Référendum sur le Brexit: Votons pour faire dégager les conservateurs!

woreuprotestLe référendum sur l’appartenance de la Grande-Bretagne à l’Union européenne se tiendra le 23 juin 2016. L’événement ne concernera pas seulement que l’Union européenne, ce sera également une opportunité de donner son verdict à David Cameron ainsi qu’à son gouvernement pourri.

Éditorial du Socialist, hebdomadaire du Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au pays de Galles)

La victoire de la sortie de l’Union européenne porterait un coup mortel au gouvernement qui pourrait conduire à la convocation de nouvelles élections générales et à la chute des conservateurs détestés actuellement au pouvoir. Voter ‘out’ est particulièrement important.
David Cameron a mis son destin en jeu dans cette bataille entre forces pro et anti Union européenne, de même que d’autres ministres du camp du ‘in’ comme George Osborne et Theresa May. Même s’ils remportent la victoire à une marge étroite, leur autorité sera gravement endommagée. En outre, d’intenses luttes intestines vont déchirer le parti conservateur quel que soit le résultat final.

Les masques sont tombés dès l’annonce du référendum. Le maire conservateur de Londres Boris Johnson a pris le camp du ‘out’, ce qui constitue un revers significatif pour Cameron. L’écrasante majorité de la base du parti Tory veut également soutenir le ‘out’, plus environ 120 députés conservateurs, un nombre à peine plus court que les 129 qui, aux dires du Daily Mirror, veulent voter pour rester au sein de l’UE.

C’est une grave erreur pour Jeremy Corbyn et le Parti travailliste de soutenir le rester dans l’UE alors que ce vote pourrait conduire à la chute du gouvernement conservateur, déjà dans les cordes. Ils doivent changer de cap et aider à faire tomber Cameron & Co afin que des élections générales puissent être convoquées.

Cette campagne doit durer quatre mois, David Cameron va tirer toutes les ficelles qu’il peut, y compris en demandant le soutien des chefs de gouvernement à travers le monde, des États-Unis à la Chine. Les politiciens capitalistes des deux côtés du débat jouent sur la peur et les menaces, et nous ne sommes pas encore au paroxysme de ces manœuvres. Le spectre d’une plus grande vulnérabilité au terrorisme a été soulevé par les ministres Iain Duncan Smith et Michael Gove dans le cas où l’adhésion à l’UE était confirmée, David Cameron utilisant le même argument en cas de Brexit. Mais tous ceux-là soutiennent le bombardement de l’Irak et de la Syrie qui alimente le fléau du terrorisme.

La classe des travailleurs n’a aucun intérêt commun avec ces politiciens capitalistes favorables à l’austérité, qu’ils soient pour ou contre l’adhésion à l’UE. Tout en se distançant fortement des positions nationalistes et pro-capitalistes des conservateurs opposés au maintien dans l’Union et du parti populiste de droite Ukip, le mouvement des travailleurs a besoin de faire entendre sa propre voix contre l’UE dans ce référendum, de s’opposer au club patronal que représente l’UE et de lutter pour les intérêts des gens ordinaires en Grande-Bretagne et en Europe.

L’inquiétude des capitalistes

Face à l’inquiétude croissante de nombreux capitalistes britanniques à la perspective de leurs intérêts minés par le Brexit, David Cameron a désespérément obtenu des concessions de dernière minute à Bruxelles qui pourraient aider à soutenir un vote pro-UE. Mais ses gesticulations politiques et les concessions très limitées qu’il a acquises des 27 autres chefs de gouvernement de l’UE ont peu fait pour changer les choses.

Il a obtenu un accord partiel concernant une attaque contre les allocations de travailleurs de l’UE qui travaillent en Grande-Bretagne et a affirmé que le Royaume-Uni aura désormais un «statut spécial» dans les futurs traités de l’UE, en plus des dérogations déjà existantes. Mais il a été signalé que la chancelière allemande Angela Merkel aurait mis en garde David Cameron que les exceptions pour la Grande-Bretagne dans les traités futurs pourraient ne jamais voir le jour dans la pratique. Le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Marc Ayrault, a quant à lui réaffirmé: “Il n’y aura pas de révision des traités, aucun droit de veto pour le Royaume-Uni sur le renforcement de la zone euro et aucune remise en cause du principe de libre circulation”.

Mais le référendum ne concernera pas principalement l’accord obtenu par Cameron mais bien l’UE dans son ensemble. Partout en Europe, les tensions entre les classes dirigeantes représentent beaucoup plus que les exemptions demandées par le gouvernement britannique. L’économie des 19 pays de la zone euro stagne en dépit des bas prix de l’énergie, d’un taux d’intérêt négatif et d’un assouplissement quantitatif massif de la part de la Banque centrale européenne.

Cette impasse a conduit à une croissance du nationalisme et des division sur l’ampleur et la répartition des mesures d’austérité brutales que l’UE a tenté de mettre en œuvre et, plus récemment, sur la crise des réfugiés, entre autres questions. L’UE est loin d’être un véhicule pour l’amélioration des droits des travailleurs, comme de nombreux dirigeants du Parti travailliste et des syndicats l’ont défendu en Grande-Bretagne et ailleurs. L’UE est une machine qui vise à imposer une vicieuse austérité qui détruit les services publics et augmente le chômage. La population ordinaire de Grèce , d’Espagne ou du Portugal peut en témoigner.

Les règles de l’UE ne sont d’aucune utilité pour les gens ordinaires. Elles ont été adoptées pour égaliser le terrain de jeu des grandes entreprises plutôt que pour tenter d’améliorer la vie de la population. Ainsi, la libre circulation des travailleurs a surtout aidé les patrons à mettre pression sur les salaires et conditions de travail, cela ne visait pas à défendre les intérêts des travailleurs et d’assurer l’élévation de leur niveau de vie par-delà les frontières.

Les normes européennes servent d’écran de fumée pour mieux cacher le fait que les politiques de l’UE sont conçues pour servir les intérêts des entreprises et lutter contre la propriété publique, contre les conventions collectives de travail, contre la régulation et contre les interventions de l’État.

L’UE est essentiellement une association des classes capitalistes européennes sur base de traités qui réduisent les obstacles à leur soif de profits et facilitent leur concurrence avec d’autres blocs commerciaux à l’échelle mondiale.

Cependant, les économies européennes n’ont pas été en mesure de surmonter les limites du développement de la production capitaliste sur la base de la propriété privée dans les Etats-nations, et elles ne le seront jamais. Parallèlement, elles font face à l’obstacle insurmontable d’une économie mondiale qui souffre partout de surcapacité de production.

Jeremy Corbyn… et le GMB

Jeremy Corbyn et d’autres à gauche ont eu tort de céder à la pression de l’aile droite du Parti Travailliste et à l’argument selon lequel l’UE est avantageuse pour les travailleurs. Ils ont ainsi préconisé de vote pour rester dans l’UE. Une des conséquences de cette erreur est que la campagne référendaire de Corbyn et les autres sera de nature à améliorer les chances de victoire pour Cameron et pour la poursuite de la politique d’austérité des conservateurs.

Les dirigeants syndicaux se trompent aussi avec leur regardant du côté d’une «Europe sociale» afin de les aider à contrer les attaques antisyndicales et anti-ouvrières d’un gouvernement de droite comme celui de David Cameron. Un futur gouvernement britannique élu sur base du programme anti-austérité défendu par Corbyn alors qu’il menait campagne pour arriver à la tête du Parti Travailliste serait directement confrontée au caractère anti-travailleurs de l’UE.

Le syndicat GMB (General workers’ union) a publié un communiqué de presse déclarant son souhait de rester dans l’UE, sous le motif que l’exploitation des grandes entreprises “est totalement stoppable. Non pas en votant pour quitter l’UE, mais en exigeant un retour à [la] vision d’une Europe sociale.” Mais qui à qui destiner cette exigence? Comment peut-on la concrétiser ? Il n’y a pratiquement pas de responsabilité démocratique dans l’UE. Les décisions sont prises par le Conseil européen – composé des chefs de gouvernement des 28 pays – et par la Commission européenne qui est en grande partie nommée plutôt qu’élue. Le Parlement européen et ses 751 députés sont presque impuissant.

Plutôt que d’entrer en lutte pour oeuvrer à la tâche futile de «démocratiser» l’UE, l’attitude de la classe des travailleurs à travers l’Europe penche de plus en plus dans le sens du rejet de cette institution lointaine, bureaucratique et responsable.

Comme l’a écrit Andrew Rawnsley dans le dernier numéro du Sunday’s Observer, les attitudes sont maintenant très éloignées de ce qu’elles étaient lorsque les politiciens du gouvernement avaient remporté le référendum de 1975 sur l’Europe: “Une grande partie de l’ancienne référence aux «figures d’autorité» s’est évaporée.Nous sommes dans un âge de colère, caractérisé par une aliénation généralisée et profonde de l’établissement.” Il a ajouté: “Le référendum pourrait être un bâton avec lequel donner une claque satisfaisante aux fesses de l’élite politique.”

Le Financial Times a rapporté que certains hommes politiques pro-européens se demandent si soulever le spectre d’un effet domino du Brexit – à savoir, la désintégration rapide de l’ensemble de l’UE – ne pousserait justement pas les à voter pour ça à la place de les effrayer!

Certains conservateurs anti-UE feignent soudainement de se préoccuper des personnes touchées par l’austérité. Le secrétaire à l’éducation Gove – détesté des enseignants pour avoir approfondi la privatisation du secteur et avoir lancé des attaques contre les conditions de salaires et de travail – a ainsi déclaré cette semaine avec hypocrisie que : «L’euro a créé la misère économique pour les personnes les plus pauvres de l’Europe.»

La seule manière de combattre ce genre de monstrueuse duplicité, c’est de construire une campagne indépendante, basée sur la classe des travailleurs, afin de lutter contre l’Union européenne capitaliste et pour offrir la meilleure couverture médiatique à cette approche.

Tout en appelant à un vote ‘out’, le Socialist Party reconnaît que pour la classe ouvrière et la classe moyenne, le fait que la Grande-Bretagne soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’Union européenne n représente aucune solution. Aucune de ces deux options n’est non plus une solution pour la population à travers l’Europe.

Seule la solidarité internationale des travailleurs avec les luttes et les combats des uns et des autres pour une confédération socialiste démocratique du continent peut créer les bases pour une société qui transformerait la vie de l’écrasante majorité de la population.

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