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Category: Amérique Latine
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AMÉRIQUE LATINE. Rompre définitivement avec le néolibéralisme
AMÉRIQUE LATINE
L’EXÉCUTIF DU Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO, internationale dont fait partie le nale MAS/LSP) a porté une attention toute particulière aux perspectives et aux tâches du mouvement ouvrier au Brésil et au Vénézuela. En janvier 2005, des milliers de jeunes et de travailleurs participeront au vailleurs Forum Social Mondial (FSM) qui se tiendra de nouveau à Porto-Alegre. Certains seront en quête d’idées et d’organisations qui proposent des alternatives. Le MAS/LSP y sera présent, dans la délégation internationale du CIO.
Els Deschoemacker
Malgré les possibilités limitées pour les organisations politiques à se profiler ouvertement lors du FSM, les développements de turbulences politiques et sociales s’y reflèteront.
Vénézuela: le programme de Chavez est insuffisant pour résoudre les problèmes de la classe ouvrière
Celso du Chili: «Pour la troisième fois, les masses ont sauvé la peau de Chavez et de sa politique. Le taux de participation extrêmement élevé lors du référendum cet été, le plus élevé dans l’histoire vénézuélienne, montre le soutien public immense pour les réformes sociales. Mais le chômage gigantesque, les bas salaires et les mauvaises conditions de travail nous montrent que le réformisme de Chavez se fait dans les limites du capitalisme et n’offre pas de solutions fondamentales.
«Avant le référendum, on pouvait avoir l’impression que Chavez virait à gauche. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Le Chavisme a une nette tendance bonapartiste. Le régime balance systématiquement entre les deux classes dans la société. Quand Chavez se sent en sécurité, il emploie un langage conciliant envers l’opposition réactionnaire et il renvoie les masses à la maison. Quand il est moins sûr, il mobilise ces mêmes masses. Vis-à-vis de l’impérialisme, il tient un discours menaçant, mais il garantit pourtant aux Etats-Unis l’ininterruption de l’approvisionnement en pétrole.
«Le CIO au Vénézuéla – nos premiers membres ont été gagnés au cours de l’année passée. Nous publions un nouveau bulletin sous le nom Socialisme révolutionnaire – et menons une discussion sur la nécessité d’un programme et d’une organisation de la classe ouvrière, indépendante de Chavez et de la bourgeoisie. La question est de savoir combien de temps durera le processus révolutionnaire au Venezuela. La bourgeoisie n’a pas mis de côté son espoir de liquider Chavez. Plus longtemps cette situation perdure, plus la réaction aura de temps pour se réorganiser.
«La polarisation et le soutien immense pour la révolution bolivarienne sont toujours dominants. Les partisans de Chavez avaient obtenu, aux élections d’octobre, 270 des 334 conseils communaux et 20 des 22 régions. Mais il y avait aussi des critiques. Le syndicat UNT, par exemple, disait que les candidats bolivariens devraient être élus au lieu d’être nommés par Chavez. Cette critique montre que Chavez est testé politiquement. Ces développements vont constituer un terrain favorable pour la construction du CIO au Vénézuela.
Brésil: processus de réorganisation dans le mouvement ouvrier
André (Brésil): «Le Brésil avait peut-être bien un des partis anticapitalistes les plus importants du monde, le Parti des Travailleurs (PT) de Lula. Ce parti refuse néanmoins de rompre avec le capitalisme et se dirige ostensiblement vers un instrument de la bourgeoisie et de l’impérialisme. «Après la crise économique en 2003 et une série de scandales, Lula pouvait partiellement réasseoir sa position grâce à une croissance économique de presque 6% dans les deux premiers trimestres de 2004 à cause d’une croissance dans l’exportation. Le chômage a baissé de 13 à 11%, mais les nouveaux emplois souffrent tous de faibles rémunérations et de mauvaises conditions de travail.
«La politique de réforme néolibérale de Lula ne laisse pas de place au doute. La coopération public-privé est à l’agenda dans les universités. En préparation des réformes structurelles du marché du travail, le gouvernement travaille sur une réforme syndicale qui donne plus de pouvoir aux bureaucrates des directions syndicales. Les OGM ont été légalisés pour le marché de l’alimentation malgré des promesses contraires. Des réformes agraires promises, seulement 44% de l’objectif a été réalisé. Tous les programmes sociaux sont sous pression à cause des réelles priorités du PT, notamment le payement de la dette et des normes fiscales strictes que le gouvernement utilise. Ce n’est pas tout. Un scandale a éclaté quand le ministre de la Défense a soutenu publiquement les tortures sous la dictature. La demande de militants des droits de l’Homme pour ouvrir les archives militaires se heurtait à un «Niet!» de Lula. Sur le plan international aussi, le rôle du PT est réactionnaire. A Haïti, les troupes brésiliennes aident à soutenir un gouvernement qui a pris le pouvoir par un coup d’état et qui est soutenu par les Etats-Unis. De cette manière, Lula veut clairement construire une crédibilité envers les Etats-Unis et obtenir un siège dans le Conseil de Sécurité de l’ONU.
«Pendant que le PT progressait aux élections communales dans un grand nombre de petites villes, il perdait aussi des positions importantes dans un nombre de plus grandes villes comme Porto- Alegre et Rio de Janeiro. A Rio, dans les élections présidentielles, le PT avait encore 80%. Cette foisci, il y a obtenu son plus mauvais score. Une partie de ces positions ont été reprises par des candidats à gauche du PT, ce qui montre le potentiel pour la gauche. Mais la bourgeoisie a aussi gagné quelques coups. A Sao Paulo, par exemple, le PSDB, parti de l’exprésident Cardoso, a gagné au détriment du PT. «La politique de Lula se heurte à toujours plus de résistance. Cette année, les travailleurs des banques ont fait grève pendant un mois contre les attaques continuelles. Les dix dernières années, 400.000 des 800.000 emplois ont été perdus dans ce secteur. Le PT y mine sa propre position car il avait, dans le passé, beaucoup de soutien dans ce secteur : trois des ministres du PT sont des ex-dirigeants des travailleurs bancaires.
«La classe ouvrière tire des conclusions de sa situation. Le lancement du Psol, nouveau parti de gauche, est une expression politique d’une partie de ce processus. Une des priorités du Psol est maintenant de se faire légaliser et de construire de solides structures. Mais la pression de l’électoralisme se développe déjà. Bien que ce parti ait peut-être le programme le plus à gauche des nouveaux partis, le danger subsiste que ce parti se cantonne au simple discours engagé. Socialisme Révolutionnaire, notre organisation au Brésil était un des premiers défenseurs de la nécessité de mettre sur pied un parti de gauche comme le Psol. On doit aider à construire ce parti, mais la défense d’un programme révolutionnaire au sein de ce parti reste crucial.»
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Crise et révolte en Amérique latine
FIN JUILLET, près de 350 camarades provenant de 14 pays se sont retrouvés lors de l’école d’été du CIO, parmi lesquels des camarades du Brésil et du Venezuela. La discussion sur l’Amérique latine, qui a pris toute une journée, était une des discussions les plus importantes.
Tina De Greef
Regimes en crise
Tout le continent est en mouvement et en crise. La profondeur de celle-ci diffère selon les pays. L’industrie textile est presque intégralement délocalisée vers l’Inde et la Chine. Les Etats doivent rembourser des dettes colossales. Actuellement au Pérou, 35% du budget sert au remboursement de la dette. Les richesses naturelles de l’Amérique latine sont en grandes parties tombées entre les mains des capitalistes.
Presque partout nous voyons les symptômes d’un régime en crise, parfois même avec des composantes pré révolutionnaires. Le Chili et le Pérou sont en ce moment les régimes les plus stables d’Amérique latine. Il y a cependant eu récemment deux grèves générales au Chili. Le gouvernement Fox au Mexique est sur une pente glissante. En Bolivie le président Sanchez de Losada a été chassé car il voulait vendre le gaz aux Etats-Unis. Carlos Mesa, son successeur, essaie quand même d’organiser cette vente, malgré la résistance des masses.
A Haïti, le revenu moyen par personne de l’ensemble de la population est inférieur à un dollar par jour. Aristide – qui a une approche anti-impérialiste seulement en paroles – a dû s’exiler. Au Pérou, Toledo est pour le moment le dirigeant le moins populaire de toute l’Amérique latine. Il a dû faire face il y a quelques semaines à une manifestation de masse, malheureusement dirigée par Garcia le leader de l’opposition bourgeoise.
La révolte au Venezuela reflète le refus de la politique néo-libérale menée au cours de la dernière décennie dans toute l’Amérique latine. Le chômage officiel est passé de 12% à 17%. La population pauvre se radicalise et place le populiste de gauche Hugo Chavez au pouvoir en 1998. Celui-ci va décider – sous la pression des masses – d’envoyer 3.500 médecins vers les gens qui n’en avaient encore jamais vus. La Constitution changea de sorte que les propriétaires terriens perdirent leurs terres et que le pétrole soit placé sous le contrôle des autorités publiques.
Les supermarchés itinérants avec de la nourriture bon marché et une nouvelle entreprise nationale de télé-communications sont les récentes initiatives de Chavez. Pour faire ces concessions, Chavez dépend des prix élevés du pétrole. Pour le moment le Venezuela est le cinquième producteur de pétrole du monde avec 3,1 millions de barils par jour. Cette réforme politique n’est cependant pas tenable à long terme dans un cadre capitaliste. La bourgeoisie, qui a perdu partiellement le contrôle de l’appareil d’état, déteste Chavez car il est a prêt à céder sur de nombreux terrains sous la pression des masses. C’est une situation dangereuse pour l’impérialisme.
Pour rencontrer fondamentalement les revendications des masses et pour élever leur niveau de vie il faut rompre avec le capitalisme. Contrairement au Chili et à d’autre pays du continent, le Venezuela n’a jamais connu de tradition socialiste ou communiste. Même Chavez ne saisit pas la chance pour mobiliser une véritable révolution socialiste: il veut installer un «capitalisme plus humain».
Pas de réconciliation avec l’opposition de droite
Chavez voudrait réconcilier la révolution et la contre-révolution. Il louvoie entre les deux: d’une part entre la pression des masses vénézuéliennes et d’autre part la bourgeoisie et l’impérialisme. Les tentatives pour une réconciliation avec l’opposition de droite vont démoraliser les masses. Seul un parti révolutionnaire – condition décisive pour une victoire révolutionnaire: le facteur subjectif – sera capable de mener les masses vers la révolution. Seul un changement total de la société, rompant avec le capitalisme, pourra mettre un terme à la crise et en finir avec le chômage et la pauvreté.
Les masses expérimentent aujourd’hui un processus important d’auto-organisation: les comités populaires, et les Cercles bolivariens initiés par Chavez. Ces organes doivent s’élargir vers toutes les couches des opprimés, et se transformer en organes réels de la lutte des travailleurs.
Des comités populaires dans les entreprises et les quartiers doivent se baser sur les principes de la démocratie ouvrière: éligibilité, révocabilité des élus, un salaire pour les élus qui ne dépasse pas le salaire moyen d’un ouvrier qualifié,…
La population doit s’armer au travers de cette forme d’auto-organisation, pour se protéger contre de nouvelles tentatives de coup d’état ou de contre-révolution violente. L’armement en soi n’est cependant pas une garantie pour une victoire: il faut aussi un véritable programme socialiste. L’appel de Chavez pour «armer la population» sont des paroles en l’air. De ce fait et si aucun véritable parti révolutionnaire ne se développe, une contre-révolution ne peut être battue.
L’armée au Venezuela est essentiellement composée de travailleurs qui reflètent clairement la pression de la société. Cette situation est quelque peu comparable avec celle de l’armée durant la révolution des oeillets au Portugal. Au Portugal, le Mouvement des Forces Armées trouvait dans son programme des éléments socialistes qui allaient beaucoup plus loin que le mouvement d’aujourd’hui au Venezuela.
Un tel parti révolutionnaire pour amener les masses à la victoire, fait défaut aujourd’hui au Venezuela.Toutes les mesures positives entreprises par Chavez jusque maintenant ont été essentiellement mises en avant par le sommet du régime. Les Cercles bolivariens forment le point d’appui dans la société pour Chavez et son gouvernement, mais il y a souvent des tentatives pour les contrôler par le haut.
Récemment il fallait élire un responsable dans un Cercle bolivarien. Le gouvernement a essayé de mettre en avant son candidat, ce qui a provoqué la protestations des travailleurs qui avaient leur propre candidat. Il y a une grande pression du bas pour une démocratisation de ces organes, où maintenant déjà une couche de la population est représentée.
L’opposition perd le référendum
La réaction de Chavez après le référendum de la mi-août – qui portait sur sa révocation – montre qu’il ne cesse de vouloir concilier le processus de révolution et la contre-révolution. Le résultat, après une participation massive, est maintenant connu: Chavez l’a emporté avec 58.25 % des voix (contre 41.74% des voix en faveur de sa révocation). L’opposition ne reconnaît pas sa défaite. Elle a lancé une enquête sur d’éventuelles fraudes électorales.
Dès l’annonce du résultat, le prix du baril de pétrole à la bourse de New-York a baissé. En fait Bush ne peut intervenir dans l’immédiat. Le prix élevé du cours du pétrole et l’importance du Venezuela comme pays producteur de pétrole, couplé à la guerre en Irak oblige l’administration américaine à remettre à plus tard une intervention dans les affaires intérieures au Venezuela.
Nouveau parti au Brésil
Au Brésil le PT social-démocrate, dirigé par Lula, est au pouvoir. Lula, un ancien métallo devenu dirigeant syndical, est arrivé au pouvoir en promettant de donner de la terre aux paysans sans-terres. Juste après avoir été élu, il a fait vote-face. Il a notamment annoncé que les fonctionnaires devaient travailler 12 ans de plus pour toucher leur maigre pension. Le chômage a pris des proportions énormes et plus de gens ont faim qu’autrefois. Quatre parlementaires restés fidèles au programme originel de Lula ont été exclu du PT. Le gouvernement Lula marche sur les traces du précédent gouvernement, qui suivait la politique du FMI.
Les 200.000 emplois pour les jeunes que Lula avait promis n’ont pas vu le jour. En outre Lula joue localement un rôle impérialiste. Il aide à mener la guerre en Irak pour se procurer une petite place au conseil des Nations-Unies.
Récemment, en réaction à la politique droitière du PT, un nouveau parti a vu le jour: le PSoL (Parti pour le Socialisme et la Liberté). Notre section au Brésil participe à la construction du PSoL dont les perspectives de croissance sont indubitables. Seul le programme est sur pied. Il comprend de fort accents révolutionnaires mais aussi des éléments de politique de réformisme keynésien. Mais ce n’est pas suffisant: l’action est nécessaire. Le débat interne porte aussi sur les statuts: il y a des propositions pour qu’ils soient très démocratiques. L’impact potentiel d’un parti de masse des travailleurs comme le Psol est important pour toute l’Amérique Latine. A ce jour, 20.000 militants ont pris part aux assemblées locales pour la fondation de ce nouveau parti.
Le combat entre révolution et contre-révolution aujourd’hui à l’oeuvre en Amérique latine est d’une importance capitale à l’échelle du monde.
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Ca chauffe en Bolivie!
Octobre dernier, un soulèvement populaire contre le gouvernement éclate en Bolivie. Les tensions, nombreuses et déjà présentes depuis longtemps tournent en insurrection lorsque le peuple apprend le projet du gouvernenment d’exporter du gaz.
Rachel
Depuis 2001, la Bolivie est gouvernée par Gonzalo Sanchez de Lozada, qui mène une politique capitaliste en lien étroit avec les Etats-Unis. Le pays étant constitué essentiellement de mineurs et de paysans, les victimes de cette politique sont nombreuses et les conditions de vies sont précaires pour une majorité de Boliviens. Mais ceci n’a en rien inquiété leur président qui avait bien d’autres soucis. Pour la petite histoire, Gonzalo a séjourné de nombreuses années au Etats-Unis et en a toujours conservé un accent anglo-saxon, d’où son surnom de « gringo ». C’est au sein de cette collaboration Gonzalo-américaine que le projet d’exportation du gaz a vu le jour. Il s’agit en fait d’exporter du gaz via un port chilien au Mexique pour y produire de l‘électricité pour la Californie.
Les mouvements de grève contre ce projet ont commencé en Septembre, à El Alto, ville annexe de la capitale où se concentrent les populations les plus pauvres et les plus démunies. Le 7 Octobre, la situation s’aggrave. El Alto est totalement bloquée, et les affrontements entre le peuple et les forces de l’ordre commencent. Le gouvernement tente d’imposer l’ordre par la force : des chars et des mitrailleuses face à des gens avec des frondes et des bouts de bois. Cette répression violente fait une centaine de morts. Celui-ci exige alors non seulement l’annulation du projet d’exportation du gaz mais aussi la démission du président.
« Mourir plutôt que vivre comme esclave », cette phrase de l’hymne national devient le mot d’ordre. Au fil des jours, alors que les affrontements s’intensifient toujours plus, le mouvement s’étend aux autres villes et à tous les secteurs d’activités. Au sein même du gouvernement les contestations naissent, avec notamment la démission du vice-président qui condamne les violentes répressions. Seul au pouvoir, le « gringo » persiste et cela ne fait que confirmer le soutien qu’il a des Etats-Unis.C’est avec la naissance de mouvements solidaires avec le peuple dans l’armée et avec l’organisation de grèves de la faim un peu partout, que la situation tourne. Le 17 octobre, soit après 10 jours de conflit, Gonzalo cède, dépose sa démission et s’exile vers Miami. Il est évident que cet homme est une marionette. Et, de plus, peut-être que si les Etats-Unis n’étaient pas enlisés en Irak, ils seraient intervenus en Bolivie pour y maintenir leur influence. Pour l’instant, c’est Carlos Mesa, le vice-président qui assure l’intérim avant l’organisation de prochaines éléctions.
Le plus difficile reste à faire : créer une politique plus juste, pour que chacun puisse accéder au minimum vital. Le gaz ne fut que le catalyseur des frustrations d’un peuple victime de la misère et de la corruption. La population est lassée d’une situation dont elle ne voit pas le bout, où les gens doivent se débattre pour survivre. La grande revendication, au-delà du gaz, au-delà de la démission du président, c’est que soit pris en compte la soufrance et la misère, que soit écouté l’immense majorité qui constitue le pays. Qu’ils soient reconnus pour ce qu’ils vivent, pensent et espèrent du futur.
Cela est évidemment impossible au sein du capitalisme qui ne prend absolument pas en compte les besoins du peuple, mais qui fonctionne pour le profit d’un petit nombre, en utilisant le reste de la population. Un nouveau parti des travailleurs est nécessaire et serait déjà un pas en avant. Un parti dans lequel les marxistes révolutionnaires pourront défendre leurs idées afin de faire un contre-poids aux idées réformistes. Car il est clair pour nous que pour les travailleurs boliviens et ceux du monde entier, il est nécessaire de rompre avec le capitalisme pour mettre en place un système qui produit selon les besoins de toute la population.
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Bolivie. L’insurrection populaire a chassé le président
Presque deux ans après le mouvement de lutte qui a contraint en Argentine quatre présidents successifs à démissionner, la Bolivie a suivi l’exemple pendant ce mois d’octobre. Un mouvement de grève générale de durée illimitée de la classe ouvrière à laquelle se sont ralliés les paysans pauvres et les peuples indigènes, a évincé le président détesté Gonzalo Sanchez de Losada.
par Andrés Aravena, membre de Socialismo Revolucionario (Chili)
"Le président déchu était détesté par les travailleurs et par les pauvres. C’est le patron fortuné d’une compagnie minière, éduqué aux États-Unis et parlant l’espagnol avec un accent américain. La Bolivie est le pays le plus pauvre du continent. 5,6 millions de Boliviens sur 8 millions souffrent de la pauvreté. Chaque heure, 20 Boliviens de plus viennent grossir les rangs des affamés. Alors que l’entourage du président roule en limousine, amasse fortune et séjourne fréquemment à Miami, le lieu de séjour huppé de l’élite latino-américaine. Gonzalo Sanchez a été incapable de résoudre le chômage et la question agraire. 3 millions de Boliviens n’ont pas accès à l’eau potable ni à l’électricité. La police a durement réprimé l’insurrection, tuant plus de cent personnes. La grève générale a été appelée pour le 29 septembre. Les revendications principales du mouvement portaient sur la nationalisation de l’industrie du gaz que le gouvernement voulait exporter aux USA, et la démission du président. Les autres revendications réclamaient l’arrêt des privatisations, la fin du rabotage des pensions et une réforme agraire.
Après la démission du président, le vice-président a pris la relève. La classe dominante reste donc au pouvoir. Tandis que certaines franges du mouvement, dont le MAS(*) de Evo Morales, ont provisoirement suspendu les actions pour tester le nouveau gouvernement, d’autres continuent la grève. Le nouveau gouvernement capitaliste s’est vite avéré incapable de résoudre la crise sociale. Il faut mettre en avant un programme révolutionnaire qui lui seul soit capable de donner une issue à la crise. Sinon, la lassitude s’emparera des activistes si le mouvement piétine. Ainsi, des comités de grève doivent être constitués, coordonnés sur le plan local, régional et national. Ils peuvent être l’embryon d’une Assemblée constituante révolutionnaire, composée des représentants des travailleurs, des paysans, des peuples indigènes, des soldats et des petits commerçants. Une assemblée capable de diriger le mouvement et de coordonner la lutte. Face aux illusions réformistes des directions syndicales et du MAS (par exemple, Morales a appelé à une médiation de l’ONU dans la question du gaz), nous devons avancer la nécessité d’une direction révolutionnaire du mouvement ouvrier pour se débarrasser du capitalisme. Une telle direction avancerait l’idée d’un gouvernement ouvrier et paysan qui en finirait avec la domination des capitalistes et des grands propriétaires fonciers liés à l’impérialisme. En entamant le processus de transformation socialiste du pays, il donnera une impulsion et la confiance en soi des classes opprimées latino-américaines qui soutiendront la lutte pour une Amérique latine socialiste, seule base sur laquelle le continent peut être unifié."
(*) Evo Morales est le leader des paysans cultivateurs de coca et ex-candidat à la présidence pour le Mouvement vers le Socialisme (MAS: Movimiento al Socialismo). Interrogé par le quotidien Le Monde pour savoir si le MAS soutenait la passation de pouvoir au vice-président, Morales déclare «soutenir cette solution, mais le nouveau gouvernement devra défendre le gaz de la nation, convoquer une Assemblée constituante (ce que le gouvernement va hésiter à faire, NDLR) et suspendre les programmes d’éradication de la coca.»