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Pompiers en lutte : Le gaz ne parvient pas à disperser la combativité des guerriers du feu
Sur les 17.000 pompiers que compte la Belgique, 1.000 à 1.500 étaient à Bruxelles ce vendredi 13 décembre (c’est un peu comme si 50.000 salariés de l’enseignement descendaient dans la rue). En cause : la réforme du statut des combattants du feu et les réponses abracadabrantesques du gouvernement face aux problèmes qu’ils soulevaient depuis longtemps pour certains. Si la police a essayé de contenir leur rage par les gaz et les matraques, elle fut vite débordée et la ‘‘Zone Neutre’’ fut vite envahie par les sapeurs qui réclamaient audience auprès du gouvernement.
Par un militant bruxellois du PSL (photo: Collectif Krasnyi)
Une fédération qui ne fait aucune unanimité
C’est que la colère gronde chez les sapeurs. Envers leur fédération de métier notamment. Celle-ci étant perçue comme une ‘‘amicale d’officiers qui protège ses intérêts’’ pour certains, comme ‘‘déconnectée de la réalité’’ pour les plus gentils. Ainsi, les critiques fusent ‘‘les grands responsables vont prendre trois grades et le pompier de base va perdre 10% de son salaire’’ a-t-on même pu lire dans La Libre. Les commentaires des pompiers sur le site du Soir sont même beaucoup plus acerbes ‘‘La fédération est une amicale, pas un syndicat, elle n’a donc pas à discuter du statut. Elle ne nous soutient pas, ben ouais on ne la soutient pas non plus. Oui les officiers ont obtenu un grade et un salaire plus élevé, ils sont donc content “On n’a obtenu certaines choses”.’’ On peut compléter par cette carte blanche dans La Libre : ‘‘On a l’impression que les négociations se passent […] au dessus du personnel de terrain et que certains interlocuteurs ‘‘officiels’’ de la ministre de l’intérieur travaillent d’avantage pour un petit groupe de personnes que pour l’ensemble de la profession.’’
Cette même fédération regrette que les ‘‘compromis’’ n’aient pas été respectés. C’est sûr qu’il est plus facile de dire cela une fois au sommet de la fédération… En attendant, les pompiers n’étaient pas de cet avis et ils l’ont fait savoir.
Un gouvernement qui n’a pas carte blanche
Et ils n’ont pas été tendres envers le gouvernement non plus. Car ces fameuses ‘‘négociations’’ se sont déroulées dans un climat tendu : pas de documents communiqués, impossibilité pour les dirigeants syndicaux de communiquer vers la base et absence de propositions de négociations. Un manque de respect si ce n’est une insulte.
Les propositions du fédéral étaient d’imposer des tests physiques aux pompiers (ce qui était réclamé depuis longtemps par beaucoup d’entre eux) alors que pendant 30 ans rien n’a été demandé aux pompiers (ce qu’eux même reconnaissent comme anormal) et du jour au lendemain, on exige d’eux des réussites astronomiques pour des tests qu’il faudrait préparer au détriment des missions de terrain.
De même la réforme est censée être financée à 50% par le fédéral et à 50% par la commune (ou la région suivant les casernes) mais personne n’a oublié la faillite du holding communal (ex Dexia, Belfius) et la perte de la manne financière qu’il représentait : au final, cela risque surtout d’être à la population de payer ou aux pompiers ou plus certainement aux deux. L’austérité s’applique ainsi à tous les niveaux de pouvoir… et à tous les différents métiers.
Enfin, la question du statut représente un recul énorme pour ces combattants du feu, qui ont peur qu’une harmonisation par le bas s’effectue au détriment des besoins réels en volontaires et professionnels. Tout cela est pourtant essentiel pour la population.
Des promesses et des compromis
La Libre a titré que les ‘‘pompiers [furent] rassurés par Joëlle Milquet’’. Pourtant, les réactions à chaud montraient plutôt que ceux-ci n’étaient pas prêts à se laisser faire si jamais la ministre essayait de leur faire un sale coup.
En effet, accueillis à coups de matraques et de gaz lacrymo, aucune confiance n’a pu être restaurée. Ainsi, Milquet a promis de créer une étape ‘‘transitoire’’ pour la réforme via une ‘‘commission C’’ où les syndicats seraient présents afin d’étudier les textes de réformes. Il s’agit d’une tactique classique pour les élites : ‘‘encommissionner’’ les représentants des travailleurs afin de freiner la lutte contre la casse sociale par des palabres interminables. Mais la casse sociale aura lieu, c’est une certitude. Toutes les instances de pouvoir sont ‘‘priées’’ de faire des ‘‘assainissements’’. Enseignants, pompiers, travailleurs communaux,… sont logés à la même enseigne, à quelques différences près.
Et si les dirigeants syndicaux se réjouissent des négociations pour l’instant, eux-mêmes avouent que si les propositions fédérales ne sont pas suffisantes, les pompiers reviendront manifester, preuve s’il en est que la base des sapeurs-pompiers est vigilante et est prête à remettre le couvert quand il le faudra.
La répression aux abois
Et le gouvernement se doute bien que la grogne des pompiers ne s’arrêtera pas là. D’ailleurs, si les policiers avaient réussi à contenir les sapeurs le vendredi l3, les maigres victoires n’auraient même pas existé.
Le gouvernement sait que la rage monte et il commence à préparer sa riposte en cas de nouvelles actions. Leurs déclarations dans les médias sont quasi unanimes ‘‘les pompiers utilisent pour leurs intérêts des véhicules publics’’, préparant ainsi l’appareil répressif à se mettre en branle au cas où pareil cas se reproduirait (avec l’approbation de la Fédération qui porte les même critiques)
Il nous faut une lutte généralisée
Cette situation pose clairement la question du plan d’action pour demain : les pompiers doivent-ils continuer à mener des actions efficaces et combatives mais isolés des autres franges de la société ?
Derrière cette question se pose la nécessité d’un plan d’action combatif réunissant toutes les victimes de l’austérité, du fédéral aux communes, pour faire reculer les coupes d’austérité et les attaques antisociales. Obtenir des acquis durables nécessite de s’unir derrière un programme clair, orienté vers la satisfaction des besoins de la population et non vers les impératifs de la dictature des marchés et de l’économie capitaliste. Et pour défendre ce programme, il nous faudra bien plus que des ballades entre Bruxelles-Nord et Bruxelles-Midi.
L’alliance D19-20, une collaboration inédite entre producteurs de lait et syndicalistes contre les politiques d’austérité, a vu le jour pour mener des actions de blocage afin d’empêcher la tenue du sommet européen du 19 décembre prochain. Nous soutenons et participons à cette initiative, qui devra se poursuivre ensuite. Elle exprime la radicalisation et la volonté de lutter qui s’opère à la base parmi nombre de militants syndicaux.
L’idée d’avoir des actions plus combatives et de passer à l’offensive émerge du débat et cherche une expression. Pour bloquer les politiques d’austérité, les travailleurs ont besoin d’élaborer collectivement un véritable plan d’action combatif allant crescendo, y compris en recourant à l’arme de grève(s) générale(s) aux niveaux belge et européen.