Category: Economie

  • Une reprise économique ? Pas pour tout le monde…

    Comment cela a-t-il pu être possible ? Le capitalisme a été confronté en 2008 à la pire crise depuis la Seconde Guerre mondiale. La production industrielle, les cours de la bourse, le taux d’emploi,… sont retombés à une vitesse rappelant le krach de Wall Street de 1929. La crise des années 30 avait également été marquée par d’énormes inégalités, par une surproduction, des bulles financières et des investissements dans de nouvelles technologies qui augmentaient plus vite que ceux dans la main-d’œuvre. Selon Karl Marx ce cocktail toxique conduit au chômage et à des crises massives en raison des efforts déployés pour restaurer le taux de profits.

    Par Peter Delsing

    Nous sommes maintenant 6 ans plus tard. Est-ce la reprise ? Les médias l’affirment et les politiciens le crient sur tous les toits. Les devins capitalistes n’expliquent-ils pas qu’après la crise survient automatiquement la reprise, comme le soleil revient après la pluie ?

    “Parvenir à éviter la catastrophe n’est pas garanti”

    Les syndicalistes combatifs et la jeunesse radicalisée ne doivent pas se laisser endormir par ces belles paroles. Depuis 2008, le ‘‘libre marché’’ ne peut faire un pas sans les béquilles des autorités publiques. Sous les circonstances actuelles, le système ne peut survivre sans interventions des Etats jadis si détestés. La collectivité a dû débourser des milliards d’euros pour sauver les banques, ce que nous payons maintenant sous forme d’attaques contre nos pensions, notre enseignement, nos allocations de chômage ou de maladie,… Une crise issue du ‘‘trop plein de dettes’’ dans le secteur bancaire a été ‘‘résolue’’ par plus de dettes, mais cette fois-ci auprès des gouvernements capitalistes.

    Le crédit est aujourd’hui invraisemblablement bon marché afin de stimuler les Bourses. Les actions atteignent à nouveau des sommets, de nouvelles bulles spéculatives sont complètement déconnectées des perspectives de croissance sous-jacentes. La Banque centrale européenne (BCE) a récemment été encore plus loin en portant son taux directeur à 0,15% (le taux auquel les banques se refinancent à ses guichets), un seuil historiquement bas. Mais selon certains analystes, c’est trop peu et trop tard: il faillait un nouveau cycle de création de monnaie, selon eux, pour sauver la zone euro d’une nouvelle et plus profonde récession.

    Il n’y a pas eu de spirale infinie de faillites bancaires entrainant dans le gouffre le reste de l’économie, c’est vrai, en raison du transfert des dettes vers les gouvernements et des interventions d’Etat. L’immense plan d’investissement dans les infrastructures chinoises, financé grâce à un endettement monstrueux, a aussi contribué à soutenir la croissance mondiale pendant un temps. Aux États-Unis et dans certains pays européens, comme l’Allemagne, une relative création d’emplois a encore eu lieu. Les intérêts que devaient verser les pays d’Europe du Sud pour leurs obligations d’Etat sont retombés, également après l’intervention de la BCE. Les attaques contre nos salaires, nos conditions de vie, la sécurité sociale,… ont contribué à restaurer les profits du capital. Les ménages de salariés ont perdu une bonne part de leurs revenus aux États-Unis et dans d’autres pays développés. En Belgique, les salaires ont été gelés. En bref, les fruits de la nouvelle (modeste) croissance se sont essentiellement dirigés vers les poches de l’establishment capitaliste.

    Toute la propagande concernant la reprise économique a des fins politiques. Mais les plus sérieux observateurs de la classe dominante ne sont pas convaincus. Ils tirent aujourd’hui l’alarme face à la croissance lente ou inexistante en Europe et face au risque de déflation : la baisse des prix qui diminue les bénéfices parce que les marchés et le pouvoir d’achat des travailleurs sont minés.

    Au cours du premier trimestre de cette année, la croissance économique de la zone euro était de 0,2% comparée à celle du trimestre précédent. La France a connu une croissance nulle et l’Italie un déclin de 0,1%. C’est l’Allemagne qui a fait le mieux, avec une croissance trimestrielle de 0,8% – ce qui assurerait une croissance de 3% sur base annuelle. L’inflation dans la zone euro est d’environ 0,7%, soit bien loin de l’objectif poursuivi de 2%. Selon Martin Wolf, du Financial Times, la BCE doit encore promettre de ‘‘faire tout ce qu’il faut faire’’ pour éviter une nouvelle chute économique (FT, 13/05/14).

    Wolf affirme que les marchés supposent que l’austérité en Europe du Sud ‘‘va durer éternellement.’’ Politiquement, ce n’est pas si évident que ça à réaliser… Un récent rapport de l’OCDE, a récemment livré une estimation des dettes des gouvernements d’Europe du Sud d’ici 2015 : l’Espagne aurait une dette équivalente à 109% de sa production annuelle de richesses (le Produit Intérieur Brut), l’Irlande à 133%; le Portugal à 141%; l’Italie à147% et la Grèce à 189%! Wolf avertit : ‘‘parvenir à éviter une catastrophe n’est pas encore garanti.’’ Ce n’est évidemment pas ton utilisé dans la presse traditionnelle, dont les contes de fée visent essentiellement à nous rassurer pour nous pousser à la consommation et ainsi essayer d’éviter une amplification des nombreux problèmes qui se posent aux capitalistes.

    Le caractère de la croissance

    Il est encore possible qu’une légère croissance existe aux Etats-Unis dans la période à venir. Mais l’économie chinoise est en plein ralentissement et l’immense marché immobilier s’y dégrade. N’oublions pas que l’économie chinoise est un important moteur de la croissance de divers ‘‘pays émergents’’ (Brésil, Russie, Inde, Turquie,…).

    L’actuelle création d’emploi est très instable. En Belgique, le taux d’emplois à temps partiel chez les moins de 30 ans est passé de 20% à 30% depuis la crise de 2008 ! Les entreprises accordent de moins en moins de bons contrats de travail aux nouveaux employés, ou les font travailler à temps partiel. Mais les loyers et le coût de la vie ne sont pas à ‘‘temps partiel’’ ! Aux États-Unis, la perte des 2 millions d’emplois depuis le début de la crise aurait été récupérée, mais il s’agit essentiellement d’emplois à temps partiel et mal payés. En équivalents temps plein, 650.000 emplois restent à récupérer uniquement pour retrouver le niveau de 2007 !

    Le capitalisme se trouve dans une impasse sans issue. Mais il ne s’effondrera pas tout seul. Les travailleurs et les jeunes devront se battre pour avoir un avenir, massivement, et à l’aide de leurs partis et syndicats combatifs et démocratiques, afin de pouvoir disposer d’une société socialiste démocratique.

    Les causes de la crise

    Karl Marx considérait le capitalisme comme un système qui repose sur ses propres contradictions. La profonde dépression des années ‘30 ou la dépression plus étendue – une période de stagnation économique et de déclin des forces productives – depuis les années ‘70 peuvent être expliquées grâce aux idées de Marx.

    – Une tendance à la surproduction

    Marx considérait que le capitalisme pourrait être confronté de différentes manières à la surproduction et à la suraccumulation. La forte inégalité entre l’élite capitaliste et la majorité des travailleurs assure que la classe des travailleurs ne peut pas racheter tout ce qu’elle produit elle-même. Les capitalistes vont dès lors se spécialiser dans les marchés de luxe, et cela peut conduire à une surproduction.

    Il est de plus contraint d’utiliser des machines plus productives pour faire face à la concurrence, chaque capitaliste essayant d’engranger plus de profits que ses concurrents. Cela peut conduire à une production plus rapide que ce que les consommateurs peuvent absorber. La production dépasse alors les marchés existants. Marx distingue également une tendance à la suraccumulation de capital. La contrainte des nouvelles technologies conduit à l’exclusion de la force de travail. Depuis les années ‘70, nous constatons d’ailleurs une croissance des capacités de production dans divers secteurs en parallèle à la constitution d’un chômage structurel croissant, en partie facilitée par le remplacement du travail par la technologie.

    – La baisse tendancielle du taux de profit

    Sous pression de la concurrence, les capitalistes ont tendance à consacrer une plus grande part de leurs profits aux nouvelles technologies. Mais Marx a démontré que la valeur – et donc les profits – provient de la part du travail qui ne revient pas aux travailleurs sous forme de salaire. Les machines, dans les faits, transfèrent leur propre valeur au nouveau produit, c’est ainsi qu’elles sont amorties. Depuis les années ’60 et ’70, cela a conduit à une pression sur le taux de profit. Les politiques néolibérales ont partiellement pu inverser cette tendance, mais au détriment du développement de nouvelles contradictions.

    – Contradiction entre le développement des forces productives et l’Etat-Nation

    Les première et deuxième guerres mondiales résultaient en partie de cette contradiction. L’existence des Etats-nations concurrents a également assuré qu’il fut impossible de créer un véritable marché européen. Seule la classe des travailleurs peut unifier les nations.

    – Une production sociale, mais une appropriation ‘‘individuelle’’

    Le problème fondamental, la base de toutes les autres contradictions, c’est que la production est effectuée par de larges groupes de personnes, elle est socialisée, mais elle est appropriée par un petit groupe de capitalistes. La propriété privée des moyens de production dans le cadre de la recherche de profits est un obstacle irrationnel au développement de l’Humanité autant qu’une recette pour un approfondissement de la crise économique et sociale. Pour réellement sortir de la crise, la production doit être socialisée.

  • Après cinq ans de crise, nous sommes toujours plus nombreux à être pris en otage par les banques et un capitalisme en faillite

    Il y a cinq ans, le 15 septembre 2008, la banque d’investissement Lehman Brothers faisait faillite. Ce qui a suivi, personne parmi les politiciens bourgeois, les plus éminents spécialistes et toute la ribambelle de savants et d’experts ne l’avait prévu : une crise qui allait frapper le capitalisme mondial en plein coeur. Comment cela fut il possible ?

    Par Peter Delsing

    Mis à part tous les problèmes auxquels l’élite a été confrontée, les conséquences ont été dévastatrices pour la plus grande partie de la population mondiale. La crise économique de 2008 fut parmi les éléments déclencheurs d’une vague d’insurrections et de révolutions au Moyen- Orient et en Afrique du Nord. En Amérique, elle a mené à ce que des millions de personnes perdent leur maison ou leur travail, ou les deux, mais aussi à une profonde modification du débat politique.

    Le mouvement Occupy a dénoncé la domination des riches et a pu compter sur une large sympathie de la part des jeunes et des travailleurs. En Europe, la crise – après toute une série de plans d’austérité – a causé une hausse tragique du chômage, surtout parmi la jeunesse. Dans le Sud de l’Europe, cela a eu pour résultat des occupations d’usines et des grèves générales. La Grèce est maintenant rejetée dans les conditions de vie d’un pays néocolonial. Elle a vu le retour d’un parti ouvertement fasciste, Aube Dorée, qu’une partie de la bourgeoisie voudrait voir arriver au gouvernement.

    Le renflouement des banques a pu sauver le système. Pour l’instant.

    Selon le journal patronal Business Week, Ben Bernanke, président de la banque centrale américaine, avait alors adressé ce discours aux dirigeants du Congrès : ‘‘Si nous n’intervenons pas immédiatement, alors d’ici lundi, nous n’aurons plus d’économie.’’ Son collègue Hank Paulson, ministre des Finances sous le président Bush, a répondu : ‘‘Ben et moi avons réalisé une projection où tout le système financier faisait faillite. Les banques ne se prêtaient plus les unes aux autres. Le crédit ne coulait plus de manière normale. J’y ai vu un chômage de 25 %, le même que pendant la Grande Dépression. Une catastrophe se serait produite si nous n’étions pas directement intervenus.’’

    Rapidement, les grandes banques, assureurs, producteurs automobiles (comme General Motors), etc. ont été renfloués à hauteur de 800 milliards de dollars. Des centaines de petites banques ont tout de même fait faillite. En Belgique, le soutien aux banques a atteint le montant de 25 milliards d’euros, que nous devons maintenant payer sous forme de coupes budgétaires. Mais en Chine aussi, un programme massif de relance de l’économie a été échafaudé, ce qui a pu fournir un marché pour l’économie mondiale (surtout pour les pays à forte croissance comme le Brésil, la Russie, l’Inde, la Turquie…)

    Ce sont ces plans de relance d’une ampleur jamais vue auparavant, en plus d’une certaine croissance qui perdure sur le marché international, qui ont permis au capitalisme mondial d’éviter l’effondrement total. Aux États-Unis, la Banque centrale a injecté environ 3600 milliards de dollars dans les banques (notamment en rachetant des crédits hypothécaires douteux) et sous forme de bons d’État. C’est plus de 20 % du PIB (la somme de tout ce que les États-Unis produisent en une année) américain, une somme immense. Fin 2011 et début 2012, la Banque centrale européenne a souscrit des prêts bon marché sur 3 ans d’échéance à hauteur de plus de 1000 milliards d’euros dans le but d’empêcher l’effondrement de plusieurs banques, ce qui aurait pu déclencher une nouvelle crise financière. Des centaines d’institutions financières européennes en ont bénéficié. Aujourd’hui, on dit qu’une nouvelle vague de prêts est nécessaire afin de sauver les banques d’Europe méridionale de la faillite.

    Le capitalisme à jamais sous perfusion de crédits bon marché ?

    Le système semble maintenant comme drogué, dépendant des prêts et des crédits bon marché. Lorsque la Banque centrale américaine suggère d’accorder son soutien aux banques et de mettre en place une politique à bas taux, les bourses commencent à gronder. Pourquoi ?

    La vérité, c’est que les grandes banques ne peuvent plus depuis longtemps réaliser des profits essentiellement à partir de l’argent qu’elles reçoivent des livrets d’épargne des entreprises et des ménages. Depuis plusieurs décennies, surtout depuis les années ‘70, le capitalisme se heurte à une tendance à la suraccumulation de capital et à la baisse du taux de profit dans l’économie réelle. Ce sont les causes que Marx avait déjà indiquées dans sa théorie du travail et de la valeur, selon laquelle le temps de travail est le facteur essentiel de fixation des prix.

    L’exploitation – l’appropriation de travail non-payé – et les attaques néolibérales sur les salaires et les allocations ont creusé le fossé entre les riches et la majorité de la population. Ce développement a contribué à une stagnation économique. La part croissante des machines et de la technologie dans la production, contre la force de travail supprimée ou en augmentation plus lente, assure que les capitalistes tirent moins de “travail non payé”, et donc moins de profits par produit. Ils se tournent donc vers le secteur financier, où des marges de profit supérieures peuvent être obtenues.

    Les banques ont joué un rôle crucial pour éviter une crise plus fondamentale dans une période de pouvoir d’achat en baisse et de chômage structurel, depuis les années ‘80. Elles vivaient de plus en plus de l’argent prêté plutôt que de l’épargne pour pouvoir maintenir la croissance économique. Grâce à tout ce capital fictif – des richesses qui ne résultent pas de la production, mais qui apparaissent comme par magie sur des écrans d’ordinateur – les entreprises, les gouvernements et les ménages faisaient toutes leurs prévisions sur base du crédit. On a ainsi vu une création massive mais artificielle d’argent et de croissance, et la formation d’une économie de “bulles”. Une économie dans laquelle on investissait de moins en moins dans la production réelle, et certainement moins dans l’emploi, mais où on investissait davantage en produits financiers de plus en plus exotiques.

    La plus grande banque américaine, JP Morgan Chase, possédait le 30 juin 2400 milliards de dollars d’actifs propres (argent non prêté, bâtiments, matériel,…). En contrepartie, la banque avait 2200 milliards de dollars d’obligations de paiement : 1200 milliards de dépôts d’épargne, 1000 milliards d’autres dettes. Pour de nombreuses banques, il est normal d’avoir 90 % de dettes par rapport aux fonds propres, ce qui serait absolument exceptionnel dans d’autres entreprises capitalistes. Vu l’importance du système, les PDG des banques tout comme leurs fournisseurs de crédit en concluent que les gouvernements seront toujours là pour intervenir. Lors de la crise suivante, cela pourrait pourtant se dérouler tout à fait autrement : les gouvernements pourraient, au vu de leurs dettes, ne plus pouvoir effectuer le moindre nouveau renflouement. Nous en avons eu un avant-goût à Chypre, où ce sont les actionnaires et même les épargnants qui ont été appelés à renflouer l’État !

    Il y a 70 ans, les banques avaient environ 20 à 30 % de fonds propres sur leur total de dettes. En 2008, ce n’était plus que 3 % ! Aujourd’hui, Wall Street mène une lutte contre la tentative de forcer les banques à conserver 5 % de fonds propres. Selon les dernières normes européennes, décidées à Bâle III, il reste possible de financer jusqu’à 97 % des actifs propres avec de l’argent prêté au lieu de fonds propres. Les banques peuvent bien avoir déjà liquidé une partie de leurs dettes, de telles normes assurent qu’elles soient comme une corde au cou du capitalisme.

    Leur comptabilité reste de plus souvent hermétique et, aux États-Unis, les investissements dans des “produits dérivés” à risques (où on peut facilement gagner de gros profits sur le prix futur des actions et des matières premières) ne sont même pas comptabilisés. Pour JP Morgan Chase, ce commerce de produits dérivés financiers vaut 70.000 milliards de dollars, soit plus de quatre fois l’ensemble de toute l’économie américaine ! Selon l’analyste financier Steve Dunning, environ les deux tiers des profits des grandes banques aujourd’hui viennent du commerce d’actions et de produits dérivés financiers, réalisés essentiellement avec de l’argent prêté. La prochaine crise économique qui fera plonger les marchés des actions et des produits dérivés effacera une grande partie de la (déjà faible) base de capital des banques. Le commerce mondial des produits d’investissements dérivés vaut 700.000 milliards de dollars, soit 10 fois l’économie mondiale ! Et le PDG de Dexia nous a récemment déclaré que sa banque serait balayée par la première crise qui frapperait un peu durement les gouvernements d’Italie ou d’Espagne. Les 54 milliards d’euros pour lesquels le gouvernement belge s’est porté garant auront vite fait de causer la ruine de l’État.

    Bref, cinq ans après la crise, rien n’a été fondamentalement résolu. Les spéculateurs sont devenus encore plus riches et c’est à nous de payer l’addition. Les grandes banques peuvent à présent mettre en faillite des pays entiers et déstabiliser des pans entiers de l’économie mondiale, comme en Grèce et en Espagne. Pour nous protéger de ces “armes de destruction massives financières”, l’ensemble du secteur bancaire doit être nationalisé sous le contrôle de la population, dans le cadre d’une nationalisation démocratique – par des comités élus et responsables de travailleurs et de jeunes – de l’ensemble de l’industrie et de l’économie, afin d’en finir une bonne fois pour toute avec la crise du capitalisme.

  • Économie : Les classes dominantes emprisonnées dans leur crise

    Récemment, la Banque Centrale Européenne (BCE) a pris la décision de baisser son taux d’intérêt directeur de 0,75% à 0,50%, ce qui signifie une ouverture encore un peu plus grande des vannes financières pour le secteur bancaire dans la zone euro. De quoi relancer l’économie ?

    Par Baptiste (Nivelles)

    Cela faisait plus d’un an que la BCE avait figé son taux à 0,75%. Durant cette période, la BCE s’évertuait à refuser d’abaisser encore plus ses taux, contrairement à la Fed dont les taux directeurs ont été mis entre 0% et 0,25% depuis 2009 (le minimum techniquement possible). La Fed va encore plus loin puisqu’elle recourt à toute une série d’armes ‘‘non-conventionnelles’’ comme l’assouplissement quantitatif (‘‘quantitative easing’’). Cette tactique consiste au rachat par la Fed de titres financiers pourris suite à la crise qui ne valent plus rien en pratique. Ce rachat massif de titres pourris revient donc à faire tourner la planche à billets et à injecter massivement de l’argent dans l’économie. Depuis 2009, la Fed en est déjà à son troisième plan d’assouplissement quantitatif !

    Bye-bye stagflation, vive les armes non-conventionnelles ?

    La raison pour laquelle la BCE refusait d’abaisser plus ses taux et de sortir des ‘‘bazooka financiers’’ était sa crainte de l’inflation. Aujourd’hui, cette crainte est écartée par les économistes de la BCE : l’austérité est telle dans la zone euro que les ménages ne sont pas en capacité de relancer la consommation et les entreprises postposent les investissements face à cette situation. La circulation de monnaie dans ‘‘l’économie réelle’’ restera donc quasi à l’arrêt malgré cette diminution des taux.

    La BCE a donc changé son fusil d’épaule. Déjà en décembre 2012, elle a commencé à goûter au ‘‘non-conventionnel’’ en mettant en place un plan de rachat illimité d’obligations d’Etat pour faire face à la spéculation vis-à-vis des pays dits ‘‘PIGS’’ (Portugal, Irlande, Grèce, Espagne). A présent, ce sont les taux directeurs qui sont donc diminués à 0,50% jusqu’en juillet 2014 au minimum. Sous-entendu : jusqu’à une relance économique, étant donné que les économistes de la BCE prévoient une stagnation de la zone euro d’ici là.

    A quoi tout cet argent va-t-il donc servir ?

    Ce qui est en apparence un virage stratégique est en réalité révélateur d’une impasse économique profonde pour le capitalisme. Cela a été dit : les ménages ne sont pas en capacité de relancer la consommation et les entreprises postposent les investissements face à cette situation. Les dirigeants capitalistes les plus sérieux n’ont jamais eu l’illusion de pouvoir résoudre leur propre crise de surproduction. Au mieux, ils ont été capables de postposer la crise de surproduction, à l’aide des crédits par exemple. Aujourd’hui, au vu de la situation du capitalisme, même cela est trop ambitieux !

    Pourquoi alors ouvrir les vannes financières encore un peu plus, à quoi tout cet argent va-t-il servir ? Dès l’annonce de la BCE, une série d’observateurs ont fait remarquer que ces liquidités allaient renforcer une tendance déjà bien présente : la spéculation et la constitution de montagnes de cash pour les milliardaires gestionnaires de holding financiers et les multinationales. Soit les mêmes politiques qui ont mené au désastre financier déclenché en 2007…

    Austérité d’un côté, dividendes records de l’autre !

    Cela n’allait pas tarder à être illustré… Ironie de l’histoire : de manière quasisynchronisée avec l’annonce de la BCE, une autre nouvelle a fait la une de la presse économique. Il s’agit de la décision d’Apple d’offrir un montant global de 100 milliards $ à ses actionnaires pour fin 2015… Soit un tiers du Produit Intérieur Brut (la totalité des richesses produites en un an dans un pays) de la Belgique. Du jamais vu en terme de dividendes. Un scandale pouvant en cacher un autre, on apprenait également que, sur les quelques 200 milliards $ de liquidités que possède Apple, 148 milliards $ se trouvent dans des paradis fiscaux. Pour graisser la patte à ses actionnaires, on supposait donc qu’Apple allait donc devoir rapatrier une bonne partie de ces liquidités… Faux ! Cela impliquerait le paiement d’un impôt ! Il a donc été décidé par Apple de laisser cette montagne de cash se dorer la couenne dans son paradis fiscal et de réaliser un emprunt pour récolter les liquidités nécessaires, les taux d’intérêt étant de toute façon à zéro…

    La stratégie d’Apple est partagée par toutes les autres multinationales : profiter des taux d’intérêt faibles pour emprunter gratuitement de l’argent, engraisser les actionnaires, garnir les comptes off-shore et attendre une amnistie fiscale pour en rapatrier une partie. La situation a pris une telle ampleur que les économistes de la Fed ont calculé le manque à gagner en cas d’amnistie fiscale : 90 milliards $ !

    ‘‘L’austérité, c’est à cause de la spéculation sur la dette…’’

    Un effet collatéral au rachat d’obligations d’Etat par la BCE et à la baisse de ses taux directeurs, c’est l’accalmie actuelle sur les intérêts que doivent payer les Etats de la zone euro pour financer leur dette. Ainsi, le taux d’intérêt sur les obligations belges à 10 ans est descendu à 1,9%, un niveau plancher historique. Moins d’un an et demi plus tôt, le même taux était à 5,9%, soit le record pour la Belgique depuis l’introduction de l’euro. Ce passage d’un record à l’autre est illustratif de l’hystérie spéculative à l’oeuvre…

    Ces deux dernières années, l’ensemble des gouvernements de la zone euro se sont évertués à nous expliquer que l’application de l’austérité, aussi brutale soit-elle, ne dépendait pas d’eux, qu’ils n’avaient pas le choix, qu’ils y étaient contraints à cause des taux d’intérêt élevés sur la dette. A présent que ces taux ont drastiquement diminué, l’austérité n’est donc plus nécessaire ?

    Que nenni ! Partout en Europe la guerre de classes continue et les gouvernements néolibéraux maintiennent leurs plans d’assainissements. En Belgique, après une réduction budgétaire initiale de 3 milliards € pour 2013 et un premier ajustement de 2,8 milliards € en mars, un nouvel ajustement de 500 millions € est à l’agenda pour le mois de juillet !

    Luttons pour un avenir, luttons pour le socialisme !

    Cette hypocrisie démontre à nouveau de quel côté de la barrière se trouvent le gouvernement et les partis qui le composent : celui des capitalistes. Organisons la résistance contre ce système sans avenir. Luttons pour une société socialiste dans laquelle l’économie est placée sous contrôle démocratique de la population, et où les choix économiques sont dictés par les besoins de tous et non par la soif de profits d’une minorité !

  • Économie mondiale : ''Les banques centrales naviguent dans le noir''

    La grave récession de 2008-2009 a fait de l’économie mondiale un véritable laboratoire d’expérimentations. Mais ni l’austérité extrême ni les trillions injectés dans les banques n’ont conduit à une véritable reprise. Les politiciens et les économistes sont désormais de plus en plus préoccupés.

    Per-Åke Westerlund, Rättvisepartiet Socialisterna (CIO-Suède)

    Au centre des préoccupations, la crise européenne. Au début de 2012, l’Italie et l’Espagne étaient proches du défaut souverain (fait pour un gouvernement de ne pas pouvoir payer sa dette), une situation qui, à son tour, aurait pu voir le projet euro entier s’effondrer. Les dirigeants et les institutions européennes, par crainte, ont du prendre des mesures extrêmes.

    La Banque Centrale Européenne (BCE) a promis un ”accès illimité” au capital pour les États et les banques. Depuis lors, la BCE a prêté 360 milliards d’euros aux banques espagnoles et 260 milliards aux banques italiennes. Une grande partie de ces sommes a été utilisée pour racheter leurs obligations d’État respectives. L’écart de taux d’intérêt – ce qui coûte en plus à l’Espagne et à l’Italie pour emprunter par rapport à l’Allemagne – a chuté de 6-7% à 2-3%.

    La générosité de la BCE est compensée par les autres banques centrales. La Réserve Fédérale Américaine (FED) est à sa quatrième phase d’assouplissement quantitatif, ce qui signifie que la FED rachète des parts de la dette publique à raison de 85 milliards de dollars par mois.

    Le nouveau gouvernement de droite du Japon s’est lancé dans une politique monétaire ”quantitative et qualitative”, une double mesure par rapport à celle de la FED. En deux ans, la banque centrale (la Banque du Japon, BOJ) va utiliser l’équivalent d’un quart de son PIB – le Japon est la troisième plus grande économie mondiale – pour acheter des obligations d’État, des actions et des biens immobiliers.

    Les Banques centrales

    Mais désormais, il y a une inquiétude croissante quant à savoir si les interventions des banques centrales sont bel et bien la solution ou au contraire aggraveraient la crise. ”Certaines figures de proue des Banques centrales avouent qu’ils naviguent dans le noir dans le pilotage de leur économie” a rapporté le Financial Times (18 avril) après la dernière réunion du Fonds Monétaire International (FMI).

    Selon Lorenzo Samgh de la direction de la BCE : ”Nous ne comprenons pas entièrement ce qui se passe dans les économies avancées”. Le chef de la Banque d’Angleterre, Mervyn King, a affirmé que personne ne pouvait être sûr que la politique monétaire expansionniste était correcte et s’est interrogé sur le fait qu’elle pouvait ”courir le risque d’attiser les problèmes qui ont conduit à la crise préalablement”.

    L’intervention de la Banque centrale a assoupli la crise immédiate pour les banques et les États les plus vulnérables. Mais ils n’ont pas reboosté l’économie – les investissements dans les pays capitalistes avancés sont toujours au record le plus bas.

    Cependant, la nouvelle politique a initié des conflits plus nets entre les Etats-Nations. La monnaie japonaise, le Yen, a chuté de 25% depuis l’année dernière. Cela a profité à l’industrie d’exportation japonaise au détriment, entre autres, des industries allemande et sud-coréenne.

    Les rapports semi-annuels d’avril du FMI (le Rapport du Stabilité financière global et des Perspectives économiques mondiales) notent que les actions des Banques centrales ont provoqué un ”large rassemblement de marché” mais ont aussi créé de nouveaux risques. Le capital passe maintenant des pays les plus riches vers les pays en développement, créant une instabilité potentielle. Le patron de la FED, Ben Bernanke, a récemment averti que la spéculation des banques pourrait augmenter.

    Le FMI

    Mais ce qui inquiète véritablement le FMI est ce qui se passera quand la politique d’assouplissement se terminera. Il n’y a pas de précédents historiques sur lequel se baser. ”Des améliorations continues nécessiteront un redressement du bilan du secteur financier et un déroulement harmonieux des sur-endettements public et privé. Si nous ne relevons pas ces défis à moyen terme, les risques pourraient réapparaitre. La crise financière mondiale pourrait se transformer en une phase plus chronique marquée par une détérioration des conditions financières et des épisodes récurrents d’instabilité financière”, écrit le FMI. Mais tout a jusqu’ici échoué, la situation tend vers une crise plus chronique.

    La deuxième étape de la politique de crise – les mesures d’austérité extrêmes – ont eu de pires effets immédiats. 19,2 millions de personnes sont actuellement au chômage dans la zone euro, dont six millions en Espagne seulement. En Grèce, le chômage des jeunes s’élève à 59,1%. Le New York Times a rapporté dans un article sur les écoles grecques que les enfants s’évanouissaient de faim et fouillaient les poubelles pour trouver de la nourriture.

    Le premier ministre portugais, Pedro Passos Caolho – un fervent partisan de l’infâme austérité de la Troïka (FMI, UE et BCE) – a promis en 2011 que ces ”deux terribles années” seraient suivies par une reprise. Mais en raison de l’austérité extrême, en 2013, le Portugal ”fait face à une récession plus profonde et plus longue que celle prévue par le gouvernement et les prêteurs internationaux.” (Financial Times).

    Le FMI a estimé en avril que le risque de récession (le fait que l’économie se contracte) dans la zone euro était de 50%. Depuis lors, le président de la BCE, Mario Draghi, a averti que même la France s’était engouffrée plus profondément dans la crise. L’UE a accordé à l’Espagne et à la France deux années supplémentaires pour se conformer à la règle selon laquelle les déficits budgétaires ne doivent pas dépasser 3% du PIB. Selon les nouvelles règles, ces deux pays auraient, aussi non, été condamnés à une amende.

    Dans une grande enquête effectuée par l’agence de notation Fitch auprès des capitalistes et des investisseurs financiers en Europe, une grande majorité pense que le calme qui règne cette année en Europe n’est que passager. ”Fitch met en garde dans un communiqué qu’elle [l’année 2013] peut revoir un été marqué par la crise de l’euro, tout comme ce fut le cas en 2011 et 2012, car il y a une forte contradiction entre le récent rallye boursier et la montée du chômage” (Dagens Industri, quotidien suédois).

    Pas de solution capitaliste

    Aucune institution capitaliste n’a de solutions. Beaucoup avertissent que l’austérité est allée trop loin, mais continuent de souligner la nécessité d’un budget équilibré pour le ”moyen terme”.

    En combien de temps la crise chypriote qui menace de s’étendre montrera que les pays de l’UE ont besoin d’une union bancaire, écrit le FMI dans son rapport ? Et avant que les flux de capitaux illimités de la BCE n’atténuent la crise, les politiciens dirigeants de l’UE comme Angela Merkel et le président de la Commission européenne Barroso déclaraient que l’UE avait besoin d’une politique budgétaire beaucoup plus stricte et synchronisée.

    Mais les intérêts nationaux et les conflits rendent spécialement les dirigeants allemands hésitants. Le risque, à leurs yeux, est que l’Allemagne devienne définitivement le garant des banques à travers l’Europe.

    En parallèle avec les contradictions croissantes au sein des États membres de l’UE, il y a une méfiance grandissante contre l’Europe elle-même. Aujourd’hui, en Espagne, 72% de la population est critique par rapport à l’Europe contre 23% avant la crise. En Allemagne, cette méfiance est passé de 36 à 59%.

    La crise a été utilisée pour pousser en avant les contre-réformes néolibérales dont rêvaient les capitalistes. Des pensions encore pires en Italie, des facilités pour licencier les travailleurs en Espagne, des réductions de salaire de 50% en Grèce et ainsi de suite. De la même façon, les capitalistes augmentent leur pression sur le président français François Hollande. Il a déjà aboli l’impôt sur les gains en capital et a promis de réduire les allocations de chômage, des pensions et des municipalités.

    En même temps, la pression politique par le bas est de plus en plus forte. Dans un sondage d’opinion français, 70% des sondés pensent qu’une ”explosion sociale” est possible dans les prochains mois.

    Le FMI, en avril, a à nouveau abaissé ses prévisions pour la croissance économique mondiale de cette année à 3,3% (3,5% néanmoins en Octobre). Le commerce mondial ne devrait augmenter que de 3,6% cette année après 2,5% l’année dernière.

    L’indice des directeurs d’achats des grandes entreprises européennes et japonaises est encore en dessous de 50, ce qui indique que l’économie ne se développe pas. Mais même dans le cas de la Chine, ce chiffre ne dépasse pas beaucoup les 50.

    La Chine

    L’économie de la Chine – la deuxième plus grande au monde mais dont on estimera qu’elle dépassera les États-Unis d’ici 2020 – est en train de ralentir fortement. Le grand plan de relance de 2009, qui a tenu la croissance grâce à des investissements massifs, frappe désormais de son revers avec force. Les dettes des municipalités et des provinces sont estimées à entre 20 et 40% du PIB du pays. Au cours du premier trimestre de cette années, ces dettes ont augmenté deux fois plus vite que dans la même période en 2012.

    Le FMI et les politiciens occidentaux parlent de la façon dont la consommation en Chine devrait augmenter et l’investissement diminuer. Mais l’abaissement de la part de l’investissement dans le PIB de 50 à 30%, dans une situation ou la croissance économique sera de 6% au lieu des 10% précédents, ”provoquerait une dépression à lui tout seul” conclut le chroniqueur économique du Financial Times, Martin Wolf. La demande s’effondrerait avec un impact considérable sur l’économie mondiale.

    Les gouvernements et les classes capitalistes mettent désormais davantage de pression sur d’autres États. Les États-Unis veulent voir une plus grande demande en Allemagne et en Europe, tandis que les politiciens européens exigent que les déficits des États-Unis et du Japon soient réduits. Le déficit budgétaire du Japon cette année est à près de 10% du PIB, pour la cinquième année consécutive. La dette publique devrait être à 255% du PIB en 2018.

    Le déficit américain est de 5% du PIB et la dette s’élève à 110% de celui-ci. La croissance cette année aux États-Unis devrait être la plus élevée dans les pays capitalistes développées, soit 1,2%. Mais les prévisions sont incertaines puisque les coupes automatiques, la mise sous séquestre, n’auront effet que dans la seconde moitié de l’année.

    Avec l’échec des ”méthodes peu orthodoxes”, de plus en plus de gens se rendent compte qu’il n’y a pas de solution dans le cadre du système capitaliste. La résistance des travailleurs et des pauvres va augmenter, comme l’ont montré les manifestations de masse au Portugal au début de mars qui étaient les plus importantes depuis la révolution de 1974. La tâche des socialistes est de construire de nouveaux partis des travailleurs avec une réponse socialiste claire face à la crise.

  • [DOSSIER] Pourquoi le capitalisme prépare de puissantes explosions sociales

    Le mois dernier, en une fraction de temps, l’euphorie concernant la ‘‘reprise économique’’ est devenue panique. Commentateurs et analystes s’efforcent à expliquer le phénomène. On fait référence à la psychologie et au manque de leadership politique. Pour nous, ce ne sont là que les symptômes d’une maladie chronique. La plupart de la population ne doit s’attendre qu’à l’appauvrissement et à une exploitation accrue de la part du capitalisme.

    Par Eric Byl, article tiré de l’édition de septembre de Lutte Socialiste

    Si l’on avait consacré les 5.000 milliards de dollars de valeur boursière évaporés ce dernier mois à la lutte contre la faim dans le monde, la Corne de l’Afrique serait probablement un paradis aujourd’hui. Avec les 25 milliards d’euros disparus à Bruxelles, on aurait pu déminer la bombe à retardement du coût du vieillissement. Mais ce n’est pas ainsi que les choses fonctionnent. Il faut d’abord créer la richesse avant de pouvoir la partager, nous disent les libéraux. Ils nous ont aussi affirmé que lorsque l’on enrichi suffisamment les riches, cela arrose le reste de la population. C’est exactement l’inverse que nous constatons : lorsque les pauvres deviennent plus pauvres, cela affecte également le revenu des groupes moyens. Le professeur britannique Richard Wilkinson souligne que tant la crise de 1929 que celle de 2008 sont survenues à un moment où l’inégalité sociale a atteint un sommet.

    Quand les économistes bourgeois sont au bout du rouleau, ils font appel à Marx. Selon le professeur d’économie Nouriel Roubini, celui-ci ‘‘avait partiellement raison en disant que la mondialisation, un secteur financier enragé et la redistribution des richesses issue du travail finiraient par conduire à la destruction du capitalisme.’’ Tout comme le prix Nobel Paul Krugman, il appelle à une restauration progressive des finances publiques, à des stimulants ciblés et à des impôts plus équitables. ‘‘L’alternative, c’est comme dans les années ‘30 du siècle dernier, la stagnation interminable, la dépression, des guerres monétaires et commerciales, des contrôles de capitaux, des crises financières, des gouvernements insolvables et l’instabilité politique.’’ Pour éviter cela, Warren Buffet, le gourou des bourses, appelle à cesser le traitement fiscal favorable aux super-riches. ‘‘Dans les années ‘80 et ‘90, quand je payais encore plus d’impôts, je n’ai jamais hésité à investir’’. Voilà ce que n’aiment pas entendre nos patrons belges, pour qui les propositions – pourtant timides – de Di Rupo représentent déjà un tsunami d’impôts.

    La recette de Roubini a pourtant déjà été appliquée, en 1933, quand le président américain Roosevelt a renversé la politique d’assainissements catastrophique de Hoover avec son New Deal. Dès que Roosevelt a voulu réduire le déficit budgétaire en 1937, l’économie a à nouveau plongé dans la dépression. Si Roubini avait pris au sérieux la seconde partie de sa citation de Marx, il saurait pourquoi. Il a finalement fallu la deuxième guerre mondiale et ses 70 millions de morts, la destruction massive des infrastructures et des entreprises, puis la peur du communisme et par conséquent l’acceptation de la nationalisation de pans entiers de l’économie, de l’organisation des services publics, de la création de la sécurité sociale et de la négociation sociale pour que l’économie se remette complètement de la Grande Dépression.

    Des sociétés et leurs limites

    Marx a dit, en boutade, que l’homme n’a pas été libéré de l’esclavage mais qu’il s’agit de l’inverse. Les sociétés esclavagistes, aussi répréhensibles furent-elles, ont à une certaine époque joué un rôle dans la protection de l’homme, à la merci de la nature. Même si, initialement, les sociétés esclavagistes se situaient à un niveau inférieur et ont étés envahies par des sociétés basées sur ce que Marx appelait le mode de production asiatique, elles l’ont par la suite remporté. Elles étaient plus productives, les esclaves étant totalement à la merci du maître.

    Au fil du temps, cet avantage s’est transformé en son ‘‘opposé dialectique’’. Le nombre d’esclaves était la mesure de toute richesse, un ‘‘investissement’’ à nourrir et à loger, y compris aux moments non productifs. L’amélioration de la production ou de l’utilisation des outils n’intéressait pas les esclaves. Ils frappaient les chevaux jusqu’à ce qu’ils deviennent boiteux. Le besoin continuel de nouveaux esclaves réclamait des efforts de guerre constamment plus importants. Ce n’est que lorsque Rome est complètement tombée en décadence que des sociétés féodales primitives et moins développées ont eu des opportunités de l’envahir.

    Les serfs étaient alors liés à la terre. Ils devaient céder une partie du produit au Seigneur, mais ils pouvaient utiliser eux-mêmes le restant. Eux avaient donc intérêt à accroître la productivité, et c’est ainsi qu’ont été rendus possibles l’utilisation de meilleurs outils et le passage de l’assolement biennal à l’assolement triennal. La croissance de la productivité a également jeté les bases du capitalisme commercial, des expéditions et des pillages coloniaux ainsi que du développement des précurseurs de nos industries (les manufactures) qui, par la suite, se sont heurtés aux limites de la société féodale basée sur la propriété terrienne.

    Selon les économistes actuels, les conditions matérielles ne contribuent guère à expliquer pourquoi le socialisme ne fonctionne pas, contrairement au capitalisme. Seuls leur suffit l’égoïsme de l’homme et son manque de motivation pour être productif sans compétition. Marx ne nierait pas l’existence de caractéristiques psychologiques mais, plutôt que d’expliquer la société à partir de là, il enquêterait sur les caractéristiques matérielles à la base de certains phénomènes psychologiques. Parallèlement, il tiendrait compte d’une certaine interaction.

    Ses conclusions au sujet de l’aliénation associée au développement du capitalisme nous offrent d’ailleurs beaucoup plus de bases pour comprendre les récentes émeutes des banlieues anglaises que les discours des politiciens portant sur la haine et ‘‘l’effondrement moral’’ de la génération actuelle. Marx admirait la manière révolutionnaire dont le capitalisme développait les forces productives. Il reconnaissait le rôle progressiste du capitalisme mais, comme avec toutes les sociétés antérieures, il a en même temps analysé ses limites en profondeur.

    Défauts inhérents et maladie chronique du capitalisme

    La tendance à la surproduction et au manque d’investissements sont des ‘‘défauts inhérents’’ au capitalisme. Le travailleur ne reçoit jamais le produit intégral de son travail sous forme de salaire. Une partie du travail non rémunéré (plus-value) disparaît dans les poches du patron qui, autrement, fermerait rapidement boutique. Mais la compétition favorise la concentration de capital dans de grands conglomérats. Tant que les capitalistes réinvestissent une part importante de la plus-value, la surproduction est principalement un problème cyclique, puisque la production et l’installation de nouvelles machines exige des travailleurs qu’ils consacrent à leur tour leur salaire en biens de consommation et en services.

    Face à la concurrence, les capitalistes sont obligés de recourir à l’usage des techniques de production les plus modernes. Cela nécessite des investissements sans cesse plus importants dans les machines, la recherche scientifique et le développement technologique, qui devront être amortis dans des délais constamment plus courts. Dans la composition du capital, le facteur travail (ou capital variable, générateur de plus-value) souffre donc en faveur du capital fixe. Le bénéfice par unité de capital investi (le taux de profit) a dès lors tendance à baisser. C’est ce qui explique que, surtout depuis le milieu des années ’70, les marchés boursiers ont connu une forte expansion. Beaucoup de capitalistes préfèrent spéculer en bourse plutôt que d’investir dans la production, qui ne génère pas grand chose. Ceux qui sont restés dans la production se sont adressés aux banques afin de financer des investissements coûteux. Toutes les grandes entreprises participent désormais à l’investissement en bourse. L’idée qu’il existerait un capital industriel responsable au côté d’un capital financier téméraire n’est qu’un mythe.

    Par le passé, ces défauts inhérents étaient ‘‘gérables’’. Mais comme la science et la technologie ont atteint un niveau où toute innovation engloutit rapidement le marché capitaliste, la manière dont notre production est organisée constitue un frein continuel au développement. Les innovations nécessitent des années de recherche pour une durée de vie de plus en plus courte. Pourtant, les actionnaires privés exigent du rendement et ne veulent surtout pas courir le risque qu’un concurrent s’envole avec le fruit de leur investissement, d’où le commerce des brevets et le sabotage constant des savoirs scientifiques, qui devraient être librement accessibles.

    Les raisons immédiates de la crise actuelle

    La presse économique cite toute une série de raisons derrière cette ‘‘montagne russe boursière qui donne le vertige à l’investisseur’’. Pour les Etats-Unis : la crainte d’une nouvelle récession, l’impasse entre Démocrates et Républicains et la réduction de la notation triple A. Pour l’Europe : l’extension de la crise de la dette, l’avenir de la monnaie unique et la solvabilité des banques. Pour la Chine : l’inflation galopante, les craintes de l’impact de la récession américaine sur les exportations et la dette des collectivités locales. Nous ne balayons pas ces raisons immédiates, mais la raison sous-jacente est que la science et la technique ont dépassé les limites de l’élasticité du marché capitaliste. Les possibilités modernes aspirent à une libre gestion collective et à une planification démocratique, ce que les capitalistes ne peuvent temporairement contourner qu’en repoussant les contradictions internes jusqu’à devenir incontrôlables !

    Dans les années ’80, déjà, pour tenter de surmonter la surproduction et restaurer les taux de profits, on s’est servi de l’extension des crédits à bon marché sur le plan de la consommation et, sur celui de la production, de restructurations et de fermetures d’entreprises, de réduction des coûts de production de biens et de services ainsi que d’attaques contre les salaires, les conditions de travail, les horaires et les contrats de travail. L’effondrement des caricatures totalitaires de socialisme en Europe de l’Est et en Union Soviétique sous le poids parasitaire de la bureaucratie stalinienne et la décision de la bureaucratie chinoise d’introduire – de façon contrôlée – le marché libre afin de s’enrichir personnellement ont donné une énorme impulsion au transfert de production vers des pays à bas salaires.

    L’économie mondiale est un enchevêtrement de nombreux facteurs qui s’influencent mutuellement. D’où ‘‘l’effet papillon’’ selon lequel un petit mouvement dans un pays, dans des circonstances particulières, peut déclencher une tornade dévastatrice dans un autre. Avec 1.200 milliards de dollars de bons du Trésor américain dans ses réserves de change et encore 800 milliards de dollars en obligations d’institutions liées aux autorités américaines, le gouvernement chinois est effrayé par une dévaluation drastique du dollar. En 2000, la consommation particulière en Chine représentait 46% de son Produit Intérieur Brut et les investissements, 34%. Dix ans plus tard, ces investissements représentaient déjà 46%, tandis que la consommation privée avait chuté à 34%, en conséquence de l’expansion massive du crédit bon marché et de la sous-évaluation de la monnaie chinoise. Cela explique l’inflation galopante et la menace de surchauffe de l’économie. Si le marché américain décroche suite à une récession, on craint que la Chine connaisse un développement semblable à celui que connaît le Japon depuis le début des années ‘90.

    USA : vers une rechute

    L’impasse entre Démocrates et Républicains, en particulier du Tea Party, concernant l’augmentation du plafond d’endettement du pays a illustré à quel point les représentants politiques de la bourgeoisie sont divisés concernant la manière de s’attaquer à cette crise. Rien ne semble fonctionner. Les ménages ne consomment pas parce qu’ils réduisent leurs dettes, que le chômage mine leur pouvoir d’achat et que les gouvernements locaux économisent. Malgré les taux d’intérêt bas, les entreprises continuent de garder leur argent au lieu de l’investir. La Banque Fédérale s’est déjà, à deux reprises, mise à imprimer de l’argent sans que cela n’apporte fondamentalement de solution, et le gouvernement fédéral devra bien un jour endiguer son déficit budgétaire. Comment faire cela sans provoquer une explosion sociale?

    Cependant, certains analystes renversent le raisonnement. Un éditorial du journal boursier flamand De Tijd, fait même appel à Gustave Lebon, qui à publié en 1895 ‘‘La psychologie des foules’’. Selon le rédacteur, les investisseurs aspirent à une poigne de fer, mais ils ne la reçoivent ni aux États-Unis, ni en Europe. Le raisonnement est ainsi fait: il n’y a pas de direction, la confiance disparaît, ainsi la panique se crée et le troupeau court dans toutes les directions. Les fondations, selon ces analystes, sont en effet en bonne santé, parce que les entreprises ont un stock de cash important. L’hebdomadaire The Economist estime toutefois la probabilité d’une récession aux États-Unis à 50% et les investisseurs espèrent quand-même un troisième recours à la planche à billet.

    Si l’agence de notation Standard & Poor a, pour la première fois depuis 1941, dévalorisé la cote des États-Unis, c’est, selon ces mêmes analystes, la faute des politiciens. S&P peut bien prétendre que l’énorme erreur de calcul à hauteur de 2.000 milliards de dollars dans le rapport sur lequel elle se basait n’a pas joué dans la démission du PDG, il est certain que cela y aura certainement contribué. La vague de critiques que S&P a dû avaler et le fait que les investisseurs, au lieu de fuir, ont encore augmenté leurs achats d’obligations du Trésor américain, permettant aux États-Unis d’emprunter à un taux d’intérêt inférieur à celui de l’Allemagne, l’ont probablement achevé.

    Bye, bye Europe ?

    Pour ne pas se faire assommer par les oracles modernes – les agences de notation – les foyers grecs, portugais et irlandais ont fortement serrés leurs ceintures. Mais maintenant, presque tout le monde s’accorde à dire qu’elles sont incompétentes. Parce que ce sont des personnes de chair et de sang, selon le professeur d’économie Paul De Grauwe de Louvain ; parce que ce sont des entreprises privées qui veulent faire du profit et non pas des évaluations appropriées, selon nous. La sévère politique d’économie imposée à la population en échange de l’aide de la troïka (Fonds monétaire international, Banque centrale européenne et Fonds européen de stabilité) a plongé ces sociétés dans une profonde récession.

    L’unification capitaliste de l’Europe et la monnaie unique étaient des leviers de maximisation des profits et de casse sociale. Les différences entre les diverses économies nationales de la zone euro n’ont pas diminué, mais augmenté. Avec la politique de faibles taux d’intérêt que les économies les plus fortes ont exigé de la Banque Centrale Européenne, des bulles immobilières se sont développées et des paradis fiscaux ont été créés dans la périphérie, instrumentalisés ailleurs pour briser des acquis sociaux et mettre en place des secteurs à bas salaires. Cette hydrocéphalie devait se dégonfler à un certain moment, nous le disons depuis des années. Les spreads, la différence entre les coûts auxquels les gouvernements nationaux peuvent emprunter, n’ont jamais été plus grands.

    Des pays non membres de la zone euro peuvent stimuler les exportations en dévaluant leur monnaie. Quiconque est emprisonné dans la zone euro ne peut que recourir à la dévaluation interne, un mot à la mode qui signifie ‘‘casse sociale’’. Les bourgeoisies européennes se sont elles-mêmes placées dans une situation kafkaïenne. Abandonner l’euro provoquerait une hémorragie majeure pour les entreprises qui repousseraient sans doute la facture vers les travailleurs et leurs familles. Mais le coût du maintien de la zone euro pourrait devenir trop élevé. La Grèce a besoin d’une seconde aide, et quelques pays ripostent déjà, mais si l’Espagne et l’Italie glissent elles-aussi bientôt, nous entrerions alors dans une toute autre dimension. Le secteur bancaire européen deviendrait insolvable, la liquidité s’assécherait, une récession mondiale s’ensuivrait et la zone euro s’éclaterait probablement de façon incontrôlée. C’est pourquoi la BCE a relancé son programme d’achats d’obligations d’États. Pour l’instant, cela semble fonctionner, mais personne ne croit que cela puisse être suffisant à terme.

    D’où l’illusion de transférer – en partie ? – les dettes nationales vers l’Europe et de les mutualiser dans des obligations européennes. Selon Karel Lannoo, le fils, cela sous-entend une responsabilité commune, un trésor européen et donc des revenus d’impôts européens. Tous les 17 parlements nationaux auraient à l’approuver. Par ailleurs, on sait très bien que la crise en 2008 avait été déclenchée parce qu’on avait saucissonné de mauvais prêts, en particulier les hypothèques à grands risques, pour les emballer avec de meilleurs prêts, en espérant qu’ainsi, les risques seraient tellement éparpillés qu’il n’y en aurait plus. Qui ose prétendre que la même technique, parce que ce sont les obligations européennes, fonctionnerait lorsqu’il s’agit de dettes publiques ?

    Fuite vers des refuges

    Les investisseurs fuient vers de prétendues valeurs refuges. En cas de croissance, ce sont des matières premières, particulièrement le pétrole, mais la hausse des prix conséquente étrangle la croissance. Les récoltes sont aussi très populaires, mais elles ont déjà entraîné des émeutes de la faim. Aujourd’hui, les obligations des gouvernements américain et allemand sont populaires, mais elles rapportent chacune moins que ce que l’on perd par inflation. Ensuite viennent l’or et les francs suisses. Le prix de l’or dépasse de loin le coût de production et la Suisse risque de devenir victime de son succès. La demande pour les francs fait tellement rebondir la monnaie que sa propre industrie risque d’être enrayée et que l’industrie du tourisme risque de s’effondrer. Des consommateurs suisses vont de plus en plus faire leurs achats de l’autre côté des frontières. Cet avertissement, l’Allemagne le prendra en considération, car ce scénario risque de lui arriver dans le cas d’un éclatement de la zone euro.

    Explosions sociales

    Ces dernières années, les fidèles lecteurs de Lutte Socialiste et du site ‘‘socialisme.be’’ ont pu lire dans nos publications de nombreux articles consacrés aux révolutions, aux grèves générales et aux mouvements provoqués par les premiers effets de la crise. Selon nous, ce ne sont là que des signes avant-coureurs des explosions sociales qui nous attendent. Lors de ces explosions, le mouvement ouvrier va se réarmer tant sur le plan organisationnel que programmatique. Le Parti Socialiste de Lutte est déterminé à y apporter une contribution importante.

  • Le capitalisme sur le sentier de la guerre des monnaies

    Prendre du speed ou d’autres stimulants au cours d’une soirée peut rendre infatigable et libéré de freins physiques ou moraux. Le crédit, pour le capitalisme, c’est l’équivalant du speed de notre fêtard : cela suscite l’euphorie, mais cela rend inévitablement le corps dépendant, l’épuisera et le démolira, pour finalement conduire à une dépression profonde. De la même façon, tant qu’il y a suffisamment de doses, les toxicomanes sont des amis inséparables. Par contre, en cas de manque, ils deviennent d’impitoyables concurrents.

    Par Eric Byl

    Concernant le crédit, les dealers sont les autorités. Pour sauver les spéculateurs, elles ont fait des emprunts massifs. C’est pour les amortir que les français devront économiser 1.700 € par personne durant les prochaines années, entre autres en travaillant plus longtemps. En Angleterre, il s’agit de 1.600 €, de 1.100 € en Allemagne et de 1.400 euros aux Pays-Bas. En Belgique, les politiciens ne savent pas encore trop comment, mais il s’agira de 2.200 à 2.500 € par habitant d’ici fin 2013. Ce n’est visiblement toujours pas très clair pour la N-VA. Le ministre flamand Bourgeois (N-VA) a ainsi déclaré à la radio qu’il sera difficile de trouver 22 à 25 milliard d’€… en une année (au lieu de 4).

    Pendant le grand crash des années ’30, qui a conduit à la deuxième guerre mondiale, chaque pays a essayé de protéger son marché face aux concurrents étrangers. C’est ce qu’on appelle le ‘‘protectionnisme’’. Dès le début de la crise immobilière déjà, des économistes avaient averti de surtout éviter cette erreur.

    Mais la crise immobilière refuse de passer et, de plus, elle a entrainé une crise bancaire dont le sauvetage a provoqué une crise des Etats. On deviendrait même désespéré de constater, à la fin du processus, que de rusés banquiers ont instrumentalisé la situation pour exproprier à tort des milliers de familles.

    Celui qui voit mourir son enfant intoxiqué est capable de tout, y compris de ce qu’on ne l’imaginait pas capable de faire. Pour les politiciens capitalistes, ce n’est pas différent. Tous essayent de diminuer les déficits en stimulant les exportations dans l’espoir de récupérer une partie du marché des autres pays. Au début, cela se faisait de façon cachée, en diminuant les taux d’intérêts où en créant de l’argent, le “quantitative easing” (voir notre dossier à ce sujet). Ils affaiblissent ainsi leur propre monnaie en comparaison des concurrents extérieurs, qui eux réagissent par des mesures similaires annulant cet effet.

    Dans son introduction au “Capital” de Marx, Friedrich Engels avait décrit une dépression comme une longue période de stagnation économique accompagnée d’un chômage structurel où chaque mesure provoque un effet contraire à son objectif. Le ‘‘Quantitative easing’’ a permis à de rusés spéculateurs d’emprunter des dollars à un taux de 0,25% pour acheter des obligations brésiliennes rapportant 5% de rendement. On appelle cela du Carry trade. Cela provoque des bulles au Brésil, mais aussi en Thaïlande par exemple, ces deux pays essayent de contrarier cet effet en introduisant une taxe supplémentaire sur les obligations achetées par des “investisseurs” étrangers.

    La création d’argent aux Etats- Unis provoque inévitablement le même réflexe en Chine, et au Japon, et en Corée du Sud, et… Cela menace de faire encore plus exploser les dettes publiques. Aux USA, les démocrates et les républicains, au congrès et au sénat, ont déjà menacé d’introduire des taxes supplémentaires sur les produits chinois au cas où la Chine refuserait de revaloriser sa monnaie (on songe à une augmentation de 20 à 40%). La Chine ne veut et ne peut pas appliquer cela.

    La possibilité que cette guerre des monnaies conduise à une guerre commerciale réelle et, finalement, à un crash encore plus profond que celui que nous venons de vivre semble inévitable. Cela s’explique par le fait que le système capitaliste n’est plus capable de gérer les forces productives qu’il a suscitées. Seule une économie démocratiquement planifiée est apte à utiliser ses capacités harmonieusement, en fonction de tous.

  • Crise du capitalisme mondial : vers une guerre des monnaies?

    Début d’année, une bonne partie des économistes et des dirigeants capitalistes affirmaient ‘‘entrevoir le bout du tunnel’’, voulant dire par là que certaines statistiques économiques leur faisaient penser que le retour à un capitalisme en croissance était pour bientôt. Tout ceux-là doivent aujourd’hui se demander quelle saleté obstruait leurs lunettes au vu de la succession de crises qui frappent leur système, à travers la crise des dettes publiques, la zone euro, l’absence de perspective autre que la précarité pour les travailleurs et leur famille et aujourd’hui une ‘‘guerre des monnaies’’ qui se profile.

    Par Baptiste (Wavre)

    LA GRANDE RÉCESSION

    Les nouvelles économiques que l’on peut lire dans les quotidiens semblent assez contradictoires, soufflant tantôt le chaud, tantôt le froid. Un jour, on parle de retour à la croissance et d’apaisement sur tel marché et, le lendemain, la panique prend place, parfois concernant le même sujet. Ce caractère maniaco-dépressif des dirigeants capitalistes est caractéristique de la crise qu’ils traversent et qui s’est déclarée sur le plan financier dès 2007 déjà. Cela reflète clairement un manque de confiance dans la capacité du système à offrir une perspective de croissance.

    Cette crise, la plus importante que le capitalisme ait connue depuis les années ’30 selon une majorité d’économistes sérieux, a eu un impact sur toutes les économies de la planète, aucun pays n’a pu se retrouver sur un ‘‘îlot de croissance’’ isolé. Cela s’est traduit par une diminution du PIB mondial en 2009, une première depuis 65 ans. Mais, en contraste avec la crise de ’29, les gouvernements sont rapidement intervenus, et considérablement, afin de sauver tout ce qui pouvait l’être dans la finance mondiale. Ainsi, le FMI a qualifié la crise actuelle de ‘‘Grande Récession’’, en contraste avec la ‘‘Grande Dépression’’ des années ’30.

    Mais ces interventions ont-elles pu sauver l’économie mondiale en résolvant un problème de confiance et en relançant la machine pour un tour ? Rien n’est moins sûr. Le FMI lui-même indique que le risque de rechute est élevé, soulignant que la reprise dans les pays capitalistes avancés est trop faible en comparaison de l’importance de la récession qui a précédé. Ils veulent dire par là qu’une récession d’une telle ampleur aurait du faire le ménage et laisser à sa suite un potentiel de croissance pour un capitalisme assaini. Mais cette croissance ne venant pas réellement (les chiffres positifs ne reflètent que les effets des plans de stimulation et une augmentation des stocks, et il n’y a pas de création d’emplois alors que des millions d’entre eux ont été détruits au cours de la crise), le spectre d’un ‘‘double-dip’’ (une récession à double creux) hante de plus en plus les gouvernements.

    INJECTION D’ARGENT

    C’est la raison pour laquelle les autorités financières des différents pays épuisent encore plus les outils monétaristes de stimulation de l’économie. Les taux d’intérêts sont déjà à 0 ? Alors l’heure est venue d’injecter des milliards de liquidités à travers un ‘‘assouplissement quantitatif’’. Il s’agit pour les autorités financières de racheter des actifs toxiques, c’est-à-dire de donner de l’argent pour des papiers qui ne seront plus solvables, ce qui revient à injecter de l’argent. Des taux d’intérêt à 0 font déjà craindre à eux seuls aux économistes le développement de bulles spéculatives et, du coup, une fébrilité de l’économie. Il ne faut pas demander la fébrilité dont fait acte le capitalisme avec une telle batterie de mesures.

    Beaucoup d’économistes n’ont d’ailleurs pas confiance en ce ‘‘quantitative easing’’ pour opérer un coup de rein dans la relance, car trop peu de choses sont connues et ils indiquent que ce ne serait qu’un sparadrap sur une jambe cassée. De fait, la crise a considérablement affaibli le pouvoir d’achat des ménages. Les marxistes peuvent aller plus loin, et avancer que le capitalisme pose ses propres limites à la croissance à travers la crise de surproduction qu’il entraîne. Et quel que soit l’aménagement monétariste des capitalistes, il ne peut en rien résoudre cette crise de surproduction.

    LES CONTRADICTIONS AUGMENTENT

    Entre-temps, la crise a également remis à l’ordre du jour les contradictions inhérentes du capitalisme, des contradictions que la croissance, même faible, du néolibéralisme avait permis de mettre temporairement au frigo. Aujourd’hui, les illusions volent en éclat et ce sont les conflits qui prennent le dessus. La crise de la zone euro a illustré à quel point la coopération entre gouvernements de différents Etats-nation passe à l’arrière plan lorsque les intérêts personnels ne sont plus suffisamment garantis.

    Dans son dernier rapport, le FMI met en avant la menace d’une guerre des monnaies, qui illustre le fait que les différents gouvernements sont décidés à mener une bataille pour préserver les intérêts de ‘‘leurs capitalistes’’. Un instrument classique pour stimuler son économie est de réaliser une dévaluation compétitive de sa monnaie. De fait, les marchandises à l’exportation sont du coup moins chers (l’exportation est donc stimulée) et l’importation est plus chère (la production interne est donc stimulée). C’est précisément cette dévaluation compétitive que des pays comme la Grèce n’ont pas été en mesure de réaliser du fait du carcan de l’euro (la solution pour eux était alors de stimuler la production avec de l’austérité).

    Mais cette dévaluation compétitive ne fonctionne que si d’autres pays concurrents sur le plan des exportations n’y recourent pas. Car si un second pays dévalue également sa monnaie, les efforts du premier pays se retrouvent annulés.

    C’est ce petit jeu de dupes que l’on peut observer aujourd’hui, notamment entre l’euro, le yen, le dollar et le yuan. De la même manière que des voix se sont élevées, notamment du côté du FMI, pour demander à des pays excédentaires comme l’Allemagne de relancer sa demande intérieure, aujourd’hui il est demandé à la Chine de développer sa demande interne. L’idée est les pays qui ont une certaine marge commerciale favorable doivent exploiter cette position de force pour stimuler la demande interne, et finalement donner un marché aux exportations de pays déficitaires.

    Cette idée est clairement une illusion. L’excédent commercial chinois est indissociable du taux d’exploitation présent dans le pays et ne peut pas être conjugué à une demande soutenue. Et il est illusoire de croire que les capitalistes allemands vont sacrifier ‘‘leur compétitivité’’ par charité pour les capitalistes qui leur sont concurrents.

    “ÇA VA FAIRE MAL”

    Le titre du rapport du FMI sur l’économie mondiale est ‘‘Est ce que ça va faire mal’’, et ce n’est pas un hasard.

    Cela a tout d’une question oratoire, à la réponse connue de tous: le FMI est convaincu que cette crise va faire très mal aux travailleurs et à leurs familles. Quel que soit l’aménagement capitaliste de la crise, il s’agit systématiquement d’un cul de sac pour les travailleurs : ce système n’a plus les moyens de proposer une perspective d’avenir et de bien être pour la société. Le seul agenda présenté est rempli de crises et de précarité. Il y a quelques années encore, les idéologues des classes dirigeantes avaient la possibilité de réciter à tue tête ‘‘There Is No Alternative’’ (TINA, il n’y a pas d’alternative au néolibéralisme). Aujourd’hui, ils ne sont plus du tout dans une telle posture, la crise de leur système illustre qu’aucune issue n’existe dans le capitalisme pour les travailleurs et leur famille.

    Un système où les richesses sont produites en fonction des besoins de la population, à travers une planification démocratique de l’économie – c.à.d. le socialisme – est le seul système en mesure d’offrir une réponse aux travailleurs.

  • La crise est-elle presque finie ?

    Les nouvelles à la radio et la télévision peuvent en donner l’impression, même si les nouvelles sont souvent contradictoires. Le chômage augmente moins fortement dans notre pays (des mesures comme le chômage temporaire ont permis de limiter la casse) et les banques font à nouveau des profits – subventionnés ou spéculatifs.

    Par Peter Delsing

    En 2008, le capitalisme mondial a été menacé par l’effondrement du secteur financier, ce qui a mis en péril une grande partie du reste de l’économie : les banques prêtent de l’argent aux entreprises et l’épargne des travailleurs devait soudainement être ‘‘couverte’’ par le gouvernement.

    Les banques avaient construit des dettes telles que la méfiance s’est installée concernant leur capacité à les rembourser. Résultat : le gouvernement a dû intervenir pour renflouer les poches des banques et sauver leurs comptes. Cette opération de sauvetage des banques pour stimuler l’économie fut la plus grande de l’histoire du capitalisme. Le montant total du soutien fut plus élevé que le Produit Intérieur Brut des Etats-Unis, ou même qu’un tiers du PIB mondial.

    De cette manière a été évité un effondrement comme celui des années 30, même les économistes bourgeois doivent le reconnaître. Mais ça ne veut pas dire que la fin de la crise est en vue, bien au contraire. Les gouvernements ont stabilisé la chute d’une façon temporaire, sans baisse du chômage et sans augmentation de nos salaires. En outre, la question nous est aujourd’hui posée de payer les coûts des plans de sauvetage des banques par des coupes dans les pensions, la sécurité sociale,… Cette transition du ‘‘surtout des mesures de stimulus’’ à ‘‘surtout des assainissements’’ sur le revenu des travailleurs peut conduire à une nouvelle récession. Qui devra encore acheter tout ce qui est produit ?

    Les problèmes fondamentaux du capitalisme ne sont pas résolus. La crise bancaire n’est pas finie. La montagne historique des dettes a eu pour but de rattraper temporairement le manque de pouvoir d’achat des travailleurs. Depuis les années 70, le capitalisme a été confronté à un ralentissement de la croissance et à des éléments de dépression. La cause est la diminution du taux de profit dans l’industrie depuis la fin des années 60 : la part du « travail non rémunéré » dans chaque produit a diminué par une forte augmentation des investissements dans la technologie. Le montant des bénéfices par unité de capital a chuté. En outre, la concentration des richesses entre les mains d’une petite élite de capitalistes à cause de l’augmentation de l’exploitation a miné le marché.

    Le taux de profit a été partiellement et temporairement rétabli avec des coupes néolibérales dans les salaires, dans la sécurité sociale,… Mais cela s’est réalisé en sapant encore plus le pouvoir d’achat, ce qui a conduit à une spirale vers le bas. Si le contrôle privé des capitalistes sur les sociétés, les matières premières, les machines,… n’est pas supprimé et remplacé par une économie démocratiquement planifiée, une nouvelle phase de crise nous menace, une dépression avec un taux de chômage de 20 à 30% et la réduction de l’assistance de la sécurité sociale à un minimum.

  • Economie: Le pire de la crise est-il devant nous?

    Nous entendons de plus en plus dire que le pire de la crise est derrière nous. L’économie semble se remettre en ce moment. Mais en même temps, on nous prévient que le chômage va continuer à monter, et que nous devrons bel et bien payer les pots cassés par les capitalistes. Le site du CIO a demandé une courte réaction sur cette prétendue fin de crise à Lynn Walsh, rédacteur en chef du magazine Socialism Today.

    www.socialistworld.net

  • Ecole d’été européenne du CIO – 2009: Le capitalisme dans la pire crise depuis les années ‘30

    L’année 2009 constitue un moment critique et signifie beaucoup de tâches nouvelles pour toutes les sections du CIO. Le développement de cette crise du capitalisme nous confronte à de nouvelles questions. A titre d’exemple, cette année déjà, nous avons connu des grèves industrielles victorieuses en Angleterre, comme à Visteon, le mouvement de masse de la jeunesse allemande, d’innombrables luttes en France ou en Irlande, mais aussi des situations très graves comme au Sri Lanka ou encore au Pakistan. Là où nous sommes présents, nos camarades ont participé activement à ces luttes. Il s’ouvre une nouvelle ère dans la lutte des classes un véritable point tournant ; tant pour la classe ouvrière que pour notre internationale.

    Rapport de la discussion

    La crise économique la plus profonde depuis les années ‘30

    La situation actuelle a des éléments de celle des années ‘80, quand nous sommes passés du statut d’observateurs à celui de facteur éventuellement décisif. D’un point de vue objectif, cette situation actuelle est encore plus favorable : le capitalisme est confronté à une crise mortelle. Les commentateurs bourgeois se confortent en se disant qu’ils ne sont pas confrontés à des résistances massives de la part de la classe des travailleurs, mais les commentateurs les plus sérieux comme Obama, reconnaissent le danger.

    Ainsi, quand les banquiers se sont plaint des mesures d’Obama, il a répondu de façon intelligente: «entre vous et les fourches, il n’y a plus rien d’autre que moi». Le soi disant paradigme des années ‘90 qui a suivi la chute du mur, la fin de l’histoire, est parti à jamais. Les racines de la crise en font une crise organique du capitalisme. Les économistes bourgeois discutent de la forme que va prendre la récession : en L, en U, en W,… Mais ils sont en tout cas d’accord pour dire que la situation est mauvaise. Les keynesiens disent que ce n’est pas une dépression, mais une grande récession, tandis que Nouriel Roubini dit que c’est une quasi-récession. Mais en termes de dureté envers la classe ouvrière, on peut dire que cela va être comme dans les années ‘30.

    Depuis trois ans, le capitalisme mondial est frappé de la pire crise qu’il ait connu depuis les années ‘30. Depuis le pic rencontré au 2ème trimestre 2008, la contraction de l’économie mondiale est d’environ -3% (chiffre à comparer aux +5% connus durant les 5 années qui ont précédé la crise). Par rapport à la crise des années ’30, cette crise est plus complexe et plus difficile à appréhender et anticiper à cause de la complexité de l’économie mondiale. Mais il ne s’agit pas que d’une crise économique, c’est aussi une crise sociale et une crise politique pour le capitalisme. Elle s’accompagne du développement d’un chômage de masse qui va encore s’amplifier. Ces dernières semaines, nous avons assisté à des soulèvements de masse dans certains pays. En Iran, il y a eu un soulèvement révolutionnaire en protestation contre les fraudes électorales. En Chine, au Xinjiang, on a vu des affrontements entre Hans et Ouïgours, immédiatement suivis par une forte répression.

    Le coup d’Etat au Honduras est un signe de l’approfondissement de la crise politique en Amérique Latine. En Afrique du Sud, les grèves dans le secteur de la construction constituent un premier test pour le gouvernement Zuma. Le continent africain, même avant que la crise ne se développe complètement, avait déjà connu des émeutes de la faim dans 12 pays. Lors d’une rencontre internationale, le président de la Jamaïque a déclaré qu’il pouvait y avoir des mouvements de masse et révolutionnaires.

    Des mouvements de masse et des grèves générales ont aussi eu lieu en Europe, notamment en France et en Grèce. En Grande-Bretagne, les luttes et les grèves avec occupation et blocages illégaux, notamment parmi les travailleurs de la construction, sont un signe des changements actuellement en cours. Ces mouvements vont avoir des effets sur la conscience des travailleurs, y compris dans les pays où des mouvements particuliers ne se sont pas développés. Cette crise met en péril la légitimité du capitalisme, même pour ses dirigeants.

    Ces derneirs temps a eu lieu une explosion au grand jour de la corruption dans les grandes compagnies, notamment bancaires et d’assurance, avec par exemple l’affaire Madoff, qui a été condamné à 150 ans de prison suite à l’escrocrie de plus de 50 miolliards de dollars avec un système pyramidal. Cette affaire a fait grand bruit, mais les banques et les compagnies connaissent des dizaines de systèmes similaires, à la limite de la légalité. L’année dernière, des protestations ont eu lieu aux USA contre le renflouement des banques, les contribuables ne voulaient pas que leur argent aille sauver les banquiers.

    Il est difficile encore de voir la profondeur et l’ampleur réels de la crise, même avec des chiffres. L’année dernière, plus de 50 mille milliards de dollars (¼ de la capitalisation mondiale…) ont été perdus, mais énormément de pertes sont encore cachées. Les pertes financière sont équivalentes à une année de production industrielle mondiale.

    Les conséquences sont dramatiques pour des millions de travailleurs et pour leur famille, plongés dans la pauvreté ou la misère. Pour les commentateurs, cela est en premier lieu dû aux erreurs de crédit bon marché ou à la malhonnêteté de certains spéculateurs et dirigeants. Ces éléments ont pu jouer un rôle, mais c’est bien l’entièreté du système qui est responsable. Depuis Reagan et Thatcher, le capitalisme a quitté l’investissement industriel productif pour se réfugier dans l’investissement financier. Depuis cette époque, l’économie a été tirée par des bulles financières du genre de celle de l’immobilier, des nouvelles technologies,… Le poids de ces bulles spéculatives est visible quand on regarde la part de profits dus à l’activité financière. Avant les années ‘80, il s’agissait de 16%; pour monter jusqu’à atteindre les 41%. A côté de cela, les politiques néo-libérales ont conduit à un accroissement des inégalités sociales et économiques dans les pays mais aussi entre eux tandis que les capitalistes se sont eux mêmes illusionnés en affirmant qu’ils avaient éliminé les risques des marchés financiers et que s’ouvrait une période de profits sans fin. En définitive, la spéculation sur les dérivés financiers s’est avérée être la plus dangereuse, celle qui pouvait mener le plus rapidement au crash.

    Cette situation ne va pas durer éternellement, le capitalisme va pouvoir retrouver des forces pour faire redémarrer l’économie, mais quel type de reprise pourrait-il y avoir? On ne peut qu’esquisser les différents scénarios possibles.

    Avant 2007, la question qui se posait était celle de la profondeur de la crise. A l’époque, il était impossible de répondre précisément, mais les tendances génréales qui se sont exprimées ont été telles que nous l’avions dit. Maintenant, nous pouvons dire qu’il y aura pas de reprise rapide; ce ne sera pas une crise en V ou en U, même les dirigeants des multinationales disent plutôt que ce sera une crise en L, voire en W.

    Tous les gouvernements d’Europe, des Etats-Unis, de Chine, du Japon, passent leur temps à injecter des milliards dans l’économie pour la soutenir, et ces mesures peuvent amortir ou ralentir les effets de la crise. Mais en conséquence, le déficit des USA va certainement atteindre 12% du PIB cette année, soit 13 mille milliards de dollars, ce qui représente 80% de son PIB annuel. Les taux d’intérêts seront de 500 milliards de dollars par an, ce qui représente 4% de son PIB annuel. Maintenant, nous sommes à plus de 700 milliards de dollars de plans de relance, sans que cela ait un effet réel sur l’économie.

    Dans Union Européenne, le déficit va atteindre les 7,3% du PIB contre 1% en 2007. Les effets réels des plans de relance sont encore incertains et même si des mesures «sociales» sont prises pour amortir les effets de la crise sociale, aucun signe de retour à la normale n’est visible, notamment dans les secteur du prêt. Il n’y a pas non plus d’indice d’un redémarrage de l’investissement industriel par les grandes entreprises. La classe capitaliste n’a aucune idée claire sur la manière de sortir de la crise, elle réagit au coup par coup, selon les évènements.

    Le début des années ‘80 avait été marqué par un passage conscient d’une orientation économique keynesienne, avec interventions d’Etats, à une orientation basée sur le monétarisme de Milton Friedman (comme l’ont appliqué Reagan, Pinochet, Thatcher,…). Ici, ils sont obligés de combiner les deux. Dans la plupart des pays, le taux d’intérêt avoisine 0%, pafois même sous 0%. Cela est dû à un recours massif à la ‘planche à billets’, ce qui crée une dévaluation monétaire. Un écroulement encore plus grave du système monétaire et financier a pu ainsi être évité, mais cela conduit au risque d’un développement massif de l’inflation, ce qui arrive toujours lors d’une impression massives de billets. Pour l’instant, cet effet est compensé par le fait que les banques gardent encore beaucoup de liquidités dans leurs coffres et par le fait que la surproduction garde les prix à un niveau relativement bas, pour l’instant on observe même plutôt une tendance déflationniste. Mais très rapidement, ces facteurs ne vont plus jouer et arrivera alors une inflation importante. La classe capitaliste n’a pas les moyens de maîtriser la situation, très certainement en ce qui concerne les mouvements qui peuvent se développer. En cas de forte inflation, il y aurait de suite une réaction de masse des travailleurs pour défendre leur niveau de vie.

    Aucun pays capitalistes avancés n’aura une croissance cette année. Le Japon est confronté à une situation désastreuse, pire que dans les années ‘90. La contraction des exportations s’y élève à 41%. La surcapacité présente dans tous les pays capitalistes est une autre preuve que le capitalisme est incapable de développer les forces de production.

    Ce qui est encore plus important pour l’avenir est l’augmentation exponentielle des dettes. La bourgeoisie est confrontée au choix : déflation ou inflation. Pour le moment ils pompent de l’argent dans l’économie, aux dépends de la dette énorme qui se crée et du risque inflationnel qui augmente. Cela signifie que partout la bourgeoisie sera obligée d’attaquer les services publics (services & salaires), l’Etat providence qui avait été construit pour adoucir les contradictions de classes va être brisé. Il y aura une guerre civile contre les services publics et les travailleurs des services publics.

    Le CIO doit néanmoins discuter de toutes les variations possibles, et accepter le fait que la bourgeoisie peut avoir un effet avec ses mesures ; mais en compilant des problèmes encore plus grands pour le futur. On parle maintenant de la possibilité d’une reprise ; on parle de ‘croissance verte’. C’est possible qu’il y ait une certaine croissance, mais incomparable en tout cas avec la situation d’avant la crise.

    Et évidemment, puisque le capitalisme est basé sur le profit, le travail non rémunéré des travailleurs, les capitalistes sont obligés de prendre des mesures contradictoires. Même le Financial Times reconnaît que la crise est provoquée par des contradictions entre l’offre et la demande, mais s’ils veulent reconstruire la profitabilité des entreprises pour se préparer à une nouvelle période de croissance, ils sont obligés d’attaquer les travailleurs. Cela va radicaliser les masses. On peut même aller encore plus loin et dire qu’il y a des éléments de révolution et de contre-révolution. S’il y avait des partis de masse de la classe ouvrière ça serait certainement le cas de manière plus visible.

    Chine

    En Chine, les mesures prises par le gouvernement ont permis d’amortir les effets de la crise, notamment la chute gigantesque des exportations. Mais cela a reposé sur un énorme investissement public avec en conséquence une pression sur les finances publiques et les banques, qui ont dû multiplier les prêts. L’investissement public aurait augmenté de quelques 49%. Même si ce chiffre officiel est un peu exagéré, même un chiffre de 20%, plus probable, resterait fort important. L’augmentation de l’investissement industriel serait de 44% contre 18% aux USA. Les prévisions de croissance parlent de 7,2% pour cette année en Chine, ce qui est une diminution non négligeable comparée aux 12% de croissance que les dernières années ont connu. De novembre à juin derniers, la balance commerciale de la Chine n’a pas cessé de baisser. Sur les 6 premiers mois de l’année uniquement, les importations ont chuté de -26%, les exportations de -21%, et le commerce global de -20%. Des mesures protectionnistes assez fortes ont été instaurées, comme contre l’importation de poulet américains (qui représentaient 60% des importations de poulets en Chine). En même temps, les prix du pétrole et des matières premières n’ont pas cessé d’augmenter depuis quelques mois. Il n’y a plus d’embauches du tout dans toute une série de secteurs industriels, et il y a encore une surcapacité de 40%.

    Le gouvernement affirme que 60% des universitaires ont trouvé un emploi en quittant leur université, un chiffre identique à celui de l’an dernier, ce qui est impossible. Dans certaines régions, cela n’atteint que 10%. Selon la CCTV, 90% des PME chinoises ont des difficultés et 40% ont déjà fermé. Le plan de relance du gouvernement n’a pas été consacré à l’industrie réelle. Il y a toujours 20 millions de travailleurs migrants qui n’ont pas de travail et, à Shanghai uniquement, 700.000 employés de bureau sont maintenant au chômage. Si la croissance serait de 7,5% pour 2009, avec une certaine reprise économique, cela est du à une augmentation de l’investissement, mais pas de la demande. Il n’y a aucune chance pour que celle-ci augmente.

    La part de l’investissement dans le PIB sera de 63% en 2009 (contre 57% en 2008). En fait, c’est 700 milliards de dolalrs qui ont été investis par l’Etat, largement plus que ce qui avait été annoncé initiallement, et cela demande une sortie monétaire très importante des réserves chinoises. La majorité de cet argent a été plongé dans l’économie spéculative, avec des investissements dans la bourse et notamment dans le secteur immobilier. L’indice boursier a grimpé de 72%, ce qui illustre bien que la Chine s’oriente vers une économie spéculative. Soit il va y avoir une augmentation de l’inflation, soit la bulle spéculative va éclater à un moment donné.

    La question aujourd’hui n’est pas de se demander si la Chine va atteindre les 8% de croissance pour 2009, mais plutôt comment ils veulent atteindre ce chiffre. Là, l’orientation est vers une augmentation de l’investissement et pas du niveau de vie des travailleurs et des paysans. La polarisation de classe est de plus en plus forte; 0,4% de la population possède 70% de la richesse, et 15% de la population représente 80% de la consommation. A peu près 1/5 de la population chinoise (soit 300 millions de personnes) vit en dessous du seuil absolu de pauvreté (avec moins de 1,25 dollar par jour).

    La crise est beaucoup plus forte en Chine qu’aux USA ou en Europe alors que le pays ne fait que rentrer en crise. La Chine montre les limites du schéma keynesien puisque l’économie chinoise est basée sur la super-exploitation et ne permet donc pas de créer de la demande.

    A côté de cela, il serait faux d’affirmer qu’il y a pas eu de développements sociaux et politiques importants cette année. Des millions de travailleurs migrants, notamment, ont été virés du jour au lendemain et contraints de vivre dans la rue des grandes villes ou de retourner à la campagne, sans rien en poche, les salaires connu de fortes baisses, les conventions collectives de travail ou encore les accords de protection ne sont pas respectés, etc.

    La crise économique qui a lieu est une des pires menaces auxquelles la dictature du parti ‘communiste’ chinois a eu à faire face depuis 20 ans. Mais la situation n’est pas la même car, en 1989, le régime était confronté à un mouvement révolutionnaire.

    Les évènements du Xinjiang en sont un produit. Tout a démarré d’un événement qui s’est déroulé sur la côte est de la Chine, où un viol a été commis. La première manifestation a exigé que le gouvernement enquête sur cette affaire, des confrontations entre les Ouïgours et Hans ont suivi. C’est un reflet de la manière dont l’Etat chinois est intervenu dans le Xinjiang, en opprimant les Ouïgours et en favorisant les Hans. Le caractère interethnique de ce conflit illustre l’absence cruelle d’un mouvement ouvrier indépendant.

    Crise révolutionnaire en Iran

    En Iran, au départ, des informations circulaient selon lesquelles Ahmadinejad pourraient échouer aux élections. Ensuite, il a semblé que Moussavi ait gagné du soutien et risquait vraiment de prendre la place d’Ahmadinejad. Les 63% obtenus par ce dernier sont clairement le fait de fraudes électorales ; ce qui a de suite déclenché une crise avec des manifestations de masse. Mais Moussavi est un leader accidentel du mouvement, sans direction à lui proposer. Sa candidature était basée sur quelques réformes réclamées par des fractions un peu plus libérales du clergé, dont la principale était de parvenir à trouver un compromis avec les USA. De suite, le mouvement a été bien au delà de la question électorale et a mis une pression énorme sur Moussavi. Sans programme apte à répondre aux attentes des masses, il a essayé de calmer le jeu. Les masses manquaient d’organisation et de direction claire.

    C’était une sorte de révolution populaire. Si les travailleurs étaient bien présents, c’était sans base de classe claire et distincte. Ahmadinejad a accumulé un soutien énorme et un pouvoir gigantesque au sein de l’Etat tant au sein du clergé que dans la police. Il a aussi utilisé la répression énorme comme un coup d’Etat interne à l’appareil. On peut dire que le régime va survivre, mais qu’il s’agira d’un régime de crise, avec un recours systématique à la répression pour calmer tous les mouvements de masse. Les revendications sociales vont être le moteur de futurs mouvements.

    L’impérialisme américain : d’un bourbier à l’autre

    Aux USA, Obama fait face à de sérieux problèmes et il a bien du mal à voir comment les résoudre. Il bénéficie toujours d’un soutien assez fort à l’intérieur du pays et de bonnes relations avec la plupart des dirigeants mondiaux ; mais cela va s’estomper petit à petit.

    Sur la question de l’Iran, il a essayé de trouver un compromis avec Ahmadinejad concernant le nucléaire, mais les derniers évènements ont sapé la légitimité d’Ahmadinejad. Vis-à-vis de l’Irak, il apparaît qu’Obama tient ses promesses de retrait des troupes; mais la situation est loin d’être stable. Tous des scénarios restent possibles, y compris celui d’une guerre civile entre les Kurdes, les Chiites et les Sunnites. Le nord du pays a connu une augmentation des conflits, notamment sur la question de l’indépendance de la région kurde. Aucun accords n’existe entre les dirigeants locaux sur la manière de répartir les revenus du pétrole.

    Mais le sujet le plus compliqué et brûlant pour l’administration Obama est la situation en Afghanistan, qui ne peut d’ailleurs être dissociée de celle du Pakistan. En fait, Obama retire des troupes du bourbier irakien pour les envoyer dans un autre, le bourbier afghan. Au Pakistan, la situation est explosive ; il est possible que le gouvernement tombe. On a vu les conséquences de l’offensive des Talibans dans la région de Swat a entraîné 1,5 million de réfugiés. Il semble que leur position ne soit pas du tout affaiblie.

    Pour l’instant Obama surfe encore sur une vague de popularité (60% d’opinion positives au début de son mandat), essentiellement parce qu’il est pas Bush, qu’il n’est pas républicain et qu’il avait fait des promesses qui paraissaient déterminées. Sa popularité est toutefois passée à un peu moins de 50% du fait direct de l’absence de résultats de sa politique. Malgré les quelques déclarations qu’il a pu faire, il reste dépendant de Wall Street. Si son plan de relance a un peu ralenti l’approfondissement de la crise dans l’économie américaine, il n’a pas du tout réduit le chômage, ni empêché la réduction des effectifs, dans le secteur automobile par exemple.

    Des mesures ont été prises pour tenter d’empêcher les expulsions de foyers, sans pour l’instant avoir d’effets. Pour la sécurité sociale, il avait fait des promesses (d’autant plus qu’un certain nombre de démocrates sont pour un système universel garanti par l’Etat) ; et même s’il a reculé sur l’idée du système du single-payer, il prône maintenant un système qui maintiendrait le système des assurances privées. Les syndicats avaient soutenu massivement la campagne en espérant pouvoir obtenir plus de droits, mais ce n’est vraiment pas une priorité pour lui. Aussi sur la question des droits des LGBT, Obama a refusé de défendre l’idée du mariage gay.

    En même temps, il serait erroné de dire que les illusions qu’il a entretenues vont disparaître du jour au lendemain ; d’autant qu’existe la jusitification de la crise. Mais, peu à peu, faute d’avoir des solutions à apporter, la désillusion va toucher un nombre grandissant de personnes. Selon une étude menée en avril par Rasmussen, 37% des Américains de moins de 30 ans préfèrent le capitalisme; 30% le socialisme. Dans toute la population, selon les sondés, 53% soutiennent le capitalisme contre 20% qui affirment qu’ils soutiennent le socialisme. Ce qu’ils entendent par ‘socialisme’ n’est bien entendu pas clair, mais cela illustre le potentiel gigantesque qui existe pour les luttes contre les capitalistes et le capitalisme.

    Impact de la crise aux Etats-Unis

    Suite à l’écroulement du marché du crédit, des millions de personnes ont perdu leur maison, et on s’attend encore à 7 millions de personnes supplémentaires. D’après les estimations, 6,5 millions d’emplois ont été détruits depuis le début de la crise, soit le nombre d’emplois qui avaient été créés pendant le dernier boom. A titre d’exemple, une offre d’emploi à Washigton a donné lieu à une file de quelques 800 personnes…

    C’est encore plus clair dans l’industrie automobile, la première et la plus violemment touchée par la crise. Depuis la crise, la chute des ventes a été de 20 à 30%, ce qui a conduit des entreprises comme Chrysler à la faillite. Le cas le plus exemplaire est celui de General Motors, symbole du capitalisme américain par excellence durant des années, et maintenant symbole de la crise économique.

    Au cours des dix dernières années, unn tiers de l’emloi industriel et manufacturier a disparu, avec un effet désastreux sur la classe des travailleurs, sur les villes ouvrières,… Ces derniers mois, des milliers de suppressions d’emplois et de multiples fermetures d’usines ont eu lieu, mais il y a encore eu des attaques contre les conditions de travail et de salaires ainsi que contre les retraites. En réponse à la crise, l’Etat a pris 60% de participation de General Motors et, à Chrysler, c’est le syndicat des travailleurs (UAW) qui a pris 50% du capital. C’est une défaite pour les travailleurs car cela s’est déroulé au prix de l’assurance santé des travailleurs et des retraités. Maintenant, c’est le syndicat qui va devoir payer pour ça et faire des coupes dans la protection maladie. Dans l’accord de prise de participation de l’Etat à GM, il y a un nouveau plan de suppressions d’emplois qui s’élève à 20.000, à ajouter aux 20.000 pertes d’emplois de l’an dernier, en plus de la fermeture de 15 usines. Ceux qui resteront auront des conditions de travail encore plus mauvaises.

    Malgré tout, la droite continue à dire que ce plan est trop favorable aux travailleurs et trop ‘socialiste’, que la manière dont les choses ont été gérées a été en faveur de l’UAW, toujours liée au parti démocrate. Du coup, dans la société, le renflouement du secteur automobile est vu comme favorable aux travailleurs. Nous devons expliquer ce que veut dire une véritable nationalisation et un véritable contrôle des travailleurs. Dans l’industrie automobile, nous devons expliquer ce que l’on ferait si les travailleurs contrôlaient les entreprises. Il y aurait déjà beaucoup à faire concernant l’environnement (voitures électriques, train,…). Les milliards qui sont allés vers ce secteur devraient favoriser la réorganiser du mode de production. La question de la reconversion industrielle ne doit pas être séparée de la question des conditions de travail des travailleurs et de leur niveau de vie.

    La faillite des directions syndicales permet de voir plus clairement qui sont ceux les plus à même de diriger les luttes. Les luttes de Visteon ou de Lindsey en Grande-Bretagne démontre ce dont sont capables les travailleurs quand ils sont vraiment attaqués. Mais il leur faut une direction. C’est dans ce contexte que l’on peut voir comment nos forces peuvent jouer, notamment dans le cas de Lindsey. Parfois, le fait que notre organisation soit présente dans ces entreprises peut être complètement décisif. La question fondamentale est aussi comment on lie ces luttes à la perspective du socialisme.

    La propriété privée des moyens de production est dépassée

    L’ensemble des capitalistes se sont mis d’accord pour nationaliser complètement ou partiellement certains secteurs durant la période de la crise, pour évidemment les reprivatiser par la suite. Toutes les pertes ont été socialisées dans l’attente que les gains puissent à nouveau être réservés au privé. Mais ces nationalisations sont cependant significatives. Marx & Engels avaient déclaré que la moindre nationalisation à elle toute seule illustre déjà que la propriété capitaliste est une forme dépassée de production.

    La tendance générale est à une propriété d’Etat pour de plus en plus de secteurs parce qu’il y a la recherche d’une forme plus progressiste d’économie. Nous devons mettre en avant de manière transitoire la question de la nationalisation sous contrôle ouvrier et celle de la gestion démocratiques de ces moyens de production nationalisés. Ce que nous proposons n’a rien à voir avec le centralisme bureaucratique des économies staliniennes et correspond à un plan international.

    La question environnementale peut être un argument en ce sens, pour aller vers une gestion raisonable des ressources naturelles. Les perspectives sont également sombres sur ce point : 300.000 personnes meurent chaque année du fait des changements climatiques, selon l’ONU, notamment avec l’apparition de nouvelles maladies. La température a augmenté de 0,7° depuis le début de la période d’industrialisation. Le G8 s’est fixé comme objectif que l’augmentation de la température ne doit pas dépasser les 2° d’ici 2050, seuil que les scienfitiques disent crucial, sans quoi les changements seraient irrémédiables. Mais le G8 n’a pas décidé d’une stratégie, d’un plan, pour atteindre ce but et même pas pour essayer d’atteindre un objectif intermédiaire en 2020. Les différentes puissances sont dans une situation de confrontation et de concurrence telle qu’ils négligent complètement cette question environnementale.

    Comment ce système arrive-t-il à survivre? A moins qu’il n’y ait vraiment la mise en avant d’une alternative au capitalisme et l’existence de forces capable de réaliser l’arrivée de cette alternative, le capitalisme trouvera toujours un moyen de sortir de ses crises. Des luttes massives vont se développer. Si une relance de l’économie se produit, beaucoup de luttes peuvent surgir très vite. Marx n’a jamais développé de déterminisme économique; la société ne change pas toute seule, il n’existe pas de crise finale du capitalisme. Nous devons construire des forces capables de changer la société, et la classe des travailleurs est la clé de la constitution de cette force. La transformation de la société nécéssite une organisation de masse et la construction de partis révolutionnaires. La classe des travailleurs doit avoir une conscience socialiste de la transformation économique, formulée en un programme, et aussi une direction profondément implantée en elle. Au nombre des tâches des militants figure aussi l’étude de la théorie et de l’histoire pour permettre cette transformation.

    La crise économique de 74-75, qui était d’un niveau inférieur, a provoqué des mouvements révolutionnaires partout dans le monde: révolution des oeillets au Portugal en ‘74, révolution contre le régime des colonels en Grèce,… même si la crise était pas aussi forte. Elle avait énormément nui aux capitalistes et à leurs idées. Aujourd’hui, il n’y a toujours pas de contrôle sur les banques, une nouvelle chute banquière est d’ailleurs à l’ordre du jour. Tout ceci va conduire à une explosion de la colère de la classe ouvrière. Il y a des mouvements de caractère semi-conscients déjà, reflété par exemple par des émeutes comme en France.

    Nous devons nous souvenir de ce que Trotsky et Lénine disaient de la montée des mouvements révolutionnaires après la première guerre mondiale : ils se demandaient si la classe ouvrière pourrait prendre le pouvoir sans parti révolutionnaire. La pratique leur a démontré que cela ne l’était pas. Nous on a une tâche différente. Sur la routes de la construction de partis révolutionnaires de masse se trouve la création de nouveaux partis des travailleurs, mais ce n’est pas notre seule tâche. En Grande-Bretagne, les luttes de Lindsey, par exemple, ont illustré comment notre parti peut devenir un point d’attraction pour différentes couches.

    Nous allons vers une période similaire aux années ‘30; nous sommes au début du processus de la crise, un processus qui sera très étalé dans le temps, une crise économique mais aussi sociale et politique, qui mettra en péril les institutions de la bourgeoisie. Ce n’est jamais facile de pouvoir capter le mouvement dans un pays avec de petites forces. Mais tous nos cadres doivent être conscients du changement dans la situation et des nouvelles possibilités qui s’offrent à nous. Cette crise s’est développée à un rythme qui a surpris la bourgeoisie, mais nous aussi, nous pouvons être surpris par le rythme de développement de notre internationale.

    L’effet initial de l’écroulement financier a été le choc et la peur. Dans certains pays des protestations ont eu lieu très rapidement, dans d’autres, la classe ouvrière et la classe moyenne ont été choquées et étourdies par la situation.

    La chute de la richesse disponible va aggraver la bataille pour l’appropriation de cette richesse, c’est le contexte de cette offensive contre les travailleurs et les services publics. Nous ne devons pas purement et simplement nous opposer aux renflouements des banques, aux bail out, etc. Nous disons qu’il faut des bail out pour les travailleurs et leur famille, pas pour les banquiers. De la même manière, nous ne devons pas dire que nous sommes contre les nationalisations capitalistes, mais pour de véritables nationalisations, sous contrôle ouvrier. C’est aussi pourquoi il est crucial d’analyser et d’expliquer les fondements de cette crise et d’expliquer pourquoi les coupes budgétaires et les attaques sociales vont continuer. Si les gouvernements savent présenter leurs mesures de manière sociale, il reste encore un peu d’illusions sur les effets qu’elles peuvent avoir et leurs buts.

    Il faut engager le dialogue avec ces travailleurs et ces jeunes qui ont encore des espoirs sur les politiques des gouvernements. Nous pouvons avoir des revendications de base envers ces gouvernement, mais tout en développant la question de la nécessité d’un mouvement ouvrier indépendant organisé, contre le simple lobbying. Cette crise ne déconsidère pas complètement et immédiatement le système capitaliste, la période des années ‘90 pèse encore lourdement sur la conscience des masses.

    Dans beaucoup de pays, il y a eu des grèves et des mouvements pour dire ‘qu’on ne paiera pas leur crise’, ce qui est un bon point de départ pour une riposte face aux conséquences de la crise. Mais il n’y a pas encore eu d’opposition au système capitaliste en lui-même, pas encore eu de slogans à l’échelle de masse qui exprimaient un rejet du système capitaliste et pour une alternative socialiste. Mais cette faiblesse du niveau de conscience n’empêche pas le développement de luttes. La question est de savoir comment le mouvement et la conscience socialistes peuvent être reconstruits : par les déductions que les travailleurs et la jeunesse vont tirer des mouvements auxquels ils vont participer. Mais nous aussi devons être un facteur dans cette évolution. La radicalisation politique pourrait par exemple venir d’une situation où on aurait une petite reprise mais avec un niveau de chômage maintenu très haut.

    Dans les pays où il n’y a pas d’alternative ouvrière massive, ces complications pourraient devenir des éléments très dangereux (des conflits interethniques par exemple). Ces dangers ne dépendent pas seulement de la situation objective, ça dépend de ce que fait ou ne fait pas le mouvement ouvrier, s’il existe. Le Sri Lanka, par exemple, était le pays qui avait le mouvement trotskyste le plus puissant au monde. Mais à cause de ces erreurs, on se retrouve là-bas dans une situation complètement dramatique. Il ne suffit pas de participer aux luttes, il faut avancer des perspectives et un programme corrects. La crise, si elle peut développer la lutte des classes, peut aussi développer des éléments très négatifs (le racisme,…).

    Il s’agit d’une crise internationale. C’est pour ça que le G8 a fait une déclaration commune pour une autorité internationale de régulation. La crise demande une réponse mondiale, c’est l’argument qu’utilisent les dirigeants capitalistes. C’est aussi le point que nous utilisons pour mettre en avant notre internationalisme et la nécessité de construire le mouvement internationalement mais aussi le Comité pour une Internationale Ouvrière, en mettant en avant ce qu’il pourrait permettre en terme de luttes dans les différents pays où il est présent. Nous pouvons jouer un rôle dans le changement du monde, pour le débarrasser de l’impérialisme et du capitalisme.


    Le Comité pour une Internationale Ouvrière, CIO

    Le capitalisme est un système mondial et il doit être combattu à la même échelle. C’est pourquoi le Parti Socialiste de Lutte fait partie d’une organisation marxiste internationale: le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), un parti mondial actif sur tous les continents. Notre lutte en Belgique s’inscrit dans le cadre d’une lutte des travailleurs du monde entier pour un société socialiste car si la révolution socialiste éclate sur le plan national, elle se termine sur l’arène internationale. La démocratie ouvrière et la planification socialiste de la production ne peuvent se limiter à un seul pays. C’est d’ailleurs l’isolement de la Russie soviétique qui a conduit à sa dégénérescence à partir de 1924.

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