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Après la chasse aux chômeurs, celle des malades de longue durée. Mais les fraudeurs fiscaux peuvent dormir tranquilles…

Mi-octobre, le gouvernement De Croo a produit son premier budget de « l’après-covid ». Sur l’emploi, l’objectif est de porter le taux d’emploi à 80 % (contre 71 % actuellement). Sur le budget, c’est encore un « effort » qu’on nous demande.
Par Julien (Bruxelles), article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste
S’attaquer aux victimes et cajoler les responsables
Aujourd’hui, l’âge de la pension est de 67 ans, alors qu’une personne de 25 ans ayant un faible niveau d’éducation a une espérance de vie en bonne santé de 62 ans, qu’une personne de 25 ans ayant un niveau d’éducation moyen a une espérance de vie en bonne santé de tout juste 67 ans et qu’une personne ayant un niveau d’éducation élevé atteint 72 ans. (1) Les patrons peuvent profiter de nous jusqu’à ce que notre santé de nous le permette tout simplement plus.
Toutes les « réformes » du marché de l’emploi ces dernières années ont servi à nous rendre corvéables à merci, à nous presser comme des citrons. L’explosion des malades de longue durée n’est donc pas du tout une surprise. Ce n’est pas la suppression du certificat médical pour absence courte 3 jours par an qui va y changer quelque chose.
On dénombre près de 471.000 malades de longue durée en Belgique, un nombre qui dépasse celui des personnes au chômage (366.000 chômeurs complets indemnisés). Parmi eux se trouvent 78.330 personnes en dépression (+42 % par rapport à 2016), 33.402 personnes en burn-out (+33,09 %), pour un total de 170.224 personnes en invalidité en raison de troubles mentaux (+26,02 %). C’est Frank Vandenbroucke qui, il y a une quinzaine d’années, fut le père du plan initial de chasse aux chômeurs. Aujourd’hui ministre de la Santé, il utilise exactement la même recette. Le gouvernement a budgétisé une économie de 124 millions d’euros en 2022 et de 500 millions autour du principe de pousser 5.000 malades de longue durée par an à retourner au travail. Pour François Perl (Solidaris) : « Il faudrait sanctionner les premiers responsables de la situation, les employeurs. »
Le gouvernement et le patronat aiment présenter les travailleurs comme des fainéants qu’il faudrait sans cesse rappeler à l’ordre. Dans les faits, un grand nombre de travailleurs se rend au boulot dans un état physique ou psychologique qui nécessiterait au contraire de prendre le temps de se soigner. Selon une étude réalisée en France par le cabinet de ressources humaines Midori Consulting, le phénomène du présentéisme (rester au boulot alors que l’on en peut plus) dépasse d’ailleurs de 1,4 à 2 fois le taux d’absentéisme.
Il n’y a pas 36 solutions pour s’en prendre à la racine du problème : diminuer la charge de travail, augmenter le nombre de collègues et permettre de partir en pension à un âge raisonnable.
Le gouvernement annonce vouloir récupérer 400 millions d’euros via un plan de lutte contre la fraude fiscale. Nous connaissons bien ces effets d’annonce jamais suivis d’effets. Michel Claise, juge d’instruction spécialisé dans la criminalité financière, s’est exprimé ainsi dans la foulée du scandale des Pandora Papers : « Nous manquons cruellement de moyens, tant au niveau du SPF Finances qu’au niveau de la justice. Lorsque le gouvernement Vivaldi annonce qu’il va lutter contre la fraude fiscale mais qu’il supprime le poste de secrétaire d’État la lutte contre la fraude fiscale, NdlR, il y a là une contradiction immense. (…) Nous avons perdu près de la moitié des policiers qui traitaient ce genre d’affaire. C’est une véritable catastrophe. »
Refinancement du rail ?
Côté investissements, la Vivaldi se gargarise d’investir 250 millions dans le chemin de fer. C’est une blague au regard des enjeux climatiques et de la situation catastrophique que subissent cheminots et voyageurs.
Dans une carte blanche (18 octobre), des chercheurs expliquent : « Début 2021, 44 guichets de gare ont été fermés. Plus récemment, le 9 septembre, le gestionnaire des infrastructures Infrabel a tiré une sonnette d’alarme : si l’on continue les coupes budgétaires, plusieurs lignes devront être fermées (Charleroi-Couvin, Termonde-Lokeren, notamment). Enfin, ce 8 octobre, les cheminots ont déclenché une grève spontanée. En cause ? Le personnel a été réduit de 41.000 à 28.000 travailleurs en vingt ans, et le sous-effectif pousse les chemins de fer à refuser aux cheminots de récupérer 116.000 heures supplémentaires prestées » (il s’agit en réalité de 110.000). Il y a bien quelques investissements ponctuels chez Infrabel, mais 94 millions d’euros sont économisés sur le budget de fonctionnement structurel pour les années 2021-2024.
La Vivaldi suit la partition du patronat
Les mesures liées au budget 2022 mériteraient encore de nombreux commentaires (lire par ailleurs notre article ci-contre sur la semaine de 4 jours sans réduction du temps de travail et notre dossier sur l’énergie). Certains pourraient éprouver un soulagement relatif au souvenir du catalogue des horreurs du gouvernement Michel. La Vivaldi tente de se présenter plus verte et plus progressiste. Mais le vernis de communication et les quelques investissements cachent mal que ce gouvernement sert les mêmes intérêts, comme l’avaient déjà amplement démontré le dernier Accord Interprofessionnel et sa scandaleuse marge d’augmentation salariale de 0,4% en 2 ans.
(1) https://www.gezondbelgie.be/nl/gezondheidstoestand/levensverwachting-en-levenskwaliteit/gezonde-levensverwachting#def-hly-25