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La politique d’austérité, ça ne marche pas
L’illusion selon laquelle la Grèce, le Portugal, l’Irlande et d’autres pays embarqués dans les griffes des marchés financiers pourraient trouver une issue en assainissant commence à partir en fumée. De plus en plus de représentants de l’establishment plaident prudemment pour un rééchelonnement des dettes afin d’éviter le pire. Car les résultats des plans d’austérité sont décevants : au lieu d’approcher d’une solution, les problèmes se sont aggravés.
Par Eric Byl
Les politiciens et patrons belges ainsi que leurs “cellules de réflexion” sont d’accord : il faut de toute urgence un vrai gouvernement afin de prendre des mesures structurelles. Ce n’est pas que Leterme présente un mauvais rapport ; les assainissements réalisés par l’AIP sur le dos des travailleurs ou ceux consécutifs au fonctionnement avec des douzièmes provisoires ne sont pas négligeables.
Mais, en comparaison de l’Irlande, du Portugal, de la Grèce ou du Royaume Uni – où c’est à la hache qu’on coupe dans les services publics, les salaires et les allocations sociales – jusqu’à maintenant, nous nous en sortons à bon compte. Trop d’ailleurs, aux dires du patronat et de ses laquais. Notre pays échappe pour l’instant à la pression des agences de notation de crédit, au contraire de l’Etat grec qui est maintenant forcé de payer des intérêts de 15,1% pour ses emprunts sur dix ans. En mai 2010, quand le FMI et les Etats-membres de l’Union Européenne avaient permis un emprunt de 110 milliards d’euros, il ne s’agissait encore ‘‘que’’ de 8%. En Grèce, le déficit budgétaire est de 10,5% et la dette de l’Etat a grimpé jusqu’à 142,8% du PIB. Ce n’est pas étonnant. Le plan d’austérité draconien que l’UE et le FMI ont imposé à la population grecque a, l’an dernier, fait chuter l’économie de 4,5% après une contraction antérieure de 2,3%. Cette année encore, on s’attend à un rétrécissement de 3,5%.
En Irlande aussi, les mesures d’austérité draconiennes conduisent à une croissance économique négative. Le déficit budgétaire est maintenant de 32,4%, après une croissance négative trois ans de suite. Le plan d’austérité que le FMI et l’UE imposent au Portugal en échange d’un emprunt de 78 milliards d’euros va dès cette année jeter l’économie portugaise dans une récession de deux ans. L’an dernier, le Royaume Uni pouvait encore, comme il ne fait pas partie de la zone euro, présenter des chiffres de croissance économique soutenus par une politique de taux d’intérêts extrêmement bas sur leur monnaie, mais le déficit budgétaire a augmenté jusqu’à 10,4%.
Nous insistons : ce ne sont pas les travailleurs et leurs familles qui ont massivement investi dans les crédits toxiques, mais bien les banques et beaucoup d’entreprises privées. Cela vaut pour la Belgique, l’Allemagne, la Grèce, l’Irlande,… Quand les banques ont dû être sauvées, elles n’ont jamais été forcées d’accepter le type de mesures aujourd’hui dictées aux pays plongés dans une spirale de dette à cause du sauvetage de leur secteur bancaire. Les paquets d’aide à ces pays n’ont rien à voir avec la solidarité. Ils ne servent qu’à mettre à couvert les banques allemandes, françaises et autres qui ont fortement investi dans les crédits des pays PIGS (Portugal, Irlande, Grèce, Espagne). En même temps, les marchés ‘‘plus sains’’ au nord pompent le capital des marchés contractés des pays sous curatelle. C’est la raison principale qui explique l’actuelle croissance allemande.
Les assainissements arrivent néanmoins à leurs limites. Qu’importe ce que peuvent dire les grands patrons européens : la publication dans Der Spiegel de la menace de la Grèce (évidemment niée par le gouvernement grec) de se retirer de la zone euro et de réintroduire le Drachme a suffi pour extorquer le rééchelonnement de la dette tant vilipendée. Ils n’aiment pas l’avouer, mais la volonté du FMI et de l’UE de considérer un ajournement du paiement de la dette grecque, ça revient à quoi d’autre qu’à un rééchelonnement? La rapacité ne connaissant toutefois pas de limites, la Grèce est en échange sensée mettre ses entreprises publiques en vente.