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Le zéro déchet à l’école : OUI si c’est pour combattre les inégalités, NON si c’est pour les renforcer

Aujourd’hui, en mangeant ses tartines, mon fils me dit : « Morgane (nom d’emprunt), elle a des tartines emballées dans de l’aluminium. Madame elle n’aime pas l’aluminium. Morgane doit reprendre ses déchets dans son cartable. »
Par Elise
Eh oui, l’école de mon fils se dit « zéro déchet ». Le concept : les enfants ne peuvent pas amener de déchets à l’école, sinon ils sont priés de les ramener chez eux. Ainsi, en début d’année, mon fils est revenu avec un dessin de bonhomme souriant sur sa main. « C’est parce que je n’avais pas de déchets dans mon cartable ! » Ce matin-là, je me souviens avoir consciencieusement déballé un paquet de biscuits pour les mettre, « sans déchet », dans une petite boîte dans son cartable, pour ne pas qu’il reçoive de remarque négative en classe… Mon fils a 3 ans. S’il n’avait pas reçu ce bonhomme souriant sur sa main, il aurait été anéanti. Ça a sans doute été le cas de la petite Morgane.
Cette gamine-là aura été dévalorisée, voire humiliée en fonction de sa façon de ressentir les choses. A mon gamin à moi, on a appris à se sentir fier de lui, au-dessus de ceux qui « ont des déchets ».
Voilà les conséquences d’une politique d’écologie basée sur la responsabilité individuelle. Avec ce genre de mesure, non seulement les déchets continuent à exister, mais en plus des enfants sont valorisés alors que d’autres sont marginalisés. Et il semble évident que ce sont les enfants issus de milieux plus favorisés, qui sont plus conscientisés, dont les parents ont des horaires plus flexibles, qui seront une fois de plus valorisés. Avec cette mesure, ce sont une fois de plus les inégalités sociales qui sont exacerbées : comme on le faisait avant avec l’habillement ou les points à l’école, on discrimine aujourd’hui avec le zéro déchet !
Mon école « zéro déchet » à moi, ce serait une école qui met en place des mesures écologiques qui profitent à tous les élèves et les réunit au lieu de les diviser.
Par exemple, une telle mesure serait que l’école offre à tous les enfants leurs repas et collations, cuisinés sur place à partir de produits locaux et sans déchets. Ce projet serait non seulement écologique, mais aussi social : il garantirait à chaque enfant l’accès à des repas sains, quel que soit le revenu de ses parents.
Bien sûr, il nécessiterait des moyens humains et financiers, mais personne ne pourra dire que la plus-value pour les enfants et le personnel n’en vaut pas l’investissement.
Alors, enseignants, battons-nous pour ça : des projets qui réunissent et font grandir les élèves, pas des projets qui rabaissent les enfants qui sont déjà les moins à l’aise dans le milieu scolaire.