Que crève le capitalisme. Ce sera lui ou nous.

Hervé Kempf (1) avait déjà écrit « Comment les riches détruisent la planète (2007) ». Son tout nouvel ouvrage se situe dans cette continuité et son titre a le mérite de dire les choses clairement. C’est hélas beaucoup moins le cas dans le livre proprement dit.

L’auteur ne manque pas de bonnes intention et une inquiétude sérieuse l’anime face à la perspective d’un « apartheid climatique » où les riches paient pour échapper à la surchauffe, à la faim et aux conflits, tandis que le reste du monde est laissé pour compte. Mais son analyse et ses propositions reposent avant tous sur les comportements individuels. Ainsi, pour lui, le capitalisme « est une organisation sociale dont les membres sont réputés avoir pour motivation principale de gagner de l’argent afin de pouvoir gagner plus d’argent. » C’est vrai. Mais cette cupidité est ancrée dans un élément matériel : la possession des moyens de production. C’est là que se situe le fondement du capitalisme et c’est à cela qu’il faut s’attaquer.

Hervé Kempf semble fier de dire « qu’il n’y a pas de programme, pas de solution clé en main, pas de remède magique qui remplace le vilain capitalisme par le gentil monde écologique et fraternel », mais définir l’alternative que nous voulons est pourtant crucial afin de définir le chemin et les méthodes d’y parvenir. L’auteur défend quant à lui la stratégie de la frénésie : mener n’importe quel type d’action contre le système capitaliste en crise pour en accélérer l’effondrement. Et espérer que cela ira mieux ensuite.

Le livre souligne à juste titre que les révoltent gagnent en ampleur : entre 2011 et 2019, les émeutes, les grèves générales et les manifestations antigouvernementales se sont accrues de 244 %, selon le Global Peace Index. L’Europe étant par ailleurs la région où l’on a compté le plus de ces rébellions. Mais nous ne pouvons simplement souhaiter que ces révoltes augmentent en nous disant « on verra bien ».

La meilleure manière de bloquer l’économie, c’est de recourir à l’arme de la grève. Nous devons faire reposer notre stratégie sur le lien avec la classe des travailleuses et des travailleurs, les seuls à même de complètement bloquer l’économie capitaliste pour la refaire ensuite tourner en étant débarrassés des parasites du patronat. Sur cette base, nous pourrons alors rationnellement et démocratiquement planifier la production économique et mobiliser toutes les ressources pour répondre aux besoins sociaux et faire face au défi écologique.

Au final, « Que crève le capitalisme » ressemble bien plus à un cri de désespoir qu’à un acte d’accusation.

1) Ancien journaliste de Courrier international, La Recherche et du Monde, actuel rédacteur en chef de Reporterre

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