Bruxelles et ses tunnels délabrés : il nous faut des investissements massifs dans l’infrastructure

Quand on s’est enfui la tête sous le sable pendant plusieurs années, la confrontation à la réalité matérielle est parfois difficile. Le manque chronique d’investissements dans l’infrastructure publique et les services publics a entrainé fin janvier la fermeture du tunnel Stéphanie à Bruxelles, une artère importante pour les navetteurs vers la Capitale. Le tunnel menaçait littéralement de s’effondrer.

Par Tim (Bruxelles)

Tous les gouvernements belges de ces dernières décennies se sont trompés eux-mêmes en croyant que le manque d’investissements dans l’infrastructure et les services publics n’aurait pas de conséquences à long terme. Les cadeaux fiscaux ont été offerts dans tous les sens et, en combinaison d’un fondamentalisme budgétaire, les moyens ont manqué pour les services publics. Le service à la population a été démantelé ou privatisé, l’infrastructure n’a pas été entretenue ou adaptée à l’évolution de la société. Visiblement, la logique était de croire que regarder ailleurs suffirait à faire disparaître le problème de lui-même.

Cette vision idéaliste sur la réalité est inévitablement rattrapée par les faits, tôt ou tard. ‘‘La réalité, c’est ce qui refuse de disparaître quand on cesse d’y croire’’, résumait déjà le fameux écrivain de science-fiction Philip K. Dick. Aucun problème n’a disparu: les routes belges sont devenues de véritables parcours du combattant plein de trous et de fissures, les écoles et les hôpitaux suivent la même voie et, depuis janvier 2016, l’état pitoyable de quelques tunnels bruxellois assure qu’il n’est pas des plus approprié d’y passer en voiture. Ce manque de planification et d’investissements dans l’infrastructure publique a été illustré une fois de plus de manière un peu plus comique quand Bruxelles Mobilité a dû ouvertement admettre qu’une bonne partie de ses archives était en train de pourrir dans un de leurs tunnels et avait partiellement été mangé par les souris!

Quelques jours avant la fermeture du tunnel Stéphanie, le gouvernement bruxellois a lancé quelques pistes pour s’en prendre à cette problématique. Trop tard, bien sûr, mais surtout totalement insuffisant. Aucune proposition ne représente une réelle solution.

Une de ces idées était de fermer certains tunnels, entre autre le tunnel Léopold II. Pas moins de 65.000 voitures y passent quotidiennement. Imaginons un instant que toutes ces voitures doivent à l’avenir voyager en surface à travers Bruxelles… La discussion ne porte de plus pas que sur les tunnels Stéphanie et Léopold II : les tunnels Pachéco, Rogier, Montgomery, Georges-Henri, Trône et le complex de tunnels Reyers doivent aussi être rénovés de toute urgence. L’effort sera déjà considérable de gérer le trafic à Bruxelles avec un tunnel fermé, que faire en les fermant tous ?

D’autres idées reprennent diverses variations d’un système de péage dans la région bruxelloise, soit pour toute la région, soit pour certains endroits, soit pour les tunnels uniquement. Toutes ces propositions placeraient à nouveau le fardeau du manque d’entretien et d’investissement sur le dos des travailleurs et de leurs familles en payant une deuxième fois des taxes pour l’infrastructure publique !

Que l’infarctus de circulation qui s’appelle Bruxelles ne peut qu’être résolu en réduisant le nombre de véhicules dans la ville, c’est une évidence. Mais faisons-le en offrant assez d’alternatives : de bons transports en commun publics, une bonne infrastructure pour l’utilisation de vélos, des parkings en dehors de la ville pour décharger le centre,… Mais le gouvernement applique une politique d’austérité sur les transports en commun alors qu’il est on ne peut plus clair que ce sont des investissements dont nous avons besoin.

Ainsi, le réseau de RER (des trains régionaux autour de Bruxelles) accuse un retard qui se compte en années. Ce réseau devait être complètement opérationnel en 2012 mais il a systématiquement été retardé faute de budgets. Pour le moment, la date de mise en service est fixée à 2025. Fin 2015, la première partie du réseau est devenue opérationnelle, mais le CEO de la SNCB, Jo Cornu, a de suite placé le réseau sous une entité à part au sein de la SNCB : le réseau S. Est-ce parce que le réseau est destiné à être totalement privatisé une fois terminé? Une approche correcte de la problématique de la mobilité à Bruxelles peut difficilement coexister avec les énormes économies qui frappent la SNCB et les augmentations de tarifs qui prévues. Jo Cornu a d’ailleurs tenu à préciser que ces augmentations de tarifs toucheront surtout les heures de pointes, très exactement les moments où la circulation à Bruxelles est la plus compliquée! Pour ne pas encore parler des moyens dont la STIB a besoin pour faire les nécessaires investissement dans son réseau : une ligne de métro à Ixelles pour décharger les lignes de bus surchargés, le métro vers l’aéroport, le renouvellement de la flotte de véhicules,…

Ceci démontre que l’anarchie de l’économie capitaliste n’offre pas de possibilités pour une planification à long terme, même pas s’il s’agit d’un thème aussi important que la mobilité. Une économie socialiste démocratiquement planifiée ne prévoirait pas seulement les moyens pour remettre en ordre le réseau de routes et de tunnels à court terme mais investirait surtout en masse dans les alternatives à l’utilisation de voitures individuelle. Il y a assez de richesses dans cette société, nous devrons seulement nous organiser pour que celles-ci soient aux mains de la population entière, pour pouvoir décider de manière démocratique des problèmes à résoudre en priorité.

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