Crise des réfugiés: ‘blame the system, not its victims’

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Non à la politique de diviser pour régner de l’establishment et de l’extrême droite !

L’Union européenne connaît actuellement la pire crise de son existence. La crise des réfugiés met les accords de Schengen sous pression. A l’heure où la Turquie a déclenché une guerre civile contre sa propre population kurde, nos politiciens ne dépassent pas les limites de leur rhétorique au racisme à peine voilé. Ils défendent toujours l’austérité alors que les possibilités d’accueil ont déjà fortement été affaiblies par cette politique. Ces dernières semaines, de nombreux politiciens flamands y sont allés de leur petite phrase assassine, sans grande indignation du côté francophone.

Par Jarmo (Anvers), article tiré de l’édition de mars Lutte Socialiste 

Le nombre de personnes qui quittent leur pays pour échapper au désespoir, à la guerre et à la misère ne va pas diminuer. Tant que le Moyen-Orient restera un foyer d’incendies (par ailleurs allumés par l’impérialisme occidental), aucune perspective réaliste n’existe quant à une réduction du nombre de demandeurs d’asile.

Il est vrai que ‘‘seulement’’ 4.241 demandes ont été comptabilisés en janvier, soit moins que les 5.000 d’octobre. Mais l’hiver rigoureux a probablement beaucoup à voir avec cette différence. Les choses seront différentes une fois que les conditions climatiques seront plus favorables pour entreprendre un voyage déjà suffisamment périlleux. De plus, la baisse fut relativement limitée en dépit du mauvais temps. Que connaîtrons-nous comme situation au printemps et en été?

La composition des groupes de réfugiés laisse planer peu de doutes concernant l’impact des interventions impérialistes occidentales : 50% des demandeurs d’asile proviennent d’Afghanistan, 17% de Syrie et 8% d’Irak. Plus de 70% de tous les réfugiés sont donc issus de pays en décombres où sévit une misère directement créée par l’Occident aux portes de l’Europe-Forteresse.

Un racisme à peine voilé

L’establishment est saisi de panique. De nombreux réfugiés chassés de leurs camps de fortune au nord de la France se dirigent vers la Flandre occidentale. La première préoccupation des dirigeants politique locaux n’est pas de leur porter assistance, mais de se demander quel sera l’effet sur la saison touristique. La presse nationale s’est fait l’écho des propos scandaleux tenus par certains politiciens locaux. Le maire de Koksijde, Vanden Bussche (Open VLD), a bien vite saisi l’occasion d’un incident avec un réfugié dans une piscine pour publiquement appeler à l’apartheid. Une interdiction générale de natation pour tous les réfugiés lui semblait être la seule mesure à adopter. Cela s’oppose purement et simplement aux droits de l’homme, la mesure ne sera probablement jamais appliquée. Mais il s’en fout, il était surtout désireux d’attirer l’attention des médias. Quand il est apparu qu’aucun réfugié n’avait été impliqué dans cet incident, le mal était déjà fait.

Le gouverneur de la province de Flandre Orientale Decaluwé (CD&V lui aussi) l’avait appelé à être plus raisonnable dans ses propos, mais il est quand même parvenu à aller plus loin lui-même en expliquant qu’il ne fallait pas donner à manger aux réfugiés. Il est tout à fait consternant de voir qu’un homme politique arrive encore à dire ce genre d’insanité en 2016. A partir d’un élan de solidarité spontané, pas mal de gens essayent de pallier aux déficiences des autorités en offrant gîte et couvert à ces personnes qui fuient des souffrances innommables. Decaluwé dédaigne ces démonstrations de solidarité, mais ce n’est bien entendu pas pour autant qu’il va réévaluer les mesures d’austérité prises ces dernières années, celles-là mêmes qui ont conduit à une pénurie de places d’accueil. Les valeurs chrétiennes du CD&V s’expriment visiblement mieux aujourd’hui en demandant de ne pas nourrir les nécessiteux…

Même le président du SP.a John Crombez (originaire d’Ostende) a pris le train en marche, peut-être avec un peu trop d’enthousiasme. Même de la part de la ‘‘gauche’’ officielle flamande, nous n’avons pas entendu de condamnation des vagues successives d’économies dans les budgets publics de ces dernières années (notamment parce que ce parti s’est retrouvé aux commandes de cette politique antisociale). Crombez a déclaré que nous ‘‘devons adopter une approche plus dures’’ face à la crise des réfugiés. Il a été remis à sa place par le bureau du parti, mais ses propos étaient extrêmement révélateurs de la manière dont le débat est mené parmi les politiciens de l’establishment.

Comment verser de l’eau au moulin de l’extrême droite

Le discours de plus en plus raciste adopté par des politiciens du ‘‘centre’’ politique est un cadeau pour l’extrême droite. Filip Dewinter (Vlaams Belang) a ainsi expliqué dans une interview au magazine Humo que son parti n’avait pas besoin de faire de déclaration autour de la crise des réfugiés puisque les autres politiciens flamands lui emboitent le pas, tout en se disant heureux que le débat soit mené de cette façon. Les attaques contre nos conditions de vie n’en finissent pas et les réfugiés sont montrés du doigt comme boucs émissaires. La tactique est ancienne, c’est ce sur quoi s’appuie l’extrême droite pour servir les intérêts de la classe capitaliste : taper vers le bas et détourner la colère vers des canaux qui divisent la population et rendent la résistance sociale plus difficile. Les partis politiques traditionnels recourent eux aussi à cette politique du diviser pour régner.

Sécuriser les profits des plus riches est la mission historique la plus importante des politiciens néolibéraux aujourd’hui. Pour l’Open VLD, la crise des réfugiés est aussi une belle opportunité: cela ouvre non seulement de nouvelles possibilités pour accroitre le degré d’exploitation en instaurant une pression sur les conditions de travail et de salaire mais cela ouvre également la voie à une plus grande privatisation de l’accueil aux demandeurs d’asile! C’est une pratique typique du néolibéralisme : désinvestir des années durant, désorganiser le service et ensuite défendre que tout fonctionne mieux sous le contrôle du secteur privé.

‘‘Les normes et les valeurs’’

Les médias traditionnels masquent les véritables raisons derrière la crise des réfugiés, qui ne provient ni de frontières trop ouvertes ni d’une approche trop laxiste, mais bien des conséquences des conflits au Moyen-Orient suscités par les multiples interventions impérialistes, militaires ou non. Voilà ce sur quoi devrait porter le débat.

Au lieu de cela, il n’est question que de la manière de réexpédier les réfugiés en pleine zone de guerre ou, comme l’aurait déclaré Francken lors d’une réunion européenne, de les repousser en pleine mer. Les demandeurs d’asile ne seraient pas adaptés à nos ‘‘valeurs’’. Mais de quelles valeurs parle-t-on ? Celles d’une société qui maintient ses portes fermées pour les victimes de sa propre politique impérialiste? Celles de partis fondés sur la morale chrétienne et qui appellent à ne pas nourrir des gens dans le besoin ? Celles de ce juge à Gand qui estime que les viols ne doivent pas être systématiquement punis et qui a récemment acquitté un présentateur-radio parce que le cas de viol était ‘‘amical’’?

On pourrait en dire autant de la démocratie. Soyons réaliste: chaque droit démocratique des habitants de l’Occident ne tombe pas du ciel, il s’agit du produit d’une lutte féroce menée pour arracher ces droits démocratiques contre ceux-là mêmes qui, aujourd’hui, se retranchent derrière les ‘‘valeurs’’ occidentales.

La solidarité

Nous devons riposter, de manière unitaire, contre la tactique de diviser pour régner de l’extrême droite et des partis traditionnels. La classe des travailleurs n’a aucun intérêt à entrer en conflit avec des couches de sa propre classe sociale. Les demandeurs d’asile aujourd’hui diabolisés et discriminés seront employés demain par l’establishment pour briser les salaires et les conditions de travail de tout le monde. Le mouvement des travailleurs ne connait qu’une seule manière d’y faire face, celle qui lui a permis de connaitre des avancées sociales : la solidarité de tous les travailleurs et leur action commune dans la lutte pour une société capable de prendre le pouvoir des mains d’une petite élite qui exploite les richesses produites par toute l’humanité. Cette société, c’est le socialisme.

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