacheront derrière toutes les déclarations sur la nécessité de ‘‘faire des efforts’’ au niveau communal ?

    Il nous faut un plan d’action !

    La réponse des communes – quelle que puisse être leur couleur politique – est de privatiser, de développer des partenariats publics-privés, d’assainir dans les dépenses (surtout au niveau du personnel, particulièrement s’il est statutaire), de démanteler les services publics et d’augmenter les taxes. Le personnel et la population sont les grandes victimes de cette approche.

    Les syndicats du secteur local réagissent (à juste titre) contre cette situation. Malheureusement, le début de réaction est jusqu’à présent isolé dans chaque commune. Là où les syndicats sont forts, ils sont (peut-être) capables d’affaiblir la politique d’austérité. Dans le cas opposé, la casse sociale est assurée. Mais soyons bien clairs : ce qui se passe aujourd’hui dans quelques villes et quelques communes se produira ailleurs demain. Il nous faut un plan d’action commun !

    Nous pouvons partir d’une pétition qui appelle les mandataires locaux à faire face à leurs responsabilités envers la population en s’opposant aux licenciements, à la dégradation du statut du personnel, aux privatisations, au démantèlement des services et en faveur de la transformation de tous les contrats à durée indéterminée en contrats statutaires. Cela appuierait les revendications du personnel tout en recherchant la solidarité des usagers et en démontrant que les syndicats sont clairement indépendants des partis traditionnels.

    Les syndicats peuvent aussi organiser des tournées d’information sur les lieux de travail avec des assemblées générales du personnel où l’ont peut démocratiquement décider d’actions. L’information et la sensibilisation sont nécessaires, mais cela ne suffit pas, il faut lutter, et au-delà du niveau local. La lutte locale doit directement se placer dans une perspective plus large.

    Des revendications telles que la conversion de tous les contrats à durée indéterminée et précaires en emplois statutaires, la création d’intercommunales publiques pour l’énergie, l’eau et la collecte des déchets (et leur renforcement là où cela existe encore), la création d’une nouvelle banque publique pour les communes et les CPAS, le refus du paiement des dettes,… concernent toutes les communes.

    Ou aller chercher l’argent ?

    Tout cela semble peu réaliste. Il est visiblement plus ‘‘réaliste’’ que la grande majorité de la population accepte le recul social. Voilà le ‘‘réalisme’’ capitaliste. En tant que syndicaliste, je n’ai jamais accepté la logique du capitalisme avec laquelle entre directement en conflit chaque droit des travailleurs. Allons-nous accepter d’aller gentiment à l’abattoir ? Peut-être n’allons nous pas rencontrer la victoire, mais nous sommes assurer d’aller droit à la défaite sans nous battre !

    De bons services communaux coûtent de l’argent. Mais tous les partis politiques de l’establishment préfèrent renflouer le secteur bancaire ! Une volonté politique fermement opposée à la logique des spéculateurs pourrait trouver des milliards d’euros immédiatement, on peut aller chercher ces moyens là où ils sont.

    Le choix véritable auquel nous faisons face est soit la justice sociale (ce que j’appelle le socialisme) soit un système qui plonge les travailleurs dans la misère (ce que j’appelle le capitalisme).

  • NON à la machine européenne de casse sociale ! Rassemblement au Parlement wallon contre le ‘‘Traité d’austérité’’

    C’est sous la pluie que plus de 200 militants se sont déplacés face au Parlement wallon ce 29 mai pour protester contre la ratification du Traité sur la Stabilité, la Coordination et la Gouvernance (TSCG), déjà passé en Flandre et au Sénat. Etaient présents bon nombre de militants de la FGTB, mais aussi de la centrale des employés de la CSC (la CNE), de la Fédération des Etudiants Francophones, de divers collectifs citoyens (constituante.be, Occupuy Charleroi,…) ou encore de partis de la gauche radicale (Front de Gauche Charleroi, PTB, PC, MG, LCR, PSL). L’enjeu n’est pas sans importance, il suffirait qu’une instance législative belge refuse de voter le traité pour qu’il ne passe pas en Belgique.

    Rapport d’Yves (Liège) et photos de Loïc (Liège)

    Austérité 2.0.

    Le TSCG est entré en vigueur depuis le 1er janvier 2013 et a actuellement été ratifié dans 17 pays européens. Imposant un déficit structurel de 0,5% (la désormais célèbre ‘‘règle d’or’’ basée sur une notion de ‘‘déficit structurel’’ totalement arbitraire) et une dette publique inférieure à 60% du PIB sous peine d’amende – pouvant aller jusqu’à 0,5% du Produit Intérieur Brut (PIB, valeur égale à la totalité des richesses produites dans un pays en un an) – aux pays l’ayant ratifié, ce pacte budgétaire est une manière de couler l’austérité dans la constitution ou en tout cas de la rendre inattaquable. L’orientation économique n’est ainsi plus une décision politique et le néolibéralisme l’unique base sur laquelle les diverses politiques peuvent se développer. L’Union Européenne n’a jamais été un instrument réellement démocratique, mais il est clairs que l’establishment européen compte supprimer les quelques éléments de démocratie qui pouvaient encore exister jusqu’ici.

    Ce traité d’austérité et de casse sociale prévoit d’ailleurs d’accroître encore plus les pouvoirs de la Commission Européenne non-élue, dont les recommandations deviendraient de véritables diktats assurant que les moindres désirés des ‘‘marchés’’ soient assouvis. Nous connaissons tous l’impact de ce type de mesures, que ce soit avec les ‘‘plans d’ajustement structurels’’ du Fonds Monétaire International ou de la Banque Mondiale ou encore avec les conditions qui ont accompagnées ‘‘l’aide’’ européenne apportée à des pays comme la Grèce.

    La pseudo-démocratie parlementaire capitaliste se montre de plus en plus sous son visage véritable : celui d’une ‘‘démocratie’’ où l’on peut choisir ce que l’on veut, tant que l’on reste dans les projets de la classe dominante. Cette dernière n’a en tête que de restaurer son taux de profit, et instrumentalise le prétexte de la crise pour mener une offensive en règle contre les acquis sociaux que le mouvement organisé des travailleurs a acquis de haute lutte : attaques contre les salaires et conditions de travail, chasse aux chômeurs, augmentation de l’âge légal pour partir en retraite, attaques contre les fonctionnaires, privatisations,… Mais cela provoquera (et provoque déjà) une contraction de l’activité économique qui elle-même entraîne une baisse des rentrées fiscales et une augmentation du chômage et donc des dépenses sociales. L’austérité entraine l’austérité, c’est une véritable avalanche de casse sociale qui nous fait face.

    La position des partis traditionnels sur cette question est une nouvelle illustration de la nécessité de construire un nouveau relais politique large pour défendre les intérêts des travailleurs. Tous se sont pliés aux dogmes économiques néolibéraux sauf ECOLO… qui prévoit de le voter au Parlement Wallon ! Le député régional wallon ECOLO Luc Tiberghien l’avait encore précisé – en présence d’Isabelle Durant (ECOLO, vice-présidente du Parlement Européen) lors d’une conférence-débat organisée le 2 mai dernier à Tournai par la CSC du Hainaut occidental. Un Beau double jeu dont toute la subtilité réside dans le fait qu’ECOLO est à l’opposition au fédéral et dans la majorité aux régions.

    Sans surprise, les seuls drapeaux que l’on voyait flotter du côté des manifestants anti-austérité étaient ceux de la gauche radicale (Front de Gauche Charleroi, PTB, PC, MG, LCR, PSL). Cela souligne une fois de plus la nécessité de canaliser nos forces. A ce titre, la lettre ouverte du PSL concernant une union électorale des forces de gauche pour 2014 semblait avoir été lue par beaucoup de monde, et à l’exception de réponses réservées de membres de directions de partis qui attendaient l’issue des discussions à ce sujet dans leurs organes, l’écho que nous avons pu entendre au sujet de cet appel était largement positif chez les militants. La nécessité de rassembler la résistance sociale est perçue et reconnue par de large couches, tant chez les militants actifs qu’au-delà.

    Dans son discours à la fin du rassemblement, le président de la FGTB-wallonne Thierry Bodson a très justement développé le fait que le débat sur le TSCG fait partie intégrante de la discussion sur l’austérité au niveau global.

    Il est aujourd’hui plus que nécessaire de disposer d’un véritable plan d’action offensif (avec un calendrier clair d’actions allant crescendo et une communication qui ne se limite pas à la presse dominante) avec grève(s) générale(s) afin d’instaurer un véritable rapport de force. Le lobbying parlementaire sera insuffisant, et laisser les diverses mobilisations s’effectuer chacune dans leur coin ne pourra mener qu’à la frustration et à la démoralisation.

    Nous connaissons déjà la prochaine date de mobilisation : le 6 juin, à Bruxelles, en Front commun syndical, sur la question du statut unique entre ouvriers et employés. Que personne ne s’y trompe : c’est là aussi de la résistance contre l’offensive patronale dont il s’agit !

  • Comment aller chercher l’argent là où il est ?

    Les chiffres parlent d’eux-mêmes et sont choquants : 25.000 milliards d’euros dorment sur des comptes planqués dans les paradis fiscaux. Leurs propriétaires ne représentent qu’une infime minorité de la population, quelques dizaines de milliers de personnes et d’institutions, qui possèdent ainsi de quoi en finir à plusieurs reprises avec la pauvreté dans le monde et de nombreux autres problèmes sociaux. L’appel à un partage des richesses existantes se fait plus audible.

    Edito de l’édition de mai de Lutte Socialiste

    Alors que l’homme de la rue – les travailleurs et les allocataires sociaux – est systématiquement visé par les plans d’austérité, les grandes fortunes sont épargnées. À chaque fois qu’il est question de les faire contribuer, la proposition est dégagée de la discussion sous prétexte que cela ne ferait que nuire à ‘’notre’’ position de compétitivité. Si le secteur diamantaire anversois cache des sommes énormes dans les paradis fiscaux, cela n’illustre, aux dires d’un de leurs avocats, que le fait ‘’qu’Anvers compte toujours comme centre diamantaire.’’ Face à cette élite de 1% de la population, les 99% restants ne représentent donc rien ?

    La logique de concurrence conduit à la pauvreté et au recul social, tout à l’opposé de la solidarité du mouvement des travailleurs. Au sein de cette solidarité se trouve la répartition équitable des richesses. Nous soutenons la revendication d’un impôt sur la fortune qui ferait payer aux riches les conséquences de cette crise causée par leur avidité.

    Mais il faut se demander comment faire. Les riches ne vont pas gentiment abandonner leurs fortunes parce que nous leur demandons. Un nouvel eldorado fiscal se développera toujours pour prendre la place de celui qui a été détruit. Quand François Hollande a parlé d’une taxe sur les plus hauts revenus (limitée d’ailleurs : 75% sur la tranche supérieure à un million d’euros), Gérard Depardieu s’est envolé vers la Belgique. Il n’est pas le seul à considérer notre pays comme un paradis pour les riches: certains quartiers d’Uccle sont devenus de véritables ghettos pour Français super-riches.

    La lutte contre la grande fraude fiscale des autorités est une opération de communication plus qu’autre chose. Mais qu’attendre d’autre de la part de partis qui ont organisé le pillage légal des caisses de l’Etat en votant des mesures telles que la déduction des intérêts notionnels? Quand les quotidiens L’Echo et De Tijd rapportent qu’au moins 110 entreprises belges auraient des connexions avec les Îles Vierges britanniques ou les Îles Caïmans (on y retrouverait même l’Etat belge), le secrétaire d’Etat à la Lutte contre la fraude John Crombez (SP.A) ne semble pas vouloir aller voir plus loin.

    De Tijd a d’ailleurs fait remarquer : ‘’Les enquêteurs de la police fédérale doivent maintenant travailler sans disposer d’accès à la vaste base de données des entreprises. Le contrat avec la base de données Euro DB n’a pas été prolongé suite aux économies du gouvernement et aucun nouveau contrat n’a été conclu. (…) Les criminels en col blanc, contrairement à nos enquêteurs qui les combattent, mettent en place des entreprises mondiales avec les meilleurs conseillers fiscaux et de la technologie de pointe. C’est David contre Goliath.’’ Nos enquêteurs en sont encore à l’âge de pierre.

    L’inégalité des richesses est inscrite dans le code génétique de ce système, au plus profond de lui. À mesure que la crise s’aggrave et instaure une pression sur les profits, les capitalistes et leurs marionnettes politiciennes imposent des mesures drastiques contre les travailleurs et leurs familles. Les effets de cette politique économique insensée sont visibles dans un nombre croissant de pays, le temps où les catastrophes sociales étaient confinées au sud de l’Europe est derrière nous.

    L’énorme disparité des richesses ne provient pas de l’activité ‘’accidentelle’’ de quelques brebis galeuses. Les pommes pourries au sommet de la société ne sont que l’expression d’un panier – la société capitaliste – totalement pourri. Et de la même manière qu’on ne peut durablement enlever les mauvaises herbes sans s’en prendre à leurs racines, une solution ne saurait être fondamentale que si elle s’attaque au problème en son coeur.

    Une rupture fondamentale avec le système capitaliste est nécessaire pour en finir avec cette inégalité des richesses sans précédent. Afin d’être véritablement en mesure de redistribuer les ressources disponibles, un contrôle démocratique est nécessaire. C’est pour cela que les secteurs clés de l’économie doivent être placés sous contrôle et gestion démocratiques et publics. Cela nécessite d’engager un combat déterminé dans la perspective d’une société socialiste démocratique.

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