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C’était il y a tout juste 50 ans: le 30 décembre 1960
45.000 personnes manifestent à Charleroi dans une atmosphère enfiévrée, 10.000 à Mons, 10.000 à Verviers, 8.000 à Jemeppe et 8.000 à Bruxelles. Des incidents, des violences, des actes de sabotage sont signalés dans les régions où la grève générale est totale. A Bruxelles il y a des incidents sanglants. Un ouvrier chômeur qui pourtant ne manifestait pas, François Vandertrappen, est tué d’une balle de revolver tirée à bout portant par un jeune provocateur qui prétextera avoir voulu défendre un gendarme.
Cet article, ainsi que les autres rapports quotidiens sur la ”Grève du Siècle”, sont basés sur le livre de Gustave Dache ”La grève générale insurrectionnelle et révolutionnaire de l’hiver 60-61”
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– – Rubrique "60-61" de ce site
– 21 décembre
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La grande question reste posée aujourd’hui encore : pourquoi ce jeune passant était-il armé d’ un pistolet pour se rendre sur les lieux de la manifestation ? La Cour d’ Appel de Bruxelles l’ a par la suite acquitté.
Cette nouvelle dramatique accentue encore la colère et la révolte ouvrière. Avant cette manifestation, H.Brouhon, un député socialiste, avait pris la parole à la Maison du Peuple. Il s’est fait huer pour avoir annoncé la décision de l’ Action Commune de Bruxelles de ne plus organiser de manifestations avant le mercredi 4 janvier.
A Charleroi, les 45.000 grévistes chantent la Marseillaise. Pourquoi la Marseillaise? Parce que dans le refrain de ce chant révolutionnaire, il est dit : «Aux armes les citoyens, formez vos bataillons», ce qui est repris en cœur par toute la masse des grévistes, exprimant ainsi on ne peut plus clairement sa volonté d’ affronter, les armes à la main, l’ Etat bourgeois. Les travailleurs scandent aussi : «Vive la République» et l’ écrasante masse ouvrière réclame encore à plusieurs reprises la : «Marche sur Bruxelles.» Ce même slogan est repris et réclamé par les manifestants de Liège et de Verviers.
A Mons et dans le Borinage, la circulation est rendue difficile à cause des barricades établies sur les routes et des nombreux dépavages de rues. Partout, de nombreux accrochages sont signalés entre gendarmes et grévistes. Les forces de l’ordre sèment le désordre là où elles passent et sur les piquets de grève, c’ est la bagarre. La grève générale gagne encore du terrain, c’ est ainsi que les régionales FGTB de Renaix, Alost et Turnhout décrètent la grève générale. La répression s’ aggrave encore, l’action des gendarmes se fait plus violente, mais la pression des travailleurs sur leurs dirigeants est de plus en plus forte. Ceux-ci ne veulent plus et ont de plus en plus de mal à diriger des manifestations qui se déroulent avec plus de violence que les jours précédents.
Il faut signaler le rôle d’ avant-garde joué à Bruxelles, à Liège et à Charleroi par les jeunes travailleurs organisés politiquement dans les «Jeunes Gardes Socialistes», les JGS. Les Jeunes Gardes sont pratiquement la seule force qui ait tenté d’ avoir une action nationale coordonnée, qui ait compris le sens réel de la lutte qui se développait dans les journées de cette grève générale de l’ hiver 60/61’ et qui ait tenté d’ entraîner les jeunes travailleurs au-delà des bornes fixées par les directions ouvrières. Pour la plupart, les JGS se réunissaient chaque jour pour prendre des décisions concernant la marche à suivre.
Malheureusement, la faiblesse et l’ encadrement des Jeunes Gardes leur interdisaient de prendre la direction des manifestations. Toutefois, les JGS de Charleroi ont encore pris d’ autres initiatives d’action par la suite. Voici en quels termes Gilbert Clajot, secrétaire national JGS, relate l’activité de ces jeunes : «Ces jeunes étaient rarement organisés avant la grève. Syndiqués, oui. Au cours des grèves, ils éprouvèrent le besoin de se regrouper entre jeunes. D’ où, d’ une part, un certain regroupement autour des organisations de jeunesse combatives. Selon les régions, les moments : JGS, JC, Jeunesses Syndicales. D’ autre part, on vit des regroupements professionnels et locaux… On vit apparaitre, dans certaines régions, des Comités d’ actions des jeunes grévistes.»
De façon générale, les jeunes ont joué un rôle important. A Liège et à Bruxelles, à Charleroi et à Anvers, fréquemment, les gendarmes chargeant la masse se retrouvaient assaillis eux-même par des jeunes travailleurs armés de seaux et de bâtons, de pavés et de poteaux, contre une police super-armée.