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Le changement, c’est maintenant ?
Les représentants les plus prévoyants de la bourgeoisie veulent une politique d’austérité moins sévère pour éviter la révolte – mais, eux aussi, envoient la facture aux 99%
L’élection de Hollande, avec le succès électoral du Front de Gauche en France et de Syriza en Grèce, ont donné un nouvel élan aux discussions sur le rythme de la politique d’austérité. Ce phénomène est d’ailleurs bien plus général : aux Pays-Bas, des sondages montrent que le SP – un parti à gauche du parti social-démocrate traditionnel, le PvdA – pourrait devenir le plus grand parti du pays et, en Allemagne, dans l’Etat régional de Rhénanie du Nord Westphalie, les sociaux-démocrates du SPD ont remporté les dernières élections sur base d’une campagne défendant un rythme d’austérité moins élevé.
Par Anja Deschoemacker, tête de liste à Saint Gilles (Bruxelles), pour ”Gauches Communes”
Di Rupo et les couches dominantes de la bourgeoisie belge poussent un soupir de soulagement: la pression diminue pour se jeter dans l’aventure d’une confrontation directe avec le mouvement ouvrier. La satisfaction ne touche pas que le PS et le CD&V (car leurs amis des directions syndicales ont sans cesse plus de difficultés à convaincre leurs bases de l’intérêt des ces liens amicaux), elle est bien plus répandue, comme l’a exprimé Guy Verhofstadt en déclarant préférer François Hollande. Les médias s’efforcent partout de convaincre qu’une orientation fondamentalement “différente” est actuellement à l’œuvre. De quelle manière ? La bourgeoisie ne présentera-t-elle plus la facture de la crise à la grande majorité des travailleurs et des pauvres ? Les gouvernements sociaux-démocrates vont-ils stopper la crise et nous sortir de la récession/dépression ? Vont-ils faire baisser la pauvreté et offrir à la société les moyens nécessaires pour progresser à nouveau ? Vont-ils offrir un avenir aux jeunes (en Espagne la moitié d’entre eux est sans emploi) ?
Regardées de plus près, leurs propositions n’expriment pas une orientation politique fondamentalement différente. Elles ne partent pas de l’idée que l’économie doit satisfaire les besoins de la majorité de la population (de bons emplois avec de bons salaires, des logements abordables et confortables, des services publics de qualité, des soins de santé et l’aide aux plus faibles renforcés, un enseignement accessible,…) mais du constat que l’austérité dure risque de miner la base du système capitaliste en provoquant des révoltes de masse. En bref, il s’agit d’une autre austérité, pas d’une autre politique !
Que représentent donc les propositions de lutte contre la fraude, d’impôts sur la spéculation et sur les riches? Qu’en est-il de cette répartition plus “équilibrée” des efforts ? En Belgique, cette histoire a tellement été racontée que sa crédibilité est nulle. Ces dernières années, chaque mesure de ce type a été utilisée comme justification de la modération salariale et des attaques contre les allocations (sous le seuil de pauvreté) ainsi que des services publics (de plus en plus chers pour l’utilisateur individuel). Et ces règlementations ont à chaque fois compris de petits stratagèmes permettant aux plus riches d’échapper à leurs devoirs. On va chercher des cacahuètes chez les plus riches afin de faire supporter le gros de l’austérité à la majorité de la population.
Ce “tournant” dans la politique européenne ne provient pas d’une inquiétude concernant le sort des masses, mais bien de l’énorme pression qui commence à croître contre la politique d’austérité. Les partis traditionnels sont sur la sellette, et des initiatives comme Syriza, le Front de Gauche et le SP risquent de les pousser dehors. Si cette pression disparaît, il n’y aura même plus de concessions minimales.
Les médias veulent répandre des illusions, mais l’expérience des masses (qui ont déjà vu à l’œuvre la trahison des sociaux-démocrates embourgeoisés des décennies durant) aidera à rapidement les dissiper. Sans renverser le capitalisme, les moyens financiers continueront de disparaître dans les poches des supers-riches et notre société deviendra une arène désespérée où les gens se bâteront pour les quelques miettes qui tomberont du banquet des riches.