Category: National

  • Remettre la gauche à l’ordre du jour

    Ce samedi 29 octobre se déroulera à Gand, au Vooruit, la seconde Journée du socialisme, un événement organisé par la Table Ronde des Socialistes. Nous avons interrogé Bart Vandersteene, membre depuis la création de la direction nationale de la Table ronde, et également porte-parole du PSL.

    LS : La première Journée du socialisme (le 20 mars 2010) a été un immense succès ; l’amphithéâtre du Vooruit était rempli à craquer. À cette date s’étaient réunis 750 socialistes pour discuter ensemble d’une interprétation neuve et actuelle du socialisme. Que pouvons-nous attendre de cette deuxième édition ?

    Bart : « En termes de nombre de participants, nous ne pouvons pas mieux faire. L’an passé nous avons déjà atteint la capacité maximum. Il semble bien que cette année on sera forcé d’afficher “Complet” à l’entrée. Mais le plus important reste bien évidemment les aspects de contenu politique. L’objectif est de laisser plus d’espace aux discussions entre les orateurs et le public au sein des groupes de travail.

    « D’un autre côté, le programme des sessions plénières va aussi montrer que, depuis la première Journée du socialisme, le monde n’est pas resté immobile. La crise du capitalisme s’est approfondie, les plans d’austérité sont, partout dans le monde, reçus par des protestations, et même le terme de “révolution” n’est plus un gros mot depuis que les masses en Tunisie et en Égypte ont “dégagé” leurs dictateurs respectifs. Une question importante est de savoir combien de temps la Belgique pourra encore rester une exception de calme relatif au milieu de cette tempête. »

    LS : L’an passé, le bourgmestre de Gand, Daniel Termont, a pu ouvrir la journée. Cela n’a pas enthousiasmé tout le monde…

    Bart : « Non, je n’en étais pas non plus partisan, mais une majorité du groupe de direction a trouvé que cette tactique était une bonne idée, pour le laisser parler en tant que bourgmestre de la ville où se déroulait la journée. Il y a adopté un discours comparativement radical, qu’il a bien vite jeté à la poubelle juste après. Il y a une gigantesque contradiction entre le discours d’un Termont lors d’une telle journée, et la pratique du SP.a qui se situe complètement dans la logique libérale et communautaire.

    « En plus de cela, il était problématique que Termont soit le seul orateur en session plénière à être membre d’un parti politique. De ce fait il a pu dire tout ce qu’il voulait sans que quelqu’un puisse le contredire. C’était également un choix tactique : le groupe de direction ne voulait pas d’orateurs du PTB ou du PSL sur le podium, afin d’éviter que l’initiative ne soit perçue comme un énième bazar de la gauche radicale. »

    LS : De quoi auront l’air les sessions plénières cette année ?

    Bart : « On aura quelques personnalités syndicales, de même que des orateurs de la Table Ronde elle-même, dont Peter Mertens du PTB, et moi-même au nom du PSL. Il est clair que l’intention, en comparaison avec l’an passé, est de renforcer le contenu idéologique. C’est au final le défi de la journée toute entière : comment traduisons-nous les idées socialistes de sorte que de plus en plus de gens en voient l’intérêt ? Comment pouvons-nous convaincre les travailleurs et les jeunes qui vont entrer en action pour défendre leur niveau de vie qu’une alternative est possible à la logique capitaliste ? C’est ce défi que doivent relever tous les socialistes aujourd’hui. Le slogan de la journée n’a d’ailleurs pas été choisi par hasard: “Lutte, solidarité, socialisme”.

    LS : Tu représentes aussi le PSL à bord du comité de direction national de Rood! (Rouge!). Comment ça se passe de ce côté-là ?

    Bart : « L’annonce du départ du SP.a d’Erik De Bruyn et de la formation de Rood! comme initiative indépendante a été bien perçue auprès des socialistes, militants et syndicalistes. Mais c’est maintenant qu’arrive l’étape la plus difficile, celle d’organiser en une structure, en un mouvement politique, le grand potentiel qui existe sur le court terme. Et à ce moment-là, nous constatons que Rood! part d’une base relativement faible. SP.a-Rood avait un porte-parole connu, mais était faible sur le plan de l’organisation. Quoi qu’il en soit, nous attendons avec impatience les meetings de présentation prévus en septembre et en octobre, entre autres à Alost, Bruges et Louvain. À Gand, il y avait 80 personnes présentes lors de la première soirée de présentation. »

    LS : Quel rôle va jouer le PSL dans Rood! ?

    Bart : « Nous collaborons à Rood! parce que nous sommes convaincus qu’il existe un grand espace pour un parti de gauche large qui aille à l’encontre de la logique actuelle de soi-disant libre marché, ou plutôt de dictature du capital. Avec le PSL, nous avons un programme et une méthode clairement définis qui sont selon nous nécessaires pour parvenir à une société socialiste. Mais il y a une couche plus large qui, bien que pas entièrement d’accord avec nous, désire s’unir avec d’autres en un seul mouvement politique dans lequel différentes idées et courants peuvent être présents. Le PSL veut jouer un rôle et désire humblement mettre son expérience politique et sa capacité d’organisation à disposition de Rood! pour contribuer à la construction d’une organisation énergique. »


    Site de Rood! : www.roodlinks.be Site de la Journée du socialisme : www.dagvanhetsocialisme.be

  • La menace des marchés financiers et des agences de notation contre la Belgique est-elle réelle ?

    Fitch Ratings, Moody’s et Standard & Poor’s ; des noms autrefois inconnus du grand public mais aujourd’hui si redoutés que leur seule évocation en fait trembler plus d’un. Régulièrement, concernant notre pays, ces agences de notation précisent que les tensions communautaires pourraient avoir des conséquences très néfastes pour la note de crédit de la Belgique. Qu’en est-il ?

    Article tiré de l’édition de septembre de Lutte Socialiste

    A lire la presse économique, il semblerait que les fondamentaux économiques de la Belgique protègent relativement le pays. La dette nationale, par exemple, est passée de 137% du Produit Intérieur Brut en 1993 à un peu moins de 100% actuellement. Cela reste considérable aux yeux des observateurs du marché, mais nombre d’autres pays commencent à nous rejoindre. Dans les cas de l’Allemagne ou de la France, sur un laps de temps similaire, la dette nationale est passée d’environ 45% à 85%. La différence n’est donc plus aussi énorme.

    Ensuite, des résidants en Belgique possèdent des fortunes financières considérables. En 2010, il s’agissait de quelque 900 milliards d’euros, soit environ 250% de la dette nationale, dont 200 milliards d’euros (60% de la dette nationale) en comptes d’épargnes, des records historiques. Le message est clair : en moyenne, les ménages en Belgique peuvent encore faire face à un approfondissement de la crise économique et ne vont pas stopper net leur consommation directement. Les chiffres d’emploi sont aussi assez rassurant pour les marchés. La Belgique a même plus d’emplois aujourd’hui qu’avant la crise (au détail près qu’il y a eu une explosion du travail précaire et temporaire et d’emplois subsidiés…). Tous ces éléments font dire aux agences de notations que la situation économique et budgétaire de la Belgique, dans le contexte international actuel, est assez bonne, avec une épargne importante.

    Reste le risque politique. L’agence Fitch, la dernière à avoir livré un rapport sur la Belgique, estime que le fait que la Belgique ne s’est toujours pas dotée d’un gouvernement de plein exercice ne constitue encore qu’un problème à long terme. Pour Moody’s, ‘‘une pression potentielle à la baisse sur la note pourrait naître si l’impasse politique actuelle n’est pas résolue rapidement’’. Standard & Poor’s ne dit pas autre chose. Cette dernière agence a récemment dégradé la note des Etats-Unis, notamment pour des raisons politiques, au vu de l’impasse entre Démocrates et Républicains concernant le relèvement du plafond de la dette du pays.

  • Leterme saute par-dessus bord

    Que fait encore la CSC avec les vautours patronaux du CD&V ?

    Le professeur de droit canon Rik Torfs a l’art typique du CVP pour louvoyer entre les questions, ce que l’on appelle aussi de l’hypocrisie dans le langage populaire. Si l’on en croit l’exode du CD&V de politiciens marqués CSC, seul le CD&V a le nez fin pour trouver des gens talentueux. Nous devrions être fiers que Leterme prenne le poste de secrétaire général adjoint de l’OCDE, l’organisation des 31 pays les plus riches au monde. En coulisse, on chuchote toutefois que cet emploi n’est pas du tout aussi prestigieux que ce qui se prétend au CD&V, ce serait au contraire un job réservé d’ordinaire aux diplomates, pas à d’ex-ministres ou d’ex-Premiers ministres.

    Par Eric Byl

    Après le départ de Vervotte et l’annonce que Van Ackere serait en vue pour le poste de gouverneur de Flandre Occidentale se dresse inévitablement la question de savoir ce que fait encore la CSC avec tous les vautours patronaux qui restent au CD&V. Existe-t-il encore l’illusion qu’elle peut empêcher un cours encore plus à droite ? Le modèle d’un parti populaire tel que le CVP, basé sur la conciliation de classe, a dépassé depuis longtemps sa date de péremption. Ce constat n’exigeait pas 40 ans de politique d’économies, c’était déjà très clair après 20 ans. La crise de la dioxine de ’99 peut bien avoir constitué la cause immédiate qui a plongé le CVP dans les abysses électoraux, le déclin avait été amorcé beaucoup plus tôt, à vrai dire à partir du moment où la croissance d’après-guerre s’est confrontée aux limites du marché capitaliste.

    Au sommet de la CSC, tout comme de la FTGB, on a pensé pendant longtemps que les bons jours reviendraient finalement, moyennant quelques concessions des travailleurs. Après 7 années de vaches grasses, 7 années de vaches maigres et ainsi de suite, comme on le sait. Mais après chaque concession, les patrons ont demandé plus. Dans ce contexte, les partis traditionnels si dominants dans la période d’après-guerre, pensons à l’Etat-CVP, ont progressivement vu s’éroder leur soutien social. Le sommet syndical aurait dû dire "stop" à ce moment-là déjà. La base a démontré plus d’une fois qu’elle en avait assez. Mais au lieu de se baser sur la force du mouvement ouvrier, les directions syndicales appuyé sur la pédale de frein. Que nous nous trouvions aux starting-blocs, prêts à nous lancer, et nous étions à nouveau freinés… pour ne pas heurter les amis politiques.

    En ’99, au moment où le vieux CVP vacillait, la CSC aurait pu prendre les commandes en mains. Sur base de sa forte position dans le mouvement ouvrier et de sa position dominante dans le secteur des soins de santé et de l’enseignement, le CVP aurait sans nul doute pu se remettre, mais il aurait alors dû s’opposer diamétralement à l’aile patronale. Le sommet de la CSC a à ce moment-là eu plus peur de sa base que des soi-disant opposants du patronat. Par conséquent, la carte qui a été jouée n’était pas celle d’une opposition pour défendre les salaires et les allocations sociales contre les attaques néolibérales de la coalition des libéraux, des "socialistes" et des verts, mais bien la carte nationaliste. Cela semblait contrôlable, car la Volksunie avait cessé d’exister et la NV-A n’avait encore que péniblement obtenu un élu, Geert Bourgeois.

    Une erreur d’estimation. Les élections fédérales de 2007 ont donné une nouvelle signification au terme de "victoire à la Pyrrhus". Le pays est depuis totalement bloqué. La "solution" de bart De Wever, une négociation confédérale, est entièrement impossible, mais il le sait. A combien s’assoir à la table ? A deux, et Bruxelles sous tutelle commune, comme le veut la NV-A mais ce pour quoi n’est aucune instance démocratique, ou à trois ? Le problème le plus important, Bruxelles, doit d’abord être résolu pour le scénario De Wever, mais on peut l’envisager. Et que faire des 6 bourgmestres des communes à facilités ? Un jour, les bourgmestres devront être nommés. Sans alternative, parce que seuls 25 à 35% maximum des électeurs votent pour des partis flamands, le Gouvernement flamand peut bien être contre les nominations, mais pas indéfiniment. La NV-A tout de même pas obliger de voter flamand sous peine de purification ethnique ?

    Le départ de Leterme est l’échec de la politique de la direction de la CSC pour limiter les dégâts en s’abritant sous les ailes du CD&V, tout comme les résultats électoraux désastreux de la social-démocratie en Flandre devraient être une sonnette d’alarme pour la direction de la FGTB concernant la patience de la base envers ce parti. Le paysage politique du capitalisme belge d’après-guerre ne fonctionne plus. Il doit être revu, et le sera. Le mouvement ouvrier ne peut pas prendre une attitude attentiste et laisser l’initiative à toutes sortes d’aventuriers. Rik Torfs peut bien adopter diverses tactiques, la base matérielle de la politique de conciliation de classe a disparu et ne nous offre qu’une politique toujours plus à droite. Le mouvement ouvrier aspire à son propre instrument politique, cela doit être la conclusion de la direction de la CSC et de la FGTB. Nous appelons tous les syndicalistes à saisir le départ de Leterme pour démarrer cette discussion.

  • Capitalisme = Crise – Leurs remèdes ne fonctionnent pas

    Le spectre de la récession est de retour. Les milliards d’euros et de dollars consacrés aux stimuli et à la reprise de la dette des banques n’ont fait que repousser la crise. Une nouvelle phase de ralentissement de la croissance mondiale arrive, et risque de donner à nouveau de belles claques aux travailleurs, partout à travers le monde.

    Par Els Deschoemacker

    Le capital vogue vers de soi-disant refuges, que ce soient les francs suisses, l’or ou les obligations d’État américaines ou allemandes. La population n’a pas cette alternative. Elle fait face à un choix : accepter que les politiciens capitalistes éliminent la dette en compromettant gravement leur niveau de vie ou contre-attaquer.

    Aucune perspective agréable ne nous attend. En août, les quartiers défavorisés anglais ont concrètement illustré à quoi peuvent conduire la pauvreté et le manque de perspectives d’avenir. Là-bas s’est produite une explosion de frustration et de violence de la jeunesse, avec des pillages dans des quartiers ouvriers où les ménages ont déjà bien du mal à nouer les deux bouts.

    Depuis que la crise a éclaté en 2008, les capitalistes sont à la recherche de remèdes. Mais tout ce qu’ils ont trouvé pour tenter de soigner ce système malade a échoué. Les autorités ont massivement repris les dettes privées du monde financier, mais elles sont maintenante obligés – par ce même monde financier – à lourdement économiser sur les dépenses sociales afin de s’acquitter de leurs dettes. Ces économies entraînent une nouvelle récession, et davantage de dettes en conséquence. La patience de la société envers l’élite politique et financière touche progressivement à sa fin. Cette élite sent la pression. Quelques milliardaires, dont Warren Buffet, disent même qu’ils veulent payer plus d’impôts.

    Cette réaction n’est pas spécialement inspirée par la frayeur d’explosions sociales telles que celles de Londres, mais surtout par la peur d’une riposte massive et organisée de la classe ouvrière américaine et européenne. Quand les milliardaires disent ‘‘ faites- nous payer’’, à vrai dire, ils disent surtout ‘‘ faites-nous AUSSI payer’’. Afin de mieux faire passer la pilule à la population, ils sont prêts à y aller un peu de leur poche.

    Une contribution des riches et des super-riches pourrait, peut-être et temporairement, tempérer la pression, et nous ne sommes bien évidemment pas contre. Chaque euro que nous pourrons trouver, nous irons le chercher.

    Mais nous ne pouvons pas nous laisser duper ainsi. Cela ne résoudra pas la crise ni ne préservera la classe ouvrière d’une destruction drastique et structurelle de ses acquis sociaux, au contraire. Cette mesure a pour but d’être un moyen d’éviter tout trouble social afin de préserver leur système tout en faisant finalement payer la classe des travailleurs. Celle-ci n’a pas d’autre choix que de se battre pour se défendre et de lutter pour de véritables solutions, comme la nationalisation de l’entièreté du secteur financier ainsi que d’autres secteurs-clé de l’économie.

    Les ‘‘indignado’s’’ (les ‘‘indignés’’ qui ont occupé les places espagnoles) ont appelé à la tenue d’une journée d’action internationale le 15 octobre contre la dictature des marchés et la politique d’austérité imposée par la troïka de l’Union Européenne, du FMI, et de la Banque Centrale Européenne.

    Les jeunes et les travailleurs de Belgique doivent se saisir de cette journée d’action pour assurer que le gouvernement, qu’il soit en affaire courante ou non, ne répercute pas la crise sur notre dos. Nous devons nous préparer, nous mobiliser et montrer au grand jour la force de la classe ouvrière, de préférence en un mouvement des travailleurs coordonné à l’échelle européenne, afin de mettre le holà à l’austérité de la troïka.

    Pour cela, il est nécessaire de nous battre afin de faire des syndicats de véritables instruments de lutte, de construire et de développer nos propres instruments politiques, mais avant tout de ne pas éviter le débat concernant l’alternative au capitalisme, le socialisme, et la manière dont cet objectif peut être atteint.


    Abonnez-vous à Lutte Socialiste! Cet article est tiré de l’édition de septembre de notre journal. Si vous désirez recevoir Lutte Socialiste dans votre boîte aux lettres, prennez vite un abonnement. Vous pouvez verser 20 euros (pour 12 n°) ou 30 euros (abonnement de soutien) au n° 001-3907596-27 de "socialist press" avec la mention "abonnement". Pour plus d’infos, des remarques, propositions d’articles,… : prennez contact avec nous via redaction@socialisme.be

  • Supprimer le redoublement : solution contre l’échec scolaire?

    La rentrée des classes est source de stress pour beaucoup de familles. Avant, pour trouver une ‘‘bonne école’’ et, lors de la rentrée, pour trouver les sous que coûte cette école. Les sous pour les fournitures, les déplacements, les activités parascolaires, mais aussi les sous pour le soutien scolaire si l’enfant rencontre des difficultés. Pour les politiciens traditionnels, loin de ces basses préoccupations, la rentrée est synonyme d’effets d’annonce à même de faire remonter leur popularité écornée par l’effet de leur propre politique…

    Par Alain (Namur)

    Un monde de l’enseignement en ébullition

    En juin de l’année passée, suite aux attaques contre les départs anticipés, les enseignants se sont lourdement mobilisés, excédés face aux dégradations de leurs conditions de travail et donc des conditions dans laquelle nos enfants apprennent. Ce sont pas moins de 12.000 personnes qui ont battu le pavé à Liège contre les mesures d’austérité imposées au secteur. Cela fait tout de même 10% du corps professoral.

    Devant cette mobilisation, les directions syndicales et les politiciens ont pris peur. Ils ont décidé de créer une commission afin de tenter d’amadouer le mouvement. Jusqu’à présent aucune demande exprimée lors de la manif n’a été rencontrée.

    Alors qu’aucune solution n’est à l’ordre du jours à l’heure de la rentrée, les différents partis au pouvoir se sont précipités dans la presse pour faire des effets d’annonce : Marcourt (PS) pour annoncer qu’il allait lancer une réforme de la formation des enseignants, Nollet (ECOLO) pour les bâtiments scolaire, Simonet et Demotte pour annoncer qu’ils allaient lancer des projets visant à abolir le redoublement.

    Es-ce que cela veut dire que la mobilisation pour sauver notre système scolaire est partagée de tous ? Rien n’est moins sûr, car aucun de ces partis n’a dit vouloir apporter de l’argent supplémentaire alors que toutes les mesures mises en avant nécessiteront énormément de budget. En gros, il faut faire plus et mieux avec moins et toujours moins…

    Un enseignement toujours aussi inégalitaire

    Ce que la majorité Olivier se garde bien de mettre en avant, c’est la situation réelle de l’enseignement. Les enseignants, les experts et toutes les études le disent. Notre système d’enseignement est l’un des plus inégalitaires. Une étude de la fondation Roi Baudouin revient sur le test PISA et montre que non seulement les résultats moyens de nos élèves sont moins bons que ceux des autres pays de l’OCDE mais, de plus, les élèves issus de l’immigration subissent une discrimination par rapport à la population belge.

    Les réformes menées dans le professionnalisant vont sans aucun doute accroître ces inégalités. La certification par unité (CPU), va renforcer le fossé qui existe au niveau des savoirs généraux entre le général et le professionnel et ne permettra même pas d’améliorer la formation technique des élèves puisqu’il ne sera pas obligatoire de réussir la totalité des unités.

    Face cette réalité et à la démotivation des enseignants qui subissent années après années des réformes sans lien et une dévalorisation de leur profession que font nos politiciens à part des effets d’annonces ?

    Des mesures phares comme slogan, sans réelle mesure de refinancement

    Ces derniers mois, différentes mesures ont étés mises en avant :

    • Le passage de la formation initiale des enseignants de 3 à 5 ans
    • La régulation des inscriptions
    • Former un tronc commun de formation générale
    • Abolir la pilarisation de l’enseignement
    • Interdiction du redoublement

    Ces mesures, pour la plupart, sont portées par des associations, des organisations de parents, des représentants de réseaux, des syndicats, des universitaires qui ont tous à cœur d’améliorer notre système d’enseignement et de le porter vers une voie réellement émancipatrice. Ils se basent sur ce qui marche dans les autres pays, surtout la Finlande, considérée comme un must en matière scolaire.

    Dans l’absolu, ces mesures sont toutes souhaitables et auront surement un effet positif sur la qualité de l’enseignement et sur la réussite scolaire. Il faut cependant considérer les problèmes que rencontre notre enseignement dans son processus, on ne peut pas simplement appliquer ce qui marche en Finlande, alors que la Finlande a connu des développements particuliers qui lui ont permis d’aboutir à un tel système. Ignorer cela, c’est considérer les choses de manière abstraite, sans substrat avec les conditions que nous rencontrons. En Belgique, même si cela est souhaitable, il est peu probable que l’on arrive par décret à supprimer les réseaux. La pilarisation de la société, même si elle tend à se diluer aujourd’hui, reste une caractéristique de la société belge. Beaucoup de gens s’identifient encore aux piliers, que ce soit via le syndicat, la mutuelle ou l’école. Il ne suffira pas de dire que l’on fait un seul réseau pour que tous les problèmes soient réglés d’un coup.

    Il en va de même pour la formation des enseignants. Le régendat a été créé à une période où il y avait pénurie d’enseignants. Depuis lors, les régents enseignent au niveau du primaire et du secondaire inférieur. Il est clair qu’au vu de la complexification du métier une formation universitaire serait souhaitable pour renforcer les connaissances de la matière enseigné, mais aussi les connaissances en sociologie, en pédagogie et orthopédagogie et en didactique. Cependant, au vu du coup des études, un passage de 3 à 5 ans peut démotiver une partie de ceux qui veulent s’engager dans le métier. De plus, le système universitaire étant très élitiste, on risque d’accroitre encore l’écart entre le milieu culturel et économique des professeurs et des élèves.

    La dernière mesure en date – interdire le redoublement – est emblématique de la contradiction entre l’idéal et le réel. Le redoublement coute chaque année 350 millions d’euros par an à la communauté (mais pour le dire cyniquement, c’est le coût de la sélection sociale). Tous les experts s’accordent à dire qu’il est inefficace car il détruit l’estime de soi des élèves et est marqué socialement. Il témoigne d’une bien ‘‘pauvre relation pédagogique’’ entre l’élève et le prof. Cependant, la lutte contre l’échec scolaire nécessite de mettre des moyens supplémentaires à disposition des écoles pour procéder à la remédiation immédiate et à l’accompagnement ciblé et individualisé.

    Ce que l’Olivier propose, c’est que les écoles luttent individuellement contre l’échec scolaire avec, éventuellement, une aide. Il n’y a donc aucun plan global de lutte contre l’échec scolaire. Cela signifie de renforcer la ségrégation entre les écoles qui ont les moyens humains et financiers de lutter contre l’échec et ceux qui ne l’ont pas. Avec une inégalité flagrante pour les élèves, puisque selon que l’enfant est dans une école qui a bénéficié de subventions ou pas, il pourra doubler ou non.

    Le redoublement est un symptôme, il faut combattre la maladie, qui est le sous-financement de l’enseignement en termes matériel et humain, résultat d’une société gangrénée par ses contradictions de classes. Cette société de classe est profondément inégalitaire, ce se reflète dans notre système d’enseignement.

    Pour combattre la maladie, il faut tuer le virus

    Afin de pouvoir réellement améliorer notre système pour qu’il puisse répondre à ses glorieux objectifs d’émancipation, il faut que les enseignants, les élèves, leurs familles luttent tous ensemble :

    • Il faut l’unité de la lutte au-delà des réseaux parce que tout les réseaux sont dans la même situation de sous financement.
    • Il faut améliorer les conditions des travailleurs du secteur, ce qui passe par le maintien et la restauration des acquis et par une revalorisation salariale ainsi qu’une attention pour la formation continue, organisée et payée par la collectivité.
    • Il faut que les étudiants du secondaire et du supérieur se mobilisent pour exiger un enseignement général technique et scientifique pourvu d’infrastructures dignes de ce nom accessible à tous
    • Il faut que tous ensemble (parents, élèves, professeurs, personnel non-enseignant), on réclament un enseignement réellement gratuit en prenant l’argent nécessaire là où il est chez les capitalistes et les patrons

    Cela passe par la création de comité d’élèves, de parents et de travailleurs du secteur, professeurs ou non, qui discutent démocratiquement des besoins et des revendications de chacun afin de mettre en avant un plan d’action qui puisse faire changer le cours des choses.

  • On retourne à l’école, mais on passe d’abord par la banque…

    Il est fréquent dans Lutte Socialiste et sur socialisme.be de pointer l’augmentation du coût de la vie et la difficulté croissante pour de nombreuses familles à faire face aux dépenses domestiques. En ce mois de rentrée scolaire, c’est le poste ‘‘école’’ du budget familial qui risque encore de faire s’arracher les cheveux aux parents.

    Par Simon (Liège)

    Une étude française révèle que le coût de la rentrée scolaire en France explose cette année avec une augmentation de 7% par rapport à l’année dernière. Le même type d’augmentation est à attendre chez nous puisque l’étude révèle que c’est l’augmentation des prix des matières premières qui serait à l’origine de cette flambée des prix. Dans le même temps, l’étude annuelle de la Ligue des familles sur ce sujet informe que le coût scolaire pour enfant atteignait de 1.000 à 8.000 euros pour l’année 2010-2011, tous niveaux confondus. Et de préciser les chiffres : 1.057 euros en maternelle (dont 168 euros en septembre), 2.152 en primaire (383 en septembre), 2.933 en secondaire (570 en septembre) et 7.928 en supérieur (1.819 en septembre). La maigre prime accordée en complément des allocations familiales est bien loin de couvrir ces frais. On est encore bien plus loin du principe légal de gratuité de l’enseignement obligatoire.

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    Cet article provient de l’édition de septembre du mensuel ‘Lutte Socialiste’, disponible dès demain après-midi. N’hésitez pas et prenez un abonnement pour recevoir tous les mois votre ration d’informations et d’analyses réellement socialistes directement à la maison!

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    Ce coût croissant de l’enseignement est un frein évident pour les familles dont les enfants voudraient suivre des études supérieures. Quel ménage moyen ne va pas s’interroger sur la possibilité d’engager pour encore trois à cinq ans des frais de scolarité s’élevant à quasi 8000 € par an ? Certes, les bourses existent, mais elles sont de plus en plus difficiles à obtenir… Ce coût a aussi une incidence sur le type d’enseignement que va pouvoir recevoir un enfant issu d’un milieu populaire, et ce dès les premiers pas dans le réseau scolaire. Nous dénonçons depuis longtemps, comme le font aussi notamment les syndicats de l’enseignement, la dualisation croissante de l’enseignement obligatoire, maternel, primaire et secondaire. De plus en plus, des écoles pourtant subsidiées avec l’argent de l’ensemble des travailleurs deviennent inaccessibles à la plupart des ménages en raison des dépenses demandées aux parents en termes de fournitures scolaires, de voyages d’étude ou autres activités. Aujourd’hui, il y a d’un côté les écoles réservées à une élite qui a les moyens de payer s’il s’avère qu’une remédiation scolaire est nécessaire, et de l’autre les écoles où les enfants des classes populaires sont régulièrement écartés car ne correspondant pas au milieu social des autres élèves.

    Les enfants issus des milieux modestes se retrouvent donc dans des écoles ghettos non en raison de leurs moindres capacités à apprendre, mais parce que ces écoles sont plus accessibles financièrement et socialement.

    Un véritable programme socialiste pour l’enseignement devrait rendre absolument gratuit, du maternel au supérieur, tout le parcours scolaire d’un jeune, en ce compris les fournitures, les voyages scolaires et les frais d’inscription. Ceci pourrait être rendu possible en refinançant l’enseignement grâce à une politique qui irait chercher l’argent où il se trouve massivement : dans la poche des grands patrons et actionnaires.

    Coûts scolaires pour :

    • La maternelle : 1.057 euros
    • Le primaire : 2.152 euros
    • Le secondaire : 2.993 euros
    • Le supérieur : 7.928 euros
  • Les conséquences de la crise bancaire sur les communes

    Pendant des années, le Holding communal, qui regroupe la participation des communes (principalement dans Dexia), a ramené de juteux dividendes aux pouvoirs locaux. Mais depuis 2008 et le quasi-naufrage de Dexia, plus rien n’est assuré. Ces dernières années, pour verser ses dividendes, le Holding puise dans ses bénéfices reportés des années précédentes. Cette ‘‘cagnotte’’ s’épuise très vite: 85 millions fin 2008, 8,6 millions fin 2010.

    Par Stéphane Delcros

    En 2008, la crise avait poussé le Holding communal à injecter 500 millions d’euros pour sauver Dexia, l’ancien crédit communal, dont il est actionnaire à 14,14%. Pour pouvoir emprunter, le Holding avait offert cette participation dans Dexia en garantie. Mais l’énorme chute boursière des actions (-27% en 12 derniers mois) a entrainé celle de la garantie du Holding.

    Fin mai, Dexia a accéléré son plan de restructuration en cédant des actifs toxiques et en vendant à perte des obligations. La perte attendue est de 3,6 milliards aux résultats du 2e trimestre. Dexia ne versera pas de dividendes à ses actionnaires, donc également au Holding. Les régions et l’Etat fédéral devraient à nouveau garantir la dette du Holding, même avec un montant nécessaire beaucoup plus élevé, mais cela ne règle pas le problème fondamental.

    L’avenir de nos servicescommunaux

    En 2008 -2009, lorsque les communes ont recapitalisé le Holding, l’accord leur prévoyait un rendement important de 13%. Beaucoup de responsables communaux ont été alléchés et ont endetté leur commune pour effectuer ce placement. Mais à cause de la situation de Dexia et donc du Holding, ce dividende est finalement diminué, mais les emprunts doivent être remboursés… Dexia est aussi vulnérable par ses partenaires en Espagne et en Italie. Quel est l’avenir de notre argent en cas de nouvelle chute financière et bancaire ?

    La région wallonne devrait cette année verser elle-même aux communes la différence de dividende non perçu. Mais combien de temps ce système va-t-il tenir ? En 2011, ils devraient encore réussir à reporter le problème. Et 2012 ? Les prochains mois seront indécis concernant l’avenir financier de nos communes. Ne les laissons pas s’écouler sans commencer dès maintenant à construire un rapport de force en notre faveur, avec les habitants et le personnel des services communaux.

    Aux niveaux local, régional et national, notre argent ne devrait pas être soumis à la spéculation et aux lois du néolibéralisme orienté vers les portefeuilles d’une petite élite. Il est urgent de dépasser les petites limites budgétaires accordées par le capitalisme et de décider nous-mêmes ce qui doit être fait avec notre argent.

    Revendiquons la nationalisation complète du système bancaire et financier sous le contrôle des travailleurs, et arrachons-leur des mains la gestion de la vie communale pour l’orienter en fonction des besoins réels et non des possibilités budgétaires.

  • Le souhait de De Wever : des économies encore plus dures

    En rejetant la note de Di Rupo, la N-VA a livré ses critiques concernant les plans d’économies. Le parti de De Wever affirme que les choses ne vont pas suffisamment loin à leur goût et regrette que l’indexation des salaires soit préservée, que l’âge de la retraite n’augmente pas assez vite et que le chômage ne soit pas limité dans le temps. En bref, l’austérité prévue par la note de Di Rupo allait déjà très loin, mais pas assez pour De Wever.

    De façon extrêmement étrange, Bart De Wever tente de faire avaler que son refus de la note de Di Rupo est une ”résistance” contre le fait que le bon travailleur Flamand devrait payer pour tout selon De Wever. Mais, avec ce que De Wever propose, le ”bon travailleur Flamand” devrait payer encore plus ! De Wever ne s’adresse en réalité pas le moins du monde au travailleur ‘normal’ quand il met en avant les mesures qu’il voudrait voir mises en oeuvre. D’ailleurs, vous qui lisez ces lignes, quand avez-vous réussi à payer moins d’impôts grâce à la déduction des ‘intérêts notionnels ? Peut-être faites vous partie de ces 70.000 Belges qui disposent d’une fortune de plus d’un million d’euros ?

    Pour De Wever, il n’est pas possible que les entreprises reçoivent moins de ‘cadeaux fiscaux’. Réduire les cadeaux fiscaux, c’est ce qu’il qualifie de ”tsunami fiscal”. Le fait est que, pendant ce temps, la moyenne des impôts des entreprises à diminué de 19.9% (en 2001) à 11.8% (en 2009). Pour de Wever, toucher aux intérêts notionnels, même légèrement, c’est un tabou.

    Le travailleur ‘normal’ devrait être plus fortement pris en main selon De Wever. Récemment, en Flandre, le président de l’Open VLD, Alexander De Croo, a été surnommé ”Baby – Thatcher”, en référence à Guy Verhofstadt, qui lorsqu’il était plus jeune reçu fin des années ’80 un tel surnom en conséquence de son approche fortement néolibérale. Il semble bien que ce soit dorénavant Bart De Wever qui lorgne sur le titre.

    Que veut-il donc ? Il prétend que la note de Di Rupo ne rencontre que deux des six ”Recommandations Européennes”. Plus précisément, De Wever exige que les allocations de chômage soit limitées dans le temps (de 6 mois à 2 ans) avec le constat suivant: ”La Belgique est le seul pays ou tu peux recevoir des allocations de chômage pendant une éternité.” Il souhaite aussi que les ‘Allocations d’attentes’ soient supprimées. De Wever exige encore de s’en prendre à l’indexation des salaires, sans toutefois explicitement affirmer qu’elle doit être supprimée, mais en disant quand même que la garder n’est pas possible…

    Les grandes entreprises et les topmanagers ont moins à craindre de Bart De Wever. Il trouve ainsi scandaleux que l’on touche à la déduction des intérêts notionnels, ce qui d’après lui signifierait une perte de crédibilité auprès des investisseurs étrangers. Larhétorique de De Wever parle du bon travailleur Flamand mais, dans les faits, il est bien plus soucieux des intérêts des investisseurs étrangers. Les topmanagers ont aussi trouver leur champion: la proposition de limiter la partie ”variables” des topmanagers (bonus et autres) à 30% du salaire total est décrite par De Wever comme étant une mesure destinée à ”intimider”.

    Le 5 juillet, nous avons écrit sur notre site qu’il y a deux courants dans la politique des partis au Parlement ”Ces deux principaux courants – ceux qui veulent immédiatement provoquer la casse sociale et à entrer en confrontation avec les syndicats ainsi que ceux qui prévoient des ‘‘sangsues’’ qui font leur boulot tous les jours, mais qui font moins de bruit au début – n’offrent pas de perspectives agréables. Préparons-nous à lutter contre ces deux stratégies. Dans les syndicats, il est urgent de briser les liens que la direction continue à entretenir avec des partis qui n’ont à offrir aux travailleurs qu’une dégradation continue de leurs conditions de vie.” Ce constat est encore vérifié après les évènements de ces derniers jours.

  • La note de Di Rupo : un ‘compromis’ qui renforce les économies néolibérales

    ”Vaillante”, ”courageuse”, ”renversante”, ou encore ”Di Rupo rompt (presque) tous les tabous”; tels ont été les commentaires des mass médias francophones au sujet de la note de Di Rupo. On trouvait moins d’euphorie du côté néerlandophone, mais le travail fourni était tout de même qualifié de ”remarquable”, comme quelque chose que ”les autres partis ne peuvent pas simplement balayer du revers de la main”. Pourquoi cette unité de vue? Parce que, comme le dit Etienne de Gallatay, économiste en chef à la Banque Degroof, ”cette proposition ne vient pas de quelqu’un qui a les élections en tête”. D’autres disent que ”cette note est celle d’un formateur, pas celle d’un président du PS”. Bref, ce qui est remarquable, c’est que Di Rupo balance brutalement ”les tabous” de la base socialiste par la fenêtre.

    Il peut bien nier, avec ténacité, que sa note ne préconise pas l’austérité. Celui qui aurait encore des illusions devra chercher bien loin la ”teneur socialiste” de la note. Ce n’est pas une coïncidence si la Fédération des Entreprises Belges (FEB) est ”prudemment positive”. Lorsqu’un réactionnaire du calibre de Van Eetvelt, le président de la fédération patronale flamande Unizo, trouve cette proposition intéressante, c’est une lourde indication sur ce que doivent en penser les travailleurs eux-mêmes. Même le Syndicat Neutre pour les Indépendants pense de cette note qu’il s’agit d’une base équilibrée pour la formation d’un gouvernement.

    De leur côté, les trois syndicats ne trouvent rien de leur lettre ouverte en front commun du 30 juin à destination du formateur Di Rupo. Dans celle-ci, ils qualifiaient les recommandations du conseil européen d’inacceptables, ”copiées des recettes néolibérales qui sont à l’origine de la crise financière et économique”. Ils plaidaient une croissance plus équilibrée, où la richesse croissante n’irait plus de pair avec un approfondissement du gouffre entre les pauvres et les riches. Une bonne note veillerait selon nous à restaurer au moins partiellement cet équilibre. Mais, tout comme les syndicats le disent, la note n’est pas équilibrée et agrandit le déséquilibre. Tandis que s’y trouvent des attaques réelles pour les travailleurs et leurs familles, il n’y a tout au plus que quelques pichenettes symboliques pour les riches.

    Derrière le conflit communautaire, une unité néolibérale

    Au cours de l’année écoulée, les partis traditionnels ont presque uniquement discuté du communautaire. Alors que chaque année, à l’exception de l’année 2009, nous produisons tous ensemble une richesse sans cesse plus grande dont la répartition est systématiquement moins égale. Par conséquent, on doit rogner sur toutes sortes de services, sur les logements sociaux, sur l’enseignement, sur la culture, etc. Au lieu d’obtenir une prestation de services qui tient compte des besoins de chacun, très vite arrive alors la question de savoir quel groupe de la population ou quelle communauté doit reculer en premier. La question communautaire est donc principalement une question de moyens.

    La note de Di Rupo le reconnaît et ouvre la discussion sur le socio-économique. Cela doit constituer la base pour parvenir à un compromis. Mais au lieu de rechercher plus de moyens chez les riches pour offrir une meilleure prestation de services, la note de Di Rupo organise un marchandage où les droits démocratiques sont achetés avec des transferts des budgets existants. Nous ne nous attendions pas à autre chose car, comme le Parti Socialiste de Lutte l’a déjà souvent répété, derrière les disputes communautaires des partis traditionnels se trouve une unité néolibérale, avec toutefois quelques nuances concernant le rythme des économies et des attaques. Ce marchandage n’accouchera pas d’une réforme d’État durable, mais ne constituera que la base de nouveaux débats communautaires.

    Di Rupo accepte une scission de la circonscription électorale de Bruxelles-Hal-Vilvorde. En échange, les droits des francophones dans les 6 communes à facilités sont plus ou moins bétonnés mais, dans les 29 autres communes de la périphérie, les francophones ne peuvent désormais plus voter pour les listes électorales de la région Bruxelles-capitale. Pour le MR et surtout pour le FDF, qui y sont électoralement forts, quelque chose de ce genre est totalement inacceptable. Parallèlement, quelques uns des dadas du PS se trouvent bien dans la note, comme le refinancement de la région Bruxelles capitale (jusqu’à 461 millions d’euros en plus), un assouplissement partiel de la législation linguistique et même des listes bilingues. Le Gouvernement flamand reste compétent pour nommer les bourgmestres, mais une possibilité de recours auprès de la cour constitutionnelle est prévue. Tout cela est loin d’une scission sans compensation, mais aussi beaucoup plus généreux que les propositions de scission qui avaient émergé jusqu’à présent.

    Le transfert de compétences vers les régions représente pas moins de 17 milliards d’euros. Le contrôle de la disponibilité des chômeurs, leur activation et leur sanctionnement est transféré vers les régions. Les soins pour les personnes âgées, la construction et la rénovation des hôpitaux, etc. irait vers les communautés, de même que les allocations familiales vers les communautés et vers la commission communautaire commune (cocom) à Bruxelles. Ces transferts sont accompagnés d’une économie automatique, puisque seuls 80% des moyens suivent le transfert de compétences. La question a même été soulevée de savoir s’il ne s’agissait pas simplement de repousser un certain nombre de factures d’un niveau à l’autre. Les États fédérés obtiennent une plus grande autonomie fiscale avec un transfert de 10 milliards d’euros (soit quasiment un tiers) de l’impôt sur les personnes physiques et avec une forme, encore restreinte certes, d’impôt régional sur les sociétés.

    Les propositions communautaires de Di Rupo ne diffèrent pas remarquablement des propositions précédentes. Pourtant, presque tous les médias réagissent avec enthousiasme. Ce qui est neuf, c’est que la politique socio-économique, les 22 milliards d’euros d’économies, est concrétisée. Selon De Tijd, ces propositions ne vont pas assez loin, le journal d’affaire croit que ce sont surtout les investisseurs qui sont touchés alors qu’ils considèrent que les attaques contre les pensions et les allocations sont insuffisantes.

    “L’équilibre” de Di Rupo: des attaques réelles sur les pensions et les allocations et des mesures symboliques pour les riches

    Di Rupo et le PS préfèrent soit disant des attaques avec un gant de velours, contrairement à une confrontation dure comme le préconisent les partisans du modèle allemand (N-VA, VLD, MR). Ceci dit, Di Rupo met en avant un paquet de mesures qui constitue des attaques particulièrement violentes contre les travailleurs. Le Pacte des générations était de la gnognotte face à ce que Di Rupo propose dans le domaine des prépensions et des pensions. Il veut mener une attaque contre les chômeurs et limiter les moyens pour la liaison au bien-être des allocations sociales de 40% (tout comme cela avait été présenté lors des négociations pour l’Accord Interprofessionnel par les patrons et les dirigeants syndicaux). Le personnel du secteur public devra aussi se serrer la ceinture avec un gel des frais de personnel pour les administrations et une attaque contre les pensions de fonctionnaires.

    En échange, quelques éléments ‘sociaux’ sont apportés : la conservation de l’index et de l’âge de la retraite à 65 ans (même si cela est miné dans les faits). Il y a aussi un impôt de crise symbolique et temporaire de 0,5% sur les fortunes supérieures à 1,25 million d’euros (hors domicile et entreprise). Sans cadastre de fortunes et sans levée du secret bancaire, cette mesure est irréalisable. Quelques mesures symboliques (la diminution des salaires des ministres de 5%, une taxe sur les billets d’avion de première classe, le gel de la dotation de la maison royale,…) doivent rendre la note acceptable. D’autres éléments plus fondamentaux – comme la politique de cadeaux fiscaux avec notamment la déduction des intérêts notionnels – sont à peine touchés. Le taux sera plafonné à 3% contre 3,42% actuellement et la déduction des intérêts notionnels ne serait, selon la proposition, plus transmissible d’année en année. Les PME pourraient toutefois décompter une demi-pour-cent supplémentaire.

    Que les dispenses fiscales sur les comptes d’épargne soit désormais réglée par déclaration d’impôt est une mesure superflue qui poussera beaucoup de petits épargnants du côté de spéculateurs rusés. Cela vaut aussi pour l’augmentation du précompte immobilier sur les intérêts de 15 à 20% (par exemple sur les comptes à terme), ce qui touchera surtout les petits épargnants. L’impôt de 25% sur la plus-value réalisée par la revente d’actions entre une et huit années après l’achat, et surtout de 50% dans le cas d’une revente moins d’un an après l’achat, doit viser les bénéfices des placements spéculatifs, mais cette mesure sera malheureusement minée en autorisant de réduire des plus-values imposables les moins-values réalisées sur des actions qui auraient diminué en valeur (comme c’était le cas avec beaucoup d’actions en 2009). Il n’est dès lors pas surprenant que cette mesure puisse compter sur la compréhension d’investisseurs acharnés.

    Ces pichenettes symboliques ne contrebalancent pas les attaques contre la sécurité sociale que présente Di Rupo. Les propositions communautaires servent à diviser les attaques et à mieux les emballer. C’est ce qu’on appelle la ”responsabilisation” dans le nouveau jargon flamand. Ainsi, Di Rupo veut économiser sur le financement des pensions des fonctionnaires à travers à travers ”un effort accru des autorités locales et une responsabilisation des États fédérés.”

    L’attaque contre les chômeurs est particulièrement dure. Les régions qui réussiront à faire sortir suffisamment de chômeurs des statistiques obtiendront un bonus. Dans ce cadre, les régions obtiennent des compétences destinées à diminuer les charges sur les différents groupes cibles, à contrôler la disponibilité des demandeurs d’emploi et à les sanctionner. Pour promouvoir cela, l’allocation de chômage pour les chômeurs de longue durée est diminuée et l’accès à une allocation pour les jeunes rendue plus difficile (un jeune qui fait des efforts insuffisants pour rechercher un emploi n’obtient plus d’allocations ou peut perdre celle-ci durant six mois). Les chômeurs âgés seront eux aussi activement contrôlés.

    L’allocation de chômage sera divisée en trois périodes : au cours de la première (d’un an maximum), il y aura une augmentation restreinte de l’allocation. Au cours de la seconde, (jusqu’à trois ans, dépendant de la durée de carrière), l’allocation sera réduite de 33% et, enfin, l’allocation de tous les chômeurs sera limitée à un minimum forfaitaire. Durant cette troisième période, l’allocation sera de fait remplacée par une allocation limitée au minimum vital. Les chômeurs devront de plus en plus accepter n’importe quel emploi. La distance minimum qui oblige quelqu’un à accepter un emploi est portée de 25 km à 60, ”indépendamment du temps de trajet à parcourir”.

    À par chômeurs, la note cible aussi les retraités pour leur faire payer la crise. L’âge de de la pension de 65 ans est officiellement conservé, mais qui travaillerait plus longtemps aurait un bonus (des personnes ”qui travaillent plus longtemps qu’une carrière complète” auront ”droit à une retraite plus élevée”). Avec les pensions légales particulièrement faibles d’aujourd’hui, travailler plus longtemps sera une nécessité pour un groupe sans cesse plus large de la population. Pour parvenir à atteindre une pension vivable, on demande encore aux partenaires sociaux d’envisager ”une généralisation du deuxième pilier.” En d’autres termes : pas de rehausse des pensions légales.

    La prépension sera de moins en moins accessible : on ne pourra y avoir accès qu’après 40 ans de carrière, et à partir de 60 ans (à la place de 58 ans). Dans les entreprises en restructuration, le minimum sera porté de 50 et 52 ans à 55 ans. L’âge pour partir en retraite anticipée (de 60 ans) sera augmenté de 2 mois par an. La diminution du nombre de ”périodes assimilées” permises dans le calcul des pensions assurera, entre autres, que les femmes seront le plus durement touchées et introduit une nouvelle discrimination.

    Les pensions du secteur public seront dorénavant calculées différemment (uniquement pour les nouveaux venus) : sur base du salaire des dix dernières années au lieu des cinq dernières. En pratique, cela signifie avoir une pension plus basse. En s’attaquant plus durement les retraités du secteur public, Di Rupo veut stimuler des divisions entre travailleurs du public et du privé. C’est une tactique récurrente lors des économies et aussi la base de la politique de la ”responsabilisation” des régions : on économise finalement chez tout le monde en montant une catégorie contre l’autre, pour tenter d’éviter toute résistance commune.

    Quelle réponse du mouvement ouvrier?

    Les attaques contre les retraités et les chômeurs vont très loin. De plus, la réduction de la norme de croissance des soins de santé (jusqu’à 2%) conduira dans ce domaine aussi à des déficits. Les syndicats de fonctionnaires ont réagi en front commun syndical pour dire que la note de Di Rupo était selon eux inacceptable. La direction de la FGTB a ces dernières années toujours défendu le ”rôle progressiste” des ”amis” du PS. Mais, tout comme avec le Pacte des générations, c’est de nouveau la social-démocratie qui propose des attaques concrètes sur les pensions. Di Rupo n’est pas le premier à formuler de telles propositions, deux anciens ministres des pensions l’ont déjà essayé : Willockx et Colla, tous deux membres du SP.a.

    Ces derniers mois, les directions syndicales ont déclaré qu’elles ne voulaient pas de mesure d’économie sévère, mais une répartition équilibrée. Avec un certain nombre de pichenettes symboliques, Di Rupo veut en tenir compte et dit explicitement ne pas toucher à l’index et à l’âge de la pension à 65 ans. Mais la note de Di Rupo signifie bel et bien une poursuite de la casse sociale telle que le PS l’a organisée ces 20 dernières années, cette fois de façon accélérée.

    Les syndicats vont ils accepter cela et limiter leur résistance aux paroles? Vont-ils simplement organiser une promenade à Bruxelles sans autre conséquences que de faire baisser la pression de la base ? La direction syndicale se trouve face à un choix : laisser dans les faits passer la politique de démolition sociale pour ne pas blesser ses amis politiques ou sérieusement organiser la résistance et la lutte contre la casse sociale avec un plan d’action. Rompre tous les liens entretenus avec les partis traditionnels fait partie de l’organisation de cette lutte.

  • Assainir 22 milliards d’euros d’ici 2015

    Parmi les négociateurs, l’unité règne pour dire qui va payer, mais pas sur la méthode

    Au moment de boucler ce journal, personne ne savait encore ce qui allait bien pouvoir figurer dans la note de Di Rupo. Un chiffre se dégageait toutefois, celui de 22 milliards d’euros à assainir pour 2015. La seule chose que Di Rupo a laissé entendre, c’est qu’il cherche à trouver un équilibre 50/50 entre augmentations des revenus et diminutions des dépenses. La N-VA et les libéraux (des deux côtés de la frontière linguistique) ont alors lancé l’offensive : pour eux, l’accent doit être mis sur l’effort dans les dépenses. Di Rupo se donne un air plus ‘‘social’’, sans avoir précisé où il allait chercher ces nouveaux revenus et quelles dépenses allaient passer à la trappe…

    Par Anja Deschoemacker, article tiré de l’édition de juillet-août de Lutte Socialiste

    Les différences de style dans le paysage politique belge sont bien connues. La N-VA, l’Open VLD et le MR veulent instrumentaliser la crise pour passer à la vitesse supérieure avec la politique néolibérale. Le modèle allemand, avec son augmentation gigantesque du secteur des bas salaires, les rend jaloux, tout comme les petits et moyens patrons de l’Unizo et du Voka. Ce n’est pas non plus une coïncidence si Bart De Wever a eu du succès lors de son passage au cercle patronal wallon le Cercle de Wallonie (le 30 novembre 2010).

    Les patrons wallons auront surtout apprécié cette partie : ‘‘Lorsque les Flamands (pour De Wever, les syndicats n’existent pas en Flandre, alors qu’ils comprennent plus de membres que tous les partis flamands mis ensemble !) disent que nous devons prendre l’exemple de l’Allemagne, où le travail intérimaire a été assoupli, les allocations de chômage réformées, des mesures prises afin de contrer la flambée des coûts du travail et où le gouvernement a introduit des réformes difficiles mais nécessaires, la majorité de la Wallonie se cabre une fois de plus et dénonce des bains de sang sociaux !’’

    Quelle douce musique aux oreilles des partis libéraux ! Les autres partis sont moins ouvertement sur cette ligne, mais c’est largement leur politique qui a introduit modération salariale, démantèlement de la sécurité sociale, privatisations et libéralisations des services publics.

    Au début de l’ère néolibérale, les partis bourgeois ont vite compris qu’une politique de confrontation directe avec les syndicats a souvent un effet contreproductif. La tactique du salami s’est donc imposée comme stratégie privilégiée, une tactique assurant graduellement – mais structurellement – le démantèlement et l’érosion de l’Etat-providence d’un côté et l’augmentation des profits des grandes entreprises de l’autre.

    N’entretenons aucune illusion ! Le PS lui aussi ne reviendra en aucune façon sur la baisse des contributions patronales à la sécurité sociale. A l’instar des autres partis, il souhaite qu’elles baissent encore, probablement plus particulièrement pour les bas salaires. Quant aux ‘‘revenus alternatifs’’ pour la sécurité sociale qui seront alors nécessaires, on ira les chercher chez ‘‘tout le monde’’, surtout dans les salaires nets des travailleurs.

    La presse flamande a attaqué Di Rupo lorsqu’il a défendu l’indexation et l’actuel âge de la retraite contre les recommandations européennes, mais Yves Leterme lui aussi a défendu l’index avec des termes identiques il y a quelques mois. Il ne faut cependant pas s’attendre à ce qu’ils reviennent sur l’index-santé (une manipulation de l’indexation qui assure que le pouvoir d’achat des salaires et des allocations diminue, même malgré l’indexation). A un certain moment, au contraire, le CD&V/CDH et le PS/SP.a accepteront une nouvelle ‘‘adaptation’’ de l’index.

    Ces deux principaux courants – ceux qui veulent immédiatement provoquer la casse sociale et à entrer en confrontation avec les syndicats ainsi que ceux qui prévoient des ‘‘sangsues’’ qui font leur boulot tous les jours, mais qui font moins de bruit au début – n’offrent pas de perspectives agréables.

    Préparons nous à lutter contre ces deux stratégies. Dans les syndicats, il est urgent de briser les liens que la direction continue à entretenir avec des partis qui n’ont à offrir aux travailleurs qu’une dégradation continue de leurs conditions de vie. Leurs partis frères en Grèce, en Espagne et au Portugal indiquent ce à quoi nous devons nous attendre lors d’une nouvelle phase de la crise financière ou économique, ce qui n’est pas à exclure pour la Belgique.

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