Category: National

  • Pauvreté : la révolte gronde et fait peur à certains

    Le secrétaire d’Etat à la pauvreté Jean-Marc Delizée (PS) prépare son plan d’action contre la pauvreté qui sera présenté le 4 juillet. Son principal souci ? Eviter "une révolte des pauvres". Quand on se dit socialiste, ne vaudrait-il pas mieux organiser celle-ci?

    Jean-Marc Delizée a déclaré que "Quinze pour cent des Belges vivent sous le seuil de pauvreté et des dizaines de milliers de personnes avec un emploi s’ajouteront à eux si nous ne faisons rien. (…) Chaque pauvre est un pauvre de trop. (…) Si nous n’y prenons pas garde, d’autres viendront rapidement s’ajouter. (…) Si nous n’entreprenons rien pour augmenter les salaires bruts les plus bas, les gens pauvres de ce pays vont se révolter".

    Tout d’abord, le chiffre de 15% est une grossière sous-estimation (voir ici 3 millions de pauvres en Belgique!). Pour le reste, nous sommes bien évidemment pour une hausse du salaire brut conséquente (nous revendiquons 1 euro de plus par heure en plus de l’indexation avec un index qui reflète le coût réel de la vie ainsi qu’une hausse des allocations sociales), pour tous, et pas seulement pour les salaires les plus bas. La crise du pouvoir d’achat ne crée pas seulement de problèmes à la population la plus précaire. Au regard du "camarade" de Jean-Marc Delizée Guy Quaden, gouverneur de la Banque Nationale et membre du PS, tous les salaires ne sont pas assez élevés (ce fameux Guy Quaden, qui par ailleurs veut s’en prendre à l’index, a gagné en 2007 quelques 474.792 euros brut, c’est-à-dire 4 fois plus que son collègue américain de la Federal Reserve…)

    Mais il nous semble particulièrement intéressant de révéler la panique du secrétaire d’Etat quant il dit que "Si nous n’entreprenons rien pour augmenter les salaires bruts les plus bas, les gens pauvres de ce pays vont se révolter." Un parti qui se dit socialiste devrait justement organiser la révolte pour éviter que la frustration et la colère ne se dilapide inutilement. Mais on sent derrière cette phrase que la préoccupation du secrétaire d’Etat est avant tout de préserver l’ordre établi, de donner une obole aux pauvres pour éviter une remise en question du système.

    S’il fallait encore le démontrer, cette citation illustre que la phraséologie sociale du PS est avant tout sa spécificité dans le panel des partis à la disposition du patronat. Sur le site du PS, dans la partie consacrée au nouveau secrétaire d’Etat à la pauvreté, on peut lire que "Lutter contre la pauvreté et réduire les inégalités, voici un combat qu’il entend mener avec toutes les forces du PS." On se demande ce que le PS va vraiment mettre en œuvre pour réduire les inégalités. Le PS va-t-il mettre à la disposition du mouvement pour le pouvoir d’achat ses moyens financiers gigantesques, ces relais avec les journalistes et ses militants ? Va-t-il oser s’en prendre aux intérêts du patronat qu’il soutien activement (en votant par exemple l’introduction des intérêts notionnels, le Pacte des Générations, la chasse aux chômeurs,…)?

    Nous en doutons, même si le PS en connaît un bout en terme d’inégalités et de pauvreté. La pauvreté a au moins triplé sur ces 20 dernières années, et le PS était au pouvoir (pour un taux officiel – et sous-évalué – de 6% de pauvreté dans les années ’80, nous sommes passés à 15% aujourd’hui, toujours selon la sous-estimation officielle). Le PS va juste s’employer à tenter de faire baisser la vapeur. Les travailleurs et les allocataires n’ont aujourd’hui plus de relais de masse pour porter leurs revendications sur le terrain politique. Il est urgent que les syndicats brisent leurs liens privilégiés avec des partis traditionnels pour qui la moindre parcelle de contrôle qu’ils peuvent encore exercer sur les syndicats est un argument à faire valoir auprès de la classe dirigeante.



    Le MAS propose de considérer les revendications suivantes :

    • Plus de pouvoir d’achat par plus de salaire et des allocations liées au bien-être, pour que nous ne payons pas nous-mêmes nos augmentations comme avec des réductions de taxes : 1€ de plus par heure
    • Un index qui reflète réellement le coût de la vie, pas d’accords all-in
    • Abolition de la norme salariale, des accords interprofessionnels comme dans le passé, avec un seuil salarial et non un plafond (un minimum qui revient à tous, pour que les secteurs faibles puissent en bénéficier également)
    • Pour les collègues qui tombent hors de l’AIP: casser tout les accords salariaux de plus de 2 ans, tel que l’accord 2005-2010 dans le non-marchand
    • Une suppression de la TVA sur les produits de première nécessité
    • Un plan massif de construction de logements sociaux publics

    Pour financer cela :

    • Une forte répression de la grande fraude fiscale
    • Un impôt sur les grandes fortunes

    Ces dernières mois, nous avons pu constater à quel point il est désastreux de laisser des secteurs-clés tels que l’énergie et les banques à l’avidité du secteur privé. Quand des grandes banques se trouvent en difficulté, l’Etat peut alors soudainement intervenir. Pour nous, le contrôle de tels secteurs revient à la collectivité. Nous plaidons donc pour leur nationalisation sous le contrôle démocratique du mouvement ouvrier et de toute la collectivité.

  • De nouveau la crise sur BHV

    Un point de vue marxiste

    Presque un an après les élections, la population continue à regarder avec stupeur le vaudeville politique. Dans une période où de plus en plus de gens peinent à maintenir leur niveau de vie, la bagarre autour de BHV est repartie de plus belle.

    Anja Deschoemacker

    Pourquoi le district électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde fait-il ainsi flamber les émotions ? C’est un dossier symbolique dans lequel les « grands principes nationalistes » jouent à fond. Mais c’est aussi une question bien concrète où tout changement de structure aura des conséquences pratiques et une question très « technique » parce que le statut particulier de BHV est devenu une exception depuis l’introduction des districts électoraux provinciaux.

    L’excitation actuelle trouve son origine dans la défaite électorale historique du CVP en 1999. Le parti gouvernemental par excellence a du devenir un parti d’opposition, mais avec un espace très réduit pour le faire. Il ne pouvait en effet pas vraiment s’opposer à la politique néolibérale du gouvernement violet (sauf pour dire qu’elle n’allait pas assez loin). Il a donc essayé, comme il l’avait fait plusieurs fois par le passé, d’aller puiser dans sa réserve électorale nationaliste flamande en aiguisant ses revendications communautaires et en concluant un cartel avec la N-VA.

    De l’autre coté de la frontière linguistique, le carrousel de BHV se déroule au milieu d’une lutte pour le pouvoir entre le PS et le MR. La scission de BHV ne ferait pas seulement perdre un gros paquet de votes au MR mais provoquerait aussi des problèmes internes avec le FDF. Quant au PS, s’il embraye aussi sur la question communautaire, c’est parce que sa crédibilité sur le plan social est fortement minée après 20 années de participation dans des gouvernements néolibéraux.

    Des deux côtés de la frontière linguistiques, les partis se sont englués dans la surenchère communautaire. Celui qui apparaîtra comme trop indulgent sera décrit par les autres comme « traitre » à la propre communauté linguistique. Mais celui qui plongera à nouveau le pays dans le chaos en provoquant des élections anticipées à cause d’une rigidité exagérée devra aussi payer un prix électoral pour cela, tellement la population en a marre, et cela partout dans le pays.

    Il y a des problèmes à Bruxelles-Hal-Vilvorde, comme les prix exorbitants du logement, les difficultés qu’ont les minorités pour avoir accès à des services dans leur propre langue, les harcèlements mutuels,… Mais ni la scission de BHV (l’option des partis flamands) ni l’élargissement de Bruxelles (celle des partis francophones) ne résoudront ces problèmes. Aucune mesure institutionnelle ne rendra plus abordable le coût du logement dans la périphérie bruxelloise – seul un développement massif du logement social pourrait y parvenir. Mais entretemps, les faits accomplis et les provocations verbales s’accumulent. La seule manière d’arrêter ce cercle devenu vicieux est de mener la lutte pour des droits bien définis pour tous les travailleurs et leurs familles, à commencer par le droit de travailler et d’avoir accès aux services publics dans sa propre langue.

    Le seul groupe dans la population qui pourrait résoudre ce problème – parce qu’il ne veut pas soumettre la majorité de la population à des intérêts minoritaires et n’a donc pas d’intérêt à la diviser – est la classe des travailleurs, la grande majorité de la population en Belgique qui travaille ou qui vit d’une allocation.

    Mais cette classe ne peut faire jouer à plein sa force afin de conquérir un progrès social que quand elle est unifiée. C’est pourquoi les travailleurs flamands doivent s’opposer aux politiciens flamands nationalistes qui prétendent parler en leur nom. C’est pourquoi aussi les travailleurs francophones ne doivent pas identifier les travailleurs flamands avec les politiciens et des organisations patronales flamandes comme le VOKA ou l’UNIZO.

    La raison fondamentale pour laquelle tous les partis considèrent la moindre question de façon communautaire est qu’aucun parti ne défend les intérêts de l’ensemble du mouvement ouvrier et que ces partis ont, au contraire, tout intérêt à pouvoir diviser la population travailleuse. Et c’est encore plus vrai aujourd’hui qu’hier, alors que la crise économique qui commence va conduire inévitablement à de nouvelles attaques contre la population.

    Les syndicats jouent un rôle important en défendant l’unité de la concertation sociale, de la sécurité sociale et de la politique du marché d’emploi. Mais pour élaborer un vrai point de vue représentant les intérêts de notre classe, un parti des travailleurs est nécessaire, au sein duquel un point de vue indépendant et uni du mouvement ouvrier pourra être élaboré de façon démocratique.


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  • Festival de Cannes: Les contribuables belges payent 400.000 euros

    Les contribuables belges payent 400.000 euros

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    Tout le potentiel du cinéma belge n’était pas à Cannes…
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    Le festival de Cannes fait parler de lui. A nouveau, cette rencontre internationale a suscité beaucoup d’intérêt… y compris parmi les politiciens belges ! Vous serez certainement intéressés de savoir, si vous n’y étiez pas, votre argent y était! Les contribuables belges (vous et moi, donc) ont ainsi déboursé au moins 400.000 euros (!) pour assurer la présence des politiciens et de stand de promotion de la Belgique.

    Cinq ministres sont, entre autres, partis à Cannes, dont Didier Reynders, Bert Anciaux, Jean-Claude Marcourt et Michel Daerden (qui a déjà une certaine expérience en tant qu’artiste après ses passages sur You Tube…). Michel Daerden, qui s’est rendu à Cannes à titre privé, a logé dans sa propre villa (d’une valeur d’environ 750.000 euros). Une soirée belge à la « Plage des Goélands » a coûté entre 50.000 et 65.000 euros et le pavillon belge est revenu à presque 150.000 euros. Sans les frais de Reynders et d’Anciaux, qui ne sont pas connus, on arrive à un total de 400.000 euros minimum. Vous vous demandez où se trouve l’argent dont le secteur culturel a besoin ?

  • Pride, not profit ! Pour une Gay Pride combative !

    Pride, not profit !

    Aujourd’hui se déroule la Gay pride à Bruxelles. Cet évènement trouve son origine dans une nuit d’émeutes de 1969 à Stonewall, aux Etats-Unis, sous le slogan porté avec force : "Gay Rights now !". C’est là qu’a commencé un mouvement sans précédent pour les droits des lesbiennes, des gays, des bi et des transsexuels (LGBT). L’histoire de la Gay Pride est donc une histoire de lutte.

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    Nos camarades britanniques en campagne à la Gay Pride de Londres en 2007.
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    Cette lutte est maintenant en arrière-plan, même à la Gay Pride qui est largement devenue une fête. On pourrait ainsi croire que la lutte a été menée et est terminée puisque des droits tels que la possibilité de se marier et d’adopter des enfants par des couples homosexuels ont été obtenus.

    En réalité, toutes les discriminations sont néanmoins restées en place : dans la famille, à l’école, sur les lieux de travail, etc. Les LGBT’s rencontrent toujours des difficultés pour se manifester tels qu’ils sont sans que ne suivent des harcèlements. Des couples homosexuels sont ainsi toujours confrontés à la discrimination dans la recherche d’un logement, la violence homophobe est toujours présente,…

    Si actuellement les homosexuels disposent des mêmes droits que tout le monde, force de constater qu’à l’instar du reste de la population – et certainement des groupes socialement les plus faibles (immigrés, femmes, personnes à faible niveau de scolarité,…) – ces droits ne peuvent être appliqués qui si les moyens suivent. La lutte de Stonewall ne s’est pas déroulée par coïncidence à un moment où le taux de chômage était bas, les salaires hauts, les services publics élaborés,… Les jeunes LGTB’s avaient alors l’opportunité de quitter la maison parentale dans le cas ou ces parents n’acceptaient pas l’orientation sexuelle ou le style de vie de leur enfant. Les emplois offraient sécurité et indépendance financière et il était donc possible d’accéder à un logement.

    A l’heure actuelle, un jeune mis à la porte par ses parents doit essayer vivre sur base d’emplois temporaires et intérimaires ou de maigres allocations sociales. Les patrons et les riches rejettent la crise de leur système sur toute la population, ce qui a des conséquences supplémentaires pour les LGBT’s dans le sens où cela rend encore plus difficile de vivre sa sexualité propre.

    Discriminations et pénuries vont de pair:

    Plus de moyens sont nécessaires !

    La discrimination ne peut se produire qui si il y a pénurie dans l’offre ; dans l’offre de bons emplois par exemple, ou encore de logements de qualité et abordables. Dans une situation de taux de chômage bas et avec assez de logements abordables, le patron et le propriétaire doivent prendre ce qu’ils peuvent avoir.

    Autre exemple: le sous-financement de l’enseignement conduit ce secteur à devoir mener plus de tâches à bien avec moins de personnel. Pour une éducation sociale, relationnelle et sexuelle qui mérite son nom, il faut des moyens supplémentaires et plus de personnel. Des enquêtes démontrent que les jeunes – et les jeunes LGBT encore plus que les autres – se posent une foule de questions sur des thèmes relationnels et sexuels sans nulle part trouver de réponses. L’enseignement est aussi le lieu par excellence où la lutte contre les préjugés omniprésents et les manigances homophobes de ceux qui veulent diviser pour mieux régner peut se mener à grande échelle. Mais sans moyens, cela reste évidement impossible.

    La baisse du pouvoir d’achat consécutive à la hausse des prix rapide des logements et loyers ainsi que des produits de base comme l’énergie et la nourriture n’épargne pas les LGBT’s. Pour eux, c’est un développement qui mine la liberté obtenue par la lutte. Pour nous – la commission LGBT du MAS/LSP – la Gay Pride doit donc à nouveau devenir une journée de lutte au lieu d’une simple fête (bien qu’on aime la fête…)

    Les difficultés auxquelles les LGBT’s non financièrement aisés sont confrontés dans la vie courante existent malheureusement aussi dans de larges pans de la vie culturelle du milieu gay. Nous voulons donc ici faire entendre une voix de protestation contre la commercialisation de la Gay Pride et contre les prix exorbitants qui doivent y être payés: 400 euros pour participer comme groupe non commercial avec un char, entre 400 et 700 euros pour mettre un stand contre l’homophobie,… En général, le milieu gay est financièrement inaccessible pour beaucoup de LGBT’s : les prix des fêtes et d’événements sont prohibitifs, les bières sont à 2,5 euros, etc.

    Les revendications que nous voulons mettre en lumière ne sont pas neuves et une partie d’entre elles ne sont pas des revendications purement LGBT. C’est que, comme écrit ci-dessus, les LGBT’s ne vivent pas sur une île isolée du reste de la société.

    Nous voulons nous battre pour:

    • Un plan national de lutte contre les préjugés et contre la violence envers les LGBT’s dans lequel l’enseignement et les médias publics ont un rôle important à jouer.
    • Une augmentation du budget pour l’enseignement qui atteigne 7% du Produit Intérieur Brut avec une partie de ces moyens supplémentaires réservés à une éducation relationnelle et sexuelle de qualité et d’un jeune âge, où la sexualité LGBT reçoit sa place justifiée et où peut se mener la lutte contre les préjugés.
    • Un bon boulot pour tout le monde : pour la semaine des 32 heures, sans perte de salaire et avec embauches compensatoires.
    • Une hausse du pouvoir d’achat par une augmentation salariale de 1 euro/heure et par une augmentation drastique du salaire minimum dans les secteurs à bas salaires.
    • Une augmentation significative et réelle des allocations et le couplement des allocations au développement du bien-être.
    • Un logement de qualité et abordable pour tous, pour un plan massif de construction de logements sociaux et de rénovation des villes.

    Nous voulons mener cette lutte avec tous ceux qui ont intérêt dans ce programme, c’est-à-dire l’écrasante majorité de la population qui doit travailler pour vivre ou qui autrement ne sait survivre que sur base d’une allocation.

    Si la lutte est menée ensemble contre ceux qui ont intérêt dans la division des personnes – qu’importe si cette division se fait sur base de l’origine nationale, du sexe, de la religion,… ou de la préférence sexuelle – en d’autre termes : les patrons et les grands actionnaires des grandes entreprises, nous pouvons alors arriver à une société dans laquelle l’exploitation, l’oppression et la discrimination seront des choses du passé parce que plus personne n’y aura intérêt.


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  • Quelle Belgique demain ?

    Bi-communautaire, tri-régionale, multi-embrouillée…

    Rudy Demotte, président de la Région wallonne et, depuis peu, de la Communauté française, et Charles Picqué, ministre-président de la Région bruxelloise, ont rendu public le 17 avril un texte commun qui fait pas mal de bruit.

    Jean Peltier

    Ils y affirment que « seule une Belgique fédérale, construite à partir de trois Régions fortes, établies sur pied d’égalité, permettra d’atteindre un équilibre institutionnel mature et satisfaisant pour tous » et, dans la foulée, proposent de remplacer la Communauté française née en 1970 par une Fédération birégionale Wallonie-Bruxelles. Serait-ce un oubli de leur part de ne pas mentionner la Communauté germanophone?

    Des documents qui visent à réformer l’architecture institutionnelle du pays, il en sort quasiment toutes les semaines depuis la crise ouverte par les élections de juin dernier. Et comme une « vraie » réforme de l’État (après les zakouskis qui ont accompagné la formation du gouvernement Leterme) devrait être conclue pour juillet, il serait étonnant que ce rythme ralentisse à l’avenir. Pourquoi alors s’intéresser particulièrement à cette proposition-ci ? La réponse tient en trois points. Primo, elle est signée par les deux « ministres-présidents » francophones, par ailleurs tous deux dirigeants du PS, ce qui n’est pas rien. Deuxio, elle pourrait peser sur le bras de fer qui s’annonce dans les prochaines semaines autour de la réforme de l’État. Et tertio, si elle était appliquée, elle modifierait sérieusement les rapports de forces politiques au sein du pays.

    Pour saisir l’enjeu, il faut comprendre comment fonctionne le fédéralisme en Belgique. Côté flamand, il y a une structure unique, à la fois Région et Communauté, mais (comme rien n’est jamais simple chez nous) celle-ci a choisi comme capitale Bruxelles, la ville cosmopolite par exellence avec une large majorité francophone ! Par contre, côté francophone, il y a une Région wallonne et une Région bruxelloise qui ont des pouvoirs de plus en plus larges et peuvent lever des impôts mais il y a aussi une Communauté franco-phone qui est responsable des mati-ères liées à la langue, en premier lieu l’enseignement et la culture. Mais cette Communauté ne peut pas lever des impôts et elle doit fonctionner avec de l’argent versé par les Régions et par l’Etat fédéral. Dans les faits, beaucoup de matières chevauchent allègrement les frontières entre les deux Régions et la Communauté, ce qui provoque la création de multiples « Comités de concertation » entre toutes les structures existantes. Bref, c’est confusion et maux de tête à tous les étages. Et, depuis des années, on cherche à remettre un peu d’ordre dans tout cela.

    Pendant longtemps, le conflit a été vif entre régionalistes (essentiellement une aile du Parti Socialiste, autour des Happart et de Van Cauwenberghe, et de la FGTB wallonne) et communautaristes (essentiellement présents à droite, au CDH et surtout au MR). Depuis des dizaines d’années, les régionalistes perdent du terrain avec le recul économique de la Wallonie et la dernière crise politique a vu Reynders, Milquet mais aussi Di Rupo rivaliser de chants d’amour à la Belgique et, pour sauver celle-ci, de grandes déclarations sur l’unité éternelle des francophones.

    Le document Demotte-Picqué semble marquer un retournement en mettant l’accent sur les deux Régions. Il y a là évidemment une solide dose de calcul politicien : les partis flamands veulent une Belgique organisée sur base des trois Communautés (et dans laquelle celle des 6,1 mill-ions de Flamands pèserait plus que celle des 3,4 millions de francophones wallons et des 1 million de Bruxellois majoritairement francophones!) et des trois régions (Flandre, Wallonie et une Bruxelles bilingue) tandis qu’une Belgique tri-régionale dans lequel les francophones seraient majoritaires dans deux Régions serait plus favorable à ceux-ci.

    Mais, au-delà, la proposition des deux compères reste à ce stade très floue : veulent-ils liquider radicalement la Communauté en remettant ses compétences aux Régions et en mettant ensuite en place une structure légère pour coordonner les politiques de ces deux Régions ou sont-ils prêts à se contenter d’un lifting de façade de la Communauté ?

    On pourrait se dire que tout cela n’est qu’amusement pour politiciens coupés des vrais problèmes. Mais les conséquences pourraient être bien plus profondes. Adapter l’enseignement, la formation, la culture,… à des situations régionales différentes n’est pas scandaleux en soi. Mais la communautarisation de l’enseignement il y a vingt ans a été de pair avec une baisse du financement de l’enseignement; côté francophone, deux vagues de rationalisation dans les années ’90 ont coûté plus de 6.000 postes d’enseignant. Parmi les syndicalistes de Bruxelles, certains plaident en faveur de la régionalisation de l’enseignement. A Bruxelles, la communautarisation a eu comme effet néfaste de créer deux systèmes sous-financés en compétition. Si ces syndicalistes plaident en faveur de la régionalisation, ce n’est pas pour diviser encore plus, mais dans le souci d’avoir un même sys-tème pour tout l’enseignement à Bruxelles. Mais si cela se fait en pleine crise économique et avec des caisses publiques largement vidées par des années de réductions d’impôts accordées au patronat, régionaliser l’enseignement risque bien de se passer de la même manière que la communautarisation dans le passé.

    C’est bien là le vrai problème – et c’est évidemment celui que Demotte et Picqué, en adeptes pas honteux pour un sou de la politique néolibérale, n’abordent pas.

    Trouver une solution aux « problèmes communautaires » qui soit satisfaisante pour la population implique non seulement que la population puisse donner son avis sur la réforme de l’Etat qu’elle voudrait mais surtout que la « régionalisation » ne casse pas les conditions de travail, ne diminue pas les services rendus par le secteur public, ne mette pas les travailleurs des diverses régions en concurrence,… et qu’au contraire des moyens importants soient mis en œuvre pour améliorer les conditions de vie et de travail. Or, c’est bien tout le contraire que la « fédéralisation » du pays à la sauce néolibérale de privatisations et de compétitivité nous a apporté depuis trente ans.


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  • PS: De “OK Patron” à “OK Corall”

    Règlements de comptes au PS… Vous avez vos pop corns?

    Jean Peltier

    On s’amuse dans les colonnes du « Soir ». Van Cauwenberghe et Janssens s’en prennent à Di Rupo qui nomme comme ministres des « petits jeunes » (qu’il sait ambitieux et qu’il espère reconnaissants) en dédaignant royalement les parlementaires chevronnés et expérimentés (eux, par exemple). Philippe Moureaux flingue Laloux qu’il veut voir démissionner et reproche à Di Rupo sa mollesse envers ceux qui manquent d‘éthique (suivez son regard vers Anne-Marie Lizin). Demotte et Picqué glorifient les Régions et descendent en flamme la Communauté française actuelle, en sérieux décalage avec Di Rupo qui n’a pas cessé de vanter ces derniers mois la primauté de la solidarité communautaire francophone. Y a pas à dire, c’est fête tous les jours au PS…

    Il faut dire que les sondages se suivent en répétant le même message : le PS continue à reculer tant en Wallonie qu’à Bruxelles. Et Di Rupo, qu’on a effectivement connu plus flamboyant par le passé, semble incapable d’inverser la tendance. Dès lors, les couteaux s’aiguisent et les prétendants à une éventuelle succession commencent à s’agiter. Il n’y a qu’une seule question que ces messieurs-dames ne (se) posent pas : si, au-delà des « affaires », c’était la politique néo-libérale que le PS mène au pouvoir depuis vingt ans qui faisait fuir peu à peu son électorat ouvrier et populaire ?


    Pour en savoir plus:

  • Lucky Reynders arrose les patrons plus vite que son ombre

    Cadeaux fiscaux

    La Belgique : ses frites, sa bande dessinée, ses intérêts notionnels. Une nouvelle campagne de promotion de la Belgique a été lancée par les gouvernements fédéral et régionaux d’inciter les investisseurs étrangers à se tourner vers notre pays. Le personnage choisi pour animer cette campagne est Lucky Luke ! Histoire d’illustrer la politique de cow-boy des politiciens traditionnels ?

    Peter Delsing

    Les salariés normaux ont récemment bénéficié d’une baisse d’impôts mais ce que l’Etat donne aux travailleurs d’une main, il le reprend de l’autre : impôts locaux et soi-disant «écologiques» ont ainsi augmenté et sont venus s’ajouter à la hausse des prix de la nourriture, du mazout, du loyer, etc.

    Les patrons, eux, n’ont pas à se plaindre de leur pouvoir d’achat. Les mesures pour augmenter leurs revenus sont prises plus rapidement, comme avec la réduction des impôts sur la personne physique qui profite surtout aux gros revenus.

    Intérêts fictifs et profits réels

    La déduction des intérêts notionnels est une mesure supplémentaire qui permet aux patrons de réduire leurs impôts (de près de 2,4 milliards d’euros par an) en plus des réductions déjà « classiques » des contributions patronales à la sécurité sociale (entre 5 et 6 milliards d’euros par an).

    Cette déduction des intérêts notionnels est destinée à compenser l’abolition des « centres de coordination », une mesure que l’Etat belge avait prise pour attirer les multinationales et que l’Union Européenne a fini par lui faire supprimer. Ces centres ont permis aux grandes entreprises de réduire fortement leurs impôts. Tandis que les salariés doivent payer au moins 43% d’impôts (pour que les services publics que nous avons payés soient peu à peu vendus au privé par la suite…), les multinationales n’ont parfois à payer que 1% ou encore moins d’impôts.

    Le coup des «intérêts notionnels» vise au même but. Lorsque des entreprises doivent emprunter en banque pour investir, elles peuvent déduire les intérêts de cet emprunt de leurs profits avant de payer leurs impôts. Désormais, si elles investissent en utilisant leurs propres capitaux, elles pourront déduire de leurs profits des intérêts fictifs (« notionnels ») équivalents aux intérêts qu’elles auraient dû payer si elles avaient eu recours à un emprunt en banque.

    Officiellement, il s’agissait d’éliminer des discriminations entre entreprises et d’attirer des capitaux étrangers, tout en créant beaucoup d’investissements et d’emplois, ce qui devait compenser le coût de cette mesure. En réalité, il s’agit d’une subvention aux profits patronaux qui rend surtout les actionnaires plus riches.

    Nous exagérons ? Pas du tout. Le gouvernement avait déjà mené une campagne de promotion à l’étranger en 2005 pour faire la publicité des intérêts notionnels, le bébé favori de Verhofstadt et de Reynders. Son slogan était : « Invest in Belgium. Increase your profit » (Investissez en Belgique. Augmentez vos profits) ». Comme ça, vous l’entendez aussi de quelqu’un d’autre que nous…

    Paradis fiscal sélectif

    Le fisc ne laisse rien passer aux modestes salariés, mais les grandes et moyennes entreprises ne sont guère menacées de telles investigations : seules 4% d’entre elles sont contrôlées de façon approfondie sur base annuelle. Avec un peu de chance, cela signifie donc un contrôle toutes les 25 ans ! Alors que le gouvernement et l’ONEm ne laissent aucun répit aux chômeurs, le personnel chargé des contrôles fiscaux a été consciemment limité.

    Les études universitaires les plus récentes estiment que la fraude fiscale nous coûte chaque année 30 milliards d’euros. Combien d’emplois stables et bien payés généreraient ces milliards d’euros, sans devoir passer par des cadeaux plantureux aux patrons ?

    Les fédérations patronales belges ne cessent d’envoyer des communiqués de presse déclarant que la fraude sociale des chômeurs doit être attaquée et que les allocations doivent être limitées dans le temps. Mais qui sont donc les véritables profiteurs ?

  • Leterme a fini par décrocher son job

    Leterme a fini par décrocher son job

    Ce qui est social n’est pas concret !

    Cette fois, ça y est, Leterme 1er est devenu réalité. Mais, bon, cela n’empêche pas la presse d’estimer à la quasi-unanimité que ce nouveau gouvernement est tout aussi intérimaire ou transitoire que le précédent. Au finish, les neuf mois de crise politique et les trois mois de gouvernement intérimaire n’ont débouché que sur une « déclaration d’intentions » en lieu et place d’un réel accord. Les promesses sociales sont toutes très vagues et restent à concrétiser : il n’y a aucun chiffre ni aucune indication qui permette de deviner où sera trouvé l’argent nécessaire.

    Article d’Anja Deschoemacker

    Alors que les directions syndicales ont réagi de manière étonnamment modérée à l’accord gouvernemental, pas mal de propositions concrètes doivent pourtant faire frémir les syndicalistes.

    BENEDICTION DU PS, DU CDH ET DU CD&V A LA CASSE SOCIALE

    Il va ainsi devenir possible d’attirer des immigrés économiques pour boucher les pénuries sur le marché de l’emploi. Leterme 1er veut aussi approfondir « le suivi systématique des chômeurs » de plus de 50 ans (lire : pouvoir les forcer à accepter des emplois à bas salaires et à mauvaises conditions de travail). Le travail intérimaire doit devenir possible dans les services publics, même s’il est dit que ce sera à des « conditions exceptionnelles et temporaires ».

    A chaque fois, il est précisé que l’élaboration de ces mesures doit s’effectuer en concertation avec les partenaires sociaux. Le PS et le CD&V espèrent obtenir des accords qui auront reçu la bénédiction des directions syndicales, raison pour laquelle certaines mesures d’adoucissement figurent dans le texte, même s’il est déjà certain qu’il n’y aura pas suffisamment d’argent pour les financer toutes.

    Citons encore les nouvelles diminutions de charges pour le travail en équipe et de nuit et surtout l’annualisation de la semaine de 38 heures. Ce dernier point est présenté comme une manière de faire passer la récupération des heures supplémentaires de façon « plus flexible », « pour le patron aussi bien que pour le travailleur. Les travailleurs peuvent par exemple compenser une période dans laquelle ils veulent être plus à la maison en travaillant plus durement dans une autre période de l’année ». Pourtant, la revendication de moins de stress et de moins de pression au boulot résonne toujours plus clairement. Mais désormais, vous devrez travailler plus durement quand ça arrange le patron, et travailler moins… quand ça arrange le patron. Et hop ! Tout le « problème » des heures supplémentaires « trop chères » disparaît dans un paquet de secteurs.

    POUR LE RESTE: ATTENDRE !

    Sans disposer de chiffres, aucune comparaison ne peut être faite entre les moyens dégagés pour le pouvoir d’achat et ceux consacrés aux cadeaux pour les patrons. Mais les mesures en faveur du pouvoir d’achat seront extrêmement limitées. En affirmant sa volonté de développer des coûts salariaux « plus favorables » (pour le patronat) en comparaison avec nos plus importants partenaires (et concurrents) commerciaux, le gouvernement a donc déjà prévenu que le moyen le plus efficace pour améliorer le pouvoir d’achat de la population – une réelle augmentation des salaires et des allocations – n’était pas pour lui une option. « La société » va devoir payer pour l’augmentation des coûts et pour compenser l’argent que le patronat ne verse plus grâce aux nombreuses diminutions des charges, à la déduction des intérêts notionnels et à la fraude. Mais la société… c’est nous.

    Il n’est toutefois pas certain que ce gouvernement va rester debout longtemps. Le premier obstacle est pour l’été, puisque le deuxième paquet de la réforme de l’Etat doit être prêt à la mi-juillet. Le deuxième sera pour septembre avec le nouveau budget, qui devra cette fois aboutir à des données chiffrées.

    Et en cas de survie, il y aura toujours BHV, combiné à la fièvre électorale en prévision des élections régionales. Leterme veut mettre en place un gouvernement stable reposant sur le principe que les intérêts de la bourgeoisie doivent être satisfaits à tout moment et que les autres intérêts sont secondaires. Mais ce gouvernement sera tout de même fort probablement un «gouvernement de transition» dans lequel les bagarres vont continuer jour après jour.

    Le mouvement ouvrier doit garder les yeux grands ouverts : travailleurs et allocataires vont devoir payer avant même qu’une crise économique ne donne l’occasion aux héritiers du vieux PSC-CVP de faire appel à leurs talents les pus reconnus : lancer, la larme à l’œil, des appels déchirants à ce que «tous» se serrent la ceinture.

  • Intérêt notionnels : PS/SP.a : A gauche toute ?

    La guerre semble déclarée entre «socialistes» et libéraux. Principale pomme de discorde : les intérêts notionnels qui, selon Laurette Onkelinx, sont d’un « machiavélisme fiscal inouï ». Et Di Rupo de continuer: « la droite a vidé les caisses ». Et quoi les gars ? Vous n’avez pas été au pouvoir avec les libéraux ces 8 dernières années ?

    Nicolas Croes

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    Une fiscalité pour les riches !

    En 1996, l’impôt moyen sur les sociétés était encore de 45%. Aujourd’hui, il est (officiellement) de 33,99%. Encore de trop ? Selon l’institut canadien C.D. Howe Institute, la Belgique se positionne en tête d’une liste de 36 pays industrialisés et de 45 en voie de développement comme la destination la plus intéressante en matière d’investissements. Les calculs d’un professeur de l’Université de Toronto – relayés par le VLD et le quotidien l’Echo, en octobre 2006 (déjà) – illustrent que les intérêts notionnels auraient fait chuter d’un seul coup l’impôt réel moyen sur le capital étranger investi de 23,5% en 2005 à -4,4% en 2006 !

    Il faut encore ajouter que tous les bénéfices des entreprises ne sont pas taxés. Loin, très loin, de là. Pour l’exercice d’imposition 2003, par exemple, les bénéfices des entreprises étaient de 46,212 milliards d’euros. Après les nombreuses déductions, la base soumise à l’impôt n’était plus que de 20,277 milliards d’euros. De fait, les impôts des entreprises représentent aujourd’hui moins de 12% des recettes fiscales de l’Etat.

    Qui paye le reste? Nos salaires et allocations soi-disant trop élevés…
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    Car à l’époque de la mise en place de ces fameux intérêts notionnels, les « socialistes » ont été beaucoup moins critiques… Annemie Roppe (SP.a-/Spirit) l’avait à l’époque qualifié de « projet révolutionnaire » dont employeurs, salariés et syndicats «peuvent être fiers». Eric Massin (PS) déclarait, lui, que l’opération était «indolore du point de vue budgétaire» et que rien ne permettait de «remettre en cause les chiffres présentés», c’est-à-dire 566 millions d’euros. Et pourtant…

    Derrière ces intérêts « conceptuels »…

    …il y a une manœuvre magnifique. Un coup en or pour les patrons. Quant aux po(n)tes « socialistes », ils ont été, au mieux, des dupes incapables de la déceler ou, plus probablement, des complices enthousiastes de ce véritable hold-up légal.

    A la base de tout cela, il y a la polémique sur l’existence en Belgique des Centres de Coordination qui appartiennent à des multinationales et qui jouent pour elles le rôle de banquier. En encourageant la création de ces Centres, le gouvernement visait officiellement à attirer les quartiers-généraux des multinationales pour créer de l’emploi (même si les conditions en termes d’emplois sont de 10 équivalents temps-plein engagés par chaque centre !).

    Que payent-ils comme impôts ? Quasiment rien. En 2002, les 207 centres de coordination fonctionnant en Belgique ont payé 73 millions d’euros d’impôts pour un bénéfice de… 5,36 milliards d’euros! Un taux d’imposition de 1,36%! Par rapport à celui des sociétés encore en vigueur à l’époque, le manque à gagner pour l’Etat était de 2,08 milliards d’euros.

    Mais l’Union Européenne a jugé que ces Centres de Coordination relevaient de la concurrence déloyale vis-à-vis des autres pays. Alors, au lieu de supprimer cette pratique, Didier Reynders l’a appliquée à tout le monde (enfin, aux entreprises…) sous la forme des désormais fameux « intérêts notionnels ».

    Il s’agit d’un mécanisme permettant aux entreprises ayant fait des investissements sans passer par des emprunts bancaires (et donc sans payer d’intérêts) de déduire des intérêts « fictifs » équivalents de leur déclaration d’impôts. Reynders avait fait la promesse totalement ridicule que cela allait coûter beaucoup moins que les Centres de Coordination. Et cette fois, sans l’argument de la création d’emplois, mais avec celui de la suppression d’une inégalité (on croirait rêver).

    Aujourd’hui, le même Reynders avoue que la mesure coûte (au bas mot) 2,4 milliards d’euros au lieu des 566 millions de départ. Et ce n’est certainement pas dans son intérêt de surévaluer ce chiffre, bien au contraire…

    Les « socialistes » aveugles ?

    Ce n’est qu’en janvier de cette année que le PS a commencé à formuler des critiques. Pour Laurette Onkelinx : « On ne peut faire un budget 2008 sans réformer les intérêts notionnels ». Car, que cela soit bien clair, aucun parti traditionnel ne réclame, malgré leurs hauts cris, l’annulation de ces cadeaux « offerts » aux patrons par les contribuables. C’est juste que, sous la pression de l’arrivée de la crise économique, les patrons vont vouloir en faire payer les dégâts aux travailleurs. Le PS et SP.a, en voulant amender quelque peu ces intérêts notionnels scandaleux, affirment simplement haut et fort que sans un minimum de poudre aux yeux, cela ne passera pas… Qui en sera dupe ?


    Beaucoup d’informations fiscales de cet article et du cadre ci-contre sont tirées de l’ouvrage de Marco Van Hees «Didier Reynders, l’homme qui parle à l’oreille des riches».

  • Une chose est certaine : la crise politique continue

    Incertitude pour l’après 23 mars

    La guéguerre politique continue sans que son intensité diminue. Le compteur de la crise gouvernementale a beau être arrêté, il est bien difficile au premier coup d’œil de comprendre qui est dans l’opposition et qui est au gouvernement.

    Anja Deschoemacker

    Tout semble possible : un nouveau gouvernement (lui aussi temporaire !) comme la poursuite de l’actuel (avec une réorganisation des ministères) – ce qui ferait peu de différence dans les faits… Comme nous l’avions dit immédiatement après les élections, le seul gouvernement possible sera un gouvernement instable, quelle que soit sa composition.

    Au CD&V, on travaille assidûment à un changement de cap. C’est surtout la vieille garde qui est à l’œuvre, celle qui sait comment passer des compromis de façon relativement « digne » au nom du « pragmatisme ». Pour le nouveau président du CD&V, Etienne Schouppe, ce parti ne doit pas être à thème unique : tout miser sur le plan communautaire pourrait mettre plus encore en danger ses liens avec la CSC et le Mouvement Ouvrier Chrétien. Il est clair que la population en a marre du « tout communautaire » et que ceux qui seront considérés comme coupables du chaos devront en payer le prix, tant au CD&V qu’à la NV-A.

    Du côté libéral, le VLD, qui a connu la défaite du 10 juin, peut compter sur le MR, devenu à cette occasion le premier parti francophone. L’enjeu pour les libéraux est de maintenir et renforcer leur position de plus grande « famille » politique. Mais ils craignent cependant de se retrouver en minorité au gouvernement entre les « partis syndicaux ».

    Le PS veut retrouver rapidement sa place de premier parti francophone, ce qu’illustrent notamment ses attaques contre la déduction des intérêts notionnels (qu’il avait pourtant approuvée dans le précédent gouvernement !). Le PS essaie de reprendre le costume qui lui avait si bien réussi ces dernières vingt années : celui de parti d’opposition au sein du gouvernement. Il peut compter sur le soutien des dirigeants du CDH, enragés contre Reynders, et qui désirent plus que tout assurer leur position de partenaire indispensable du PS à tous les niveaux de pouvoir.

    Pour tous ces partis, seul compte l’horizon de juin 2009. Des élections regroupées, à la fois au niveau régional et fédéral, seraient l’occasion de remettre un peu d’ordre afin de préparer une confrontation directe avec le mouvement ouvrier qui est plus difficile avec des élections toutes proches.

    Il est probable qu’entetemps, l’une ou l’autre réforme d’Etat aura été élaborée. Cela ne sera pas un Big Bang, mais plutôt un compromis belge classique, justifiée au nom du soi-disant « intérêt général ». En fait, même si ces partis ont chacun leurs propres intérêts, ils sont tous liés les uns aux autres par leur propre « intérêt général » : celui de l’élite riche, de la classe dirigeante. L’idée sera de régionaliser le plus possible les coupes dans les budgets (sous couvert de « responsabiliser » les régions) afin d’affaiblir la lutte contre les futurs plans d’austérité.

    La population sera évidemment sollicitée pour « apporter sa pierre à l’édifice ». On demandera donc d’accepter des attaques contre les fonctionnaires, une nouvelle « modération salariale », la poursuite de la chasse aux chômeurs, des contributions individuelles plus importantes des malades pour les soins de santé,… Les partis traditionnels voudront bien sûr aller chercher cet argent chez « tout le monde »… à l’exception du patronat.

    Syndicalistes, militants de terrain, vrais socialistes, restons vigilants et ne nous laissons pas aveugler par la poudre aux yeux qui est bien la seule chose que les partis établis sont prêts à nous distribuer sans compter…

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