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La mairie de gauche à Barcelone obtient une victoire sur le logement. Comment briser les carcans budgétaires ?

Après la crise de 2008 un intense cycle de lutte de classe a pris place dans l’Etat espagnol, qui a ouvert la voie à l’émergence de Podemos et aux listes de confluences de gauche (Podemos, Gauche Unie et des représentants des mouvements sociaux). Ada Colau, première femme maire à Barcelone et première issue des mouvements sociaux, était la tête de liste de Barcelona en Comú (Barcelone en commun), en tant qu’ex-porte-parole de la plateforme contre les expulsions de logements (PAH). La victoire de ces listes de confluence aux élections locales de 2015, notamment à Barcelone et Madrid, a représenté un important développement pour le mouvement anti-austérité.
Par Marisa Cabal Cabeza, candidate de Gauches Communes à Saint-Gilles
Une mairie féministe
La mairie a soutenu et participé à la grève et à la manifestation historique du 8 mars pour les droits des femmes. Ada Colau a précisé que la violence et les discriminations sexistes ne concernent pas l’éducation, c’est un problème structurel intégré au cœur du système, des institutions et de l’économie, en ajoutant que la question soulevée par la grève est qu’il y a des exploités et des privilégiés qui en profitent. En Belgique, notre campagne ROSA fait elle aussi le lien entre l’oppression sexiste, l’austérité et l’exploitation capitaliste.
Le montant des aides sociales pour les cantines scolaires a été triplé ; des tarifs sociaux pour les crèches publiques ont été introduits et 3 nouvelles crèches avec 217 places seront ouvertes à partir de la prochaine rentrée scolaire.
Voilà ce que peut faire une commune de gauche contre la double journée de travail des femmes. Avec Gauches Communes, à Saint-Gilles (Bruxelles), nous estimons qu’il faut 30 nouvelles crèches publiques pour s’attaquer au manque de places et que la commune devrait assurer la gratuité des repas à l’école. A Barcelone, 43% des familles ne trouvent pas de place dans une crèche publique ; 3 nouvelles crèches, c’est donc insuffisant.
Une bataille gagnée pour la défense des logements sociaux
À Barcelone, les prix des loyers crèvent les plafonds. Chaque jour, 10 expulsions de logements prennent place. En 2013, la maire de Madrid lui a vendu plus de 1.800 logements sociaux à Blackstone, un fonds vautour qui spécule sur la crise immobilière, qui est ainsi devenu le plus grand agent immobilier du pays. Une année plus tard, une banque catalane, Caixa Catalunya, précédemment sauvée avec 12 milliards d’euros de fonds publics, lui a vendu plus de 40.000 hypothèques toxiques. La banque s’est libérée d’actifs toxiques tandis que Blackstone a pu voler les maisons de gens de ceux pour qui l’hypothèque était devenue impayable.
Le 14 juin, un homme de 43 ans s’est suicidé. Sa famille était menacée d’expulsion par Blackstone. Des manifestations ont eu lieu sous le slogan : ‘‘ce ne sont pas des suicides, ce sont des assassinats’’. La pression de la rue a poussé le conseil municipal à discuter d’une nouvelle loi : l’obligation pour les promoteurs de réserver 30% des nouveaux bâtiments et des rénovations aux logements à loyer social, loi approuvée le 17 juin. La victoire est d’autant plus importante qu’elle montre la voie à suivre : celle de la construction d’un rapport de force dans la rue.
Cela n’enlève toutefois rien à la nécessité de construire des logements sociaux publics. En deux ans, la mairie en a construit 750 et elle a pris un crédit pour en construire 2.000 de plus, un effort qu’aucune autre autorité n’a fait auparavant. Le problème reste entier : le taux de logements sociaux à Barcelone est de 1,5%. Tout comme la PAH, nous estimons qu’il faut tendre à atteindre 20% de logements sociaux pour que la pression soit suffisante sur les loyers privés. À Saint Gilles, Gauche Communes propose de construire 3.000 logements sociaux publics. À Barcelone, il faudrait en construire 120.000 de plus.
La lutte pour l’accès à l’eau
A Barcelone, l’eau est gérée par Agbar, une filiale de la très rentable multinationale française Suez. Une ressource comme l’eau devrait être un bien commun. Colau a proposé au conseil municipal un projet de consultation pour une gestion publique et démocratique de l’eau. Le projet reste bloqué, tous les groupes ont voté contre, en dépit d’études qui montrent que 70% de la population y est favorable.
Une plateforme composée de voisins, de syndicats et d’organisations écologistes a été formée, sans que la mobilisation ne prenne la même dynamique que pour le logement. La pression fut insuffisante.
Pour un front des villes rebelles
Les confluences de gauche ont aussi gagné les élections à Madrid, Cadix, Saragosse, La Corogne,… Elles pourraient utiliser ces positions élues pour organiser un front de communes rebelles.
Crèches, logements, etc. : ce front pourrait défendre des budgets qui répondent aux nécessités sociales et les coupler à la mobilisation active de la population afin d’arracher un refinancement des villes. Une politique sociale pourrait alors être réellement appliquée alors qu’elle est bloquée par des budgets volontairement limités.