Category: Europe

  • ‘‘Pussy Riot’’, les bouc-émissaires de Poutine

    Personne ne les a vu venir ces ‘‘rockeuses punks féministes de la troisième génération’’ qui se surnomment les ‘‘Pussy Riot’’ et se vêtissent de Balaklavas aux couleurs éclatantes et de bas collants de laine. Il aurait en effet été difficile de prévoir, il y a un an, qu’elles deviendraient non seulement un symbole de l’opposition grandissante au régime de Poutine mais aussi le sujet de ses colères vindicatives. Trois membres de ce groupe ont été arrêtées en février pour avoir participé à une ‘‘prière punk’’ à l’autel de la cathédrale orthodoxe principale de Moscou. Elles ont été accusées ‘‘d’hooliganisme’’ et retenues en prison depuis six mois alors que deux d’entre elles sont mères de jeunes enfants. Elles n’ont pas pu voir leurs compagnons, leurs familles ou leurs amis jusqu’à aujourd’hui.

    Par Rob Jones, Moscou

    Désormais, les ‘‘Pussy Riot’’ représentent plus un mouvement politique qu’un groupe musical. Elles ont de nombreux membres qui agissent sous les pseudonymes de Blondie, Terminator, Garage, Séraphin, Le chat, Schumacher et qui échangent leurs noms dès que nécessaire afin de conserver l’anonymat. Des dizaines de personnes soutiennent leurs actions multiples qui peuvent aller de la simple satyre à la pure provocation. Au départ, des membres ont pris part à des actions organisées par le groupe ‘‘Voina’’. Par exemple, ils ont peint un organe génital masculin sur l’un des ponts tournants de Saint-Pétersbourg. Quand le pont était levé la nuit, ceux qui travaillaient dans les bureaux de la police politique (FSB) en face, se sont retrouvés à contempler ce commentaire pictural représentant ce que de nombreuses personnes pensent de leurs activités. Mais les actions sont devenues de plus en plus politiquement explicites au fur et à mesure que l’opposition au régime de Poutine grandissait dans les manifestations de masse. Les termes utilisés dans leurs ‘‘prières punks’’ sont clairement anti-Poutine et contre la hiérarchie cléricale.

    Leur participation à la ‘‘prière punk’’ dans la ‘‘Cathédrale du Christ-Sauveur’’ à Moscou a enragé l’élite au pouvoir. Ils ont pratiquement unanimement demandé à ce que des actions fermes soient prises à l’encontre de ces femmes. La cathédrale symbolise à elle seule toute la pourriture de la nouvelle Russie capitaliste, construite (ou plutôt reconstruite sur le site de l’ancienne cathédrale commémorative de la victoire russe face à Napoléon) dans la moitié des années ’90, elle est minée par des scandales de corruption. Pendant le pic de la dépression économique qui a suivi l’effondrement de l’Union Soviétique, le régime d’Eltsine a dépensé des millions de roubles afin de construire cette église. Ses dômes ont été plaqués avec 50 kilogrammes d’or, offert par un nouveau banquier oligarque à la réputation criminelle. Aujourd’hui, seulement 7% de la cathédrale est utilisée pour les services religieux, le reste accueille toute sorte d’activités commerciales. Mais tout cela importe peu aux yeux de l’Eglise Orthodoxe Russe, l’une des Eglises les plus réactionnaires au monde. Au contraire, les portes paroles de l’Eglise Orthodoxe russe ont défilé les uns après les autres pour littéralement diaboliser les ‘‘Pussy Riot’’. Selon l’avocat de l’Eglise, les ‘‘Pussy Riot’’ représentent une forme de ‘‘pouvoir supérieur tentant détruire l’Eglise Orthodoxe Russe. Il s’agit de la même force qui est à l’origine des actes terroristes du 11 septembre aux Etats-Unis : Satan !’’

    Vsevolod Chaplin, le porte-parole officiel de l’Eglise blâme en premier lieu le ‘‘groupe diabolique’’ et en second lieu le ‘‘gouvernement mondial’’ (dans l’histoire de la Russie, il s’agit d’un synonyme pour parler d’une conspiration juive). Il a expliqué que ces groupes étaient étroitement liés à Satan. Il croit que les rockeuses-punks sont des pêcheuses qui devraient être sévèrement punies. Quand on lui demande de justifier cela, il dit que c’est ‘‘Dieu’’ qui le lui a dit !

    Chaplin est connu pour ses croyances réactionnaires et violentes. Plus tôt cette année, il a exigé que les travaux de Lénine et de Trotsky soient jugés ‘‘extrémistes’’ et retirés de circulation. Il a continué en déclarant qu’il croyait qu’il s’agissait d’un devoir moral pour tous les chrétiens du monde de tuer autant de bolchéviques que possible. Ce n’est pas étonnant de voir que l’Eglise orthodoxe soit souvent vue aux côtés des fascistes lors des manifestations contre le droit à l’avortement, contre les droits des femmes ou encore contre la communauté LGBT.

    Aucun des partis officiels parlementaire ne s’est opposé à la campagne vicieuse menée à l’encontre des ‘‘Pussy Riot’’. Au début du dernier procès, Genaddy Zyuganov, le leader du parti ‘‘communiste’’ russe a publié un communiqué de presse dans lequel il ‘‘rejette fermement la dernière provocation anti orthodoxe’’. Lors d’une interview à la radio, il a même été plus loin. Il s’est plaint de l’influence grandissante de l’Occident et de l’OTAN et a prévenu que le ‘‘Printemps Arabe aurait des conséquences tragiques sur les Chrétiens’’. Il a expliqué que le Parti Communiste ‘‘est à une large échelle le représentant de l’Eglise Orthodoxe en politique. J’ai toujours défendu et défendrai toujours les intérêts des croyants… Nous sommes prêts à utiliser toute notre influence pour défendre la réputation et l’autorité des prêcheurs qui ont souffert du ridicule, des calomnies et de la diffamation.’’

    Les ‘‘Pussy Riot n’ont pas bénéficié d’un procès équitable. Le juge n’a pas arrêté de faire des commentaires contre elles, l’avocat général des chefs d’accusation a soumis plus de 200 pages de preuves sans laisser le temps aux avocats de la défense de les lire. De plus, les témoins qui désirent parler en faveur du groupe sont rejetés par le juge.

    Il est assez perturbant de voir que le juge a demandé l’avis d’un expert-psychiatre, tout comme Staline utilisait les hôpitaux psychiatriques afin de punir les dissidents. Cet expert a déclaré que les trois femmes souffraient de troubles de la personnalité, qu’il a décrit dans un cas comme ‘‘voulant une position sociale active et un désir d’autoréalisation’’ et pour les autres comme ‘‘une tendance aux activités d’opposition’’ ! Apparemment entendre la ‘‘voix de Dieu’’ et appeler ‘‘au meurtre d’autant de Bolchéviques que possible’’ n’est pas considéré comme un trouble de la personnalité !

    Néanmoins l’affaire des ‘‘Pussy Riot’’ n’est pas un cas isolé. Elle s’est accompagnée d’une vague d’autres arrestations associées à une croissance du mouvement de l’opposition. Le bureau du procureur se confronte à de nombreux leaders connus tel que le blogger de droite Aleksei Navalniy. Les accusations les plus récentes datent du temps où il agissait en tant que conseiller du gouverneur régional de Kirov, quand il a préconisé un contrat de vente sur le bois de construction de la région, ce qui a conduit à des pertes financières significatives, si pas, comme le procureur le dit, à la mauvaise utilisation de fortes sommes d’argent. Cette accusation est particulièrement ironique compte tenu du fait que Navalny a mené une campagne contre la corruption nommée ‘‘Pilrus’’ basée sur le mot commun utilisé pour désigner la corruption ‘‘scier l’argent’’. Il risque jusqu’à dix ans d’emprisonnement pour ces accusations.

    Cependant, parallèlement à ces cas célèbres, 16 autres activistes ont été arrêtés et attendent leurs procès pour des accusations qui pourraient bien en laisser certains en prison pour plusieurs années.

    Mais le régime se trouve dans l’impasse avec ces arrestations. Les arrestations des ‘‘Pussy Riot’’ ont conduit à d’énormes contestations à l’échelle internationale. Peter Gabriel, Sting, Steven Fry, Danny de Vito, Terry Gilliam et Pete Townsend font partie de ceux qui soutiennent publiquement le groupe. Des groupes internationaux qui jouent des concerts en Russie montrent de plus en plus de solidarité envers les ‘‘Pussy Riot’’ en portant des tee-shirts ou en donnant aux autres membres du groupe du temps pour jouer. C’est le cas par exemple de Franz Ferdinand, des Beastie Boys, de Patti Smith, de Faith No More et des Red Hot Chilli Peppers. Même si de nombreux artistes russes continuent à soutenir le régime en place, en sachant bien que s’ils s’y opposent, ils perdront leur temps d’antenne, il est significatif de voir que plus de 100 artistes en vogue, nombres d’entre eux étaient encore récemment pro-Poutine, se soient exprimés contre le régime.

    Mais ce qui est bien plus inquiétant pour le régime, c’est que la population toute entière commence à changer de point de vue brusquement. Dans les semaines qui ont suivi l’action, la vaste majorité de la société russe soutenait les actions du gouvernement contre le groupe, vu la condamnation sans appel de tous les officiels ainsi que des hauts responsables de toutes les croyances russes confondues. Néanmoins, les dernières enquêtes d’opinion montrent que plus de 20% des Russes (cela représente environ 30 millions de personnes) sont prêts à protester activement contre le gouvernement.

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière en Russie appelle à la libération immédiate des ‘‘Pussy Riot’’ mais aussi de tous les autres opposants arrêtés lors des récentes manifestations d’opposition. Toutes ces accusations doivent être levées. Il doit y avoir une séparation immédiate entre l’Eglise Orthodoxe Russe et l’Etat à tous les niveaux. Une réelle liberté d’expression – avec le droit de critiquer l’Etat, le Président et l’Eglise – doit être instaurée à tous les niveaux. Le régime de Poutine doit se diriger vers la création d’une assemblée constituante démocratique formée par des représentants des lieux de travail, des institutions de l’éducation et des zones résidentielles afin de décider quelles sont les meilleures formes de gouvernement pour la Russie. Un parti de masse des travailleurs avec un programme socialiste prêt à se battre pour le pouvoir politique doit être construit et il est impératif de construire une nouvelle société socialiste libre du capitalisme, des bureaucrates et des prêtres.

  • Aggravation de la crise sociale et politique en Italie

    Les possibilités de création d’un nouveau parti des travailleurs grandissent

    L’année 2012 a vu les crises économique, sociale et politique s’aggraver encore plus en Italie. Après la Grèce, l’Italie est un des pays les plus touchés par la crise au sein de l’Union Européenne. Le FMI estime à 2,2% la diminution du PIB italien pour 2012. Le taux de chômage y a atteint son niveau le plus élevé depuis 2001, 1 jeune sur 3 se retrouvant officiellement sans emploi. Durant les premiers mois de l’année, 150.000 entreprises ont dû mettre la clé sous la porte – l’équivalent de 1.600 fermetures par jour.

    Giuliano Brunetti, Controcorrente (CIO-Italie)

    Selon l’ISTAT (Institut National de la Statistique), 8,3 millions d’Italiens (12% de la population) vivent sous le seuil de pauvreté tandis que 5% d’Italiens vivent dans une situation de pauvreté alarmante. Pendant ce temps, le gouvernement a voté le Pacte Fiscal et une nouvelle « révision des politiques publiques ». Appliquer ces deux mesures signifierait une réduction drastique des fonds alloués à la santé publique et le licenciement de 130.000 employés du secteur public. D’ores et déjà, 35% des jeunes sont sans emploi et dépendent de leur famille pour survivre.

    Maintenant que la Constitution italienne impose d’équilibrer le budget, avec l’objectif de réduire la dette publique (123,8% du PIB) de 5% par an, cela veut dire que jusque 2023, les différents gouvernements devront mettre en oeuvre des coupes budgétaires de 45 milliards d’euros par an.

    Ces données chiffrées, factuelles, sont le meilleur indicateur de la profondeur de cette crise, de ses sévères répercussions pour l’homme de la rue et des abysses vers lesquelles le capitalisme traîne la société.

    Crise du système politique

    La crise économique s’est traduite dans le langage cru d’une crise politique. En fait, on peut même dire que le système entier a été secoué par plusieurs tremblements de terre. Les classes dirigeantes sont maintenant confrontées à un tumulte grandissant dans leurs rangs. Pas une seule institution n’a été épargnée par la crise : la Cofindustria (Fédération des patrons italiens), l’Eglise catholique et même la Fédération Nationale de Football ont été affaiblies par des scandales de corruption, de pots-de-vin, par des divisions internes.

    Au récent Congrès National de la Cofindustria, le président de la fédération n’a été élu qu’à une majorité de 11 votes seulement. C’est la première fois dans l’histoire de cette institution qu’un président est élu avec une majorité si ténue. Ces divisions sont l’expression de tensions bien réelles au sein des classes dirigeantes, particulièrement dans les rangs des gros industriels.

    Dans ces circonstances, il serait correct de dire que leur seule force réside dans la faiblesse des organisations des travailleurs et particulièrement de leur ligne de conduite politique.

    Le gouvernement technocrate dirigé par le banquier Mario Monti, composé de quelques uns des « plus fins stratèges » de la classe capitaliste italienne, est isolé dans la société italienne : moins d’un Italien sur trois le soutient. Et seulement 4% des Italiens disent faire confiance aux partis politiques !

    Tous les partis politiques majeurs, de la Ligue du Nord au PDL (Peuple de la Liberté) de Berlusconi en passant par le PD (Parti Démocrate) doivent faire face à une forte réduction de leur soutien populaire, tout en sachant que la moitié des Italiens n’ont pas voté aux dernières élections locales.

    La Ligue du Nord, qui pendant de nombreuses années a construit son caractère populaire autour de son opposition aux élites corrompues des salons romains, est à son tour secouée par des scandales de corruption. Ces derniers impliquent l’achat d’un diplôme pour le fils de l’ancien chef de file Umberto Bossi ou encore l’acquisition de diamants et de propriétés en Tanzanie via les caisses électorales du parti.

    Confrontés à la colère dans leurs rangs, les élites de la Ligue ont préféré écarter leur leader historique pour élire Roberto Maroni, ancien ministre de l’intérieur sous le gouvernement Berlusconi, au poste de Secrétaire Fédéral.

    Il y a quelques mois, le PDL se targuait encore d’être le premier parti d’Italie, affirmant compter un million de membres dans ses rangs. Mais aux dernières élections locales, le parti a subi une défaite cuisante, perdant des centaines de mayorats et finissant troisième voire quatrième dans certaines villes, souvent avec moins de 10% des suffrages.

    Le possible retour de Berlusconi sur la scène politique est quant à lui le dernier geste désespéré et grotesque du capitaine essayant de sauver son navire sur le point de couler.

    Le PD, même lui, a perdu des dizaines de milliers de votes, en partie dans des bastions de longue date du PD. Cependant, la base électorale du PD a mieux tenu que celle du PDL.

    Beppe Grillo et le Mouvement 5 Etoiles

    Le nouveau facteur pouvant bouleverser le champ politique italien est incarné par le succès sans précédent du Mouvement 5 Etoiles. Mené par Beppe Grillo, humoriste millionnaire reconverti en politique, le Mouvement 5 Etoiles n’est ni un parti politique, ni une alliance, ni un mouvement social comme nous aurions l’habitude d’en voir. Le mouvement a été construit autour d’Internet, d’un site web, mettant en avant des visions politiques très généralistes prônant le rejet des politiques de droite comme de gauche. Le mouvement de Beppe Grillo n’a pas vraiment de liste de membres, de structure, de ramifications visibles ou encore de dirigeants élus. Grillo a bâti son autorité en proclamant la différence entre son mouvement et la caste politique corrompue. Bref, avec une façon obsolète de faire de la politique.

    Il a érigé ses forces sur les ruines de la gauche traditionnelle, débâcle politique et organisationnelle du Parti de la Refondation Communiste (PRC) incluse. Avec sa rhétorique radicale, Grillo a pu attirer vers son mouvement une nouvelle frange de la société – des jeunes provenant généralement de milieux de gauche mais également de milieux de droite, parfois même de la Ligue du Nord.

    On estime à 20% les intentions de vote pour son mouvement. Ce résultat ferait du Mouvement 5 Etoiles la seconde force politique en Italie. A l’heure actuelle, le mouvement a déjà plusieurs centaines de conseillers locaux élus. Certains mayorats ont aussi été obtenus, notamment dans la ville de Parme, cité d’une taille déjà conséquente. Le succès de Beppe Grillo doit être vu comme étant l’expression du rejet des partis traditionnels et des énormes possibilités existant pour une une opposition, un mouvement alternatif au sein de la société italienne.

    Cependant, cet engouement est plus basé sur une perte de confiance et un dégoût envers la politique dite traditionnelle, plutôt que sur un enthousiasme positif et constructif que le mouvement aurait suscité. Ce succès est donc extrêmement volatile : il serait ainsi plus approprié de parler de rassemblement contre le reste du paysage politique plutôt que de soutien pour Grillo et son mouvement à proprement parler.

    Le Mouvement 5 Etoiles pourrait drainer plus de soutien dans un futur proche mais son inaptitude à adopter un programme clair pour répondre aux besoins des gens ordinaires, en addition d’une absence d’ancrage réel dans la société, pourrait nous indiquer un déclin après l’ascension vertigineuse que l’on a pu observer.

    A ce moment-là, des milliers de militants du Mouvement risquent de finir déçus, découragés et en quête d’une autre solution politique. La gauche et le mouvement ouvrier se devront alors de proposer une solution aux nombreux jeunes gens, aux nombreux travailleurs ayant été dans un premier temps séduits par la rhétorique « anti-système » de Beppe Grillo.

    ALBA, le Comité Anti-Dette et le combat pour la fondation d’un nouveau parti des travailleurs

    Comme l’a démontrée la montée en puissance du «Grillismo », nous vivons une situation extraordinaire, une période où l’accélération des processus sociaux et historiques est flagrante, caractérisée par une décomposition/recomposition rapide du paysage politique.

    Rarement auparavant a-t-on ressenti aussi fort le besoin d’une entité politique nouvelle ; une arme dans les mains de celles et ceux qui veulent se battre et résister aux attaques frontales menées par les oligarques sur les droits et les conditions de vie des classes populaires.

    Aujourd’hui, le débat est ouvert autour de cette problématique : elle ne peut plus être postposée ni évitée. La tentative de la direction du syndicat métallurgiste (la FIOM) d’envoyer un « ultimatum » aux partis politiques démontre bien la volonté de certains militants actifs dans les milieux industriels de trouver un moyen d’expression, un mégaphone à utiliser pour organiser la lutte et rallier ceux qui veulent s’unir contre le système en place.

    Le 1e octobre 2011, un millier d’activistes, leaders syndicalistes et autres travailleurs luttant pour leurs droits répondirent présent à l’appel lancé par Giorgio Cremaschi, ancien leader de la FIOM, ainsi que par certaines sections du Syndicat de la Base (USB). Cet appel proposait de bâtir une organisation de lutte et de discussion autour d’un programme politique anti-crise.

    Le « manifeste » politique qui fut approuvé à la première assemblée générale du « Comité Anti-Dette » s’articulait autour du besoin d’un côté de rejeter l’étranglement provoqué par la dette publique et de l’autre d’argumenter en faveur d’une nationalisation des banques – et de la finance en général – sous contrôle démocratique avec pour objectif de faire payer aux responsables la crise du capitalisme.

    Cependant, le sentiment de découragement, de résignation, la frustration ambiante concernant la situation politique, l’appel à la grève générale (d’abord postposée puis finalement abandonnée) de la Confédération Générale Italienne du Travail (CGIL), accumulés à l’inaptitude à transformer en propositions politiques concrètes la demande de non-paiement de la dette, ainsi que l’opportunisme avec lequel certaines composantes d’organisations de gauche telles que Sinistra Critica (Secrétariat Unifié de la Quatrième Internationale) et Falcemartello (Tendance Marxiste Internationale) ont « oeuvré », tout cela a au cours des derniers mois stoppé dans leur élan les processus de construction, renforcement et consolidation du Comité Anti-Dette et ses composantes territoriales.

    Il n’est pourtant pas exclu qu’avec l’intensification de la crise de l’euro et le renforcement de la dette, le Comité puisse résoudre ses remous internes. Cependant, cette hypothèse n’est pas la plus probable de toutes.

    En parallèle, une discussion s’est ouverte concernant une proposition lancée par « Il Manifesto », journal politique de gauche. Cette proposition est connue sous le nom d’ALBA, une association entre diverses campagnes visant à protéger la propriété publique et l’environnement. ALBA a tenu son premier meeting national à Florence. Des activistes de mouvements sociaux divers, des leaders syndicalistes ainsi que des citoyens ordinaires s’y sont joints. Le programme politique d’ALBA doit certes encore être défini mais apparaît d’ores et déjà très confus.

    Néanmoins, nous ne pouvons pas écarter la possibilité que cette initiative puisse attirer le soutien de tous ceux ayant perdu leurs illusions concernant les partis traditionnels, et donc à la recherche d’un nouveau « foyer politique ».

    Le succès du Mouvement 5 Etoiles montre toutes les possibilités offertes par une telle situation politique et surtout qu’un espace vacant politique de cette importance ne peut persister bien longtemps. Il peut y avoir d’énormes possibilités, d’énormes opportunités mais en l’absence d’une réelle alternative de gauche, d’autres forces – de droite y compris – peuvent occuper la place laissée libre par l’effondrement de la gauche traditionnelle.

    Dans le futur, Controcorrente continuera d’oeuvrer dans les alliances, de faire campagne pour une lutte organisée et de promouvoir l’exigence d’une grève générale de 24 heures comme première étape dans le combat contre le gouvernement Monti et ses attaques.

    En même temps, nous continuerons de coopérer avec le Comité Anti-Dette ainsi qu’à suivre le développement d’ALBA, tout en restant ouverts à toute initiative nouvelle qui pourrait émerger, autour du FIOM par exemple.

  • Entre les ténèbres capitalistes et l'Aube Dorée : rapport du débat sur les tactiques et stratégies marxistes à adopter en Grèce

    Depuis plusieurs années le Comité pour une Internationale Ouvrière (internationale du PSL – LSP) tient son école d’été, lieu de débat, de rencontres et de conférences entre militants de tout horizon qui leur permet de faire le point sur les différentes situations nationales et internationales et sur les taches que les militants, conscients des enjeux actuels pour la classe ouvrière, se doivent d’accomplir. Cette école d’été revêt cependant un caractère bien particulier compte tenu de la situation explosive du moment : les mouvements de masses en Espagne & en Grèce, la création de nouvelles formations de gauche qui réunissent de larges pans de la classe des travailleurs, l’approfondissement de la crise du capitalisme … et à la croisée de tout cela, la situation en Grèce.

    Par Clément (Bruxelles)

    Ces 4 dernières années la Grèce à été secouée par plusieurs plans d’assainissement, par des scandales de corruptions massifs touchant l’establishment grec, par la mainmise de la troïka (BCE- UE -FMI) sur son économie et sa politique. Points négatifs s’il en est, cela n’a pas moins engendrée des réponses massives de la part des jeunes et des travailleurs : pas moins de 16 grèves générales, une manifestation qui a compté 800.000 travailleurs en octobre, 2.000.000 de personnes qui ont refusés de payer l’impôt supplémentaire imposé par le gouvernement, plus de 500.000 participants aux occupations de places et d’entreprises, des assemblées générales sur ces occupations qui ont amenés de éléments nouveaux pour la démocratie et pour l’organisation des jeunes et des travailleurs dans leur lutte contre le système capitaliste, le « mouvement des patates » qui a permit la mise en rapport avec les producteurs locaux et les consommateurs court-circuitant ainsi la grande distribution et diminuant de 15% le prix de vente : la révolution et la contre-révolution sont en marche.

    Tous ces éléments (et bien d’autres) montrent la capacité des travailleurs à s’organiser et à se défendre contre le système qui les exploite. Cela montre également à quel point la conscience de la nécessité de lutter, de s’organiser et de militer pour une alternative socialiste commence à pénétrer et à toucher un nombre toujours plus large de la société à tel point qu’il s’en est fallu de peu pour que la première force politique du pays ne soit un parti de gauche radicale : SYRIZA.

    Le 28 % obtenu par SYRIZA aux dernières élections ont été ressentis par les classes dirigeantes grecque et européenne comme un séisme politique : pour la première fois depuis longtemps l’opposition devenait anticapitaliste et radicale. Pour toutes ces raisons il était essentiel de se pencher sur les tactiques et stratégies à adopter dans cette situation révolutionnaire et sur le processus, le développement et la maturité de la révolution en Grèce. Ceci constituait une introduction à la discussion (sur les stratégies à adopter) menée à l’école d’été et ce qui suit, l’essentiel des débats menés durant cette discussion.

    Le camarade Andros, de Grèce, ayant expliqué la situation sur place a commencé à développer plus en détail le travail de notre organisation sœur en Grèce XEKINHIMA, la section grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière, et de notre point de vue sur SYRIZA.

    En 2010, le CIO et XEKINHIMA ont développé un programme et des revendications pour la Grèce. Celui-ci (qui préconise notamment l’abolition de la dette, la nationalisation des secteurs clés de l’économie ou encore le contrôle ouvrier de l ‘économie) tout d’abord raillé par l’ensemble des organisations de gauche, a été par la suite adopté par la quasi-totalité d’entre-elles. Ce programme prévoyait des mesures révolutionnaires qui permettraient de sortir la Grèce du marasme capitaliste dans lequel elle se trouve et mettre en place une vraie démocratie sous contrôle des jeunes et des travailleurs.

    La révolution et la contre-révolution ne sont cependant pas linéaire : il y’a des flux et des reflux, il y aura des retraites ou des défaites comme nous nous devons de nous battre pour des victoires. Typiquement, après plusieurs mois de luttes, la combativité a fait place à une certaine forme de résignation. Et les néofascistes d’« Aube Dorée » sont entrés au parlement. Les deux sont liés, l’histoire l’a montré. Et le fait que leurs actes de violence dans la rue comme sur les plateaux télé n’aient en rien entachés leur pourcentage de vote montre que même si ils sont un vote contestataire il y a aussi toute une partie de la population qui se rallie consciemment à leurs positions et à leurs méthodes en pensant y trouver là une alternative au système capitaliste et à la crise. Pourtant ils agressent physiquement immigrés, homosexuels, membres du KKE (Parti communiste Grec) ou de SYRIZA (avec qui ils sont d’ailleurs les deux grands gagnant de ces élections).

    Le reste de la gauche ne bouge pas sur ce problème et n’organise, pas encore du moins, la défense des quartiers contre les intrusions des militants de ce parti. Mais une autre intervention viendra plus loin sur ce sujet et le camarade Andros développe un autre point important : dans une telle période décisive les choix tactiques et stratégiques effectués sont déterminant.

    Les organisations de gauche sont amenées à se positionner sur des questions complètement nouvelles, dont personne n’aurait pu prévoir la venue sur le devant de la scène et pour lesquelles il faut prendre des décisions. Celles-ci ne seront pas toujours les bonnes mais si c’est le cas, l’apprentissage sur le terrain de la lutte permettra de les corriger.

    XEKINHIMA a essayé de se positionner comme un catalyseur de la lutte : en effet les luttes sont volatiles, dispersées, manquent d’organisations entre elles (1). Dans ce sens XEKINHIMA est intervenu dans des réseaux de syndicats locaux avec une proposition de grève générale de 48h et a étendu cette revendication a un appel a toute la gauche sous forme de plan d’action commun et en réanimant le mouvement des « enragés » via des occupations. Malgré les efforts pour rallier la gauche, nous nous sommes heurtés au sectarisme de plusieurs organisations dont le KKE : on remarque donc bien l’absence de compréhension de la situation des directions.

    Sur cette base XEKINHIMA et deux syndicats dont les directions sont ouvertement marxistes ont décidé d’occuper le ministère de la santé, avec le soutien de ceux qui y travaillent. Bien que l’occupation n’ait pas eu lieu toute la campagne autour de cette action a grandement conforté la place de XEKINHIMA et l’opinion que les travailleurs en avaient.

    Le camarade Andros poursuit son exposé de la situation en indiquant que l’opinion parmi les travailleurs, est qu’après la grève générale de février les travailleurs se sont tournés vers les élections comme moyen d’expression de leur frustration. Les médias ont alors mis SYRIZA sur le devant de la scène. Crédité de 35% d’intention de vote, SYRIZA est descendu à 28% pour ne pas avoir su convaincre (par son programme) et ce notamment sur la question de continuer ou non avec l’Euro comme monnaie.

    De plus SYRIZA a entamé, deux semaines avant les élections, un virage à droite en reculant sur ses revendications (pas de nationalisations sauf « si il y en a besoin », remettre le salaire minimum à son niveau d’origine et seulement si la conjecture économique le permet). Cependant SYRIZA a réalisé un excellent score qui a fait de lui la deuxième force politique du pays (1,6 millions de votes). Cependant 90% des votants se disent sceptique quant à la suite des combats politiques : beaucoup attendent avec intérêt ce que fera SYRIZA par la suite.

    De nouvelles questions apparaissent pour les militants les plus conscients et les plus radicalisés de la société grecque : comment s’organiser pour lutter, seuls, dans une nouvelle hypothétique formation de gauche ou revenir dans SYRIZA ? Car en 2011 XEKINHIMA avait décidé de quitter la formation SYRIZA.

    Aujourd’hui, par la qualité de ses interventions et de son programme XEKINHIMA travaille en étroite collaboration avec Syriza qui lui a proposé d’intégrer le Comité Central, le comité Exécutif et a même proposé un poste de secrétaire permanent à XEKINHIMA. Andros continue en indiquant que SYRIZA se retrouve avec une série de défi. L’un d’entre eux étant de réactiver ses sections militantes locales celles-ci ayant été inactives depuis 2 ans, avec la revitalisation de SYRIZA sur la scène politique les sections ont recommencés à se tenir régulièrement où XEKINHIMA est intervenue (avec un excellent retour sur ces interventions).

    Un autre des défis de SYRIZA sera d’empêcher la bureaucratisation au sein de l’organisation : avec la déroute du PASOK, un bon nombre d’anciens bureaucrates des directions syndicales corrompues ou des instances même du PASOK, sont venus avec l’intention de profiter de la vogue de SYRIZA pour pouvoir mener à bien leurs tentatives opportunistes et manoeuvristes et ainsi conserver la part du gâteau qu’ils avaient pu obtenir quand le PASOK était la première force du pays. XEKINHIMA s’opposera bien évidemment à eux mais cela ne sera victorieux que s’il y a une politique consciente de l’ensemble de SYRIZA.

    Si ces bureaucrates ne sont pas écartés du parti alors les couches plus larges de la population et les travailleurs qui viendront d’y adhérer s’en détourneront rapidement.

    La tâche de XEKINHIMA est de combattre le réformisme de ces bureaucrates qui auparavant brisaient les grèves. Cette tâche se place dans un rôle plus large de XEKINHIMA qui est d’être dans une certaine mesure dans SYRIZA, de voir, d’évaluer et d’estimer combien de forces XEKINHIMA doit mettre dans SYRIZA (et ainsi diffuser nos idées parmi une formation large de travailleurs) sans oublier d’en préserver pour pouvoir se développer également en dehors de SYRIZA. Il est déterminant d’arriver à analyser la situation, de déterminer les tactiques et stratégies les plus adaptées, de trouver les bons mots d’ordres et revendications et voilà pourquoi il convient d’être prudent. XEKINHIMA prendra une décision démocratiquement sur ce qu’il convient de faire, quels seront les tâches et les rôles de l’organisation et quelles seront les perspectives quand à la direction de SYRIZA et à son attitude.

    En effet le gouvernement n’aura pas « d’État de grâce », 68% de la population vivant sous le seuil de pauvreté il devra agir vite. Il en va de même pour SYRIZA, car le chaos économique pouvant arriver d’un jour à l’autre avec la sortie récente du vice-président de la DeutscheBank qui considérait que le mieux pour la Grèce serait de vivre dans une économie avec deux monnaies (ce qui aurait pour résultat une spéculation accrue ,l’apparition du marché noir … ) et qu’actuellement SYRIZA ne dispose pas d’un leadership suffisant pour mobiliser les masses et passer à l’offensive sur le terrain aux côtés des travailleurs alors que cette situation est une occasion d’importance qui nécessite de passe à l’offensive avec des revendications comme la nationalisation de pans entiers de l’économie sous contrôle ouvrier.

    Si SYRIZA passait à l’offensive, elle serait poussée sur sa gauche et pour pouvoir assurer ce tournant à gauche XEKINHIMA doit se renforcer en tant qu’organisation à part qui a des liens forts avec les travailleurs et les jeunes, ce qui sera une condition indispensable pour le développement et la consolidation de l’organisation et de ses positions. Une chose peut cependant nous rassurer sur ce sujet, XEKINHIMA est la seule à ne pas avoir scissionné alors que la gauche grecque est dans un processus de changement permanent ce qui favorise les scissions.

    Une autre des tâches qui nous incombent est de continuer à lier des liens et des alliances avec les autres formations de gauche, ce qui nous prend beaucoup d’énergie. Ainsi nous sommes en discussion avec une tendance de la formation ANTARSYA, la seule en fait qui à rompu avec le sectarisme de celle-ci pour se rapprocher de SYRIZA.

    Comme toute l’intervention du camarade Andros a pu le montrer, les tâches qui sont les nôtres dans la situation actuelle sont énormes et cette discussion est essentielle. Mais le courage, la détermination et l’investissement de nos camarades est un exemple de volonté politique pour l’ensemble de l’internationale.

    Vint le tour du camarade Sasha (Allemagne) a mis en lumière l’importance de se centrer sur des questions concrètes et parlantes comme la réquisition des bâtiments vides de l’État et de la classe dirigeante pour palier à la crise du logement et à la pauvreté des travailleurs grecs, etc. Ces revendications peuvent être mises en parallèle avec celles développées par Lénine en 1917 (Terre, pain, paix).

    Puis il y eut l’intervention du camarade Stefan (du Secrétariat International) indiquant que nous devions apporter des éléments de réponses concrètes sur ce qui suivrait si nous chassions par la rue le gouvernement d’austérité imposée. SYRIZA est composée de militants capables et rompus qui savent mener une lutte sur le terrain. Ainsi l’un des défis de SYRIZA sera beaucoup plus de construire et de convaincre les travailleurs et les jeunes de se rallier en masse à SYRIZA et que la tache de XEKINHIMA sera de convaincre de mener la bataille dans SYRIZA (2) car SYRIZA est la seule alternative, il faudra recruter sur base de la création d’un nouveau mouvement de masse qui serait l’expression de la classe des travailleurs et des jeunes.

    La camarade Maria (Grèce) fit une intervention qui concerna exclusivement l’éclosion du mouvement « Aube Dorée ». Avec 7% des votes aux deux élections et 18 parlementaires, ils sont les autres gagnants de ces élections. Et (comme malheureusement en Allemagne dans les années trente) la gauche traditionnelle préfère nier l’existence du problème car selon eux « en parler serait leur faire trop d’honneur » (dixit le parti communiste grec – le KKE). Pourtant il faut bien se pencher sur ce phénomène de résurgence de l’extrême droite pour pouvoir le comprendre. En effet beaucoup de votants d’Aube Dorée sont des petits exploitants ou de petits commerçants acculés par la crise et surendettés qui critiquent les partis traditionnels (pour leurs bilans, leurs affaires de corruptions ou qui voient dans les syndicats affiliés aux partis traditionnels une part du problème) et pensent reconnaître en « Aube Dorée » (avec ses méthodes violentes) une vraie politique de rupture et de lutte contre la crise.

    Notre camarade souleva la nécessité d’une grande campagne antifasciste en Grèce dont ils ont déjà commencé à construire un embryon en faisant à toutes les associations possibles pour lutter contre ce fléau (syndicats, partis, associations de quartiers ou de parents d’élèves…) et occuper la rue et l’espace publique pour établir une résistance contre la montée du fascisme. Toutefois la camarade soulève le fait qu’il ne faut pas stigmatiser ceux qui votent « Aube Dorée » comme peuvent le faire certains groupuscules et qu’il fallait discuter des idées le plus possible et apporter aux interrogations des travailleurs des réponses concrètes. Cependant devant le danger que représente ce parti elle indique également qu’il va falloir sans doute se défendre physiquement contre les attaques des néofascistes.

    Tony, du secrétariat international, est intervenu après Maria, insistant encore sur la nécessité de savoir déterminer les bons slogans et les bonnes tactiques durant le processus de révolution et de contre révolution. Il indique cependant qu’il faut éviter le sectarisme typique de ce que Lénine appela le « gauchisme » et nous séparer des travailleurs et des jeunes par des slogans trop éloignés de la réalité du terrain ce qui desservira nos idées et notre organisation. Il prend pour exemple la guérilla chilienne qui compta jusqu’à 10.00 membres mais qui décroissa rapidement car ils ne parvenaient plus à convaincre la classe ouvrière, lassée d’une lutte qui n’amenait aucun changement. Aujourd’hui il y a un fort sentiment antiparti chez les jeunes, du généralement au comportement et au manque de réponse des partis traditionnels aux demandes de ceux-ci. Il faudra composer avec pour la période qui vient et les convaincre par nos actions et nos revendications de la qualité de notre organisation.

    Il continue en soulignant que ce seront les perspectives qui doivent dicter la tactique à adopter. Il remarque que le soutient à SYRIZA diminue car il y a toujours cette défiance et ce scepticisme présent parmi les travailleurs grecs.

    Il finit son intervention en parlant du rôle du parti révolutionnaire dans une organisation bien plus large rajoutant qu’on doit voir pour devoir de savoir évaluer les forces posées dans l’implication dans cette organisation. Aujourd’hui la situation est favorable à notre ré-implication dans SYRIZA (et d’un point de vue plus mondial également) notant que si notre présence et le sérieux de nos idées et de nos méthodes sont reconnus dans SYRIZA à tel point qu’il est possible que nous ayons dans l’avenir des élus ce qui serait d’une utilité non négligeable pour diffuser nos idées et montrer à la classe ouvrière ce qu’est un élu révolutionnaire. Cependant il termine par signifier que rien n’est acquis et que le défi qui nous est présenté est énorme et que la masse de travail devra être conséquente.

    Le camarade Andros concluait cette (courte mais intense) discussion sur les attitudes à avoir et les tactiques à adopter. Il a notamment beaucoup abordé la question de la construction de notre organisation.

    Notre capacité d’analyse de la situation nous a permis d’éviter de connaître les déchirements qui ont marqué les autres organisations, d’où la nécessité de peser et d’évaluer toutes nos taches et priorités avant de faire un pas tel que rejoindre SYRIZA en tant que tendance.

    Il a fini cette discussion sur les tactiques et stratégies marxistes à adopter en indiquant un point positif pour l’avenir du mouvement ouvrier à savoir qu’actuellement se créent (à notre initiative) des Comités de Défense Antifasciste dans les quartiers pour contrer les militants d’ »Aube Dorée », comités qui ont le contenu politique et les méthodes des milices ouvrières d’antan.

    Cette école d’été, rassemblant un grand nombre de cadres et militants révolutionnaires du monde entier et placées sous l’ombre de la situation mondiale explosive, aura permis de renforcer la confiance des militants en la capacité de leur organisation et les confortant dans la nécessité de s’organiser pour se battre, en Belgique dans le PSL – LSP, et de l’avenir de l’alternative socialiste.


    (1) Cette référence au catalyseur et issu d’une citation de Trotsky (dans Le Programme de transition de 1938) où Trotsky explique que le problème du prolétariat est la direction des partis dits révolutionnaires qui sont incapables de comprendre la situation. Il compare la direction à un cylindre à piston : « Sans organisation dirigeante, l’énergie des masses se volatiliserait comme de la vapeur non enfermée dans un cylindre à piston. Cependant le mouvement ne vient ni du cylindre ni du piston, mais de la vapeur. » Il signifie bien que le rôle d’une direction est de catalyser vers les bons mots d’ordres et les bonnes revendications au bon moment pour que la force des travailleurs puisse être victorieuse.

    (2) Cette question du rôle des élus de gauche est une question qui permet de différencier le PSL-LSP des autres partis dits de « gauche », car dans notre vision un élu révolutionnaire se doit d’être un outil à tout niveau que ce soit pour favoriser la lutte des jeunes et des travailleurs en défendant des points et un programme clair au sein des institutions bourgeoises : jamais nous ne tomberons dans l’illusion que nous pourrons changer ce système de l’intérieur. Un élu est pour nous un moyen de porter les revendications du monde ouvrier jusque dans les arcanes de l’État capitaliste.

  • Ouverture des Jeux Olympiques de Londres

    Les Jeux Olympiques de Londres commencent avec la cérémonie d’ouverture de ce vendredi 27 juillet, dont l’audience attendue est estimée à 1 milliard de personnes à travers le monde. Il ne sera pas question que de sport, loin de là. L’évènement est également marqué par une commercialisation tout bonnement crasse ainsi que par une augmentation de la répression d’Etat.

    Par Manny Thain, à partir d’un article de l’hebdomadaire Socialism Today (magazine du Socialist Party d’Angleterre et du Pays de Galles)

    Ci-contre : Protestations contre l’entreprise Dow Chemicals

    Tout a commence par un mensonge : les jeux devaient coûter £2,4 milliards de livres sterlings (un peu plus de 3 milliards d’euros). Ce chiffre n’a jamais été crédible. Il n’incluait par exemple pas la TVA (de 20%, soit 480.000 livres, 615.000 euros) ou les dépenses de sécurité (un milliard de livres, soit 1,3 milliard d’euros). En rajoutant cela, on parvenait à 3,9 milliards de livres (5 milliards d’euros). Le budget final a toutefois réussi à atteindre la somme astronomique de 9,3 milliards de livres (12 milliards d’euros).

    Il s’agit d’une véritable arnaque, une escroquerie massive pour la classe ouvrière et la classe moyenne, sur les épaules desquelles reposera l’écrasante majorité de ce coût avec les taxes directes et indirectes. Le gouvernement (grâce aux contribuables) a directement pris en charge 6,2 milliards de livres (8 milliards d’euros), le reste étant pour la plus large part issu de la loterie (c’est-à-dire une taxe indirecte sur les plus pauvres). Malgré les différentes déclarations qui avaient assuré la participation du secteur privé aux divers projets de construction, seuls 2% (!) du budget des Jeux Olympiques sont en réalité issus de fonds privés.

    Le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques d’été de 2012 à Londres (Locog, London Organising Committee of the Olympic Games and Paralympic Games) – le comité chargé de l’organisation, de la planification, du financement et du déroulement des Jeux olympiques d’été de 2012 et des Jeux paralympiques d’été de 2012 – a levé 2,1 milliards de livres supplémentaires (2,7 milliards d’euros), dont deux tiers proviennent du sponsoring assuré par le monde des affaires et du Grand Capital. Le Locog a reçu une contribution du Comité Olympique International (CIO), le reste provient de la vente de tiquets et du merchandising, c’est-à-dire de nos poches, encore une fois. Le Locog a à sa tête Lord Sebastian Coe, ancien athlète de haut niveau, ancien député conservateur, ambassadeur pour la multinationale Nike et multimillionnaire.

    Les Sponsors

    Les principaux sponsors du Comité International Olympique ont chacun payé 60 millions de livres (77 millions d’euros) pour des contrats de 10 ans. Comme il en va de soi sous le système capitaliste, ils ont reçu en échange des pouvoirs proprement colossaux. Il est ainsi interdit à ceux qui ne sont pas sponsors officiels d’utiliser le mot ‘Olympique’, le symbole des 5 anneaux ou encore la devise des Jeux Olympiques. C’est assez ironique dans le cadre d’un évènement basé sur la compétition…

    Afin de protéger les droits des compagnies de diffusion, les spectateurs ne sont pas autorisés de publier sur YouTube ou sur les médias sociaux des images des compétitions ou de l’intérieur du village olympique. Twitter bloquera tous les commentaries qui utilisent des termes comme ‘‘#London2012’’ et même les athlètes eux-mêmes n’ont pas le droit de publier des vidéos ou des commentaires audio de leurs propres performances ! Il faudra encore voir avec quelle rigueur seront appliqués ces lois, mais les indications reçues avant le commencement de ces Jeux donnent clairement l’impression que les autorités ne vont pas rigoler.

    Le journal ‘‘The Guardian’’ a reporté que sur les 80.000 sièges disponibles pour la finale du 100m hommes, seuls 29.000 (36%) iront au public. Pour les finales du vélodrome, 2.500 places iront au public sur 6.000. Il est toutefois encore possible d’avoir un ticket en passant par les réseaux officieux des 54 pays qui seront représentés à ces jeux, source d’un gigantesque marché noir. Le Comité International Olympique a bien été forcé de dire qu’il y aurait des enquêtes à ce sujet. Cela illustre le caractère pourri de l’administration des Jeux, dirigée par une petite clique à son sommet, avec des méthodes de clique élitiste.

    La ‘‘famille Olympique’’

    Le traitement préférentiel des 70.000 membres de la ‘‘famille Olympique’’ – représentants officiels, athlètes, médias, etc. – ne s’arrête pas là.

    C’est une chose d’assurer que les athlètes soient bien traités. Eux, au moins, ont vraiment un rôle à jouer dans ces Jeux. Mais c’en est une autre de dérouler le tapis rouge pour la horde des bureaucrates et dirigeants politiques, dont des représentants de régimes parmi les plus oppressifs au monde. Il y aura au moins une centaine de journées de grosses perturbations du trafic dans les rues de Londres, puisque de larges bandes sont exclusivement réservées à l’usage des Jeux.

    On pourrait croire que l’organisation des Jeux aurait été une bonne base pour relancer l’activité sportive dans le pays, mais il n’en est rien. Le gouvernement avait pour objectif d’augmenter le nombre de personnes faisant régulièrement du sport de un million d’ici 2013, mais ce but a été abandonné. Le nombre de nageurs réguliers pour les années 2010-11 représente une chute de 435.000 par rapport à 2007-08 (les données sont similaires pour le tennis, le football et le rugby). Parmi les jeunes âgés de 16 à 19 ans, le nombre de sportifs a diminué de plus de 100.000 personnes sur ce même laps de temps (pour ne plus représenter que 825.900 jeunes à travers tout le Royaume-Uni).

    La coalition au pouvoir (une alliance des conservateurs et des libéraux-démocrates) a repris le flambeau des mains du parti travailliste en ce qui concerne la destruction de la politique sportive dans les écoles. Depuis 2004, le budget pour les activités scolaires sportives a diminué de 216 millions de livres (277 millions d’euros) jusqu’à 35 millions (45 millions d’euros). Environ 3.400 entraîneurs ont été licenciés dans le pays, et les subventions de 1.300 terrains ont été supprimées.

    Le gouvernement a également supprimé des facilités pour les personnes connaissant des limitations (handicap mental ou physique), contrairement aux promesses qui parlaient d’augmenter la facilité d’accès du sports pour ces couches spécifiques. Pour l’instant, 18% des adultes handicapés ont des activités physiques régulières de plus de 30 minutes par semaine, contre 38% de la population adulte globale.

    Des jeux éthiques ?

    Le ministère britannique du travail et des pensions a signé un contrat avec la société AtoS Healthcare, filiale d’AtoS Consulting, pour évaluer les capacités de travail de personnes handicapées bénéficiant d’allocations d’invalidité. Ces évaluations sont très controversées. Il est notamment reproché à cette entreprise d’avoir conclu à la capacité de travailler de malades en phase terminale ou de personnes lourdement handicapées. Des milliers de personnes se sont retrouvées sans moyen à cause de cette Enterprise qui est un sponsor majeur des Jeux Paralympiques. Ces Jeux de Londres étaient censés être les plus éthiques jamais organisés. Le journal ‘‘The Independent’’ (du 6 mai 2012) a toutefois rapporté d’autres faits qui entachent gravement ces Jeux.

    Le journal cite notamment divers exemples de mauvais traitements dans des entreprises des Philippines et de Chine travaillant pour Adidas ou encore dans les usines de Next au sein de la zone de libre-échange du Sri Lanka. Aucune de ces entreprises n’autorise d’organisation syndicale. Dow Chemicals est un sponsor officiel des Jeux Olympiques de Londres (et a payé 63 millions de livres). Dow continue de refuser de reconnaître la moindre responsabilité dans la catastrophe de Bhopal (en Inde) en 1984. Cette catastrophe avait coûté la vie à 20.000 personnes et en avait blessé des centaines de milliers. Des procès intenté à la multinationale par des victimes sont toujours en cours aux USA et en Inde. Le Parc Olympique a également été l’objet de nombreuses protestations de la part de travailleurs du secteur de la construction, car les syndicats étaient dans les faits écartés du site.

    Un des héritages de ces Jeux sera l’accroissement des pouvoirs de répression de l’Etat. L’opération de sécurité derrière ces Jeux a atteint une ampleur jamais vue depuis la fin de la seconde guerre mondiale dans le Royaume-Uni. Au côté des 13.500 soldats et des milliers d’officiers de police se trouvent également 48.000 agents de sécurité privés. La société G4S en a entraîné 23.700 pour un contrat de 284 millions de livres (365 millions d’euros). Les Jeux vont servir à accroître la privatisation des services de sécurité, ce qui aura des conséquences désastreuses pour les collectivités locales.

    Le soutien public était considéré comme important pour accordé les divers contrats de construction. Une commission de l’organisation des jeux présidée (l’Olympic Bidding Committee, OBC), preside par Lord Coe, a donc demandé l’implication du Telco (The East London Communities Organisation, l’Organisation des communautés de l’est de Londres, devenue depuis ‘‘London Citizens’’). Regroupant environ 80 groupes locaux et groupes religieux, Telco avait un certain poids. L’association a dressé un accord éthique qui impliquait la construction de logements abordables pour la population, d’infrastructures éducatives et de santé, ainsi que la création d’emplois au salaire en vigueur à Londres. L’accord a été signé en 2004 par Lord Coe, Ken Livingstone (qui était maire de Londres à l’époque) et par le travailliste John Biggs, à la tête de l’agence de développement londonienne.

    Mais, en 2006, une nouvelle structure a été crée : l’Olympic Delivery Authority (ODA), qui a pour charge de s’occuper de se qui adviendra après les Jeux Olympiques. L’ODA a refusé de rencontré le Telco et de reconnaître l’accord conclu sous le prétexte que l’ODA n’existait pas à sa signature !

    La collectivité, trahie par l’organisation des Jeux, a par contre dû passer à la caisse pour renflouer les projets immobiliers liés aux Jeux suite au déclenchement de la crise économique. Alors que le gouvernement travailliste de l’époque préparait 50 milliards de livres (64 milliards d’euros) pour partiellement nationaliser les banques, 5,9 milliards de livres (7,6 milliards d’euros) d’argent public ont été injectés dans le projet olympique afin de le renflouer. Encore une fois, l’argent des contribuables a été utilisé pour aider des compagnies de construction parmi les plus riches au monde.

    Ce Parc Olympique n’est même pas destine à être un parc public après la tenue des Jeux. Une société a été créée, l’Olympic Park Legacy Company (OPLC), qui gèrera ce parc et a déjà prévu de revendre différentes parties à plusieurs consortium, dont un dirigé par la famille royale du Qatar.

    Encore une fois au bénéfice du privé

    Cet OPLC devra être remplacé par la London Legacy Development Corporation (LLDC), dont les pouvoirs seront bien plus nombreux et étendus. Cela signifie qu’une bonne partie de l’est de Londres sera gérée par le privé, hors de tout contrôle des autorités locales. Il est officiellement question de créer 11.000 logements sur le terrain du Parc Olympique, dont 35% sont supposés être ‘abordables’. Comment cela se matérialisera-t-il ? Rien n’est moins clair. Le gouvernement a par ailleurs décidé en avril d’autoriser que le loyer de ces ‘logements sociaux’ pourraient atteindre 80% du loyer moyen sur le marché privé. Cette augmentation du loyer est énorme.

    Dans cette région de l’est de Londres se trouve le quartier de Newham, où près de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté. 70% des enfants y sont membres de familles à faibles revenus. 32.000 personnes sont sur la liste d’attente pour obtenir un logement social. Ces gens n’auront d’autre choix que de se tourner vers le secteur privé. Mais les nouveaux logements qui seront construits par les entreprises privées sur les terrains actuellement occupés par les Jeux seront hors de portées de tous ces gens.

    Les Jeux Olympiques et Paralympiques devraient être l’occasion de célébrer la vitesse, la force, l’agilité et la vitesse d’esprit. Cela devrait être une gigantesque expérience collective réunissant des athlètes et des (télé)spectateurs de partout à travers le monde. Mais le système capitaliste ne réfléchit qu’en termes de profit à court terme. Pour les multinationales, ces Jeux ne sont qu’une immense opportunité d’amasser encore plus d’argent, avec la complicité de cet establishment politique pourri.

  • Espagne : Les mineurs se rendent à Madrid et montrent la voie de la lutte aux travailleurs !

    Pour une grève générale de 48 heures destinée à renverser le gouvernement Rajoy

    Des milliers de mineurs sont arrivés à Madrid la semaine dernière, au terme d’une marche sur la capitale dans le cadre de leur lutte pour défendre leurs emplois. Ils y ont été accueillis par des milliers de travailleurs et jeunes madrilènes descendus afin d’exprimer leur solidarité tandis que des pompiers les ont escortés à travers la capitale, jusqu’au devant du parlement. Le jour même de l’arrivée des mineurs, Rajoy et le gouvernement de droite du PP (Parti Populaire) ont annoncé de nouvelles mesures budgétaires, qui comprennent selon divers observateurs les pires coupes budgétaires depuis 1956, à l’époque de la dictature fasciste de Franco.

    John Hird, Socialismo Revolucionario (CIO-Espagne)

    La couverture du magazine satirique EL JUEVES montre Mariano Rajoy embrasser à pleine bouche le joueur de foot Iker Casillas, en parodie du fameux baiser qu’Iker avait donné à sa compagne lorsque l’Espagne avait remporté la coupe du monde de foot il y a deux ans. Rajoy a tout tenté pour être associé à la récente victoire de l’équipe espagnole lors de la coupe de l’Euro 2012. Rajoy a même appelé le coach Vincente Del Bosque à “gagner la coupe pour l’Espagne afin de nous aider à oublier la crise.” Del Bosque a répondu que son équipe ferait de son mieux, mais que la victoire ne résoudrait pas les problèmes sociaux-économiques du pays. Quel grand coach et quel homme avisé !

    Les mineurs des Asturies et d’autres régions ont apporté la lutte de classe jusqu’à la porte de Rajoy et ont balayé le facteur ’Euro Cup’. Le célèbre footballeur David Villa (du FC Barcelone et de l’équipe nationale) a même ouvertement déclaré son soutien pour les mineurs et leur lutte. Alors que les mineurs étaient en marche à Madrid, ils chantaient : "Esta es nuestra selección" (“voilà notre équipe”.) Un mineur a commenté dans les médias qu’il s’attendait à un bon accueil à Madrid, mais qu’avec l’accueil incroyable qu’ils ont finalement reçu, il se sentait réellement comme étant dans ’La selección’.

    L’arrivée des mineurs à Madrid a été telle une catharsis pour les autres couches de travailleurs également cibles d’attaques antisociales, comme les pompiers, les enseignants et les fonctionnaires locaux. “Les mineurs sont notre fierté!” Les chants d’encouragement de ces travailleurs illustrent que le mouvement des mineurs rassemble la colère qui vit en Espagne. Les mineurs eux-mêmes reprennent des chants de la guerre civile espagnole comme “Santa Barbara”. Même le grand quotidien bourgeois El Pais admet l’idée que la “lucha obrera” (la lutte ouvrière) reprend de la vigueur. Mais en général, les médias espagnols continuent de jouer un rôle des plus lamentables. Alors que des dizaines de milliers de travailleurs manifestent dans les rues de Madrid, les chaînes de TV continuent de diffuser un menu d’émissions de sport, de films américains et de d’émissions de variété.

    La presse gouvernementale ne fait que publier des mensonges à propos des mineurs. Selon ABC, les mines sont si sûres que les femmes peuvent s’y rendre en hauts talons, alors que les mineurs reçoivent des salaires de 2.100 euros par mois, ce qui est loin d’être le cas. Les mineurs auraient dilapidé les millions d’euros de subsides qu’ils ont reçu et – l’attaque n’est pas neuve – ce seraient des gens violents. Dans les faits, les mineurs reçoivent en moyenne un salaire compris entre 1.000 et 1.500 euros par mois pôur un travail très dangereux. Un policier gagne environ 1.900 euros.

    Toute l’industrie est subsidiée en Espagne, y compris les transports et l’agriculture. Pourquoi s’en prendre aux mineurs, dont les subsides ne représentent qu’1% de l’aide publique totale ? Les banques espagnoles ont encore récemment reçu une centaine de milliards d’euros, et où est passé tout cet argent ? Les subsidies accordés aux compagnies minières ont été gaspillées auprès des entreprises minières privées et des gouvernements locaux et régionaux. Cela aurait dû être consacré à l’amélioration des infrastructures et à la création d’emplois. Les mineurs ne sont pas responsables de cela, et de nombreux travailleurs espagnols le comprennent fort bien. Concernant la violence, que peut-il bien y avoir de plus violent que la destruction brutale de 8.000 emplois directs dans les mines et de 30.000 emplois indirects dans toute la collectivité ? La seule réponse de Rajoy face aux exigences des mineurs a été de mobiliser la police nationale et la Garde Civile, ce qui constitue une véritable provocation pour les communautés de mineurs. Les mineurs et leurs familles ont déjà souffert de leur brutale répression. A Ciñera, León, des balles en caoutchouc ont été utilisées, de même que des gaz lacrymogènes.

    Les mineurs féminines ont aussi marché des Asturies à Madrid, et les femmes des mineurs ont aussi commencé à s’organiser. Des milliers de personnes ont pris part aux manifestations massives aux portes du ministère de l’Industrie, avec les mineurs aux côtés de leurs familles et de travailleurs de tous les secteurs de Madrid, parmi lesquels les travailleurs du secteur de l’enseignement. Les manifestations se sont principalement déroulées pacifiquement, malgré les provocations policières. Mais de véritables batailles rangées ont eu lieu, avec le quartier général du Parti Populaire protégé par une douzaine de véhicules armés de la police.

    Les politiciens vivent en plein déni. Esperanza Aguirre, présidente de la communauté de Madrid, a refusé d’admettre l’ampleur de la marche des mineurs, tandis que Rajoy n’a jusqu’à présent pas une seule fois mentionné leur cas. A Los Cortes, seul le dirigeant d’Izquierda Unida (Gauche Unie) a quelque peu reflété la colère qui prend place dans le pays en affirmant que les récentes mesures de coupes budgétaires étaient comme de jeter de l’essence dans les rues d’Espagne.

    Pour une grève générale de 48 heures

    Alors que les mineurs étaient en pleine manifestation, Rajoy a annoncé une augmentation de la TVA de 3% et une réduction importante des allocations de chômage. Rajoy a affirmé que cela “encouragerait” les chômeurs à trouver de l’emploi ! Il y a actuellement plus de 5 millions de travailleurs sans emploi dans le pays… Au total, le pays devra économiser sur les deux ans et demi à venir, c’est à dire d’ici à la fin 2014, 65 milliards d’euros supplémentaires, en plus des précédentes mesures. Le gouvernement capitaliste propose aussi de réduire le nombre de permanents dans les syndicats afin de les rendre moins aptes à défendre les travailleurs. Des protestations spontanées de travailleurs du secteur public (enseignants, fonctionnaires, éboueurs, et même certaines sections de la garde civile) ont eu lieu dans les rues. Selon El Pais, certains membres de la police anti-émeute ont retiré leurs casques à un moment, en signe de solidarité. Tout cela n’est qu’une anticipation de l’explosion sociale massive et des lutes qui vont surgir en Espagne au cours des prochaines mois.

    Samedi dernier, Rajoy a dû annuler des apparitions publiques en raison des protestations. D’anciens premiers ministres, comme Aznar et Zapatero, ont déjà dû faire face à une aversion semblable. Mais comme El Pais le souligne, ils ont eu à le faire après 5 années passées au pouvoir alors que Rajoy n’est au pouvoir que depuis 6 mois !

    La ligne de front est claire. Le gouvernement n’agit que pour le grand capital. Leur seule politique est de faire payer les pauvres et la classe ouvrière. Hier encore, de nombreux travailleurs étaient en colère face à ce constat, mais n’avaient pas encore la confiance suffisante pour résolument parti à la contre-attaque. C’était hier. Aujourd’hui, les mineurs espagnols ont montré la voie de la résistance à toute la classe des travailleurs. Les syndicats ont appelé à des protestations nationales pour ce 19 juillet. Cela ne sera pas suffisant. Une grève générale de 48 heures est nécessaire en tant que prochaine étape dans la lutte pour renverser le gouvernement Rajoy et lutter pour une alternative favorable aux travailleurs.


    La police anti-émeute solidaire des manifestants

    Sur la photo ci-dessous, on peut voir les policiers placés devant le Parlement de Madrid retirer leurs casques afin de soutenir les manifestants. Cette image est bien entendu très populaires sur les médias sociaux, tandis que la presse traditionnelle reste étrangement silencieuse à ce sujet…

  • Crise de la zone euro. Le capitalisme espagnol chancelle

    L’Espagne a maintenant rejoint la Grèce dans le club des pays à grands problèmes. L’approfondissement de la crise européenne est proprement effrayant. L’Espagne est la quatrième économie de l’Union européenne : quasiment deux fois la taille des économies de celles de Grèce, d’Irlande et du Portugal réunies ! Le pays était déjà victime des conséquences de sa bulle immobilière et d’un marché de l’emploi avec un taux de chômage supérieur à 25% (et de plus de 50% parmi la jeunesse). Le pays est maintenant frappé de plein fouet par la crise internationale et le rôle destructeur du capital financier.

    Par Peter Delsing, article issu de l’édition d’été de Lutte Socialiste

    De l’indignation à la grève des mineurs

    Les illusions entretenues par les capitalistes espagnols envers les capacités de la droite de reprendre la situation en main de manière décisive furent bien éphémères. Le chef du gouvernement, Mariano Rajoy (Parti Populaire), s’est retrouvé face à une furieuse opposition de la part de la classe ouvrière espagnole. La grève générale du 29 mars contre les réformes du travail a mobilisé des millions de travailleurs. Le premier mai, plus d’un million de personnes étaient dans les rues. Le 12 mai, le premier anniversaire du mouvement des Indignés, un million de personnes ont manifesté dans des dizaines de villes. Le 22 mai la grève de l’enseignement a connu un taux de participation de 80%. Ces actions, surtout en l’absence de réelle stratégie de la part des directions syndicales, illustrent la volonté des jeunes et des travailleurs de mener une bataille acharnée contre les tentatives du capitalisme de décimer leur niveau de vie.

    Dans les Asturies, la résistance massive des mineurs, de leurs familles et même des commerces locaux est indicative du type de confrontations que nous allons voir de plus en plus se développer. Le gouvernement veut supprimer plus de 60% des subventions à l’industrie, 8.000 emplois sont directement en jeu, des dizaines de milliers indirectement. La tradition de résistance des mineurs a ses racines dans la dictature de Franco et même avant, dans les années ’30. Ils ont érigé des barricades afin de protéger leurs communautés et leurs emplois et sont parvenus à bloquer la police à plusieurs reprises, parfois lors de scènes semblant issues de la guerre civile. Avec leurs méthodes militantes et l’organisation d’une résistance de masse, les mineurs ont également reçu le soutien des petits commerçants. En Belgique, les dirigeants syndicaux regardent ces commerçants plutôt comme des adversaires.

    Si les dirigeants des grands syndicats et du parti de gauche Izquierda Unida étaient aussi combatifs et déterminés que leur base, le gouvernement ne tiendrait pas jusqu’à la fin de l’année. D’ici là, le gouvernement veut encore assainir 27 milliards d’euros dans les dépenses publiques. La section espagnole du Comité pour une Inter nationale Ouvrière, Socialismo Revolucionario, appelle à une grève générale de 48 heures afin de continuer sur la lancée du succès de la grève générale du 29 mars et pour que le mouvement des Indignés se saisisse de cette occasion pour en faire son angle d’attaque.

    Le gouvernement espagnol n’a-t-il pas besoin d’un renflouement ?

    Le bluff de Rajoy et du Partido Popular n’a pas marché. Ils ont tout d’abord clamé que l’Espagne n’avait pas besoin d’un plan de sauvetage, qu’il s’agissait seulement d’une aide pour les banques. Les dettes de l’Etat semblaient limitées au début de cette crise, à environ 60% du Produit Intérieur Brut. Mais elle a très vite augmenté. La nationalisation et le sauvetage de Bankia – un conglomérat de différentes banques – va pousser la dette espagnole à 80% ou 90% du PIB.

    Actuellement, l’Espagne a une dette nationale de 595 milliards d’euros, ce à quoi il faut maintenant ajouter l’aide européenne pour le secteur bancaire. Ce dernier montant peut atteindre les 100 milliards d’euros, une somme trouvée en quelques heures parce que l’Espagne est ‘‘too big to fail’’ (trop grande pour foirer). Les audits privés sur lesquelles se base le gouvernement parlent dans ‘‘le pire des cas’’ de 62 milliards d’euros pour ces banques. Mais ce n’est là que le sommet de l’iceberg. Au premier trimestre de 2012, les prix de l’immobilier ont baissé de 13%, la plus forte baisse sur base annuelle depuis le début de la crise. La crise du secteur de la construction s’approfondit. D’autres études indiquent que les banques Espagnoles auront besoin de 134 à 180 milliards d’euros pour se recapitaliser dans les années à venir.

    Selon la RBS (Royal Bank of Scotland) le gouvernement Rajoy devra refinancer ses obligations d’Etats pour un montant de 155 milliards d’euros d’ici 2014. Dans cette même période, 121 milliards doivent être trouvés pour financer le déficit budgétaire. Le fait que 40% des dépenses publiques soient effectuées par les régions et les autorités locales, avec toutes les tensions nationales présentes en Espagne, ne rend pas la question plus aisée à résoudre. Le gouvernement espagnol sera forcé de tirer la sonnette d’alarme à un moment donné. La résistance de la population contre la barbarie et le déclin de la civilisation sera un élément crucial dans ce développement.

    Les banques espagnoles sont propriétaires d’un tiers des obligations d’Etat espagnoles. Les banques et le gouvernement se tiennent mutuellement dans un étau. Si le gouvernement ne peut plus payer ses dettes, le secteur bancaire sera décimé. Si les banques s’effondrent, la dette publique sera insoutenable à cause des garanties sur l’aide européenne.

    Le parti de gauche Izquierda Unida remonte dans les sondages mais, malheureusement, le parti est beaucoup moins résolu que Syriza, en Grèce, à s’opposer à l’austérité. La direction du parti s’est fait rappeler à l’ordre par sa base concernant une coalition régionale avec le PSOE, le parti social-démocrate tout entier acquis au néolibéralisme. La constitution d’une véritable gauche socialiste et combative au sein des syndicats et d’Izquierda Unida est de la plus haute importance pour développer la résistance de masse contre le capitalisme et pour une société socialiste démocratique.

  • Europe : ACTA est vaincu, une victoire remportée contre les attaques sur la liberté d'internet

    ACTA (l’accord commercial anti-contrefaçon) a été vaincu hier au Parlement Européen par une majorité écrasante de 478 voix. 165 eurodéputés se sont abstenus tandis qu’une petite minorité de 39 députés européens s’est prononcée en faveur de ce traité très controversé. Il s’agit d’une véritable gifle pour la Commission Européenne et l’agenda du Grand Capital. Ce traité serait passé en force sans la large pression publique exercée contre lui. Les principaux alliés politiques de la Commission Européenne dans cette bataille étaient dans le plus grand groupe au Parlement Européen, le Parti Populaire Européen (PPE, auquel appartient le CD&V et le CDH), et du groupe des Conservateurs et Réformistes Européens (CRE).

    Juste avant que le vote ne prenne place, le PPE a tenté une dernière fois de sauver ACTA en proposant de reporter le vote. Cette demande a toutefois été battue. Le fait que seuls 39 députés européens aient publiquement osé voter en faveur d’ACTA est avant tout le résultat de la campagne publique massive contre le traité. Dans les quatre derniers jours qui ont précédé le vote, notre camarade le député européen Paul Murphy a reçu pas moins de 1600 emails lui demandant de voter contre ACTA. Cette pression a assuré que des députés initialement favorables à ACTA ont en définitive voté à l’opposé ou se sont abstenus. Il n’y a que le le groupe des Verts et le groupe de la Gauche Unitaire Européenne / Gauche Verte Nordique (GUE/NGL, groupe dont Paul Murphy est membre) qui se sont opposés dès le début à ACTA.

    Voici ci-dessous une déclaration de presse du bureau de Paul Murphy, député européen du Socialist Party (CIO-Irlande).

    “Il s’agit d’une grande victoire pour ces millions de personnes à travers l’Europe qui ont fait campagne contre ce traité représentant une gigantesque attaque contre les libertés d’internet et les libertés civiles en faveur des intérêts des grandes compagnies. La Commission Européenne et ses alliés politiques au Parlement, en particulier le commissaire européen de Gucht, ont tout tenté pour éviter le vote du Parlement Européen sur ACTA car ils étaient effrayés par la défaite.

    > “La Commission s’est comportée avec un grand mépris démocratique tout au long du processus. Quand de Gucht a parlé à la Commission du commerce international il y a deux semaines, il a déclaré que quelque soit le résultat du vote du Parlement, la Commission fera tout pour faire passer le projet de toute façon.

    “J’applaudis les militants anti-ACTA, ces dizaines de milliers de personnes qui sont descendues dans les rues et ces millions de personnes qui ont signé les pétitions en ligne. Ils ont remporté une importante victoire aujourd’hui. Cependant, la lutte contre ACTA et les mesures similaires n’est pas terminée. La Commission reviendra avec de nouvelles propositions. Nous aurons besoin de poursuivre la lutte pour une économie et une société basée sur le libre échange des informations, de la connaissance et de la recherche, au bénéfice de la population mondiale.”

  • Espagne : Solidarité avec les luttes des mineurs

    Depuis plus d’un mois les mineurs de plusieurs régions d’Espagne sont entrés dans une lutte déterminée afin de protester contre la diminution drastique des subventions au secteur minier de la part du gouvernement qui au même moment, renfloue à hauteur de 24 milliards la Bankia. Il s’agit d’une atteinte de plus aux conditions de vie des 99% afin de satisfaire l’avidité des 1%.

    Par Nicolas P. (Bruxelles)

    Depuis le 28 mai, les milliers de mineurs des régions des Asturies, de Léon et d’Aragon ont entamé une grève, devenue illimitée trois jours plus tard. Pour des raisons d’économies budgétaires, le gouvernement espagnol entend réduire de 63% les subventions accordées au secteur minier, ce qui représente la somme de 190 millions d’euros pour l’année 2012. Il s’agit de la suppression des deux tiers des subventions, et donc, dans les faits, de la fermeture d’ici 2018 des mines qui n’emploient plus aujourd’hui que 8000 personnes (contre plus de 45 000 en 1991).

    La grève illimitée a conduit à l’occupation des mines, de puits, de routes et de chemins de fer. Le 18 juin, les deux grands syndicats espagnols, l’UGT et la CC.OO ont lancé un mot d’ordre de grève générale dans les régions concernées, les Asturies, l’Andalousie, en Castille et en Aragon. Celle-ci a partout été massivement suivie. Une des raisons du succès de la solidarité envers les mineurs est sans aucun doute le fait qu’au moment même ou la vie des dizaines de milliers de personnes est jetée à la poubelle, le gouvernement cherche et trouve près de 24 milliards d’euros, afin de soutenir de façon touchante la Bankia (conglomérat de banque qui se vante d’un chiffre d’affaires de 486 milliards d’euros) qui décidément nécessitait un coup de main de la part d’amis dévoués. Une solidarité sélective de la part du gouvernement espagnol qui pousse toute la population à l’indignation et à la colère. Ce n’est pas une nécessité ”mal comprise” par les gens stupides comme se plaisent à le faire croire les médias traditionnels, mais bien un choix politique parfaitement compris et totalement rejeté par la population, un choix qui favorise les 1% au détriment de la vie des 99%.

    Le 18 juin des manifestations ont eu lieu dans tout le pays avec des records à Oviedo (50.000 participants) et à Léon (150.00 manifestants) avec l’occupation du conseil provincial. Une ”marche noire” a débuté fin juin et devrait se terminer le 11 juillet à Madrid. Partout la police a tenté d’attaquer les grèves et les manifestations mais a dû reculer face au soutien indéfectible de la population locale. Les scènes de violence, de barricades en feu et de lance-roquettes improvisés ont fait la une de la presse, celle-ci trop heureuse d’éviter une analyse de fond pour se consacrer à de violents discours contre la brutalité primaire d’ouvriers incapables de comprendre que leur emploi ne peut avoir de place dans une économie mondialisée et des finances publiques saines.

    Ce mouvement n’est pas sans rappeler les grèves des Asturies qui, entre 1962 et 1963, avaient bousculé l’Espagne franquiste. Les mineurs étaient partis d’abord en lutte pour des augmentations de salaires et des conditions sociales meilleures et avaient ensuite orienté leurs actions vers les droits démocratiques comme la reconnaissance du droit de grève ou l’élection libre des représentants syndicaux. Malgré quelques concessions notables, le mouvement n’avait pas réussi à renverser le régime franquiste, notamment à cause d’erreurs tactiques de la part du Parti Communiste Espagnol, fer de lance de la lutte dans les régions concernées. Cependant, l’ampleur du mouvement est attestée par Guy Debord qui écrivait qu’il s’agissait certainement de ”l’événement le plus important de l’année pour le mouvement ouvrier en Europe.”

    Comme lors de ce conflit, les mineurs d’aujourd’hui tiennent tête avec force aux policiers, déçus de ne plus pouvoir se défouler sans risque sur des Indignés. Le chef des unités de police spécialisées dans la lutte contre les ”désordres publics” (les CRS espagnols) a déclaré à la presse : ”Avez-vous vu les biceps de la plupart des mineurs. D’une simple gifle, ils arrachent les casques de nos hommes.” Un autre CRS, nostalgique des après-midi de ”gestion des foules” à la Puerta Del Sol déclarait qu’avec les étudiants au moins ”on leur file un coup et le sang coule de leur nez délicat.” Le chômage des jeunes est de plus de 60% dans les régions concernées et avec la mort du secteur minier, c’est toute une partie de l’Espagne qui risque de sombrer dans la misère. La résistance est donc à la hauteur du risque, n’en déplaise aux policiers et au gouvernement.

    Les arguments classiques contre les mineurs et leur travail sont visibles partout dans les médias : archaïque, polluant, coûteux… Un dernier adjectif qui pourrait tout aussi bien qualifier la ratification du Traité de stabilité, qui oblige aujourd’hui l’Espagne à appliquer une austérité brutale qui, de toute évidence, n’enchante pas tout le monde. Avant même le mouvement des mineurs, l’Espagne connaissait une grève générale le 29 mars, suivie par plus de dix millions de travailleurs à travers le pays. La lutte des mineurs doit s’inscrire dans une lutte globale contre l’austérité afin de répondre sur tous les fronts aux injonctions des banques et des marchés. Un gouvernement qui s’opposerait à celle-ci défendrait réellement les intérêts des travailleurs et serait en mesure de nationaliser la totalité du secteur énergétique du pays et d’allier progrès écologique avec la sauvegarde d’emplois et de conditions de vies décentes.

  • France : Les élections législatives renforcent le Parti Socialiste au pouvoir

    La France sort d’une période profondément marquée d’un côté par les élections, de l’autre par l’aggravation de la crise économique. Bien que la France n’en est pas encore à subir la sinistre austérité qui frappe d’autres pays de l’Union européenne, les inégalités de classe et la polarisation sociale se creusent et ont été reflétées lors des dernières élections.

    Gauche Révolutionnaire (CIO-France)

    Après avoir fait dégager l’ancien président Nicolas Sarkozy et l’UMP (l’Union pour un Mouvement Populaire), les électeurs les ont giflés une fois de plus en donnant une majorité absolue au Parti Socialiste. Ainsi, bon nombre d’influents ministres du précédent gouvernement ont perdu leur siège à l’Assemblée Nationale. Après l’ère Sarkozy, la droite traverse maintenant une crise idéologique majeure combinée à une crise de direction. L’UMP sort de cette échéance électorale avec une capacité sérieusement affaiblie de pourvoir se présenter comme une opposition au gouvernement de Jean-Marc Ayrault (nommé Premier ministre par le nouveau président François Hollande). C’est d’ailleurs encore plus le cas au vu de la position renforcée du Front National.

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    L’orientation plus droitière que Sarkozy a essayé d’impulser à l’UMP a rencontré la résistance de l’aile conservatrice plus traditionnelle, plus gaulliste, de l’électorat. Sarkozy a également perdu le soutien d’une section des électeurs de la classe ouvrière dont le niveau de vie a gravement été compromis durant ces cinq dernières années. Sarkozy et l’UMP ont aussi été puni par ceux qui préfèrent ‘‘l’original à la copie’’ et ont voté pour la dirigeante du Front National Marine Le Pen aux élections présidentielles et pour les candidats du FN aux élections législatives.

    Le PS, qui a remporté toutes les élections nationales ces cinq dernières années, apparaît renforcé. Certains éléments contredisent toutefois cette observation. Bien que le PS soit sorti grand vainqueur des élections, son score à l’élection présidentielle du mois de mai ne représente pas une si grande victoire sur l’UMP. De plus, la faible participation aux élections législatives (43% lors du second tour) confirme le rejet croissant éprouvé par la population envers les politiciens traditionnels et leur opportunisme. Cela laisse à penser que ce vote a avant tout revêtu un caractère très tactique de la part de la classe ouvrière.

    En dépit de son passé, le PS n’a pas encore pleinement exposé sa véritable nature aux yeux de la population, il n’y a pas encore une compréhension généralisée que c’est l’austérité qui sera appliquée par ce gouvernement. Sa politique locale repose sur des relations de népotisme, ce qui confirme localement l’embourgeoisement total du parti, même s’il peut encore recevoir le soutien passif de certaines couches de la population, surtout dans les banlieues. Mais ce répit ne saurait être que temporaire puisque la marge de manœuvre du gouvernement, tant économiquement que politiquement, est limitée.

    La France connait une situation politique unique en Europe. Alors que de nombreux pays sont gouvernés par des coalitions instables, la France a à sa tête un PS hégémonique qui contrôle la présidence, le Sénat, l’Assemblée ainsi que la plupart des régions et des conseils locaux. Cela masque toutefois un intelligent jeu d’équilibre entre les différentes tendances du PS et ses alliés dans la composition du gouvernement. Cela sera sérieusement mis à l’épreuve dans ce contexte où la crise économique s’approfondit de jour en jour. Nous en avons d’ailleurs déjà eu un aperçu au cours de la récente controverse concernant la baisse du nombre de travailleurs du secteur public.

    Des mesures telles que la limitation du salaire des ministres et du président, l’augmentation de l’impôt sur la fortune (l’ISF) et d’autres taxes sur les riches, etc., sont positivement observées par la plupart des gens. D’autres mesures comme l’augmentation du salaire minimum – même limitée à ce point (2%, soit 21,5 euros) – l’engagement de 1.000 enseignants dans l’enseignement primaire et l’annonce de pourparlers avec les syndicats seront aussi favorablement considérées, même si certains travailleurs trouvent tout cela nettement insuffisant. Le fait est que cette approche se situe loin des violentes attaques du gouvernement Sarkozy et de son arrogance.

    D’autre part, bien que le PS ait tenté de capitaliser la colère contre la grave destruction d’emplois dans le secteur industriel connue sous la présidence de Sarkozy (300.000 emplois perdus en cinq ans), le gouvernement de Hollande sera très rapidement confronté à une situation similaire. Les plans de restructuration, les licenciements et les fermetures d’usine qui avaient été retardées par les entreprises privées en raison de la période électorale sont maintenant de retour à l’ordre du jour.

    La prochaine étape pour le gouvernement Ayrault est la présentation du budget 2013 à l’automne. Peu de chiffres sont sortis mais avec l’objectif de réduire le déficit budgétaire à 3% en 2013, chacun sait que le secteur public sera l’objet d’attaques, sans doute en commençant par le système de soins de santé.

    Ces élections ont également été marquées par un vote élevé pour le FN, qui a récolté 10% en moyenne avec des pics atteignant près de 20% dans ses bastions. Bien que le parti d’extrême-droite ait perdu un peu de soutien électoral comparativement à l’élection présidentielle, il a réussi à gagner deux députés. Sans ignorer le facteur du racisme, il est clair que ce résultat exprime le rejet des partis traditionnels associés à l’establishment (l’UMPS, comme le dit le FN). L’accent mis sur les questions sociales par le FN a également joué un rôle important dans ce vote.

    Le Front de Gauche a obtenu un résultat légèrement meilleur que celui dont avait bénéficié le seul Parti communiste (PCF) il y a cinq ans de cela (677.000 voix de plus), mais c’est bien plus bas que le score obtenu aux élections présidentielles (1.115.600 voix comparativement à 3.984.800 aux présidentielles). Ces élections, cependant, étaient particulièrement antidémocratiques, et le Front de Gauche a vu son groupe parlementaire s’affaiblir. Ce soutien électoral plus faible par rapport aux élections présidentielles est en partie dû à la campagne plutôt classique du Front de Gauche, de type PCF, sans critiques conséquentes contre le PS. La dynamique autour de la campagne de Jean-Luc Mélenchon est retombée, à l’exception de Hénin-Beaumont, dans la région du Nord-Pas-de-Calais, où Mélenchon a affronté Le Pen. Là-bas, la déception a été palpable puisque le vote pour Le Pen a été très important et que Mélenchon a été éliminé au premier tour. Dans cette circonscription, marquée par le chômage et les emplois précaires, le FN a été capable d’exploiter la misère sociale qui a augmenté nombre d’années durant. Étant donné le faible poids du Front de Gauche au parlement, et le fait que le PS dispose d’une majorité parlementaire sur ses seules forces, la possibilité d’une entrée du PCF au gouvernement est pour le moment exclue. La probabilité d’une scission au sein du Front de Gauche n’est donc pas immédiatement posée.

    Le vote obtenu par Lutte Ouvrière et le Nouveau Parti Anticapitaliste n’a même pas atteint 1%. L’extrême-gauche paye le prix fort pour des années de sectarisme et d’analyses erronées de la situation ainsi que pour son incapacité à exprimer les besoins et les aspirations des travailleurs et des jeunes sur la scène politique.

    Bien que relativement calme en France pour l’instant, la situation économique est instable à l’échelle européenne. Des pays comme la Grèce et l’Italie sont aux prises avec des situations critiques et les banques françaises sont impliquées dans des investissements pourris avec ces pays, ce qui pourrait les affecter assez vite. Il est probable que les petites réformes et les quelques gestes sociaux de la nouvelle administration Hollande cèderont rapidement place à l’austérité. Dans cette situation très changeante, la conscience des masses va rattraper son retard. De nouvelles opportunités se présenteront pour construire une force réellement socialiste de masse afin d’armer le mouvement ouvrie

  • [INTERVIEW] Un marxiste élu à la tête du plus grand syndicat d’Irlande du Nord

    Notre camarade Padraig Mulholland, membre de notre parti frère en Irlande du Nord le Socialist Party, a récemment été élu président du syndicat NIPSA (Northern Ireland Public Service Alliance, le plus grand syndicat d’Irlande du Nord avec ses 45.000 membres), lors de la conférence annuelle du syndicat qui s’est tenue au début du mois de Juin. Entretien avec un dirigeant syndical combatif.

    Interview réalisée par l’hebdomadaire ”The Socialist”

    Quelle est la portée de ta victoire?

    A cette conférence, les délégués ont voté pour un candidat de gauche prêt à se battre. J’ai clairement fait savoir que je suis membre du Socialist Party et de Broad Left (Gauche Large), une initiative qui réuni des militants partisans d’un syndicalisme de combat et démocratique. Les candidats de cette initiative ont également remporté la vice-présidence et la trésorerie du syndicat. Ces résultats indiquent clairement le début d’un changement d’atmosphère au sein du syndicat. Les militants syndicaux savent que leurs conditions de travail font l’objet d’attaques sévères, tout comme les services publics eux-mêmes. Ils savent également qu’une direction syndicale ferme et résolue est nécessaire pour les mois à venir. Les permanents syndicaux doivent être bien conscients que notre syndicat est contrôlé par ses membres, et j’ai bien l’intention de solidement tenir compte des points de vue de la base.

    Quels sont les sujets brûlants qui font face au syndicat?

    Nous résistons à des coupes budgétaires immondes dans nos services publics, à des baisse salariales et à une détérioration de nos droits à la pension. Il est extrêmement important de continuer à mener campagne et de partir en action. Une action de grève coordonnée de l’ensemble du secteur public est d’ailleurs en préparation pour l’automne. Nos membres dans le secteur des logements sociaux partiront aussi en action ces prochaines semaines, et je ferai tout mon possible pour soutenir cette action.

    La conférence de la NIPSA a voté cette année pour commencer un débat portant sur la nécessité d’un fonds politique. Quelle est la portée des près de 50% de voix en faveur de cette motion ?

    Si cette motion avait été adoptée, elle aurait permis aux membres de se prononcer pour savoir si la NIPSA devrait être plus ‘‘politique’’. A mon sens, tous les syndicats devraient être politiques. Pour l’instant, nous ne pouvons que simplement défendre nos intérêts, sans aller plus loin. Nous avons besoin d’une voix politique, d’un nouveau parti des travailleurs qui ne soit pas sectaire sur la question de la confession religieuse et qui représente les intérêts de toute la classe ouvrière. Notre syndicat, qui a des membres tant parmi les protestants que parmi les catholiques, est très bien placé pour jouer un grand rôle dans la création d’un tel type de parti. Je crois que nous parviendrons bientôt à recevoir l’appui des deux tiers des délégués, tel que cela est nécessaire pour que la motion passe.


    La NIPSA est, en fonction des normes britanniques, un petit syndicat. Mais en Irlande du Nord, il s’agit du principal syndicat. Avec ses 46.000 membres parmi les catholiques et les protestants, il s’agit du seul syndicat à être actif dans tout le secteur public et dans toutes les régions d’Irlande du Nord. Le secteur public fait actuellement face à une offensive d’austérité à la fois de la part du gouvernement de Londres et de celui de Belfast.

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