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Kshama Sawant : Une élue au service de la mobilisation sociale
En novembre 2013, pour la première fois depuis des décennies, une socialiste était élue au conseil municipal de la ville de Seattle avec 93.000 voix(1). Pour les représentants des partis républicain et démocrate, habitués à gérer la politique pour le compte de la classe dominante sans personne pour venir jouer les trouble-fête, cela a représenté un choc. Mais le véritable choc restait à venir. Moins d’un an plus tard, le journal Seattle Times expliquait que Kshama Sawant commençait à ‘‘déterminer l’agenda politique de la ville’’.
Lors de sa prestation de serment, face à 800 participants enthousiastes, le ton fut immédiatement donné : ‘‘Les politologues se demandent à mon sujet: fera-t-elle des compromis? Peut-elle travailler avec d’autres? Bien entendu, j’aurai à rencontrer des représentants de l’establishment et à discuter avec eux. Mais quand je le ferai, je mettrai sur table les besoins et les aspirations de la classe ouvrière, peu importe qui sera assis en face de moi (…), il n’y aura pas de tractation secrète avec des entreprises ou leurs serviteurs politiques. Il n’y aura pas d’arrangement pourri qui desservirait ceux que je représente.’’(2)
Les marxistes ne pensent pas que gagner des acquis pour la classe des travailleurs soit une question d’arrangements de couloir : il s’agit de construire un rapport de force. Dès le début de sa campagne électorale impliquant des centaines de bénévoles, bien au-delà des rangs de son parti, Socialist Alternative, Kshama porta la revendication pour un salaire minimum de 15$ de l’heure qui avait émergé de secteurs de travail précaire comme les fast-foods. Loin de simplement se poser comme candidate favorable à cette mesure ou comme porte-parole, elle utilisa sa campagne pour construire des comités de base ‘‘15NOW’’ dans lesquels chacun pouvait s’investir. Elle travailla de concert avec ces comités pour construire la pression sur le conseil municipal, qui fut forcé de céder et d’instaurer le plus haut salaire minimum dans une grande ville américaine.
Un porte-voix pour construire le mouvement
Outre les victoires locales sur le salaire minimum, une augmentation de 29 millions de dollars du budget dévolu aux logements sociaux, l’arrêt de toute collaboration entre la ville et l’entreprise Wells Fargo (active dans la construction de pipelines) en solidarité avec les Sioux de Standing Rock,… Kshama Sawant a également utilisé sa position afin de populariser des mots d’ordre visant à construire le mouvement. Ainsi, au lendemain de l’élection de Trump, elle proposa à une large audience le mot d’ordre des ‘‘100 jours de résistance’’ et d’actions contre ce dernier, culminant avec des actions de grèves lors du premier mai. Cet appel a pu servir d’appui à tous ceux qui avaient commencé à s’organiser pour bloquer l’agenda réactionnaire de Trump, et a permis de donner une perspective de lutte à ceux qui participaient à des actions spontanées.
Enfin, son rôle d’élue marxiste fut aussi de dévoiler la logique du système capitaliste, ce qu’elle fit en répondant systématiquement – et avec une très large audience – aux discours annuels d’Obama sur ‘‘l’état de l’Union’’, ou encore en soutenant la lutte des travailleurs de Boeing menacés de licenciement tout en expliquant lors d’une de leurs assemblées générales que la seule solution définitive à cette épée de Damoclès était de retirer l’entreprise des mains de patrons avides pour la placer dans celles de la collectivité. In fine, un représentant des travailleurs ne peut être qu’un représentant : il doit aussi, à son échelle, indiquer le chemin pour une transformation socialiste de la société.
(1) À Seattle, le maire n’est secondé que par 9 élus qui sont directement impliqués dans la gestion de la ville. Il n’existe pas de conseillers municipaux d’opposition au côté du conseil.
(2) http://www.socialisme.be/fr/7584/sawant-2